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Arrêt De La Cour Constitutionelle
publié le 11 novembre 1999

Arrêt n° 79/99 du 30 juin 1999 Numéro du rôle : 1456 En cause : la question préjudicielle relative à l'article 17, § 3, alinéa 1 er , des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat, posée par le Conseil d'Etat. La Cour d'arbitrag composée des présidents M. Melchior et L. De Grève, et des juges H. Boel, L. François, J. Delruelle(...)

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11/11/1999
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COUR D'ARBITRAGE


Arrêt n° 79/99 du 30 juin 1999 Numéro du rôle : 1456 En cause : la question préjudicielle relative à l'article 17, § 3, alinéa 1er, des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat, posée par le Conseil d'Etat.

La Cour d'arbitrage, composée des présidents M. Melchior et L. De Grève, et des juges H. Boel, L. François, J. Delruelle, H. Coremans et M. Bossuyt, assistée du greffier L. Potoms, présidée par le président M. Melchior, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet de la question préjudicielle Par arrêt du 23 octobre 1998 en cause de V. Lescot contre la Région wallonne, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour d'arbitrage le 3 novembre 1998, le Conseil d'Etat a posé la question préjudicielle suivante : « L'article 17, § 3, alinéa 1er, des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat, modifié par la loi du 4 août 1996Documents pertinents retrouvés type loi prom. 04/08/1996 pub. 08/06/2005 numac 2005015073 source service public federal affaires etrangeres, commerce exterieur et cooperation au developpement Loi portant assentiment à la Convention entre le Royaume de Belgique et la République gabonaise tendant à éviter la double imposition et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, signée à Bruxelles le 14 janvier 1993 type loi prom. 04/08/1996 pub. 24/07/1997 numac 1996015142 source ministere des affaires etrangeres, du commerce exterieur et de la cooperation au developpement Loi portant approbation de la Convention entre le Royaume de Belgique et la République Arabe d'Egypte tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu, signée au Caire le 3 janvier 1991 type loi prom. 04/08/1996 pub. 30/06/1998 numac 1998015016 source ministere des affaires etrangeres, du commerce exterieur et de la cooperation au developpement Loi portant approbation de l'Accord sur le Transport routier entre le Royaume de Belgique, la République d'Estonie, la République de Lettonie, la République de Lituanie, le Grand-Duché de Luxembourg et le Royaume des Pays-Bas, signé à Athènes le 11 juin 1992 type loi prom. 04/08/1996 pub. 21/10/1999 numac 1999015088 source ministere des affaires etrangeres, du commerce exterieur et de la cooperation internationale Loi portant assentiment au Protocole entre le gouvernement du Royaume de Belgique et le gouvernement de la République française relatif aux allocations de naissance, signé à Bruxelles, le 26 avril 1993 type loi prom. 04/08/1996 pub. 19/05/1999 numac 1999015018 source ministere des affaires etrangeres, du commerce exterieur et de la cooperation au developpement Loi portant approbation de l'Accord sur le Transport routier entre le Royaume de Belgique, la République d'Estonie, la République de Lettonie, la République de Lituanie, le Grand-Duché de Luxembourg et le Royaume des Pays-Bas, signé à Athènes le 11 juin 1992. - Addendum fermer, viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'il prévoit qu'une demande de suspension peut être introduite au plus tard en même temps que le recours en annulation dont elle est l'accessoire, mais interdit qu'elle soit introduite postérieurement à ce recours, traitant ainsi différemment, d'une part, le requérant pour qui le risque de préjudice grave difficilement réparable est apparu postérieurement au dépôt de la requête en annulation, et, d'autre part, celui pour qui ce risque existait déjà au jour du dépôt de la requête en annulation, le premier étant mis, à la différence du second, dans l'impossibilité d'agir en référé devant le Conseil d'Etat ? » II. Les faits et la procédure antérieure Le requérant devant le Conseil d'Etat a demandé, le 20 août 1998, l'annulation d'un permis de bâtir. Les travaux pour lesquels ce permis était requis ont débuté le 31 août 1998. Le requérant a postulé le 4 septembre 1998 la suspension du permis attaqué.

