publié le 20 mars 2002
Extrait de l'arrêt n° 16/2002 du 17 janvier 2002 Numéros du rôle : 2251, 2252, 2253, 2254, 2255, 2256, 2258, 2259 et 2260. En cause : les questions préjudicielles relatives à l'article 57, § 2, de la loi du 8 juillet 1976 organique des c La Cour d'arbitrage, composée des présidents M. Melchior et A. Arts, et des juges P. Martens, R.(...)
COUR D'ARBITRAGE
Extrait de l'arrêt n° 16/2002 du 17 janvier 2002 Numéros du rôle : 2251, 2252, 2253, 2254, 2255, 2256, 2258, 2259 et 2260.
En cause : les questions préjudicielles relatives à l'article 57, § 2, de la loi du 8 juillet 1976Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/07/1976 pub. 18/04/2016 numac 2016000231 source service public federal interieur Loi organique des centres publics d'action sociale. - Coordination officieuse en langue allemande de la version applicable aux habitants de la région de langue allemande fermer organique des centres publics d'aide sociale, tel qu'il a été modifié par l'article 65 de la loi du 15 juillet 1996, posées par la Cour du travail de Mons.
La Cour d'arbitrage, composée des présidents M. Melchior et A. Arts, et des juges P. Martens, R. Henneuse, M. Bossuyt, E. De Groot et J.-P. Moerman, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président M. Melchior, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles Par neuf arrêts du 25 septembre 2001 en cause des centres publics d'aide sociale de Charleroi, Gerpinnes, Ath, Mons et Fleurus contre différentes personnes de nationalité étrangère et en présence de l'Etat belge, dont les expéditions sont parvenues au greffe de la Cour d'arbitrage les 3 et 4 octobre 2001, la Cour du travail de Mons a posé des questions préjudicielles identiques, dont le libellé est le suivant : « L'article 57, § 2, de la loi du 8 juillet 1976Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/07/1976 pub. 18/04/2016 numac 2016000231 source service public federal interieur Loi organique des centres publics d'action sociale. - Coordination officieuse en langue allemande de la version applicable aux habitants de la région de langue allemande fermer organique des centres publics d'aide sociale, modifié par l'article 65 de la loi du 15 juillet 1996 et par les arrêts rendus par votre haute institution les 22 avril 1998, 21 octobre 1998 et 30 juin 1999 viole-t-il ou non les articles 10 et 11 de la Constitution, lus conjointement avec les articles 23 et 191 de la Constitution, l'article 11.1 du Pacte international de New York du 19 décembre 1996 [lire : 1966] relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et l'article 3 de la Convention de Rome du 4 novembre 1950 de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en ce qu'il traite de la même manière deux catégories distinctes d'étrangers, soit avec une suffisante justification raisonnable, soit sans une telle justification, l'étranger qui séjourne illégalement dans le Royaume susceptible d'être amené à quitter le territoire sur ordre de l'autorité publique et l'étranger, également démuni de titre de séjour mais demandeur en régularisation dans le cadre de la loi du 22 décembre 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 22/12/1999 pub. 10/01/2000 numac 1999000985 source ministere de l'interieur Loi relative à la régularisation de séjour de certaines catégories d'étrangers séjournant sur le territoire du Royaume fermer et qui ne peut être éloigné du territoire en application de l'article 14 de cette même loi ? » (...) IV. En droit (...) Quant au respect des droits de la défense B.1.1. Le premier intimé devant la Cour du travail de Mons (affaire n° 2251) demande à développer ses moyens devant la Cour (A.3.6).
B.1.2. Le législateur spécial a permis à toute personne physique ou morale justifiant d'un intérêt de saisir la Cour d'arbitrage d'un recours en annulation (article 2, 2°, de la loi spéciale du 6 janvier 1989). Il a fait obligation à toute juridiction d'interroger la Cour à titre préjudiciel, sauf dans les hypothèses mentionnées à l'article 26, § 2, alinéas 2 et 3, de la loi spéciale du 6 janvier 1989, cette obligation étant particulièrement contraignante à l'égard des juridictions dont les décisions ne sont pas susceptibles d'appel. Il n'a posé aucune exigence quant à l'assistance d'un avocat et il a rendu la procédure entièrement gratuite.
