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Arrêt
publié le 02 avril 2024

Extrait de l'arrêt n° 148/2023 du 9 novembre 2023 Numéro du rôle : 7887 En cause : la question préjudicielle concernant l'article 39, § 1 er , alinéa 3, de la loi du 3 juillet 1978 « relative aux contrats de travail », posée par La Cour constitutionnelle, composée des présidents P. Nihoul et L. Lavrysen, et des juges T. Gie(...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 148/2023 du 9 novembre 2023 Numéro du rôle : 7887 En cause : la question préjudicielle concernant l'article 39, § 1er, alinéa 3, de la loi du 3 juillet 1978Documents pertinents retrouvés type loi prom. 03/07/1978 pub. 12/03/2009 numac 2009000158 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail type loi prom. 03/07/1978 pub. 03/07/2008 numac 2008000527 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail Coordination officieuse en langue allemande fermer « relative aux contrats de travail », posée par le Tribunal du travail francophone de Bruxelles.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents P. Nihoul et L. Lavrysen, et des juges T. Giet, Y. Kherbache, D. Pieters, S. de Bethune et M. Plovie, assistée du greffier N. Dupont, présidée par le président P. Nihoul, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet de la question préjudicielle et procédure Par jugement du 7 novembre 2022, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 14 novembre 2022, le Tribunal du travail francophone de Bruxelles a posé la question préjudicielle suivante : « L'article 39, § 1er, alinéa 3 de la loi du 3 juillet 1978Documents pertinents retrouvés type loi prom. 03/07/1978 pub. 12/03/2009 numac 2009000158 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail type loi prom. 03/07/1978 pub. 03/07/2008 numac 2008000527 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail Coordination officieuse en langue allemande fermer relative aux contrats de travail, interprété en ce que le travailleur dont la rémunération en cours est partiellement ou totalement variable, qui est licencié au cours de la période pendant laquelle il a cessé totalement ses prestations de travail pour cause de chômage pour force majeure liée au COVID-19 - alors que, par définition, il n'a pas choisi d'être placé en chômage pour force majeure liée au COVID-19, lequel s'impose à lui (comme c'est le cas dans les hypothèses ayant donné lieu aux arrêts de la Cour constitutionnelle du 28 mai 2009 et du 5 décembre 2013) - a droit à une indemnité compensatoire de préavis calculée, quant à la partie variable de sa rémunération, sur la base de la moyenne des douze mois antérieurs à la rupture de son contrat de travail indépendamment de la suspension de son contrat de travail pour cause de chômage pour force majeure liée au COVID-19, ce qui aboutit à une rémunération dont le montant est limité, voire nul, et ce faisant, à une indemnité compensatoire de préavis dont le montant est limité, voire nul, viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution alors que : - sa situation est différente du travailleur dont la rémunération est partiellement ou totalement variable et dont le contrat de travail n'a pas été suspendu au cours des douze mois précédant la rupture de son contrat de travail, lequel a lui aussi droit à une indemnité compensatoire de préavis calculée sur la base de la moyenne des douze mois antérieurs à la rupture de son contrat de travail, ce traitement égal n'étant pas raisonnablement justifié ? - sa situation est sinon identique, à tout le moins comparable, à celle du travailleur dont le contrat de travail est suspendu totalement en raison de son placement en chômage pour force majeure liée au COVID-19 et dont la rémunération est fixe, lequel a droit à une indemnité compensatoire de préavis calculée sur la base de sa rémunération fixe proméritée en n'ayant pas égard à la suspension de son contrat de travail, cette différence de traitement n'étant pas raisonnablement justifiée ? - sa situation est sinon identique, à tout le moins comparable, à celle du travailleur dont le contrat de travail est suspendu en cas de reprise du travail à temps partiel moyennant l'autorisation de l'employeur et du médecin-conseil de la mutuelle et/ou en cas de congé à temps partiel pour l'octroi de soins palliatifs, lequel a droit en ces hypothèses à une indemnité compensatoire de préavis calculée sur base de la rémunération effectivement due au travailleur avant la suspension partielle du contrat de travail, la Cour constitutionnelle ayant souligné en ses arrêts n° 164/2013 du 5 décembre 2013 et n° 89/2009 du 28 mai 2009 que la suspension du contrat de travail s'imposait en ces occurrences au travailleur, comme c'est le cas pour travailleur devant subir la suspension de son contrat de travail pour cause de force majeure liée au COVID-19, cette différence de traitement n'étant pas raisonnablement justifiée ? ». (...) III. En droit (...) B.1.1. La question préjudicielle porte sur la compatibilité de l'article 39, § 1er, alinéa 3, de la loi du 3 juillet 1978Documents pertinents retrouvés type loi prom. 03/07/1978 pub. 12/03/2009 numac 2009000158 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail type loi prom. 03/07/1978 pub. 03/07/2008 numac 2008000527 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail Coordination officieuse en langue allemande fermer « relative aux contrats de travail » (ci-après : la loi du 3 juillet 1978Documents pertinents retrouvés type loi prom. 03/07/1978 pub. 12/03/2009 numac 2009000158 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail type loi prom. 03/07/1978 pub. 03/07/2008 numac 2008000527 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail Coordination officieuse en langue allemande fermer) avec les articles 10 et 11 de la Constitution.

