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Arrêt
publié le 28 juin 2021

Extrait de l'arrêt n° 24/2021 du 25 février 2021 Numéro du rôle : 7060 En cause : la question préjudicielle relative à l'article 187ter du Code judiciaire, posée par le Conseil d'Etat. La Cour constitutionnelle, composée des présidents après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet de la question préjudicielle et procéd(...)

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Extrait de l'arrêt n° 24/2021 du 25 février 2021 Numéro du rôle : 7060 En cause : la question préjudicielle relative à l'article 187ter du Code judiciaire, posée par le Conseil d'Etat.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents F. Daoût et L. Lavrysen, et des juges J.-P. Moerman, T. Merckx-Van Goey, P. Nihoul, T. Giet, R. Leysen, J. Moerman, M. Pâques et Y. Kherbache, assistée du greffier F. Meersschaut, présidée par le président F. Daoût, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet de la question préjudicielle et procédure Par l'arrêt n° 242.982 du 19 novembre 2018, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 26 novembre 2018, le Conseil d'Etat a posé la question préjudicielle suivante : « L'article 187ter du Code judiciaire viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'il aboutit à traiter de manière différente les magistrats lauréats à l'examen d'aptitude et les magistrats dispensés de cet examen en vertu des articles 187bis, 191bis, 194bis du Code judiciaire dès lors que les magistrats de ces deux catégories sont présumés disposer de la maturité et de la capacité nécessaires à l'exercice de la fonction de magistrat et se trouvent par conséquent dans une situation identique puisqu'ils ont tous répondu avec succès au contrôle de maturité et de capacité qui conditionne l'entrée dans la magistrature ? ». (...) III. En droit (...) B.1. Les articles 187 à 187ter, 191bis et 194bis du Code judiciaire disposent : «

Art. 187.§ 1er. Pour pouvoir être nommé juge de paix ou juge au tribunal de police, le candidat doit être âgé d'au moins 35 ans, être docteur ou licencié en droit et avoir réussi l'examen d'aptitude professionnelle prévu par l'article 259bis-9, § 1er ou être détenteur du certificat attestant qu'il a achevé avec fruit le stage judiciaire prévu par l'article 259octies. § 2. Le candidat doit en outre satisfaire à l'une des conditions suivantes : 1° avoir, pendant au moins douze années, suivi le barreau, exercé des fonctions de magistrat du ministère public ou de juge ou la profession de notaire;ou avoir exercé des fonctions juridiques pendant douze années dont au moins trois années dans une fonction judiciaire; 2° avoir, pendant au moins cinq années, exercé des fonctions de conseiller, d'auditeur, d'auditeur adjoint, de référendaire près la Cour de cassation, de référendaire, de référendaire adjoint au Conseil d'Etat ou des fonctions de référendaire à la Cour constitutionnelle; Le cas échéant, la durée d'exercice des fonctions visées au 2° est prise en compte pour le calcul de la période de douze années prévue au 1°.

Pour le candidat qui prouve sa connaissance de la langue autre que celle dans laquelle il a passé les examens du doctorat ou de la licence en droit en produisant le certificat délivré par le jury d'examen institué par l'article 43quinquies de la loi du 15 juin 1935Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/06/1935 pub. 11/10/2011 numac 2011000619 source service public federal interieur Loi concernant l'emploi des langues en matière judiciaire. - Coordination officieuse en langue allemande fermer concernant l'emploi des langues en matière judiciaire, les délais globaux visés aux 1° et 2° du présent paragraphe, sont réduits d'un an.

Art. 187bis.Toute personne qui a exercé la profession d'avocat à titre d'activité professionnelle principale pendant vingt ans au moins ou qui a exercé pendant quinze ans au moins cette activité à titre d'activité professionnelle principale et exercé pendant cinq ans au moins une fonction dont l'exercice nécessite une bonne connaissance du droit, est dispensée de l'examen d'aptitude professionnelle prévu à l'article 259bis-9, § 1er, en vue d'une nomination visée à l'article 187, pour autant que les conditions prévues à l'article 191bis, § § 2 et 3, soient respectées. [...]

Art. 187ter.Le nombre de personnes nommées, sur la base de l'examen oral d'évaluation visé à l'article 191bis, § 2, à des places visées à l'article 187 ne peut excéder, par ressort, 12 % du nombre total, fixé par la loi visée à l'article 186, § 1er, alinéa 9, des juges de paix et des juges au tribunal de police du ressort de la cour d'appel ». «

Art. 191bis.§ 1er. Toute personne qui a exercé la profession d'avocat à titre d'activité professionnelle principale pendant vingt ans au moins ou qui a exercé pendant quinze ans au moins cette activité à titre d'activité professionnelle principale et exercé pendant cinq ans au moins une fonction dont l'exercice nécessite une bonne connaissance du droit, est dispensée de l'examen d'aptitude professionnelle prévu à l'article 259bis-9, § 1er, en vue d'une nomination visée à l'article 190, pour autant que les conditions prévues aux § § 2 et 3 soient respectées. [...] § 2. A cette fin, une demande est introduite par voie électronique à la commission de nomination et de désignation compétente en fonction de la langue du diplôme de docteur, de licencié ou de master en droit.

La demande doit être accompagnée des pièces justificatives desquelles il ressort que les conditions prévues au § 1er sont remplies. Les pièces justificatives jointes à une demande déclarée recevable ne doivent plus être réclamées lorsque le candidat introduit une nouvelle demande de participation à un examen oral d'évaluation.