En raison de ce large accès à la Cour, le législateur spécial a entendu éviter que celle-ci, qui risquait d'être saisie de nombreuses procédures dont certaines n'auraient aucune chance sérieuse d'aboutir, ne se trouve dans l'impossibilité de les traiter dans un délai raisonnable en devant, pour chacune d'elles, observer les règles formulées aux articles 85 à 90 de la loi spéciale du 6 janvier 1989.
B.1.3. Il résulte des travaux préparatoires de la loi spéciale du 6 janvier 1989 que le législateur a entendu assurer le respect des droits de la défense des parties concernées par la notification des conclusions des juges-rapporteurs et la possibilité d'introduire un mémoire justificatif plutôt que par la possibilité d'être entendu par la Cour (Doc. parl., Sénat, 1988-1989, n° 483/2, pp. 16, 54, 86 et 87).
La Cour ne doit pas donner suite à la demande d'audition.
Les dispositions en cause B.2.1. Aux termes de l'article 57, § 1er, de la loi du 8 juillet 1976Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/07/1976 pub. 18/04/2016 numac 2016000231 source service public federal interieur Loi organique des centres publics d'action sociale. - Coordination officieuse en langue allemande de la version applicable aux habitants de la région de langue allemande fermer organique des centres publics d'aide sociale (ci-après : loi sur les C.P.A.S.), le centre public d'aide sociale a pour mission d'assurer aux personnes et aux familles l'aide due par la collectivité. Cette aide n'est pas nécessairement financière, mais peut être matérielle, sociale, médicale, médico-sociale ou psychologique.
B.2.2. L'article 57, § 2, de la loi sur les C.P.A.S., remplacé par l'article 65 de la loi du 15 juillet 1996 « modifiant la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers et la loi du 8 juillet 1976Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/07/1976 pub. 18/04/2016 numac 2016000231 source service public federal interieur Loi organique des centres publics d'action sociale. - Coordination officieuse en langue allemande de la version applicable aux habitants de la région de langue allemande fermer organique des centres publics d'aide sociale » et partiellement annulé par l'arrêt de la Cour n° 43/98 du 22 avril 1998, dispose : « § 2. Par dérogation aux autres dispositions de la présente loi, la mission du centre public d'aide sociale se limite à l'octroi de l'aide médicale urgente, à l'égard d'un étranger qui séjourne illégalement dans le Royaume.
Le Roi peut déterminer ce qu'il y a lieu d'entendre par aide médicale urgente.
Un étranger qui s'est déclaré réfugié et a demandé à être reconnu comme tel, séjourne illégalement dans le Royaume lorsque la demande d'asile a été rejetée et qu'un ordre de quitter le territoire a été notifié à l'étranger concerné.
L'aide sociale accordée à un étranger qui était en fait bénéficiaire au moment où un ordre de quitter le territoire lui a été notifié, est arrêtée, à l'exception de l'aide médicale urgente, le jour où l'étranger quitte effectivement le territoire et, au plus tard, le jour de l'expiration du délai de l'ordre de quitter le territoire.
Il est dérogé aux dispositions de l'alinéa précédent pendant le délai strictement nécessaire pour permettre à l'étranger de quitter le territoire, pour autant qu'il ait signé une déclaration attestant son intention explicite de quitter le plus vite possible le territoire, sans que ce délai ne puisse en aucun cas excéder un mois.
