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Décision Du Conseil De La Concurrence
publié le 22 février 2013

Conseil de la concurrence. - Décision n° 2012-P/K-32 du 10 décembre 2012. - Affaires CONC-P/K-05/0067, CONC-P/K-09/0017 et CONC-P/K-10/0016 Publimail, Link2Biz International et G3 Worldwide Belgium/bpost I. Procédure II. Le rapport de l'audi III. Questions de procédure IV. Le contexte factuel 4.1. Le secteur postal et la régulation

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SERVICE PUBLIC FEDERAL ECONOMIE, P.M.E., CLASSES MOYENNES ET ENERGIE


Conseil de la concurrence. - Décision n° 2012-P/K-32 du 10 décembre 2012. - Affaires CONC-P/K-05/0067, CONC-P/K-09/0017 et CONC-P/K-10/0016 Publimail, Link2Biz International et G3 Worldwide Belgium/bpost I.Procédure II. Le rapport de l'auditeur III. Questions de procédure IV. Le contexte factuel 4.1. Le secteur postal et la régulation 4.2. Aperçu général des activités postales et des différentes catégories d'opérateurs 4.3. La politique commerciale de bpost qui fait l'objet du rapport 4.3.1. Les différents types de contrats 4.3.2. Les tarifs et les ristournes 4.3.2.1. Les ristournes commerciales 4.3.2.2. Les ristournes opérationnelles 4.3.2.3. Indirect Channel Rebate 4.3.2.4. Remarques générales sur les ristournes V. Les marchés en cause 5.1. La position des parties concernant la définition des marchés 5.2. L'analyse par le Conseil VI. Commerce entre Etats membres VII. L'existence d'une position dominante VIII. Le caractère abusif du modèle expéditeur 8.1. Résumé de la position des parties 8.2. Analyse par le Conseil 8.2.1. Introduction 8.2.2. L'assiette de calcul des ristournes 8.2.2.1 Le traitement différencié de deux groupes de clients 8.2.2.2. Les effets d'éviction du modèle expéditeur 8.2.2.3 Les autres facteurs qui contribuent au caractère restrictif 8.3. Les justifications invoquées par bpost pour le modèle expéditeur 8.4. Conclusion sur le caractère abusif du modèle expéditeur IX. Les autres griefs 9.1. Le refus de vente 9.2. Le manque de transparence X. Sanction 10.1. La compétence du Conseil 10.2. Le montant de base 10.3. Autres considérations concernant le calcul de l'amende I. Procédure 1. Le 2 novembre 2005, la SA Publimail (ci-après : Publimail) a déposé une plainte auprès du Conseil de la concurrence sur la base de l'article 3 de la Loi sur la protection de la concurrence économique (ci-après : LPCE) contre La Poste SA (ci-après la nouvelle dénomination : bpost).La plainte a été enregistrée sous le numéro CONC-P/ K-05/0067.

Le 8 octobre 2009, Link2Biz International SA (ci-après : Link2Biz) porte plainte contre bpost auprès du Conseil de la concurrence. La plainte a été enregistrée sous la référence CONC-P/K-09/0017.

Le 14 juillet 2010, G3 Worldwide Belgium SA (ci-après : G3) porte également plainte contre bpost. Sa plainte est enregistrée sous la référence CONC-P/K-10/0016. 2. Le 7 avril 2011, l'auditeur a déposé un rapport motivé au Conseil. Le rapport propose au Conseil de la concurrence de constater un abus de position dominante dans le chef de bpost. Le rapport motivé a été notifié à la partie incriminée. 3. Le 26 avril 2011, le dépôt du rapport de l'auditeur a été notifié aux plaignants conformément à l'article 48, § 1er, deuxième alinéa de la LPCE.4. Dans un courrier du 16 mai 2011, bpost a adressé plusieurs demandes d'ordre procédural au Conseil.5. Le 23 mai 2011, le plaignant, G3, demande d'obtenir une copie du rapport motivé.6. Le 24 mai 2011, les conseils de bpost, ainsi que l'auditeur, accompagné de représentants de la Direction générale de la concurrence, ont été entendus par la chambre.L'objet de l'audience était le règlement de la procédure et les demandes formulées par bpost. Les conseils de bpost ont eu l'occasion d'expliquer leurs demandes à la chambre et l'auditeur a eu la possibilité de réagir aux différents points soulevés par les courriers mentionnés ci-dessus. 7. Le 1er juin 2011, le plaignant Link2Biz a demandé la communication de la version non confidentielle du rapport de l'auditorat ainsi que l'accès au dossier.Le 7 juin 2011, Link2Biz a ajouté une demande d'accès aux observations déposées par bpost, elle a demandé de pouvoir déposer des observations écrites et elle a demandé d'être entendue lors de l'audience. 8. Dans une décision du 8 juin 2011, la chambre a répondu aux demandes de bpost.La décision est reprise ci-dessous : « - absence de procès-verbaux ou de rapports de réunions bpost demande que le dossier d'instruction soit déclaré incomplet pour cause de l'absence de certains procès-verbaux ou autres supports contenant des informations détaillées au sujet de ce qui a été discuté lors de plusieurs réunions tenues lors de l'instruction des affaires.

Il s'agit notamment de réunions avec les plaignants, de réunions avec des représentants de l'IBPT ainsi que de réunions avec des tiers.

En particulier, bpost cite des réunions qui auraient eu lieu le 18 novembre 2010 et le 24 août 2010 avec Link2Biz International et ses conseils, une réunion avec Publimail qui aurait eu lieu en octobre 2009, une réunion du 11 décembre 2009 avec Spring, des réunions du 10 décembre 2009, 15 septembre 2010 et du 27 octobre 2010 avec l'IBPT et, finalement, des réunions qui auraient eu lieu le 5 mai 2010 et le 3 août 2010 avec M. [...] de la BDMA. bpost demande également une copie de toute documentation écrite présentée lors de ces réunions. bpost estime que la partie incriminée a droit à l'accès à des pièces résumant le contenu de chacune des réunions qui ont eu lieu dans le cadre de l'instruction formelle en son absence.

Le premier problème d'accès soulevé par bpost concerne donc l'absence de documents reprenant le contenu de certaines réunions organisées par l'auditorat lors de l'instruction. Lors de l'audience, l'auditeur a réfuté les arguments de bpost pour les différentes catégories de réunions citées, à l'exception de la réunion tenue avec M. [...] de la BDMA. En ce qui concerne les plaignants, l'auditeur a précisé qu'une partie des réunions auxquelles se réfère bpost sur base des indications qu'elle a trouvées dans d'autres documents contenus dans le dossier, ont eu lieu soit avant les plaintes, soit en dehors de l'instruction par l'auditorat.

En ce qui concerne les réunions avec l'IBPT, l'auditeur fait une distinction entre les réponses que peut donner l'IBPT à des demandes de renseignements (celles-ci se trouvent bien dans le dossier d'instruction en version non confidentielle) et la communication informelle qui a eu lieu entre régulateurs.

L'auditeur a confirmé lors de l'audience que tous les documents recueillis lors de l'instruction, à charge et à décharge pour bpost, se trouvent dans le dossier d'instruction. Or, le rapport motivé est basé sur les éléments qui se trouvent dans le dossier d'instruction.

Ce dossier, éventuellement complété par des éléments qui feront l'objet du débat devant la chambre, contient les seuls éléments de preuve sur lesquels le Conseil peut se baser pour rendre sa décision.

L'absence d'autres documents n'existant pas à ce jour, ne peut pas nuire à la défense de bpost.

En ce qui concerne en particulier des réunions tenues avec M. [...] de la BDMA, la chambre a pris acte de l'explication qu'a donnée l'auditeur : un PV validé par la personne en question n'a pas pu être fait lors de l'instruction pour cause d'absence de coopération malgré des rappels de la part de l'équipe d'instruction. La chambre pourra, si elle l'estime nécessaire, décider d'entendre ce tiers sur base de l'article 48, § 5, de la LPCE. - demandes concernant la confidentialité de certains documents du dossier d'instruction bpost a formulé une deuxième série de questions qui concernent la confidentialité de certains documents dans le dossier transmis par l'auditeur.

En premier lieu, bpost conteste la qualification de confidentialité de certaines demandes de renseignements lui envoyées par la Direction Générale de la concurrence. Selon bpost, les questions mêmes incluent des informations confidentielles et ne peuvent donc être accessibles pour les tiers.

Il s'agit en particulier des demandes de renseignements du 22 juillet 2009 et du 6 septembre 2010. Lors de l'audience, l'auditeur a reconnu que la qualification des documents en question pourrait être modifiée dans la mesure où la question qui est posée reprend des éléments d'une réponse qui elle-même était à considérer comme confidentielle. Par contre, les questions dont la formulation est basée sur des éléments venant des tiers, ne justifient pas de protection en raison de la confidentialité. La chambre a pu constater à l'audience du 24 mai 2011 que l'auditeur s'est déclaré prêt à revoir certaines qualifications suite aux demandes de bpost.

La chambre souscrit aux critères formulés par l'auditeur sur ce point (repris ci-dessus au n° 13) et invite l'auditeur à requalifier les documents 82, question 6 et document 113, question 2a2, 2a3, 4a, 4b, 9a et 9c selon cette méthode.

Ensuite, bpost demande à l'auditeur d'écarter intégralement du dossier transmis à la chambre du Conseil tous les documents du dossier d'instruction venant des tiers qui portent la classification « D ». La classification « D » a été donnée par l'auditeur aux documents auxquels il donne accès uniquement à la chambre mais qui restent inaccessibles à bpost.

Selon bpost, il faut interpréter la LPCE en ce sens que le législateur a voulu empêcher que la chambre du Conseil qui connaît de l'affaire ait connaissance des éléments occultés de telle façon du dossier pour l'entreprise concernée.

Sur ce point, l'auditeur s'est référé dans sa décision en matière de confidentialité (décision du 7 avril 2011) à la jurisprudence du Conseil et notamment à la décision dans l'affaire Base/Proximus (Décision 2009-P/K-10 du Conseil du 26 mai 2009). Il a précisé qu'il en suit que tous les organes de l'autorité de la concurrence doivent avoir accès aux informations confidentielles dans le cadre de l'exécution de leurs tâches. Le fait que le législateur indique que les informations confidentielles des tiers doivent être enlevées du dossier implique qu'elles doivent être enlevées du dossier qui sera accessible à certaines parties à la procédure. Le but ne peut être d'enlever ces informations du dossier accessible à la chambre.

Tout d'abord, la chambre constate que dès lors que ces affaires lui ont été distribuées, elle a pris connaissance du rapport motivé ainsi que du dossier d'instruction et de la décision en matière de confidentialité prise par l'auditeur. Ce dossier contient quelques documents avec le « code D » auxquels bpost n'a pas accès. Dans la mesure où le dossier a été déposé, il n'est plus possible pour l'auditeur de donner suite à la demande de bpost de retirer une partie du dossier.

En tout état de cause, la chambre considère que les droits de la défense de l'entreprise concernée ne s'opposent pas à ce que la chambre prenne connaissance de certains éléments dont l'entreprise concernée n'a pas pu prendre connaissance. L'asymétrie d'information qui peut éventuellement en être le résultat est nécessaire pour la protection de la confidentialité des données venant des tiers d'une part, et est limitée d'autre part par la nécessité pour l'auditorat de fournir des versions non confidentielles adéquates aux entreprises concernées. Une version non confidentielle adéquate ne rend inaccessible que les données qui méritent vraiment la protection de la confidentialité.

Pour le surplus, la protection juridique des entreprises concernées est garantie par le principe établi selon lequel la chambre ne peut se baser sur des éléments qui n'ont pas été portés à la connaissance de l'entreprise concernée, au moins en version non confidentielle (voir également l'article 48, § 7 de la LPCE). Il n'est donc pas exclu que la chambre estime ultérieurement qu'il s'avère nécessaire de donner un accès à certaines données lors du débat contradictoire si cela est nécessaire en vue du principe évoqué.

Toute autre interprétation de la loi rendrait d'ailleurs une instruction en matière de concurrence très difficile, voire impossible (Décision Kinepolis 2008-C/C-52 du 1 octobre 2008, confirmée par la Cour d'appel sur la procédure dans un arrêt du 11 mars 2010, Décision 2009-P/K-10 du Conseil du 26 mai 2009, Base/Proximus, Décision 2010-I/O-11 du 20 mai 2010, Staalplaatradiatoren, en particulier les n° 57 à 70).Il est inconcevable qu'une juridiction amenée à prendre une décision ait a priori un accès incomplet au dossier. Le Conseil est appelé à évaluer le rapport et les preuves amenés par l'auditeur en respectant aussi bien l'importance de la protection de la confidentialité de toutes parties (y inclus les tiers) que la présomption d'innocence et les droits de la défense de l'entreprise concernée. Si l'intérêt public et/ou les droits de la défense exigeaient un accès élargi lors de la procédure devant la chambre, il appartient à la chambre de prendre les mesures nécessaires.

A ce stade de la procédure, bpost conteste le principe même du fait que certains documents soient accessibles uniquement à la chambre.

Pour les raisons évoquées ci-dessus, ces arguments doivent être rejetés.

Finalement dans cette catégorie, bpost conteste également la classification « D » de certains documents du dossier d'instruction qui viennent des tiers dont aucune version non confidentielle ne semble être inclue dans le dossier. Il s'agit notamment de certains documents provenant de l'IBPT. En ce qui concerne la classification « D » (uniquement accessible à la chambre) des documents venant de l'IBPT, l'auditeur a indiqué lors de l'audience que des versions non confidentielles de ces documents se trouvent en partie ailleurs dans le dossier. Les seules exceptions sont les documents 129 3a-3b, c'est-à-dire le résultat de la consultation publique organisée par l'IBPT. Cependant, il existe une synthèse de ces documents qui figure dans le dossier accessible pour bpost au numéro 125. La qualification des documents auxquels bpost demande l'accès a été établie par l'IBPT. La chambre du Conseil estime que c'est à juste titre que l'auditeur a repris cette qualification.

En ce qui concerne les annexes 4 et 5 au document 129, des présentations powerpoint des études, la chambre du Conseil constate qu'un résumé est effectivement accessible au document 133. Pour ces études, la chambre du Conseil remarque cependant qu'il n'est pas exclu que certains éléments de ces études devront être soumis au débat contradictoire dans la mesure où ces éléments seraient nécessaires pour la décision que la chambre est appelée à prendre (voir ci-dessus au n° 19).

Il ressort finalement de l'inventaire du dossier d'instruction que certaines réponses par certains tiers (les routeurs) sont intégralement inaccessibles pour bpost et qu'il n'en existe pas de version non confidentielle.

Il s'agit en particulier des documents 156, 162, 189, 200, 222 et 231.

Le rapport fait explicitement référence à certains de ces documents.

L'entreprise concernée peut donc en déduire que ces éléments ont servi à la rédaction du rapport motivé et sont donc potentiellement à charge.

La chambre constate que la LPCE impose en tous les cas l'obligation de fournir une version non confidentielle et invite donc l'auditeur à ajouter ces versions non confidentielles au dossier accessible à bpost. Lors de l'audience tenue le 24 mai 2011 il s'est engagé à contacter les tiers en question afin d'obtenir des versions non confidentielles adéquates. - la décision de joindre les affaires Finalement, bpost demande d'obtenir la décision de l'auditeur de joindre les trois affaires.

La chambre constate que l'auditeur a déposé un seul rapport motivé pour trois affaires distinctes. Une décision formelle de joindre les affaires ne figure pas dans le dossier. L'auditeur a confirmé lors de l'audience du 24 mai 2011 qu'une telle décision n'existe pas. Il ne semble pas y avoir de disposition légale qui s'oppose à ce qu'un seul rapport soit déposé pour trois affaires. » 9. Le 28 juin 2011, et suite à la décision du 8 juin 2011, l'auditeur dépose un nouvel inventaire du dossier d'instruction et des nouvelles pièces.Il communique également ces documents à l'entreprise concernée. 10. La chambre répond aux demandes de Link2Biz dans une décision du 5 juillet 2011.Cette décision est reprise ci-dessous : « Link2 Biz International pourra être entendue, en tant que plaignant, dans le cadre de la procédure devant le Conseil (article 48, § 5, alinéa 1er de la LPCE).

En ce qui concerne l'accès au rapport, la LPCE prévoit que, si la chambre du Conseil qui connaît de l'affaire l'estime nécessaire, le plaignant peut recevoir une version non confidentielle du rapport de l'auditeur (article 48, § 1er, alinéa 1er de la LPCE).

Dans le cas d'espèce, la chambre estime effectivement qu'il est nécessaire que Link2Biz International puisse prendre connaissance de la version non confidentielle du rapport.

L'accès au rapport permettra également au plaignant de formuler ses observations écrites en fonction des éléments retenus par l'auditeur.

A cet effet, le président de chambre fixera les délais conformément à l'article 48, § 3 de la LPCE. Pour ce qui est de l'accès au dossier d'instruction, l'article 48, § 2, deuxième alinéa, de la LPCE, prévoit que le plaignant n'a, en principe, pas accès au dossier, à moins que le président de la chambre n'en décide autrement. Il convient donc au président de la chambre de prendre cette décision. « 11. Suite à la décision du 5 juillet 2011 de la chambre, le président de chambre a rejeté la demande d'accès au dossier de Link2Biz dans une décision du 7 juillet 2011.La décision est motivée comme suit : « Les personnes ayant introduit la plainte et toutes les autres personnes physiques ou morales entendues par la chambre du Conseil n'ont, en principe, pas accès au dossier, à moins que le président de la chambre qui connaît de l'affaire n'en décide autrement (article 48, § 2, deuxième alinéa de la LPCE).

Lorsqu'un tiers est entendu par la chambre qui connaît de l'affaire, le président de chambre pourrait envisager de lui donner accès à certaines ou à toutes les pièces du dossier, dérogeant ainsi au principe suivant lequel le tiers n'a pas accès au dossier, afin de lui permettre d'informer utilement la chambre au sujet des pratiques restrictives de concurrence faisant l'objet de l'instruction.

En l'espèce, le plaignant doit être en mesure de faire connaître son point de vue à propos de l'objet de l'instruction après avoir pris connaissance de la version du rapport de l'auditeur qui lui sera transmise.

Sur la base du rapport dont il prendra connaissance, le plaignant peut amener des éléments factuels, économiques et/ou juridiques, qui peuvent être utiles pour la chambre à ce stade de la procédure. En tant que plaignant, il peut également informer la chambre sur les circonstances qui l'ont mené à déposer plainte.

L'examen des pièces du dossier auxquelles ce rapport fait référence n'est pas indispensable à cet effet. Il n'est dès lors pas nécessaire ni même utile de déroger dans cette affaire au principe de l'absence d'accès au dossier par les tiers.

La demande de Link2Biz, telle que formulée dans la lettre de ses conseils du 1er juin 2011 ne peut dès lors pas être agréée. » 12. En ce qui concerne la demande de G3, sur base d'une motivation identique à celle pour Link2Biz, la chambre décide le 5 juillet 2011 d'accorder à G3 le droit d'être entendue et le droit d'avoir accès à la version non confidentielle du rapport.13. Par ailleurs, en vue de la suite de la procédure devant le Conseil, la chambre décide, le 5 juillet 2011, de joindre les trois affaires CONC-P/K-05/0067, CONC-P/K-09/0017 et CONC-P/K-10/0016.14. Le 7 juillet 2011, le greffier du Conseil informe le président de l'IBPT du dépôt du rapport motivé dans cette affaire.Une copie de ce courrier est transmise aux parties, l'auditeur et l'entreprise concernée. 15. Après la consultation de l'auditeur et de l'entreprise concernée par le président de chambre, le greffe transmet une version non confidentielle du rapport aux différents plaignants le 13 juillet 2011.16. Ensuite, un calendrier pour les observations écrites est fixé par le président de chambre et transmis aux parties le 19 juillet 2011.17. Le 30 août 2011, le plaignant Publimail, demande d'avoir accès à la version non confidentielle du rapport de l'auditeur. Le 15 septembre 2011, la chambre a décidé comme suit : « En tant que plaignant, Publimail SA pourra être entendue dans le cadre de la procédure devant le Conseil (article 48, § 5, alinéa 1er de la LPCE).

En ce qui concerne l'accès au rapport, la LPCE prévoit que, si la chambre du Conseil qui connaît de l'affaire l'estime nécessaire, le plaignant peut recevoir une version non confidentielle du rapport de l'auditeur (article 48, § 1er, alinéa 1er de la LPCE).

Dans le cas d'espèce, la chambre estime effectivement qu'il est nécessaire que Publimail SA puisse prendre connaissance de la version non confidentielle du rapport. Cet accès permettra à Publimail SA d'être entendue par la chambre en ayant connaissance des principaux éléments retenus par l'auditeur à l'encontre de bpost. « 18. Après consultation de l'auditeur et de l'entreprise concernée par le président de chambre, une version non confidentielle du rapport est transmise à Publimail le 13 octobre 2011.19. Le 8 décembre 2011, le greffe adresse un courrier au président de l'IBPT dans lequel il est indiqué que la chambre souhaite entendre l'IBPT à l'audience prévue dans cette affaire.20. Le 15 décembre 2011, les parties reçoivent quelques informations sur le déroulement de l'audience.A cette date, la chambre décide également de n'entendre l'IBPT qu'à une deuxième audience à déterminer. 21. Le 20 décembre 2011 une audience a lieu en présence de l'auditeur, de l'équipe d'instruction de la Direction générale de la concurrence et de l'entreprise concernée.Les plaignants auxquels la chambre a accordé le droit d'être entendu l'ont également été. 22. Après consultation de l'entreprise concernée concernant la confidentialité par le président de chambre, la chambre a décidé, le 10 janvier 2012, de communiquer le rapport motivé de l'auditeur à l'IBPT.23. Le 12 janvier 2012, le président de chambre fixe un calendrier supplémentaire pour des observations écrites concernant des nouveaux engagements présentés par bpost et auxquels l'auditeur n'avait pu réagir qu'à l'audience du 20 décembre 2011.24. Le 27 février 2012 le greffe communique une liste de questions de la chambre à l'IBPT.Cette liste est également envoyée à l'auditeur et à l'entreprise concernée. 25. Le 5 mars 2012 une deuxième audience a eu lieu dans cette affaire. Lors de cette audience les représentants de l'IBPT, l'auditeur, l'équipe d'instruction et l'entreprise concernée ont été entendus. 26. Après l'audience le président de chambre accorde encore un délai à bpost afin de répondre à des questions précises posées lors de l'audience concernant son chiffre d'affaires. Le 12 mars 2012, bpost envoie les données demandées par la chambre et le 13 mars 2012 l'auditeur indique à la chambre qu'il ne conteste pas ces données. L'affaire est alors mise en délibéré. 27. Le 12 avril 2012, et suite à l'audience, bpost a transmis des informations supplémentaires à la chambre.Ces informations ont été communiquées à l'auditeur.