La demande de suspension étant postérieure au recours en annulation, l'auditeur au Conseil d'Etat, se référant à l'article 17, § 3, alinéa 1er, des lois coordonnées, conclut à l'irrecevabilité manifeste de la demande. Le requérant fait valoir que les travaux n'avaient pas commencé lorsqu'il a introduit son recours en annulation et que le préjudice grave et difficilement réparable qui justifie la demande de suspension n'est survenu que lorsque lesdits travaux ont été entamés.

Il soutient par ailleurs que la disposition précitée contient une discrimination entre requérants, suivant que le préjudice grave et difficilement réparable survient avant ou après l'introduction du recours en annulation.

A la demande du requérant, la question préjudicielle reproduite ci-dessus a été adressée à la Cour.

III. La procédure devant la Cour Par ordonnance du 3 novembre 1998, le président en exercice a désigné les juges du siège conformément aux articles 58 et 59 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage.

Les juges-rapporteurs ont estimé n'y avoir lieu de faire application des articles 71 ou 72 de la loi organique.

La décision de renvoi a été notifiée conformément à l'article 77 de la loi organique, par lettres recommandées à la poste le 13 novembre 1998.

L'avis prescrit par l'article 74 de la loi organique a été publié au Moniteur belge du 28 novembre 1998.

Des mémoires ont été introduits par : - le Conseil des ministres, rue de la Loi 16, 1000 Bruxelles, par lettre recommandée à la poste le 21 décembre 1998; - V. Lescot, faisant élection de domicile à 7000 Mons, rue de la Terre du Prince 17, par lettre recommandée à la poste le 29 décembre 1998; - le collège des bourgmestre et échevins de la ville de Mons, dont les bureaux sont établis à 7000 Mons, Grand-Place, par lettre recommandée à la poste le 30 décembre 1998.

Ces mémoires ont été notifiés conformément à l'article 89 de la loi organique, par lettres recommandées à la poste le 21 janvier 1999.

Le collège des bourgmestre et échevins de la ville de Mons a introduit un mémoire en réponse, par lettre recommandée à la poste le 22 février 1999.

Par ordonnance du 28 avril 1999, la Cour a prorogé jusqu'au 3 novembre 1999 le délai dans lequel l'arrêt doit être rendu.

Par ordonnance du 5 mai 1999, la Cour a déclaré l'affaire en état et fixé l'audience au 9 juin 1999.

Cette ordonnance a été notifiée aux parties ainsi qu'à leurs avocats par lettres recommandées à la poste le 6 mai 1999.

A l'audience publique du 9 juin 1999 : - ont comparu : . Me P. Marleghem, avocat au barreau de Mons, pour V. Lescot; . Me F. Daout, avocat au barreau de Mons, pour le collège des bourgmestre et échevins de la ville de Mons; . Me M. Mahieu, avocat à la Cour de cassation, pour le Conseil des ministres; - les juges-rapporteurs L. François et H. Coremans ont fait rapport; - les avocats précités ont été entendus; - l'affaire a été mise en délibéré.

La procédure s'est déroulée conformément aux articles 62 et suivants de la loi organique, relatifs à l'emploi des langues devant la Cour.

IV. En droit - A - A.1.1. La ville de Mons observe que les travaux que conteste le requérant devant le Conseil d'Etat ont déjà fait l'objet d'un permis de bâtir en 1996, lequel a fait l'objet d'un recours en annulation en 1997. Le risque étant un « événement dommageable dont la survenance est incertaine, quant à sa réalisation ou à la date de cette réalisation;se dit aussi bien de l'éventualité d'un tel événement en général que de l'événement spécifié dont la survenance est envisagée » (Cornu), l'intéressé ne peut soutenir, comme il tente implicitement de le faire, que le risque de préjudice grave et difficilement réparable dont il se prévaut ne serait apparu que postérieurement au dépôt de son recours en annulation du 20 août 1998. Bien que la Cour ne puisse statuer sur la pertinence de la question posée, ces éléments de fait montrent que l'intéressé souhaite en réalité « reculer » au stade du « risque du risque » de préjudice grave et difficilement réparable; cette démarche sort naturellement du champ d'application du texte soumis à la Cour.

