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Arrêt
publié le 11 septembre 2007

Extrait de l'arrêt n° 111/2007 du 26 juillet 2007 Numéro du rôle : 4205 En cause : les questions préjudicielles relatives aux articles 74bis, § 2, et 75, § 1 er , alinéa 5, du Code électoral communal bruxellois, posées pa La Cour constitutionnelle, composée des présidents M. Melchior et A. Arts, et des juges P. Marte(...)

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Extrait de l'arrêt n° 111/2007 du 26 juillet 2007 Numéro du rôle : 4205 En cause : les questions préjudicielles relatives aux articles 74bis, § 2, et 75, § 1er, alinéa 5, du Code électoral communal bruxellois, posées par le Conseil d'Etat.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents M. Melchior et A. Arts, et des juges P. Martens, R. Henneuse, M. Bossuyt, E. De Groot, L. Lavrysen, A. Alen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke et J. Spreutels, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président M. Melchior, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles et procédure Par arrêt n° 170.895 du 7 mai 2007 en cause de Jacques Vandenhaute, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 11 mai 2007, le Conseil d'Etat a posé les questions préjudicielles suivantes : 1. « L'article 75, § 1er, alinéa 5, du Code électoral communal bruxellois viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution, s'il doit être interprété, à la lumière des ordonnances des 20 juillet 2006 et 20 octobre 2006, comme ne s'appliquant qu'aux seules réclamations contre l'élection à l'exclusion de celles fondées sur la loi du 7 juillet 1994 relative à la limitation et au contrôle des dépenses électorales engagées pour les élections des conseils provinciaux, communaux et de district et pour l'élection directe des conseils de l'aide sociale, établissant ainsi une différence de traitement entre les conseillers communaux selon que leur mandat est mis en cause à l'occasion d'une réclamation contre l'élection ou d'une réclamation fondée sur la loi du 7 juillet 1994 ? »;2. « L'article 74bis, § 2, du Code électoral communal bruxellois viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution en établissant une différence de traitement entre les mandataires politiques suivant qu'ils participent aux élections législatives ou aux élections communales, en ce qu'il prévoit la possibilité de priver de son mandat un candidat aux élections communales qui n'aurait pas respecté les dispositions des articles 3, § 2, ou 7 de la loi du 7 juillet 1994 relative à la limitation et au contrôle des dépenses électorales engagées pour les élections des conseils provinciaux, communaux et de district et pour l'élection directe des conseils de l'aide sociale ou de l'article 23, § 2, du Code précité, alors que pareille possibilité de privation de mandat n'existe pas à l'égard des candidats aux élections législatives, puisque cette sanction spécifique n'est pas prévue par la loi du 4 juillet 1989 relative à la limitation et au contrôle des dépenses électorales engagées pour les élections des chambres fédérales ainsi qu'au financement et à la comptabilité ouverte des partis politiques ? ». (...) III. En droit (...) Les dispositions en cause et les dispositions applicables à l'espèce B.1. Les articles 74, 74bis et 75 du Code électoral communal bruxellois sont libellés comme suit : «

Art. 74.§ 1er. Dans le présent code, il faut entendre par ' collège juridictionnel ', le collège visé a l'article 83quinquies, § 2 de la loi spéciale du 12 janvier 1989 relative aux institutions bruxelloises.

Seuls les candidats sont autorisés à introduire, auprès du collège juridictionnel, une réclamation contre l'élection.

Toute réclamation doit, à peine de déchéance, être formulée par écrit, dans les dix jours de la date du procès-verbal, et mentionner l'identité et le domicile du réclamant.

Elle est remise au secrétaire du collège juridictionnel ou envoyée sous pli recommandé à la poste.

Le fonctionnaire, à qui la réclamation est remise, est tenu d'en donner récépissé.

