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Arrêt De La Cour Constitutionelle
publié le 29 avril 1998

Arrêt n° 43/98 du 22 avril 1998 Numéro du rôle : 1073 En cause : le recours en annulation partielle ou totale des articles 6, 7, 11, 22, 55, 58, 59, 60, 65 et 69, § 3, de la loi du 15 juillet 1996 modifiant la loi du 15 décembre 1980 sur La Cour d'arbitrage, composée des présidents M. Melchior et L. De Grève, et des juges H. Boel, (...)

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1998021177
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Arrêt n° 43/98 du 22 avril 1998 Numéro du rôle : 1073 En cause : le recours en annulation partielle ou totale des articles 6, 7, 11, 22, 55, 58, 59, 60, 65 et 69, § 3, de la loi du 15 juillet 1996 modifiant la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers et la loi du 8 juillet 1976Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/07/1976 pub. 18/04/2016 numac 2016000231 source service public federal interieur Loi organique des centres publics d'action sociale. - Coordination officieuse en langue allemande de la version applicable aux habitants de la région de langue allemande fermer organique des centres publics d'aide sociale, introduit par l'a.s.b.l. Mouvement contre le racisme, l'antisémitisme et la xénophobie et autres.

La Cour d'arbitrage, composée des présidents M. Melchior et L. De Grève, et des juges H. Boel, P. Martens, J. Delruelle, G. De Baets, E. Cerexhe, H. Coremans, A. Arts et R. Henneuse, assistée du greffier L. Potoms, présidée par le président M. Melchior, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet du recours Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 24 mars 1997 et parvenue au greffe le 25 mars 1997, l'a.s.b.l. Mouvement contre le racisme, l'antisémitisme et la xénophobie, dont le siège social est établi à 1210 Bruxelles, rue de la Poste 37, l'a.s.b.l.

Ligue des droits de l'homme, dont le siège social est établi à 1000 Bruxelles, rue Watteeu 6, et l'a.s.b.l. Syndicat des avocats pour la démocratie, dont le siège social est établi à 1060 Bruxelles, rue Dejoncker 51/16, ont introduit un recours en annulation partielle ou totale des articles 6, 7, 11, 22, 55, 58, 59, 60, 65 et 69, § 3, de la loi du 15 juillet 1996 modifiant la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers et la loi du 8 juillet 1976Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/07/1976 pub. 18/04/2016 numac 2016000231 source service public federal interieur Loi organique des centres publics d'action sociale. - Coordination officieuse en langue allemande de la version applicable aux habitants de la région de langue allemande fermer organique des centres publics d'aide sociale (publiée au Moniteur belge du 5 octobre 1996).

II. La procédure Par ordonnance du 25 mars 1997, le président en exercice a désigné les juges du siège conformément aux articles 58 et 59 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage.

Les juges-rapporteurs ont estimé n'y avoir lieu de faire application des articles 71 ou 72 de la loi organique.

Le recours a été notifié conformément à l'article 76 de la loi organique, par lettres recommandées à la poste le 5 mai 1997.

L'avis prescrit par l'article 74 de la loi organique a été publié au Moniteur belge du 7 mai 1997.

Le Conseil des ministres, rue de la Loi 16, 1000 Bruxelles, a introduit un mémoire, par lettre recommandée à la poste le 13 juin 1997.

Ce mémoire a été notifié conformément à l'article 89 de la loi organique, par lettres recommandées à la poste le 25 juin 1997.

Les parties requérantes ont introduit un mémoire en réponse, par lettre recommandée à la poste le 17 juillet 1997.

Par ordonnances du 25 juin 1997 et du 25 février 1998, la Cour a prorogé respectivement jusqu'aux 24 mars 1998 et 24 septembre 1998 le délai dans lequel l'arrêt doit être rendu.

Par ordonnance du 21 janvier 1998, le président M. Melchior a soumis l'affaire à la Cour réunie en séance plénière.

Par ordonnance du même jour, la Cour a déclaré l'affaire en état et fixé l'audience au 11 février 1998.

Cette ordonnance a été notifiée aux parties ainsi qu'à leurs avocats par lettres recommandées à la poste le 22 janvier 1998.

A l'audience publique du 11 février 1998 : - ont comparu : . Me L. Walleyn et Me A. Schaus, avocats au barreau de Bruxelles, pour les parties requérantes; . Me P. Legros, avocat au barreau de Bruxelles, pour le Conseil des ministres; - les juges-rapporteurs R. Henneuse et G. De Baets ont fait rapport; - les avocats précités ont été entendus; - l'affaire a été mise en délibéré.

La procédure s'est déroulée conformément aux articles 62 et suivants de la loi organique, relatifs à l'emploi des langues devant la Cour.

III. En droit - A - En ce qui concerne la recevabilité A.1.1. Le Conseil des ministres conteste la recevabilité du recours.

Outre l'absence au dossier de la décision du conseil d'administration de chacune des associations sans but lucratif d'introduire le recours, est contestée le respect, par l'a.s.b.l. Syndicat des avocats pour la démocratie, des formalités prescrites par la loi du 27 juin 1921Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1921 pub. 19/08/2013 numac 2013000498 source service public federal interieur Loi sur les associations sans but lucratif, les associations internationales sans but lucratif et les fondations. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer sur les associations sans but lucratif. De surcroît, l'association sans but lucratif précitée ne satisfait pas aux conditions qu'impose la jurisprudence de la Cour en matière de défense d'un intérêt collectif, par une association sans but lucratif.

A.1.2. Les parties requérantes répondent qu'ont été transmis au greffe de la Cour la preuve de la publication de leurs statuts au Moniteur belge, les décisions des organes compétents d'introduire le recours ainsi que, en ce qui concerne le Syndicat des avocats pour la démocratie, le certificat du greffe du tribunal civil établissant le dépôt de la liste de ses membres pour l'année 1997. Tant en ce que les dispositions contestées règlent l'emploi des langues devant les autorités compétentes en matière d'asile qu'en ce qu'elles règlent les possibilités de recours devant la chambre du conseil pour l'étranger qui introduit une demande d'asile à la frontière, elles affectent l'objet social de la troisième partie requérante à divers titres (points 1, 2 et 3 de l'objet social). La Cour a d'ailleurs, à deux reprises (C.A., 4 mars 1993 et 14 juillet 1994) déclaré recevables des recours formés par cette association sans but lucratif.

En ce qui concerne l'article 6 de la loi du 15 juillet 1976, en tant qu'il remplace l'article 3, 3°, de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer A.2.1. Cette disposition oblige les étrangers qui franchissent la frontière, y compris ceux porteurs ou dispensés de visa, à présenter les documents justifiant l'objet et les conditions du séjour envisagé.

Elle introduit entre certains étrangers, d'une part, les Belges et les ressortissants européens, d'autre part - qui ne sont pas soumis à cette obligation -, une différence de traitement disproportionnée et arbitraire. En ce qu'elle laisse aux fonctionnaires chargés du contrôle aux frontières un pouvoir d'appréciation arbitraire, elle porte atteinte aux principes de sécurité juridique et de prévisibilité de la loi.

A.2.2. Pour le Conseil des ministres, l'inapplicabilité de cette disposition aux ressortissants belges est une conséquence directe de l'article 3.2 du protocole n° 4 de la Convention européenne des droits de l'homme. En ce qui concerne l'inapplicabilité de l'article 3, 3°, nouveau, de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer aux ressortissants de l'Union européenne et de l'Espace économique européen, elle est une conséquence directe des conventions internationales ratifiées par la Belgique et auxquelles celle-ci ne peut se soustraire. La disposition précitée est une application directe et obligée du paragraphe 1er, c), combiné avec le paragraphe 2 de l'article 5 de la Convention du 19 juin 1990 portant application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985.

A.2.3. Dans leur mémoire en réponse, les parties requérantes précisent leur moyen. Celui-ci porte sur le caractère arbitraire et aléatoire des motifs pour lesquels l'accès au territoire peut être refusé, d'autant plus manifeste lorsque la disposition en cause est comparée aux termes précis utilisés à l'article 3, 6°, de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer, disposition dans le cadre de laquelle c'est au ministre lui-même qu'est laissée l'appréciation. En toute hypothèse, une disposition internationale ne peut justifier l'introduction en droit belge d'une disposition inconstitutionnelle.