A.1.2. Selon le Conseil des ministres et la ville de Mons, la disposition en cause, qui a été assouplie par rapport à sa version initiale en ce sens que l'introduction d'une demande de suspension ne doit plus être simultanée à celle du recours en annulation, crée une différence de traitement qui repose sur une justification objective et raisonnable.

A.1.3. Il faut en effet tenir compte, selon le Conseil des ministres et la ville de Mons, de ce que la procédure en suspension a un caractère accessoire par rapport à la procédure en annulation (elle est rejetée si la requête en annulation est irrecevable ou si les moyens invoqués sont insuffisants à fonder une décision d'annulation) : la Cour ne pourrait, sans statuer en opportunité, remettre en cause ce caractère accessoire compte tenu duquel l'article 17, § 3, alinéa 1er, des lois sur le Conseil d'Etat a effectivement prévu l'exigence en cause.

La circonstance que pour certains requérants le risque de préjudice grave et difficilement réparable ne pourrait se déclarer qu'après l'introduction du recours en annulation, alors que le délai pour agir au Conseil d'Etat n'est pas expiré, ne justifie pas de remettre en cause la jurisprudence du Conseil d'Etat déclarant irrecevables des demandes de suspension introduites après un recours en annulation.

A.1.4. Celui qui désire agir au Conseil d'Etat s'interrogera le plus souvent sur ses possibilités d'action non seulement en annulation, mais également en suspension, de telle sorte que, selon le Conseil des ministres, la demande de suspension précédera le recours en annulation ou sera concomitante à celui-ci.

Il n'est en effet pas fréquent qu'un risque de préjudice grave et difficilement réparable que causerait l'exécution immédiate d'un acte administratif apparaisse après le délai de soixante jours dans lequel doit être introduit un recours en annulation. Autrement dit, en autorisant une dissociation relative des recours en annulation et en suspension, c'est-à-dire en permettant que le recours en suspension soit introduit antérieurement, mais non postérieurement, au recours en annulation, l'article 17, § 3, alinéa 1er, des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat offre des possibilités d'action qui correspondent au quod plerumque fit. La Cour a régulièrement admis qu'il fallait apprécier la réglementation au regard des situations les plus fréquentes.

A.1.5. Selon le Conseil des ministres et la ville de Mons, la possibilité d'obtenir la suspension d'un acte administratif n'est qu'un tempérament - non un abandon - du privilège du préalable : le législateur a fixé un point d'équilibre raisonnable entre la nécessité de garantir l'efficacité d'une action administrative, d'une part, et le respect de droits ou intérêts concurrents qui seraient méconnus ou mis en péril par cette action administrative, d'autre part.

L'administré dispose en effet d'un délai suffisant pour apprécier s'il y a lieu d'agir non seulement en annulation, mais également en suspension.

A.1.6. La situation, plutôt extraordinaire, dans laquelle la menace de préjudice apparaît après l'introduction du recours en annulation peut, d'après le Conseil des ministres et la ville de Mons, être rencontrée par d'autres possibilités d'actions juridiques.

A.1.7. D'une part, le référé civil, étant entendu qu'il ne s'agit pas d'apprécier si, durant le délai de soixante jours pour agir au Conseil d'Etat, ainsi que lorsque le Conseil d'Etat a été saisi en suspension, le juge des référés peut également être saisi : la question préjudicielle portant sur une disposition qui exclut de pouvoir encore agir en suspension devant le Conseil d'Etat puisque celui-ci a déjà été saisi d'un recours en annulation, il s'agit d'apprécier quelles autres possibilités d'action sont encore offertes. A cet égard, nul ne conteste que, lorsque le Conseil d'Etat n'est plus compétent, soit par expiration du délai pour agir, soit parce qu'il a été saisi d'une requête en annulation mais non d'une requête en suspension, il est toujours loisible d'agir devant le juge des référés de l'ordre judiciaire.

