publié le 06 juin 2006
Extrait de l'arrêt n° 46/2006 du 22 mars 2006 Numéro du rôle : 3696 En cause : la question préjudicielle relative aux articles 2, 2°, 10, 4°, et 12bis de la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l La Cour d'arbitrage, composée des présidents M. Melchior et A. Arts, et des juges R. Henneuse, (...)
Extrait de l'arrêt n° 46/2006 du 22 mars 2006 Numéro du rôle : 3696 En cause : la question préjudicielle relative aux articles 2, 2°, 10, 4°, et 12bis de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers, et à l'article 26 de l'arrêté royal du 8 octobre 1981 portant le même intitulé, posée par la Cour d'appel de Liège.
La Cour d'arbitrage, composée des présidents M. Melchior et A. Arts, et des juges R. Henneuse, M. Bossuyt, E. De Groot, A. Alen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke et J. Spreutels, assistée du greffier L. Potoms, présidée par le président M. Melchior, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet de la question préjudicielle et procédure Par arrêt du 26 avril 2005 en cause de l'Etat belge contre M. Bousnina et N. Ajair, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour d'arbitrage le 4 mai 2005, la Cour d'appel de Liège a posé la question préjudicielle suivante : « Les articles 2, 2°, 10, 4°, et 12bis de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer et 26 de l'arrêté royal du 8 octobre 1981 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers en Belgique violent-ils les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'ils exigent de l'étranger non CE qui est entré en Belgique sans les documents requis ou qui y est demeuré en Belgique après la date de validité de ces documents, mais qui a épousé un ressortissant non CE admis à séjourner en Belgique, de produire les documents requis pour son entrée en Belgique sous peine d'être refoulé hors du pays et de devoir retourner dans son pays d'origine pour les obtenir même s'il remplit les conditions requises par l'article 10, 4°, de la loi pour être admis à séjourner de plein droit en Belgique plus de trois mois, alors que le même étranger ne peut, conformément à l'enseignement de la Cour de Justice des Communautés européennes, être refoulé pour ce motif s'il a épousé un ressortissant belge ou communautaire ? ». (...) III. En droit (...) B.1. Les articles 2, 10 et 12bis de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers disposent : «
Art. 2.Est autorisé à entrer dans le Royaume, l'étranger porteur : 1° soit des documents requis en vertu d'un traité international, d'une loi ou d'un arrêté royal;2° soit d'un passeport valable ou d'un titre de voyage en tenant lieu, revêtu d'un visa ou d'une autorisation tenant lieu de visa, valable pour la Belgique, apposé par un représentant diplomatique ou consulaire belge ou par celui d'un Etat partie à une convention internationale relative au franchissement des frontières extérieures, liant la Belgique. Le Ministre ou son délégué peut autoriser à pénétrer en Belgique l'étranger qui n'est porteur d'aucun des documents prévus par l'alinéa précédent, sur la base de modalités déterminées par arrêté royal ». «
Art. 10.Sous réserve des dispositions des articles 9 et 12, sont de plein droit admis à séjourner plus de trois mois dans le Royaume : 1° l'étranger dont le droit de séjour est reconnu par un traité international, par la loi ou par un arrêté royal;2° l'étranger qui remplit les conditions légales pour acquérir la nationalité belge par déclaration de nationalité ou par option, ou pour la recouvrer, sans qu'il soit toutefois requis qu'il ait eu sa résidence principale en Belgique durant les douze mois qui précèdent la demande d'admission au séjour et sans qu'il doive faire une déclaration, selon le cas, de nationalité, d'option ou de recouvrement de la nationalité belge;3° la femme qui, par son mariage ou à la suite de l'acquisition par son mari d'une nationalité étrangère, a perdu la nationalité belge;4° le conjoint étranger d'un étranger admis ou autorisé à séjourner dans le Royaume ou autorisé à s'y établir, qui vient vivre avec lui, à condition que les deux personnes concernées soient âgées de plus de dix-huit ans, ainsi que leurs enfants s'ils sont à leur charge, et viennent vivre avec eux avant d'avoir atteint l'âge de dix-huit ans, à moins qu'un accord international liant la Belgique ne prévoie des dispositions plus favorables. Lorsque le conjoint ou l'enfant d'un étranger admis ou autorisé à séjourner dans le Royaume ou autorisé à s'établir, a été lui-même admis à y séjourner en application du premier alinéa, 4°, après l'entrée en vigueur de la présente disposition, le droit de rejoindre le même étranger ne peut plus être invoqué qu'au cours de la même année civile et de l'année civile suivante.
