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Décision Du Conseil De La Concurrence
publié le 04 décembre 2003

Conseil de la concurrence. - Décision n° 2002-C/C-61 du 30 août 2002 Affaire CONC-C/C-02/25 : Electrabel Customer Solutions S.A./Interlux S.C.R.L. En cause : Electrabel Customer Solutions S.A. , ayant son siège so(...) et Intercommunale pour la distribution d'énergie pour la province du Luxembourg ayant pris la (...)

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SERVICE PUBLIC FEDERAL ECONOMIE, P.M.E., CLASSES MOYENNES ET ENERGIE


Conseil de la concurrence. - Décision n° 2002-C/C-61 du 30 août 2002 Affaire CONC-C/C-02/25 : Electrabel Customer Solutions S.A./Interlux S.C.R.L. En cause : Electrabel Customer Solutions S.A. (ci-après "ECS"), ayant son siège social 8, boulevard du Régent à 1000 Bruxelles et Intercommunale pour la distribution d'énergie pour la province du Luxembourg ayant pris la forme d'une S.C.R.L. (ci-après "Interlux"), ayant son siège social à l'hôtel de ville d'Arlon, 8 rue Paul Reuter à 6700 Arlon;

Vu la loi du 5 août 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/08/1991 pub. 10/08/2010 numac 2010000448 source service public federal interieur Loi relative à l'importation, à l'exportation, au transit et à la lutte contre le trafic d'armes, de munitions et de matériel devant servir spécialement à un usage militaire ou de maintien de l'ordre et de la technologie y afférente. - Coordination officieuse en langue allemande fermer sur la protection de la concurrence économique coordonnée le 1er juillet 1999 (ci-après LPCE);

Vu la notification datée du 25 avril 2002 d'une concentration qui consiste en la prise de contrôle exclusif par ECS, filiale d'Electrabel, de l'activité d'Interlux de fourniture d'électricité aux clients de celle-ci au fur et à mesure qu'ils deviennent éligibles;

Vu la décision n°2002-C/C - 50 du 28 juin 2002 par laquelle le Conseil de la concurrence a décidé d'engager la procédure prévue à l'article 34 de la loi et de renvoyer l'affaire au rapporteur pour un complément d'instruction;

Vu les pièces des dossiers (1e phase et 2e phase) du Service de la concurrence;

Vu les rapports motivés du Corps des rapporteurs datés du 11 juin et 31 juillet 2002;

Vu les décisions sur la confidentialité des pièces de ces dossiers du 13 juin et du 6 août 2002;

Vu les ordonnances autorisant l'audition des personnes justifiant d'un intérêt suffisant conformément à l'article 32 quater , § 2, LPCE;

Vu les observations des parties notifiantes du 24 juin 2002 et leurs observations sur les rapports complémentaires du 23 août 2002;

Vu les autres pièces transmises et jointes au dossier de la procédure;

Entendu à l'audience du 27 août 2002, la Commission Wallonne pour l'Energie ( en abrégé la Cwape) représentée par son président, Monsieur Francis Ghigny, la S.A. Luminus représentée par Maître Marc Van der Woude, avocat au barreau de Bruxelles, la N.V. Nuon Energy Trade & Wholesale représentée par Maître Dirk Arts, avocat au barreau de Bruxelles et la Federation of Belgian Large Industrial Energy Consumers ASBL (en abrégé Febeliec) représentée par son président Monsieur Peter Claes et Monsieur Franck Vandermarliere;

Entendu à l'audience du 28 août 2002 le Corps des rapporteurs représenté par Monsieur Patrick Marchand, rapporteur et les parties notifiantes représentées par Monsieur de Garcia, Monsieur Etienne Snyers et Monsieur Patrick Baeten et assistées par Maître Alexandre Vandencasteele, Maître Dirk Brinckman et Maître Annick Vronincks, avocats à Bruxelles;

Vu la demande de prolongation des délais adressée par courrier du 29 août 2002 par les parties notifiantes au Conseil de la concurrence;

Après délibéré, le Conseil de la concurrence prononce la décision suivante. 1. les parties notifiantes 1.1. Acquéreur La société Electrabel Customer Solutions (ci-après "ECS") est une société anonyme de droit belge constituée par acte du 12 décembre 2001 publié dans les annexes du Moniteur belge du 28 décembre 2001, ayant son siège social à 1000 Bruxelles, boulevard du Régent, 8 et ayant pour objet la fourniture d'électricité et de gaz ainsi que la fourniture de produits et services y afférents.