Dans les quarante jours de la réception de la demande, la commission de nomination et de désignation décide de sa recevabilité à la majorité des trois quarts des voix.

Si la commission de nomination et de désignation déclare la demande irrecevable, le demandeur en est informé par voie électronique.

Si la commission de nomination et de désignation déclare la demande recevable, le demandeur est invité à un examen oral d'évaluation par voie électronique.

Préalablement à l'examen oral d'évaluation, la commission de nomination et de désignation sollicite, par voie électronique, l'avis écrit motivé : 1° du représentant du barreau ou des barreaux de l'arrondissement judiciaire concerné désigné par l'ordre ou les ordres des avocats du barreau ou des barreaux de cet arrondissement où le candidat exerce ou a exercé des fonctions en tant qu'avocat.Pour l'arrondissement judiciaire de Bruxelles, l'avis du représentant de l'ordre français ou du représentant de l'ordre néerlandais est recueilli, selon que le candidat est ou a été inscrit au tableau de l'ordre français ou de l'ordre néerlandais des avocats; 2° le cas échéant, du chef de corps de la juridiction où le candidat exerce des fonctions en tant que juge suppléant ou conseiller suppléant. L'avis porte notamment sur l'expérience professionnelle utile dont le candidat peut se prévaloir pour exercer des fonctions en tant que magistrat.

Les personnes visées à l'alinéa 6 ne peuvent émettre un avis sur les parents ou alliés jusqu'au quatrième degré ni sur des personnes avec qui elles constituent un ménage de fait.

L'avis est transmis à la commission de nomination et de désignation et au candidat dans un délai de trente jours à compter de la demande d'avis.

A défaut d'avis rendu dans le délai prescrit, il est passé outre à cet avis.

Le candidat dispose d'un délai de quinze jours à compter de la notification de l'avis pour communiquer ses observations à la commission de nomination et de désignation.

Les délais de procédure sont suspendus du 15 juillet au 15 août.

Le demandeur dont la commission de nomination et de désignation compétente estime, à la majorité des trois quarts des voix, qu'il a réussi l'examen oral d'évaluation est autorisé à se porter candidat à une nomination. § 3. L'autorisation délivrée par la commission de nomination et de désignation est valable pendant trois ans à compter de la date de délivrance de l'autorisation.

Si le candidat n'a pas réussi l'examen oral d'évaluation, il en est averti par écrit motivé transmis par voie électronique. Dans ce cas, l'intéressé peut introduire une nouvelle demande au plus tôt trois ans après cette notification. Une version actualisée du curriculum vitae est le cas échéant jointe à la demande ». «

Art. 194bis.Toute personne qui a exercé la profession d'avocat à titre d'activité professionnelle principale pendant vingt ans au moins ou qui a exercé pendant quinze ans au moins cette activité à titre d'activité professionnelle principale et exercé pendant cinq ans au moins une fonction dont l'exercice nécessite une bonne connaissance du droit, est dispensée de l'examen d'aptitude professionnelle prévu à l'article 259bis-9, § 1er, en vue d'une nomination visée à l'article 194, pour autant que les conditions prévues à l'article 191bis, § § 2 et 3, soient respectées. [...] ».

B.2. Le juge a quo interroge la Cour sur la compatibilité de l'article 187ter du Code judiciaire avec les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce qu'il instaure une différence de traitement entre des magistrats qui sont candidats à une fonction dans la magistrature, selon qu'ils ont initialement accédé à la magistrature après avoir réussi l'examen d'aptitude professionnelle visé à l'article 259bis-9, § 1er, du Code judiciaire ou après avoir réussi l'examen oral d'évaluation, sur la base des articles 187bis, 191bis et 194bis du Code judiciaire, qui prévoient une dispense de l'examen d'aptitude professionnelle. Alors que les candidats de ces deux catégories sont présumés avoir la maturité et la capacité nécessaires à l'exercice de la fonction de magistrat, seuls les candidats de la seconde catégorie sont soumis à une limitation du nombre de nominations possibles, par ressort de cour d'appel.

Le juge a quo demande en particulier à la Cour si la disposition en cause est compatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce qu'elle s'applique non seulement aux candidats détenteurs du certificat de réussite de l'examen oral d'évaluation visé à l'article 191bis du Code judiciaire qui n'exercent pas déjà une fonction de magistrat (« primo-nominations »), mais aussi aux candidats qui exercent déjà une fonction de magistrat, à laquelle ils ont accédé après avoir réussi l'examen oral d'évaluation précité (nominations ultérieures).

B.3. Le principe d'égalité et de non-discrimination n'exclut pas qu'une différence de traitement soit établie entre des catégories de personnes, pour autant qu'elle repose sur un critère objectif et qu'elle soit raisonnablement justifiée.

L'existence d'une telle justification doit s'apprécier en tenant compte du but et des effets de la mesure critiquée ainsi que de la nature des principes en cause; le principe d'égalité et de non-discrimination est violé lorsqu'il est établi qu'il n'existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.

B.4. Par la loi du 15 juin 2001Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/06/2001 pub. 21/07/2001 numac 2001009548 source ministere de la justice Loi modifiant les articles 190, 194, 259bis 9, 259bis 10, 259octies et 371 du Code judiciaire, insérant l'article 191bis dans le Code judiciaire et modifiant l'article 21 de la loi du 18 juillet 1991 modifiant les règles du Code judiciaire relatives à la formation et au recrutement des magistrats type loi prom. 15/06/2001 pub. 25/08/2001 numac 2001009446 source ministere de la justice Loi modifiant l'article 357 du Code judiciaire fermer « modifiant les articles 190, 194, 259bis-9, 259bis-10, 259octies et 371 du Code judiciaire, insérant l'article 191bis dans le Code judiciaire et modifiant l'article 21 de la loi du 18 juillet 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 18/07/1991 pub. 04/04/2018 numac 2018030682 source service public federal interieur Loi organique du contrôle des services de police et de renseignement et de l'Organe de coordination pour l'analyse de la menace. - Coordination officieuse en langue allemande fermer modifiant les règles du Code judiciaire relatives à la formation et au recrutement des magistrats », le législateur a créé une nouvelle voie d'accès à la magistrature.