Quand un étranger a été admis à séjourner dans le Royaume par application du premier alinéa, 4°, après l'entrée en vigueur de la présente disposition, ni son conjoint ni leurs enfants ne peuvent invoquer le droit de venir le rejoindre.
Le premier alinéa, 4°, n'est pas applicable aux membres de la famille de l'étranger autorisé à séjourner pour faire des études en Belgique ». «
Art. 12bis.Lorsque l'étranger déclare se trouver dans un des cas prévus à l'article 10, il est, au vu des documents requis pour son entrée et des documents qui prouvent qu'il remplit les conditions visées à l'article 10, inscrit au registre des étrangers et mis en possession d'un document attestant que la demande a été introduite et d'un document attestant qu'il est inscrit au registre des étrangers.
L'administration communale informe sans délai le Ministre, ou son délégué, de la demande et s'assure de son accord.
En cas de décision favorable du Ministre, ou de son délégué, ou si dans un délai d'un an aucune décision n'est portée à la connaissance de l'administration communale, l'étranger est admis à séjourner.
Par une décision motivée, portée à la connaissance de l'administration communale avant l'expiration du délai d'un an prévu à l'alinéa 3, le Ministre, ou son délégué, peut une fois prolonger d'une période de trois mois ce délai d'un an ».
L'article 26 de l'arrêté royal du 8 octobre 1981 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers dispose : « § 1. Lorsque l'étranger déclare se trouver dans un des cas prévus à l'article 10 de la loi, l'administration communale lui remet un document attestant que la demande a été introduite et établi conformément au modèle figurant à l'annexe 15bis. L'administration communale transmet immédiatement une copie de ce document au Ministre ou à son délégué. § 2. Si l'étranger ne produit pas les documents visés à l'article 12bis de la loi, l'administration communale lui notifie la décision d'irrecevabilité de sa demande par la remise du document conforme au modèle figurant à l'annexe 15ter.
L'administration communale transmet immédiatement une copie de ce document au Ministre ou à son délégué.
En outre, si l'étranger se trouve dans un des cas prévus à l'article 7 de la loi, la décision lui donnant l'ordre de quitter le territoire est notifiée au moyen du formulaire A ou B, conforme au modèle figurant à l'annexe 12 ou 13. § 3. Si l'étranger produit les documents visés à l'article 12bis de la loi, il est inscrit au registre des étrangers et mis en possession d'une attestation d'immatriculation du modèle A, arrivant à échéance un an après la date d'introduction de sa demande. § 4. Si le Ministre ou son délégué décide que l'étranger visé au § 3 n'a pas le droit de séjour, il lui donne l'ordre de quitter le territoire. L'administration communale notifie ces deux décisions par la remise du document conforme au modèle figurant à l'annexe 14. § 5. En cas de décision favorable sur la demande de séjour ou si aucune décision n'est portée à la connaissance de l'administration communale dans un délai d'un an à partir de l'introduction de la demande, l'étranger visé au § 3 est mis en possession du certificat d'inscription au registre des étrangers. § 6. Si le Ministre ou son délégué décide de prolonger le délai d'un an prévu au § 5 d'une période de trois mois, l'administration communale remet à l'étranger une copie de cette décision et proroge l'attestation d'immatriculation de trois mois à partir de la date de son échéance.
En cas de décision favorable sur la demande de séjour ou si aucune décision n'est portée à la connaissance de l'administration communale dans ce nouveau délai de trois mois, l'étranger est mis en possession du certificat d'inscription au registre des étrangers.
Si le Ministre ou son délégué décide que l'étranger n'a pas le droit de séjour, il lui donne l'ordre de quitter le territoire.