II. Le rapport de l'auditeur 28. L'entreprise concernée est la société anonyme de droit public bpost, anciennement La Poste, l'opérateur postal historique belge, dont le siège social est établi à Bruxelles.Le changement de la dénomination commerciale en « bpost » s'est fait en juin 2010.

Ci-après, le Conseil utilisera uniquement cette nouvelle dénomination. 29. Les activités de bpost concernent principalement les services postaux et les services financiers.Le rapport explique que bpost est également présent dans les activités de routage et de la personnalisation des documents au travers de ses filiales eXbo et Speos, qu'elle opère comme fournisseur de sa filiale BPI pour le courrier injecté directement sur le marché belge depuis l'étranger. En outre, il est question d'activités de « fulfilment » consistant en la préparation de colis en fonction de cahiers de charges précis pour assurer du trafic de paquets à sa division Taxipost. 30. Le plaignant Publimail est, selon le rapport, une entreprise de routage, dont l'activité consiste à assurer le traitement informatique, l'impression, la préparation, le conditionnement, l'adressage, le tri postal et le transport vers la poste, des courriers et mailings pour le compte d'entreprises diverses.Dans sa plainte de 2005, Publimail avait invoqué deux comportements de bpost qu'elle qualifiait d'abus de position dominante. Premièrement, Publimail estimait devoir travailler dans des conditions techniques de plus en plus difficiles depuis que bpost avait acquis plusieurs routeurs elle-même. Des exigences techniques plus strictes seraient appliquées aux autres routeurs. Deuxièmement, Publimail accusait bpost de prix discriminatoires. L'argument principal à ce sujet était que bpost ne permettait pas à Publimail d'accéder aux tarifs conventionnels et que de ce fait, elle ne pouvait concurrencer sur un pied d'égalité, alors qu'elle rentrait effectivement dans les conditions demandées par bpost pour pouvoir bénéficier de ses tarifs. 31. Selon le rapport, le plaignant Link2Biz s'occupe entre autre de routage.Il exerce également le métier d'intermédiaire postal sur les marchés internationaux. Dans sa plainte Link2Biz a cité plusieurs abus de position dominante dans le chef de bpost. Il s'agissait notamment de refus de livraison, de discrimination par rapport aux clients directs de bpost, de non-respect des obligations de transparence imposées par le cadre réglementaire, d'amenuisement des marges et de discrimination par rapport à une filiale de bpost et concurrente du plaignant. 32. Finalement, le rapport indique que le plaignant G3 (Spring), est l'un des plus grands fournisseurs de services postaux internationaux pour les clients professionnels.Spring Global Mail est le résultat d'une joint-venture entre TNT Post, Royal Mail et Singapore Post.

Spring Global Mail fournit également d'autres services tels que le « reversed mail logistics » ainsi que le « response services ». La société Spring met également en avant plusieurs points qui lui font dire que bpost abuse de sa position dominante. Les différents points avancés par G3 concernent principalement le refus de bpost de fournir aux mêmes conditions un contrat Client Direct aux intermédiaires.

Selon G3, bpost réserve ces contrats aux grands clients de bpost tels que les entreprises bancaires. 33. Le rapport de l'auditeur contient d'abord une description historique du processus de libéralisation du secteur postal en Belgique ainsi que de certaines caractéristiques pertinentes du secteur de routage et du cadre tarifaire.Les relations commerciales entre les plaignants d'une part, et l'entreprise en cause d'autre part, sont également décrites. Dans son analyse juridique, l'auditeur retient finalement plusieurs griefs contre bpost qu'il qualifie d'infractions à l'article 3 de la LPCE et/ou l'article 102 du TFUE : (1) La discrimination abusive entre déposants en fonction de leurs activités, en particulier bpost abuserait de sa position dominante sur le marché des services postaux relatifs au courrier industriel domestique (Direct Mail) et (Admin Mail) relevant ou non du monopole légal en appliquant, pour la période d'octobre 2009 jusqu'à ce jour (jour du dépôt du rapport), des conditions différentes à certaines catégories de déposants - les clients directs et les intermédiaires (routeurs) - selon qu'ils sont à l'origine ou non des envois déposés sans que cette discrimination ne soit justifiée par des critères objectifs.(2) Discrimination abusive entre déposants selon qu'ils identifient ou non leurs clients : en particulier l'auditeur estime que bpost abuse de sa position dominante sur le marché des services postaux relatifs au courrier industriel domestique (Direct Mail) et (Admin Mail) relevant ou non du monopole légal en incitant les intermédiaires à lui communiquer l'identité de leurs clients et en appliquant, pour la période entre octobre 2009 à ce jour (jour du dépôt du rapport), des conditions différentes entre les déposants en fonction de l'identification ou non de leur portefeuille clientèle sans que cette discrimination ne soit justifiée par des critères objectifs.(3) Refus de fourniture : le rapport expose que, sous réserve de justification objective apportée par bpost, le refus d'octroyer aux déposants intermédiaires, pendant la période de juin 2009 à ce jour, les mêmes contrats que ceux octroyés aux déposants « clients directs » constitue un refus de vente et est susceptible de conduire à l'élimination d'une concurrence effective dans la mesure où l'octroi de ristournes par émetteur empêche le développement du déposant intermédiaire.Un tel refus de vente constituerait dans le chef de bpost un abus de position dominante. (4) Accroissement des barrières à l'entrée et à l'expansion résultant d'un manque de transparence : le rapport développe que, selon l'auditeur, bpost a certaines responsabilités particulières tant envers ses concurrents qu'envers ses clients, une de ses responsabilités étant de fournir à ses clients intermédiaires une information précise quant à sa politique tarifaire et commerciale.Il est difficile pour les intermédiaires, selon l'auditeur, d'avoir une vision claire de la politique commerciale et tarifaire de bpost. De plus, les changements fréquents de cette politique aggravent le manque de transparence. Par ce fait, bpost accroît, selon le rapport, les barrières à l'entrée et à l'expansion de déposants intermédiaires.

L'auditeur qualifie ces circonstances d'abus de position dominante sur le marché des services postaux relatifs au courrier industriel domestique (Direct Mail et Admin Mail) relevant ou non du monopole légal pour la période 2003 à ce jour. 34. En ce qui concerne la gravité de l'infraction, l'auditeur considère que les infractions retenues peuvent être qualifiées comme une restriction grave.Par ailleurs, l'instruction n'aurait pas fait apparaître des circonstances aggravantes mais l'auditeur n'exclut pas qu'il existe éventuellement des circonstances atténuantes du fait que bpost ait décidé en 2011 de modifier quelques aspects de sa politique commerciale en vue de rencontrer certaines préoccupations de ses partenaires commerciaux et des autorités. 35. Compte tenu de ce qui précède, l'auditeur estime que bpost a abusé de sa position dominante sur le marché des services postaux relatifs au courrier industriel domestique (Direct Mail et Admin Mail) relevant ou non du monopole légal et viole de ce fait les articles 3 de la LPCE et 102 du TFUE : - en appliquant, pour la période d'octobre 2009 à ce jour (jour du dépôt du rapport) des conditions différentes à certaines catégories de déposants - les clients directs et les intermédiaires (routeurs) - selon qu'ils sont à l'origine ou non des envois déposés sans que cette discrimination ne soit justifiée par des critères objectifs; - en incitant les intermédiaires, pour la période d'octobre 2009 à ce jour, à lui communiquer l'identité de leurs clients et en appliquant, pour la même période, des conditions différentes entre déposants en fonction de l'identification ou non de leur portefeuille clientèle sans que cette discrimination ne soit justifiée par des critères objectifs; - sous réserve de justification objective apportée par bpost, en refusant pour la période de juin 2009 à ce jour, d'octroyer aux déposants intermédiaires les mêmes contrats que ceux octroyés aux déposants (clients directs), ce qui constitue un refus de vente et est susceptible de conduire à l'élimination d'une concurrence effective dans la mesure où l'octroi d'une ristourne par émetteur empêche le développement du déposant intermédiaire; - en accroissant, pour la période de mars 2003 à ce jour, les barrières à l'entrée et à l'expansion des déposants intermédiaires, en raison du manque de transparence causé par une absence de vision claire pour les déposants de la politique commerciale et tarifaire de bpost et par des changements fréquents de cette politique. 36. L'auditeur propose au Conseil de la concurrence : - de constater que les plaintes sont recevables; - de constater que bpost disposait d'une position dominante sur le marché des services postaux relatifs au courrier industriel domestique (Direct Mail et Admin Mail) relevant ou non du monopole légal pendant les années 2003 à ce jour; - de constater que bpost a enfreint l'article 3 de la LPCE et l'article 102 du TFUE en exploitant de façon abusive cette position dominante par les pratiques restrictives décrites ci-dessus; - d'imposer à bpost en application de l'article 36, § 1er de la LPCE, une amende proportionnelle à la gravité de l'infraction retenue et à sa durée.

III. Questions de procédure 37. L'entreprise concernée a invoqué plusieurs moyens concernant la procédure qu'il convient d'examiner avant l'analyse sur le fond.bpost prétend d'abord que le Conseil devrait constater la prescription de l'instruction en ce qui concerne la période avant octobre 2004.

Ensuite, bpost invoque l'absence de compétence du Conseil de la concurrence en ce qui concerne l'application de la législation postale et invoque des points spécifiques concernant le déroulement de l'instruction et la constitution du dossier d'instruction. 38. En ce qui concerne la prescription légale, l'argument de bpost concerne spécifiquement l'infraction alléguée qui consisterait en la création de barrières à l'entrée résultant de manque de transparence. Selon bpost l'auditorat n'a été saisi, au sens de l'article 44, § 1er, de la LPCE, d'une plainte visant le prétendu manque de transparence que le 8 octobre 2009, date du dépôt de la plainte de Link2BIz. Par conséquent l'instruction de l'auditeur ne pouvait porter que sur des faits ne remontant pas à plus de cinq ans à compter du 8 octobre 2009, c'est-à-dire jusqu'au 8 octobre 2004.

L'auditeur répond que si la première plainte faisant état du grief relatif au manque de transparence a bien été introduite le 8 octobre 2009, le non-respect des obligations en matière de transparence par bpost a été analysé par lui comme une infraction continue et/ou répétée qui n'avait pas encore pris fin au moment du dépôt du rapport.

Dès lors, la prescription n'a pas pu commencer à courir et l'autorité de concurrence pouvait remonter au-delà de la période de cinq ans visée à l'article 88, 1er alinéa dans la mesure où il s'agit selon l'auditeur, d'une infraction continue ou répétée visée à l'article 88, § 1er, alinéa 2 de la LPCE. 39. Le Conseil constate que l'article 88, § 1er, deuxième alinéa de la LPCE vise clairement le cas spécifique d'une infraction continue.Pour ce genre d'infractions, le législateur a voulu que le délai ne commence à courir qu'au moment de la fin de l'infraction (voir également Décision 2011-P/K-13 du 21 avril 2011, Omega Pharma et la Décision 2012-P/K-20 du 30 juillet 2012, Tondeur/Presstalis). 40. Le Conseil rappelle également qu'il y a lieu de considérer l'ensemble des griefs finalement retenus par l'auditeur dans le rapport motivé avant d'examiner si les conditions de la prescription sont remplies puisque l'auditeur ne décide qu'au moment de déposer son rapport quels griefs il va finalement retenir (Décision 2012-P/K-20 du 30 juillet 2012, Tondeur/Presstalis).41. En tout état de cause, vu l'évaluation juridique contenue dans cette décision concernant le grief lié à la transparence (voir ci-dessous au chapitre IX), il n'est pas nécessaire pour le Conseil de se prononcer sur ce moyen.42. bpost a également invoqué l'absence de compétence du Conseil de la concurrence en ce qui concerne l'application de la législation postale.Dans ses observations écrites bpost se base sur le fait que le rapport contient à plusieurs reprises des allégations basées sur la législation postale. Elle qualifie le raisonnement de l'auditeur d'excès de pouvoir. Ni l'auditeur ni le Conseil de la concurrence ne sont compétents, selon bpost, pour assurer le respect de la législation postale qui relève de la compétence exclusive de l'IBPT (article 14, § 1, 3 de la loi du 17 janvier 2003Documents pertinents retrouvés type loi prom. 17/01/2003 pub. 24/01/2003 numac 2003014009 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi relatif au statut du régulateur des secteurs des postes et des télécommunications belges type loi prom. 17/01/2003 pub. 24/01/2003 numac 2003014010 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi concernant les recours et le traitement des litiges à l'occasion de la loi du 17 janvier 2003 relative au statut du régulateur des secteurs des postes et télécommunications belges fermer). Les directives postales constituent selon bpost une loi spéciale vis-à-vis des règles de la concurrence en ce qui concerne des obligations de non-discrimination et de transparence. Le Conseil ne serait alors pas compétent pour appliquer vis-à-vis de bpost des obligations spécifiques de non-discrimination et de transparence telles qu'elles ressortent de l'article 144bis et de l'article 144ter de la Loi postale et de l'article 12 de la Directive postale.

L'auditeur répond que les règles de concurrence peuvent s'appliquer même lorsque des législations sectorielles spécifiques existent, la base légale pour l'intervention des autorités de concurrence n'étant pas la même que celles des autorités de régulation. Il appartient donc bien, selon l'auditeur, au Conseil de se prononcer sur les griefs en question, y compris ceux relatifs à l'obligation de non-discrimination et de transparence, dans la mesure où ces griefs sont également fondés au regard de la LPCE. 43. Il est clair que l'existence de la régulation sectorielle et l'éventuel impact sur les comportements d'une entreprise comme bpost, ainsi que la position (historique) particulière de bpost, peuvent faire partie de l'analyse du Conseil.Il est tout aussi clair que le Conseil ne doit pas appliquer les règles sectorielles et ne le fera pas dans la présente affaire.

La LPCE s'applique pleinement dans le secteur postal, comme dans tout autre secteur économique. Le Conseil est compétent, sans la moindre réserve, pour constater et sanctionner une infraction à l'article 3 de la LPCE. L'existence de la régulation sectorielle n'exclut pas l'exercice des compétences propres du Conseil tant que l'application des règles sectorielles n'enlève pas à l'entreprise la marge de manoeuvre pour adapter son comportement commercial (voir par analogie TUE 10 avril 2008, affaire T-271/03, Deutsche Telekom, numéro 105 et CJUE 14 octobre 2010, affaire C-280/08, aux numéros 80 et suivants et la Décision de la Commission du 22 juin 2011, Telekomunikacja Polska, au numéro 126).

Le moyen de bpost basé sur la compétence doit être rejeté. 44. En ce qui concerne le déroulement de l'instruction, bpost se plaint de la rédaction du rapport dans lequel l'auditeur reprendrait des accusations gratuites, voire des informations erronées de la part des plaignants.Par ailleurs, bpost n'aurait pas eu la possibilité de réagir au grief concernant le refus de vente pendant l'instruction. bpost doute également de la pertinence des questions posées lors de l'instruction ainsi que du caractère complet du rapport.

L'auditeur souligne qu'il n'a pas l'obligation de divulguer quels seront les griefs dans la phase de l'instruction. Il estime également que la plupart des allégations de bpost concernant les prétendues accusations gratuites des plaignants concernent en réalité des extraits de textes dont les plaignants sont les auteurs. Il estime finalement que le rapport divulgue en priorité les éléments à charge dès lors qu'il constitue la communication des griefs retenus. 45. Le Conseil confirme que l'auditeur n'a pas l'obligation de divulguer dans la phase de l'instruction quels seront précisément les griefs qu'il envisage de retenir.Dans le cadre législatif actuel, le dépôt du rapport motivé auprès du Conseil (article 45, § 4 et 48, § 1er, de la LPCE) fait démarrer la phase contradictoire de la procédure dans laquelle l'entreprise concernée a toutes les possibilités d'exercer ses droits de la défense.

Les critiques soulevées à l'égard du rapport motivé et du choix des arguments, doivent être rejetées. Comme l'auditeur le souligne à juste titre, le rapport motivé constitue une prise de position de sa part.

IV. Le contexte factuel 4.1. Le secteur postal et la régulation 46. Le secteur postal est un secteur particulier de l'économie, qui a fait l'objet d'une libéralisation en plusieurs phases dans tous les états membres de l'Union Européenne.Le rapport contient une description historique de ce processus de libéralisation qui n'a pas été contestée en tant que telle par l'entreprise concernée. Le secteur postal en Belgique fait toujours, à l'heure actuelle, l'objet de régulation et de contrôle par un régulateur indépendant, l'Institut belge pour la Poste et les Télécommunications (ci-après : l'IBPT). 47. Dans un premier temps, le commerce des produits postaux a été libéralisé.L'ouverture des services postaux est intervenue plus tard que dans d'autres secteurs régulés comme le secteur bancaire ou les télécommunications. Une série de plusieurs directives européennes consécutives a fourni la base légale pour la libéralisation des services postaux. 48. Ce cadre législatif est basé sur plusieurs grands principes.Il y a tout d'abord le service universel que chaque état membre doit garantir au citoyen. Ce service universel implique notamment une levée quotidienne de courrier et une distribution au domicile de chaque personne. Afin de garantir le financement du service universel, les états membres peuvent réserver certains services postaux au prestataire du service universel. Ensuite, les législateurs nationaux peuvent fixer les conditions d'accès au réseau postal. Les opérateurs doivent obtenir des licences d'exploitation. 49. Le cadre législatif européen prévoit également la possibilité d'une réglementation des tarifs de chacun des services inclus dans la prestation du service universel.50. Le cadre législatif prévoit également des principes comptables, des normes de qualité pour le service ainsi que des normes techniques. Le respect des obligations découlant des directives européennes dans le secteur postal est assuré par l'autorité de régulation, en l'occurrence l'IBPT. 51. En ce qui concerne la tarification des services postaux ainsi que les conditions d'accessibilité au réseau public, les principes de transparence et de non-discrimination sont des éléments essentiels de la régulation. 52. Récemment, l'ouverture totale du marché postal a été décidée au niveau européen (Directive 97/67/CE du Parlement européen et du Conseil du 15 décembre 1997 concernant des règles communes pour le développement du marché intérieur des services postaux de la Communauté et l'amélioration de la qualité du service, J.O. (1998) L 15, p. 14, telle que modifiée par la Directive 2008/6/CE du 20 février 2008, J.O. du 27 février 2008, L 52, p. 3). Le rythme de la libéralisation et de l'introduction de la dernière phase, soit l'ouverture totale du marché postal, est différent selon les états membres. 53. En Belgique, la plus récente des phases de libéralisation a été inscrite dans la législation postale en 2010 ( Loi du 21 mars 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/03/1991 pub. 18/01/2016 numac 2015000792 source service public federal interieur Loi portant réforme de certaines entreprises publiques économiques. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 21/03/1991 pub. 09/01/2013 numac 2012000673 source service public federal interieur Loi portant réforme de certaines entreprises publiques économiques. - Coordination officieuse en langue allemande fermer portant réforme de certaines entreprises publiques économiques, M.B. 27 mars 1991, p. 6155, telle que modifiée par la loi du 13 décembre 2010Documents pertinents retrouvés type loi prom. 13/12/2010 pub. 31/12/2010 numac 2010011511 source service public federal economie, p.m.e., classes moyennes et energie Loi modifiant la loi du 21 mars 1991 portant réforme de certaines entreprises publiques économiques, la loi du 17 janvier 2003 relative au statut du régulateur des secteurs des postes et des télécommunications belges et modifiant la loi du 9 juillet 2001 fixant certaines règles relatives au cadre juridique pour les signatures électroniques et les services de certification fermer, M.B. 31 décembre 2010, p. 83267). Dans ce cadre-là, bpost a été désigné comme prestataire unique du service universel pour l'ensemble du territoire belge, à compter de 2011 jusqu'au 31 décembre 2018. Le service universel est partiellement financé par l'état fédéral. 54. Le cadre législatif prévoit également des règles pour les détenteurs de licences ainsi que des exigences essentielles imposées par l'état en matière de service postal que tous les prestataires doivent respecter, comme par exemple la confidentialité de la correspondance, la sécurité du réseau et le respect des conditions de travail.55. Sur base du cadre réglementaire décrit ci-dessus, le régulateur belge, l'IBPT, intervient pour examiner la politique de tarification de l'opérateur qui a été désigné pour la prestation du service universel. 4.2. Aperçu général des activités postales et des différentes catégories d'opérateurs 56. Avant d'entamer l'analyse des marchés en cause sous l'angle du droit de la concurrence, il y a lieu de décrire les activités des différentes entreprises concernées et les caractéristiques pertinentes de la politique commerciale de bpost qui constituent le contexte factuel de cette affaire.57. Les activités de bpost sont principalement les services postaux et les services financiers.Ces derniers ne sont pas concernés par cette affaire. 58. En ce qui concerne les services postaux, on peut distinguer différentes activités : la levée, le tri, le transport et la distribution des envois postaux.bpost est actif sur toute cette chaîne de distribution. 59. bpost était le prestataire du service universel pendant la période concernée dans cette affaire.60. Les envois qui font l'objet de la présente procédure font partie du service universel qui comprend : - La levée, le tri, le transport et la distribution des envois postaux jusqu'à deux kilos; - La levée, le tri, le transport et la distribution des colis postaux jusqu'à dix kilos; - La distribution des colis postaux reçus d'autres états membres et pesant jusqu'à vingt kilos; - Les services relatifs aux envois recommandés et aux envois à valeur déclarée.

Le service postal universel comprend aussi bien les services nationaux que les services transfrontaliers.

Conformément aux possibilités laissées par les directives européennes, le législateur belge a réservé une partie du service postal à bpost.

En vertu de ce domaine réservé, bpost a un droit exclusif pour la levée, le tri, le transport et la distribution de certains envois, en fonction de leur poids. Ce domaine réservé a été réduit de manière graduelle. Alors qu'au début de la libéralisation du marché postal, le domaine réservé s'étendait à tous les envois de moins de 350 grammes, il a été réduit en janvier 2003 aux envois de moins de 100 grammes et en janvier 2006 aux envois de moins de 50 grammes. Depuis le 1er janvier 2011, le domaine réservé a été abrogé et la libéralisation totale du marché postal en Belgique est devenue une réalité. 61. Les expéditeurs sont à l'origine des envois postaux.Dans ce cadre, ils choisissent d'effectuer en interne ou de faire effectuer par un prestataire extérieur la préparation des envois, y compris dans certains cas, le tri et le dépôt du courrier en des points de concentration du réseau de bpost. Dans tous les cas, ils rémunèrent bpost (directement ou indirectement) pour le service de distribution du courrier, vu le monopole de fait de bpost sur cette activité au cours de la période prise en considération dans le rapport de l'auditeur. 62. Les intermédiaires (ou routeurs) offrent un ensemble de services aux expéditeurs qui peuvent aller de la préparation du courrier (appelée aussi « activités prépostales »), de la collecte, du tri et du dépôt en des points de concentration du réseau de bpost jusqu'à la facturation du service de distribution réalisé par bpost.63. Tous les intermédiaires n'offrent pas tous ces différents services.Certains se concentrent sur les activités de préparation du courrier, c'est-à-dire sur des activités prépostales qui ne font pas l'objet de la présente affaire. Il s'agit par exemple de l'impression ou de la mise sous pli.