En ce qui concerne l'article 7, insérant un article 3bis dans la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer A.3.1. Selon les parties requérantes, cette disposition limite fortement les possibilités de l'étranger de fournir une prise en charge, tout en aggravant les responsabilités de celui qui s'engage.

Elle introduit diverses discriminations entre étrangers, respectivement, selon la qualité de personne physique ou de personne morale qui les prend en charge, selon la durée pour laquelle cette personne est autorisée à séjourner en Belgique ou selon qu'ils sont étrangers en court séjour ou étudiants.

A.3.2. Pour le Conseil des ministres, l'exclusion des personnes morales se justifie par le fait que, constituant souvent des « coquilles vides », elles n'offrent aucune garantie concrète de prise en charge et que leur responsabilité peut être moins facilement engagée que celle des personnes physiques. S'agissant de la deuxième discrimination alléguée, elle se justifie par l'exigence d'un lien de rattachement durable avec la Belgique, un contrôle de solvabilité étant beaucoup plus difficile à réaliser à l'égard d'un étranger ne résidant pas en Belgique. Quant à la différence de traitement faite par rapport aux étudiants, ceux-ci bénéficient généralement d'une bourse et leur but de séjour est différent de celui des étrangers en séjour de courte durée.

A.3.3. Dans leur mémoire en réponse, les parties requérantes soulignent, s'agissant de la distinction opérée entre étrangers en court séjour et étudiants étrangers, que les exigences de solvabilité devraient être plus importantes pour les seconds, dès lors qu'ils sont censés rester à charge de leur garant pendant plusieurs années; en outre, leurs moyens d'existence ne sont pas nécessairement supérieurs à ceux d'un touriste ou d'un homme d'affaires.

En ce qui concerne l'article 11, en ce qu'il remplace l'article 7, 3°, de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer A.4.1. Pour les parties requérantes, cette disposition substitue désormais à la dangerosité avérée de l'étranger sur le plan de l'ordre public ou de la sécurité nationale, une dangerosité potentielle. Elle opère une discrimination, entre étrangers admis au séjour en Belgique, selon qu'il s'agit d'un court séjour ou non. Un tel système, risquant de déboucher sur des décisions arbitraires, porte atteinte à la sécurité juridique et à la prévisibilité de la loi, atteinte d'autant plus grave qu'elle peut déboucher sur des mesures lourdes de conséquences, à savoir l'éloignement du territoire et la mise en détention.

Par ailleurs, la Convention du 19 juin 1990 n'imposait nullement l'adoption de la disposition en cause. Cette dernière concerne en effet l'éloignement du territoire, et non le franchissement des frontières ou la libre circulation à l'intérieur de celles-ci, que visent les dispositions avancées par le Conseil des ministres.

En outre, à supposer même que la disposition en cause constitue l'exécution de la Convention d'application de l'accord de Schengen, cela ne suffit pas à justifier la violation des articles 10 et 11 de la Constitution.

A.4.2. Pour le Conseil des ministres, cette disposition respecte la Convention précitée du 19 juin 1990 portant application de l'accord de Schengen, en particulier ses articles 5, paragraphes 1 et 2, 19, 29 et 23. Par ailleurs, le même critère de dangerosité potentielle est utilisé à l'article 34 de la loi sur la fonction de police. En ce qui concerne l'article 11, en ce qu'il modifie l'article 7, 2°, de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer A.5.1. En étendant la durée de détention requise pour l'exécution forcée d'un ordre de quitter le territoire - auparavant d'une durée de deux mois -, la disposition en cause viole les principes d'égalité et de non-discrimination. Elle échappe au champ d'application des articles 5 et 18 de la Convention européenne des droits de l'homme, en ce que l'objectif poursuivi est moins de faciliter les éloignements du territoire que de décourager le séjour illégal en le sanctionnant par une peine de détention déguisée. Le délai de huit mois ne peut être considéré comme raisonnable et excède, en ce qu'il porte atteinte à une liberté fondamentale, ce qui est strictement nécessaire. Il est relevé que, contrairement aux personnes privées de leur liberté en vertu des législations en matière de police et de détention préventive, les étrangers susceptibles de se voir appliquer cette mesure n'ont pas commis de délit, voire n'ont pas nécessairement violé la loi sur le séjour. Même au regard de l'autre objectif invoqué lors des travaux préparatoires, à savoir inciter l'étranger détenu à collaborer avec les autorités belges et étrangères en vue de l'organisation de son rapatriement, la mesure n'apparaît pas proportionnée à l'organisation pratique d'un éloignement forcé.

A.5.2. Le Conseil des ministres s'en réfère à la procédure de détention préventive, en soulignant que les personnes qui en font l'objet n'ont pas non plus, nécessairement, commis de délit, ni même violé la loi pénale. Il est relevé que la Cour, dans son arrêt n° 61/94 du 14 juillet 1994, a considéré qu'il n'était pas en soi interdit de priver de liberté un étranger aux fins d'éloignement; la disposition en cause en l'espèce n'est pas contraire à cette jurisprudence, notamment en ce que le délai de huit mois est un délai maximal et que la prolongation du délai initial est soumis à un contrôle judiciaire.

A.5.3. Les parties requérantes, dans leur mémoire en réponse, relèvent que les différentes catégories de personnes privées de liberté (condamnés, personnes en détention préventive, internés, colloqués, personnes détenues administrativement - dont les étrangers) constituent des catégories comparables.

En ce qui concerne l'article 22, complétant l'article 29 de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer A.6.1. Outre la référence à l'argumentation développée au A.5.1, il est relevé que, pour les étrangers expulsés, la détention en vue de l'exécution d'une mesure d'expulsion, prise pour des motifs d'ordre public, constitue une double peine et prolonge souvent la période de détention subie en vertu d'une condamnation pénale, ce qui est en soi discriminatoire.

A.6.2. Le Conseil des ministres s'en réfère, pour sa part, à l'argumentation développée ci-dessus au A.5.2.

En ce qui concerne l'article 55, remplaçant l'article 74/4 de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer A.7.1. Cette disposition impose désormais aux transporteurs de rapatrier et de payer les frais de rapatriement, non seulement lorsque le refus d'accès au territoire est fondé sur le défaut de possession des documents requis par l'article 2, mais aussi lorsque le refus est fondé sur l'article 3 de la loi, alors même que l'étranger serait en possession des documents précités; cette obligation s'ajoute aux obligations financières et aux amendes pénales et administratives que prévoyait déjà la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer. L'article 55 instaure ainsi une discrimination entre les transporteurs - seuls ceux qui transportent des étrangers subissant les charges financières que cette disposition instaure -, laquelle est disproportionnée par rapport à l'objectif poursuivi (A.7.2) et ne peut être justifiée par référence à l'article 26.1.a) de la Convention du 19 juin 1990 (A.7.3).

A.7.2. La discrimination précitée porte tout d'abord atteinte au droit des transporteurs de prévoir les conséquences juridiques de leurs actes; en effet, l'obligation financière nouvelle résultant de l'article 55 est la conséquence d'un refus d'accès au territoire fondé sur l'article 3 de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer, refus qu'ils ne peuvent raisonnablement prévoir.

Ensuite, ce système aboutit à confier à des personnes privées - les transporteurs - les compétences de l'Etat en matière de police des étrangers, en violation du principe constitutionnel selon lequel les pouvoirs publics sont tenus d'exercer personnellement leurs attributions et ne peuvent s'en décharger sur des tiers.

Enfin, l'article 55 entraîne des conséquences excessives à l'égard des passagers étrangers, lesquels risquent de ne plus être pris en charge par les transporteurs pour des motifs impossibles à connaître et relevant de la seule appréciation desdits transporteurs; cette conséquence apparaît particulièrement dramatique à l'égard des réfugiés contraints de fuir le pays où ils sont victimes de persécutions.

