publié le 22 juin 2021
Arrêté royal modifiant l'arrêté royal du 17 octobre 2011 relatif à la protection physique des matières nucléaires et des installations nucléaires et l'arrêté royal du 30 novembre 2011 portant prescriptions de sûreté des installations nucléaires
2 JUIN 2021. - Arrêté royal modifiant l'arrêté royal du 17 octobre 2011 relatif à la protection physique des matières nucléaires et des installations nucléaires et l'arrêté royal du 30 novembre 2011 portant prescriptions de sûreté des installations nucléaires
RAPPORT AU ROI Sire, Nous avons l'honneur de soumettre à la signature de Votre Majesté un arrêté royal modifiant l'arrêté royal du 17 octobre 2011 relatif à la protection physique des matières nucléaires et des installations nucléaires et l'arrêté royal du 30 novembre 2011 portant prescriptions de sûreté des installations nucléaires.
L'exploitant d'un établissement de classe I est tenu d'appliquer les obligations que lui impose la réglementation dans les domaines de « Safety, Security et Safeguards » de manière coordonnée, cohérente, effective et efficace sur le terrain, tout en tenant compte des différentes interfaces.
La « Sécurité » ou « Security » (qui englobe la « protection physique ») d'un établissement de classe 1 inclut les diverses mesures visant à empêcher et à détecter les actes malveillants (principalement le vol et le sabotage) mettant en jeu des matières nucléaires, et à intervenir en pareil cas. « Sûreté » ou « Safety » désigne les mesures relatives à la sûreté nucléaire et à la radioprotection.
L'interface « Sûreté - Sécurité » concerne les structures, systèmes, composants, équipements, etc....qui remplissent une fonction pour l'exploitation sûre de l'établissement de classe I (par exemple, certains circuits d'un réacteur nucléaire) et qui doivent faire l'objet d'analyses de risques des conséquences d'une panne, d'un incident... mais aussi des effets d'un acte malveillant, d'un acte de sabotage...
Au niveau international, l'interface « Sûreté - Sécurité » a de plus en plus d'importance et des directives sont élaborées au sein d'organisations internationales (ENSRA, WENRA, IAEA, NEA, ...).
La publication de l'AIEA « The interface between Safety and Security at nuclear power plants » INSAG-24 mentionne clairement que : « Both Safety and Security must be addressed and the interface between the two should be coordinated. » et « When conflict is unavoidable, the matter should be considered from both Safety and Security perspectives and resolved based on the philosophy of minimizing the overall risk to the public. » Le présent arrêté vise à clarifier la réglementation existante concernant l'interface entre la « Sûreté » et la « Sécurité » pour des installations nucléaires de classe I. Cette clarification se concrétise par une modification de l'arrêté royal du 17 octobre 2011 relatif à la protection physique des matières nucléaires et des installations nucléaires et par une modification de l'arrêté royal du 30 novembre 2011 portant prescriptions de sûreté des installations nucléaires.
L'arrêté royal du 30 novembre 2011 portant prescriptions de sûreté des installations nucléaires (AR prescriptions de sûreté des installations nucléaires) définit la sûreté nucléaire comme la réalisation de conditions d'exploitation adéquates, la prévention des accidents et l'atténuation des conséquences des accidents, contribuant à protéger les travailleurs et la population contre les dangers résultant des rayonnements ionisants émis par les installations nucléaires.
Les obligations de l'exploitant en matière de protection physique renvoient essentiellement au système de protection physique établi en application de l'article 6 de l'Arrêté royal relatif à la protection physique des matières nucléaires et des installations nucléaires, ou à ses composantes.
La protection physique repose en grande partie sur les mêmes principes que la sûreté nucléaire, l'objectif fondamental étant dans les deux cas de protéger la population, les travailleurs et l'environnement.
Ces principes sont décrits en détail par le Groupe consultatif international pour la sûreté nucléaire (INSAG) de l'Agence internationale de l'Energie atomique (AIEA) dans son rapport n° 24 « The Interface Between Safety and Security at Nuclear Power Plants ».
Les évaluations de sûreté se concentrent traditionnellement sur les risques découlant d'événements non intentionnels causés par des phénomènes naturels (tels que des séismes, des tornades ou des inondations), des pannes matérielles, d'autres événements ou interruptions d'origine interne (tels que des incendies, des ruptures de canalisations ou des pertes de l'alimentation électrique), ou des erreurs humaines (telles que l'application erronée des procédures ou une erreur d'alignement des circuits).