L'administration communale notifie ces deux décisions par la remise du document conforme au modèle figurant à l'annexe 14 ».
B.2. Le juge a quo interroge la Cour sur la compatibilité avec les articles 10 et 11 de la Constitution des articles 2, 2°, 10, 4°, et 12bis de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer précitée et de l'article 26 de l'arrêté royal précité, « en ce qu'ils exigent de l'étranger non CE qui est entré en Belgique sans les documents requis ou qui y est demeuré en Belgique après la date de validité de ces documents, mais qui a épousé un ressortissant non CE admis à séjourner en Belgique, de produire les documents requis pour son entrée en Belgique sous peine d'être refoulé hors du pays et de devoir retourner dans son pays d'origine pour les obtenir même s'il remplit les conditions requises par l'article 10, 4°, de la loi pour être admis à séjourner de plein droit en Belgique plus de trois mois, alors que le même étranger ne peut, conformément à l'enseignement de la Cour de Justice des Communautés européennes, être refoulé pour ce motif s'il a épousé un ressortissant belge ou communautaire ».
B.3. Il ressort des faits de la cause et des motifs de la décision de renvoi que le litige pendant devant le juge a quo concerne un étranger non C.E. qui est entré en Belgique avec un passeport en règle muni d'un visa mais qui est demeuré en Belgique après la date de validité de ce document et qui a épousé, après cette date, un ressortissant non C.E. admis à séjourner en Belgique. La Cour limite son examen à cette catégorie d'étrangers.
B.4. Le Conseil des ministres estime que la question préjudicielle relative à l'article 26 de l'arrêté royal du 8 octobre 1981 n'appelle pas de réponse parce que la Cour d'arbitrage est incompétente pour se prononcer sur la constitutionnalité d'un arrêté royal.
B.5.1. La Cour ne peut se prononcer sur la compatibilité d'une différence de traitement avec les articles 10 et 11 de la Constitution que si elle est imputable à une norme législative. Ni l'article 26, § 1er, de la loi spéciale du 6 janvier 1989, ni aucune autre disposition constitutionnelle ou législative ne confère à la Cour le pouvoir de statuer, à titre préjudiciel, sur la question de savoir si un arrêté royal est compatible ou non avec les articles 10 et 11 de la Constitution.
B.5.2. C'est l'article 12bis de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer précitée qui contient expressément l'obligation pour l'étranger qui déclare se trouver dans un des cas prévus à l'article 10 de produire les documents requis pour son entrée. La différence de traitement soumise au contrôle de la Cour est donc bien imputable à cette disposition législative.
B.6.1. Il ressort des travaux préparatoires de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer que l'article 10, 4°, admet de plein droit au séjour les catégories d'étrangers qui y sont visées dans le souci de respecter le droit à la vie familiale garanti par les articles 8 et 12 de la Convention européenne des droits de l'homme (Doc. parl., Chambre, 1974-1975, n° 653/1, p. 16).
B.6.2. Il ressort des travaux préparatoires de la loi du 6 août 1993Documents pertinents retrouvés type loi prom. 06/08/1993 pub. 18/12/1998 numac 1998015163 source ministere des affaires etrangeres, du commerce exterieur et de la cooperation au developpement Loi portant assentiment à la Convention n° 148 concernant la protection des travailleurs contre les risques professionnels dus à la pollution de l'air, au bruit et aux vibrations sur les lieux de travail, adoptée à Genève le 20 juin 1977 par la Conférence internationale du travail lors de sa soixante-troisième session type loi prom. 06/08/1993 pub. 04/06/2015 numac 2015000253 source service public federal interieur Loi portant approbation et exécution de la Convention internationale portant création d'un fonds international d'indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures, faite à Bruxelles le 18 décembre 1971, et portant exécution des Protocoles à cette Convention, faits à Londres le 27 novembre 1992 et le 16 mai 2003. - Coordination officieuse en langue allemande fermer « modifiant les articles 10, 11, 12 et 14 de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers et y insérant un article 12bis » que le législateur a entendu résoudre certains problèmes relatifs au droit de séjour des étrangers venus en Belgique sur la base du regroupement familial.