B.1.2. Tel qu'il a été modifié par la loi du 26 décembre 2013Documents pertinents retrouvés type loi prom. 26/12/2013 pub. 31/12/2013 numac 2013012289 source service public federal emploi, travail et concertation sociale Loi concernant l'introduction d'un statut unique entre ouvriers et employés en ce qui concerne les délais de préavis et le jour de carence ainsi que de mesures d'accompagnement fermer « concernant l'introduction d'un statut unique entre ouvriers et employés en ce qui concerne les délais de préavis et le jour de carence ainsi que des mesures d'accompagnement » (ci-après : la loi du 26 décembre 2013Documents pertinents retrouvés type loi prom. 26/12/2013 pub. 31/12/2013 numac 2013012289 source service public federal emploi, travail et concertation sociale Loi concernant l'introduction d'un statut unique entre ouvriers et employés en ce qui concerne les délais de préavis et le jour de carence ainsi que de mesures d'accompagnement fermer), l'article 39, § 1er, de la loi du 3 juillet 1978Documents pertinents retrouvés type loi prom. 03/07/1978 pub. 12/03/2009 numac 2009000158 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail type loi prom. 03/07/1978 pub. 03/07/2008 numac 2008000527 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail Coordination officieuse en langue allemande fermer dispose : « Si le contrat a été conclu pour une durée indéterminée, la partie qui résilie le contrat sans motif grave ou sans respecter le délai de préavis fixé aux articles 37/2, 37/5, 37/6 et 37/11, est tenue de payer à l'autre partie une indemnité égale à la rémunération en cours correspondant soit à la durée du délai de préavis, soit à la partie de ce délai restant à courir. L'indemnité est toutefois toujours égale au montant de la rémunération en cours correspondant à la durée du délai de préavis, lorsque le congé est donné par l'employeur et en méconnaissance des dispositions de l'article 40 de la loi sur le travail du 16 mars 1971.

L'indemnité de congé comprend non seulement la rémunération en cours, mais aussi les avantages acquis en vertu du contrat.

Lorsque la rémunération en cours ou les avantages acquis en vertu du contrat sont partiellement ou entièrement variables, on prend en compte, pour la partie variable, la moyenne des douze mois antérieurs ou, le cas échéant, la partie de ces douze mois au cours de laquelle le travailleur a été en service.

Pour les travailleurs payés au forfait, la détermination de la rémunération hebdomadaire pour calculer l'indemnité de congé s'obtient en multipliant la rémunération mensuelle par trois et en la divisant par treize ».

B.2. En vertu des articles 37 et 39 de la loi du 3 juillet 1978Documents pertinents retrouvés type loi prom. 03/07/1978 pub. 12/03/2009 numac 2009000158 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail type loi prom. 03/07/1978 pub. 03/07/2008 numac 2008000527 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail Coordination officieuse en langue allemande fermer, les contrats de travail qui ont été conclus pour une durée indéterminée peuvent être résiliés unilatéralement moyennant un préavis ou, à défaut, moyennant une indemnité compensatoire de préavis, hormis le licenciement pour motif grave.

Par l'article 39 de la loi du 3 juillet 1978Documents pertinents retrouvés type loi prom. 03/07/1978 pub. 12/03/2009 numac 2009000158 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail type loi prom. 03/07/1978 pub. 03/07/2008 numac 2008000527 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail Coordination officieuse en langue allemande fermer, le législateur vise à tempérer les effets que peut avoir une résiliation unilatérale du contrat de travail, en subordonnant en principe la résiliation à un délai de préavis ou, à défaut, au paiement d'une indemnité compensatoire de préavis.