La déclaration d'intention précitée ne peut être signée qu'une seule fois. Le centre informe sans retard le Ministre qui a l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers dans ses compétences, ainsi que la commune concernée, de la signature de la déclaration d'intention. » B.2.3. Les questions préjudicielles portent toutes sur la compatibilité avec les articles 10 et 11 de la Constitution, de la disposition en cause interprétée comme s'appliquant aux personnes qui ont introduit une demande de régularisation conformément à la loi du 22 décembre 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 22/12/1999 pub. 10/01/2000 numac 1999000985 source ministere de l'interieur Loi relative à la régularisation de séjour de certaines catégories d'étrangers séjournant sur le territoire du Royaume fermer relative à la régularisation de séjour de certaines catégories d'étrangers séjournant sur le territoire du Royaume.
B.2.4. L'article 2 de cette loi dispose : « Sans préjudice de l'application de l'article 9 de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers, la présente loi s'applique aux demandes de régularisation de séjour introduites par des étrangers qui séjournaient déjà effectivement en Belgique au 1er octobre 1999 et qui, au moment de la demande : 1° soit ont demandé la reconnaissance de la qualité de réfugié sans avoir reçu de décision exécutoire dans un délai de quatre ans, ce délai étant ramené à trois ans pour les familles avec des enfants mineurs séjournant en Belgique au 1er octobre 1999 et en âge d'aller à l'école;2° soit ne peuvent, pour des raisons indépendantes de leur volonté, retourner ni dans le ou les pays où ils ont séjourné habituellement avant leur arrivée en Belgique, ni dans leur pays d'origine, ni dans le pays dont ils ont la nationalité;3° soit sont gravement malades;4° soit peuvent faire valoir des circonstances humanitaires et ont développé des attaches sociales durables dans le pays.» B.2.5. L'article 14 de la loi du 22 décembre 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 22/12/1999 pub. 10/01/2000 numac 1999000985 source ministere de l'interieur Loi relative à la régularisation de séjour de certaines catégories d'étrangers séjournant sur le territoire du Royaume fermer est libellé comme suit : « Hormis les mesures d'éloignement motivées par l'ordre public ou la sécurité nationale, ou à moins que la demande ne réponde manifestement pas aux conditions de l'article 9, il ne sera pas procédé matériellement à un éloignement entre l'introduction de la demande et le jour où une décision négative a été prise en application de l'article 12. » Quant au fond B.3.1. L'article 57 de la loi sur les C.P.A.S. fait une distinction, en matière d'aide sociale, entre les étrangers, selon que ceux-ci séjournent légalement ou illégalement sur le territoire. Depuis la loi du 30 décembre 1992Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/12/1992 pub. 18/06/2012 numac 2012000355 source service public federal interieur Loi portant des dispositions sociales et diverses. - Coordination officieuse en langue allemande d'extraits fermer, l'article 57, § 2, précise que l'aide sociale accordée aux étrangers séjournant illégalement sur le territoire est limitée à l'aide médicale urgente. Cette mesure tend à harmoniser la législation relative au statut de séjour des étrangers et celle relative à l'aide sociale.
B.3.2. C'est au législateur qu'il appartient de mener une politique concernant l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers et de prévoir à cet égard, dans le respect du principe d'égalité et de non-discrimination, les mesures nécessaires qui peuvent notamment porter sur la fixation des conditions auxquelles le séjour d'un étranger en Belgique est légal ou non. Le fait qu'il en découle une différence de traitement entre étrangers est la conséquence logique de la mise en oeuvre de ladite politique.
B.3.3. Les questions préjudicielles concernent la situation particulière des demandeurs d'une régularisation de séjour fondée sur la loi du 22 décembre 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 22/12/1999 pub. 10/01/2000 numac 1999000985 source ministere de l'interieur Loi relative à la régularisation de séjour de certaines catégories d'étrangers séjournant sur le territoire du Royaume fermer.