Dans le cas de la protection physique, les risques ou événements considérés résultent d'actes de malveillance dont la finalité est de voler des matières nucléaires ou de causer un sabotage.
Néanmoins, dans certaines circonstances, il se peut que des actions qui servent à la protection physique soient incompatibles avec la sûreté nucléaire. L'installation de barrières de ralentissement pour des raisons de sécurité peut, par exemple, constituer un obstacle en cas d'intervention rapide requise par un événement de sûreté.
Lors de leur réunion plénière d'avril 2017, les membres de l'association des autorités de sûreté nucléaire WENRA ont décidé de créer une Task Force regroupant des experts dans les domaines de la sûreté nucléaire et de la sécurité nucléaire en vue d'identifier les interfaces entre sûreté nucléaire et sécurité nucléaire et de proposer des mesures de gestion de celles-ci. Le 10 avril 2019, cette Task Force a rédigé ses conclusions dans un rapport intitulé « Interfaces between Nuclear Safety and Nuclear Security » (WENRA2019), qui est disponible sur le site web de WENRA. Le présent arrêté complète l'arrêté royal du 30 novembre 2011 portant prescriptions de sûreté des installations nucléaires de manière à garantir que l'interface entre sûreté nucléaire et sécurité nucléaire est prise en considération lors de l'application des prescriptions de sûreté.
La modification de l'arrêté royal du 17 octobre 2011 relatif à la protection physique des matières nucléaires et des installations nucléaires poursuit le même objectif.
Le principe directeur est que les conflits entre sûreté nucléaire et protection physique doivent être résolus de manière à minimiser le risque global pour la population, les travailleurs et l'environnement.
Les propositions de modifications aux arrêtés royaux des 30 novembre 2011 et 17 octobre 2011 se traduiront chez les exploitants par une série de modifications des processus de leur système de gestion afin de mieux gérer l'interface safety-security. Ces propositions ne devraient par contre pas entraîner directement de modifications matérielles des installations.
Commentaire des articles : Articles 1ier - 2 Les articles 1ier et 2 sont des modifications de l'arrêté royal du 17 octobre 2011 relatif à la protection physique des matières nucléaires et des installations nucléaires L'arrêté royal du 17 octobre relatif à la protection physique des matières nucléaires et des installations nucléaires dispose en son article 6 § 1er que l'exploitant d'une installation nucléaire doit mettre en place un système de protection physique, soumis à l'agrément de l'Agence. Il est évidemment souhaitable que l'exploitant évalue et veille à limiter les effets négatifs qu'ont ou que peuvent avoir l'un sur l'autre d'une part le système de protection physique ou ses composantes, d'autre part la sûreté nucléaire de l'installation, en particulier la mise en oeuvre des prescriptions de l'AR du 30 novembre 2011.
Ce principe général se décline en particulier dans l'exigence de prendre l'interface en considération dans le cadre de l'article 6 § 7 relatif à la procédure d'évaluation du système de protection physique par l'exploitant, ainsi que dans celui de l'article 8 § 6 relatif à la procédure d'évaluation du système de protection physique par l'Agence.
Les articles 3-10 sont des modifications de l'arrêté royal du 30 novembre 2011 portant prescriptions de sûreté des installations nucléaires L'article 3 modifie l'article 4.1.
Conformément avec l'Interface 02 du document WENRA2019, cette modification précise qu'il convient de clairement définir et documenter les liens hiérarchiques et les lignes de communication entre les responsables de la protection physique et les responsables des questions en relation avec la sûreté nucléaire de l'installation.
Les articles 4, 5 et 6 modifient les articles 5.1 et 5.2.
Ces modifications spécifient, conformément aux Interfaces 03 et 04 du document WENRA2019, que tous les processus et toutes les activités susceptibles d'avoir une influence sur la sûreté nucléaire mais aussi sur la protection physique doivent faire partie du système de gestion intégré.
L'article 7 modifie l'article 5.5.
Conformément aux Interfaces 03 et 04 du document WENRA2019, le système de gestion doit comporter un processus visant à détecter et résoudre tout conflit entre sûreté nucléaire et protection physique.
L'article 8 modifie l'article 7.5/1.
