Etaamb.openjustice.be
Arrêt
publié le 06 août 2015

Extrait de l'arrêt n° 91/2015 du 18 juin 2015 Numéro du rôle : 5902 En cause : la question préjudicielle relative à l'article 2 du décret de la Région flamande du 15 juillet 1997 contenant le Code flamand du Logement et aux articles 1 er composée des présidents A. Alen et J. Spreutels, et des juges E. De G

source
cour constitutionnelle
numac
2015203492
pub.
06/08/2015
prom.
--
moniteur
https://www.ejustice.just.fgov.be/cgi/article_body(...)
Document Qrcode

COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 91/2015 du 18 juin 2015 Numéro du rôle : 5902 En cause : la question préjudicielle relative à l'article 2 du décret de la Région flamande du 15 juillet 1997 contenant le Code flamand du Logement et aux articles 1er, 10° et 17°, 3, 7 et 14 de l'arrêté du Gouvernement flamand du 12 octobre 2007 réglementant le régime de location sociale et portant exécution du titre VII du Code flamand du Logement, posée par le Juge de paix du canton de Furnes-Nieuport, siège Furnes.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents A. Alen et J. Spreutels, et des juges E. De Groot, L. Lavrysen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke, T. Merckx-Van Goey, P. Nihoul, F. Daoût, T. Giet et R. Leysen, assistée du greffier F. Meersschaut, présidée par le président A. Alen, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet de la question préjudicielle et procédure Par jugement du 22 avril 2014 en cause de la SC SCRL « Woonmaatschappij IJzer & Zee » contre Adjetey Afatsawo, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 14 mai 2014, le Juge de paix du canton de Furnes-Nieuport, siège de Furnes, a posé la question préjudicielle suivante : « L'article 2 du décret du 15 juillet 1997 contenant le Code flamand du Logement et les articles 1er, 10°, 1er, 17°, 3, 7 et 14 de l'arrêté du Gouvernement flamand du 12 octobre 2007 réglementant le régime de location sociale et portant exécution du titre VII du Code flamand du Logement violent-ils les articles 10, 11, 22 et/ou 23 de la Constitution lorsqu'ils sont interprétés en ce sens qu'une distinction est faite, vis-à-vis d'un locataire qui remplit les conditions pour louer un logement social et tient un logement social en location, selon que ce locataire : - après que le contrat de bail social a pris cours, entretient une relation durable avec une personne qui remplit les conditions d'admission pour être qualifiée de locataire social; - après que le contrat de bail a pris cours, entretient une relation durable avec une personne qui ne remplit pas les conditions d'admission pour être qualifiée de locataire social; compte tenu de ce que dans la première hypothèse, le locataire et son ou sa partenaire peuvent cohabiter dans le logement social qu'il loue, tandis que cela n'est légalement pas possible dans la seconde hypothèse ? ». (...) III. En droit (...) B.1. Le décret du 15 juillet 1997 contenant le Code flamand du Logement (ci-après : le Code flamand du logement) vise à garantir le droit à un logement décent. Il encourage à cette fin la mise à disposition d'un logement adapté, de bonne qualité, dans un environnement correct, à prix raisonnable et offrant une sécurité de logement (article 3).

Pour réaliser cet objectif, l'un des moyens consiste à mettre à disposition à des conditions sociales des habitations sociales de location ou d'achat, en particulier pour les ménages et isolés les plus démunis (article 4, § 1er). La politique flamande du logement est axée sur la réalisation de chances de développement optimales pour chacun, sur une viabilité optimale des quartiers, sur la promotion de l'intégration d'habitants dans la société et sur la promotion de chances égales pour chacun (article 4, § 2).

La mission principale des sociétés de logement social est d'améliorer les conditions de logement des familles et personnes isolées mal logées en assurant une offre suffisante d'habitations sociales de location et d'achat. Le financement des sociétés de logement social est principalement supporté par la Région flamande.