Lors de l'adoption de cette loi, il a été souligné à plusieurs reprises dans les travaux préparatoires que la demande de régularisation ne modifiait pas le statut juridique du séjour des intéressés et n'ouvrait pas, en tant que telle, un droit à l'aide sociale. C'est la raison pour laquelle l'article 57, § 2, de la loi sur les C.P.A.S. a été maintenu inchangé (Doc. parl., Chambre, 1999-2000, Doc. 50 0234/001, p. 5, et 0234/005, p. 60; Ann., Chambre, 1999-2000, 24 novembre 1999, HA 50 plen. 017, pp. 7, 8, 18, 31 et 32;
Doc. parl., Sénat, 1999-2000, n° 2-202/3, p. 23).
Il ne résulte pas de ce qui précède que le droit à l'aide sociale de toutes les personnes qui ont introduit une demande de régularisation de séjour serait limité à l'aide médicale urgente durant l'examen de cette demande. Les personnes qui bénéficient de l'aide sociale sur d'autres bases juridiques, conformément à l'article 57, § 1er, de la loi sur les C.P.A.S., conservent ce droit durant la procédure de régularisation.
B.3.4. C'est au juge qui pose une question préjudicielle qu'il appartient de statuer sur l'applicabilité d'une norme à l'affaire dont il est saisi.
Les questions préjudicielles se rapportent aux demandeurs de régularisation de séjour auxquels s'applique, selon les juges a quo, l'article 57, § 2, de la loi sur les C.P.A.S. : elles sont fondées sur l'interprétation selon laquelle le statut de séjour de l'étranger concerné est illégal au sens de cette disposition.
B.4.1. Dans les questions préjudicielles, il est demandé à la Cour si l'article 57, § 2, de la loi sur les C.P.A.S. viole les articles 10 et 11 de la Constitution, lus conjointement ou non avec les articles 23 et 191 de celle-ci, avec l'article 11.1 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et avec l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme, en ce qu'il n'est pas fait de distinction, au sein de la catégorie des étrangers en séjour illégal, entre ceux qui peuvent être éloignés du territoire et ceux qui ne le peuvent matériellement pas, en vertu de l'article 14 de la loi du 22 décembre 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 22/12/1999 pub. 10/01/2000 numac 1999000985 source ministere de l'interieur Loi relative à la régularisation de séjour de certaines catégories d'étrangers séjournant sur le territoire du Royaume fermer.
B.4.2. Il ressort des travaux préparatoires de la loi du 22 décembre 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 22/12/1999 pub. 10/01/2000 numac 1999000985 source ministere de l'interieur Loi relative à la régularisation de séjour de certaines catégories d'étrangers séjournant sur le territoire du Royaume fermer qu'un équilibre a été recherché entre, d'une part, le souci de trouver une solution humaine et définitive pour un grand nombre d'étrangers qui séjournaient illégalement sur le territoire et, d'autre part, le souci de veiller à ce que les demandes puissent être gérées, en vue de la réussite de cette opération d'envergure (Doc. parl., Chambre, 1999-2000, Doc. 50 0234/001, pp. 3-10, et 0234/005, pp. 5-16).
B.4.3. Le législateur n'a pas opté pour une régularisation automatique, mais bien pour une procédure dans laquelle il est examiné, cas par cas, si les conditions fixées par la loi sont remplies. En ne prévoyant pas que l'introduction d'une demande de régularisation ouvrirait, par elle-même, un droit à l'aide sociale, il a entendu éviter l'attrait financier de la demande de régularisation, afin d'écarter les demandes abusives introduites uniquement dans le but d'obtenir l'aide sociale et afin de combattre une immigration illégale supplémentaire (voy. Doc. parl., Chambre, 1999-2000, Doc. 50 0234/001, p. 10, et 0234/005, p. 13, p. 60 et p. 65; Ann., Chambre, 1999-2000, 24 novembre 1999, HA 50 plen. 017, pp. 31 et 32; Doc. parl., Sénat, 1999-2000, n° 2-202/3, pp. 4 et 6).