D'autres offrent en complément des services de collecte, tri et dépôt, c'est-à dire des activités postales en amont de la distribution. Les plaignants dans cette affaire sont à situer dans cette catégorie d'activités.

Certains, enfin, appelés intermédiaires - consolidateurs, ajoutent une activité de regroupement d'envois de la part de différents expéditeurs en vue de bénéficier de rabais quantitatifs au volume offerts par bpost pour la distribution de courrier. Cette activité de regroupement n'implique pas d'activité physique de traitement de courrier. Selon le rapport de l'auditeur, il n'existait pas, dans la période concernée, d'acteurs spécialisés sur la seule activité de consolidation en Belgique. 64. Lors de la procédure devant le Conseil, la segmentation du marché postal ainsi que le degré de concurrence entre les différentes activités opérationnelles a fait l'objet du débat.Les parties s'accordent en général pour distinguer les étapes suivantes dans la chaîne de distribution postale :

Pour la consultation du tableau, voir image Il faut préciser par rapport à ce tableau que les activités de la préparation, du conditionnement et du dépôt du courrier peuvent être faites tant par les expéditeurs en interne que par les intermédiaires. 65. Selon le rapport de l'auditeur, l'activité des routeurs peut aider au développement du courrier postal en ajoutant de la valeur par le biais de leurs activités d'impression, de tri et de conditionnement. Lorsque les envois sont collectés et triés avant d'être déposés en un des points d'accès au réseau de distribution, bpost bénéficie de certaines économies au niveau postal. Dans le cadre de la procédure devant le Conseil, bpost et l'auditeur ont présenté des points de vue différents concernant la valeur ajoutée des services rendus par les routeurs. 66. Comme il sera expliqué plus en détail ci-dessous, les volumes déposés par les routeurs le sont soit, sous convention conclue directement entre celles-ci et bpost, soit pour le compte des expéditeurs, sous la convention conclue entre ces expéditeurs et bpost. 4.3. La politique commerciale de bpost qui fait l'objet du rapport 67. Le rapport de l'auditeur concerne les activités de bpost en matière d'imprimés adressés (appelés ci-après : « Direct Mail ») ainsi que de courriers administratifs (appelés ci-après : « Admin Mail ») et en particulier, le rapport concerne les tarifs conventionnels appliqués par bpost pour ces types d'envois.68. Les envois Direct Mail sont des imprimés adressés qui ont, par leur nature, un contenu identique (par exemple les envois publicitaires). Les courriers administratifs Admin Mail en revanche sont des courriers adressés ayant un contenu non identique (par exemple les factures et les extraits de compte). Ces courriers sont donc principalement envoyés par les banques, par les fournisseurs d'énergie, par les administrations. 69. Il sera expliqué ci-dessous que vu les éléments apportés par l'auditeur et dans le cadre du débat contradictoire, l'analyse du Conseil sera principalement focalisée sur les tarifs d'affranchissement des envois du type Direct Mail (voir ci-dessous au numéro 106);70. Il ressort du dossier que pour le Direct Mail et l'Admin Mail, dans la période examinée dans cette affaire, bpost appliquait trois types de tarifs différents, à savoir les tarifs pleins, les tarifs préférentiels et les tarifs conventionnels.71. Par le tarif plein, on entend le tarif qui est payé par le grand public ou par les entreprises n'effectuant que des envois en faible quantité;aucun travail de pré tri ou de dépôt auprès d'un bureau postal n'est requis.

Le tarif préférentiel se réfère à un tarif réduit appliqué lorsque les envois répondent à des conditions relatives à la quantité par dépôt, au format des envois ainsi qu'à certaines conditions opérationnelles (tri par code postal etc.). Le tarif préférentiel est généralement utilisé par les expéditeurs ou les intermédiaires qui ne réalisent pas un chiffre d'affaires suffisant avec bpost pour donner droit à une convention avec bpost. 72. Enfin, les tarifs conventionnels font l'objet d'une convention conclue entre bpost et ses différentes catégories de clients.Le client qui s'engage à déposer un volume de courrier représentant un chiffre d'affaires minimal bénéficie d'un tarif conventionnel. Ces conventions prévoient également des conditions visant à faciliter ou à garantir le paiement des factures de bpost.

Il existe des fenêtres temporelles pour la conclusion des conventions. bpost a introduit ce système en 2008. Le système prévoit trois dates de renouvellement de contrat pour les envois Direct Mail et Admin Mail. 4.3.1. Les différents types de contrats 73. Le « modèle expéditeur » dont il est principalement question dans le rapport de l'auditeur, est à situer dans la partie conventionnelle de la tarification de bpost.74. En octobre 2009, bpost a présenté la politique commerciale qu'elle comptait mettre en oeuvre à l'égard de ses clients directs et des routeurs pour l'année 2010.Le rapport de l'auditeur reprend le schéma suivant fourni par bpost même et qui représente la nouvelle politique tarifaire, appelée aussi le modèle expéditeur :

Pour la consultation du tableau, voir image 75. bpost introduit trois types de contrat : le « Direct Customer Contract », l'« Intermediary Contract » et le « Proxy Contract ». Comme le signale bpost, le principe fondateur de cette nouvelle politique tarifaire est que les volumes ne sont pris en compte qu'au niveau de l'expéditeur : « Volumes are recognised at the sender level » (explication au doc. 91, p. 4887 du dossier d'instruction). La principale conséquence selon le rapport est que les routeurs ne peuvent plus consolider le courrier de plusieurs entreprises pour pouvoir bénéficier des rabais sur volume de bpost. 76. Le premier type de contrat est le « Direct Customer Contract » (contrat Client Direct).Il implique un engagement de la part du client d'atteindre un certain volume de courrier sur la période définie.

Ce type de contrat est soit d'une durée d'un an, soit d'une durée inférieure. Pour qu'une entreprise puisse bénéficier des tarifs Client Direct de bpost, elle doit s'engager à déposer un certain volume de courrier par période d'un an ou de trois mois. Ce volume est exprimé en termes de chiffre d'affaires net de ristournes quantitatives et il peut être identique sur les quatre périodes ou varier. Le client peut également, sous certaines conditions, modifier ce volume durant la période de validité du contrat. 77. Pour déterminer le volume de courrier, le client direct prend en compte son volume en tant qu'expéditeur.A ce volume peut s'ajouter le courrier des sociétés avec lesquelles il a un lien (appelées « Expéditeurs Autorisés ») et qui sont repris à l'annexe de la convention signée entre bpost et le client (sur ce point : rapport de l'auditeur du 7 avril 2011, p. 40-41, et les observations de bpost du 4 octobre 2011, p. 29, 83 et 84). 78. A partir de l'entrée en vigueur du contrat, le client direct reçoit un tarif provisoire basé sur ses prévisions de chiffre d'affaires net, c'est-à-dire après déduction des ristournes quantitatives.Pour calculer le tarif définitif, bpost se base, en fin de période, sur le chiffre d'affaires effectivement atteint. 79. Le deuxième type de contrat est l'« Intermediary contract ».Il prévoit l'octroi d'un rabais à la fin de la période, calculé en fonction du volume d'envois fourni à bpost par le routeur. Pour pouvoir déterminer le rabais auquel il a droit, l'intermédiaire est dans l'obligation d'identifier le volume d'envois par client/expéditeur. S'il n'identifie pas l'expéditeur des envois, l'intermédiaire est facturé aux tarifs de la classe 0. 80. Pour qu'un client puisse avoir accès à un contrat intermédiaire, il doit déposer un volume de courrier qui dépasse un chiffre d'affaires minimal à réaliser pendant une période de référence.Ce seuil est identique au seuil minimal des contrats clients directs. 81. Le troisième type de contrat est le « Proxy Contract » : il s'agit d'un type de contrat tripartite entre bpost, le routeur et l'expéditeur.Le routeur conclut un contrat avec bpost en tant que gestionnaire exclusif du courrier d'un ou plusieurs expéditeurs. Cela signifie qu'une clause « Mandat » est ajoutée au contrat qui prévoit qu'une troisième société (le « mandataire ») est partie au contrat, c'est-à-dire l'intermédiaire qui agit au nom et pour le compte de l'expéditeur en vue de gérer et de mener toutes les relations contractuelles entre bpost et l'expéditeur. Selon bpost, l'intermédiaire exécute notamment des tâches purement administratives : réception de factures, paiement au nom et pour le compte de l'expéditeur, gestion des communications avec bpost, etc.

La tarification est la même que celle prévue dans les contrats Client Direct : les tarifs provisoires sont appliqués aux envois pour la durée prévue dans la convention et bpost adapte les tarifs en fin de période en fonction du chiffre d'affaires effectivement généré au cours de la période écoulée. Ce type de contrat est donc semblable au contrat Client Direct pour ce qui concerne l'octroi de ristournes quantitatives. Il diffère du contrat Client Direct par le fait que la gestion contractuelle de la relation entre l'expéditeur et bpost est effectuée par l'intermédiaire au nom de l'expéditeur, ce pourquoi bpost rémunère l'intermédiaire via l'octroi d'un Indirect Channel Rebate (voir ci-dessous, sous 4.3.2.3). 82. Ainsi qu'il sera expliqué ci-dessous, la présente affaire concerne les tarifs pratiqués par bpost pour la rémunération de la prestation de distribution du courrier Direct Mail et Admin Mail dans la période concernée.A cet égard, deux hypothèses sont à distinguer concernant les expéditeurs : soit, dans le cadre d'un Proxy contract, l'intermédiaire effectue des prestations pour et au nom d'un expéditeur qui a lui-même signé une convention avec bpost sur base de laquelle les tarifs d'affranchissement qui lui sont appliqués sont déterminés; soit, l'expéditeur n'a pas de convention avec bpost et l'intermédiaire se voit facturer les frais d'affranchissement en vertu de sa propre convention avec bpost (observations écrites de bpost, point 16). Les conditions d'affranchissement appliquées aux intermédiaires ne se retrouvent dès lors que dans les contrats de type intermédiaire et pas dans les contrats de type Proxy pour lequel l'intermédiaire n'effectue que des prestations de gestion du service après-vente de bpost en faveur de l'expéditeur. 4.3.2. Les tarifs et les ristournes 83. Dans la suite de la présente décision, il sera question principalement des contrats Client Direct et des contrats Intermédiaires puisque le rapport formule des griefs qui ont trait à la différence entre la tarification de ces deux types de contrats et qu'ainsi mentionné au numéro 81, les contrats Proxy ne diffèrent pas des contrats Client Directs pour ce qui concerne les ristournes quantitatives.84. Le rapport concerne principalement le modèle tarifaire pour 2010, appelé le modèle expéditeur. Le système de ristournes compris dans le modèle expéditeur se compose d'une part, de ristournes commerciales (appelées aussi ristournes quantitatives), calculées sur base du chiffre d'affaires généré par expéditeur et qui répondent, selon bpost, au souhait d'augmenter les volumes de Direct Mail et d'Admin Mail et, d'autre part, de ristournes opérationnelles, qui sont supposées correspondre à des réductions de coût dont bpost bénéficie.

Les éléments essentiels du calcul de ces deux types de ristournes sont repris ci-dessous (modèle tarifaire pour 2010). 4.3.2.1. Les ristournes commerciales 85. En ce qui concerne les ristournes commerciales, bpost calcule en fin de période par expéditeur identifié, le chiffre d'affaires effectivement généré par celui-ci et adapte alors les tarifs provisoires pour déterminer les tarifs définitifs.Ces ristournes constituent donc des rabais rétroactifs qui s'appliquent à l'ensemble du chiffre d'affaires par expéditeur généré avec bpost sur une période déterminée. 86. Les ristournes commerciales octroyées par bpost en 2010 sont fondées sur les revenus générés par expéditeur, qu'il soit un client direct ou un intermédiaire.Il n'existe qu'une exception. Les clients directs peuvent consolider les envois des expéditeurs autorisés repris dans l'annexe de leur contrat avec bpost (voir sur les expéditeurs autorisés au numéro 77). Le rabais octroyé dépend de la classe de taille à laquelle appartient le niveau de revenus générés par l'expéditeur. 87. En ce qui concerne les intermédiaires, les ristournes sont calculées selon le volume déposé pendant la période considérée, par le client final, s'il est identifié par l'intermédiaire.88. Les ristournes sont payées de la manière suivante.89. Pour les clients directs, le bénéfice des rabais quantitatifs n'est accordé que dans le cadre d'un engagement de l'expéditeur d'atteindre un certain volume de courrier sur la période définie.Le tarif provisoire accordé aux clients directs est celui de la classe à laquelle appartient cette prévision de chiffre d'affaires. 90. Si le total des revenus générés n'est pas atteint, le client est ramené à la classe réelle avec une pénalité de 2 x 2,5 %;si le nombre d'envois dépasse les prévisions, le client peut aussi se voir augmenter de classe, sans pénalité. 91. Pour les clients directs, la ristourne est ainsi appliquée à chaque facture en fonction de la classe convenue, avec correction éventuelle à la fin de la période de référence (trimestre pour les envois > 50 gr, année pour les envois < 50 gr).Le même principe s'applique lorsqu'un contrat Proxy (tripartite bpost, client, routeur) a été conclu. 92. Les rabais octroyés aux clients directs varient en fonction du chiffre d'affaires atteint au cours d'une période de trois mois et sont classés en douze classes.Pour l'année 2010 les rabais sont les suivants pour les conventions 20 (Direct Mail inférieur à 50 g), 21 (Direct Mail supérieur à 50 g), 30 (Admin Mail inférieur à 50 g) et 31 (Admin Mail supérieur à 50 g) :

20

21

30

31

Class 1

- 10,4 %

- 9,7 %

- 1,4 %

- 1,4 %

Class 2

- 10,8 %

- 10,6 %

- 1,9 %

- 1,9 %

Class 3

- 14,4 %

- 14,3 %

- 2,2 %

- 2,2 %

Class 4

- 15,8 %

- 18,3 %

- 2,4 %

- 2,4 %

Class 5

- 19,8 %

- 22,8 %

- 2,9 %

- 2,9 %

Class 6

- 20,7 %

- 27,3 %

- 3,4 %

- 3,4 %

Class 7

- 23,9 %

- 32,3 %

- 7,3 %

- 3,9 %

Class 8

- 25,7 %

- 36,8 %

- 9,8 %

- 6,3 %

Class 9

- 26,6 %

- 39,5 %

- 10,3 %

- 8,8 %

Class 10

- 31,5 %

- 40,9 %

- 10,8 %

- 10,8 %

Class 11

- 39,7 %

- 47,7 %

- 11,3 %

- 12,8 %

Class 12

- 39,7 %

- 50,4 %

- 11,8 %

- 14,7 %


Les chiffres d'affaires annuels nets de ristournes quantitatives minima à atteindre sont les suivants (en milliers € ) :

20

21

30

31

Class 1

88,7

29,4

161,3

80,6

Class 2

130,8

47,5

248,5

118,9

Class 3

210,6

74,2

379,2

184,2

Class 4

327,3

116,8

575,6

282,4

Class 5

515,7

192,3

873,3

425,7

Class 6

789,0

306,4

1.316,6

647,3

Class 7

1.239,5

501,1

2.058,9

981,5

Class 8

1.854,4

805,3

3.172,8

1.471,3

Class 9

2.888,0

1.262,1

4.844,4

2.324,8

Class 10

4.645,4

1.972,4

7.366,1

3.564,2

Class 11

7.904,2

3.442,4

11.110,6

5.467,2

Class 12

NA

5.551,9

16.819,0

8.452,6


(tableaux à la page 41 du rapport, non contestés par bpost) 93. Il apparaît de ces tableaux que la politique commerciale 2010 de bpost (annoncée fin 2009) octroyait des ristournes entre 10 et 50 % pour le Direct Mail et de 1 à 15 % pour l'Admin Mail.94. Pour les routeurs, il n'y a pas de ristourne commerciale directe. bpost explique qu'au cours de la période contractuelle, le client sous contrat intermédiaire est facturé aux tarifs de la classe 0 (description dans le rapport, numéro 155). bpost estime qu'elle ne possède pas les informations nécessaires au calcul de la ristourne commerciale. Si l'intermédiaire souhaite bénéficier d'une ristourne de fin de période supérieure à la classe 0, il doit identifier l'expéditeur lors de chaque dépôt, puisque bpost n'autorise plus la consolidation des volumes de courriers. La ristourne n'est donc octroyée que par client identifié. La ristourne calculée par client identifié, et payée à la fin de chaque période. 95. Dans l'hypothèse où l'intermédiaire identifie l'émetteur des envois, il bénéficie des ristournes suivantes :

Convention 25

CLASS

Yearly REVENUE

2010

2009

1

Between €

88,707

and €

130,761

- 10,38 %

- 7,000 %

2

€

130,761

€

210,594

- 10,83 %

- 7,500 %

3

€

210,594

€

327,252

- 14,43 %

- 11,000 %

4

€

327,252

€

515,697

- 15,78 %

- 12,000 %

5

€

515,697

€

789,022

- 19,84 %

- 13,200 %

6

€

789,022

€

1,239,519

- 20,74 %

- 14,000 %


Convention 26

CLASS

Yearly REVENUE

2010

2009

1

Between €

7,34

and €

11,863

- 10,38 %

- 7,000 %

2

€

11,863

€

18,544

- 10,83 %

- 7,500 %

3

€

18,544

€

29,199

- 14,43 %

- 11,000 %

4

€

29,199

€

48,077

- 15,78 %

- 12,200 %

5

€

48,077

€

76,595

- 19,84 %

- 15,200 %

6

€

76,595

€

125,275

- 20,74 %

- 18,200 %


Convention 35

CLASS

Yearly REVENUE

2010

2009

1

Between €

161,282

and €

248,542

- 1,42 %

- 0,900 %

2

€

248,542

€

379,169

- 1,91 %

- 1,300 %

3

€

379,117

€

575,620

- 2,15 %

- 1,400 %

4

€

575,620

€

873,271

- 2,40 %

- 1,600 %

5

€

873,271

€

1,316,590

- 2,89 %

- 1,900 %

6

€

1,316,590

€

2,058,923

- 3,39 %

- 2,300 %


Convention 36

CLASS

Yearly REVENUE

2010

2009

1

Between €

20,160

and €

29,717

- 1,42 %

- 0,900 %

2

€

29,717

€

46,042

- 1,91 %

- 1,300 %

3

€

46,042

€

70,595

- 2,15 %

- 1,400 %

4

€

70,595

€

106,430

- 2,40 %

- 1,600 %

5

€

106,430

€

161,831

- 2,89 %

- 1,900 %

6

€

161,831

€

245,37

- 3,39 %

- 2,300 %


(tableaux figurant au rapport de l'auditeur à la page 43, non contestés par bpost qui a cependant soulevé que les tableaux n'étaient pas complets car ils ne mentionnaient pas les ristournes correspondantes aux classes 7 à 12 qui sont également disponibles sous les contrats du type intermédiaire, observations écrites de bpost du 4 octobre 2011, p.37) La convention 25 concerne le Direct Mail de moins de 50 g, la convention 26 concerne le Direct Mail de plus de 50 g, la convention 35 concerne l'Admin Mail de moins de 50 g et la convention 36 concerne l'Admin Mail de plus de 50 g. 96. bpost calcule en fin de période par expéditeur identifié, le chiffre d'affaires effectivement généré par celui-ci et adapte les tarifs provisoires selon la grille ci-dessus pour déterminer les tarifs définitifs dont bénéficie l'intermédiaire.bpost précise que l'information relative aux classes supérieures à la classe 6 est disponible sur demande motivée et écrite. 97. La comparaison des conventions 20, 21, 30 et 31, applicables aux clients sous contrats Client Direct et Proxy Contract, avec les conventions 25, 26, 35 et 36 applicables aux intermédiaires montre que les définitions, sur base annuelle, des classes de taille de revenus nets de rabais quantitatifs générés par expéditeur sont semblables ainsi que les niveaux de rabais octroyés dans chaque classe de taille. La différence entre intermédiaires et clients directs et Proxy se situe au niveau du paiement de cette ristourne. Elle est immédiate dans le cadre des contrats Client Direct et Proxy sur base du revenu que l'expéditeur s'engage à générer avec bpost au cours de la période considérée. Elle est accordée en fin de période dans le cas des contrats intermédiaires sur base de l'identification des volumes par expéditeur identifié par l'intermédiaire. 4.3.2.2. Les ristournes opérationnelles 98. La deuxième catégorie de ristournes concerne sont les ristournes de type opérationnel.99. Indépendamment du type de contrat (« Direct Customer Contract », « Intermediary Contract » ou « Proxy Contract »), le client de bpost peut bénéficier de ristournes opérationnelles lors de chaque dépôt d'envois. bpost définit ce qu'elle entend par « dépôt » dans ses conditions générales pour les « envois adressés » : un dépôt doit être composé d'envois de même dimension, et de même emballage, émanant du même expéditeur, soumis à un même régime/mode de préparation, et de même poids. 100. Certaines réductions tarifaires sont octroyées en fonction de la qualité des adresses, de l'utilisation des conteneurs prévus et de l'utilisation de la plateforme Internet E-MassPost pour l'annonce des dépôts (rapport, numéros 162 et 163). En ce qui concerne la qualité des adresses, si elle dépasse 95 %, le client de bpost bénéficie d'une ristourne selon le schéma suivant :

Data Quality

Réduction

> 95 %

0,5 %

> 98 %

1,0 %


101. En ce qui concerne les conteneurs, si le client utilise pour un dépôt d'envois les bacs et conteneurs fournis par bpost, il bénéficie d'une réduction de 0,25 % sur le tarif applicable à ce dépôt et finalement, en ce qui concerne l'utilisation du logiciel de bpost, si le client utilise E-MassPost pour annoncer un dépôt d'envois, il bénéficie d'une réduction de 0,25 % sur le tarif applicable à ce dépôt. Ces ristournes correspondent à certaines activités de préparation du courrier qui ont été effectuées par l'expéditeur ou le routeur et qui permettent de ce fait à bpost de faire des économies au niveau du traitement du courrier. 102. Des réductions appelées « Drop Size Rebate » sont également accordées aux dépôts dont le volume atteint ou dépasse 10.000 envois.