La durée du délai de préavis est réglée aux articles 37/1 et suivants de la loi du 3 juillet 1978Documents pertinents retrouvés type loi prom. 03/07/1978 pub. 12/03/2009 numac 2009000158 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail type loi prom. 03/07/1978 pub. 03/07/2008 numac 2008000527 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail Coordination officieuse en langue allemande fermer. En vertu de l'article 39, § 1er, de cette loi, l'indemnité compensatoire de préavis est fixée sur la base de la « rémunération en cours » au moment de la notification du congé, qui correspond en principe soit à la durée du délai de préavis, soit à la partie restant à courir de ce délai. L'article 39, § 1er, alinéa 2, précise que l'indemnité de congé comprend non seulement la rémunération en cours mais aussi tous les avantages acquis en vertu du contrat. L'article 39, § 1er, alinéa 3, détaille le mode de calcul de l'indemnité compensatoire de préavis lorsque la rémunération en cours ou les avantages acquis en vertu du contrat sont partiellement ou entièrement variables : il faut prendre en compte, pour la partie variable, la moyenne des douze mois antérieurs ou, le cas échéant, la partie de ces douze mois au cours de laquelle le travailleur a été en service.

B.3. L'alinéa 3 de l'article 39, § 1er, de la loi du 3 juillet 1978Documents pertinents retrouvés type loi prom. 03/07/1978 pub. 12/03/2009 numac 2009000158 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail type loi prom. 03/07/1978 pub. 03/07/2008 numac 2008000527 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail Coordination officieuse en langue allemande fermer a été inséré par l'article 14 de la loi du 26 décembre 2013Documents pertinents retrouvés type loi prom. 26/12/2013 pub. 31/12/2013 numac 2013012289 source service public federal emploi, travail et concertation sociale Loi concernant l'introduction d'un statut unique entre ouvriers et employés en ce qui concerne les délais de préavis et le jour de carence ainsi que de mesures d'accompagnement fermer, afin de préciser les règles relatives au calcul de l'assiette de l'indemnité de congé, en cas de rémunération variable.

Les travaux préparatoires exposent à cet égard : « En ce qui concerne l'article 14, 2°, les modifications apportées à l'article 39 de la loi ont pour seul objectif d'y intégrer les principes de l'article 86/4 de la loi du 3 juillet 1978Documents pertinents retrouvés type loi prom. 03/07/1978 pub. 12/03/2009 numac 2009000158 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail type loi prom. 03/07/1978 pub. 03/07/2008 numac 2008000527 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail Coordination officieuse en langue allemande fermer relative aux contrats de travail. Les principes pour déterminer l'assiette servant de base à l'indemnité de congé ne sont pas modifiés sous réserve des précisions apportées par les règles contenues actuellement dans l'article 86/4.

L'article 39 prévoit actuellement que l'indemnité de congé doit être calculée en tenant compte de la rémunération et des avantages auxquels le travailleur a droit au moment de la notification du congé. Le montant de ces avantages devant être déterminé avec certitude au moment du congé, une des méthodes offrant le plus de sécurité juridique est de se référer au dernier montant qui était dû dans les douze mois précédant le congé.

Il est précisé à l'article 39 que, lorsque la rémunération et/ou les avantages sont totalement ou partiellement variables, il y a lieu de tenir compte, pour le calcul du montant à inclure dans la base de calcul de l'indemnité de congé, de la moyenne de ces rémunérations et/ou avantages dont le droit au paiement est exigible dans les douze mois qui précèdent le congé. Ainsi, lorsqu'un bonus est par exemple dû tous les trois mois aux travailleurs et dont le montant est variable, on prendra en compte la moyenne des douze mois antérieurs précédant le congé » (Doc. parl., Chambre, 2013-2014, DOC 53-3144/001, p. 19).

B.4. La question préjudicielle est liée à l'interprétation de la notion de « rémunération en cours » et du mode de calcul de l'indemnité compensatoire de préavis dans le cas du licenciement d'un travailleur dont la rémunération est totalement ou partiellement variable, mais dont le contrat de travail a été suspendu totalement pour cause de chômage temporaire pour force majeure liée à la COVID-19, d'avril 2020 jusqu'à la mi-septembre 2020.

En vertu de l'article 26, alinéa 1er, de la loi du 3 juillet 1978Documents pertinents retrouvés type loi prom. 03/07/1978 pub. 12/03/2009 numac 2009000158 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail type loi prom. 03/07/1978 pub. 03/07/2008 numac 2008000527 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail Coordination officieuse en langue allemande fermer, les événements de force majeure n'entraînent pas la rupture du contrat lorsqu'ils ne font que suspendre momentanément l'exécution du contrat.