Celle-ci s'ajoute aux deux voies d'accès existantes, à savoir, d'une part, l'obtention d'un certificat attestant que la personne concernée a achevé avec fruit le stage judiciaire après y avoir été admise sur concours (article 259octies du Code judiciaire) et, d'autre part, la réussite d'un examen d'aptitude professionnelle (article 259bis-9, § 1er, du même Code).

La création de cette nouvelle voie d'accès à la magistrature, également appelée « troisième voie [d'accès] », vise à élargir le champ de recrutement de la magistrature à des personnes qui disposent d'une expérience professionnelle particulière, acquise pour l'essentiel sinon exclusivement au barreau, et qui, pour cette raison, pourraient être dispensées de l'examen d'aptitude professionnelle (Doc. parl., Chambre, 1999-2000, DOC 50-0703/001, p. 4).

B.5.1. Saisie d'un recours en annulation de plusieurs dispositions de la loi du 15 juin 2001Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/06/2001 pub. 21/07/2001 numac 2001009548 source ministere de la justice Loi modifiant les articles 190, 194, 259bis 9, 259bis 10, 259octies et 371 du Code judiciaire, insérant l'article 191bis dans le Code judiciaire et modifiant l'article 21 de la loi du 18 juillet 1991 modifiant les règles du Code judiciaire relatives à la formation et au recrutement des magistrats type loi prom. 15/06/2001 pub. 25/08/2001 numac 2001009446 source ministere de la justice Loi modifiant l'article 357 du Code judiciaire fermer précitée, la Cour a jugé, par son arrêt n° 14/2003 du 28 janvier 2003, que le législateur pouvait « considérer que les personnes ayant une longue expérience de la pratique du barreau doivent être encouragées à poser leur candidature à une fonction dans la magistrature » (B.10.3) et qu'en dispensant de l'examen d'aptitude professionnelle les avocats ayant pratiqué le barreau pendant au moins vingt ans, « le législateur est resté fidèle à la conception souvent réaffirmée et partagée par de nombreux Etats selon laquelle la pratique du barreau permet d'acquérir les qualités psychologiques, humaines et juridiques que doivent posséder les juges » (B.12). Elle en a conclu que les moyens n'étaient pas fondés en ce qu'ils critiquaient, dans son principe, la troisième voie d'accès à la magistrature (B.13).

B.5.2. Par ce même arrêt, la Cour a toutefois jugé qu'« en ne prévoyant qu'une simple condition d'ancienneté dans une pratique professionnelle et en ne fixant pas dans quelle proportion la nouvelle catégorie de candidats peut accéder à la magistrature, le législateur est allé au-delà de ce qu'exigeait son souci de permettre que des avocats expérimentés puissent accéder à la magistrature » (B.15). La Cour a donc annulé les dispositions attaquées, après avoir considéré que la troisième voie d'accès à la magistrature ne peut être ouverte que « dans une très faible proportion » et moyennant le respect de plusieurs conditions, parmi lesquelles la réussite d'un examen oral d'évaluation, « sous peine de méconnaître les objectifs que le législateur s'est fixés et de tromper les attentes légitimes de ceux qui se soumettent aux épreuves du concours [d'admission au stage judiciaire] ou de l'examen [d'aptitude professionnelle] » (B.17).

B.6.1. Afin de rencontrer ces objections, le législateur a modifié à nouveau le Code judiciaire, par la loi du 7 avril 2005Documents pertinents retrouvés type loi prom. 07/04/2005 pub. 13/05/2005 numac 2005009279 source service public federal justice Loi insérant les articles 187bis, 187ter, 191bis, 191ter, 194bis et 194ter dans le Code judiciaire et modifiant les articles 259bis-9 et 259bis-10 du même code fermer « insérant les articles 187bis, 187ter, 191bis, 191ter, 194bis et 194ter dans le Code judiciaire et modifiant les articles 259bis-9 et 259bis-10 du même Code ».

B.6.2. En vertu des articles 187bis, 191bis et 194bis, tels qu'ils ont été insérés dans le Code judiciaire par la loi du 7 avril 2005Documents pertinents retrouvés type loi prom. 07/04/2005 pub. 13/05/2005 numac 2005009279 source service public federal justice Loi insérant les articles 187bis, 187ter, 191bis, 191ter, 194bis et 194ter dans le Code judiciaire et modifiant les articles 259bis-9 et 259bis-10 du même code fermer précitée, une dispense de l'examen d'aptitude professionnelle est accordée à « toute personne qui a exercé la profession d'avocat à titre d'activité professionnelle principale pendant vingt ans au moins ou qui a exercé pendant quinze ans au moins cette activité à titre d'activité professionnelle principale et exercé pendant cinq ans au moins une fonction dont l'exercice nécessite une bonne connaissance du droit [...], pour autant que les conditions prévues à l'article 191bis, § § 2 et 3, soient respectées ». La personne dont la candidature est déclarée recevable par la commission de nomination et de désignation est invitée à un examen oral d'évaluation. Au terme de cet examen et sur la base, notamment, de l'avis écrit motivé d'un représentant du barreau, la commission décide, à la majorité des trois quarts des voix, si le demandeur a réussi l'examen oral d'évaluation et est autorisé à se porter candidat à une nomination. Cette autorisation est valable pendant trois ans (article 191bis, § § 2 et 3).