Cette ristourne s'élève à 1,9 à 6 % pour l'Admin Mail. En ce qui concerne le Direct Mail la progressivité de cette ristourne est la suivante :

Volume du dépôt

Réduction

Entre 10.000 et 24.999 envois

1,9 %

Entre 25.000 et 49.999 envois

5 %

Entre 50.000 et 249.999 envois

6 %

Entre 250.000 et 499.999 envois

10 %

Entre 500.000 et 999.999 envois

13 %

A partir de 1.000.000 envois

20 %


(tableau au numéro 163 du rapport) La ristourne pour le « Drop Size », qui permet les réductions les plus significatives, est calculée par expéditeur, et non en fonction du volume total du dépôt. bpost justifie le calcul de l'octroi de ce Drop Size discount par expéditeur (notamment au point 305 des observations écrites de bpost) par le fait que : - le traitement d'envois de même poids, dimension et type de tri est plus facile et efficace que celui d'envois différents - même des envois du même poids, dimension et emballage peuvent être traités différemment (exemple d'une adresse à un endroit différent sur l'enveloppe) ce qui rend le traitement plus difficile.

Pour garantir une préparation identique des envois, bpost inclut la condition que le dépôt doit être constitué d'envois provenant d'un seul expéditeur. Ceci s'applique aux routeurs. Par contre, les entreprises qui forment un groupe, peuvent bénéficier de la consolidation de leurs dépôts (voir observations écrites de bpost, point 58). 4.3.2.3. Indirect Channel Rebate 103. Finalement, en dehors des ristournes commerciales et opérationnelles, les routeurs bénéficient d'une ristourne spécifique, appelée Indirect Channel Rebate, lorsqu'ils prennent en charge la gestion commerciale de la relation après-vente avec l'expéditeur, et concluent un contrat avec bpost.Cette ristourne est fixée à 0.50 % pour l'Admin Mail et à 12 % pour de Direct Mail pour les envois de clients, identifiés ou non, en classe 0 (qui ont un volume insuffisant pour ouvrir droit à une ristourne commerciale). Elle varie entre 2.500 euros et 5.000 euros par expéditeur pour les classes de taille 1 à 12. 104. Les rabais sont calculés et payés trimestriellement pour les envois > 50 grammes, et font l'objet d'avances trimestrielles et d'un calcul annuel pour les envois < 50 grammes. 4.3.2.4. Remarques générales sur les ristournes 105. L'auditeur précise que la politique tarifaire décrite dans les paragraphes précédents a subi des modifications, notamment à la suite des interventions de l'IBPT et aux demandes de renseignements de la Direction Générale de la concurrence. bpost a en effet procédé à des aménagements de sa politique tarifaire pour 2010 au cours de l'année. Les améliorations portent principalement sur la transparence de l'information dispensée aux routeurs. Au niveau des ristournes, le rapport décrit une seule modification pertinente, c'est-à-dire l'accélération du versement des ristournes commerciales pour les contrats Intermédiaires (numéros 164-168 du rapport). La ristourne reste cependant rétroactive et la description reste valable. Au mois de juin 2010, bpost a annoncé des modifications ainsi que la politique tarifaire pour 2011. La même structure restait en vigueur, mais bpost a introduit une variation des « pricing models » et certaines nouvelles possibilités opérationnelles (voir les présentations en annexes 9, 13, 44 et 45 des observations écrites). Ces nouveautés ne touchent pas à l'essence du modèle par expéditeur, c'est-à-dire que les volumes pris en compte pour les ristournes ne peuvent être consolidées. 106. Il ressort de ce qui précède que pour tous les différents types de ristournes, l'impact sur les tarifs est le plus important pour le Direct Mail, que ce soit pour les ristournes commerciales (voir les tableaux aux numéros 92 et 95), pour le Drop Size Rebate (voir numéro 102), ou encore pour la ristourne spécifique pour les intermédiaires, l'Indirect Channel Rebate (point 4.3.2.3). 107. Une deuxième constatation qui s'impose est qu'aussi bien les ristournes commerciales, que les ristournes opérationnelles (et notamment le Drop Size Rebate), sont octroyées à la condition que les intermédiaires identifient les expéditeurs.Il s'agit de l'élément déterminant du modèle expéditeur qui est au centre des griefs formulés par l'auditeur. De plus, ces deux types de rabais ne reposent pas sur des économies de coûts mais sont justifiés, selon bpost, par la nécessité de stimuler la demande d'envois des expéditeurs.

V. Les marchés en cause 5.1. La position des parties concernant la définition des marchés 108. En ce qui concerne la définition des marchés en cause, l'auditeur explique qu'il existe des marchés séparés pour le courrier international et le courrier domestique.Il distingue ensuite les services postaux express des services postaux standards. Les services express sont généralement jugés plus rapides et plus fiables que des services postaux de base aux yeux du consommateur. Les tarifs et l'infrastructure nécessaire seraient également différents. 109. Les services pour les particuliers sont également distingués des services pour les entreprises par l'auditeur.De façon générale, les entreprises demandent et reçoivent des services plus étendus que ceux offerts aux particuliers. bpost propose aux entreprises plusieurs services qu'elle n'offre pas aux particuliers : machines à affranchir, enlèvement et affranchissement, envois à partir de PC, factures en ligne, etc. De plus, les clients professionnels négocient le tarif afin de bénéficier de réductions. Finalement, il y a lieu de distinguer, selon l'auditeur, les services de courrier adressé des services de courrier non adressé. 110. Sur tous ces points l'auditeur et bpost se montrent d'accord. bpost affirme en effet dans ses observations écrites qu'elle se rallie en grande partie aux définitions des marchés pertinents proposées par l'auditeur et par Spring qui a également fourni des renseignements à l'auditeur en tant que tiers. 111. Par contre, bpost estime qu'il n'y a pas de substituabilité entre les services Direct Mail et Admin Mail.Afin de justifier cette thèse du point de vue de la demande, elle se réfère au caractère obligatoire ou facultatif des services, aux coûts différents et aux centres budgétaires différents, ainsi qu'à la différence au niveau des canaux de communication. Pour ce qui est du côté de l'offre, bpost avance que les conditions spécifiques pour prendre en considération la substituabilité de l'offre ne sont pas remplies. 112. L'auditeur identifie quatre marchés dans son rapport motivé : - Le marché des services postaux relatifs au courrier industriel domestique Direct Mail relevant du monopole légal (inférieur ou égal à 50 ou 100 grammes selon la période concernée); - Le marché des services postaux relatifs au courrier industriel domestique Direct Mail exclu du monopole légal; - Le marché des services postaux relatifs au courrier industriel domestique Admin Mail relevant du monopole légal; - Le marché des services postaux relatifs au courrier industriel domestique Admin Mail exclu du monopole légal. 113. En ce qui concerne la distinction entre les services Direct Mail et Admin Mail, l'auditeur accorde bien à bpost l'absence de substitution du côté de la demande mais considère qu'il y a des possibilités de substitution du côté de l'offre.Il n'accepte donc pas la distinction entre Direct Mail et Admin Mail comme proposée par bpost et ne considère pas qu'il s'agit de marchés séparés.

Il ajoute cependant que, pour l'évaluation de la position de bpost, il importe finalement peu de faire la distinction ou pas, puisqu'en tout état de cause, la part de marché de bpost est très considérable pour chacun des marchés. Dans ses observations écrites il confirme que la question peut rester ouverte. En ce qui concerne la distinction selon le courrier qui relève du monopole légal ou non, l'auditeur ne revient plus sur cette distinction dans la suite de son rapport. 114. En ce qui concerne la dimension géographique du marché à prendre en considération pour le marché des produits concernés, il semble que les parties s'accordent également pour dire que ce marché géographique couvre l'ensemble du territoire national.Les différents opérateurs sont actifs sur ce territoire et la tarification et le cadre règlementaire sont d'ordre national. 115. Selon bpost, l'auditeur aurait dû également définir les marchés sur lesquels les plaignants sont actifs et sur lesquels bpost ne disposerait d'aucun important pouvoir de marché. 5.2. L'analyse par le Conseil 116. Le rapport motivé dans cette affaire concerne un abus de position dominante allégué dans le chef de bpost.La définition du ou des marchés concernés au sens de la Communication sur la définition du marché en cause aux fins du droit communautaire de la concurrence (J.O. 1997, C 372, p. 5) a comme premier objectif d'établir si l'entreprise concernée se trouve en position dominante au regard aussi bien du droit belge et européen de la concurrence. Le marché concerné est alors le marché sur lequel l'entreprise incriminée est active et l'exercice de la définition de marché vise à établir quelle est la pression concurrentielle qui existe sur ce marché. En cas de position dominante, la pression concurrentielle est faible et certains comportements sur ce marché ou sur d'autres marchés avoisinants peuvent constituer un abus de position dans le chef de l'entreprise concernée (voir notamment TUE 8 septembre 2010, affaire T-29/05, Deltafina/Commission, numéro 48). 117. Pour les besoins de l'analyse dans cette affaire, le Conseil suit globalement l'approche en matière de définition des marchés proposée par l'auditeur, qui est soutenue par bpost et confirmée par les éléments recueillis pendant l'instruction.Cette approche paraît également être conforme à celle qui a été adoptée dans des cas suffisamment semblables au niveau des marchés en cause (voir notamment la Décision de la Commission du 21 avril 2009, Posten AB/Post Danmark, COMP/M5152, citée par les deux parties). 118. Le Conseil estime qu'il n'est effectivement pas nécessaire d'examiner en détail la question de savoir si le Direct Mail et l'Admin Mail constituent des marchés véritablement distincts, vu l'analyse qu'il fera ci-dessous au sujet de l'existence de la position dominante. Cette position n'exclut pas que le Conseil puisse tenir compte du fait que l'impact de l'abus éventuel par bpost soit différent en fonction du type de courrier (voir ci-dessus au numéro 106). 119. Il est possible de retenir comme marché concerné dans le sens de la Communication sur la définition du marché en cause de la Commission (J.O. (1997) C 372, p. 5) : le marché des services postaux relatifs au courrier industriel domestique Direct Mail et Admin Mail relevant ou non du monopole légal. 120. Ce marché inclut les différentes étapes dans la chaîne postale (voir le tableau ci-dessus au numéro 64), c'est-à-dire d'une part les activités appelées ci-dessus la préparation du courrier, la levée, le tri, faisant partie du service universel ou non et, d'autre part, la distribution du courrier en question.121. Ces différentes étapes dans la chaîne de distribution et les différentes catégories d'acteurs qui y sont actifs, permettent ensuite de distinguer des segments de marché pertinents dans le cadre de cette affaire. De façon générale, la préparation du courrier, la levée, le tri sont exercés par certains clients/expéditeurs eux-mêmes ou entièrement ou partiellement par les intermédiaires/routeurs (ce groupe étant encore sous-divisé en différentes catégories selon les activités) ou encore par bpost pour ce qui concerne la levée et le tri.

En ce qui concerne par contre la distribution du courrier industriel domestique Direct Mail et Admin Mail relevant ou non du monopole légal, bpost était le seul opérateur actif dans ce segment pendant la période concernée. 122. L'activité des intermédiaires est décrite dans le rapport motivé et elle est au centre de l'analyse qui mène l'auditeur à retenir des griefs contre bpost.Devant le Conseil il avance que le fait que bpost n'est pas ou peu actif lui-même dans le domaine du routage, ne lui permet pas pour autant d'abuser de sa position dominante sur le marché plus large des services postaux comme il l'a défini dans son rapport. 123. Les entreprises actives dans le routage ou les intermédiaires (comme les plaignants) interviennent dans la logistique de la communication et se situent en amont de la chaîne de distribution. Elles effectuent des activités qui permettent que le courrier réponde aux normes de bpost. 124. La Commission a défini le routage comme « une activité de préparation de courrier en amont de la prise en charge de celui-ci par La Poste dans le cadre de ses prestations du domaine réservé.....

Dans la majorité des cas elle suppose l'accès aux services pertinents du monopole postal... » (Décision 2002/344/CE de la Commission du 23 octobre 2001 relative à l'absence de contrôle exhaustif et indépendant des conditions tarifaires et techniques appliquées par La Poste aux entreprises de routage pour l'accès à ses services réservés (SNELPD), et Avis 07-A-17 du 20 décembre 2007 du Conseil de la concurrence français relatif à une demande d'avis de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) sur le dispositif de remises commerciales de La Poste). 125. Le Conseil rappelle qu'une fois que les marchés concernés sont définis et qu'une éventuelle position dominante s'avère exister, il peut être important dans le cadre de l'analyse de la pratique restrictive d'examiner d'autres marchés ou segments de marché, notamment si la pratique restrictive a lieu sur un ou plusieurs autres marchés ou encore parce que les effets réels ou potentiels de la pratique se font sentir sur d'autres marchés connexes.Ces marchés ou ces segments de marché ne sont pas forcément des marchés où l'entreprise concernée est active mais ce sont des marchés qui sont affectés par le comportement de cette entreprise (Décision 2009-P/K-10 du Conseil du 26 mai 2009, Base/Proximus, et récemment Décision 2012-P/K-20 du 30 juillet 2012, Tondeur/Presstalis). 126. Il est clair pour le Conseil que, vu les griefs contenus dans le rapport, les activités en amont de la distribution du courrier et en particulier les activités des intermédiaires, doivent faire partie de l'analyse concurrentielle dans cette affaire.Pour l'analyse sur le fond, il importe peu de savoir si cette activité doit être présentée comme un marché distinct mais connexe à la distribution, ou comme un segment du même marché plus large dont fait également partie la distribution. Dans la présente décision, le Conseil prend la dernière approche.

VI. Commerce entre Etats membres 127. Sur la base de l'article 3 du Règlement 1/2003 (J.O. 2003, L 1, p. 1), le Conseil de la concurrence doit d'abord examiner si les pratiques qui font l'objet de cette affaire doivent également être analysées sous l'angle de l'article 102 TFUE.128. L'auditeur estime que l'article 102 TFUE s'applique puisque les comportements de bpost affectent sensiblement le commerce entre Etats membres au sens requis par le droit de l'Union. 129. Dans ses observations bpost s'est limité à soulever que l'auditeur renvoie au point dans les lignes directrices de la Commission qui concerne les cas d'abus couvrant plusieurs états membres (Lignes directrices de la Commission relatives à la notion d'affectation du commerce figurant aux articles 81 et 82 du Traité CE (J.O. (2004) C 101, p. 7). Or, selon bpost ce cas de figure ne se présente pas en l'espèce et l'auditeur aurait dû se référer au point des lignes directrices qui concernent l'exploitation abusive, comme la discrimination par les prix et la tarification excessive. 130. Le Conseil constate que le paragraphe cité par bpost ( § 95) mentionne bien que le commerce entre états membres est susceptible d'être affecté si les acheteurs (des services) sont désavantagés par la tarification discriminatoire ou si la pratique sert à faire barrage aux importations.De plus, selon les lignes directrices de la Commission, le comportement d'une entreprise en position dominante qui fait partie d'une stratégie générale, doit être apprécié quant à son incidence globale. Lorsqu'une entreprise en position dominante adopte diverses pratiques dans la poursuite d'un même objectif, par exemple des pratiques visant à éliminer ou à évincer des concurrents, il suffit, pour que l'article 102 soit applicable à toutes les pratiques faisant partie de cette stratégie générale, que l'une d'elles soit susceptible d'affecter le commerce entre Etats membres ( § 17 des Lignes Directrices).

Le Conseil ajoute que bpost a inclut plusieurs références à des clients établis en dehors de la Belgique dans ses observations (voir par exemple aux annexes 29, 30, 31 des observations écrites de bpost et le point 269 dans lequel bpost décrit les impacts de l'augmentation de ses tarifs sur ses clients étrangers). 131. Dans la présente décision, les pratiques qui font l'objet du rapport seront donc examinées aussi bien sur la base de l'article 3 de la LPCE que sur la base de l'article 102 TFUE.132. A titre subsidiaire, au cas où le Conseil appliquerait les règles européennes, bpost demande au Conseil que la communication de tout document à la Commission européenne se fasse de manière contradictoire.Elle fait référence à l'article 11, § 4 du Règlement 1/2003 selon lequel une autorité nationale de concurrence doit informer la Commission au plus tard 30 jours avant l'adoption d'une décision ordonnant la cessation de l'infraction. bpost invoque les droits de la défense qui exigeraient notamment que le Conseil ne peut baser sa décision sur des documents et sur des éléments sur lesquels l'entreprise concernée n'a pas pu s'exprimer et dont elle n'a pas connaissance. Toute communication de documents à la Commission devrait donc se faire de manière contradictoire et bpost devrait avoir l'opportunité de répondre aux observations éventuelles de la Commission. Le Conseil répondra à ce point ci-dessous dans le chapitre X concernant la sanction.

VII. L'existence d'une position dominante 133. Le point de départ de toute analyse basée sur l'article 3 LPCE et l'article 102 TFUE est que l'existence d'une position dominante n'est pas interdite et qu'une entreprise dominante peut rentrer en concurrence par les mérites, tout comme tout autre opérateur économique actif sur le marché pertinent.Cependant, l'entreprise en question a une responsabilité particulière; celle de ne pas rendre la concurrence inefficace par son comportement. Il est également important de souligner que lorsque l'existence d'une position dominante trouve son origine dans un ancien monopole légal, cette circonstance doit être prise en compte (voir aussi CJUE 27 mars 2012, affaire C-209/10, Post Danmark A/S, numéro 23). 134. Il est rappelé qu'une position dominante au sens de l'article 3 LPCE et l'article 102 TFUE est une position de puissance économique détenue par une entreprise qui lui confère le pouvoir de faire obstacle au maintien d'une concurrence effective sur le marché en cause, en lui fournissant la possibilité de comportements indépendants dans une mesure appréciable vis-à-vis de ses concurrents, de ses clients et, finalement, des consommateurs. Une telle position n'exclut pas l'existence d'une certaine concurrence mais met la firme qui en bénéficie en mesure si non de décider, tout au moins d'influencer notablement les conditions dans lesquelles cette concurrence se développera et, en tout cas, de se comporter dans une large mesure sans devoir en tenir compte et sans pour autant lui porter préjudice (CJUE 13 février 1979, affaire 85/76, Hoffmann La Roche). 135. Pour déterminer s'il existe une position dominante au sens de l'article 3 de la LPCE et de l'article 102 TFUE, le Conseil doit examiner plusieurs facteurs qui, pris isolément, ne seraient pas nécessairement déterminants.Parmi ces facteurs, une grande importance est généralement attachée à la part de marché puisqu'une part de marché très importante constitue une présomption d'existence de position dominante (voir également Décision 2009-P/K-10 du Conseil du 26 mai 2009, Base/Proximus, chapitre VI). 136. En ce qui concerne les parts de marché de bpost, le rapport de l'auditeur se base sur les chiffres fournis par bpost même et complète ces chiffres avec quelques informations sur le nombre très limité de concurrents sur le marché concerné.Les informations concernant les concurrents actifs sur le marché dans le rapport (p. 69-71) proviennent des renseignements donnés par bpost. Pour le Direct Mail inférieur ou égal à 50 grammes, bpost cite Ciblex. L'auditeur soumet cependant que Ciblex ne travaille qu'en circuit fermé et ne peut pas être considéré comme relevant du champ d'application du service universel, ce qui amènerait en réalité la part de marché de bpost à [80-100] % (non contestée par bpost dans la suite de la procédure).

Pour le Direct Mail supérieur à 50 grammes, il est question de TNT Post (en 2008 : [0-10] %), Private Majors (en 2008 : [0-10] %) et quelques autres entreprises, ayant ensemble une part de marché cumulée pour 2008 de [0-10] %. 137. Sur base de ses propres estimations ainsi que des comptes annuels des acteurs du marché, bpost estime sa part de marché sur chacun des marchés identifiés par l'auditeur (voir ci-dessus au numéro 112) entre [80-100] et [80-100] %.Elle fournit ses informations dans le cadre de l'enquête et dans la suite de la procédure devant le Conseil ces parts de marché n'ont plus fait l'objet de discussion. 138. Que la distinction soit faite ou non entre Direct Mail et Admin Mail, les parts de marché de bpost sont donc très élevées, entre [80-100] et [80-100] % avec, de plus, différents concurrents qui se partagent la partie restante du marché.Des parts de marché si importantes, suffisent en elles-mêmes à établir l'existence d'une position dominante dans le chef de bpost. 139. bpost n'a pas contesté occuper une position dominante sur les marchés en cause comme identifiés par l'auditeur, que le Conseil a défini ensemble comme le marché des services postaux relatifs au courrier industriel domestique Direct Mail et Admin Mail relevant ou non du monopole légal. bpost a toutefois invoqué le fait que l'auditeur aurait dû définir le marché concerné comme étant celui du routage sur lequel bpost nie d'être actif. Le Conseil a expliqué ci-dessus que selon lui, le marché concerné dans cette affaire inclut une partie des activités de routage, qui ne seraient être considérées comme formant un marché à part entière. 140. Le rapport démontre qu'il existe également d'autres facteurs confirmant et renforçant la position dominante de bpost. Tout d'abord, le fait que bpost soit la seule entreprise active sur le territoire belge à disposer d'un réseau complet de collecte et de distribution de courrier adressé, ensuite bpost a joui jusqu'au 31 décembre 2010 d'un monopole légal. De plus, bpost est également présent sur plusieurs marchés connexes. Finalement, le rapport de l'auditeur soulève que les barrières à l'entrée sont élevées dans le marché en cause, étant donné que le développement d'un réseau de distribution et de collecte postal capable de concurrencer celui de bpost demanderait des moyens financiers considérables. L'existence de ces éléments renforçant la position dominante n'a pas été contestée par bpost.