La S.A. E.C.S. est une filiale de la S.A. Electrabel et de la Naanloze Venootschap voor de Oprichting en Uitbating van een FM- en TV-distributienet te Oostende en abrégé Teveo qui détiennent respectivement 49.999 actions et 1 action de celle-ci.. La S.A. Teveo est pour sa part contrôlée par Electrabel qui détient 99,975 %de ses actions, l'actionnaire minoritaire étant M. Yvan Dupon, par ailleurs administrateur de la S.A. Electrabel. La société E.C.S. est ainsi en fait une filiale à 100%de la S.A. Electrabel.

La société anonyme de droit belge Electrabel ayant son siège social à 1000 Bruxelles, boulevard du Régent, 8 est une entreprise active à tous les stades dans le secteur de l'électricité, de la production à la fourniture au client final. 1.2. Vendeur L'Intercommunale pour la distribution d'énergie pour la province du Luxembourg (ci-après "Interlux") est une association intercommunale ayant pris la forme d'une société coopérative à responsabilité limitée, constituée pour assurer la distribution d'énergie dans la province de Luxembourg. Elle a comme activité principale la distribution d'électricité et de gaz aux clients situés sur le territoire des communes affiliées. Son siège social est établi à l'hôtel de ville d'Arlon, rue Paul Reuter, 8.

Interlux est une intercommunale mixte. Elle est constituée sur base d'un partenariat avec une société privée, en l'occurrence la S.A. Electrabel, actuellement actionnaire majoritaire (à concurrence de 69%). Les communes qui y sont associées détiennent 31 %du capital.

Des dispositions réglementaires notamment les dispositions du décret du 5 décembre 1996 relatif aux intercommunales wallonnes, prévoient toutefois que les communes doivent toujours disposer de la majorité des voix ainsi que de la présidence dans les organes de gestion et de contrôle, et ce quelque soit la proportion des apports des diverses parties à la constitution du capital. 1.3. Entreprise ou partie d'entreprise cible L'opération vise la clientèle d'Interlux devenant éligible sur le marché de la fourniture d'électricité. 2. Description de l'opération 2.1. Préambule La concentration notifiée s'inscrit dans le cadre de la libéralisation du marché de l'électricité décidée au niveau européen par la directive 96/92 du 19 décembre 1996 (Directive 96/92/CE du Parlement et du Conseil du 19 décembre 1996 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l'électricité publiée au JO L27 du 30 janvier 1997) qui impose une ouverture limitée et progressive du marché de l'électricité.Les modalités de cette libéralisation sont (ou seront) prévues dans une réglementation nationale et régionale.

De manière très schématique, l'Etat fédéral est compétent pour ce qui a trait à la production, au transport et aux tarifs; la distribution et la fourniture relèvent de la compétence des Régions.