A.7.3. S'agissant de la justification tirée de l'article 26.1 de la Convention du 19 juin 1990, cette disposition n'a pas une portée aussi large que l'article 55 en cause. D'une part, il ne se prononce pas sur la prise en charge, par le transporteur, des frais de rapatriement, et d'autre part, ne met à sa charge que la seule obligation de contrôler la possession des documents de voyage requis. Les autres conventions internationales (en matière d'aviation civile internationale, de trafic maritime international et de transports internationaux ferroviaires) n'imposent également aux transporteurs que la vérification des documents de voyage requis dans le pays de destination.

Il s'ensuit que la seule obligation qui peut être justifiée dans le chef des transporteurs, au regard des diverses conventions internationales citées ci-dessus, porte sur la vérification de la possession par les passagers des documents requis; en conséquence, seul le non-respect de cette obligation peut justifier la mise en cause de la responsabilité financière des transporteurs.

A.8. Selon le Conseil des ministres, le recours en annulation est, tout d'abord, irrecevable en ce qui concerne cette disposition, à défaut pour celle-ci de porter atteinte à l'objet social des associations requérantes. Ensuite, il est relevé que l'article 55 n'opère aucune distinction entre différentes catégories de transporteurs, tous - tant privés que publics - étant concernés par lui. En toute hypothèse, à supposer même qu'il opère une différenciation, celle-ci viserait des étrangers qui ne se trouvent pas encore sur le territoire belge, et qui ne bénéficient dès lors pas du principe d'égalité et de non-discrimination.

A.9. En raison de l'objectif poursuivi par l'article 55, à savoir réduire le flux migratoire, cette disposition affecte directement et défavorablement l'objet social des associations sans but lucratif requérantes.

S'agissant de l'argument tiré du fait que les étrangers visés par l'article 55 ne bénéficient pas du principe d'égalité et de non-discrimination, celui-ci est contesté, l'interdiction de discrimination s'imposant tant en vertu de la Constitution que du droit international, et limitant dès lors la liberté des Etats en matière d'accès et de séjour des étrangers.

Quant à l'argument tiré de l'absence de différence de traitement opérée entre transporteurs, à supposer même qu'il soit fondé, il n'en reste pas moins une différence de traitement faite au détriment des transporteurs, injustifiée en ce qu'elle porte atteinte à leur seul détriment aux principes de sécurité juridique et de prévisibilité de la loi.

En ce qui concerne l'article 58, remplaçant les paragraphes 3, 4 et 5 de l'article 74/5 de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer A.10.1. Cette disposition permet le maintien des demandeurs d'asile dans un lieu situé aux frontières, actuellement le centre de transit 127 à Zaventem, des demandeurs d'asile qui ont fait l'objet d'une décision de refus d'entrée exécutoire ou d'une décision confirmative d'une telle décision; les modalités de prolongation de cet enfermement sont identiques à celles prévues par l'article 11, la partie requérante se référant à l'argumentation développée au sujet de l'article 11. Un tel enfermement peut constituer un traitement inhumain et dégradant prohibé par l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme et, s'agissant des enfants, est contraire à la Convention relative aux droits de l'enfant.

A.10.2. Le Conseil des ministres, outre qu'il s'en réfère également à l'argumentation développée au sujet de l'article 11, conteste que l'article 58 viole l'article 3 précité de la Convention européenne. En vertu de la jurisprudence de la Cour comme de la doctrine, exigeant des souffrances d'un minimum de gravité, la mesure de prolongation de la détention ne peut être considérée comme une torture, un traitement inhumain, un avilissement ou une humiliation grave.

A.10.3. Dans leur mémoire en réponse, les parties requérantes rappellent que le président du Tribunal de première instance de Bruxelles a considéré, dans une ordonnance de juin 1993, que les conditions d'hébergement des demandeurs d'asile à Zaventem étaient contraires à l'article 3 précité.

En ce qui concerne l'article 59, remplaçant les paragraphes 2, 3 et 4, de l'article 74/6 de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer A.11. Cette disposition permet le maintien en un lieu déterminé des étrangers qui ont pénétré irrégulièrement sur le territoire, qui ont introduit une demande d'asile et ont fait l'objet d'une décision exécutoire de refus de séjour ou d'une décision confirmative, le maintien pouvant atteindre une durée maximale de huit mois.

Tant les parties requérantes que le Conseil des ministres s'en réfèrent à l'argumentation développée ci-dessus au sujet de l'article 58.

En ce qui concerne l'article 60, insérant un article 74/7 dans la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer A.12.1. Dès lors que cette disposition peut être interprétée comme permettant aux autorités de police de retenir au poste un étranger n'étant pas en possession des documents requis, durant vingt-quatre heures, alors même qu'il serait en situation régulière, elle introduit une discrimination par rapport aux Belges : ceux-ci, dans la même situation, ne peuvent en effet être retenus que douze heures, en vertu de l'article 34 de la loi du 5 août 1992Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/08/1992 pub. 21/10/1999 numac 1999015203 source ministere des affaires etrangeres, du commerce exterieur et de la cooperation internationale Loi portant approbation du Protocole modifiant l'article 81 du Traité instituant l'Union économique Benelux du 3 février 1958, fait à Bruxelles le 16 février 1990 fermer sur la fonction de police.

Cette différence de traitement ne peut être justifiée par le motif avancé lors des travaux préparatoires, à savoir laisser aux autorités le soin de procéder, outre au contrôle d'identité, aux examens nécessaires à un éventuel éloignement de l'étranger, ce type de vérification ne demandant pas plus de temps que lorsqu'elle a trait à un Belge.

A.12.2. S'agissant de l'interprétation de l'article 60, le Conseil des ministres précise que l'arrestation administrative n'est envisageable qu'à l'égard des étrangers ne disposant d'aucune pièce attestant de leur identité. Quant au fond, le but de cette arrestation administrative est double : d'une part, permettre la vérification de l'identité de l'étranger concerné et, d'autre part, permettre au ministre ou à son délégué de prendre éventuellement une mesure d'éloignement. C'est ce deuxième élément qui différencie l'arrestation administrative d'un étranger de celle d'un Belge, celui-ci ne pouvant faire l'objet d'une mesure d'éloignement. En outre, l'article 60 prévoit que l'arrestation administrative ne peut intervenir que dans l'attente d'une décision du ministre ou de son délégué, de telle sorte que si les vérifications aboutissent au constat que l'étranger arrêté est en situation régulière, est ressortissant de l'Union, voire est Belge, il sera aussitôt remis en liberté.

A.12.3. Dans leur mémoire en réponse, les parties requérantes invitent le Conseil des ministres à préciser la portée des termes « pièces d'identité » et « porteur » et soulignent que ces difficultés d'interprétation indiquent que l'article 60 présente de grands risques d'application arbitraire.

En ce qui concerne l'article 65, modifiant l'article 57, § 2, de la loi du 8 juillet 1976Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/07/1976 pub. 18/04/2016 numac 2016000231 source service public federal interieur Loi organique des centres publics d'action sociale. - Coordination officieuse en langue allemande de la version applicable aux habitants de la région de langue allemande fermer organique des centres publics d'aide sociale A.13.1. En vertu de cette disposition, indépendamment de la notification d'un ordre de quitter le territoire ou de l'existence d'un recours introduit à l'encontre d'un tel ordre, les étrangers en séjour illégal n'auront plus droit qu'à l'aide médicale urgente.

A.13.2. L'article 65 prive de l'aide sociale les étrangers en séjour illégal et les candidats réfugiés auxquels un ordre exécutoire a été notifié et, ce faisant, discrimine ces étrangers par rapport aux Belges et aux autres étrangers.

Une différence de traitement est faite entre l'étranger qui bénéficiait déjà de l'aide sociale au moment où un ordre de quitter le territoire lui est notifié et celui qui introduit sa demande en étant en situation de séjour illégal : le premier pourra continuer à bénéficier de l'aide sociale jusqu'à l'expiration du délai pour quitter le territoire, alors que le second ne pourra en bénéficier.