Il est défendu d'antidater ce récépissé sous peine d'un emprisonnement d'un mois à deux ans. § 2. La réclamation fondée sur la violation des articles 3, §§ 1er et 2, ou 7 de la loi du 7 juillet 1994 relative à la limitation et au contrôle des dépenses électorales engagées pour les élections des conseils provinciaux, communaux et de district et pour l'élection directe des conseils de l'aide sociale ou de l'article 23, § 2, est introduite auprès du collège juridictionnel dans les quarante-cinq jours de la date des élections. § 3. Toute personne ayant introduit une réclamation qui s'avère non fondée et pour laquelle l'intention de nuire est établie sera punie d'une amende de 250 à 2 500 euros.

Un nouveau délai de quinze jours est ouvert à compter du prononcé de la condamnation définitive fondée sur une plainte introduite sur la base de l'article 12 de la loi du 7 juillet 1994 relative à la limitation et au contrôle des dépenses électorales engagées pour les élections des conseils provinciaux et communaux et des conseils de district et pour l'élection directe des conseils de l'aide sociale.

Art. 74bis.§ 1er. Les élections ne peuvent être annulées tant par le collège juridictionnel que par le Conseil d'Etat que pour cause d'irrégularité susceptible d'influencer la répartition des sièges entre les différentes listes. § 2. Un candidat élu peut être privé de son mandat tant par le Collège juridictionnel, que par le Conseil d'Etat, s'il ne respecte pas les dispositions des articles 3, § 2, ou 7 de la loi du 7 juillet 1994 relative à la limitation et au contrôle des dépenses électorales engagées pour les élections des conseils provinciaux et communaux et de district et pour l'élection directe des conseils de l'aide sociale ou de l'article 23, § 2.

Un candidat en tête d'une liste communale peut être privé de son mandat tant par le Collège juridictionnel que par le Conseil d'Etat, s'il ne respecte pas les dispositions des articles 3, § 1, ou 7 de la même loi du 7 juillet 1994, ou de l'article 23, § 2. § 3. Le conseiller communal qui a été privé de son mandat par une décision du collège juridictionnel ou du Conseil d'Etat est remplacé au sein du conseil communal par le premier suppléant de la liste sur laquelle il avait été élu.

Art. 75.§ 1er. Le collège juridictionnel statue sur les réclamations.

L'exposé de l'affaire, par un membre du collège juridictionnel et le prononcé des décisions ont lieu en séance publique. La décision doit être motivée et mentionner le nom du rapporteur, ainsi que ceux des membres présents, le tout à peine de nullité.

Il ne peut être procédé à une vérification des bulletins qu'en présence des témoins désignés en vertu de l'article 23, ou ceux-ci dûment appelés; les enveloppes qui contiennent les bulletins sont recachetées en leur présence et à leur intervention.

Le collège juridictionnel se prononce dans les trente jours de l'introduction de la réclamation.

Si aucune décision n'est intervenue dans ce délai, la réclamation est considérée, comme rejetée et le résultat de l'élection, tel qu'il a été proclamé par le bureau de vote principal, devient définitif sans préjudice de l'application de l'article 74, § 3. § 2. Le collège juridictionnel ne peut annuler l'élection qu'à la suite d'une réclamation.

En l'absence de réclamation, le collège juridictionnel se borne à vérifier l'exactitude de la répartition des sièges entre les listes et l'ordre dans lequel les conseillers et les suppléants ont été déclarés élus. Le cas échéant, [il] modifie d'office la répartition des sièges et l'ordre des élus.

Sans préjudice de l'application de l'article 74, § 3, le résultat de l'élection, tel qu'il a été proclamé par le bureau de vote principal, devient définitif quarante-cinq jours après le jour des élections. § 3. Lorsqu'il prend une décision en application des paragraphes 1 et 2, le collège juridictionnel statue en tant que juridiction administrative, qu'il ait été ou non saisi d'une réclamation ».

Quant à la première question préjudicielle B.2.1. L'article 74, §§ 1er et 2, du Code électoral communal bruxellois fixe les délais dans lesquels doivent être introduites les réclamations contre l'élection et en matière de dépenses électorales.