Le cadre normatif en cette matière comprend notamment : - la loi du 29 avril 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 29/04/1999 pub. 11/05/1999 numac 1999011160 source ministere des affaires economiques Loi relative à l'organisation du marché de l'électricité type loi prom. 29/04/1999 pub. 11/05/1999 numac 1999011161 source ministere des affaires economiques Loi relative à l'organisation du marché du gaz et au statut fiscal des producteurs d'électricité fermer relative à l'organisation du marché de l'électricité (ci-après "loi électricité") publiée au Moniteur belge du 11 mai 1999 et modifiée successivement par une loi du 12 août 2000, du 16 juillet 2001 et du 30 décembre 2001; - le décret de la Région flamande du 17 juillet 2000 relatif à l'organisation du marché de l'électricité (ci-après "décret flamand") publié au Moniteur Belge du 22 septembre 2000; - le décret de la Région wallonne du 12 avril 2001 relatif à l'organisation du marché régional de l'électricité (ci- après "décret wallon") publiée au M.B. du 01 mai 2001 et l'arrêté du Gouvernement wallon du 21 mars 2002 relatif aux clients devenus éligibles et au contrôle de leur éligibilité publié au M.B. du 27 avril 2002; - l' ordonnance du 19 juillet 2001Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 19/07/2001 pub. 17/11/2001 numac 2001031386 source ministere de la region de bruxelles-capitale Ordonnance relative à l'organisation du marché de l'électricité en Région de Bruxelles-Capitale fermer relative à l'organisation du marché de l'électricité en Région de Bruxelles- Capitale (ci après "l'ordonnance") publiée au M.B. 17 novembre 2001; - l'A.R. du 11 juillet 2002 relatif à la structure tarifaire générale et aux principes de base et procédures en matière de tarifs de raccordement aux réseaux de distribution et d'utilisation de ceux-ci, de services auxiliaires fournis par les gestionnaires de ces réseaux et en matière de comptabilité des gestionnaires des réseaux de distribution d'électricité publié au M.B. 27 juillet 2002 et entrant en vigueur le 1er janvier 2003;

Les seuils d'éligibilité ainsi que des dates limites d'ouverture du marché varient ainsi en fonction de la région et de la réglementation applicable.

A l'issue de cette libéralisation du marché de l'électricité en Belgique, la distribution de l'électricité devrait être scindée en deux activités devant être confiées à des sociétés distinctes : - la gestion du réseau, qui vise l'exploitation, la maintenance et le développement du réseau de distribution. - la vente d'électricité qui concerne l'approvisionnement en énergie des clients éligibles.

Dès 1996, des communes en partenariat avec Electrabel avaient décidé de poursuivre, au sein d'intercommunales mixtes, des activités de gestion du réseau de distribution et de vente à la clientèle sous monopole communal et aboutit à l'élaboration de statuts dits « de troisième génération » qui reçurent à l'époque l'aval des autorités européennes en ce qui concernait leurs aspects intracommunautaires.

Diverses intercommunales mixtes dont Interlux assurent ainsi encore actuellement la gestion du réseau de distribution ainsi que la fourniture d'électricité.

L'article 8, § 1er, du décret wallon relatif à l'organisation du marché régional de l'électricité, prévoit expressément que le gestionnaire du réseau de distribution ne peut réaliser des activités de production autres que de l'électricité verte ou de vente d'électricité autres que les ventes nécessitées par son activité de gestionnaire de réseau. Le gestionnaire du réseau de distribution ne peut s'engager dans des activités de fourniture aux clients éligibles ni dans la fourniture d'autres services sur le marché de l'électricité qui ne sont pas directement liés à l'exécution des tâches visées à l'article 11 (càd la gestion du réseau). Toutefois, à la demande des communes, le gestionnaire du réseau de distribution peut fournir l'électricité aux clients captifs....

Il s'ensuit que les intercommunales mixtes wallonnes, telle que Interlux, qui souhaitent être désignées comme gestionnaire de réseau, ne pourront plus à terme, fournir en même temps de l'électricité aux clients (devenus) éligibles.

Compte tenu des implications et des conséquences de ce processus de libéralisation en cours, la S.A. Electrabel et Intermixt Wallonie (établissement d'utilité publique regroupant tous les mandataires publics des intercommunales mixtes) ont négocié les termes d'un nouvel accord susceptible de maintenir leur partenariat dans un cadre équilibré.

Le principe retenu a été que dans le marché de la distribution, les communes et les intercommunales choisiraient la gestion des réseaux, activités de type monopolistique et régulée, tandis qu'Electrabel par le biais d'une filiale, se concentrerait sur l'activité de fourniture aux clients.