Cette différence de traitement viole les articles 10, 11, 23 et 191 de la Constitution. L'article 23, assurant à chacun le droit de mener une vie conforme à la dignité humaine, protège en son point 2° « le droit à la sécurité sociale, à la protection de la santé et à l'aide sociale, médicale et juridique ». Ce droit n'est en rien subordonné à la légalité du séjour, à tout le moins jusqu'à l'expiration du délai d'une mesure d'éloignement définitive. En raison de sa formulation précise et inconditionnelle, l'article 23 édicte un droit subjectif d'application immédiate, bénéficiant à toute personne et qui implique, à tout le moins, un effet de standstill : il interdit les mesures négatives qui dérogeraient à la situation actuelle. En portant atteinte à ce droit fondamental, l'article 65 constitue une mesure disproportionnée au regard des objectifs poursuivis par le législateur, à savoir alléger les dépenses de l'Etat et arrêter l'immigration illégale.

Enfin, en privant l'étranger qui a introduit un recours contre un ordre de quitter le territoire, de tout droit à l'aide sociale autre que l'aide médicale urgente, la disposition en cause vide de son sens ce droit au recours institué par la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer; elle instaure en outre une différence de traitement entre étrangers basée sur le critère de la fortune, selon qu'ils ont ou non les moyens financiers de subvenir à leurs besoins durant la durée de la procédure.

A.14. Le Conseil des ministres souligne tout d'abord que la Cour est incompétente pour contrôler le respect de l'article 23 de la Constitution. Il conteste ensuite le fait que cette disposition édicterait un droit subjectif d'application directe au bénéfice de toute personne.

Par ailleurs, il ressort de l'arrêt de la Cour n° 51/94 du 29 juin 1994 que celle-ci a admis le principe d'une limitation de l'aide sociale, sans qu'importe à cet égard le caractère définitif ou simplement exécutoire de l'ordre de quitter le territoire.

Enfin, en raison de l'absence d'effet suspensif des recours devant le Conseil d'Etat, l'étranger destinataire d'un ordre de quitter le territoire se trouve dans une situation tout aussi précaire que celle de l'étranger auquel a été signifié un ordre définitif de quitter le territoire; il n'y a donc pas entre eux la différence de situation qui est alléguée par les parties requérantes.

A.15. Dans leur mémoire en réponse, les parties requérantes répliquent à l'argument pris de l'incompétence de la Cour que la violation de l'article 23 de la Constitution n'est pas invoquée séparément mais en combinaison avec les articles 10, 11 et 191 de la Constitution.

En ce qui concerne l'article 69, § 3 A.16.1. Sur la base de cette disposition, la limitation à un maximum de huit mois de la privation de liberté administrative n'entre en vigueur que le 1er janvier 1998. Il s'ensuit que les étrangers privés de liberté entre le 16 décembre 1996 (date d'entrée en vigueur de la loi) et le 30 avril 1997 (huit mois avant la date du 1er janvier 1998) pourront subir une détention de plus de huit mois, pouvant aller jusque plus de douze mois. Il est fait référence, a fortiori, à l'argumentation relative à l'article 59. En outre, il est souligné qu'une détention opérée sans limitation de durée peut être considérée comme une violation de l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme, ce qui implique le caractère disproportionné d'une telle mesure.

A.16.2. Pour le Conseil des ministres, ce moyen est irrecevable pour défaut d'intérêt, dans la mesure où les effets de la disposition transitoire critiquée seront épuisés au jour d'une éventuelle annulation. A l'appui du défaut d'intérêt, est également invoqué le fait que les parties requérantes n'ont pas demandé la suspension de cette mesure.

A.17. Les parties requérantes, à titre subsidiaire, analysent l'hypothèse dans laquelle la Cour considérerait que les articles 6, 7, 3°, et 55 de la loi du 15 juillet 1996 constituent une exécution imposée des articles 5.1.c), 5.2, 5.1.e), 19, 20, 21, 23 et 26.1.a) de la Convention du 19 juin 1990 portant application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985. Cette circonstance est irrelevante en ce que, comme la Cour l'a relevé à diverses reprises, un traité international ne peut autoriser un législateur à méconnaître les droits et libertés garantis par la Constitution nationale, parmi lesquels le principe d'égalité et de non-discrimination. Lorsqu'elle exécute un traité n'ayant pas d'effet direct, il appartient à l'autorité compétente d'assurer cette mise en oeuvre d'une manière conforme à la Constitution afin de ne pas introduire dans l'ordre juridique interne des normes législatives inconstitutionnelles; il est relevé qu'il en est a fortiori de même lorsque la norme d'exécution porte atteinte à des normes législatives inconstitutionnelles. - B - En ce qui concerne la recevabilité B.1. Le Conseil des ministres conteste la recevabilité du recours.

Outre l'absence au dossier de la décision du conseil d'administration de chacune des associations sans but lucratif d'introduire le recours, est allégué, en ce qui concerne l'a.s.b.l. Syndicat des avocats pour la démocratie, le non-respect des formalités prescrites par la loi du 27 juin 1921Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1921 pub. 19/08/2013 numac 2013000498 source service public federal interieur Loi sur les associations sans but lucratif, les associations internationales sans but lucratif et les fondations. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer sur les associations sans but lucratif. En outre, cette association sans but lucratif ne satisferait pas aux conditions auxquelles est subordonnée la défense, par une association sans but lucratif, d'un intérêt collectif.

B.2. En ce qui concerne la première exception, il ressort des pièces communiquées à la Cour par les parties requérantes, d'une part, que le conseil d'administration de chacune d'entre elles a pris la décision d'introduire le présent recours et, d'autre part, que l'a.s.b.l.

Syndicat des avocats pour la démocratie a satisfait aux formalités prescrites par la loi du 27 juin 1921Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1921 pub. 19/08/2013 numac 2013000498 source service public federal interieur Loi sur les associations sans but lucratif, les associations internationales sans but lucratif et les fondations. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer sur les associations sans but lucratif.

B.3.1. En ce qui concerne l'exception tirée du défaut d'intérêt de cette même association sans but lucratif, il y a lieu de relever que lorsqu'une association sans but lucratif se prévaut d'un intérêt collectif, il est requis : - que son objet social soit d'une nature particulière et, dès lors, distinct de l'intérêt général; - que cet intérêt ne soit pas limité aux intérêts individuels des membres; - que la norme entreprise soit susceptible d'affecter l'objet social; - que celui-ci soit réellement poursuivi, ce qui doit ressortir d'activités concrètes et durables de l'association.

B.3.2. L'a.s.b.l. Syndicat des avocats pour la démocratie a notamment pour objet : « 1° de promouvoir et garantir les droits de la défense et à cette fin d'assurer aux avocats comme aux autres citoyens les libertés individuelles, politiques, économiques et sociales et l'intégrité physique; 2° de promouvoir et garantir, pour les citoyens notamment les plus démunis ou victimes d'atteintes aux droits de l'homme, l'accès au meilleur droit et à une justice démocratique, moderne et humaine;3° d'agir pour le respect des droits essentiels et des libertés fondamentales, publiques et individuelles, notamment contre tout abus de la puissance publique et de tout pouvoir;».

Cette association poursuit un objectif qui ne se confond ni avec l'intérêt général ni avec l'intérêt individuel de ses membres. Son objet social est réellement poursuivi, ainsi qu'en attestent les activités qu'elle exerce. Les dispositions qu'elle attaque et qui restreignent la liberté de certaines catégories d'étrangers peuvent porter atteinte aux objectifs qu'elle s'est fixés.

Tel n'est cependant pas le cas de l'article 55 de la loi du 15 juillet 1996, qui remplace l'article 74/4 de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer par le texte suivant : «

Art. 74/4.Le transporteur public ou privé qui a amené dans le Royaume un passager dépourvu des documents requis par l'article 2 ou se trouvant dans un des autres cas visés à l'article 3, doit le transporter ou le faire transporter sans délai dans le pays d'où il vient ou dans tout autre pays où il peut être admis. Il est solidairement tenu avec le passager de payer les frais de rapatriement de ce dernier.