Cette modification introduit dans les prescriptions de sûreté la philosophie de `security by design' visée dans l'Interface 07 du document WENRA2019, dont la finalité est de considérer et de mettre en oeuvre les mesures de protection physique à un stade aussi précoce que possible lors de la conception ou de la modification pour éviter toute modification pour des raisons de sécurité après la conception et faire en sorte qu'il n'y ait pas de conflit avec les exigences de sûreté.
Les exemples suivants, qui sont mentionnés dans l'interface 07, peuvent être cités : (1) La sûreté nucléaire et la sécurité nucléaire ont en commun que tous les équipements assurant des fonctions de sûreté sont conçus et entretenus de telle sorte que ces fonctions soient également assurées en cas de menaces internes et externes, y compris en cas d'acte de malveillance.(2) Plusieurs principes bien établis servent tant la sûreté nucléaire que la sécurité nucléaire.Une bonne conception constitue une barrière face aux événements accidentels et malveillants. Un système de sûreté qui présente une redondance suffisante et une séparation physique rigoureuse et dont les accès sont contrôlés permet à la fois de protéger l'installation contre des problèmes de sûreté, tels que le feu ou les inondations, et contre des problèmes de sécurité tels que le sabotage d'un équipement. (3) Des mesures de sécurité supplémentaires doivent être mises en oeuvre pour parer les vulnérabilités qu'il est impossible de limiter par la seule conception de sûreté, de sorte que la protection requise contre les actes de malveillance soit garantie.Les implications en termes de sûreté nucléaire, comme l'accessibilité à l'installation/aux équipements en cas d'événement lié à la sûreté, doivent être prises en compte lors de la mise en oeuvre de ces mesures.
Il convient d'évaluer les conséquences d'actes de malveillance sur base de la menace de référence, et d'identifier les équipements, systèmes ou dispositifs qui doivent être protégés.
Les informations relatives aux mesures de sûreté destinées à protéger l'installation et son fonctionnement contre les actes de malveillance doivent être présentées dans un concept de sécurité. Le concept de sécurité doit également spécifier les mesures liées à la sûreté qui protègent en même temps l'installation contre des actes de malveillance.
Conformément à l'Interface 08 du document WENRA2019, la conception des systèmes et composants doit tenir compte de leur importance tant pour la sûreté nucléaire que pour la protection physique. Le principe `fail safe' reste pleinement d'application.
Les experts de la sûreté nucléaire et de la sécurité nucléaire devraient évaluer ensemble les conséquences des actes de malveillance.
Les mesures prises à la conception de l'installation à des fins de sûreté nucléaire devraient être prises en compte à cette fin.
Les articles 9 en 10 modifient l' article 15.1 .
Les changements sur le plan de la protection physique qui impactent la sûreté nucléaire doivent être considérés et gérées comme des modifications.
Inversement, les conséquences sur la protection physique d'une modification en rapport avec le sûreté nucléaire doivent être examinées et les mises à jour nécessaires doivent être effectuées.
L'article 11 fixe les mesures transitoires.
Ces modifications entrent en vigueur trois mois après la publication de l'arrêté. Ce délai permet aux exploitants de mettre leur systèmes de gestion et leurs processus en conformité avec ces modifications si cela s'avère nécessaire.
J'ai l'honneur d'être, Sire, de Votre Majesté le très respectueux et très fidèle serviteur, La Ministre de l'Intérieur, des Réformes institutionnelles et du Renouveau démocratique, A. VERLINDEN
2 JUIN 2021. - Arrêté royal modifiant l'arrêté royal du 17 octobre 2011 relatif à la protection physique des matières nucléaires et des installations nucléaires et l'arrêté royal du 30 novembre 2011 portant prescriptions de sûreté des installations nucléaires PHILIPPE, Roi des Belges, A tous, présents et à venir, Salut.