B.2. Le juge a quo demande à la Cour si l'article 2 du Code flamand du logement et les articles 1er, 10° et 17°, 3, 7 et 14 de l'arrêté du Gouvernement flamand du 12 octobre 2007 réglementant le régime de location sociale et portant exécution du titre VII du Code flamand du Logement violent les articles 10, 11, 22 et 23 de la Constitution lorsqu'ils sont interprétés en ce sens qu'une distinction est faite entre les locataires qui remplissent les conditions pour louer un logement social, selon que ces locataires, après que le contrat de bail social a pris cours, entretiennent une relation durable avec une personne qui remplit ou non les conditions d'admission pour être qualifiée de locataire social, de sorte que dans la première hypothèse, le locataire peut cohabiter avec son ou sa partenaire dans le logement social qu'il loue, tandis qu'il ne le peut pas dans la seconde hypothèse.

B.3.1. Il ressort de la décision de renvoi que la question préjudicielle porte uniquement sur l'article 2, § 1er, alinéa 1er, 34°, du Code flamand du logement, qui définit comme suit le locataire d'une habitation sociale : « a) la personne qui, lors de l'inscription pour une habitation sociale de location, s'est présentée comme locataire de référence, et la personne qui, au début du contrat de location, est mariée ou cohabite légalement avec cette personne ou qui, au début du contrat de location, est le/la partenaire de fait de cette personne; b) la personne qui, après que le contrat de location prend cours, se marie ou cohabite légalement avec la personne, visée au point a), et qui cosigne le contrat de location ou le/la partenaire de fait qui cohabite pendant une année en tant que locataire tel/telle que visé(e) au point c) avec la personne, visée au point a);c) toute autre personne que les personnes, visées aux points a) et b), à l'exception des enfants mineurs qui ont leur domicile principal dans l'habitation sociale de location, et qui cosignent le contrat de location;».

B.3.2. La question préjudicielle porte sur les conditions que le partenaire d'un locataire social doit remplir pour être considéré, après que le contrat de bail a pris cours, comme un locataire social, et donc sur les litterae b) et c) de la disposition précitée.

B.4.1. Le juge a quo renvoie en outre aux articles 1er, 10° et 17°, 3, 7 et 14 de l'arrêté du Gouvernement flamand du 12 octobre 2007 réglementant le régime de location sociale et portant exécution du titre VII du Code flamand du Logement. D'après ces dispositions, pour pouvoir être inscrit dans le registre d'inscription des habitations sociales et pour être admis à ce logement, tout candidat locataire doit remplir certaines conditions, et notamment être inscrit dans les registres de la population.

B.4.2. Le juge a quo déduit de la réglementation précitée que le partenaire d'un locataire social, qui - dans les circonstances de l'instance soumise au juge a quo - serait tenu d'adhérer au bail en cours, doit remplir les mêmes conditions d'admission qu'un candidat locataire. La Cour doit donc également tenir compte de l'article 95, § 1er, alinéa 1er, 5°, et alinéa 2, du Code flamand du logement, tel qu'il a été inséré par le décret du 31 mai 2013, qui dispose : « Le candidat-locataire ne peut être admis à une habitation sociale de location que lorsqu'il prouve : [...] 5° être inscrit dans les registres de la population, visés à l'article 1er, § 1er, alinéa premier, 1°, de la loi du 19 juillet 1991 relative aux registres de la population, aux cartes d'identité, aux cartes d'étranger et aux documents de séjour et modifiant la loi du 8 août 1983 organisant un Registre national des personnes physiques, ou être inscrit en adresse de référence tel que visé à l'article 1er, § 2, de la loi précitée. Une personne ne peut accéder à un contrat de location courant que lorsqu'elle démontre qu'elle répond aux conditions, visées à l'alinéa premier, à l'exception de la condition relative au revenu, et lorsque l'accès n'aboutit pas à une habitation sociale de location qui est une habitation inadaptée ».