Contrairement à ce que prévoyait la loi du 15 juin 2001Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/06/2001 pub. 21/07/2001 numac 2001009548 source ministere de la justice Loi modifiant les articles 190, 194, 259bis 9, 259bis 10, 259octies et 371 du Code judiciaire, insérant l'article 191bis dans le Code judiciaire et modifiant l'article 21 de la loi du 18 juillet 1991 modifiant les règles du Code judiciaire relatives à la formation et au recrutement des magistrats type loi prom. 15/06/2001 pub. 25/08/2001 numac 2001009446 source ministere de la justice Loi modifiant l'article 357 du Code judiciaire fermer, la possibilité de se porter candidat via la troisième voie d'accès n'est plus limitée aux fonctions de juge au tribunal de première instance, au tribunal de commerce et au tribunal du travail (article 191bis), elle est étendue aux fonctions de juge de paix et de juge au tribunal de police (article 187bis), ainsi qu'aux fonctions de substitut du procureur du Roi et de substitut de l'auditeur du travail (article 194bis).

B.6.3. Les articles 187ter, 191ter et 194ter, tels qu'ils ont été insérés dans le Code judiciaire par la loi du 7 avril 2005Documents pertinents retrouvés type loi prom. 07/04/2005 pub. 13/05/2005 numac 2005009279 source service public federal justice Loi insérant les articles 187bis, 187ter, 191bis, 191ter, 194bis et 194ter dans le Code judiciaire et modifiant les articles 259bis-9 et 259bis-10 du même code fermer précitée, limitent le nombre de candidats pouvant être nommés à ces fonctions : ce nombre ne peut excéder 12 % du nombre total, respectivement, des juges de paix et des juges au tribunal de police du ressort de la cour d'appel, des juges des tribunaux de première instance, des tribunaux de commerce et des tribunaux du travail situés dans le ressort de la cour d'appel ou de la cour du travail et des substituts du procureur du Roi et des substituts de l'auditorat du travail du ressort de la cour d'appel ou de la cour du travail.

B.6.4. Au sujet de ces modifications, les travaux préparatoires indiquent : « La loi du 15 juin 2001Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/06/2001 pub. 21/07/2001 numac 2001009548 source ministere de la justice Loi modifiant les articles 190, 194, 259bis 9, 259bis 10, 259octies et 371 du Code judiciaire, insérant l'article 191bis dans le Code judiciaire et modifiant l'article 21 de la loi du 18 juillet 1991 modifiant les règles du Code judiciaire relatives à la formation et au recrutement des magistrats type loi prom. 15/06/2001 pub. 25/08/2001 numac 2001009446 source ministere de la justice Loi modifiant l'article 357 du Code judiciaire fermer a instauré une troisième voie d'accès à la magistrature, l'examen oral d'évaluation.

Les articles 3, 5 et 6, relatifs à la troisième voie d'accès, ont été annulés par l'arrêt n° 14/2003 de la Cour d'arbitrage du 28 janvier 2003.

La Cour d'arbitrage était d'opinion que cette troisième voie d'accès ne peut être ouverte que dans une très faible proportion, sous peine de méconnaître les objectifs que le législateur s'est fixés et de tromper les attentes légitimes de ceux qui se soumettent aux épreuves du concours ou de l'examen.

Ce projet de loi a pour but de restaurer cette troisième voie d'accès en tenant compte des remarques de la Cour d'arbitrage.

La création d'une troisième voie d'accès n'ayant pas été remise en cause par la Cour d'arbitrage, le présent projet rend ce nouveau mode d'accès également applicable aux juges de paix, aux juges de police et aux substituts des parquets près les tribunaux de première instance et près les tribunaux du travail, en limitant à 12 % du cadre des magistrats par ressort de Cour d'appel le nombre de magistrats qui peuvent être nommés selon cette troisième voie, et ce afin de répondre à l'exigence posée par la Cour d'arbitrage » (Doc. parl., Chambre, 2003-2004, DOC 51-1247/001, p. 3).

Les travaux préparatoires mentionnent également : « Ce projet correspond à une large demande des praticiens du droit.

Cette troisième voie offre à de potentiels éléments de valeur, qui peuvent justifier d'une carrière juridique appréciable, la possibilité de venir renforcer la magistrature. Etant donné qu'ils ont atteint dans leur vie et dans leur carrière un niveau qui ne les encourage sans doute pas à présenter un examen écrit traditionnel, il fallait élaborer un autre mode de sélection afin d'encourager ces personnes à rejoindre la magistrature » (Doc. parl., Chambre, 2004-2005, DOC 51-1247/007, p. 5).