B.4.4. Le législateur peut adopter des mesures visant à combattre les abus de procédure et peut également être amené à faire certains choix politiques pour des raisons budgétaires. La Cour doit toutefois vérifier si le choix du législateur n'entraîne aucune discrimination.
B.4.5. C'est uniquement pour ceux qui se trouvaient en séjour illégal sur le territoire lors de l'adoption de la loi du 22 décembre 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 22/12/1999 pub. 10/01/2000 numac 1999000985 source ministere de l'interieur Loi relative à la régularisation de séjour de certaines catégories d'étrangers séjournant sur le territoire du Royaume fermer, soit parce qu'ils y avaient accédé sans autorisation et étaient demeurés dans la clandestinité soit parce qu'ils séjournaient sur le territoire après l'expiration de la période pour laquelle ils avaient obtenu l'autorisation requise ou parce qu'ils ont été déboutés de leur demande d'asile et n'ont pas donné suite à l'ordre de quitter le territoire, que le droit à l'aide sociale des demandeurs de régularisation est limité à l'aide médicale urgente.
Il a été dit à plusieurs reprises au cours des travaux préparatoires que la demande de régularisation n'affectait pas le statut juridique du séjour des intéressés (Doc. parl., Chambre, 1999-2000, Doc. 50 0234/005, p. 60, et Doc. parl., Sénat, 1999-2000, n° 2-202/3, pp. 36 et 58). Le fait qu'il ne soit pas procédé « matériellement » à l'éloignement de ceux-ci pendant l'examen de leur demande de régularisation signifie simplement qu'ils sont tolérés sur le territoire, dans l'attente d'une décision, et n'empêche pas qu'ils se trouvent, de leur propre fait, dans une situation de séjour illégale.
Leur situation diffère objectivement de celle des personnes qui, avant l'adoption de la loi du 22 décembre 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 22/12/1999 pub. 10/01/2000 numac 1999000985 source ministere de l'interieur Loi relative à la régularisation de séjour de certaines catégories d'étrangers séjournant sur le territoire du Royaume fermer, avaient obtenu un statut légal de séjour, sur la base des procédures prévues à cet effet, ou dont la demande d'asile était encore pendante devant les instances compétentes.
B.4.6. La régularisation offre aux étrangers concernés une chance d'obtenir un statut de séjour légal, malgré leur séjour clandestin ou le fait que les procédures existant auparavant ont été épuisées, et donc aussi d'obtenir le droit à l'aide sociale, conformément à l'article 57, § 1er, de la loi sur les C.P.A.S. En attendant, l'aide médicale urgente leur est garantie. Sur la base de la circulaire du 6 avril 2000Documents pertinents retrouvés type circulaire prom. 06/04/2000 pub. 15/04/2000 numac 2000012198 source ministere de l'emploi et du travail Circulaire concernant les autorisations provisoires d'occupation pour les ressortissants étrangers ayant introduit une demande de régularisation de séjour type circulaire prom. 06/04/2000 pub. 24/11/2000 numac 2000000836 source ministere de l'interieur Circulaire concernant les autorisations provisoires d'occupation pour les ressortissants étrangers ayant introduit une demande de régularisation de séjour. - Traduction allemande fermer concernant les autorisations provisoires d'occupation pour les ressortissants étrangers ayant introduit une demande de régularisation de séjour, modifiée par la circulaire du 6 février 2001, ils peuvent en outre obtenir une autorisation provisoire d'occupation et pourvoir ainsi à leur subsistance.
B.4.7. L'article 14 de la loi du 22 décembre 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 22/12/1999 pub. 10/01/2000 numac 1999000985 source ministere de l'interieur Loi relative à la régularisation de séjour de certaines catégories d'étrangers séjournant sur le territoire du Royaume fermer a pour effet que les étrangers qui ont introduit une demande de régularisation de séjour sont tolérés sur le territoire durant le déroulement de cette procédure, sans que soit accordée à ceux d'entre eux qui séjournent illégalement sur le territoire un titre de séjour. Lorsqu'un ordre de quitter le territoire a été donné précédemment à l'intéressé, celui-ci subsiste, même s'il n'est pas procédé effectivement à son exécution forcée (Doc. parl., Chambre, 1999-2000, Doc. 50 0234/001, p. 18).
