publié le 03 mai 2001
Extrait de l'arrêt n° 21/2001 du 1 er mars 2001 Numéro du rôle : 1781 En cause : la question préjudicielle relative à l'article 57, § 2, alinéas 3 et 4, de la loi du 8 juillet 1976 organique des centres publics d'aide sociale, La Cour d'arbitrage, composée des présidents G. De Baets et M. Melchior, et des juges H. Boel, L(...)
COUR D'ARBITRAGE
Extrait de l'arrêt n° 21/2001 du 1er mars 2001 Numéro du rôle : 1781 En cause : la question préjudicielle relative à l'article 57, § 2, alinéas 3 et 4, de la
loi du 8 juillet 1976Documents pertinents retrouvés
type
loi
prom.
08/07/1976
pub.
18/04/2016
numac
2016000231
source
service public federal interieur
Loi organique des centres publics d'action sociale. - Coordination officieuse en langue allemande de la version applicable aux habitants de la région de langue allemande
fermer organique des centres publics d'aide sociale, modifié par l'article 65 de la loi du 15 juillet 1996, posée par le Tribunal du travail de Courtrai.
La Cour d'arbitrage, composée des présidents G. De Baets et M. Melchior, et des juges H. Boel, L. François, P. Martens, J. Delruelle, E. Cerexhe, A. Arts, M. Bossuyt et E. De Groot, assistée du greffier L. Potoms, présidée par le président G. De Baets, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet de la question préjudicielle Par jugement du 29 septembre 1999 en cause de L. A.-B. contre le centre public d'aide sociale de Courtrai, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour d'arbitrage le 12 octobre 1999, le Tribunal du travail de Courtrai a posé la question préjudicielle suivante : « L'article 57, § 2, alinéas 3 et 4, de la loi du 8 juillet 1976Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/07/1976 pub. 18/04/2016 numac 2016000231 source service public federal interieur Loi organique des centres publics d'action sociale. - Coordination officieuse en langue allemande de la version applicable aux habitants de la région de langue allemande fermer organique des centres publics d'aide sociale, tel qu'il est interprété par la Cour d'arbitrage en son arrêt n 43/98 du 22 avril 1998, viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution dans la mesure où l'étranger qui a demandé à être reconnu comme réfugié, dont la demande a été rejetée par l'Office des étrangers et qui a reçu l'ordre de quitter le territoire, n'a droit ni à une aide égale au minimum de moyens d'existence ni aux allocations familiales garanties tant que le recours contre la décision de l'Office des étrangers est pendant auprès du Conseil d'Etat, alors qu'un étranger qui introduit un recours auprès du même Conseil d'Etat contre une décision du Commissariat général aux réfugiés et aux apatrides ou contre une décision de la Commission permanente de recours y a droit ? » (...) IV. En droit (...) B.1. La question préjudicielle porte sur la compatibilité de l'article 57, § 2, alinéas 3 et 4, de la loi du 8 juillet 1976Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/07/1976 pub. 18/04/2016 numac 2016000231 source service public federal interieur Loi organique des centres publics d'action sociale. - Coordination officieuse en langue allemande de la version applicable aux habitants de la région de langue allemande fermer organique des centres publics d'aide sociale (ci-après : la loi organique des C.P.A.S.) avec les articles 10 et 11 de la Constitution. Elle invite la Cour à établir une comparaison, pour ce qui est du droit à l'aide sociale, entre : a) l'étranger qui a demandé une seconde fois à être reconnu comme réfugié, dont la demande n'a pas été prise en compte par l'Office des étrangers et qui a reçu un ordre de quitter le territoire, tant que le recours contre la décision de l'Office des étrangers est pendant auprès du Conseil d'Etat, et b) un étranger qui introduit un recours auprès du même Conseil d'Etat contre une décision du Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides ou contre une décision de la Commission permanente de recours. Il ressort des éléments du dossier que l'affaire concerne la cessation de l'aide sociale accordée à un étranger qui s'est pour la deuxième fois déclaré réfugié, après que sa première demande eut été rejetée par le Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides et par la Commission permanente de recours des réfugiés, et que le Conseil d'Etat eut rejeté le recours en annulation contre cette décision, et qui en était en fait bénéficiaire au moment où l'ordre de quitter le territoire lui a été notifié, après que le délégué du ministre de l'Intérieur eut refusé de prendre en considération cette deuxième déclaration.