B.7. Saisie de plusieurs recours en annulation de la loi du 7 avril 2005Documents pertinents retrouvés type loi prom. 07/04/2005 pub. 13/05/2005 numac 2005009279 source service public federal justice Loi insérant les articles 187bis, 187ter, 191bis, 191ter, 194bis et 194ter dans le Code judiciaire et modifiant les articles 259bis-9 et 259bis-10 du même code fermer précitée, la Cour a jugé, par son arrêt n° 142/2006 du 20 septembre 2006, que la différence de traitement que cette loi instaure entre, d'une part, les avocats dispensés de l'examen d'aptitude professionnelle et, d'autre part, les lauréats de l'examen d'aptitude professionnelle et les stagiaires judiciaires est raisonnablement justifiée et, en particulier, qu'en limitant à 12 % du nombre total de magistrats composant le cadre du personnel des juridictions, par ressort, le nombre de personnes pouvant être nommées sur la base de l'examen oral d'évaluation visé à l'article 191bis, § 2, du Code judiciaire, le législateur a pris une mesure pertinente, eu égard à l'objectif poursuivi : « B.8.1. Les deux premiers moyens dans l'affaire n° 3809 sont pris de la violation des articles 10 et 11, combinés avec les articles 151, § 4, et 153, de la Constitution, en ce que la loi attaquée créerait une discrimination au détriment des stagiaires et des lauréats de l'examen d'aptitude professionnelle.

B.8.2. La différence de traitement entre, d'une part, les avocats dispensés de l'examen d'aptitude professionnelle et, d'autre part, les lauréats de l'examen d'aptitude professionnelle et les stagiaires judiciaires repose sur un critère objectif, à savoir le nombre d'années durant lesquelles les avocats concernés ont acquis une expérience au barreau, éventuellement complété par une expérience dans une fonction dont l'exercice nécessite une bonne connaissance du droit.

B.9. Le législateur peut considérer que les personnes ayant une longue expérience de la pratique du barreau doivent être encouragées à poser leur candidature à une fonction dans la magistrature. Lors de l'adoption de la loi du 18 juillet 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 18/07/1991 pub. 04/04/2018 numac 2018030682 source service public federal interieur Loi organique du contrôle des services de police et de renseignement et de l'Organe de coordination pour l'analyse de la menace. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, qui a modifié les règles relatives à la nomination des magistrats, il apparaissait déjà que le Gouvernement avait, à l'époque, manifesté ' son plus grand intérêt à l'accès aux fonctions de magistrats, des avocats et autres juristes ayant une réelle expérience professionnelle ' et qu'il s'était rallié à l'opinion selon laquelle une longue expérience, notamment au barreau, peut ' faire présumer de grandes qualités professionnelles, celles-ci étant d'ailleurs vérifiées par un examen tandis que les qualités humaines du candidat seront logiquement connues du comité chargé de donner un avis au ministre avant la nomination ' (Doc. parl., Sénat, 1989-1990, n° 974-1, p. 10). Il fut encore précisé, au cours des travaux préparatoires de la loi du 18 juillet 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 18/07/1991 pub. 04/04/2018 numac 2018030682 source service public federal interieur Loi organique du contrôle des services de police et de renseignement et de l'Organe de coordination pour l'analyse de la menace. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, que le ministre ' aurait préféré exiger d'abord un stage au barreau, qui aurait été suivi de l'examen et, enfin, du stage judiciaire ' mais qu'il a renoncé à cette solution qui ' s'est heurtée à des objections d'ordre social ' (Doc. parl., Sénat, 1989-1990, n° 974-2, p. 31).

B.10. Les modifications apportées à la loi du 18 juillet 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 18/07/1991 pub. 04/04/2018 numac 2018030682 source service public federal interieur Loi organique du contrôle des services de police et de renseignement et de l'Organe de coordination pour l'analyse de la menace. - Coordination officieuse en langue allemande fermer ont néanmoins eu pour effet que, depuis la loi du 22 décembre 1998, la pratique du barreau n'est pas exigée des candidats au concours d'admission au stage judiciaire, de telle sorte que des stagiaires pourront être nommés magistrats après avoir accompli un stage dans diverses institutions publiques ou privées, mais sans avoir d'expérience du barreau.

B.11. Il est vrai que les magistrats ayant été nommés dans leur fonction après avoir réussi l'examen d'aptitude professionnelle auront souvent eu une expérience du barreau. Toutefois, ainsi qu'il ressort des travaux préparatoires de la loi du 15 juin 2001Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/06/2001 pub. 21/07/2001 numac 2001009548 source ministere de la justice Loi modifiant les articles 190, 194, 259bis 9, 259bis 10, 259octies et 371 du Code judiciaire, insérant l'article 191bis dans le Code judiciaire et modifiant l'article 21 de la loi du 18 juillet 1991 modifiant les règles du Code judiciaire relatives à la formation et au recrutement des magistrats type loi prom. 15/06/2001 pub. 25/08/2001 numac 2001009446 source ministere de la justice Loi modifiant l'article 357 du Code judiciaire fermer, il apparaît que les avocats ayant pratiqué le barreau pendant au moins vingt ans se soumettent rarement à un tel examen et renoncent ainsi à entrer dans la magistrature (Doc. parl., Chambre, 2000-2001, DOC 50-0703/001, p. 4).

B.12. Il ressort des travaux préparatoires de la loi attaquée que le législateur a tenu compte d'un avis donné par le Conseil supérieur de la justice le 28 juin 2000 qui avait estimé notamment qu'une telle mesure était justifiée parce qu'elle modulerait le recrutement en fonction des âges et de l'expérience professionnelle et qu'elle favoriserait la mobilité (Doc. parl., Chambre, 2004-2005, DOC 51-1247/007, p. 5). Le même avis soulignait que le Conseil supérieur de la justice interviendrait à deux reprises avant que l'avocat puisse se porter candidat : une première fois pour apprécier la recevabilité de la candidature, une seconde fois pour l'examen oral d'évaluation.

Le même avis avait observé que ' les barreaux rendent obligatoire la formation permanente, de sorte que la qualité des candidats qui seront nommés sera garantie ' (ibidem).