B.4.8. Il n'aurait pas été raisonnable d'inviter les étrangers séjournant illégalement sur le territoire et dont le séjour est souvent clandestin à se faire connaître en introduisant une demande de régularisation de séjour, sans leur donner la garantie qu'ils ne seront « matériellement » pas éloignés. Il ne serait pas davantage raisonnable d'affirmer qu'il n'est constitutionnellement possible de leur accorder cette garantie que si elle est accompagnée de l'octroi du droit à l'aide sociale, même s'il n'est pas établi qu'ils remplissent les conditions pour obtenir la régularisation. Les demandeurs de la régularisation de séjour dont l'aide sociale est limitée à l'aide médicale urgente sont des étrangers qui n'ont pas agi conformément à la réglementation existante en matière de séjour, soit parce qu'ils n'ont pas donné suite à un ordre de quitter le territoire, soit parce qu'ils n'ont pas obtenu l'autorisation de séjour requise ou parce qu'ils ne l'avaient pas demandée.
En attendant que la procédure de régularisation soit clôturée, leur situation de séjour ne diffère pas, sur le plan juridique, de celle des autres étrangers qui séjournent illégalement sur le territoire, de sorte qu'il n'est pas déraisonnable qu'ils soient traités de la même manière en ce qui concerne l'aide sociale. La loi du 22 décembre 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 22/12/1999 pub. 10/01/2000 numac 1999000985 source ministere de l'interieur Loi relative à la régularisation de séjour de certaines catégories d'étrangers séjournant sur le territoire du Royaume fermer accorde aux intéressés une chance d'obtenir l'autorisation de séjour exigée, même s'ils ont éventuellement épuisé sans résultat les procédures qui existaient antérieurement.
Il résulte de ce qui précède qu'il n'est pas manifestement déraisonnable qu'en attendant la clôture de la procédure de régularisation, soit aussi longtemps qu'il n'est pas établi que les conditions pour obtenir la régularisation sont remplies, l'aide sociale garantie aux demandeurs soit ainsi limitée.
B.5. Aux termes des questions préjudicielles, il est également demandé à la Cour de contrôler la disposition en cause au regard des articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec les articles 23 et 191 de la Constitution, avec l'article 11.1 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels ainsi qu'avec l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme. Ce contrôle aboutit à la même conclusion en raison des considérations qui précèdent.
B.6. Les questions préjudicielles appellent une réponse négative.
Par ces motifs, la Cour dit pour droit : L'article 57, § 2, de la loi du 8 juillet 1976Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/07/1976 pub. 18/04/2016 numac 2016000231 source service public federal interieur Loi organique des centres publics d'action sociale. - Coordination officieuse en langue allemande de la version applicable aux habitants de la région de langue allemande fermer organique des centres publics d'aide sociale, modifié par les lois des 30 décembre 1992 et 15 juillet 1996, interprété en ce sens que le droit à l'aide sociale de l'étranger séjournant illégalement sur le territoire et qui a introduit une demande de régularisation de séjour sur la base de la loi du 22 décembre 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 22/12/1999 pub. 10/01/2000 numac 1999000985 source ministere de l'interieur Loi relative à la régularisation de séjour de certaines catégories d'étrangers séjournant sur le territoire du Royaume fermer est limité à l'aide médicale urgente aussi longtemps que son séjour n'est pas régularisé, ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution, lus isolément ou combinés avec les articles 23 et 191 de la Constitution, avec l'article 11.1 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et avec l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme.
Ainsi prononcé en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 17 janvier 2002.
Le greffier, P.-Y. Dutilleux.
Le président, M. Melchior.