B.4.3. L'article 1er, § 1er, alinéa 1er, de la loi précitée du 19 juillet 1991 dispose : « Dans chaque commune, sont tenus : 1° des registres de la population dans lesquels sont inscrits au lieu où ils ont établi leur résidence principale, qu'ils y soient présents ou qu'ils en soient temporairement absents, les Belges et les étrangers admis ou autorisés à séjourner plus de trois mois dans le Royaume, autorisés à s'y établir, ou les étrangers inscrits pour une autre raison conformément aux dispositions de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers, à l'exception des étrangers qui sont inscrits au registre d'attente visé au 2°;2° un registre d'attente dans lequel sont inscrits au lieu où ils ont établi leur résidence principale, les étrangers qui introduisent une demande d'asile et qui ne sont pas inscrits à un autre titre dans les registres de la population ». B.4.4. Il ressort de ce qui précède que ce partenaire du locataire de référence doit être inscrit dans le registre de la population ou dans le registre des étrangers. Dans l'affaire devant le juge a quo, cette condition n'était pas remplie parce que la personne étrangère en question était inscrite dans le registre d'attente des étrangers dans l'attente d'une décision sur sa demande d'asile. La Cour limite son examen à ce cas.

B.5.1. Les articles 10 et 11 de la Constitution garantissent le principe d'égalité et de non-discrimination. Ce principe n'exclut pas qu'une différence de traitement soit établie entre des catégories de personnes, pour autant qu'elle repose sur un critère objectif et qu'elle soit raisonnablement justifiée.

L'existence d'une telle justification doit s'apprécier en tenant compte du but et des effets de la mesure critiquée, ainsi que de la nature des principes en cause; le principe d'égalité et de non-discrimination est violé lorsqu'il est établi qu'il n'existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.

B.5.2. L'article 22 de la Constitution dispose : « Chacun a droit au respect de sa vie privée et familiale, sauf dans les cas et conditions fixés par la loi.

La loi, le décret ou la règle visée à l'article 134 garantissent la protection de ce droit ».

B.5.3. L'article 23 de la Constitution dispose : « Chacun a le droit de mener une vie conforme à la dignité humaine.

A cette fin, la loi, le décret ou la règle visée à l'article 134 garantissent, en tenant compte des obligations correspondantes, les droits économiques, sociaux et culturels, et déterminent les conditions de leur exercice.

Ces droits comprennent notamment : [...] 3° le droit à un logement décent; [...] ».

B.5.4. Il ressort des travaux préparatoires de l'article 22 de la Constitution que le Constituant a recherché la plus grande concordance possible avec l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme (Doc. parl., Chambre, 1992-1993, n° 997/5, p. 2).

B.5.5. Cet article 8 dispose : « 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ». B.5.6. Selon la Cour européenne des droits de l'homme, l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme ne confère aucun droit au logement. Toutefois, dès lors que les Etats accordent des avantages de ce type, ils doivent le faire en conformité avec le principe d'égalité. De plus, les conditions imposées en matière de logement touchent à la vie familiale des intéressés (CEDH, 27 septembre 2011, Bah c. Royaume-Uni, § 40). Les Etats membres disposent d'une marge d'appréciation relativement étendue pour réglementer le logement social, qui constitue une matière socio-économique (ibid., § 47). Les Etats peuvent réserver à certaines catégories d'étrangers des avantages en matière de logement social, qui pèsent lourdement sur les moyens publics (ibid., § 49). La Cour européenne a aussi admis que la nature du statut de séjour peut justifier une différence de traitement entre étrangers lors de l'octroi d'avantages sociaux, dans la mesure où les étrangers qui ne séjournent que brièvement sur le territoire ou y sont en séjour illégal ne contribuent pas aux moyens publics (CEDH, 21 juin 2011, Ponomaryovi, c. Bulgarie, § 54).