En application de cette disposition, l'article 11 de l'arrêté de pouvoirs spéciaux n° 37 du 24 juin 2020 « pris en exécution des articles 2 et 5 de la loi du 27 mars 2020Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/03/2020 pub. 30/03/2020 numac 2020040938 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi habilitant le Roi à prendre des mesures de lutte contre la propagation du coronavirus COVID-19 (1) type loi prom. 27/03/2020 pub. 30/03/2020 numac 2020040937 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi habilitant le Roi à prendre des mesures de lutte contre la propagation du coronavirus COVID-19 (1) fermer accordant des pouvoirs au Roi afin de prendre des mesures dans la lutte contre la propagation du coronavirus COVID-19 (II) visant à soutenir les travailleurs » organise la réglementation du chômage temporaire pour cause de force majeure au cas où l'employeur invoque à l'égard de son travailleur la suspension de l'exécution du contrat de travail en raison d'une situation de force majeure temporaire résultant de l'épidémie de COVID-19.

La Cour limite son examen à une telle situation.

B.5.1. La Cour est interrogée sur la compatibilité avec les articles 10 et 11 de la Constitution, de la disposition en cause, interprétée en ce sens que « le travailleur dont la rémunération en cours est partiellement ou totalement variable, qui est licencié au cours de la période pendant laquelle il a cessé totalement ses prestations de travail pour cause de chômage pour force majeure liée au COVID-19 [...] a droit à une indemnité compensatoire de préavis calculée, quant à la partie variable de sa rémunération, sur la base de la moyenne des douze mois antérieurs à la rupture de son contrat de travail indépendamment de la suspension de son contrat de travail pour cause de chômage pour force majeure liée au COVID-19, ce qui aboutit à une rémunération dont le montant est limité, voire nul, et ce faisant, à une indemnité compensatoire de préavis dont le montant est limité, voire nul ».

B.5.2. La juridiction a quo invite la Cour à comparer la situation du travailleur dont la rémunération en cours est partiellement ou totalement variable, qui est licencié au cours de la période pendant laquelle il a cessé totalement ses prestations de travail pour cause de chômage pour force majeure liée à la COVID-19 avec : - la situation du travailleur dont la rémunération est partiellement ou totalement variable et dont le contrat de travail n'a pas été suspendu au cours des douze mois précédant la rupture de son contrat de travail, lequel a lui aussi droit à une indemnité compensatoire de préavis calculée sur la base de la moyenne des douze mois antérieurs à la rupture de son contrat de travail; - la situation du travailleur dont le contrat de travail est suspendu totalement en raison de son placement en chômage pour force majeure liée à la COVID-19 et dont la rémunération est fixe, lequel a droit à une indemnité compensatoire de préavis calculée sur la base de sa rémunération fixe proméritée en n'ayant pas égard à la suspension de son contrat de travail, et - la situation du travailleur dont le contrat de travail est suspendu en cas de reprise du travail à temps partiel moyennant l'autorisation de l'employeur et du médecin-conseil de la mutuelle et/ou en cas de congé à temps partiel pour l'octroi de soins palliatifs, lequel a droit en ces hypothèses à une indemnité compensatoire de préavis calculée sur base de la rémunération effectivement due au travailleur avant la suspension partielle du contrat de travail, comme la Cour l'a jugé par ses arrêts n° 164/2013 du 5 décembre 2013 (ECLI:BE:GHCC:2013:ARR.164) et n° 89/2009 du 28 mai 2009 (ECLI:BE:GHCC:2009:ARR.089).

B.6. Le Conseil des ministres estime, en ordre principal, que la question préjudicielle n'appelle pas de réponse. En effet, elle serait fondée sur une lecture manifestement erronée de la disposition en cause.

B.7. Il appartient en règle à la juridiction a quo d'interpréter les dispositions qu'elle applique, sous réserve d'une lecture manifestement erronée de celles-ci.

B.8.1. La disposition en cause « établit une règle pour le calcul de la rémunération et des avantages auxquels le travailleur a droit au moment du congé, lorsque ces avantages et rémunération sont variables » (Cass., 6 mai 2019, S.17.0085.F, ECLI:BE:CASS:2019:ARR.20190506.2).

La juridiction a quo juge que la « rémunération en cours » dont parle l'article 39, § 1er, de la loi du 3 juillet 1978Documents pertinents retrouvés type loi prom. 03/07/1978 pub. 12/03/2009 numac 2009000158 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail type loi prom. 03/07/1978 pub. 03/07/2008 numac 2008000527 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail Coordination officieuse en langue allemande fermer, est déterminée, conformément à l'alinéa 3 de cette disposition, quant à la partie variable de cette rémunération, sur la base de la moyenne des douze mois antérieurs à la rupture du contrat de travail indépendamment de la suspension totale du contrat de travail pour cause de chômage pour force majeure liée à la COVID-19.