L'article 4 de la loi qui insère l'article 12bis soumis au contrôle de la Cour règle la procédure administrative de l'inscription au registre des étrangers. Le législateur a voulu en effet organiser un contrôle de la réalité du regroupement familial (Doc. parl., Chambre, 1991-1992, n° 133/3, p. 4).
B.7. Les dispositions en cause n'opèrent pas expressément de différence de traitement entre les étrangers non C.E. qui ont épousé un ressortissant non C.E. admis à séjourner en Belgique et les étrangers non C.E. qui ont épousé un ressortissant belge ou C.E. Cette différence de traitement est consécutive à un arrêt de la Cour de Justice des Communautés européennes du 25 juillet 2002, MRAX c.
Etat belge. Saisie de questions préjudicielles en interprétation par le Conseil d'Etat de Belgique, la Cour de justice des Communautés européennes a notamment dit pour droit que : « 1) L'article 3 de la directive 68/360/CEE du Conseil, du 15 octobre 1968, relative à la suppression des restrictions au déplacement et au séjour des travailleurs des Etats membres et de leur famille à l'intérieur de la Communauté, l'article 3 de la directive 73/148/CEE du Conseil, du 21 mai 1973, relative à la suppression des restrictions au déplacement et au séjour des ressortissants des Etats membres à l'intérieur de la Communauté en matière d'établissement et de prestation de services, ainsi que le règlement (CE) n° 2317/95 du Conseil, du 25 septembre 1995, déterminant les pays tiers dont les ressortissants doivent être munis d'un visa lors du franchissement des frontières extérieures des Etats membres, lus à la lumière du principe de proportionnalité, doivent être interprétés en ce sens qu'un Etat membre ne peut pas refouler à la frontière un ressortissant d'un pays tiers, conjoint d'un ressortissant d'un Etat membre, qui tente de pénétrer sur son territoire sans disposer d'une carte d'identité ou d'un passeport en cours de validité ou, le cas échéant, d'un visa, lorsque ledit conjoint est en mesure de prouver son identité ainsi que le lien conjugal et s'il n'existe pas d'éléments de nature à établir qu'il représente un danger pour l'ordre public, la sécurité publique ou la santé publique au sens des articles 10 de la directive 68/360 et 8 de la directive 73/148. [...] 3) Les articles 3 et 4, paragraphe 3, de la directive 68/360, 3 et 6 de la directive 73/148 et 3, paragraphe 3, de la directive 64/221/CEE du Conseil, du 25 février 1964, pour la coordination des mesures spéciales aux étrangers en matière de déplacement et de séjour justifiées par des raisons d'ordre public, de sécurité publique et de santé publique, doivent être interprétés en ce sens qu'un Etat membre ne peut refuser de délivrer un titre de séjour à un ressortissant d'un pays tiers, conjoint d'un ressortissant d'un Etat membre, qui est entré régulièrement sur le territoire de cet Etat membre, ni prendre à son encontre une mesure d'éloignement du territoire, au seul motif que son visa a expiré avant qu'il sollicite un titre de séjour.» B.8. Conformément aux directives européennes 64/221/CEE, 68/360/CEE et 73/148/CEE, telles qu'elles ont été interprétées par la Cour de justice des Communautés européennes dans l'arrêt du 25 juillet 2002 précité, les dispositions législatives en cause créent une différence de traitement entre les étrangers non C.E. qui épousent un ressortissant non C.E. admis à séjourner en Belgique et les étrangers non C.E. qui épousent un ressortissant belge ou C.E. Seule la première catégorie d'étrangers non C.E. est obligée de demander les documents requis au représentant diplomatique ou consulaire de son pays d'origine, préalablement à l'entrée sur le territoire.
B.9. Cette différence de traitement repose sur un critère objectif, la nationalité de l'époux qui est rejoint. Dans la première hypothèse, il s'agit d'un ressortissant non C.E., dans la seconde d'un Belge ou d'un ressortissant C.E. Les Etats membres de l'Union européenne forment une communauté ayant un ordre juridique spécifique et ayant institué une citoyenneté propre caractérisée par un certain nombre de droits et d'obligations. Une différence de traitement fondée sur l'appartenance à cette communauté qui accorde aux ressortissants d'un Etat membre de celle-ci des avantages sur la base de la réciprocité repose sur un critère objectif.