L'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme ne reconnaît pas le droit d'un étranger à séjourner dans un pays déterminé. La Cour européenne des droits de l'homme a jugé à maintes reprises que « d'après un principe de droit international bien établi, les Etats ont le droit, sans préjudice des engagements découlant pour eux de traités, de contrôler l'entrée des non-nationaux sur leur sol » (CEDH, 28 mai 1985, Abdulaziz, Cabales et Balkandali c. Royaume-Uni, § 67; 21 octobre 1997, Boujlifa c. France, § 42; 18 octobre 2006, Üner c. Pays-Bas, § 54;31 octobre 2008, Darren Omoregie e.a. c.

Royaume-Uni, § 54). Plus particulièrement, cet article n'implique pas l'obligation pour un Etat d'autoriser le regroupement familial sur son territoire. En effet, la Cour européenne a précisé que « l'article 8 ne saurait s'interpréter comme comportant pour un Etat contractant l'obligation générale de respecter le choix, par des couples mariés, de leur domicile commun et d'accepter l'installation de conjoints non nationaux dans le pays » (CEDH, Abdulaziz, Cabales et Balkandali, précité, § 68; Darren Omoregie e.a., précité, § 57; 29 juillet 2010, Mengesha Kimfe c. Suisse, § 61; 6 novembre 2012, Hode et Abdi c.

Royaume-Uni, § 43). Enfin, la protection de la vie familiale ne peut être invoquée que par des personnes qui constituent de facto une famille. Le désir de fonder une famille ne tombe pas sous cette protection.

B.6. Les dispositions citées en B.3.1 et B.4.2 ont été insérées dans le Code flamand du logement par les articles 3, 6°, et 50, 3°, du décret du 31 mai 2013 portant modification de divers décrets relatifs au logement. Elles sont entrées en vigueur le 23 décembre 2013.

B.7.1. Le décret précité a fait l'objet d'un recours en annulation dans l'affaire n° 5808. Les parties requérantes ont notamment demandé l'annulation de l'article 50, 3°, qui a inséré dans l'article 95, § 1er, l'alinéa 2 précité, selon lequel une personne ne peut adhérer à un contrat de bail en cours que si elle démontre qu'elle répond aux conditions d'admission visées à l'alinéa 1er, à l'exception de la condition relative au revenu, et si cette adhésion n'a pas pour effet de rendre inadaptée une habitation sociale de location.

B.7.2. Par son arrêt n° 24/2015 du 5 mars 2015, la Cour a rejeté les griefs pris de la violation des dispositions mentionnées plus haut.

Cependant, elle s'est prononcée sur d'autres conditions d'admission, notamment la volonté d'apprendre le néerlandais et, si le décret du 28 février 2003 relatif à la politique flamande d'intégration civique trouve à s'appliquer, la volonté de suivre le parcours d'intégration civique. La Cour ne s'est pas prononcée sur la condition d'inscription - qui est en cause en l'espèce - dans les registres de la population ou dans le registre des étrangers du partenaire d'un locataire social, qui serait tenu d'adhérer au bail en cours.

B.8.1. Selon l'article 92, § 3, du Code flamand du logement, le locataire doit communiquer immédiatement au bailleur toute modification de personnes occupant l'habitation sociale de location de façon durable. L'article 98, § 3, assimile le non-respect de cette obligation à une faute grave pouvant conduire à la résiliation du contrat de location.

B.8.2. Le conjoint ou le partenaire du locataire de référence qui souhaite cohabiter avec lui de façon durable dans le logement social après que le contrat de location a pris cours est considéré comme locataire social et doit remplir les conditions d'admission prévues par l'article 95, § 1er, alinéa 1er, du Code flamand du logement, à l'exception de la condition de revenu. Comme le locataire de référence, ce partenaire doit donc notamment être inscrit dans le registre de la population ou dans le registre des étrangers.

B.9. Les étrangers inscrits dans le registre d'attente ne satisfont pas aux conditions d'admission à un logement social et ne peuvent adhérer à un contrat de location qui a pris cours pour un tel logement. Sont inscrits dans le registre d'attente, les étrangers qui ont demandé la reconnaissance du statut de réfugié, mais qui sont en attente d'une décision. Il n'est donc pas certain qu'un permis de séjour pourra leur être accordé. Si ce n'est pas le cas, leur situation de séjour ne sera plus légale et ils devront quitter le territoire.