VIII. Le caractère abusif du modèle expéditeur 8.1. Résumé de la position des parties 141. Les deux premiers griefs formulés dans le rapport motivé concernent la politique tarifaire de bpost et en particulier le modèle expéditeur.Il y a d'abord, selon l'auditeur, la discrimination abusive entre déposants en fonction de leur activité. Puis, deuxièmement, la discrimination abusive entre déposants selon qu'ils identifient ou non leurs clients. Dans le cadre de la discrimination alléguée entre déposants en fonction de leurs activités, l'auditeur mentionne d'une part la discrimination tarifaire et, d'autre part, d'autres aspects d'ordre non tarifaire comme par exemple la discrimination relative à la période de renouvellement des contrats. 142. Pour ces griefs, l'auditeur se concentre sur la période d'octobre 2009 à ce jour mais le rapport contient également une description détaillée de la politique tarifaire à partir de 2003.143. L'auditeur reproche, en résumé, à la politique tarifaire annoncée en 2009 et appliquée à partir de 2010 que les routeurs n'avaient pas accès aux contrats « Clients Directs » (voir la description ci-dessus aux numéros 76 à 78).Le rapport relève à cet égard que les ristournes ne sont pas calculées en fonction des volumes cumulés déposés par les déposants intermédiaires mais en fonction de l'expéditeur d'origine et que les ristournes ne sont accordées que pour autant que l'intermédiaire communique précisément l'identité de ces expéditeurs. 144. Un autre aspect de la politique tarifaire que l'auditeur a qualifié de discriminatoire est le fait que les ristournes opérationnelles - et en particulier le Drop Size Rebate - ne sont pas calculées de la même façon pour les clients directs et les routeurs puisque la majorité de ces ristournes ne se calculeraient pas sur l'entièreté du dépôt mais uniquement par dépôt d'un même client.145. L'auditeur souligne que bpost effectue une discrimination entre déposants non pas sur base de ses activités propres mais sur base de l'activité de ses clients.Dans son rapport, il considère qu'il peut y avoir une discrimination abusive de la part d'une entreprise qui opère un traitement différent entre des clients qui n'agissent pas sur le même marché. 146. L'auditeur estime que cette politique tarifaire, outre le fait qu'elle empêche le développement normal de la concurrence sur le marché de l'intermédiation postale mettant en difficulté les plus gros intermédiaires (tel que le démontre selon lui l'éviction de Link2Biz), induit également plusieurs autres conséquences négatives aggravant cette discrimination abusive.147. La première d'entre elles est l'obligation faite aux déposants « intermédiaires » de dévoiler de manière précise leur portefeuille clientèle s'ils désirent bénéficier des rabais pour leurs clients.148. Une autre conséquence négative, qui est en elle-même l'un des facteurs de la discrimination abusive selon l'auditeur, est l'obligation de préfinancement faite aux routeurs si ces derniers souhaitent répercuter les rabais qu'ils reçoivent de bpost.Cette obligation de préfinancement décourage la répercussion des rabais sur les clients des intermédiaires et entraîne des coûts financiers pour les déposants « intermédiaires ». 149. L'auditeur constate également que l'interdiction de consolidation d'envois provenant de différents émetteurs ne vise que les déposants intermédiaires.En effet, bpost autorise la consolidation pour certains groupes de société. bpost attribue des ristournes à des entreprises liées qui peuvent bénéficier d'un rabais calculé sur base du volume global déposé. L'auditeur voit mal comment bpost peut justifier que ces sociétés puissent globaliser le volume de leurs envois pour obtenir des rabais plus élevés alors que les déposants intermédiaires se voient refuser cette possibilité. 150. Dans son rapport, l'auditeur a également retenu comme élément incriminant le système des fenêtres temporelles pour la conclusion des conventions, ainsi que l'existence de certains rabais exceptionnels.151. Dans la procédure devant le Conseil, bpost a soulevé plusieurs moyens au sujet du caractère prétendument abusif du modèle expéditeur. Les principaux moyens seront repris pour chacun des aspects différents de la politique tarifaire qui seront examinés ci-dessus. En résumé, bpost considère qu'il n'y a pas de traitement différent entre les expéditeurs et les clients directs; deuxièmement bpost invoque que de toute façon la situation des expéditeurs est différente et justifie donc un traitement différent et, finalement, bpost insiste sur l'absence d'impact du modèle expéditeur sur la concurrence. Pour autant que le Conseil considère que le modèle expéditeur puisse être considéré comme abusif, bpost a invoqué également des justifications. 8.2. Analyse par le Conseil 8.2.1. Introduction 152. Les griefs qui ont été formulés à l'encontre de bpost par l'auditeur sont basés sur l'interdiction d'abus de position dominante. L'abus est une notion objective, le Conseil doit analyser si le comportement de bpost tend à restreindre la concurrence ou si le comportement est de nature ou est susceptible d'avoir un tel effet sur les marchés qui ont été identifiés comme les marchés en cause.

L'interdiction d'abus vise les comportements d'une entreprise en position dominante qui, sur un marché où, à la suite précisément de la présence de l'entreprise en question, le degré de concurrence est déjà affaibli, ont pour effet de faire obstacle, par le recours à des moyens différents de ceux qui gouvernent une compétition normale des produits ou des services sur la base des prestations des opérateurs économiques, au maintien du degré de concurrence existant encore sur le marché ou au développement de cette concurrence (voir également CJUE 27 mars 2012, affaire C-209/10, Post Danmark). La stratégie commerciale de l'entreprise concernée est une des circonstances factuelles à prendre en considération (CJUE 19 avril 2012, affaire C-549/10 P, Tomra, numéros 17 à 19). 153. Il faut rappeler d'abord que rien ne s'oppose en principe à ce que le Conseil examine la tarification de bpost, même si elle fait l'objet d'un contrôle par le régulateur compétent, l'IBPT.154. Le Conseil analysera les griefs de l'auditeur uniquement au regard des règles de concurrence belges et européennes dont il doit assurer le respect.bpost a invoqué le risque que le Conseil dépasse ses compétences en se basant sur la législation postale pour évaluer les griefs soulevés par l'auditeur mais ce risque n'existe donc pas. 155. Pour déterminer si un comportement peut être considéré comme un abus, et plus spécifiquement en présence d'un système de rabais, il faut apprécier l'ensemble des circonstances, et notamment les critères et les modalités d'octroi des tarifs et des rabais.Cet exercice peut notamment consister à examiner si les tarifs et les rabais tendent, par un avantage qui ne repose sur aucune prestation économique qui les justifie, à enlever à l'acheteur, ou à restreindre dans son chef, la possibilité de choix en ce qui concerne ses sources d'approvisionnement, à barrer l'accès du marché aux concurrents, à appliquer à des partenaires commerciaux des conditions inégales à des prestations équivalentes ou à renforcer la position dominante par une concurrence faussée. Cet examen doit avoir égard au contexte dans lequel les pratiques s'inscrivent (TUE 9 septembre 2010, affaire T-155/06, Tomra, nos. 214-215, CJUE 27 mars 2012, affaire C-209/10, Post Danmark, numéro 26, et également la Décision du Conseil 2009-P/K-10 du 26 mai 2009 dans l'affaire Base/Proximus et la Décision 2012-P/K-20 du 30 juillet 2012 dans l'affaire Tondeur/Presstalis). 156. Les deux griefs concernant la tarification visent différentes caractéristiques de la même politique tarifaire de bpost et ses effets pour les routeurs/intermédiaires, et en particulier, la mise en oeuvre et l'application du modèle expéditeur.157. Pour le Conseil il faut regarder ce modèle dans son ensemble, comme un schéma de comportements plus que comme un ensemble de mesures séparés (voir l'approche semblable dans la Décision 2009-P/K-10 du 26 mai 2009, Base/BMB, numéros 170 à 172 et la Décision COMP/C-1/36915, Deutsche Post - interception de courrier transfrontalier, no.104). La même idée de base sous-jacente au rapport est exprimée à travers les différents griefs, à savoir l'existence d'une stratégie commerciale de bpost qui vise à préserver sa position dominante en gardant l'accès aux grands clients et en rendant plus difficile l'accès à ces clients pour les routeurs/intermédiaires, et ce notamment en vue de la libéralisation du marché de la distribution. 8.2.2. L'assiette de calcul des ristournes 158. Qu'il s'agisse des ristournes commerciales ou du Drop Size Rebate, le problème dans la tarification de bpost qui est identifié dans le rapport, est principalement que le système de bpost annoncé en 2009 et introduit en 2010 n'accepte pas que les envois soient consolidés au niveau des expéditeurs. En d'autres termes, les remises les plus importantes octroyées aux intermédiaires regroupant les envois de plusieurs expéditeurs, sont basées sur le chiffre d'affaires généré par expéditeur et non pas sur le chiffre d'affaires cumulé généré par un intermédiaire auprès de bpost. 159. L'auditeur a évalué ces faits sous l'angle de la discrimination. Pour bpost, toutes les obligations légales en matière de non-discrimination ont été respectées. D'abord, le modèle serait compatible avec le droit de la concurrence puisque les tarifs/ristournes quantitatives pour les intermédiaires et les clients directs seraient identiques. 160. En effet, comme le souligne d'ailleurs bpost lui-même, un intermédiaire qui souhaite déposer ses propres envois et qui conclut un contrat de client direct, bénéficiera sans doute des conditions identiques aux expéditeurs, dès lors qu'il se place alors au niveau des expéditeurs clients directs.Cependant, le grief de l'auditeur ne vise évidemment pas cette hypothèse mais bien celle de l'intermédiaire qui regroupe les envois de plusieurs expéditeurs sans se les approprier. Cet argument de bpost n'est donc pas pertinent pour le Conseil. 161. Ensuite, bpost avance que les intermédiaires et les expéditeurs (clients directs) se trouvent dans une situation différente, ce qui justifierait un calcul par expéditeur des ristournes quantitatives. Pour bpost, les intermédiaires et les expéditeurs (clients directs) ont une qualité fondamentalement différente puisqu'ils ne sont pas actifs sur le même marché ni au même niveau de la chaîne de distribution. Aucun degré de concurrence n'existe, selon bpost, entre ces deux catégories de clients. Pour ces raisons, l'interdiction de l'article 3 de la LPCE et de l'article 102 TFUE ne s'appliquerait pas selon bpost puisque ces articles ne s'opposeraient pas à ce qu'une entreprise en position dominante développe une stratégie commerciale et tarifaire variée et différente selon le segment ou le niveau de la chaîne de distribution sur lequel ses clients sont actifs. 162. Le Conseil analysera le système de tarification de bpost qui fait l'objet du rapport en traitant d'abord les arguments liés au traitement différencié de différents partenaires commerciaux au niveau tarifaire et puis en examinant les caractéristiques restrictives du système tarifaire dans leur ensemble. 8.2.2.1 Le traitement différencié de deux groupes de clients 163. Le rapport de l'auditeur identifie le modèle expéditeur comme restrictif de la concurrence dans la mesure où il ne permet pas aux intermédiaires de bénéficier des mêmes conditions que les clients directs.Du point de vue juridique, il a pris la perspective de la discrimination (premier grief) mais aussi du refus de vente (deuxième grief dans le rapport, voir plus loin au 9.1) pour qualifier le modèle expéditeur comme un abus de position dominante. Ensuite, le rapport analyse aussi la politique tarifaire de bpost au regard du principe de la transparence (voir également plus loin, au 9.2). 164. Vu l'approche de l'auditeur, il convient d'examiner d'abord si la politique tarifaire de bpost décrite ci-dessus au 4.3.2 est à considérer comme une pratique discriminatoire comme l'auditeur le suggère. Cette qualification est contestée par bpost. 165. Le principe général de droit que constitue l'interdiction de non-discrimination a été concrétisé aussi bien en droit de la concurrence que dans les règles sectorielles.Ce principe interdit, de façon générale, que deux situations identiques voire suffisamment semblables, soient traitées de façon différente ou que deux situations différentes soient traitées de façon identique. En droit de la concurrence, en particulier en matière d'abus de position dominante, ce principe a été concrétisé dans les textes législatifs notamment en stipulant qu'un comportement peut être abusif si l'entreprise « applique à l'égard des partenaires commerciaux des conditions inégales à des prestations équivalentes en leur infligeant de ce fait un désavantage dans la concurrence » (article 102 TFUE, sous c et article 3 de la LPCE, deuxième alinéa, 3° ). 166. Dans le cadre de l'interdiction de l'abus de position dominante, l'approche en matière de traitement différencié de catégories de clients prend le principe général de non-discrimination comme point de départ mais doit tenir compte aussi des objectifs de l'interdiction, du droit de la concurrence en général et de la réalité économique et de la structure concurrentielle des marchés en cause.167. Cette approche est notamment inspirée par le constat que les limites entre les marchés et les segments de marché ne sont souvent pas si nettes et qu'une entreprise peut subir de la pression concurrentielle venant d'un autre marché, un autre segment de marché ou un autre niveau dans la chaîne de distribution.Quand des liens existent entre différents marchés ou différents niveaux de distribution, l'analyse concurrentielle doit inclure l'ensemble de ces marchés. Une entreprise peut avoir une position dominante sur un marché mais l'abus en tant que tel peut se situer plutôt sur un marché en aval ou en amont (voir également la Décision 2012-P/K-20 du 30 juillet 2012, Tondeur/Presstalis).

Sur base de cette approche, le Conseil n'a pas voulu exclure, par exemple, qu'un abus puisse exister en cas de différenciation de prix entre plusieurs segments de marché. Le simple fait que des produits fassent partie d'un marché différent, n'est pas suffisant pour justifier des prix discriminatoires (Décision 2011-P/K-15 du 29 avril 2011, Freedom/Inbev). 168. Dans certaines conditions une entreprise en position dominante peut adopter une stratégie tarifaire différente pour différentes catégories de clients mais le comportement commercial de l'entreprise ne doit pas fausser la concurrence sur un marché situé en amont ou en aval (voir également l'arrêt TUE du 9 septembre 2009, Clearstream, affaire T-301/04, au n° 192).Ce qui importe alors est d'analyser si un certain degré de concurrence existe entre l'entreprise en position dominante et des entreprises actives sur un marché lié, ou si le comportement de l'entreprise en position dominante porte préjudice à la concurrence ou présente un désavantage pour les concurrents ou les partenaires commerciaux sur le marché où cette entreprise est elle-même active ou sur un marché lié. Il s'agit d'hypothèses alternatives et non pas cumulatives comme le prétend bpost. 169. Pour le Conseil, il faut examiner la relation des deux catégories de clients (clients directs et intermédiaires/routeurs) à l'égard de bpost et non pas se focaliser uniquement sur la relation entre les deux catégories de clients entre elles (voir également Aéroports de Paris, arrêt TUE du 12 décembre 2000, affaire T-128/98, no.206). Il est important de prendre en compte les critères selon lesquels les rabais sont donnés (voir également l'avis du Conseil français de 2007 citée ci-dessus 124, notamment au numéro 74 et CJUE 15 mars 2007, affaire C-95/04 P, British Airways). 170. Le Conseil constate que d'une part les clients directs et les intermédiaires/routeurs sont tous les deux des partenaires commerciaux de bpost et que, d'autre part, le service que bpost leur fournit est, en grande partie, identique, voire très semblable.Dans les deux cas, il s'agit de distribuer du courrier pour lequel certaines activités en amont de la distribution ont déjà été effectuées. 171. bpost a reconnu que les routeurs sont des clients qui achètent les services de distribution de bpost (voir par exemple dans ses observations additionnelles, p.9). En même temps, bpost reconnaît qu'il y a une certaine concurrence entre les intermédiaires et bpost (voir par exemple p. 38 des observations écrites). 172. bpost ne conteste pas que pour un volume donné, les tarifs conventionnels accordés aux clients directs sont plus avantageux que les tarifs accordés aux routeurs qui ne peuvent pas consolider.173. Pour déterminer le tarif applicable, bpost n'accepte pas la consolidation du courrier sauf pour les Expéditeurs Autorisés (voir les groupes de société, ci-dessus, numéro 77).En d'autres termes, les conditions commerciales pour le même service (assurer la prise en charge pour la distribution) sont différentes pour les différentes catégories de partenaires commerciaux. La base de calcul (le chiffre d'affaires) n'est pas prise en considération de la même façon pour les clients directs et pour les intermédiaires. Pourtant, le volume est précisément le critère objectif déterminant pour les différentes ristournes de type quantitatif. 174. Par rapport à bpost (certains) expéditeurs/client directs d'une part, et les intermédiaires/routeurs d'autre part, se trouvent dans une position semblable et devraient donc, en principe, pouvoir bénéficier des mêmes conditions.175. L'auditeur a également attiré l'attention sur le fait que bpost accordait des ristournes à des groupes de sociétés, ce qui est un élément important dans l'évaluation de la politique commerciale et les objectifs poursuivis par bpost.En effet, le fait que les entreprises liées peuvent bénéficier des rabais de type quantitatif calculés sur base du volume global déposé peut créer des doutes par rapport aux arguments invoqués par bpost (voir ci-dessous concernant les justifications) et soulève des questions quant au comportement vis-à-vis des intermédiaires. Il s'agit d'un élément qui pourrait favoriser les grands clients. 176. Sur base des éléments qui ressortent de l'instruction et qui ont fait l'objet du débat devant le Conseil, il y a lieu de constater effectivement un traitement différencié entre d'une part les clients directs/expéditeurs et, d'autre part, les intermédiaires.Ce traitement soulève des soucis au niveau de la concurrence puisqu'il s'agit de deux catégories de clients de bpost et puisque ce traitement différencié concerne des ristournes de type quantitatif basées sur le volume. 177. bpost a contesté que ce traitement différencié puisse être considéré comme un traitement différent de deux situations identiques dans le sens requis par la jurisprudence en matière de discrimination.178. Le contexte factuel et les rapports des différents acteurs sur le marché concerné rendent effectivement plus difficile et sans doute peu approprié de qualifier ce traitement différencié comme une discrimination stricte dans le sens de la jurisprudence uniquement basée sur l'article 102 sous c) TFUE.Cependant, contrairement à ce que semble défendre bpost, le simple fait que les intermédiaires/routeurs et les clients directs se trouvent entièrement ou partiellement à un autre niveau du marché n'exclut pas qu'un traitement différencié puisse être un élément décisif pour déterminer le caractère abusif d'un comportement. En d'autres termes, ce n'est pas en excluant l'hypothèse de la discrimination au sens strict du terme, que l'on peut exclure toute application de l'article 102 TFUE. 179. Même si l'existence d'un rapport de concurrence entre les catégories de clients semble être retenue actuellement comme condition pour le cas de figure mentionné à l'article 102 sous c) du traité TFUE, le texte même du traité TFUE et de la LPCE ainsi que la jurisprudence montre bien qu'il convient de prendre une approche proche de la réalité économique.Un traitement différencié peut être inéquitable ou peut poser des problèmes à des partenaires commerciaux au regard de la concurrence et de la structure du marché. Un comportement caractérisé par un traitement différencié pourrait être qualifié en faisant référence à l'article 102 sous b) ou sous a) TFUE. Dans la jurisprudence un comportement potentiellement abusif a aussi souvent été examiné sur base des grands principes de l'article 102 TFUE sans faire référence aux exemples qui y sont repris (voir récemment CJUE 27 mars 2012, affaire C-209/12, Post Danmark).

La liste des exemples dans l'article 102 TFUE ou l'article 3 de la LPCE n'est pas exhaustive et il ne convient pas d'en faire une lecture limitative (voir l'approche de la Cour dans l'affaire Tetra Pak, CJUE 14 novembre 1996, affaire C-333/94 P, notamment au numéro 37, et la Décision COMP/38745 de la Commission du 20 octobre 2004 sur la législation postale allemande relative aux services de routage, et notamment à l'accès aux intermédiaires pour l'autoprestation et des groupeurs au réseau postal publics et aux tarifs spéciaux correspondants (DPAG), no. 95, voir également l'Avis du Conseil français, cité ci-dessus au numéro 124 et les numéros 75 et 76 et les références qui s'y trouvent). 180. Le Conseil n'est pas tenu par la qualification en tant que discrimination qui n'est qu'une des hypothèses possibles dans le cadre de l'article 102 TFUE.Comme il a été dit ci-dessus, l'auditeur a d'ailleurs examiné le modèle expéditeur sous l'angle de plusieurs qualifications dans le cadre de griefs différents. bpost s'est également défendu contre les griefs de l'auditeur en développant plusieurs moyens juridiques et économiques qui couvrent aussi bien la discrimination stricte que le caractère potentiellement restrictif du modèle expéditeur sous d'autres perspectives. 181. La discrimination stricte entre deux cas identiques n'étant sans doute pas établie, il y a bien un traitement différencié entre deux catégories de clients de bpost.Ce traitement différencié est à la base de l'analyse concurrentielle du Conseil. D'autres caractéristiques restrictives du modèle expéditeur seront identifiées ci-dessous. 8.2.2.2. Les effets d'éviction du modèle expéditeur Concurrence et accès aux grands clients 182. La particularité dans cette affaire est que les intermédiaires/routeurs sont non seulement les clients de bpost mais en plus, du moins pour une partie des activités, des concurrents (cette double capacité est reconnue notamment dans la Décision de la Commission du 23 octobre 2001 relative à l'absence de contrôle exhaustif et indépendant des conditions tarifaires et techniques appliquées par La Poste aux entreprises de routage pour l'accès à ses services réservés).Cette circonstance est pertinente dans la mesure où elle peut contribuer au caractère abusif d'un système de tarification qui présente un désavantage pour une catégorie de partenaires commerciaux que sont les intermédiaires/routeurs, qui sont en même temps concurrents pour l'accès aux clients. Un désavantage pour une catégorie de clients/partenaires commerciaux peut alors avoir un caractère évictif de concurrents ou de concurrents potentiels. 183. Le rapport de concurrence existe également parce que bpost a effectivement une activité de routeur via sa filiale Speos.Cette société propose des services de gestion de documents administratifs qui incluent des activités de préparation de courrier.

Le rapport indique qu'en 2009 Speos avait une part de marché de [0-10] % dans le segment de marché du routage. bpost n'a pas contesté que sa filiale Speos est bien active sur le segment de marché du routage mais a soulevé qu'il s'agit d'une activité très limitée et qui concernerait uniquement l'Admin Mail (observations écrites bpost, p. 72, observations additionnelles bpost, p. 10). Dans sa décision du 20 juillet 2011, L'IBPT mentionne également les activités de Speos en faisant référence au rapport annuel de bpost pour 2009 (p. 12, note 21). 184. Un rapport de concurrence existe surtout entre bpost et les intermédiaires parce que, même si bpost peut offrir un service qui couvre toute la chaîne de distribution tandis que les intermédiaires doivent s'adresser à bpost pour la distribution, un client direct qui signe une convention client direct avec bpost est un client qui est perdu pour les intermédiaires/routeurs, voire pour un nouvel entrant dans le marché. Du point de vue de l'analyse concurrentielle, ce qui est encore plus important est qu'un client expéditeur qui contracte exclusivement avec un intermédiaire n'a plus de contact direct avec bpost. Ce dernier perd donc l'accès privilégié à ces clients pour la durée du contrat.

Le tableau fourni par bpost pour expliquer le modèle expéditeur montre bien que pour bpost les intermédiaires ont un rôle vis-à-vis des plus petits clients mais que bpost garde le contact avec les grands clients (voir le tableau au numéro 74) que ce soit via le contrat Client Direct ou le contrat Proxy. 185. Il existe donc bien un certain degré de concurrence entre bpost et les intermédiaires/routeurs, et les intermédiaires/routeurs exercent une forme de pression concurrentielle sur bpost.L'accès direct aux clients est à la base de ce constat. 186. Au vu de l'importance des plus grands expéditeurs de courrier qui représentent une proportion importante des volumes de courrier en Belgique (point 245 des observations écrites de bpost) [...] pour l'année 2009 (point 247 des observations écrites de bpost), bpost a, en effet, intérêt à garder un lien direct avec ces grands clients.