B.13. En décidant d'ouvrir l'accès à la magistrature à des avocats, de la manière et pour les raisons énoncées ci-avant, le législateur a pris une mesure qui est pertinente pour atteindre l'objectif qu'il poursuit.

B.14. Il reste à examiner si la mesure dans laquelle ce recrutement est autorisé peut avoir les conséquences discriminatoires qui sont dénoncées par les parties requérantes.

B.15. Dans son arrêt n° 14/2003, la Cour a rappelé que, depuis la loi du 18 juillet 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 18/07/1991 pub. 04/04/2018 numac 2018030682 source service public federal interieur Loi organique du contrôle des services de police et de renseignement et de l'Organe de coordination pour l'analyse de la menace. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, le législateur a opté pour un mode de recrutement dans la magistrature qui suppose que les candidats se soumettent à un concours ou à un examen permettant d'évaluer de manière objective s'ils possèdent la maturité et la capacité nécessaire[s] à l'exercice de la fonction de magistrat (article 259bis-9, § 1er, alinéa 2, du Code judiciaire).

Dans son examen de la loi du 15 juin 2001Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/06/2001 pub. 21/07/2001 numac 2001009548 source ministere de la justice Loi modifiant les articles 190, 194, 259bis 9, 259bis 10, 259octies et 371 du Code judiciaire, insérant l'article 191bis dans le Code judiciaire et modifiant l'article 21 de la loi du 18 juillet 1991 modifiant les règles du Code judiciaire relatives à la formation et au recrutement des magistrats type loi prom. 15/06/2001 pub. 25/08/2001 numac 2001009446 source ministere de la justice Loi modifiant l'article 357 du Code judiciaire fermer, la Cour a admis que les motifs présentement rappelés en B.9 peuvent amener le législateur à déroger à ces exigences pour permettre que des avocats expérimentés accèdent à la magistrature dès lors que leur longue expérience professionnelle révèle des qualités telles qu'il peut être justifié de les dispenser de l'examen d'aptitude professionnelle. La Cour a toutefois jugé à cette occasion que cette troisième voie d'accès ne pouvait être ouverte que dans une très faible proportion et aux conditions strictes de l'examen d'évaluation auxquelles cette catégorie de candidats doit en tout état de cause être soumise, sous peine de méconnaître les attentes légitimes de ceux qui se soumettent aux épreuves du concours ou de l'examen. En ne fixant pas cette proportion, le législateur était allé au-delà de ce qu'exigeait son souci de permettre que des avocats expérimentés puissent accéder à la magistrature.

B.16. Pour tenir compte de l'exigence, formulée par la Cour, d'une stricte limitation de l'accès à la magistrature par cette troisième voie, le législateur a fixé le nombre maximal des magistrats qui peuvent être recrutés par cette voie à 12 p.c. du nombre total, fixé par la loi, des magistrats du ressort de la cour d'appel ou de la cour du travail, dans chacune des trois catégories de magistrats décrites en B.1.5. Bien qu'il fût envisagé, dans un premier temps, d'arrêter cette proportion à 20 p.c. (Doc. parl., Chambre, DOC 51-1247/001, p. 16), elle a en définitive été fixée à 12 p.c. La section de législation du Conseil d'Etat, dans son avis du 3 mai 2004, a dit que cette proportion pouvait être considérée comme ne méconnaissant pas le sens que la Cour a entendu attacher aux termes ' très faible proportion ' (ibid.).

B.17. Les parties requérantes reprochent au législateur d'avoir fixé ce quota non par rapport aux places à pourvoir mais par rapport au nombre total, fixé par la loi, des magistrats du ressort de la cour d'appel ou de la cour du travail, dans chacune des trois catégories de magistrats.

B.18. En appliquant le quota maximal de 12 p.c., par ressort, au nombre total des magistrats composant le cadre du personnel des juridictions déterminées par la loi visée à l'article 186, alinéa 5, du Code judiciaire, le législateur a pris une mesure qui est conforme à l'objectif qu'il poursuit : ' la magistrature doit avoir un visage pluriel et les différentes tranches d'âge doivent y être représentées ' (Doc. parl., Sénat, 2004-2005, n° 3-976/4, p. 33). En exigeant une expérience professionnelle de vingt années, il ouvrait la troisième voie d'accès à des candidats ' qui auront au minimum 44 ans ', tandis que ' la moyenne d'âge pour les candidats à l'examen d'aptitude professionnelle est de 36 ans ' (ibid.).

B.19. Tout au long des débats parlementaires, le législateur a eu l'attention attirée, notamment par les représentants des stagiaires judiciaires, sur le risque de voir attribués tous les postes pourvus au cours d'une année judiciaire à des candidats issus de la troisième voie d'accès (ibid., pp. 10, 20 et 23). Des amendements ont été déposés qui proposaient, soit de calculer le pourcentage des places attribuées à la troisième voie d'accès sur le nombre de places déclarées vacantes au cours de chaque année civile, soit de prévoir un double plafond, l'un calculé sur le nombre des magistrats composant le cadre, l'autre sur le nombre de places vacantes (Doc. parl., Sénat, 2004-2005, n° 3-976/2; n° 3-976/3).

Ces amendements ont été rejetés, mais il a été tenu compte, dans une certaine mesure, des préoccupations qu'ils traduisaient en prévoyant une application progressive de la loi : la proportion maximale des magistrats issus de la troisième voie de recrutement sera de 4 p.c. la première année, 8 p.c. la deuxième et 12 p.c. à partir de la troisième (art. 10 de la loi).