B.10. Selon le Gouvernement flamand, la mesure en cause poursuit un double objectif. Elle vise tout d'abord à répartir de manière équitable les deniers publics limités dans le domaine du logement social. Elle chercherait en second lieu à mettre la politique de l'autorité flamande en matière d'accès au logement social en adéquation avec la politique fédérale en matière de séjour.

B.11.1. La mise à disposition d'un logement social entraîne pour le locataire un avantage pécuniaire important, financé par des moyens publics, qui consiste en la jouissance d'une habitation à un loyer qui est inférieur au prix du marché. Lorsqu'il octroie des avantages sociaux à des étrangers, le législateur décrétal peut tenir compte de la nature de leur statut de séjour et de la durabilité de leur séjour.

B.11.2. A la lumière du deuxième objectif, il apparaît comme une mesure pertinente de n'offrir aux étrangers la possibilité de s'inscrire pour un logement social, d'être admis à un tel logement en tant que locataire social et de signer le contrat de bail, que lorsqu'il est établi, après une décision de l'autorité fédérale, qu'ils pourront séjourner de façon durable et légale sur le territoire.

B.11.3. Il n'est donc pas sans justification raisonnable qu'un étranger qui est le partenaire d'un locataire d'un logement social et qui souhaite occuper ce logement de façon permanente après que le contrat de location a pris cours, doive également être inscrit dans le registre de la population ou dans le registre des étrangers, avant de pouvoir adhérer à un contrat de bail social.

B.12. Selon le juge a quo, les dispositions en cause doivent être interprétées en ce sens que, dans le cas d'une cohabitation permanente, l'intéressé doit toujours adhérer au contrat de bail en cours et doit, par conséquent, remplir les conditions fixées à l'article 95, § 1er, du Code flamand du logement. Il en conclut que le partenaire du locataire social, qui entretient une relation durable avec ce dernier, mais qui ne remplit pas ces conditions, ne peut pas habiter dans l'habitation sociale de location avec le locataire de référence initial, ce qui entraînerait la différence de traitement au sujet de laquelle la Cour est interrogée.

B.13.1. Il ressort de la genèse de la disposition en cause que le législateur décrétal a voulu établir une distinction entre, d'une part, une cohabitation permanente dans un logement social, pour laquelle les conditions énoncées par l'article 95, § 1er, alinéa 1er, du Code flamand du logement s'appliquent, et, d'autre part, une occupation temporaire ou occasionnelle, à laquelle ces conditions ne s'appliquent pas.

B.13.2. Les conditions énoncées par l'article 95, § 1er, du Code flamand du logement s'appliquent à toute personne souhaitant occuper de manière permanente le logement social en qualité de locataire. Des séjours temporaires, comme l'hébergement d'une personne dispensant des soins ou l'hébergement temporaire de membres de la famille ou d'amis, ne sont pas soumis aux conditions d'admission du Code flamand du logement (Doc. parl., Parlement flamand, 2005-2006, n° 824/1, pp. 8-9). Les litiges concernant la nature de l'hébergement peuvent être déférés aux instances compétentes, sous contrôle du juge.

B.14. L'inscription d'un demandeur d'asile dans le registre d'attente pour les étrangers est une situation qui est nécessairement temporaire, étant donné qu'après l'examen de la demande d'asile, elle sera suivie par une inscription dans le registre des étrangers ou par un ordre de quitter le territoire. Etant donné que durant l'inscription dans le registre d'attente, il n'est pas encore certain que l'étranger concerné obtiendra un permis de séjour, il n'est pas possible de considérer qu'il pourra séjourner de manière permanente dans le logement social de son partenaire.

B.15. L'article 2, § 1er, alinéa 1er, 34°, du Code flamand du logement affecte le droit au respect de la vie familiale et le droit au logement de manière disproportionnée s'il est interprété en ce sens qu'un demandeur d'asile qui séjourne dans l'habitation sociale de location de son partenaire, avec qui il a une relation durable, soit considéré, dans l'attente d'une décision concernant sa demande d'asile, comme un locataire social occupant le logement social de manière permanente et étant par conséquent soumis aux conditions fixées dans l'article 95, § 1er, alinéas 1er et 2, du Code flamand du logement.