L'indemnité de congé est en principe fondée sur la rémunération à laquelle le travailleur a droit en contrepartie de son travail au moment de la notification du congé.

Dans l'interprétation de l'article 39, § 1er, alinéa 3, de la loi du 3 juillet 1978Documents pertinents retrouvés type loi prom. 03/07/1978 pub. 12/03/2009 numac 2009000158 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail type loi prom. 03/07/1978 pub. 03/07/2008 numac 2008000527 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail Coordination officieuse en langue allemande fermer donnée par la juridiction a quo dans la question préjudicielle, il serait alors tenu compte, pour déterminer l'indemnité de congé sur la base de la moyenne des douze mois antérieurs à la rupture de son contrat de travail, d'une période au cours de laquelle le travailleur n'avait pas droit à une rémunération fût-elle variable en contrepartie de son travail, dès lors que l'exécution du contrat de travail du travailleur en question avait été suspendue entièrement pour cause de chômage temporaire pour force majeure liée à la COVID-19.

Lorsque l'exécution du contrat de travail est suspendue entièrement en raison de chômage temporaire pour force majeure, la rémunération en contrepartie du travail n'est en effet plus due par l'employeur (article 20, 3°, de la loi du 3 juillet 1978Documents pertinents retrouvés type loi prom. 03/07/1978 pub. 12/03/2009 numac 2009000158 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail type loi prom. 03/07/1978 pub. 03/07/2008 numac 2008000527 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail Coordination officieuse en langue allemande fermer).

B.8.2. Ainsi, lorsque le licenciement a lieu au cours de la période où le travailleur a entièrement suspendu ses prestations de travail en application de la loi de redressement du 22 janvier 1985 contenant des dispositions sociales, la Cour a jugé que la « rémunération en cours » ne peut s'entendre que comme la rémunération qu'il percevait avant la suspension du contrat car « à défaut, il ne pourrait percevoir aucune indemnité compensatoire de préavis et serait privé de toute protection en cas de licenciement » (voir l'arrêt n° 119/2001 du 10 octobre 2001, ECLI:BE:GHCC:2001:ARR.119, B.4.2; n° 51/2008 du 13 mars 2008, ECLI:BE:GHCC:2008:ARR.051, B.4.1, alinéa 3).

Un raisonnement analogue s'applique lorsque le licenciement a lieu postérieurement à la période où le travailleur bénéficiant d'une rémunération variable a entièrement suspendu ses prestations de travail pour cause de chômage temporaire pour force majeure liée à la COVID-19, mais que les douze mois antérieurs au congé comprennent cette période. Comme le constate la juridiction a quo, en ce cas, ce mode de calcul aboutirait à une rémunération dont le montant est limité et ce faisant, à une indemnité compensatoire de préavis dont le montant est également limité, puisqu'elle est calculée sur une période au cours de laquelle aucune rémunération n'était due par l'employeur.

B.9. La Cour constate à cet égard que la finale de l'article 39, § 1er, alinéa 3, de la loi du 3 juillet 1978Documents pertinents retrouvés type loi prom. 03/07/1978 pub. 12/03/2009 numac 2009000158 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail type loi prom. 03/07/1978 pub. 03/07/2008 numac 2008000527 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail Coordination officieuse en langue allemande fermer prévoit que, pour déterminer la partie variable de la « rémunération en cours », on prend en compte la moyenne des douze mois antérieurs « ou, le cas échéant, la partie de ces douze mois au cours de laquelle le travailleur a été en service ».

Cette finale permet ainsi d'exclure, dans les douze mois permettant de déterminer la moyenne de la rémunération pour calculer l'indemnité de congé, la période durant laquelle aucune rémunération n'était due par l'employeur en l'absence de prestation de travail, y compris la période au cours de laquelle le contrat de travail a été suspendu totalement pour cause de chômage pour force majeure liée à la COVID-19.

Il en découle qu'en l'espèce, la partie variable de la « rémunération en cours » doit être déterminée sur la moyenne de la rémunération au cours des douze mois antérieurs à la rupture de son contrat de travail, cette période de douze mois étant diminuée des cinq mois et demi durant lesquels le travailleur a été placé en chômage temporaire pour force majeure liée à la COVID-19.

B.10. Compte tenu de ce qui précède, la question préjudicielle procède d'une lecture erronée.

B.11. La question préjudicielle n'appelle pas de réponse.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : Compte tenu de ce qui est dit en B.9, la question préjudicielle n'appelle pas de réponse.

Ainsi rendu en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 9 novembre 2023.

Le greffier, Le président, N. Dupont P. Nihoul

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