Vu son intérêt à garder le lien avec les grands clients, bpost est incitée à abuser de sa position dominante sur le marché concerné. 187. Il faut également constater que plusieurs sources dans le dossier confirment que la concurrence sur le marché en amont de la distribution, peut être un facteur stimulant pour lancer la concurrence sur le marché de la distribution qui vient d'être libéralisé plus récemment (observations de l'auditeur du 17 novembre 2011, qui cite la Commission et l'IBPT ainsi qu'un rapport de Copenhagen Economics établi à la demande de la Commission, p.15 des observations écrites; voir aussi la décision de l'IBPT du 20 juillet 2011 qui cite un rapport de CRID au numéro 56). 188. Il est clair que dans le cadre de ce dossier comme l'indique bpost (observations écrites additionnelles du 14 décembre 2011, p.43 et suivants), il n'incombe pas au Conseil de se prononcer sur le futur développement de la structure du marché de la distribution. Cependant, la concurrence sur le marché de distribution joue un rôle dans le cadre de l'analyse dans la mesure où la politique tarifaire de bpost privilégie l'accès aux grands clients et que, sans cet accès, les coûts d'entrée de concurrents au niveau de la distribution pourraient rester vraisemblablement prohibitifs. 189. C'est dans ce contexte particulier qu'il faut examiner si le modèle expéditeur en tant que système de tarification présenté et appliqué par bpost, peut présenter un désavantage dans la concurrence pour les intermédiaires/routeurs. Désavantage pour la concurrence 190. Le concept de désavantage peut englober plusieurs scénarios différents dans lesquels l'entreprise en position dominante vise à évincer les concurrents ou encore à exploiter sa position sur le marché.Il peut y avoir une situation où le client est défavorisé par rapport à un autre client de l'entreprise en position dominante, une situation où le client est défavorisé par rapport l'entreprise en position dominante, ou encore, une situation où le client est défavorisé sur le plan commercial de façon telle que sa capacité à concourir, sur quelque marché que ce soit, est entravée (Décision du 20 octobre 2004, DPAG, citée au numéro 179, au 93). 191. Pour le Conseil, le système de tarification et le critère de l'identification comme condition sine qua non pour obtenir des rabais semblables à ceux dont bénéficient les clients directs, présente bien un désavantage pour les intermédiaires qui sont, du moins partiellement, dans un rapport de concurrence avec bpost.Les intermédiaires sont défavorisés par rapport aux clients directs même s'ils ne sont pas concurrents dans le sens strict; les intermédiaires sont défavorisés par rapport à bpost parce qu'il ne leur est pas possible d'offrir aux expéditeurs les mêmes conditions.

Les expéditeurs dont le courrier était consolidé en 2009 et qui avaient de ce fait obtenu des conditions plus favorables que s'ils avaient opté pour un contrat Client Direct n'ont plus eu accès à ces conditions favorables en 2010 suite à l'introduction du modèle par expéditeur. 192. Dans une perspective de protection de la concurrence et à plus long terme, le niveau dans la chaîne qui est la demande (les expéditeurs, grands et plus petits) est aussi défavorisé, parce que le choix peut être limité par les effets d'éviction du système de rabais. Or, l'existence d'un certain choix des services offerts est également importante à préserver, et cela vaut encore plus pour un marché récemment libéralisé. 193. Si les expéditeurs ne sont donc pas des concurrents directs des routeurs, le maintien des routeurs à des tarifs en pratique plus élevés que les expéditeurs, pouvait les exclure du marché de la prestation des services en amont pour les expéditeurs.En effet, les clients directs/expéditeurs n'ont pas d'intérêt à externaliser l'entièreté des services, tant que bpost leur accorde des tarifs plus avantageux pour la distribution qu'aux routeurs. Le Conseil retrouve aussi cette idée dans l'Ordonnance du 28 octobre 2004 du Président du Tribunal de commerce de Bruxelles qui est citée par l'auditeur (au chapitre 5.2.2 du rapport).

Impact sur la position des intermédiaires 194. Contrairement à ce qu'invoque bpost, l'auditeur n'était pas dans l'obligation d'apporter la preuve d'une détérioration concrète et quantifiable de la position concurrentielle des partenaires commerciaux pris individuellement dès lors qu'il est établi que le système qui fait l'objet du rapport motivé défavorise les intermédiaires/routeurs en tant que catégorie de partenaires commerciaux, non pas pour favoriser une autre catégorie de partenaires commerciaux mais pour favoriser bpost elle-même et les relations contractuelles qu'elle peut avoir avec les clients directs, ce qui est susceptible d'avoir un effet d'éviction (CJUE 17 février 2011, affaire C-52/09, TeliaSonera, numéro 64). Le Conseil constate que l'instruction a pu mettre en avant des indications concrètes et suffisamment convaincantes de l'impact que le système de tarification a pu avoir sur les activités des intermédiaires. 195. bpost défend que, contrairement aux propos de l'auditeur, aucun effet négatif sur la position concurrentielle des intermédiaires ne résulte du modèle « par expéditeur » (notamment aux points 202 et suivants de ses observations écrites) du fait que : - le modèle « par expéditeur » n'aurait pas d'impact négatif sur le niveau des ristournes quantitatives payées aux intermédiaires - le modèle « par expéditeur » est avantageux pour la dynamique dans le secteur des intermédiaires et le secteur postal belge en général et cet impact positif se poursuit en 2011 - l'unique alternative est une [...] ce qui aura pour conséquence inévitable une [...] 196. bpost base sa démonstration sur des rapports établis à sa demande par Oxera (annexes 27 et 28), rapports qui analysent l'impact de la tarification 2010 sur les intermédiaires.Ces rapports établissent que : - le volume de DM et Admin Mail traité par les intermédiaires (via les conventions intermédiaires et proxy) a augmenté au total. La proportion de DM et Admin qui a été envoyée via des intermédiaires s'est accrue, passant de [15-25] % en 2009 à [15-25] % en 2010 et cette croissance s'est poursuivie en 2011 pour atteindre [15-25] %. - le nombre de clients direct DM et Admin a diminué alors que le volume de courrier expédié par ces clients directs a augmenté mais moins rapidement que celui traité par les intermédiaires dans le cadre des contrats d'intermédiaires et Proxy - le volume de courrier déposé par les intermédiaires sous contrat d'intermédiaire et sous contrat Proxy sous-estime les volumes globaux déposés par les intermédiaires dans la mesure où, selon les estimations de bpost, [60-100] % du courrier des clients directs est déposé par des intermédiaires. 197. Le Conseil ne conteste pas en soi les conclusions d'Oxera mais relève que l'essentiel des informations fournies dans ce rapport ainsi que les conclusions ne permettent pas de mettre en doute que les spécificités du modèle « par expéditeur », c'est-à-dire les remises quantitatives ainsi que le Drop Size Rebate ont un impact réellement ou potentiellement négatif sur les intermédiaires.198. L'analyse d'Oxera porte, en effet, sur les effets de l'ensemble de la tarification introduite par bpost en 2010, y compris des éléments de cette tarification, dont l'introduction du Indirect Channel Rebate.Il est dès lors difficile d'identifier, dans le rapport Oxera 2010, l'impact spécifique des rabais accordés par expéditeur.

Cette difficulté est encore renforcée par le choix de distinguer d'une part les clients sous convention Clients directs et d'autre part, les intermédiaires en regroupant dans cette catégorie des intermédiaires aussi bien les clients dont les volumes d'envois font l'objet des conventions « Intermédiaires » que les clients qui ont signé des « Proxy contracts ». Ainsi que relevé au numéro 81 ci-dessus, les contrats Proxy sont, du point de vue de l'affranchissement, des contrats de type client direct auquel une clause Mandat a été ajoutée.

Une analyse des effets des rabais par expéditeur aurait dû distinguer d'une part tous les envois des expéditeurs qui ont une convention avec bpost et bénéficient de rabais de type Clients Directs, soit les envois des clients sous contrat direct et les clients sous contrat Proxy et, d'autre part, les envois des expéditeurs qui n'ont pas de convention avec bpost mais dont les envois sont facturés dans le cadre d'une convention « Intermédiaire ».

L'introduction du contrat Proxy en 2010 a pour objet de permettre à l'expéditeur de maintenir un statut de client direct au niveau des conditions tarifaires tout en sous-traitant l'entièreté de sa relation avec bpost à un intermédiaire. On peut dès lors supposer qu'un certain nombre de clients directs ont ainsi pu choisir de passer d'une convention « client direct » à une convention de type « Proxy ».

L'annexe 4 des observations de bpost montre d'ailleurs que sur [...] clients, [...] sont passés sous contrat « Proxy » en 2010. 199. Observer une diminution du nombre de clients directs entre 2009 et 2010 - sans information sur le fait de savoir combien de clients directs sont éventuellement passés sous contrat Proxy - ou une augmentation du volume traité par les intermédiaires en 2010 sans savoir quelle part de ce volume représente du volume sous contrat « Proxy » n'est dès lors pas forcément révélateur de l'impact de l'introduction du modèle « expéditeur » sur le volume des envois qui fait l'objet d'une convention « intermédiaire ». A fortiori, dans ce cadre, les envois d'expéditeurs sous contrat client direct déposés par les intermédiaires ne sont pas à prendre en compte dans le volume d'activités des intermédiaires puisque l'affranchissement de ces envois est facturé directement à l'expéditeur. 200. bpost conteste ensuite l'affirmation de l'auditeur selon laquelle le modèle « par expéditeur » serait défavorable pour les activités des intermédiaires générant des volumes élevés. bpost considère que c'est à tort que l'auditeur assimile une diminution des ristournes octroyées en 2010 à certains grands intermédiaires (par rapport aux ristournes qu'ils ont obtenues en 2009) à une stratégie d'éviction (point 404 du rapport) ou à une atteinte au positionnement de ces derniers (points 304 et 404 du rapport).201. A nouveau, le Conseil constate que l'argumentation de bpost se fonde sur des données tirées des rapports Oxera qui ne permettent pas de mettre en doute l'impact réel ou potentiel des ristournes quantitatives sur les intermédiaires sous convention « Intermédiaire » exclusivement.202. En effet, bpost présente l'impact pour les intermédiaires en général de la tarification 2010 dans son entièreté (point 235 des observations écrites) et indique que le nombre d'intermédiaires qui a vu les ristournes qui lui sont octroyées par bpost pour des envois de type Direct Mail augmenter en 2010 est plus élevé que celui de ceux qui ont vu leurs ristournes diminuer.bpost ajoute, par ailleurs, que le modèle par expéditeur a permis de conserver un niveau de rémunération des intermédiaires supérieur à ce qu'il était en 2008 moyenne. Les ristournes payées aux intermédiaires, calculées sur base d'un volume constant tel que mesuré en 2010 sous les conventions Direct Mail seraient ainsi passées de [5-10] millions en 2008 à [5-10] en 2009 et [5-10] millions en 2010.

Convention / année

2008

2009

2010

Total des ristournes opérationnelles (millions EUR)

[0-5]

[0-5]

[0-5]

Total des ristournes quantitatives incl. ICR (millions EUR)

[4-8]

[4-8]

[4-8]

TOTAL

[5-10]

[5-10]

[5-10]

Total des ristournes opérationnelles (%)

[0-5] %

[0-5] %

[0-5] %

Total des ristournes quantitatives incl. ICR (%) (« Indirect Channel Rebate »)

[10-15] %

[10-15] %

[10-15] %

TOTAL

[15-20] %

[15-20] %

[15-20] %


(tableau figurant à la page 99 des observations écrites de bpost) 203. Les ristournes opérationnelles (dont le Drop Size Rebate) ne représentent que [10-30] % du total des ristournes tandis que les ristournes quantitatives incluant l'Indirect Channel Rebate représentent [70-90] % des ristournes.204. Le Conseil note que, si le nombre d'intermédiaires qui a vu les ristournes qui lui ont été payées par bpost augmenter en 2010, est plus élevé que le nombre d'intermédiaires qui a vu le montant des ristournes payées par bpost diminuer, l'impact en terme financier est plus important pour ceux qui ont vu leurs ristournes diminuer puisque le montant des ristournes quantitatives, y inclus l'Indirect Channel Rebate, octroyées en 2010 est inférieur de [1] millions, soit une diminution de [5-15] %, au montant des ristournes quantitatives octroyé en 2009, année où l'ICR n'existait pas.Du fait de l'agrégation au sein d'une même catégorie des ristournes quantitatives et de l'ICR, l'impact du modèle par expéditeur sur les ristournes quantitatives ne peut ainsi être déduit du tableau ci-dessous - ce que bpost fait pourtant dans ses observations.). L'ampleur des ristournes de type Indirect Channel Rebate introduites en 2010 monte à [0-5] millions d'euros (rapport d'Oxera 2010, p. 28). 205. En déduisant ce montant de [0-5] millions du total des ristournes quantitatives (y inclus l' Indirect Channel Rebate) repris en 2010 dans le tableau ci-dessus au numéro 202, soit [5-10] millions, on obtient un montant de ristournes quantitatives (hors Indirect Channel Rebate) payées aux intermédiaires en 2010 de [5-10] - [0-5] = [0-5] millions, soit une réduction de [30-45] % par rapport aux ristournes quantitatives octroyées en 2009.Le Conseil estime sur cette base que le modèle « par expéditeur » étant défini comme les ristournes octroyées aux envois par expéditeur a eu un impact significatif en 2010 en réduisant de plus de [30-40] % le montant de ces ristournes. 206. Le Conseil note également que l'introduction de l'Indirect Channel Rebate, ristourne destinée à compenser les intermédiaires pour les coûts qu'ils encourent du fait de la gestion contractuelle de la relation commerciale avec bpost, soit en leur nom propre, soit au nom des expéditeurs dans le cadre des contrats Proxy, a pour effet de compenser une bonne part des réductions de ristournes quantitatives résultant de l'introduction du modèle « par expéditeur ».C'est sur cette base que bpost estime que sa tarification 2010 n'a engendré qu'une baisse limitée des ristournes quantitatives, Indirect Channel Rebate inclus, pour les intermédiaires. Or, le grief concerne les rabais quantitatifs et pas l'Indirect Channel Rebate. Le chiffre pertinent de mesure de l'effet du modèle expéditeur est donc une baisse de [30-45] %. 207. De plus, ainsi que le relève le rapport Oxera 2011, la ventilation de l'Indirect Channel Rebate et des ristournes quantitatives varie fortement en fonction du volume d'envois déposé par l'intermédiaire. L'impact positif des ristournes Indirect Channel Rebate existe surtout pour les petits intermédiaires qui se situent en dessous du seuil de chiffre d'affaires avec bpost qui leur donnerait droit à des ristournes quantitatives. Par contre, l'impact négatif des ristournes quantitatives existe principalement pour les grands intermédiaires.

Derrière un impact agrégé de [...] % se situe un statut quo ou une forte amélioration de la situation des intermédiaires qui déposent un volume limité d'envois tandis que la situation des intermédiaires qui en 2009 déposaient un grand volume d'envois se dégrade fortement.

Taux élevés et caractère rétroactif 208. Il y a d'autres aspects spécifiques dans ce cas qui contribuent au caractère restrictif du système de bpost et à ses effets d'éviction.Le Conseil identifie tout particulièrement le taux élevé des ristournes et leur caractère rétroactif. 209. bpost reconnaît (voir au point 228 des observations écrites) que le niveau des rabais accordés est beaucoup plus élevé que celui des rabais accordés en Allemagne, au Royaume Uni et en France.C'est ainsi que le dispositif de remises commerciales de La Poste qui a fait l'objet de l'Avis n° 07-A-17 du 20 décembre 2007 du Conseil de la Concurrence français, comporte une remise maximale de 12 % pour le marketing direct tant dans le secteur réservé que non réservé. Ce taux est inférieur à celui obtenu dans la classe 3 dans la grille tarifaire de bpost et est à comparer à une remise maximale octroyée par bpost de 40 % pour le marketing direct en secteur réservé (convention 20 ou 25) et de 50 % pour le marketing direct en secteur non réservé (convention 21 ou 26). Pour un même chiffre d'affaires annuel se situant juste en dessous de 5 millions d'euros, la remise octroyée pour le marketing direct dans le système français est de 3,3 % tandis que la remise octroyée par bpost en 2010 varie entre 32 % et 41 % (classe 10 des conventions 20 et 21). 210. De plus, l'assiette sur laquelle les ristournes sont calculées diffère également entre le système belge et le système français.Dans le cas français, la remise s'applique sur la seule quantité incrémentale achetée au-delà du seuil défini pour chaque classe tandis que dans le cas belge, le rabais est rétroactif car la remise d'une classe déterminée s'applique au chiffre d'affaires total généré par un expéditeur lorsque ce chiffre d'affaires dépasse le seuil défini pour la classe. 211. Or, ainsi que le souligne le Conseil de la concurrence français (point 108 et 109 de l'Avis n° 07-A-17, cité ci-dessus au numéro 124), des remises rétroactives sont jugées moins favorablement au regard du droit de la concurrence que les remises incrémentales.Dans le cas de rabais rétroactifs qui varient en fonction du seuil atteint, en effet, le prix d'une unité supplémentaire achetée peut être très faible, voire négatif et, en tout état de cause inférieur à son coût variable, au voisinage d'un seuil. Les effets de ce type de rabais peuvent alors être analogues à ceux d'une pratique de prédation ciblée. 212. De plus, dans ce cas les intermédiaires, ce type de ristourne implique une obligation de préfinancement puisque, contrairement aux clients directs, les intermédiaires ne bénéficient que d'un tarif provisoire correspondant au tarif de la classe 0, soit le tarif préférentiel.Cette obligation de préfinancement peut être lourde à porter pour les routeurs et peut les empêcher de répercuter les rabais sur les clients. 213. L'importance des rabais accordés par bpost à ses grands clients et l'incapacité pour les routeurs d'offrir une grille tarifaire similaire - du fait du risque associé à l'engagement sur le volume dans le cas de contrat client direct et de l'obligation de préfinancement dans le cas de contrat intermédiaire implique qu'il n'y a aucun intérêt pour les grands clients à arrêter leur convention avec bpost et confier l'entièreté de la gestion de leurs besoins postaux à un intermédiaire.Ces remises ont un effet fidélisant sur les plus grands clients de bpost qui, par ailleurs, représentent une part significative du volume d'envois marketing direct (voir ci-dessus au numéro 186). L'interdiction de consolidation des envois par les routeurs introduite en 2010 étend cet effet fidélisant aux expéditeurs de taille moyenne. 214. En effet, de par la consolidation des envois d'un certain nombre d'expéditeurs de taille moyenne ou petite, certains intermédiaires, en 2009, ont été en mesure de déposer un volume d'envois leur permettant de bénéficier de rabais correspondant à des classes de taille plus élevées que celles à laquelle appartiennent les expéditeurs pris isolément et d'ainsi accorder à ces expéditeurs des tarifs d'affranchissement plus favorables que ceux qu'ils auraient obtenus en contractant directement avec bpost.Suite à l'interdiction de consolidation par les routeurs, ces expéditeurs n'ont plus intérêt à confier l'ensemble de leurs besoins postaux à un intermédiaire. Ils seront éventuellement incités à passer à un Proxy contract qui combine les conditions tarifaires d'un client direct avec la possibilité de confier la gestion du service après-vente de cette relation contractuelle avec bpost à un intermédiaire.

Cette extension de l'effet fidélisant des rabais quantitatifs octroyés dans le cadre du modèle expéditeur pourrait augmenter les barrières à l'entrée dans le secteur de la distribution postale.

Conclusion intermédiaire sur les effets d'éviction 215. Si il n'est effectivement pas interdit à une entreprise dominante de réajuster sa politique tarifaire, il est par contre considéré comme constitutif d'un abus pour une entreprise en position dominante d'adopter une politique tarifaire qui a un effet d'exclusion sur une catégorie d'acteurs en sorte que le degré de concurrence auquel est soumis cette entreprise dominante en soit affecté.216. Il y a donc bien un ensemble de circonstances qui montrent une pratique qui tend à enlever à l'acheteur ou à restreindre pour celui-ci, les possibilités de choix en ce qui concerne ses sources d'approvisionnement, à barrer l'accès du marché aux concurrents, qui en plus d'un traitement différencié, inflige un désavantage dans la concurrence aux intermédiaires.La pratique renforce également la position dominante de bpost (voir CJUE 27 mars 2012, affaire C-209/10, Post Danmark, critère pour les effets d'éviction cité au numéro 26).