B.20. La loi attaquée ne confère aucune priorité aux candidats qui auront réussi l'examen oral d'évaluation sur ceux qui auront réussi le concours ou l'examen d'aptitude. C'est à la commission de nomination et de désignation, dont les compétences ne sont pas modifiées sur ce point, qu'il appartiendra de comparer les mérites des candidats et de présenter ceux qui ont fait la preuve des plus grandes qualités.

Pour effectuer cette comparaison, la commission disposera, pour chacun des candidats, des avis prévus à l'article 259ter du Code judiciaire et, conformément à l'article 151, § 4, alinéa 1er, de la Constitution, elle ne pourra fonder ses présentations, qui doivent être motivées et recueillir la majorité des deux tiers, qu'' après évaluation de la compétence et de l'aptitude ' de chaque candidat, au regard des caractéristiques de la place déclarée vacante, et sans devoir atteindre les quotas de 4, 8 et 12 p.c. puisqu'il s'agit non d'une exigence mais d'un maximum.

Le cas échéant, il appartient au Conseil d'Etat de vérifier si, dans ses présentations, la commission de nomination et de désignation a respecté toutes les exigences précitées.

Pour tous ces motifs, en particulier l'exigence que la commission de nomination et de désignation tienne également compte, dans ses propositions, des caractéristiques de la place déclarée vacante, le législateur a raisonnablement pu considérer comme plutôt théorique le risque de nominations de masse de candidats provenant de la troisième voie d'accès (Doc. parl., Sénat, 2004-2005, n° 3-976/4, pp. 35-36).

B.21. Il est vrai que l'instauration de la troisième voie de recrutement pourrait aggraver la situation des stagiaires et porter atteinte à leurs attentes légitimes en augmentant le risque de ne pas pouvoir être nommés à l'issue de leur stage en raison de la présence de nouveaux concurrents. Ils se verraient alors victimes d'une différence de traitement injustifiée, puisque l'accomplissement d'un stage donne lieu, en règle générale, à une nomination, sauf si le stagiaire a fait l'objet d'une évaluation négative. Mais une telle discrimination serait due, non à l'application des dispositions attaquées, mais à l'absence d'un statut satisfaisant des stagiaires, dont il a été dit à plusieurs reprises, au cours des travaux préparatoires, qu'il faisait l'objet des préoccupations du Gouvernement (Doc. parl., Chambre, 2004-2005, DOC 51-1247/007, pp. 9 et 11).

B.22. Il découle de ce qui précède que les mesures critiquées ne créent pas de différence de traitement injustifiée au détriment des stagiaires et des lauréats de l'examen d'aptitude professionnelle.

B.23. Les deux premiers moyens dans l'affaire n° 3809 ne peuvent être accueillis ».

B.8. Bien qu'elle se soit prononcée, par les arrêts nos 14/2003 et 142/2006, précités, sur le choix de principe du législateur de créer une troisième voie d'accès à la magistrature pour les personnes disposant d'une longue expérience au barreau, la Cour ne s'est pas prononcée, par ces arrêts, sur la question de savoir si les conditions liées à cette voie d'accès doivent s'appliquer ou non aux candidats à une nomination qui exercent déjà une fonction de magistrat à laquelle ils ont accédé via cette troisième voie d'accès.

B.9. Par un avis du 17 octobre 2016 relatif à un « avant-projet de loi portant simplification, harmonisation, informatisation et modernisation de dispositions de droit civil et de procédure civile ainsi que du notariat, et portant diverses mesures en matière de justice », le Conseil supérieur de la Justice a observé : « Les articles 187ter (juges de paix et de police), 191ter (juges aux tribunaux de première instance, du travail et de commerce) et 194ter (substituts du procureur du Roi et de l'auditeur du travail) prévoient que le nombre de personnes nommées sur la base de l'examen oral d'évaluation ne peut excéder 12 % du nombre total de magistrats prévu par le cadre pour le ressort de la cour d'appel (ou, selon le cas, de la cour du travail), pour ces différentes catégories de magistrats.

Le problème est que, depuis l'entrée en vigueur de ces dispositions (à savoir, le 13 mai 2006), dans certains ressorts, la limite des 12 % est atteinte pour différentes catégories de magistrats, spécialement celles des juges de paix et des juges au tribunal de police. Il en résulte que les lauréats de l'examen oral d'évaluation qui souhaitent, par exemple, se porter candidats à une place de juge de paix (ce qui est fréquent, s'agissant de candidats très expérimentés disposant d'une expérience de plus de 20 ans de barreau) se trouvent dans l'impossibilité de postuler en raison de cette limite des 12 %. De plus, compte tenu de l'interprétation que les services du SPF Justice font des dispositions précitées (à savoir que, pour le calcul des 12 %, il convient de comptabiliser toutes les primo-nominations sur la base de l'examen oral d'évaluation, même en cas de nomination à une autre fonction ou de promotion ultérieure), cette situation de blocage peut durer de nombreuses années, ce qui n'est certainement pas le voeu du législateur. Dans ces conditions, se pose la question de l'effectivité même de cette troisième voie d'accès à la magistrature.

Selon le Conseil supérieur, sous peine de ' bloquer ' le système, la limite des 12 % ne doit s'appliquer qu'aux primo-nominations, c'est-à-dire aux personnes qui accèdent à la magistrature sur la base de l'examen oral d'évaluation, et ne doit donc pas concerner les magistrats, qui, après un accès via la troisième voie, ont été nommés ou promus à une autre fonction.