Il appert de la motivation du jugement de renvoi que l'intéressé a introduit un recours en annulation auprès du Conseil d'Etat contre l'ordre de quitter le territoire.
B.2. Dans la question préjudicielle, il est observé, s'agissant de la première catégorie d'étrangers impliquée dans la comparaison, qu'elle n'a droit « ni à une aide égale au minimum de moyens d'existence ni aux prestations familiales garanties ». Aux termes de la question préjudicielle, la deuxième catégorie d'étrangers impliquée dans la comparaison y a, quant à elle, droit.
L'article 57 de la loi organique des C.P.A.S. porte sur l'aide sociale à laquelle le centre public d'aide sociale est tenu. L'aide sociale assurée conformément à cette disposition peut être toute aide, en espèces ou en nature, aussi bien palliative que curative ou préventive. La loi ne précise pas en quoi consiste cette aide, ni à quelles conditions elle est accordée, sauf que cette aide « a pour but de permettre à chacun de mener une vie conforme à la dignité humaine » (article 1er, alinéa 1er). Elle peut être octroyée à celui qui bénéficie du minimum de moyens d'existence, mais également à celui qui n'y a pas droit, tel un demandeur d'asile.
B.3.1. Avant d'être remplacé par la loi du 15 juillet 1996, l'article 57, § 2, alinéas 3 et 4, de la loi organique des C.P.A.S., tel qu'il avait été inséré par l'article 151 de la loi du 30 décembre 1992Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/12/1992 pub. 18/06/2012 numac 2012000355 source service public federal interieur Loi portant des dispositions sociales et diverses. - Coordination officieuse en langue allemande d'extraits fermer, disposait : « L'aide sociale prend fin à dater de l'exécution de l'ordre de quitter le territoire et, au plus tard, au jour de l'expiration du délai de l'ordre définitif de quitter le territoire.
Il est dérogé à l'alinéa précédent, pendant le temps strictement nécessaire pour permettre effectivement à l'intéressé de quitter le territoire; ce délai ne pourra en aucun cas excéder un mois. » B.3.2. A partir du 10 janvier 1997, ces dispositions ont été remplacées comme suit par l'article 65 de la loi du 15 juillet 1996 : « Un étranger qui s'est déclaré réfugié et a demandé à être reconnu comme tel, séjourne illégalement dans le Royaume lorsque la demande d'asile a été rejetée et qu'un ordre de quitter le territoire exécutoire a été notifié à l'étranger concerné.
L'aide sociale accordée à un étranger qui était en fait bénéficiaire au moment où un ordre de quitter le territoire exécutoire lui a été notifié, est arrêtée, à l'exception de l'aide médicale urgente, le jour où l'étranger quitte effectivement le territoire et, au plus tard, le jour de l'expiration du délai de l'ordre de quitter le territoire. » B.3.3. Dans son arrêt n° 43/98 du 22 avril 1998, la Cour a considéré que le nouvel article 57, § 2, alinéas 3 et 4, de la loi organique des centres publics d'aide sociale violait les articles 10 et 11 de la Constitution en tant qu'il était applicable à l'étranger qui avait demandé à être reconnu comme réfugié, dont la demande avait été rejetée et qui avait reçu un ordre de quitter le territoire, tant que n'avaient pas été tranchés les recours qu'il avait introduits devant le Conseil d'Etat contre la décision du Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides prise en application de l'article 63/3 de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers ou contre la décision de la Commission permanente de recours des réfugiés. La Cour a ainsi explicitement précisé que sont seuls visés les recours pendants auprès du Conseil d'Etat qui sont dirigés contre les décisions relatives aux demandes de reconnaissance comme réfugié, dès lors que l'annulation portait uniquement sur les alinéas 3 et 4 de l'article 57, § 2, de la loi organique des C.P.A.S., relatifs aux étrangers qui ont demandé à être reconnus comme réfugiés.
Dans son arrêt n° 80/99 du 30 juin 1999, la Cour y a ajouté que si la mesure prévue par l'article 57, § 2, est appliquée aux personnes qui, pour des raisons médicales, sont dans l'impossibilité absolue de donner suite à l'ordre de quitter la Belgique, cette disposition viole également les articles 10 et 11 de la Constitution.