L'article 75, § 2, du même Code détermine quand devient définitif le résultat des élections, tel qu'il a été proclamé par le bureau de vote principal. L' ordonnance du 20 juillet 2006Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 20/07/2006 pub. 29/08/2006 numac 2006031392 source ministere de la region de bruxelles-capitale Ordonnance modifiant la nouvelle loi communale et le code électoral communal bruxellois fermer « modifiant la nouvelle loi communale et le code électoral communal bruxellois » limite à dix jours le délai d'introduction des réclamations contre l'élection (article 74, § 1er) et à quarante-cinq jours le délai dans lequel, en l'absence de réclamation contre l'élection, le résultat devient définitif (article 75, § 2, alinéa 3). L' ordonnance du 20 octobre 2006Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 20/10/2006 pub. 03/11/2006 numac 2006031546 source ministere de la region de bruxelles-capitale Ordonnance modifiant l'article 74, § 2, du Code électoral communal bruxellois fermer « modifiant l'article 74, § 2, du Code électoral communal bruxellois », pour sa part, fixe le délai pour introduire une réclamation en matière de dépenses électorales à quarante-cinq jours (article 74, § 2).

B.2.2. Il ressort des travaux préparatoires de l' ordonnance du 20 juillet 2006Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 20/07/2006 pub. 29/08/2006 numac 2006031392 source ministere de la region de bruxelles-capitale Ordonnance modifiant la nouvelle loi communale et le code électoral communal bruxellois fermer que le législateur ordonnanciel bruxellois a souhaité permettre une installation plus rapide du conseil communal (Doc. parl., Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, 2005-2006, A-244/1, pp. 3-4).

B.2.3. Quant à la modification opérée par l' ordonnance du 20 octobre 2006Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 20/10/2006 pub. 03/11/2006 numac 2006031546 source ministere de la region de bruxelles-capitale Ordonnance modifiant l'article 74, § 2, du Code électoral communal bruxellois fermer, elle a été justifiée, dans les travaux préparatoires, par le fait que le délai de dix jours est incompatible avec la procédure en matière de dépenses électorales et, notamment, avec le délai de trente jours prévu par l'article 23, § 2, du Code électoral communal pour permettre le dépôt de la déclaration de dépenses électorales : « L' ordonnance du 20 juillet 2006Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 20/07/2006 pub. 29/08/2006 numac 2006031392 source ministere de la region de bruxelles-capitale Ordonnance modifiant la nouvelle loi communale et le code électoral communal bruxellois fermer modifiant la nouvelle loi communale et le code électoral bruxellois (Moniteur belge 29 août 2006) avait notamment pour but de réduire les délais d'installation du conseil communal et du collège des bourgmestre et échevins.

Ainsi l'article 6 de ladite ordonnance, en remplaçant l'alinéa 3 de l'article 74, § 1er du Code électoral communal bruxellois, a ramené le délai dans lequel les réclamations contre l'élection doivent être introduites auprès du collège juridictionnel de quarante à dix jours.

Il s'agit ici du contentieux relatif à la validité des élections.

Ce faisant, l'article 6 de l' ordonnance du 20 juillet 2006Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 20/07/2006 pub. 29/08/2006 numac 2006031392 source ministere de la region de bruxelles-capitale Ordonnance modifiant la nouvelle loi communale et le code électoral communal bruxellois fermer a également réduit à dix jours le délai d'introduction des réclamations relatives aux dépenses électorales.

En effet, l'article 74, § 2 du Code électoral communal bruxellois, qui traite de ces réclamations, renvoie au § 1er en ce qui concerne le délai d'introduction de la réclamation auprès du collège juridictionnel.

Cette modification ' implicite ' de l'article 74, § 2 a échappé à la vigilance du législateur ainsi qu'à celle du Conseil d'Etat, alors que ce n'était nullement l'intention du premier.

Or, ce délai de dix jours n'est pas compatible avec la procédure relative aux dépenses électorales.