Il a été établi, bien au-delà des exigences de la jurisprudence (voir CJUE 6 décembre 2012, affaires C-457/10 P, AstraZeneca, numéro 112), que le modèle par expéditeur de bpost pouvait avoir des effets d'éviction contribuant à son caractère abusif. 8.2.2.3 Les autres facteurs qui contribuent au caractère restrictif 217. Il y a plusieurs autres facteurs concrets qui contribuent à l'impact du modèle expéditeur sur la position concurrentielle des intermédiaires/routeurs et à son caractère abusif.218. Le rapport soulève une discrimination relative à la période de renouvellement des contrats.L'auditeur explique que bpost applique par secteur d'activité, différentes périodes de renouvellement des contrats. Pour l'auditeur, les fenêtres temporelles des signatures de convention posent trois types de difficultés : la gestion des contrats, la marge de manoeuvre restreinte pour les intermédiaires et, dernièrement, un problème de discrimination. 219. bpost expose (observations écrites, numéro 29) avoir introduit un système de fenêtres temporelles pour le renouvellement des conventions en 2008, et a instauré trois dates de renouvellement de contrat pour les envois DM et Admin Mail déterminés par secteur : - 1er janvier : Presse, grande distribution, biens de grande consommation - 1er février : Routeurs et autres intermédiaires, vente par correspondance - 1er mars : Finances, Assurances, Télécom, Energie, Secteur public 220.bpost ajoute que les clients de bpost, tant les intermédiaires que les expéditeurs-clients directs, disposent déjà bien avant les dates de renouvellement de contrat des détails de sa politique tarifaire et ajoute (observations écrites, numéro 315) que les intermédiaires possèdent depuis octobre-décembre toute l'information nécessaire relative à la nouvelle structure tarifaire qui s'appliquera, quant à eux, à partir du 1er février. bpost affirme également que les clients-expéditeurs directs dont le contrat se termine en janvier et qui souhaitaient négocier avec un distributeur avaient la possibilité de demander le renouvellement de leur contrat arrivant à échéance pour un mois. 221. L'utilité des fenêtres temporelles pour le renouvellement des contrats est justifiée par bpost par l'impossibilité de renouveler tous les contrats à la même date et ce, en raison de la charge de travail trop importante qui en résulterait pour son équipe commerciale et administrative.Elle ajoute que compte tenu des conventions encore en cours, elle est tenue de respecter leur durée et n'a, dès lors, pas la possibilité contractuelle d'imposer à ces clients directs et intermédiaires de nouveaux contrats avant la date d'échéance des contrats encore en cours. Cependant, bpost précise que le principe d'égalité est respecté. 222. Force est de constater que ce système avait pour effet de rendre les négociations entre les intermédiaires et les expéditeurs, particulièrement ceux qui étaient déjà clients de bpost, particulièrement ardues.A supposer que les informations tarifaires aient été effectivement transmises aux intermédiaires à temps pour leur permettre d'en prendre connaissance, ceux-ci devaient nécessairement s'engager envers les expéditeurs du premier groupe sans avoir eux-mêmes conclu une convention avec bpost ou même pu entamer des négociations à ce sujet, ou obtenir de leurs prospects expéditeurs qu'ils sollicitent la prorogation de leurs conditions antérieures. 223. Si, en ce qui concerne les expéditeurs de ce premier groupe, l'instauration des fenêtres temporelles avait donc pour effet de placer les intermédiaires dans une position de négociation très difficile et affaiblie, particulièrement en ce qui concerne les expéditeurs déjà clients de bpost, il en est pratiquement de même pour les expéditeurs du deuxième groupe déjà clients de bpost. Il faut tenir compte du fait que ces expéditeurs pouvaient préférer négocier rapidement avec bpost plutôt que de devoir attendre que l'intermédiaire qui leur proposait ses services ait lui-même conclu avec bpost. 224. Si l'on peut comprendre que bpost ait souhaité répartir sur quelques mois la charge de travail de ses équipes occasionnée par le renouvellement des conventions (et ses modifications tarifaires), il faut constater que la manière dont bpost a réparti les entreprises et les intermédiaires entre les diverses fenêtres temporelles n'est pas justifiée par cette charge de travail et avait pour conséquence de rendre l'activité, et particulièrement le développement de l'activité et la conquête de nouveaux clients, plus difficile pour les intermédiaires.225. Il faut revenir ensuite sur l'obligation pour les intermédiaires/routeurs d'identifier leurs clients expéditeurs, qui a déjà été identifiée comme un facteur important dans le cadre de l'analyse concurrentielle évoquée ci-dessus.226. Cette obligation d'identifier les clients peut aussi en elle-même aggraver le caractère restrictif du système de tarification d'une autre façon.En effet, étant donné qu'il a été établi que bpost et les intermédiaires sont en partie des concurrents, le fait d'obtenir des informations sur les clients qui décident de travailler avec les intermédiaires / routeurs présente un avantage pour bpost. bpost estime que sa promesse de ne pas utiliser ses données à d'autres fins suffit pour garantir la non utilisation commerciale de données extrêmement sensibles. Le Conseil estime qu'un tel engagement de la part de bpost ne peut pas compenser la restriction causée par l'avantage que l'identification des clients procure à bpost, tout particulièrement en vue de l'importance stratégique du contact direct avec les grands clients. 227. Mis à part ces aspects spécifiques du modèle expéditeur qui renforcent le caractère restrictif de la pratique, il y a également des éléments qui sont propres au contexte juridique et économique dans lequel bpost opère.228. Dans la période concernée et jusqu'à présent, même après la libéralisation pour la distribution, bpost a un monopole de fait pour la distribution et est donc un partenaire incontournable pour les intermédiaires/routeurs tout comme pour les expéditeurs.Ce monopole de fait s'ajoute au fait que bpost a été désigné comme prestataire du service universel. bpost est seule à pouvoir déterminer les conditions de l'accès au marché de la distribution. Cette absence d'alternatives pour les routeurs qui souhaitent développer leurs activités est un élément pertinent. Compte tenu de la responsabilité particulière qu'ont les entreprises en position dominante, l'existence du monopole de fait pour la distribution contribue certainement au caractère restrictif du système de tarification. 229. Pour le Conseil, le dossier fait également apparaitre que la politique commerciale de bpost en général, et le modèle expéditeur en particulier, a été introduit dans un contexte complexe qui manquait de transparence et qui était en développement constant (p.132-137 du rapport). Une telle situation empêche les intermédiaires de prévoir raisonnablement quels sont les types de ristournes disponibles lorsqu'ils rentrent en négociation avec leurs clients.

Vu la position de marché de bpost et sa position incontournable pour les intermédiaires/routeurs, cette absence de transparence peut contribuer au caractère abusif de la pratique. Comme le souligne l'auditeur, l'absence de transparence a été constatée à maintes reprises dans le passé par notamment l'IBPT. 8.3. Les justifications invoquées par bpost pour le modèle expéditeur 230. Dans le cadre de sa défense devant le Conseil, bpost a développé une série d'arguments que l'on pourrait qualifier de justifications objectives ou économiques.Le Conseil traitera ci-dessous des principales justifications dans la mesure où elles n'ont pas encore été intégrées dans l'analyse des restrictions au 8.2. 231. Il convient d'abord de répondre au moyen de bpost qui a invoqué la situation en France pour justifier sa politique tarifaire.De façon générale, le Conseil voit mal comment l'existence d'une certaine pratique, validée ou non, dans un autre état membre pourrait en tant que telle constituer une justification dans le cadre du droit de la concurrence appliqué dans un autre état membre, ou permettre de considérer qu'un comportement abusif n'aurait pas ce caractère. Tout au plus, une éventuelle jurisprudence pertinente aurait pu créer des attentes dans le chef de bpost concernant l'approche en Belgique (voir ci-dessous au chapitre X). 232. La position que prend le Conseil dans la présente décision peut paraître, à première vue, différente que celle prise par la Cour de cassation française dans son arrêt du 5 mai 2009 (08-15290, Edipost et autres contre La Poste qui est citée par bpost).Comme l'auditeur l'a remarqué dans son rapport et dans ses observations en réponse aux observations de bpost, il faut être très prudent en comparant différentes cas. L'évaluation d'un abus de position dominante dépend des faits concrets et du contexte économique spécifique. 233. Le dossier montre en tout cas deux différences importantes au niveau des ristournes données par la Poste française et par bpost : d'une part, les ristournes quantitatives données par bpost sont considérablement plus élevées que celles qui étaient données par la Poste française et qui faisaient l'objet de l'affaire qui a mené à l'arrêt du 5 mai 2009 (voir également les observations écrites de Link2Biz, point 19);d'autre part, certaines caractéristiques pertinentes étaient différentes comme par exemple le caractère rétroactif du système de bpost (voir ci-dessus, aux numéros 209 et 210 et également soulevé par les plaignants) alors que le système évalué par la Cour de cassation concernait des rabais incrémentaux. Ces deux circonstances sont importantes dans l'évaluation du caractère restrictif du modèle expéditeur de bpost dans la période concernée. 234. Puis, il n'a pas été établi que le contexte réglementaire et juridique dans lequel La Poste française opérait pendant la période examinée dans le cas français était suffisamment comparable au contexte belge en 2009-2010 qui fait l'objet de la présente affaire.235. Finalement, dans son arrêt du 5 mai 2009, la Cour de cassation a décidé que le moyen soulevé par les requérants (routeurs) ne permettait pas d'invalider l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 26 mars 2008 sans qu'elle ne se livre à un examen approfondi de l'analyse effectuée en matière du droit de la concurrence.La cour d'appel avait pris une approche qui était principalement basée sur le constat que les routeurs n'étaient pas les clients de La Poste puisqu'il n'y avait pas de contrat entre les routeurs et La Poste mais uniquement avec les expéditeurs, et que les ristournes étaient fondées sur la spécificité de la demande. Sur cette base, il n'y avait pas, selon la cour d'appel, de situation équivalente des expéditeurs et des routeurs. La Cour de cassation a jugé que ce constat n'était pas entaché d'erreur. 236. Mis à part les différences importantes avec le cas français invoqué par bpost au niveau des faits et du contexte pertinent, le Conseil a expliqué ci-dessus qu'il y a lieu dans ce cas, de prendre la perspective de la relation commerciale que chacun a avec bpost et de considérer que les expéditeurs et les routeurs se trouvent dans une position suffisamment semblable en tant que client des services de distribution, même s'ils se trouvent à un autre niveau de la chaîne de distribution.237. bpost a également invoqué d'autres justifications.238. Si les conditions d'application sont remplies, l'interdiction de l'article 3 LPCE et de l'article 102 TFUE s'applique puisqu'il n'y a pas d'exception semblable à l'article 2, § 3 de la LPCE ou l'article 101, § 3 du TFUE mais uniquement la possibilité pour l'entreprise en question de démontrer qu'il existe éventuellement une justification objective pour l'avantage que la ristourne représente.Si l'entreprise apporte les preuves nécessaires pour justifier son comportement, le comportement ne sera pas considéré comme abusif. Dans ce cas, l'interdiction ne s'appliquerait pas. 239. L'appréciation de la justification économique s'effectue également sur la base de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce. L'entreprise peut démontrer que soit son comportement est objectivement nécessaire, soit que l'effet d'éviction qui résulte d'un tel système, désavantageux pour la concurrence, peut être contrebalancé, voire surpassé, par des avantages en termes d'efficacité qui profitent également au consommateur. Si l'effet d'éviction de ce système est sans rapport avec les avantages pour le marché et les consommateurs ou s'il va au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre ces avantages, ledit système doit être considéré comme abusif (CJUE 15 mars 2007, affaire C-95/04 P, British Airways, au numéro 86). Il faut donc dans cette dernière hypothèse, pouvoir établir un rapport clair entre les gains d'efficience et les effets restrictifs du système et ces derniers ne peuvent en tout cas pas être disproportionnés par rapport aux gains d'efficience présumés.

Il appartient à bpost d'apporter les éléments nécessaires pour effectuer une telle analyse. 240. En ce qui concerne la nécessité de l'identification des clients, que bpost a invoqué comme justification objective, il faut dire que le problème de pouvoir calculer le nombre de courriers émis par émetteurs ne se poserait pas si l'exigence de bpost d'individualiser les rabais par émetteur sans raison objective ne l'exigeait pas.Si les rabais étaient calculés sur la totalité des courriers déposés, cette nécessité d'identification n'existerait pas. 241. En ce qui concerne les gains d'efficience éventuels qui pourraient compenser les effets restrictifs du système, le Conseil ne peut pas exclure qu'en principe la nécessité de stimuler la demande et d'inciter les clients à continuer à utiliser la poste comme média, pourrait servir de justification d'une pratique commerciale à première vue abusive.242. En l'occurrence, selon bpost, le modèle par expéditeur permettrait de faire augmenter le volume postal en Belgique.243. Le raisonnement économique sous-tendant le modèle « par expéditeur » serait de stimuler l'expéditeur à accroître son volume postal, et en particulier les grands émetteurs dont la demande pour les services postaux serait caractérisée par une plus grande sensibilité au prix. bpost s'appuie sur le rapport établi par Oxera (en annexe 27 des observations écrites de bpost) qui, selon bpost, confirme que plusieurs études internationales démontrent que les grands expéditeurs sont plus sensibles au prix que les expéditeurs générant un volume postal plus limité. De plus, ce rapport établirait également l'impact positif du modèle par expéditeur sur la stimulation de la demande dans la mesure où le volume d'envois Direct et Admin Mail a augmenté en 2010. 244. Même si l'objectif de stimulation du volume postal pourrait se justifier au regard de l'importance des économies d'échelle dans la distribution postale, le Conseil observe que bpost n'apporte pas d'éléments convaincants à l'appui de la nécessité objective du modèle par expéditeur pour atteindre cet objectif.245. D'une part, bpost ne fournit aucune indication chiffrée confirmant des valeurs d'élasticité-prix supérieures pour ses grands clients émetteurs d'un type de courrier;bpost a seulement mentionné qu'« elle ressent » le fait que les grands expéditeurs sont plus sensibles au prix, sans donner plus de détails (voir au point 269 des observations écrites de bpost).

Les études citées dans le rapport d'Oxera (point 3.3 de l'annexe 27 des observations écrites de bpost) indiquent [...] mais ne permettent pas de mettre en évidence [...]. 246. Le Conseil note également que parmi les scénarios développés par Oxera pour mesurer l'impact du modèle par expéditeur sur le volume d'envois, un des scénarios se caractérise par des valeurs d'élasticité-prix constante quelle que soit la classe de taille à laquelle appartient l'émetteur.De plus, très peu de valeurs d'élasticité reprises dans les scénarios suggèrent qu'il est effectivement profitable pour bpost d'accorder des rabais dans la mesure où la demande considérée est inélastique. 247. D'autre part, si, ainsi que l'affirme bpost (au point 270 de ses observations écrites), l'analyse effectuée par Oxera montre que le volume d'envois Direct Mail et Admin Mail a augmenté en 2010, ce fait n'étaye nullement la thèse de la justification objective du modèle par expéditeur dans la mesure où l'augmentation du volume Direct Mail et Admin Mail traité par les clients directs est moindre que celle du volume traité par les intermédiaires (voir p.6 et 8 de l'annexe 28 des observations écrites de bpost) conduisant à une augmentation de la part du volume total traité par les intermédiaires entre 2009 et 2010.

La stimulation du volume postal apparaît ainsi en 2010 plus importante chez les intermédiaires que chez les clients directs, bénéficiaires du modèle par expéditeur, contredisant de ce fait l'argumentaire de la justification objective du modèle par expéditeur invoqué par bpost. 248. La thèse de bpost qui consiste à dire que seuls les expéditeurs sont capables de stimuler réellement la demande n'est pas établie.Les intermédiaires sont capables de stimuler également la demande en rétrocédant les rabais à leurs clients et ils y ont intérêt en vue de la concurrence qui règne entre eux. 249. bpost a également avancé l'argument de la remise en cause du financement du service universel si elle devait continuer à permettre la consolidation aux routeurs.Un risque existerait que l'ensemble du courrier professionnel tombe sous la classe 12 de ce rabais (p. 17 de l'annexe 27 des observations écrites de bpost); dans une telle hypothèse bpost estime qu'elle se retrouverait dans l'incapacité financière de financer le service universel faute de moyens. Pour l'auditeur, bpost n'a apporté aucune évaluation chiffrée démontrant de quelque manière que ce soit ce risque. 250. Le Conseil note effectivement tout comme l'auditeur, que bpost n'apporte aucun élément chiffré permettant de montrer que des rabais moins élevés mais non différenciés auraient eu un impact négatif sur les revenus et la profitabilité de bpost de nature telle que la viabilité financière de l'obligation de service universel soit mise en péril.Elle se contente d'affirmer que si une tendance à la consolidation se poursuivait au détriment des intermédiaires classiques offrant des activités de routage avec une valeur ajoutée, bpost prévoyait une perte de revenus considérable qui mettrait en péril le financement du service universel (observations écrites au point 244). Oxera se contente de chiffrer dans ses rapports qu'un tel scénario est possible, ce qui n'en établit pas la réalité.

En 2009, année où la consolidation était possible, la part de marché des plaignants en ce compris la consolidation dont ils étaient les principaux acteurs n'excédait pas [15-35] %. Cette situation s'écarte fortement des différents scénarios de consolidation examinés par Oxera (un minimum de [50-70] %, p. 13 de l'annexe 28 des observations écrites de bpost). 251. De toute façon, même si il était prouvé que la consolidation des courrier remettait en cause le financement du service universel, ceci pourrait difficilement être considéré comme une raison objective permettant à une entreprise en position dominante un traitement différencié entre des clients avec les risques d'éviction invoqués ci-dessus, bpost aurait la possibilité à ce moment-là de réajuster ses rabais pour que ces derniers ne remettent pas en cause son équilibre financier (voir l'arrêt Deutsche Post, CJUE 6 mars 2008, affaires C-287/06 à C-292/06).252. Le Conseil conclut de cette analyse qu'il n'y a pas d'éléments suffisamment convaincants pour retenir une des justifications économiques invoquées par bpost. 8.4. Conclusion sur le caractère abusif du modèle expéditeur 253. L'ensemble des aspects restrictifs du modèle expéditeur qui sont décrits ci-dessus, constitue un abus de position dominante dans le chef de bpost.Pour le Conseil, il ne convient pas de qualifier cette infraction comme une discrimination dans le sens strict du terme parce que cette qualification ne tient pas suffisamment compte de la complexité juridique et économique des faits et de l'analyse concurrentielle qui est faite dans cette décision. 254. Il s'agit par contre d'un système qui présentait des désavantages importants pour une catégorie de partenaires commerciaux de bpost, c'est-à-dire les intermédiaires/routeurs.255. Le traitement différencié des clients directs et des intermédiaires est à la base du caractère abusif du modèle expéditeur. Ce traitement ne peut être justifié uniquement sur base du fait que les clients directs et les intermédiaires n'étaient pas dans une situation identique. 256. En instaurant un tel système de tarification, bpost a abusé de sa position dominante sur le marché concerné en rendant plus difficile le développement de l'activité des intermédiaires qui se situent entre les expéditeurs et bpost.257. Les activités des intermédiaires constituent un des seuls facteurs de pression concurrentielle sur bpost dans le marché concerné comme défini par le Conseil.De plus, du moins potentiellement, les intermédiaires sont susceptibles de se développer également comme nouveaux entrants sur le segment de la distribution. 258. Pour offrir leurs services, les intermédiaires dépendent entièrement de bpost qui avait un monopole de fait pour la distribution du courrier.bpost était en même temps concurrent des intermédiaires et partenaire commercial incontournable. 259. L'accès aux clients directs, en particulier les grands clients, est rendu plus difficile pour les intermédiaires.De ce fait le maintien des liens historiques qu'entretient bpost avec cette catégorie de clients était favorisé. Ce caractère fidélisant du modèle expéditeur est alors susceptible de renforcer la position dominante de bpost et de retarder le développement de la concurrence sur le marché de la distribution. 260. Ce comportement a eu lieu dans un contexte caractérisé par des changements fréquents et continus et pas toujours clairs des conditions tarifaires appliquées par bpost, ce qui rendait aussi plus difficile le développement des activités des intermédiaires.L'IBPT s'est prononcé sur la question de la transparence dans sa décision du 20 juillet 2011. 261. Vu l'analyse du Conseil qui mène à la conclusion de l'existence d'un abus, le Conseil ne traite plus de certains autres reproches concrets du rapport à l'encontre de la politique tarifaire de bpost comme les tests opérationnels et certains rabais exceptionnels.262. Pendant la procédure devant le Conseil, l'auditeur a clarifié qu'il considère que le début de cette infraction était l'annonce de la (nouvelle) politique tarifaire en octobre 2009 aux clients directs et aux routeurs.bpost a mis fin au système, modèle expéditeur à l'occasion de la décision du 20 juillet 2011 de l'IBPT. Même si l'annonce a vraisemblablement rendu la position concurrentielle des intermédiaires plus difficile, il faut considérer que la date de référence pour le début de l'infraction est la date d'entrée en vigueur du nouveau système, soit le 1er janvier 2010.

IX. Les autres griefs 9.1. Le refus de vente 263. Dans son rapport motivé, l'auditeur a formulé un grief contre bpost qu'il qualifie de refus de fourniture.Le grief vise la remise en cause par bpost des conditions contractuelles proposées à L2Biz pour l'année 2009 en cours de convention et la décision d'empêcher l'accès des routeurs aux conditions des clients depuis 2010. Il estime que ces circonstances constituent un refus de vente implicite dans la mesure où les intermédiaires n'ont d'autre choix que de proposer leurs services à des conditions inéquitables par rapport à celles obtenues par les clients directs de bpost. 264. Dans sa défense, bpost souligne que ce grief correspond essentiellement au grief concernant la prétendue discrimination abusive entre déposants en fonction de leurs activités.En ce qui concerne leur relation avec L2Biz et ses prétendues tentatives de conclure des conventions Committed Revenues, bpost considère que le rapport ne contient aucune preuve pour l'allégation d'un refus de vente. bpost rappelle également que la qualification d'un refus de fourniture comme un abus de position dominante est exceptionnelle vu la liberté pour chaque entreprise de choisir ses partenaires commerciaux et de disposer librement de ses biens. bpost nie avoir refusé de conclure des conventions avec certains clients. 265. Le Conseil s'accorde avec bpost pour dire que ce grief correspond en grande partie aux deux griefs traités ci-dessus.Les difficultés de tous les routeurs, et en particulier L2Biz, pour obtenir des conditions clients directs, font en effet l'objet de l'analyse concurrentielle qui a déjà été effectuée au chapitre VIII. Le Conseil a qualifié le modèle expéditeur comme abusif notamment pour ses effets fidélisants et évictifs. 266. Etant donné que le Conseil est arrivé à la conclusion que l'adoption et la mise en oeuvre du système de tarification 2010, « modèle expéditeur » constitue un abus de position dominante, il n'y a plus lieu de traiter de ce grief de façon distincte parce qu'il s'agit d'une autre façon de qualifier la même pratique commerciale.Le rapport mentionne aussi les relations commerciales entre bpost et Link2Biz comme une illustration de la politique commerciale abusive et pour démontrer l'impact sur les routeurs.

Pour autant que ce grief vise à sanctionner plus spécifiquement les comportements envers L2Biz dans le but de protéger les intérêts de cette entreprise, le Conseil rappelle d'ailleurs qu'il a une mission d'intérêt général. 9.2. Le manque de transparence 267. En dernier lieu, le rapport motivé contient un grief qui reproche à bpost l'accroissement des barrières à l'entrée et à l'expansion résultant d'un manque de transparence.L'auditeur considère que la transparence est essentielle aussi bien pour l'autorité de régulation, pour les acteurs du secteur postal et pour les clients de bpost. 268. Les différents plaignants qui sont à l'origine de cette affaire, avaient invoqué un ensemble de moyens relatifs à l'absence de transparence.Ils avaient invoqué notamment le refus de communiquer ou la communication partielle ou tardive des conditions tarifaires ainsi que des problèmes de qualité et d'exactitude des informations fournies. Les conditions de négociation et de signature concrètes des conventions à signer avec bpost avaient également été invoquées. 269. Dans le cadre de la procédure devant le Conseil, bpost a réfuté en détail ce grief concernant la transparence.D'une part, bpost estime que le droit de la concurrence n'impose pas d'obligation de transparence en tant que tel et, d'autre part, bpost prétend que le Conseil de la concurrence n'est pas compétent pour juger d'un éventuel manque de transparence vu la supervision effectuée par l'IBPT qui est compétente pour y veiller sur base de la législation postale.

Ensuite, bpost insiste avoir respecté toutes les obligations légales en matière de transparence, notamment suite aux procédures menées devant l'IBPT. L'entreprise explique également de façon détaillée quelles sont les améliorations qui ont été apportées au système de tarification avant et après la décision du 20 juillet 2011 de l'IBPT. Pour bpost, il n'y a donc ni d'abus de position dominante, ni de barrière à l'entrée et à l'expansion pour les intermédiaires. 270. A titre subsidiaire, bpost a présenté devant le Conseil non seulement un aperçu des mesures déjà proposées et réalisées afin d'augmenter davantage la transparence de son offre, mais également une proposition formelle d'engagements afin de répondre aux soucis énoncés dans le rapport de l'auditeur.Ces engagements ont été présentés dans les observations écrites de bpost, dans les observations additionnelles de bpost et la chambre a également donné l'occasion à l'auditeur d'y réagir par écrit. 271. Il apparaît de l'analyse contenue au 8.2 ci-dessus que le Conseil a identifié la complexité de l'offre de bpost et le manque de transparence comme étant des caractéristiques du contexte juridique et économique qui contribuent au caractère restrictif du système de tarification examiné sous l'angle de l'article 102 du Traité TFUE ainsi que l'article 3 de la LPCE. 272. Le Conseil prend acte des engagements déjà pris et mis en oeuvre en pratique par bpost et qui n'ont pas été contestés par l'auditeur. Le Conseil constate également que des engagements ont été formalisés dans le cadre de la procédure devant l'IBPT qui a été clôturé par la décision du 20 juillet 2011. 273. Sur base du dossier et des éléments connus à ce jour, le Conseil estime qu'il ne lui appartient pas d'aller au-delà de la supervision de la transparence qu'exerce l'IBPT sur base de la législation postale.Il ne parait ni nécessaire ni opportun dans le cadre de la présente affaire de rentrer dans une analyse qui doit permettre de déterminer si, au-delà du respect de la législation postale, il existe également un abus de position dominante uniquement sur base des soucis inspirés par l'absence de transparence, ou si un tel abus a existé dans le passé.