Le référé civil constitue une action d'une efficacité équivalente à celle qui s'attache à l'action qui n'a pas été intentée avant ou concomitamment au recours en annulation et obéit à des conditions similaires à celles requises pour obtenir une suspension - voire plus favorables que celles-ci -, le risque de préjudice grave et difficilement réparable ne devant pas être établi.

A.1.8. D'autre part, parce qu'il a été indiqué que la possibilité existait, lorsque le délai prévu pour introduire un recours en annulation n'est pas expiré, d'introduire un nouveau recours en annulation, avec la mention que le premier recours doit être considéré comme nul et non avenu, et de joindre au second recours en annulation une demande en suspension qui ne pourra pas être considérée comme irrecevable. Cette solution n'a pas été condamnée par la jurisprudence.

A.2.1. V. Lescot, requérant devant le Conseil d'Etat, fait valoir qu'il n'existait, lors de l'introduction de son recours en annulation, aucun risque de préjudice grave difficilement réparable (une demande de suspension introduite à ce moment eût été irrecevable) et qu'il disposait encore d'un temps suffisant avant l'expiration du délai de soixante jours. Mais la limitation fixée par la disposition en cause met le requérant dans l'impossibilité d'agir en suspension en le traitant de manière discriminatoire par rapport à celui qui, au jour de l'introduction du recours, peut se prévaloir d'un préjudice grave difficilement réparable. Les exigences du procès équitable sont méconnues alors que, dans les deux hypothèses, une demande de suspension pouvait être introduite dans le délai de recours de soixante jours, qui est un délai de forclusion mettant toutes les parties sur pied d'égalité.

A.2.2. Le législateur a présumé que les requérants redoutant l'exécution immédiate de l'acte attaqué veilleront à en demander simultanément la suspension. Mais la menace peut n'apparaître qu'ensuite, même après l'expiration du délai de recours. Un recours devant le juge des référés serait voué à l'échec, soit parce que la demande de suspension introduite par le requérant aurait été rejetée et que l'on voit mal le juge des référés ordonner une suspension dans cette hypothèse, soit parce que, si une telle demande n'avait pas été introduite, le défaut d'urgence serait opposé au requérant, à qui il serait reproché de n'avoir pas assorti son recours en annulation d'une demande de suspension.

A.2.3. Les impératifs économiques liés aux frais de défense et au coût, pour un particulier, du droit de timbre de 7.000 francs à apposer à la fois sur le recours en annulation et la demande de suspension amènent à ce que cette dernière soit bien pensée et réfléchie. Une appréciation du préjudice grave et difficilement réparable peut, comme en l'espèce, n'être possible que lors de la mise en uvre de l'acte attaqué; le risque peut croître en intensité après le moment du dépôt du recours en annulation.

Aucun motif légitime ne dicte qu'un requérant soit privé du droit de déposer un recours en suspension après un recours en annulation, pour autant qu'il se trouve toujours dans le délai de soixante jours à compter de la prise de connaissance de l'acte attaqué.

A.3.1. Contrairement à ce que défend V. Lescot (A.2.2), la ville de Mons considère qu'un arrêt du Conseil d'Etat rejetant une demande de suspension n'a aucune autorité de chose jugée devant le juge des référés qui serait saisi ultérieurement : le Conseil d'Etat ne saurait être considéré comme s'étant prononcé sur le caractère grave difficilement réparable d'un risque qui n'existait pas encore au moment où il fut saisi. Le juge des référés peut donc ordonner la suspension d'un acte administratif s'il s'avère que le risque de préjudice grave difficilement réparable est apparu après le dépôt du recours en annulation devant le Conseil d'Etat contre cet acte.