En effet, les déclarations de dépenses électorales doivent être déposées au greffe du tribunal de première instance dans les trente jours qui suivent la date des élections (article 23, § 2, alinéas 3 et 4 du Code électoral communal bruxellois) et peuvent y être consultées par tous les électeurs de la circonscription électorale pendant quinze jours à partir du trente et unième jour après la date des élections (article 23, § 2, alinéa 7 du même Code).

Si certaines pratiques, comme la distribution de cadeaux ou de gadgets ou l'utilisation de panneaux ou affiches de plus de 4 m2, peuvent très bien être contestées dans les dix jours de l'élection, les dépenses électorales proprement dites ne peuvent pas l'être dans ce délai, puisque les déclarations y afférentes peuvent être déposées pendant trente jours suivant l'élection et que leur consultation ne peut avoir lieu qu'à partir du trente et unième jour suivant l'élection.

Dans un souci de sécurité juridique et de traitement unifié du contentieux des dépenses électorales, il convient donc de modifier l'article 74, § 2 du Code électoral bruxellois en prévoyant un délai de quarante-cinq jours après les élections afin de permettre l'exercice effectif du droit de réclamation dans la cadre du contentieux des dépenses électorales.

C'est d'ailleurs le délai prévu par le nouveau Code wallon de la démocratie locale pour ce type de réclamation, la procédure de déclaration et de consultation des dépenses électorales prévoyant les mêmes délais que ceux prévus par le Code électoral communal bruxellois respectivement trente et quinze jours » (Doc. parl., Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, 2005-2006, A-303/1, pp. 1-2).

B.3.1. Dans la décision de renvoi, le Conseil d'Etat considère qu'il résulte de ces modifications que « la procédure du contentieux de l'élection et celle du contentieux des dépenses électorales sont dissociées; que la seconde est appelée à se poursuivre au-delà du délai dans lequel le collège se prononce sur la réclamation contre l'élection et du délai prévu pour la validation de l'élection ». Le Conseil d'Etat constate alors que le délai de trente jours prévu par l'article 75, § 1er, alinéa 4, est « inconciliable avec l'instruction des réclamations au contentieux des dépenses électorales », de sorte que la validation des élections pour absence de décision du Collège juridictionnel dans le délai de rigueur de trente jours ne vaut que pour la réclamation contre les élections. Le délai de trente jours dans lequel le Collège juridictionnel doit prendre sa décision dans la matière du contentieux des dépenses électorales serait « un délai d'ordre qui ne peut être censuré qu'en cas de dépassement d'un terme raisonnable ».

B.3.2. Le Conseil d'Etat interroge la Cour sur le point de savoir si, dans cette interprétation, l'article 75, § 1er, alinéa 5, du Code électoral communal bruxellois est compatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'il établit une différence de traitement entre, d'une part, les conseillers communaux dont le mandat est mis en cause à l'occasion d'une réclamation contre l'élection et, d'autre part, les conseillers communaux dont le mandat est mis en cause par une réclamation en matière de dépenses électorales. La première catégorie de conseillers communaux bénéficierait, sans justification raisonnable, d'un régime plus favorable que la deuxième catégorie de conseillers communaux puisque le Collège juridictionnel qui doit trancher ces réclamations doit statuer dans les trente jours, pour autant que la réclamation en question ne soit pas considérée comme rejetée tacitement.

B.4. La différence de traitement qui résulte de cette interprétation de l'article 75, § 1er, alinéa 5, du Code électoral communal bruxellois repose sur un critère objectif, à savoir la nature différente des deux types de réclamations qui peuvent être introduites devant le Collège juridictionnel.

Alors que la réclamation relative à l'élection concerne, notamment, l'organisation des élections, le comptage des bulletins, les atteintes éventuelles à la liberté de vote, des erreurs dans les convocations ou sur les bulletins de vote, la réclamation relative aux dépenses électorales a pour objet de sanctionner le comportement d'un candidat à l'élection qui n'aurait pas respecté les dispositions particulières relatives aux dépenses électorales. La réclamation relative à l'élection peut aboutir soit à l'annulation de l'élection, soit à la modification de la répartition des sièges entre les listes ou de l'ordre des conseillers élus ou des suppléants (article 76 du Code précité). La réclamation relative aux dépenses électorales, quant à elle, a pour seul effet de priver, le cas échéant, le candidat de son mandat, cette privation ne nécessitant pas d'organiser de nouvelles élections puisqu'aux termes de l'article 74bis, § 3, le conseiller communal privé de son mandat est remplacé au sein du conseil communal par le premier suppléant de sa liste.