Pour ces motifs, le Conseil supérieur préconise la suppression de cette limite de 12 % ou, à tout le moins, une clarification de son champ d'application (uniquement les primo-nominations) » (Conseil supérieur de la Justice, avis du 17 octobre 2016, p. 10).

B.10. Comme il est dit en B.6.1 à B.6.4, la disposition en cause a été insérée dans le Code judiciaire par la loi du 7 avril 2005Documents pertinents retrouvés type loi prom. 07/04/2005 pub. 13/05/2005 numac 2005009279 source service public federal justice Loi insérant les articles 187bis, 187ter, 191bis, 191ter, 194bis et 194ter dans le Code judiciaire et modifiant les articles 259bis-9 et 259bis-10 du même code fermer. Par cette loi, le législateur non seulement a voulu rencontrer les objections formulées par la Cour dans son arrêt n° 14/2003 du 28 janvier 2003, mais il a également réaffirmé sa volonté de créer une troisième voie d'accès à la magistrature pour les personnes disposant d'une longue expérience au barreau, afin de concrétiser son objectif d'une magistrature à « visage pluriel », dans laquelle « les différentes tranches d'âge [sont] représentées » (Doc. parl., Sénat, 2004-2005, n° 3-976/4, p. 33).

B.11. Il ressort de l'avis du Conseil supérieur de la Justice cité en B.9 que l'application du quota de 12 % aux nominations dites « ultérieures » peut porter atteinte à « l'effectivité même de cette troisième voie d'accès à la magistrature », en raison d'un blocage de cette voie d'accès durant de nombreuses années. Dans l'interprétation selon laquelle le quota de 12 % doit s'appliquer non seulement aux « primo-nominations », mais aussi aux nominations ultérieures, la différence de traitement créée par la disposition en cause entre les candidats à une fonction de magistrat qui exercent déjà une autre fonction de magistrat n'est ainsi pas pertinente au regard des objectifs que le législateur poursuit par la troisième voie d'accès à la magistrature. En outre, dans cette interprétation, cette disposition porte une atteinte discriminatoire aux possibilités de carrière des personnes qui exercent déjà la fonction de magistrat. En effet, par rapport aux règles relatives aux conditions de nomination à une certaine fonction dans la magistrature, les personnes qui exercent la fonction de magistrat et qui ont donc déjà obtenu l'« accès » à la magistrature ne se trouvent pas, lorsqu'elles posent leur candidature, dans des situations fondamentalement différentes selon la manière dont elles ont accédé à leur fonction dans le passé. La différence de traitement créée par la disposition en cause, dans l'interprétation précitée, entre les catégories de magistrats visées dans la question préjudicielle n'est pas raisonnablement justifiée.

B.12. Dans l'interprétation selon laquelle elle est applicable non seulement aux candidats qui ont réussi l'examen oral d'évaluation visé à l'article 191bis du Code judiciaire et qui n'exercent pas encore une fonction de magistrat (les « primo-nominations »), mais aussi aux candidats qui exercent déjà une fonction de magistrat à laquelle ils ont accédé après avoir réussi l'examen oral d'évaluation (les nominations ultérieures), la disposition en cause n'est pas compatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution.

B.13. Toutefois, la disposition en cause pourrait aussi recevoir une autre interprétation, selon laquelle le quota de 12 % qu'elle vise est uniquement applicable aux « primo-nominations » et ne l'est donc pas aux nominations ultérieures de candidats qui exercent déjà une fonction de magistrat. Ainsi que l'a observé le Conseil supérieur de la Justice dans l'avis précité, ce n'était en effet « certainement pas le voeu du législateur » que les dispositions que ce dernier a adoptées en ce qui concerne la troisième voie d'accès à la magistrature soient interprétées en manière telle que leur application entraîne un blocage de cette voie d'accès durant de nombreuses années.

En outre, il peut se déduire de l'esprit des dispositions du Code judiciaire qui règlent la troisième voie d'accès à la magistrature que, par cette voie d'accès, le législateur a visé les « primo-nominations ».

B.14. Dans cette interprétation, la disposition en cause ne crée pas une différence de traitement entre les catégories de magistrats visées dans la question préjudicielle.

B.15. Dans l'interprétation selon laquelle elle est uniquement applicable aux candidats qui ont réussi l'examen oral d'évaluation visé à l'article 191bis du Code judiciaire et qui n'exercent pas encore une fonction de magistrat (les « primo-nominations »), et non aux candidats qui exercent déjà une fonction de magistrat à laquelle ils ont accédé après avoir réussi l'examen oral d'évaluation précité (les nominations ultérieures), la disposition en cause est compatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : - Dans l'interprétation selon laquelle l'article 187ter du Code judiciaire est applicable non seulement aux candidats qui ont réussi l'examen oral d'évaluation visé à l'article 191bis du Code judiciaire et qui n'exercent pas encore une fonction de magistrat, mais aussi aux candidats qui exercent déjà une fonction de magistrat à laquelle ils ont accédé après avoir réussi l'examen oral d'évaluation précité, cette disposition viole les articles 10 et 11 de la Constitution. - Dans l'interprétation selon laquelle l'article 187ter du Code judiciaire est exclusivement applicable aux candidats qui ont réussi l'examen oral d'évaluation visé à l'article 191bis du Code judiciaire et qui n'exercent pas encore une fonction de magistrat, et non aux candidats qui exercent déjà une fonction de magistrat à laquelle ils ont accédé après avoir réussi l'examen oral d'évaluation précité, cette disposition ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution.

Ainsi rendu en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 25 février 2021.

Le greffier, F. Meersschaut Le président, F. Daoût

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