Dans son arrêt n° 57/2000 du 17 mai 2000, la Cour a précisé, en revanche, que si la mesure prévue par l'article 57, § 2, est appliquée aux personnes qui ont demandé à être reconnues comme réfugiés et dont la demande a été rejetée par le ministre de l'Intérieur par application de l'article 51/5 de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers et de l'article 8 de la Convention relative à la détermination de l'Etat responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans un Etat membre des Communautés européennes, approuvée par la loi du 11 mai 1995, même si l'intéressé attaque cette décision par un recours en annulation et une demande de suspension auprès du Conseil d'Etat, cette disposition ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution.
B.3.4. En l'espèce, il s'agit de l'hypothèse où un recours en annulation non suspensif est introduit auprès du Conseil d'Etat contre le refus du ministre compétent ou de son délégué de prendre en considération une deuxième déclaration en tant que réfugié.
Les recours juridictionnels contre une telle décision sont traités à l'article 51/8 de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer précitée, qui dispose : « Le ministre ou son délégué, peut décider de ne pas prendre la déclaration en considération lorsque l'étranger a déjà fait auparavant la même déclaration auprès d'une autorité visée à l'alinéa 1er et qu'il ne fournit pas de nouveaux éléments qu'il existe, en ce qui le concerne, de sérieuses indications d'une crainte fondée de persécution au sens de la Convention internationale relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951. Les nouveaux éléments doivent avoir trait à des faits ou des situations qui se sont produits après la dernière phase de la procédure au cours de laquelle l'étranger aurait pu les fournir.
Une décision de ne pas prendre la déclaration en considération n'est susceptible que d'un recours en annulation devant le Conseil d'Etat.
Aucune demande de suspension ne peut être introduite contre cette décision. » B.4. Ainsi que la Cour l'a relevé dans son arrêt n° 83/94 du 1er décembre 1994, le législateur a voulu éliminer une forme spécifique d'abus de procédure, qui consiste à multiplier des déclarations identiques. Elle a estimé que, pour atteindre cet objectif, le législateur avait pu exclure la demande de suspension devant le Conseil d'Etat contre la décision purement confirmative du ministre ou de son délégué, le Conseil d'Etat vérifiant, avant de déclarer irrecevable une telle demande, « si les conditions de cette cause d'irrecevabilité se trouvent réunies » (B.7).
B.5. La question préjudicielle concerne la situation de l'étranger pendant la période où est pendant le recours qu'il a introduit contre la décision du ministre ou de son délégué de ne pas prendre en considération sa deuxième demande.
B.6. Pour les mêmes motifs que ceux qui justifient l'article 50, alinéas 3 et 4, de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer, il n'est pas déraisonnable de refuser le bénéfice de l'aide sociale à l'étranger qui se trouve dans la situation décrite dans ces dispositions. Cette personne, qui a déjà épuisé les recours dirigés contre le refus d'accueillir sa première demande, se trouve dans une situation essentiellement différente de celle dont les recours, dirigés contre cette première demande, sont pendants. Compte tenu de l'objectif mentionné en B.4, il peut se justifier de ne pas lui permettre de bénéficier de l'aide sociale aussi longtemps que ni le ministre ou son délégué ni le Conseil d'Etat n'ont admis la réalité et la pertinence des nouveaux éléments qu'elle invoque.
B.7. La question préjudicielle appelle une réponse négative.
Par ces motifs, la Cour dit pour droit : L'article 57, § 2, de la loi du 8 juillet 1976Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/07/1976 pub. 18/04/2016 numac 2016000231 source service public federal interieur Loi organique des centres publics d'action sociale. - Coordination officieuse en langue allemande de la version applicable aux habitants de la région de langue allemande fermer organique des centres publics d'aide sociale, modifié par l'article 65 de la loi du 15 juillet 1996, ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'il limite à l'aide médicale urgente le droit à l'aide sociale pour l'étranger dont la demande à être reconnu comme réfugié n'a pas été prise en considération par le ministre compétent ou par son délégué en application de l'article 51/8 de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers, même si l'intéressé attaque, par un recours auprès du Conseil d'Etat, la décision de ne pas prendre la demande en considération.
Ainsi prononcé en langue néerlandaise et en langue française, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 1er mars 2001.
Le greffier, L. Potoms.
Le président, G. De Baets.