B.5. La disposition en cause poursuit également un but légitime qui est d'assurer la continuité des autorités publiques communales. C'est, en effet, afin de ne pas retarder l'installation et l'entrée en fonction du conseil communal et afin de protéger la sécurité juridique de l'élection de l'ensemble des candidats que le Collège juridictionnel statue dans un délai de rigueur de trente jours suivant l'introduction de la réclamation. C'est en raison de ces mêmes impératifs que le résultat de l'élection, tel qu'il a été proclamé par le bureau de vote principal, devient définitif, s'il n'a pas été statué dans ce délai.

B.6.1. La différence de traitement qui résulte de l'interprétation restrictive de l'article 75, § 1er, alinéa 5, en cause n'est pas dépourvue de justification raisonnable. Le Collège juridictionnel doit effectivement, en sa qualité de juridiction administrative, statuer dans un délai raisonnable, en veillant à l'intérêt de la cause pour les parties concernées et en particulier leur intérêt à sa rapide solution.

B.6.2. C'est en outre au terme d'un débat contradictoire et moyennant une décision motivée, que le Collège juridictionnel peut priver le candidat élu de son mandat. Cette décision est susceptible d'un recours de pleine juridiction auprès du Conseil d'Etat, qui statue dans les soixante jours.

B.7. La première question préjudicielle appelle une réponse négative.

Quant à la seconde question préjudicielle B.8. Dans la seconde question préjudicielle, le Conseil d'Etat demande si l'article 74bis, § 2, du Code électoral communal bruxellois viole les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'il prévoit la possibilité de priver de son mandat un candidat élu qui n'aurait pas respecté les dispositions relatives à la limitation et au contrôle des dépenses électorales alors que pareille possibilité de sanction n'existe pas à l'égard des candidats élus aux élections législatives.

Il n'appartient pas à la Cour dans le cadre de cette question préjudicielle de contrôler la proportionnalité de la mesure en cause au regard d'autres dispositions constitutionnelles.

B.9. Les parties intéressées devant la juridiction a quo, le président du Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale et le Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale font valoir que la question préjudicielle n'appelle pas de réponse puisque les articles 10 et 11 de la Constitution ne permettent pas à la Cour de comparer une législation fédérale avec la législation de la Région de Bruxelles-Capitale.

B.10.1. L'article 6, § 1er, VIII, alinéa 1er, 4°, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, inséré par l'article 4 de la loi spéciale du 13 juillet 2001 « portant transfert de diverses compétences aux régions et communautés », puis modifié par l'article 2 de la loi spéciale du 25 avril 2004, attribue à la Région wallonne et à la Région flamande : « VIII. En ce qui concerne les pouvoirs subordonnés : [...] 4° l'élection des organes provinciaux, communaux et intracommunaux, ainsi que des organes des agglomérations et fédérations de communes, en ce compris le contrôle des dépenses électorales y afférentes et l'origine des fonds qui y ont été affectés : a) à l'exception des règles inscrites dans la loi communale, la loi électorale communale, la loi organique des centres publics d'aide sociale, la loi provinciale, le Code électoral, la loi organique des élections provinciales et la loi organisant l'élection simultanée pour les chambres législatives et les conseils provinciaux en vertu de la loi du 9 août 1988 portant modification de la loi communale, de la loi électorale communale, de la loi organique des centres publics d'aide sociale, de la loi provinciale, du Code électoral, de la loi organique des élections provinciales et de la loi organisant l'élection simultanée pour les Chambres législatives et les conseils provinciaux;b) à l'exception de la compétence exclusive du Conseil d'Etat pour statuer par voie d'arrêts sur les recours en dernier ressort en matière électorale;c) étant entendu que les décrets et les ordonnances ayant pour effet de diminuer la proportionnalité de la répartition des sièges par rapport à la répartition des voix doivent être adoptés à la majorité visée à l'article 35, § 3. Les régions exercent cette compétence, sans préjudice des articles 5, deuxième et troisième alinéas, 23bis et 30bis de la loi électorale communale coordonnée le 4 août 1932, et des articles 2, § 2, quatrième alinéa, 3bis, deuxième alinéa, 3novies, deuxième alinéa, et 5, troisième alinéa, de la loi organique des élections provinciales; [...] ».