En outre, lorsque le passager est dépourvu des documents requis par l'article 2, le transporteur public ou privé est solidairement tenu avec lui de payer les frais d'hébergement, de séjour et de soins de santé. » Cette disposition impose des obligations non aux étrangers eux-mêmes mais aux entreprises qui les transportent. Ces entreprises ne peuvent être rangées parmi les personnes dont l'association requérante s'est donné pour objectif de défendre les droits fondamentaux. Sans doute la disposition précitée pourrait-elle avoir pour effet de modifier le comportement des transporteurs à l'égard des étrangers qui font appel à leurs services. Mais il s'agit là d'un effet indirect qui ne peut suffire à justifier l'intérêt de l'association requérante à attaquer une telle disposition.

B.3.3. L'a.s.b.l. Ligue des droits de l'homme a pour objet « de combattre l'injustice et toute atteinte arbitraire aux droits d'un individu ou d'une collectivité ».

L'a.s.b.l. Mouvement contre le racisme, l'antisémitisme et la xénophobie a pour but « la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la xénophobie ».

L'objet social de ces deux associations ne leur donne pas un intérêt direct à attaquer l'article 55, qui concerne les transporteurs.

B.3.4. Il s'ensuit que le recours est recevable, sauf en ce qu'il est dirigé contre l'article 55 de la loi du 15 juillet 1996 qui remplace l'article 74/4 de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer.

En ce qui concerne le fond En ce qui concerne l'article 6 de la loi du 15 juillet 1996, remplaçant l'article 3 de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer.

B.4.1. Les parties requérantes limitent leur critique au seul article 3, 3°, nouveau, qui dispose : «

Art. 3.Sauf dérogations prévues par un traité international ou par la loi, peut être refoulé par les autorités chargées du contrôle aux frontières, l'étranger qui se trouve dans un des cas suivants : 3° s'il ne peut pas présenter, le cas échéant, les documents justifiant l'objet et les conditions du séjour envisagé; Cette disposition, traitant différemment les étrangers par rapport aux Belges et aux ressortissants européens, serait discriminatoire, en ce qu'elle porterait atteinte à la sécurité juridique, en raison du large pouvoir d'appréciation qu'elle laisse à l'autorité compétente.

B.4.2. L'article 6 entrepris a pour objet de régler les conditions du refoulement d'un étranger aux frontières de l'Etat belge et les conditions de son séjour en Belgique.

Les Belges ne pouvant être privés du droit d'entrer sur le territoire de l'Etat dont ils sont ressortissants (article 3.2 du Protocole additionnel n° 4 à la Convention européenne des droits de l'homme), ils ne sauraient, en raison de cette protection juridique particulière, entrer dans le champ d'application de l'article 6 entrepris.

Les ressortissants européens et les personnes assimilées à ceux-ci bénéficiant du droit de circuler et de séjourner librement dans les Etats membres (article 8 A du Traité C.E.), ils ne sauraient eux non plus entrer dans le champ d'application de l'article 6 entrepris. Les étrangers non européens se trouvent dans une situation qui, en raison des dispositions de ces traités, ne peut être comparée à celle des Belges et des Européens.

B.4.3. Il résulte de ce qui précède que le moyen pris de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution, par l'article 3, 3°, nouveau, de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer, n'est pas fondé.

En ce qui concerne l'article 7 de la loi du 15 juillet 1996 B.5. L'article 7 insère dans la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer un article 3bis, lequel dispose : « Sans préjudice d'autres dispositions de la présente loi, la preuve des moyens de subsistance suffisants peut être apportée par la production d'une attestation de prise en charge, dans laquelle une personne physique qui dispose de ressources suffisantes et qui possède la nationalité belge ou qui est autorisée ou admise à séjourner en Belgique pour une durée illimitée, s'engage à l'égard de l'étranger, de l'Etat belge et de tout centre public d'aide sociale compétent, à prendre en charge pendant un délai de deux ans les soins de santé, les frais de séjour et de rapatriement de l'étranger.

La personne qui a signé l'engagement de prise en charge est, avec l'étranger, solidairement responsable du paiement des frais de soins de santé, de séjour et de rapatriement de ce dernier.

Le bourgmestre de la commune dans le registre de la population ou des étrangers de laquelle la personne qui a signé l'engagement de prise en charge est inscrite, ou son délégué, est tenu de légaliser la signature apposée au bas de l'engagement de prise en charge, si les conditions de l'authentification de la signature sont remplies.

Le bourgmestre ou son délégué peut indiquer, dans un avis adressé au Ministre ou à son délégué, si la personne qui a signé l'engagement de prise en charge dispose de ressources suffisantes. Cet avis n'est pas contraignant.

Le Roi fixe les modalités de l'engagement de prise en charge et les modalités de la récupération des sommes à charge de la personne qui a signé cet engagement.

Le Roi peut fixer les cas dans lesquels et les conditions auxquelles la validité de l'engagement de prise en charge est subordonnée à l'obligation de verser une somme auprès de la Caisse des dépôts et consignations ou de fournir une garantie bancaire. » B.6. Selon les parties requérantes, cette disposition introduit plusieurs discriminations entre étrangers : tout d'abord, selon qu'ils sont pris en charge par une personne physique ou par une personne morale, ensuite selon la durée pour laquelle la personne physique est autorisée à séjourner en Belgique et, enfin, selon que les étrangers sont ou en court séjour ou des étudiants.

B.7. Il ressort de la requête et du mémoire en réponse que les parties requérantes limitent leurs critiques à trois éléments de l'article 3bis nouveau : la prise en charge doit émaner exclusivement d'une personne physique, celle-ci doit impérativement être belge ou être autorisée à séjourner en Belgique pour une durée illimitée et la prise en charge vaut pour deux ans, à l'inverse des étudiants étrangers pour lesquels, en vertu de l'article 60 de la loi, la prise en charge vaut pour « au moins une année académique ». L'objet limité que se donne ainsi le recours implique que seul l'alinéa 1er de l'article 3bis nouveau est soumis au contrôle de la Cour, et dans la seule mesure où cette disposition règle les trois points précités.

B.8.1. Il ressort des travaux préparatoires de cette disposition que le législateur entendait « fournir une base légale claire à l'usage de l'engagement de prise en charge, hors de la situation visée à l'article 60 de la loi, et [...] éviter l'arbitraire lors de la légalisation de la signature » (Doc. parl., Chambre, 1995-1996, n° 364/1, p. 14).

B.8.2. Il appartient au législateur d'exiger que le tiers qui déclare prendre un étranger en charge soit une personne physique de nationalité belge ou autorisée à séjourner en Belgique pour une durée illimitée. En effet, il n'est pas manifestement déraisonnable de considérer qu'une personne qui satisfait à cette double exigence se prête mieux au contrôle des garanties de solvabilité.

Le législateur peut raisonnablement considérer qu'autoriser la prise en charge par une personne morale implique le risque d'aboutir à une concentration de prises en charge dont il résulterait que celles-ci ne répondraient plus à son objectif. L'exigence légale d'une prise en charge par une personne physique n'exclut pas que cette dernière, en cas de mise en oeuvre de la garantie, puisse bénéficier d'une intervention d'une personne morale.

B.9. En ce que la disposition en cause soumet les étrangers qu'elle vise à des conditions et modalités de prise en charge différentes, en particulier sur le plan de sa durée, de celles applicables aux étudiants étrangers visés à l'article 60 de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer, elle apparaît raisonnablement justifiée. Les étrangers désireux de faire des études en Belgique présentent en effet diverses particularités qui peuvent justifier qu'ils soient traités différemment : ils bénéficient fréquemment d'une bourse d'études, en outre la durée pour laquelle ils séjournent en Belgique permet que puisse être envisagé, dans leur chef, l'exercice d'une activité lucrative compatible avec leurs études et enfin, leur admission en Belgique s'intègre souvent dans la politique de coopération au développement avec le pays dont ils sont ressortissants.

B.10. Le moyen n'est pas fondé.