Vu la loi du 15 avril 1994Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/04/1994 pub. 14/10/2011 numac 2011000621 source service public federal interieur Loi relative à la protection de la population et de l'environnement contre les dangers résultant des rayonnements ionisants et relative à l'Agence fédérale de Contrôle nucléaire. - Coordination officieuse en langue allemande fermer relative à la protection de la population et de l'environnement contre les dangers résultant des rayonnements ionisants et relative à l'Agence fédérale de Contrôle nucléaire, les articles 3 et 17bis;
Vu l'arrêté royal du 17 octobre 2011 relatif à la protection physique des matières nucléaires et des installations nucléaires;
Vu l'arrêté royal du 30 novembre 2011 portant prescriptions de sûreté des installations nucléaires;
Vu la proposition de l'Agence fédérale de Contrôle nucléaire transmise au Ministre de l'Intérieur le 26 février 2021;
Vu l'avis de l'Inspection des Finances, donné le 1ier mars 2021;
Vu l'accord du Ministre du Budget, donné le 20 mars 2021;
Vu l'avis n° 69.211/3 du Conseil d'Etat donné le 6 mai 2021, en application de l'article 84, § 1er, alinéa 1er, 2°, des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées le 12 janvier 1973;
Sur la proposition de Notre Ministre de l'Intérieur et de l'avis de Nos Ministres qui en ont délibéré en Conseil, Nous avons arrêté et arrêtons :
Article 1er.L'article 6 § 7 de l'arrêté royal du 17 octobre 2011 relatif à la protection physique des matières nucléaires et des installations nucléaires, est complété par un alinéa rédigé comme suit : « L'évaluation mentionnée à l'alinéa premier porte également sur les effets négatifs qu'ont ou que peuvent avoir l'un sur l'autre d'une part le système de protection physique ou ses composantes, d'autre part la sûreté nucléaire de l'installation, en particulier la mise en oeuvre des prescriptions de l'AR du 30 novembre 2011 portant prescriptions de sûreté des installations nucléaires. ».
Art. 2.L'article 8 § 6 du même arrêté est complété par un alinéa, rédigé comme suit : « L'évaluation porte également sur la manière dont l'exploitant évalue et veille à limiter les effets négatifs qu'ont ou que peuvent avoir l'un sur l'autre d'une part le système de protection physique ou ses composantes, d'autre part la sûreté nucléaire de l'installation, en particulier la mise en oeuvre des prescriptions de l'AR du 30 novembre 2011 portant prescriptions de sûreté des installations nucléaires. » .
Art. 3.A l'article 4.1., deuxième alinéa de l'arrêté royal du 30 novembre 2011 portant prescriptions de sûreté des installations nucléaires, les mots « et entre les responsables pour la protection physique » sont insérés avant les mots « sont clairement définis et documentés, » .
Art. 4.A l'article 5.1., premier alinéa, du même arrêté, les mots « et en matière de protection physique, » sont insérés entre les mots « lors de l'exécution de leur travail » et les mots « afin d'éviter que celles-ci » .
Art. 5.A l'article 5.1., deuxième alinéa, du même arrêté, les mots « la protection physique et » sont insérés entre les mots « y compris » et les mots « les activités réalisées » .
Art. 6.A l'article 5.2., deuxième alinéa du même arrêté, les mots « en matière de protection physique et » sont insérés entre les mots « envers l'exploitant, notamment » et les mots « en matière de bien-être » .
Art. 7.A l'article 5.5., du même arrêté, après le premier alinéa, un alinéa est introduit, comme suit : « Le système de gestion contient un processus qui permet de détecter et résoudre les conflits entre la sûreté nucléaire et la protection physique. » .
Art. 8.Après l'article 7.5. du même arrêté, un article est inséré, comme suit : « 7.5./1 Mesures de protection physique Les mesures de protection physique sont considérées dès les premières étapes de la conception de nouvelles installations ou de modifications d'installations existantes. » .
Art. 9.A l'article 15.1, après le premier alinéa, du même arrêté, un alinéa est inséré comme suit : « Les modifications qui ont un impact à la fois sur la sûreté nucléaire et la protection physique doivent être mises en oeuvre d'une manière qui minimise le risque général pour la population, les travailleurs et l'environnement. » .
Art. 10.Dans le deuxième alinéa de l'article 15.1 du même arrêté, qui devient le troisième alinéa, après le troisième tiret un tiret est inséré comme suit : « - changement relatif à la protection physique qui a un impact sur la sûreté nucléaire; ».
Art. 11.Le présent arrêté entre en vigueur le premier jour du troisième mois qui suit celui de sa publication au Moniteur belge.
Art. 12.La Ministre de l'Intérieur, des Réformes Institutionnelles et du Renouveau démocratique est chargée de l'exécution du présent arrêté.
Donné à Bruxelles, le 2 juin 2021.
PHILIPPE Par le Roi : La Ministre de l'Intérieur, des Réformes institutionnelles et du Renouveau démocratique, A. VERLINDEN