Afin de valoriser la clientèle que ces intercommunales alimentent actuellement en électricité et qu'elles ne pourront plus alimenter dès leur éligibilité, les communes ont convenu avec leur partenaire au sein des intercommunales mixtes, Electrabel, que la société ECS, constituée en décembre 2001 et dont les actions sont entièrement détenues directement ou indirectement par Electrabel, reprendrait cette clientèle. En contrepartie de cette prise de contrôle par ECS et de cette cession de clientèle par Interlux, les communes se verraient offrir la possibilité d'augmenter leur actionnariat dans l'intercommunale. Ces communes deviendraient en outre actionnaires minoritaires (maximum 5 %du capital) dans cette société ECS et participeraient aux bénéfices à concurrence de 40 %du résultat réalisé.

Ces négociations ont débouché sur l'élaboration de diverses conventions et d'un « Mémorandum of Understanding » signé le 30 mars 2001.

Cette concentration est la première d'une série d'autres opérations visant la reprise par ECS de la clientèle éligible de toutes les intercommunales mixtes en Belgique.

Depuis la notification de la présente opération, d'autres concentrations impliquant d'autres intercommunales ont été notifiées au Conseil de la concurrence.

Confirmant les informations fournies par les parties, la Commission européenne a signalé qu'une concentration avait déjà fait l'objet d'une pré-notification et que d'autres notifications devraient également suivre au niveau européen. 2.2. Opération visée par la notification L'opération qui fait l'objet de la présente notification consiste en la reprise par ECS (constituée le 12 décembre 2001 et filiale en fait à 100%d'Electrabel), de la clientèle d'Interlux portant sur la fourniture d'électricité aux clients de celle-ci au fur et à mesure qu'ils deviennent éligibles et dans la mesure où ils ne décident pas de conclure un contrat avec un autre fournisseur.

Les parties notifiantes ont déclarées que la reprise par ECS de cette clientèle éligible d'Interlux visée par cette notification n'a pas fait l'objet d'un document spécifique mais doit se déduire d'un ensemble de documents parmi lesquels le document intitulé « Mémorandum of understanding entre Intermix - Electrabel » signé le 30 mars 2001 et les modifications apportées aux statuts d'Interlux adoptées le 25 mars 2002. 3. Délais La décision du Conseil de la concurrence prise au terme de la première phase et par laquelle le Conseil de la concurrence a décidé d'engager la procédure prévue à l'article 34 de la loi et de renvoyer l'affaire au rapporteur pour un complément d'instruction a été le 28 juin 2002. Le délai visé à l'article 34, §1er, de la loi prend par conséquent cours à cette date et la décision du Conseil de la concurrence prise en application de l'article 34, §§ 1 et 2, de la loi doit être rendue pour le 30 août 2002 au plus tard. 4. Le marché 4.1. Marché de produits concerné Pour rappel, cinq types d'activités différentes peuvent être distingués dans le secteur de l'électricité, en l'espèce : - la production d'électricité, - le transport qui consiste en l'acheminement de l'électricité sur des câbles de haute tension, - la distribution qui est l'acheminement de l'électricité sur des câbles de moyenne et basse tension, - la fourniture qui consiste en la livraison au consommateur final; - le négoce qui vise l'achat et la revente d'électricité.

Les quatre premières activités peuvent être considérées comme relevant de marchés de produits distincts, puisque celles-ci nécessitent des actifs et des ressources différents et parce que les conditions de marché et de concurrence sont différentes pour chacune d'entre elles.

La question de savoir si le négoce d'électricité constitue un marché distinct du négoce général des produits d'énergie ne doit pas être tranchée dans le cadre de la présente procédure en raison du fait que cette activité n'est pas visée dans la présente notification.

L'instruction menée en première phase aboutissait à la conclusion qu'Electrabel occupe une position dominante sur les marchés belges de l'électricité en raison des parts de marché extrêmement élevées détenus quel que soit le marché envisagé. L'instruction en seconde phase a confirmé l'existence de cette position dominante. Cette position dominante sur les quatre marchés susmentionnés, n'est au demeurant pas contestée, en ce compris par les parties notifiantes. 4.2. La position du corps des rapporteurs.