A.3.2. L'appréciation des impératifs économiques liés au droit de timbre faite par V. Lescot procède, selon la ville de Mons, d'une lecture erronée des dispositions de l'arrêté du Régent du 23 août 1948 déterminant la procédure devant la section d'administration du Conseil d'Etat, dont l'article 70, tel qu'il était en vigueur lors de l'introduction du recours en cause, prévoit le paiement du droit de 7.000 francs pour la seule demande de suspension, celui afférent à la demande d'annulation ne devant être acquitté que si la procédure est poursuivie. Ces impératifs économiques ne justifient donc nullement l'abstention d'introduire une demande de suspension concomitante au recours en annulation. - B - B.1. L'article 17, § 3, alinéa 1er, des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées par l'arrêté royal du 12 janvier 1973, dispose : « § 3. La demande de suspension est introduite par un acte distinct de la requête en annulation et au plus tard avec celle-ci. » B.2. En exigeant que la demande de suspension soit introduite antérieurement ou simultanément au recours en annulation dont cette demande est l'accessoire, la disposition en cause établit une différence de traitement entre les requérants suivant que le risque de préjudice grave et difficilement réparable a été aperçu avant ou après l'introduction du recours en annulation.

B.3. Les règles constitutionnelles de l'égalité et de la non-discrimination n'excluent pas qu'une différence de traitement soit établie entre des catégories de personnes, pour autant qu'elle repose sur un critère objectif et qu'elle soit raisonnablement justifiée.

L'existence d'une telle justification doit s'apprécier en tenant compte du but et des effets de la mesure critiquée ainsi que de la nature des principes en cause; le principe d'égalité est violé lorsqu'il est établi qu'il n'existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.

B.4. La suspension n'a d'utilité que si elle est rapide. Dès lors qu'il mettait en place une procédure supposant que le Conseil d'Etat agisse avec diligence, le législateur pouvait considérer que des délais pouvaient, de même, être impartis au demandeur (Doc. parl., Sénat, 1990-1991, n° 1300-2, p. 11).

B.5.1. Lorsqu'il supprima, par la loi du 19 juillet 1991, l'exigence de la simultanéité de l'introduction de la demande de suspension et du recours en annulation que formulait la disposition en cause dans sa rédaction initiale, le législateur se rangea à l'avis du Conseil d'Etat selon lequel une mesure de suspension devait pouvoir être prise pendant le délai de soixante jours dont le requérant dispose pour rédiger avec tout le soin nécessaire son recours en annulation (Doc. parl., Sénat, 1990-1991, n° 1300-1, p. 39). La disposition en cause permet en conséquence que la demande de suspension précède le recours en annulation. Le législateur n'en a pas moins refusé d'admettre que la demande de suspension puisse être introduite après le recours en annulation; un amendement qui le proposait fut rejeté à l'unanimité en commission du Sénat (Doc. parl., Sénat, 1990-1991, n° 1300-2, p. 11).

B.5.2. S'il est vrai qu'un préjudice grave et difficilement réparable, issu de l'acte attaqué, peut ne survenir qu'après l'introduction du recours, il y a lieu d'observer que la loi ne subordonne pas la suspension à la réalisation mais au risque d'un préjudice grave et difficilement réparable et que le requérant est normalement à même d'apprécier l'existence de ce risque dès qu'il se dispose à demander l'annulation de l'acte qui lui fait grief.

En outre, sans compter les possibilités qui s'offrent de recourir au juge des référés, il y a lieu de relever que le requérant qui n'a pas mesuré ledit risque au moment de l'introduction du recours peut, si le délai n'est pas expiré, introduire un nouveau recours et y joindre une demande de suspension.

B.5.3. La question appelle une réponse négative.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : L'article 17, § 3, alinéa 1er, des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées par l'arrêté royal du 12 janvier 1973, ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'il prévoit qu'une demande de suspension peut être introduite au plus tard en même temps que le recours en annulation dont elle est l'accessoire.

Ainsi prononcé en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 30 juin 1999.

Le greffier, L. Potoms.

Le président, M. Melchior.

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