En ce qui concerne l'article 11 de la loi du 15 juillet 1996 B.11.1. Cet article 11 remplace l'article 7 de la loi du 15 décembre 1980. L'article 7 se lit désormais comme suit : « Sans préjudice des dispositions plus favorables contenues dans un traité international, le Ministre ou son délégué peut donner l'ordre de quitter le territoire avant une date déterminée, à l'étranger qui n'est ni autorisé ni admis à séjourner plus de trois mois ou à s'établir dans le Royaume : 1° s'il demeure dans le Royaume sans être porteur des documents requis par l'article 2;2° s'il demeure dans le Royaume au-delà du délai fixé conformément à l'article 6, ou ne peut apporter la preuve que ce délai n'est pas dépassé;3° si, par son comportement, il est considéré comme pouvant compromettre l'ordre public ou la sécurité nationale;4° s'il est considéré par le Ministre, après avis conforme de la Commission consultative des étrangers, comme pouvant compromettre les relations internationales de la Belgique ou d'un Etat partie à une convention internationale relative au franchissement des frontières extérieures, liant la Belgique;5° s'il est signalé aux fins de non-admission conformément à l'article 3, 5°;6° s'il ne dispose pas de moyens de subsistance suffisants, tant pour la durée du séjour envisagé que pour le retour dans le pays de provenance ou le transit vers un Etat tiers dans lequel son admission est garantie, et n'est pas en mesure d'acquérir légalement ces moyens;7° s'il est atteint d'une des maladies ou infirmités énumérées à l'annexe de la présente loi;8° s'il exerce une activité professionnelle indépendante ou en subordination sans être en possession de l'autorisation requise à cet effet;9° si, en application des conventions ou des accords internationaux liant la Belgique, il est remis aux autorités belges par les autorités des Etats contractants en vue de son éloignement du territoire de ces Etats;10° si, en application des conventions ou des accords internationaux liant la Belgique, il doit être remis par les autorités belges aux autorités des Etats contractants;11° s'il a été renvoyé ou expulsé du Royaume depuis moins de dix ans, lorsque la mesure n'a pas été suspendue ou rapportée. Dans les mêmes cas, si le Ministre ou son délégué l'estime nécessaire, il peut faire ramener sans délai l'étranger à la frontière.

L'étranger peut être détenu à cette fin pendant le temps strictement nécessaire à l'exécution de la mesure sans que la durée de la détention puisse dépasser deux mois.

Le Ministre ou son délégué peut toutefois prolonger cette détention par période de deux mois, lorsque les démarches nécessaires en vue de l'éloignement de l'étranger ont été entreprises dans les sept jours ouvrables de la mise en détention de l'étranger, qu'elles sont poursuivies avec toute la diligence requise et qu'il subsiste toujours une possibilité d'éloigner effectivement l'étranger dans un délai raisonnable.

Après une prolongation, la décision visée à l'alinéa précédent ne peut plus être prise que par le Ministre.

Après huit mois de détention, l'étranger doit être mis en liberté. » B.11.2. Les parties requérantes contestent l'article 11 sur deux plans.

D'une part, elles critiquent les alinéas 3 à 6 du nouvel article 7 relatifs à la durée de détention et à son éventuelle prolongation : ce moyen sera examiné ci-dessous avec ceux dirigés contre des dispositions ayant le même objet, insérées par les articles 22, 58, 59 et 69 de la loi du 15 juillet 1996.

D'autre part, les parties requérantes critiquent l'alinéa 1er, 3°, de l'article 7 nouveau. Cette disposition discriminerait, parmi les étrangers admis à séjourner en Belgique, ceux admis pour un court séjour : en prévoyant pour ces derniers un critère de dangerosité potentielle, cette disposition porterait atteinte aux principes de sécurité juridique et de prévisibilité de la loi.

B.12. Aux termes de l'article 7 nouveau, alinéa 1er, 3°, l'étranger admis à séjourner en Belgique pour un court séjour peut faire l'objet d'un ordre de quitter le territoire si, « par son comportement, il est considéré comme pouvant compromettre l'ordre public ou la sécurité nationale ». Par contre, en vertu de l'article 20 de la loi, l'étranger admis à séjourner pour plus de trois mois ne peut être renvoyé que s'il « a porté atteinte à l'ordre public ou à la sécurité nationale », tandis que l'étranger établi en Belgique ne peut être expulsé que s'il a « gravement porté atteinte à l'ordre public ou à la sécurité nationale ». Une différence de traitement est dès lors opérée entre étrangers, seuls ceux admis au court séjour pouvant être contraints de quitter le territoire en l'absence d'une d'atteinte effective à l'ordre public ou à la sécurité nationale.

B.13. Selon les travaux préparatoires de cette disposition, la modification proposée visait à mettre la législation belge en concordance avec la Convention d'application de l'accord de Schengen; ainsi a-t-il été relevé que « de la combinaison des articles 5, § 1er, e, 19, 20 et 21 de la Convention d'application de l'Accord de Schengen, il résulte que l'étranger considéré comme pouvant compromettre l'ordre public ou la sécurité nationale ne peut pas résider en Belgique pour un court séjour » (Doc. parl., Chambre, 1995-1996, n° 364/1, p. 17).

B.14.1. Dès lors que l'ordre public ou la sécurité nationale sont susceptibles d'être affectés, le législateur peut légitimement estimer que la seule menace qui pèse sur ces intérêts peut justifier un ordre de quitter le territoire. S'agissant des étrangers, le législateur pouvait en conséquence prévoir que peut faire l'objet d'un ordre de quitter le territoire l'étranger en court séjour qui, par son comportement, est considéré comme pouvant compromettre l'ordre public ou la sécurité nationale.

B.14.2. En ce qui concerne la différence de traitement qu'opère la disposition en cause par rapport aux étrangers admis à séjourner pour plus de trois mois ou établis en Belgique, lesquels ne peuvent être renvoyés ou expulsés, en vertu de l'article 20, qu'en cas d'atteinte effective à l'ordre public ou à la sécurité nationale, elle n'apparaît pas manifestement déraisonnable. Le législateur a pu en effet considérer que, en ce qui concerne les étrangers en court séjour visés par la disposition en cause, leur moins grand degré d'intégration dans la communauté nationale par rapport à celui des étrangers en séjour plus long pouvait justifier la mesure critiquée.

B.15. Le moyen n'est pas fondé.

En ce qui concerne les articles 11, 22, 58, 59 et 69 de la loi du 15 juillet 1996 B.16.1. Les articles 11, 22, 58 et 59 de la loi du 15 juillet 1996 remplacent ou complètent, selon le cas, les articles 7, 29, 74/5, §§ 3 à 5, et 74/6, §§ 2 à 4, de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer.

D'une part, ils prévoient que, selon le cas, la mesure privative de liberté ou de maintien en un lieu déterminé ne peut excéder deux mois.

D'autre part, ils précisent que le ministre ou son délégué peut cependant prolonger cette mesure, par période de deux mois, pour autant que les démarches nécessaires en vue de l'éloignement de l'étranger aient été entreprises dans les sept jours ouvrables de la mise en détention ou de la mesure de maintien en un lieu déterminé, qu'elles aient été poursuivies avec toute la diligence requise et qu'il subsiste toujours une possibilité raisonnable d'éloigner effectivement l'étranger dans un délai raisonnable. En outre, il est prévu que, après une prolongation, les prolongations suivantes ne peuvent être décidées que par le ministre. Enfin, les dispositions précitées de la loi du 15 juillet 1996 prévoient que, après huit mois de détention ou de maintien en un lieu déterminé, l'étranger doit être mis en liberté. Cette limitation n'entre toutefois en vigueur, en vertu de l'article 69, § 3, de la loi du 15 juillet 1996, qu'au 1er janvier 1998, après l'évaluation que prévoit cette disposition.

B.16.2. Les parties requérantes contestent, en des termes similaires, ces dispositions en ce qu'elles ont en commun de préciser les conditions dans lesquelles, selon le cas, la détention ou le maintien en un lieu déterminé d'un étranger - d'une durée originaire maximale de deux mois - peut être prolongée. Les parties requérantes considèrent en particulier que ces conditions sont discriminatoires, notamment au regard des conditions dans lesquelles sont traitées par la loi sur la détention préventive des personnes pourtant soupçonnées d'avoir commis un délit. Par ailleurs, elles estiment aussi que le délai de huit mois ne peut être considéré comme raisonnable au regard de l'article 5 de la Convention européenne des droits de l'homme.