B.10.2. L'article 4, alinéa 1er, de la loi spéciale du 12 janvier 1989 « relative aux institutions bruxelloises » - modifié par l'article 66 de la loi spéciale du 16 juillet 1993 « visant à achever la structure fédérale de l'Etat » et par l'article 5, A), de la loi spéciale du 27 mars 2006 « adaptant diverses dispositions à la nouvelle dénomination du Parlement wallon, du Parlement de la Communauté française, du Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, du Parlement flamand et du Parlement de la Communauté germanophone » - attribue à la Région de Bruxelles-Capitale la même compétence.

B.11. En ce que la seconde question préjudicielle allègue la violation des articles 10 et 11 de la Constitution parce que l'article 74bis, § 2, du Code électoral communal bruxellois prévoit de pouvoir priver de son mandat un candidat élu qui ne respecte pas les dispositions des articles 3, § 2, ou 7 de la loi du 7 juillet 1994 « relative à la limitation et au contrôle des dépenses électorales engagées pour les élections des conseils provinciaux, communaux et de district et pour l'élection directe des conseils de l'aide sociale » ou de l'article 23, § 2, du Code précité, alors que pareille sanction n'existe pas pour les candidats aux élections législatives fédérales qui ne respectent pas les règles de la loi du 4 juillet 1989 « relative à la limitation et au contrôle des dépenses électorales engagées pour les élections des chambres fédérales, ainsi qu'au financement et à la comptabilité ouverte des partis politiques », il y a lieu d'observer que, en vertu de l'article 6, § 1er, VIII, 4°, de la loi spéciale du 8 août 1980 précitée, le contrôle des dépenses électorales relatives à l'élection des organes communaux relève de la compétence des régions.

B.12. Par l' ordonnance du 16 février 2006Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 16/02/2006 pub. 28/02/2006 numac 2006031068 source ministere de la region de bruxelles-capitale Ordonnance modifiant la loi électorale communale fermer « modifiant la loi électorale communale », la Région de Bruxelles-Capitale a manifesté sa volonté de faire sienne la loi électorale communale du 4 août 1932, dans les limites de ses compétences.

B.13. Il s'ensuit que, en comparant la situation des conseillers communaux à celle des parlementaires fédéraux, la question préjudicielle critique une différence de traitement qui trouve sa source dans l'application de normes de législateurs différents à des personnes exerçant des fonctions différentes. Une telle différence ne saurait en soi être considérée comme contraire au principe d'égalité et de non-discrimination. Sans préjudice de l'application éventuelle du principe de proportionnalité dans l'exercice des compétences, l'autonomie que l'article 6, § 1er, VIII, de la loi spéciale du 8 août 1980 a conférée aux régions n'aurait pas de sens si une différence de traitement entre les destinataires, d'une part, de règles fédérales et, d'autre part, de règles régionales dans des matières analogues était jugée contraire en tant que telle au principe d'égalité et de non-discrimination.

B.14. La seconde question préjudicielle appelle une réponse négative.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : Les articles 74bis, § 2, et 75, § 1er, alinéa 5, du Code électoral communal bruxellois ne violent pas les articles 10 et 11 de la Constitution.

Ainsi prononcé en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989, à l'audience publique du 26 juillet 2007.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux.

Le président, M. Melchior.

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