B.10. La différence de traitement est en rapport avec l'objectif du législateur, qui est de freiner l'immigration, tout en tenant compte de la situation des étrangers qui ont des liens avec des Belges ou des ressortissants C.E. Il n'est pas contraire à cet objectif de soumettre le regroupement familial de deux conjoints étrangers à des conditions plus sévères que le regroupement familial de deux conjoints dont l'un est Belge ou ressortissant C.E. B.11. La Cour doit encore vérifier si les dispositions ne portent pas une atteinte disproportionnée au droit à la vie familiale.
B.12. L'article 22 de la Constitution dispose : « Chacun a droit au respect de sa vie privée et familiale, sauf dans les cas et conditions fixés par la loi.
La loi, le décret ou la règle visée à l'article 134 garantissent la protection de ce droit ».
L'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme dispose : « 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ». B.13.1. En imposant aux étrangers, dont le séjour est devenu illégal de leur propre fait, de retourner dans leur pays d'origine pour demander l'autorisation requise pour être admis sur le territoire belge, le législateur a voulu éviter qu'ils puissent retirer un avantage de l'infraction qu'ils commettent envers cette règle et que la clandestinité soit récompensée.
Ces dispositions ne sont d'ailleurs pas contraires à la directive 2003/86/CE du Conseil du 22 septembre 2003 relative au droit au regroupement familial, qui dispose en son article 5, paragraphe 3, que, sauf dans les cas appropriés où un Etat membre a prévu d'y déroger, la demande d'accès et de séjour dans le cadre du droit au regroupement familial est introduite et traitée « à l'extérieur du territoire de l'Etat membre dans lequel le regroupant réside ».
B.13.2. En outre, les dispositions législatives en cause ne s'opposent pas à la jouissance du droit au regroupement familial mais fixent uniquement les modalités auxquelles il convient de satisfaire avant de pouvoir recourir à ce droit.
B.13.3. En imposant à un étranger non C.E. dont le visa est périmé et qui a épousé un ressortissant non C.E. admis à séjourner en Belgique de retourner dans son pays d'origine pour demander l'autorisation requise, les dispositions en cause ne portent pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie familiale de cet étranger et ne constituent pas davantage une ingérence qui ne peut se justifier pour les motifs d'intérêt général retenus par l'article 8.2 de la Convention européenne des droits de l'homme.
En effet, une telle ingérence dans la vie privée et familiale est prévue par la loi et ne peut entraîner qu'un éventuel éloignement temporaire qui n'implique pas de rupture des liens unissant les intéressés en vue d'obtenir l'autorisation requise.
B.13.4. En ce qui concerne l'application des dispositions en cause, il n'appartient pas à la Cour mais, le cas échéant, au juge compétent, si besoin en est statuant en référé, d'apprécier si une décision négative est ou non contraire aux dispositions légales ou si l'absence déraisonnablement longue d'une décision d'autorisation porterait atteinte à la vie familiale d'une manière injustifiée.
B.14. En ce qu'ils exigent de l'étranger non C.E. qui est entré en Belgique avec un passeport en règle muni d'un visa mais qui est demeuré en Belgique après la date de validité de ce document et qui a épousé un ressortissant non C.E. admis à séjourner en Belgique, de se rendre dans son pays d'origine afin de demander l'autorisation requise pour son entrée en Belgique auprès du poste diplomatique ou consulaire belge compétent, les articles 2, 2°, 10, 4°, et 12bis de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers ne sont pas incompatibles avec les articles 10 et 11 de la Constitution.
B.15. La question préjudicielle appelle une réponse négative.
Par ces motifs, la Cour dit pour droit : Les articles 2, 2°, 10, 4°, et 12bis de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers ne violent pas les articles 10 et 11 de la Constitution.
Ainsi prononcé en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 22 mars 2006.
Le greffier, L. Potoms.
Le président, M. Melchior.