B.17. La liberté individuelle constitue dans une société démocratique une liberté fondamentale garantie par l'article 12 de la Constitution et par l'article 5.1 de la Convention européenne des droits de l'homme. Aucune restriction ne peut y être apportée que si elle est justifiée par un intérêt supérieur et qu'elle répond à un objectif légitime.

B.18. Dans son arrêt n° 61/94, la Cour a admis que le législateur prévoie que des mesures privatives de liberté de deux mois soient prises à l'encontre d'un étranger non soupçonné d'infraction pénale en raison des motifs tirés notamment du délai jugé trop court (un mois) pour instruire un dossier et de la nécessité de prévenir que les personnes concernées par la mesure ne se réfugient dans la clandestinité.

La Cour avait tenu compte de ce que, ainsi que le précisaient les travaux préparatoires de la loi du 6 mai 1993, la mesure de maintien ne pourrait être prise « que si elle [était] absolument nécessaire et proportionnelle » (B.7.4) et elle avait souligné l'existence du contrôle juridictionnel permettant de vérifier le caractère légal du maintien, à la lumière de l'objectif poursuivi qui était de garantir l'éloignement effectif du territoire (B.7.6).

B.19. Aux termes de l'article 5.1.f) de la Convention européenne des droits de l'homme, une privation de liberté peut se justifier « s'il s'agit de l'arrestation ou de la détention régulières d'une personne pour l'empêcher de pénétrer irrégulièrement dans le territoire, ou contre laquelle une procédure d'expulsion ou d'extradition est en cours ».

Tous les cas visés par les dispositions précitées de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer, modifiée par la loi du 15 juillet 1996, concernent des étrangers se trouvant dans une des situations prévues à l'article 5.1.f) de la susdite Convention.

En effet, qu'ils aient ou non demandé l'asile, les étrangers auxquels l'autorisation d'entrée ou de séjour sur le territoire exigée par la loi a été accordée ne peuvent se voir imposer une détention ou un maintien dans un lieu déterminé, sur la base des dispositions attaquées. Ces mesures ne peuvent être prises qu'à l'égard des étrangers auxquels l'accès au territoire ou le séjour sur celui-ci a été refusé.

La privation de liberté prévue par les articles attaqués ne constitue pas une mesure pénale mais une mesure administrative destinée à permettre l'éloignement effectif d'étrangers qui ont reçu un ordre de quitter le territoire.

B.20. Les difficultés liées à un éloignement effectif, qui ne peuvent pas toujours être résolues dans la période limitée de deux mois, peuvent exiger la prolongation de la mesure privative de liberté.

Une telle prolongation est seulement possible en vertu des articles 11, 22, 58 et 59, lorsqu'il est satisfait aux trois conditions suivantes : 1) les démarches nécessaires en vue de l'éloignement de l'étranger doivent avoir été entreprises dans les sept jours ouvrables;2) ces démarches doivent être poursuivies avec toute la diligence requise;3) une possibilité d'éloigner effectivement l'étranger dans un délai raisonnable doit toujours subsister. Il est en outre prévu que la prolongation de la détention ne peut être décidée que par le ministre, à l'exception de la première qui peut l'être par le ministre ou son délégué.

Par ailleurs, les articles 11, 22, 58 et 59 de la loi du 15 juillet 1996 prévoient chacun que la durée maximale de détention ou de maintien en un lieu déterminé est de huit mois, terme maximal au-delà duquel l'étranger doit être mis en liberté.

B.21.1. Compte tenu de ce que la privation de liberté est une restriction à une liberté fondamentale, les conditions précitées sont de stricte interprétation. Elles sont cumulatives. L'absence de collaboration de l'étranger ne peut justifier la privation de liberté.

B.21.2. La Cour observe que le respect des conditions et modalités précitées est soumis à un contrôle juridictionnel, exercé par la chambre du conseil du tribunal correctionnel, selon les modalités déterminées par les articles 71 et suivants de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer.

B.21.3. En vertu de l'article 72, alinéa 2, cette juridiction ne peut apprécier l'opportunité de la mesure privative de liberté, mais elle doit néanmoins vérifier la légalité de cette mesure, conformément aux exigences de l'article 5.4 de la Convention européenne des droits de l'homme en examinant si les trois conditions cumulatives rappelées en B.20 sont réunies.

B.22. Il résulte de ce qui précède que les articles 11, 22, 58 et 59 de la loi du 15 juillet 1996 ne violent pas les articles 10 et 11 de la Constitution dès lors que la prolongation éventuelle des mesures de détention ou de maintien en un lieu déterminé est subordonnée à des conditions strictes et à un contrôle juridictionnel.

B.23. Il y a lieu toutefois d'examiner si l'article 69, § 3, de la même loi résiste également au contrôle de constitutionnalité, en ce qu'il détermine la date d'entrée en vigueur de la limitation à un maximum de huit mois des mesures privatives de liberté, limitation prévue par les dispositions précitées de la loi du 15 juillet 1996.

L'article 69, § 3, alinéa 1er, reporte en effet à la date du 1er janvier 1998 la date d'entrée en vigueur de cette limitation. En différant ainsi la date d'entrée en vigueur de cette limitation, l'article 69, § 3, alinéa 1er, de la loi du 15 juillet 1996 rend possible les prolongations successives, par périodes de deux mois, des mesures de détention ou de maintien en un lieu déterminé, la durée totale de privation de liberté pouvant dès lors atteindre plus de douze mois, eu égard à la date d'entrée en vigueur (16 décembre 1996) des articles 11, 22, 58 et 59 autorisant lesdites prolongations.

B.24. En ce qu'il admet le principe de prolongations illimitées en nombre des mesures de détention ou de maintien en un lieu déterminé d'étrangers, l'article 69, § 3, alinéa 1er, constitue une mesure qui ne peut être raisonnablement justifiée.

Elle constitue en effet une atteinte disproportionnée à la liberté individuelle, garantie par l'article 12 de la Constitution et par l'article 5 de la Convention européenne des droits de l'homme.

B.25. Il résulte de ce qui précède que l'article 69, § 3, alinéa 1er, de la loi du 15 juillet 1996 viole les articles 10 et 11 de la Constitution.

En ce qui concerne l'article 60 de la loi du 15 juillet 1996 B.26.1. L'article 60 insère dans la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer un article 74/7, rédigé comme suit : « Les services de police peuvent saisir un étranger qui n'est pas porteur des pièces d'identité ou des documents prévus par la loi et le soumettre à une mesure d'arrestation administrative, dans l'attente d'une décision du Ministre ou de son délégué. La durée de la privation de liberté ne peut dépasser vingt-quatre heures. » B.26.2. Selon les parties requérantes, l'article 74/7 nouveau serait discriminatoire en ce qu'il prévoit, pour l'arrestation administrative d'un étranger, une durée maximale de vingt-quatre heures, alors que celle-ci est de douze heures en ce qui concerne les Belges, en vertu de l'article 34 de la loi du 5 août 1992Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/08/1992 pub. 21/10/1999 numac 1999015203 source ministere des affaires etrangeres, du commerce exterieur et de la cooperation internationale Loi portant approbation du Protocole modifiant l'article 81 du Traité instituant l'Union économique Benelux du 3 février 1958, fait à Bruxelles le 16 février 1990 fermer sur la fonction de police.

B.27.1. Il ressort des travaux préparatoires de cette disposition que l'arrestation administrative d'une durée maximale de vingt-quatre heures qu'elle institue en ce qui concerne les étrangers a pour but de prolonger de douze heures la privation de liberté de douze heures au maximum autorisée, conformément à l'article 34 de la loi du 5 août 1992Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/08/1992 pub. 21/10/1999 numac 1999015203 source ministere des affaires etrangeres, du commerce exterieur et de la cooperation internationale Loi portant approbation du Protocole modifiant l'article 81 du Traité instituant l'Union économique Benelux du 3 février 1958, fait à Bruxelles le 16 février 1990 fermer, pour le contrôle d'identité, afin de permettre aux autorités compétentes de décider l'éloignement de ces étrangers, si ce contrôle d'identité aboutit à un constat de situation irrégulière.