B.16. Sans doute la Cour doit-elle, dans le domaine de la politique du logement, respecter l'appréciation des législateurs régionaux quant à l'intérêt général, sauf si cette appréciation est manifestement déraisonnable (arrêt n° 33/2007, B.5.3; arrêt n° 62/2007, B.5.3; arrêt n° 155/2007, B.6; arrêt n° 64/2015, B.6), mais ce pouvoir d'appréciation est moins large lorsque cette politique de logement risque d'entraîner pour une certaine catégorie de personnes la perte de leur logement, ce qui est effectivement considéré comme une des ingérences les plus extrêmes dans le droit au respect du logement (arrêt n° 101/2008, B.23.3; arrêt n° 64/2015, B.21.2; CEDH, 13 mai 2008, McCann c. Royaume-Uni, § 50).

B.17. Les dispositions en cause peuvent également être interprétées en ce sens que le séjour d'un demandeur d'asile dans le logement social de son partenaire avec qui il a une relation durable soit considéré, dans l'attente de la décision relative à sa demande d'asile et au plus tard jusqu'à cette décision, comme une cohabitation temporaire qui n'est pas soumise aux conditions d'admission prévues par l'article 95, § 1er, alinéas 1er et 2, du Code flamand du logement. Ainsi, cette cohabitation est régulière et ne peut entraîner la résiliation du bail.

Après une décision positive sur la demande d'asile, l'étranger concerné sera inscrit dans le registre des étrangers et pourra séjourner de manière permanente avec son partenaire dans l'habitation sociale de location et adhérer au contrat de bail, pourvu qu'il remplisse également les autres conditions visées dans l'article 95, § 1er, alinéas 1er et 2, du Code flamand du logement.

Cependant, il ne saurait en aucun cas s'agir d'une cohabitation régulière lorsque l'étranger concerné, à la suite d'une décision négative concernant sa demande d'asile, ne séjourne plus légalement sur le territoire. La cohabitation dans le logement social, au cours de l'examen de la demande d'asile, ne peut pas davantage contrecarrer la politique fédérale en matière d'asile. En cas de contestation, il appartient à l'autorité compétente, sous contrôle juridictionnel, d'apprécier si la cohabitation est régulière.

B.18. Dans l'interprétation mentionnée en B.17, les dispositions en cause ne sont pas incompatibles avec les articles 10, 11, 22 et 23 de la Constitution.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : - L'article 2, § 1er, alinéa 1er, 34°, du Code flamand du logement viole les articles 10, 11, 22 et 23 de la Constitution dans l'interprétation selon laquelle un demandeur d'asile qui séjourne dans l'habitation sociale de location de son partenaire, avec qui il a une relation durable, est considéré, dans l'attente d'une décision relative à sa demande d'asile, comme un locataire social qui occupe de manière permanente le logement social et est par conséquent soumis aux conditions prévues par l'article 95, § 1er, alinéas 1er et 2, du Code flamand du logement. - L'article 2, § 1er, alinéa 1er, 34°, du Code flamand du logement ne viole pas les articles 10, 11, 22 et 23 de la Constitution dans l'interprétation selon laquelle un demandeur d'asile qui séjourne dans l'habitation sociale de location de son partenaire, avec qui il a une relation durable, n'est pas considéré, dans l'attente d'une décision relative à sa demande d'asile et au plus tard jusqu'à cette décision, comme un locataire social qui occupe de manière permanente le logement social et n'est dès lors pas soumis aux conditions prévues par l'article 95, § 1er, alinéas 1er et 2, du Code flamand du logement.

Ainsi rendu en langue néerlandaise et en langue française, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 18 juin 2015.

Le greffier, F. Meersschaut Le président, A. Alen

^