X. Sanction 274. Dans la présente décision, le Conseil a constaté une infraction au droit de la concurrence qui est imputable à bpost.La durée de l'infraction a été établie à 1 an et sept mois, soit du 1er janvier 2010 à fin juillet 2011.

Dans son rapport, l'auditeur demande au Conseil d'imposer à bpost une amende proportionnelle à la gravité de l'infraction retenue et à sa durée.

Selon l'auditeur, l'instruction n'a pas fait apparaître de circonstances aggravantes qui pourraient être prises en considération pour le calcul de l'amende. Selon lui, le calcul pourrait éventuellement prendre en compte comme circonstances atténuantes le fait que bpost ait décidé en 2011 de modifier quelques aspects de sa politique commerciale en vue de rencontrer certaines préoccupations de ses partenaires commerciaux et des autorités. 10.1. La compétence du Conseil 275. En ce qui concerne le calcul d'une sanction, il convient tout d'abord de constater que les nouvelles Lignes directrices du Conseil en matière du calcul d'amendes s'appliquent dans cette affaire puisqu'une audience a eu lieu le 5 mars 2012 (voir numéro 46 des lignes directrices, Moniteur belge du 18 janvier 2012, Ed.2, pp. 3217-3223). 276. Devant le Conseil, bpost a réfuté intégralement les motifs invoqués par l'auditeur pour imposer une amende en l'espèce.Tout d'abord, bpost considère que le Conseil n'est pas compétent pour imposer une amende. Ce moyen est basé sur, d'une part, le principe non bis in idem, et, d'autre part, l'exigence générale d'équité.

Le principe non bis in idem s'opposerait à l'imposition d'une amende par le Conseil parce que le Conseil de l'IBPT, dans sa décision du 20 juillet 2011, a déjà imposé une amende à bpost de 2.300.000 euros. bpost considère que les conditions d'application du principe sont remplies et invoque l'identité des faits, l'unité de contrevenant ainsi que l'unité de bien juridique. 277. Dans la présente décision, le Conseil s'est prononcé sur le système de tarification 2010, appelé le modèle expéditeur, de bpost. Le Conseil ne s'est pas prononcé sur le grief relatif à la transparence. 278. Il semblerait effectivement que la décision de l'IBPT du 20 juillet 2011 concerne en grande partie le même système de tarification.Même si les deux autorités se sont prononcées sur base d'un autre dossier et que l'on ne peut donc pas exclure que certains faits soient différents, il pourrait être justifié de considérer qu'il y a identité des faits, en tout cas dans une certaine mesure.

Cependant, le Conseil considère que les autres conditions d'application du principe non bis in idem qui sont invoquées par bpost même, ne sont pas remplies pour autant. 279. Il apparaît clairement de la présente décision, que le Conseil de concurrence applique uniquement les règles de concurrence, plus particulièrement l'article 3 de la LPCE, et l'article 102 TFUE.Il s'agit de règles qui permettent à l'autorité de concurrence de veiller sur la libre concurrence dans le cadre d'un contrôle ex post. L'IBPT, à son tour, supervise les marchés et applique la régulation spécifique en vigueur pour le secteur postal. 280. Les règles sectorielles qui mettent en oeuvre la libéralisation des secteurs où existaient anciennement des monopoles d'état, visent à établir des conditions de libre concurrence mais visent également, notamment, à promouvoir certaines technologies et à prévoir un maximum de choix et de qualité pour les consommateurs.Leur rôle est plutôt de stimuler et d'activer la concurrence. Les règles de concurrence à leur tour, visent à assurer qu'en pratique, les entreprises dans tous les secteurs économiques, respectent en permanence leurs obligations dans le fonctionnement quotidien des marchés et s'abstiennent de pratiques restrictives. Ces règles ne s'appliquent d'ailleurs que dans la mesure où les entreprises sont libres de déterminer leur comportement commercial sur le marché. 281. Comme indiqué ci-haut, l'application de la régulation sectorielle n'exclut pas l'application des règles de concurrence (CJUE 14 octobre 2010, affaire C-280/08, Deutsche Telekom, aux numéros 126 à 128, Décision de la Commission du 22 juin 2011, COMP/39525, Telekomunikacja Polska, numéros 119- 142).Un opérateur actif sur un marché qui fait l'objet de régulation peut s'attendre à ce que son comportement soit évalué aussi bien d'une perspective de régulation que de la perspective du droit de la concurrence. 282. Ce qui importe dans la présente affaire est de constater que l'IBPT, d'une part, et le Conseil, d'autre part, se sont strictement tenus à l'application de règles différentes.Dans la présente décision, le système de tarification 2010 de bpost a été analysé au regard de l'article 102 du traite TFUE et de l'article 3 de la LPCE. Le fait que l'auditeur ou le Conseil se réfèrent à certaines dispositions de la législation sectorielle ne veut évidemment pas dire que ces règles sont appliquées. Dans la mesure où des principes communs se retrouvent dans les différentes législations, rien ne s'oppose à ce que l'on se réfère à différentes sources. 283. Il a déjà été dit ci-dessus que rien ne s'oppose à ce que le Conseil établisse une infraction dans le chef de bpost après la décision du 20 juillet 2011 de l'IBPT.Sur cette base, rien ne s'oppose à ce que le Conseil sanctionne le comportement de bpost. Pour autant que l'on puisse considérer que l'application du principe de non bis in idem requière l'unité du bien juridique protégé, le Conseil considère que cette condition n'est en tout cas pas remplie. 284. En ce qui concerne la possibilité pour le Conseil d'imposer une amende, bpost se réfère en outre, à l'absence de prévisibilité de la méthode de calcul et du montant de l'amende éventuel.Ce moyen est basé sur l'article 7 de la Convention européenne et sur l'absence de lignes directrices de la part du Conseil avant la publication des Lignes directrices de décembre 2011. 285. Il faut rappeler que le Conseil a eu l'occasion à plusieurs reprises de souligner qu'il considérait qu'à l'entrée en vigueur de la LPCE en octobre 2006, les anciennes lignes directrices n'étaient plus d'application.Cependant, dans la mesure où ces anciennes lignes directrices traduisaient des règles générales applicables en matières d'imposition d'amende, le Conseil a annoncé son intention de les appliquer (voir notamment § 50 de la Communication clémence, M.B. 22 octobre 2007, p. 54708 et toutes les décisions imposant des amendes depuis lors). Le fait de considérer que la gravité et la durée sont les facteurs les plus importants pour le calcul d'une amende, fait partie de ces principes généraux que le Conseil a continué à appliquer. 286. Le projet de Lignes directrices du Conseil a été publié en octobre 2011 et les lignes directrices ont été adoptées en décembre 2011 et publiées en janvier 2012 (en cours de la présente procédure).287. La LPCE donne une compétence explicite au Conseil de la concurrence pour imposer des amendes aux entreprises (article 63 LPCE).Le Conseil a un pouvoir d'appréciation dans le cadre des sanctions. La loi prévoit uniquement un maximum de 10 % du chiffre d'affaires de l'entreprise concernée (article 63 LPCE) mais ne prévoit pas de méthodologie de calcul, ni d'autres outils pour calculer le niveau de l'amende. Le choix du législateur et le pouvoir d'appréciation du Conseil sont tout à fait en ligne avec la pratique au niveau européen ainsi que dans d'autres états membres. Les articles 63 et 86 de la LPCE offrent une base légale suffisante pour imposer une amende. L'absence de lignes directrices ne porte pas atteinte à la possibilité d'imposer de telles amendes.

Le Conseil se réfère aussi au numéro 6 des Lignes directrices qui rappelle que le calcul d'une amende ne doit pas être prévisible dans le sens où une entreprise pourrait calculer le montant précis. Les étapes dans le calcul et la méthodologie doivent être prévisibles.

Ci-après le Conseil appliquera une méthodologie qui reste tout à fait en ligne avec la pratique décisionnelle du Conseil depuis 2006. 10.2. Le montant de base 288. Les Lignes directrices du Conseil confirment le principe que le calcul de l'amende prend comme point de départ une proportion de la valeur des ventes sur le marché, qui est en lien direct ou indirect avec l'infraction (voir au numéro 21 des Lignes directrices).Dans ce cas, il n'y a pas de raisons spécifiques qui s'opposent à cette approche. 289. L'infraction de bpost concerne les tarifs conventionnels, et plus en particulier la tarification annoncée pour 2010 par bpost et ses conséquences pour les intermédiaires.Le marché belge des services postaux relatifs au courrier industriel Direct Mail et Admin Mail a été identifié ci-dessus comme marché concerné. Puis, certains segments de marché ont été identifiés qui correspondent aux différents niveaux dans la chaîne de distribution, comme le marché sur lequel les routeurs sont actifs. 290. Dans ces observations écrites bpost explique que le Conseil devrait se limiter au chiffre d'affaires généré par les intermédiaires qui avaient une convention avec bpost pour le Direct Mail en 2010, il s'agissait d'un montant de [...] euros. Après l'audience, bpost a fourni des chiffres au Conseil où il était question de [...] euros comme chiffre généré par les intermédiaires en 2010 (réponse de bpost du 12 mars 2012). 291. Le Conseil estime effectivement qu'il convient de se limiter au chiffre d'affaires sur le marché du Direct Mail, en excluant l'Admin Mail.Ce choix est inspiré par le constat que l'infraction retenue dans cette décision affectait principalement le Direct Mail, étant la catégorie de courrier dont les intermédiaires s'occupaient principalement dans la période infractionnelle. Les rabais octroyés pour le Direct Mail sont aussi beaucoup plus importants et le Conseil a considéré que l'ampleur des rabais était un élément pertinent pour établir l'infraction. 292. Cependant, contrairement à ce que propose bpost, il n'y a pas de raisons pour se limiter au chiffre généré par les intermédiaires mêmes, mais il y a bien lieu de prendre comme base le chiffre d'affaires de bpost qui est l'auteur de l'abus de position dominante. Ce chiffre inclut le chiffre généré par les intermédiaires mais également, notamment, le chiffre généré par les contrats Clients directs, qui précisément étaient conclus sur base des meilleures conditions tarifaires auxquelles les intermédiaires n'avaient pas droit, ce qui a contribué au caractère abusif de la tarification 2010. 293. Le Conseil prend donc comme point de départ le chiffre d'affaires pour 2010 sur le marché du Direct Mail comme il a été communiqué au Conseil le 12 mars 2012 par bpost et qui n'a pas été contesté par l'auditeur (voir son courrier du 13 mars 2012). Le chiffre de [...] euros constitue la base de calcul au sens du numéro 21 des Lignes directrices. 294. Pour arriver au montant de base, le Conseil doit d'abord appliquer un pourcentage à la base de calcul qui traduit la gravité des infractions retenues.295. bpost conteste que sa politique tarifaire ait conduit à l'affaiblissement d'une concurrence effective et prétend que les intérêts des utilisateurs n'ont pas été atteints.bpost souligne également avoir adapté certains aspects de sa politique tarifaire suite aux réactions reçues lors de la consultation publique de l'IBPT. Finalement, bpost se réfère au cas français et estime que le fait que le modèle par expéditeur ait été validé en France rend l'infraction moins grave. 296. Le numéro 25 des Lignes Directrices prévoit que tout abus de position dominante est considéré comme une infraction grave.Le pourcentage appliqué pour une infraction grave peut aller de 15 % jusqu'à 30 % (numéro 27 des Lignes directrices). 297. Contrairement à ce que prétend bpost, le Conseil a bien établi que le modèle expéditeur pouvait porter atteinte à la concurrence.Les activités des intermédiaires étaient un des seuls facteurs de pression concurrentielle sur bpost. De plus, l'impact potentiel ou réel considérable sur leurs activités a été démontré.

Il n'est pas nécessaire de démontrer une atteinte à court terme des intérêts des utilisateurs ou des consommateurs. Une atteinte au jeu normal de la concurrence peut être à la base de l'infraction (voir encore récemment CJUE 27 mars 2012, affaire C-209/10, Post Danmark, au numéro 20). L'existence d'une concurrence efficace est considérée comme étant un levier important pour réaliser des conditions de marché favorables aux consommateurs. Dans ce cas, le Conseil a expliqué que l'existence du marché du routage est un facteur qui peut pousser bpost à plus d'efficacité et qui peut également être à la base du développement futur de la concurrence sur le marché concerné. 298. La nature de l'infraction et le contexte économique justifient donc de qualifier l'abus comme étant une infraction grave.299. Pour le Conseil, il faut aussi tenir compte de l'ordonnance du 28 octobre 2004 du président du tribunal de commerce de Bruxelles qui figure dans le dossier d'instruction et qui a été citée par l'auditeur dans son rapport.Dans cette ordonnance le Président a constaté que La Poste (actuellement bpost) avait enfreint l'article 82 du traité CE (actuellement l'article 102 TFUE) en imposant des tarifs discriminatoires à l'égard des routeurs Two4Mail et Two4Two. Le Président a notamment établi que « Si les clients historiques ne sont pas des concurrents des routeurs, le maintien des routeurs à un tarif plus élevé que les clients historiques les exclut du marché de la prestation des services en amont pour ces clients directs. Ces clients directs n'ont en effet aucun intérêt à sous-traiter ou à externaliser ces services, tant que La Poste leur accorde des tarifs plus avantageux qu'aux routeurs. Le refus d'octroyer des rabais de la même façon à tous les opérateurs nuit par ailleurs aux consommateurs de petite taille faisant appel aux routeurs. » (chapitre 2.3.3.3 de l'ordonnance). [...] Ce jugement constitue un précédent en Belgique que bpost ne pouvait pas négliger. Il confirme le caractère grave de l'infraction. 300. Dans cette affaire le Conseil retient donc un pourcentage de 15 % pour la gravité. Le facteur de gravité est alors de [...] euros (15 % de la base de calcul de [...] euros). 301. Le pourcentage de 15 % peut être considéré comme relativement modéré vu la taille de l'entreprise en question, sa part de marché et le fait qu'elle était, dans la période infractionnelle, partenaire commercial incontournable pour les intermédiaires vu son monopole de fait pour la distribution.Cependant, pour le choix de ce pourcentage le Conseil tient aussi compte du fait que bpost a mis fin au système avec effet rétroactif, et du fait qu'elle avait déjà porté certaines modifications au système en 2010 et 2011. 302. Il faut examiner ensuite de quelle façon le facteur de la durée peut également rentrer en compte.Sur la base du numéro 30 des Lignes directrices, le Conseil ajoute au facteur gravité un pourcentage qui représente la durée. Ce facteur peut aller de 10 à 30 % par année.

Chaque trimestre entamé au-delà d'un an est considéré comme un trimestre. Dans le cas d'espèce, il faut arrondir un an et sept mois à un an et neuf mois. 303. Le Conseil retient un pourcentage de 10 % par année.Il s'agit du pourcentage minimum que les Lignes directrices prévoient. 304. Le calcul pour le facteur durée se présente alors comme suit : ([...] x 10 %) x 1,75 = [...] euros. 305. Le montant de base de l'amende se compose comme suit : le facteur gravité [...] euros + le facteur durée [...] euros = [...] euros. 10.3. Autres considérations concernant le calcul de l'amende 306. L'existence de circonstances aggravantes ou atténuantes propres à l'entreprise concernée peut nécessiter une adaptation du montant de l'amende vers le haut ou vers le bas.307. En ce qui concerne les circonstances aggravantes, l'auditeur a conclu sur base de son instruction qu'il n'y a pas lieu d'en retenir. Le Conseil s'aligne à cette position. 308. En ce qui concerne les circonstances atténuantes, le fait que les autorités françaises aient validé un système qui, du moins en apparence, était semblable au système de bpost, peut être un facteur à prendre en considération par le Conseil comme circonstance atténuante, mais de façon modeste puisque le modèle expéditeur appliqué en Belgique montrait des différences importantes et son l'impact était beaucoup plus conséquent.bpost a également donné les exemples d'autres pays membres de l'Union européenne où des systèmes de tarification basés sur un modèle expéditeur seraient en place et jusqu' à présent, sans avoir été mis en question par les autorités de concurrence.

Une certaine difficulté pour l'entreprise à prévoir la position des autorités de concurrence est retenue par le Conseil pour le calcul de l'amende comme une circonstance atténuante.

Cette circonstance peut équivaloir à une réduction de [...] % du montant de base. Un montant de [...] euros sera déduit du montant de base pour arriver à un montant de 39.699.786, 22 euros. 309. Outre les circonstances spécifiques et individuelles, le Conseil doit avoir égard aux principes généraux d'équité et de proportionnalité.En ce qui concerne l'équité, bpost a fait référence à l'amende déjà imposée par l'IBPT dans sa décision du 20 juillet 2011. 310. Dans la mesure où les deux autorités sanctionnent sur des bases différentes, l'amende déjà imposée par l'IBPT concerne une autre infraction, l'application du principe de ne bis in idem a été écarté. Même si aucun principe de droit ne lui impose de le faire, il paraît tout de même opportun au Conseil de tenir compte de l'amende imposée par l'IBPT vu que sa décision du 20 juillet 2011 concerne également le modèle expéditeur. Il est d'autant plus adéquat de le faire que suite à la procédure devant l'IBPT, et puis suite à la décision, bpost a modifié, a proposé des compensations aux intermédiaires et puis a abrogé le modèle expéditeur pour 2012.

Pour cette raison, il sera déduit du montant de l'amende auquel le Conseil était arrivé après la réduction pour circonstance atténuante, l'amende imposée par l'IBPT dans sa décision du 20 juillet 2011, soit 2.300.000 euros (voir par analogie la Décision de la Commission du 22 juin 2011, Telekomunikacja Polska). 39.699.786, 22 euros - 2.300.000 euros = 37.399.786, 22 euros. 311. Le montant de base qui a été choisi ci-dessus et le facteur de gravité relativement modéré, font que le montant de l'amende ne peut pas créer d'autres soucis au niveau de l'équité. 312. En ce qui concerne la proportionnalité, dans le cadre de l'abus de position dominante l'exercice constitue notamment en la comparaison de l'amende au chiffre d'affaires concerné ainsi qu'au chiffre d'affaires total pour 2010 de bpost (2, 317 milliards, source : www.bpost.be, rapport annuel de bpost). Cet exercice montre que l'amende imposée à bpost est adaptée aussi bien à la gravité de l'infraction qu'aux circonstances spécifiques de l'affaire, tout en assurant un effet dissuasif suffisant, et reste en dessous du maximum légal. 313. L'amende imposée à bpost est de 37.399.786, 22 euros. 314. bpost a encore demandé d'être associée à la procédure qui vise à respecter l'obligation qui découle pour le Conseil de l'article 11 § 4 du Regl.1/2003. Selon cette disposition, l'autorité de concurrence doit informer la Commission au plus tard trente jours avant l'adoption d'une décision d'infraction. Il est prévu qu'à cet effet, les autorités communiquent à la Commission un résumé de l'affaire, la décision envisagée ou, en l'absence de celle-ci, tout autre document exposant l'orientation envisagée. 315. En tant qu'autorité de concurrence, désignée comme telle par la Belgique, l'autorité belge de la concurrence, en particulier sa composante décisionnelle, le Conseil, respecte cette obligation qui trouve sa base légale directement dans le Règlement 1/2003.316. Il n'y a aucune disposition qui prévoit que les parties à la procédure devant l'autorité soient impliquées dans ce processus.Cela vaut donc également pour l'Auditorat. Il s'agit d'un mécanisme spécifique de coopération entre autorités de concurrence qui a été mis en place au niveau européen. 317. Il découle clairement de l'article 11 précité que la Commission doit être informé, il ne s'agit donc pas d'une procédure de consultation, et a fortiori, la Commission n'a pas de droit de veto ni même l'obligation de donner des commentaires.318. Un éventuel avis donné par la Commission, pour autant que la procédure d'information y donne lieu, n'est en tout cas pas contraignant.319. Reste à examiner si, en l'absence de dispositions légales à cet effet, l'obligation d'impliquer bpost dans ce processus, suit des droits de la défense.Etant une juridiction, le Conseil doit être particulièrement attentif au respect de ces droits. 320. A supposer même que la Commission émette des commentaires, la chambre considère que le Conseil doit alors appliquer par analogie les mêmes règles que pour les informations venant des tiers, c'est-à-dire qu'elle ne pourra en aucun cas fonder sa décision sur des éléments qui n'ont pas été portés à la connaissance de la partie incriminée.Dans l'hypothèse donc d'éléments qui seraient de nature à avoir une influence sur la décision de la chambre et après délibération, il pourrait être nécessaire de rouvrir les débats afin de permettre aussi bien à la partie incriminée qu'à l'auditeur de prendre connaissance d'éventuels nouveaux éléments. 321. Dans le cas d'espèce, le Conseil a soumis sa décision envisagée à la Commission le 12 octobre 2012, soit au plus tard 30 jours avant la présente décision comme prévu par l'article 11 (4) du Règlement 1/2003.La chambre n'a pu constater aucun élément qui nécessiterait la réouverture des débats.

Par ces motifs, Le Conseil de la concurrence, - Constate que la société anonyme de droit public bpost a enfreint l'article 3 de la loi sur la protection de la concurrence économique et l'article 102 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne en adoptant et en mettant en oeuvre un système de tarification, appelé le modèle expéditeur, de janvier 2010 à juillet 2011. - Impose à bpost une amende de 37.399.786 euros.

Ainsi décidé le 10 décembre 2012 par la Onzième chambre du Conseil de la concurrence composée de Mme Laura Parret, président de chambre, M. Olivier Gutt et Mme Elisabeth de Ghellinck-van Hecke, conseillers.

Conformément à l'article 67 de la loi sur la protection de la concurrence économique, coordonnée le 15 septembre 2006, la notification de la présente décision sera effectuée à bpost SA de droit public, Publimail SA, Link2Biz International SA, G3 Worldwide Belgium SA et au Ministre qui a l'économie parmi ses attributions.

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