B.27.2. Cette différence de traitement par rapport aux Belges apparaît raisonnablement justifiée par le souci d'éviter que ne vivent dans la clandestinité les étrangers dont il apparaîtrait qu'ils sont en situation irrégulière et doivent être éloignés du territoire.

B.28. Il résulte de ce qui précède que l'article 60 de la loi du 15 juillet 1996 ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution.

En ce qui concerne l'article 65 de la loi du 15 juillet 1996 B.29. Le moyen est dirigé contre l'article 65 de la loi attaquée, qui modifie l'article 57, § 2, de la loi du 8 juillet 1976Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/07/1976 pub. 18/04/2016 numac 2016000231 source service public federal interieur Loi organique des centres publics d'action sociale. - Coordination officieuse en langue allemande de la version applicable aux habitants de la région de langue allemande fermer organique des centres publics d'aide sociale. Cette disposition violerait les articles 10, 11, 23 et 191 de la Constitution en ce qu'elle limite ou supprime le droit à l'aide sociale pour certaines catégories d'étrangers.

B.30. L'article 65 de la loi attaquée remplace, avec effet au 10 janvier 1997, l'article 57, § 2, de la loi organique des centres publics d'aide sociale. Cette disposition est depuis lors libellée comme suit : « § 2. Par dérogation aux autres dispositions de la présente loi, la mission du centre public d'aide sociale se limite à l'octroi de l'aide médicale urgente, à l'égard d'un étranger qui séjourne illégalement dans le Royaume.

Le Roi peut déterminer ce qu'il y a lieu d'entendre par aide médicale urgente.

Un étranger qui s'est déclaré réfugié et a demandé à être reconnu comme tel, séjourne illégalement dans le Royaume lorsque la demande d'asile a été rejetée et qu'un ordre de quitter le territoire exécutoire a été notifié à l'étranger concerné.

L'aide sociale accordée à un étranger qui était en fait bénéficiaire au moment où un ordre de quitter le territoire exécutoire lui a été notifié, est arrêtée, à l'exception de l'aide médicale urgente, le jour où l'étranger quitte effectivement le territoire et, au plus tard, le jour de l'expiration du délai de l'ordre de quitter le territoire.

Il est dérogé aux dispositions de l'alinéa précédent pendant le délai strictement nécessaire pour permettre à l'étranger de quitter le territoire, pour autant qu'il ait signé une déclaration attestant son intention explicite de quitter le plus vite possible le territoire, sans que ce délai ne puisse en aucun cas excéder un mois.

La déclaration d'intention précitée ne peut être signée qu'une seule fois. Le centre informe sans retard le Ministre qui a l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers dans ses compétences, ainsi que la commune concernée, de la signature de la déclaration d'intention. » B.31. Ainsi que la Cour l'a observé dans son arrêt n° 51/94 du 29 juin 1994, lorsqu'un Etat qui entend limiter l'immigration constate que les moyens qu'il emploie à cet effet ne sont pas efficaces, il n'est pas déraisonnable qu'il ne se reconnaisse pas les mêmes devoirs face aux besoins de ceux, d'une part, qui séjournent légalement sur son territoire (ses nationaux et certaines catégories d'étrangers), et des étrangers, d'autre part, qui s'y trouvent encore après avoir reçu l'ordre de quitter le territoire.

En disposant que celui qui a reçu un ordre définitif de quitter le territoire à une date déterminée ne recevra, s'il n'a pas obtempéré, plus d'aide sociale, à la seule exception de l'aide médicale urgente, le législateur avait utilisé, ainsi que l'a jugé la Cour dans son arrêt n° 51/94, un moyen dont les effets permettent d'atteindre l'objectif poursuivi, qui est d'inciter l'intéressé à obéir à l'ordre reçu. Ce moyen n'était pas disproportionné à cet objectif dès lors qu'il garantissait que l'intéressé qui souhaitait quitter le territoire de sa propre initiative et qui exprimait cette intention bénéficierait de l'aide sociale durant le délai, limité à un mois, « strictement nécessaire pour permettre à l'étranger de quitter le territoire », et de l'aide médicale urgente, sans délai.

B.32. Toutefois, dès lors que, pour mettre fin à des divergences d'interprétations, le législateur remplace le terme « définitif » par celui d'« exécutoire », l'étranger est privé de l'aide sociale même s'il a introduit un recours en annulation accompagné ou non d'une demande de suspension qui serait pendant devant le Conseil d'Etat.

B.33. Il appartient à la Cour d'examiner si une telle disposition n'est pas discriminatoire en ce qu'elle porte atteinte, au détriment d'une catégorie de personnes, au droit à l'aide sociale et au droit à l'exercice effectif d'un recours juridictionnel.

B.34. Les règles de procédure applicables devant le Conseil d'Etat permettent de rejeter à bref délai les demandes de suspension et les recours en annulation qui seraient manifestement irrecevables ou manifestement non fondés. (articles 12 à 15 de l'arrêté royal du 5 décembre 1991 déterminant la procédure en référé devant le Conseil d'Etat; articles 93 et 94 de l'arrêté du Régent du 23 août 1948 déterminant la procédure devant la section d'administration du Conseil d'Etat). Une telle procédure permet de rejeter, dans un délai inférieur au délai prévu par les articles 11, 22, 58 et 59 de la loi du 15 juillet 1996, les recours qui auraient pour seul objectif de prolonger indûment le bénéfice de l'aide sociale.

B.35. Dès lors qu'il existe une procédure permettant de filtrer les recours dilatoires, il est excessif de prévoir, en outre, que sont privés du droit à l'aide sociale, tous les demandeurs d'asile dont la demande a été rejetée et qui ont reçu, pour ce motif, un ordre de quitter le territoire, alors qu'ils ont attaqué devant le Conseil d'Etat la décision du Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides prise en application de l'article 63/3 de la loi ou celle de la Commission permanente de recours des réfugiés.

B.36. Etant donné la nature des principes en cause, la mesure attaquée apparaît comme apportant une limitation disproportionnée à l'exercice des droits fondamentaux mentionnés en B.33. Elle viole dès lors les articles 10 et 11 de la Constitution.

B.37. Il y a lieu d'annuler, dans les troisième et quatrième alinéas du nouvel article 57, § 2, de la loi organique des centres publics d'aide sociale, le terme « exécutoire ».

Cette annulation a pour effet que l'article 57, § 2, doit s'interpréter comme ne s'appliquant pas à l'étranger qui a demandé à être reconnu comme réfugié, dont la demande a été rejetée et qui a reçu un ordre de quitter le territoire, tant que n'ont pas été tranchés les recours qu'il a introduits devant le Conseil d'Etat contre la décision du Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides prise en application de l'article 63/3 de la loi ou contre la décision de la Commission permanente de recours des réfugiés.

Par ces motifs, la Cour annule - l'alinéa 1er du paragraphe 3 de l'article 69 de la loi du 15 juillet 1996 modifiant la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers et la loi du 8 juillet 1976Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/07/1976 pub. 18/04/2016 numac 2016000231 source service public federal interieur Loi organique des centres publics d'action sociale. - Coordination officieuse en langue allemande de la version applicable aux habitants de la région de langue allemande fermer organique des centres publics d'aide sociale; - le terme « exécutoire » dans les alinéas 3 et 4 de l'article 57, § 2, de la loi du 8 juillet 1976Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/07/1976 pub. 18/04/2016 numac 2016000231 source service public federal interieur Loi organique des centres publics d'action sociale. - Coordination officieuse en langue allemande de la version applicable aux habitants de la région de langue allemande fermer organique des centres publics d'aide sociale modifié par l'article 65 de la loi précitée; rejette le recours pour le surplus.

Ainsi prononcé en langue française, en langue néerlandaise et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 22 avril 1998.

Le greffier, L. Potoms.

Le président, M. Melchior.

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