Le corps des rapporteurs estime que l'opération renforce une position dominante et a pour conséquence d'entraver de manière significative la concurrence sur le marché belge de la fourniture d'électricité aux clients éligibles.

Le rapporteur propose, à titre principal, de dire la concentration en cause non admissible et par conséquent d'interdire la mise en oeuvre de l'ensemble des différents conventions et documents dont l'application aboutirait à la cession à titre exclusif à ECS de l'activité d'Interlux de fourniture d'électricité aux clients éligibles.

Subsidiairement, le rapporteur note que le cas échéant, le Conseil pourrait imposer certaines conditions et charges de manière à faciliter la pénétration de concurrents sur le marché en cause, ce qui permettrait de retenir l'admissibilité de l'opération. 4.3. Position des parties intervenantes : Les concurrents entendus aux audiences et/ou ayant fait part de leur position dans le cours de l'instruction du rapporteur développent la même position.

Ils concluent à l'interdiction de la concentration ou à tout le moins à l'imposition de conditions relatives à tous les niveaux du marché de l'électricité, suffisamment rigoureuses et cohérentes. 4.4. Position de Febeliec : Les représentants de Febeliec approuvent la plupart des conditions retenues par le corps des rapporteurs mais craint que l'application trop radicale de certaines d'entre elles n'aient des effets défavorables pour le client. 4.5. Position de la CWaPE : La CWaPE considère que l'opération en cause respecte le texte du décret du 12 avril 2001 et de ses arrêtés d'application.

Elle relève cependant que la stricte observance des lois et décrets pourrait à elle seule ne pas garantir les conditions d'une saine concurrence, car les textes réglementaires, dans l'état actuel, laissent la porte ouverte à de possibles, voire probables, discriminations, rendant le rôle des régulateurs particulièrement important.

La CWaPE termine en donnant quelques pistes de réflexion concernant des conditions qui devraient accompagner une décision d'admissibilité. 4.6. Position de la CREG : La CREG a été entendue par le Conseil de la concurrence dans le cadre de la première phase et a déposé divers documents dans lesquels elle relève une série d'obstacles à une véritable concurrence sur le marché belge.

Elle a exposé que les parties notifiantes bénéficiaient du fait qu'aucune disposition ne détermine de procédure à suivre par les intercommunales dans le choix du fournisseur par défaut, ce qui leur permet de décider sans nécessairement faire jouer la concurrence. 4.7. Position des parties notifiantes : Les parties estiment que l'opération répond complètement à l'obligation légale imposée au gestionnaire du réseau d'abandonner toute activité de fourniture d'électricité et qu'elle est, à l'heure actuelle, la seule de nature à assurer aux clients devenus éligibles une véritable liberté de choix sans être soumis à l'insécurité d'approvisionnement.

Elles estiment qu'actuellement, seule Electrabel, par sa filiale ECS, est en mesure de garantir la continuité de la fourniture d'électricité.

Elles reconnaissent l'existence de barrières à l'entrée sur le marché belge mais réfutent l'idée que l'opération accroisse ces barrières.

Si elles admettent se trouver dans une position plus confortable que les concurrents nouveaux entrants sur le marché belge, elles expliquent que celle-ci résulte principalement de leur qualité de fournisseur historique ayant bénéficié d'un monopole, ce qui leur donne nécessairement une parfaite connaissance du marché, des différents coûts de production, de transport et vente, des profils des clients, et une reconnaissance par les consommateurs.

Dans leur note d'observation, elles déclarent être disposées à accepter que : - l'identité des clients appelés à devenir éligibles et leur date d'éligibilité soient accessibles aux concurrents d'Electrabel; - les clients ayant signé un contrat d'une durée de plus de 3 ans se voient reconnaître un droit de résiliation unilatérale, moyennant un préavis de six mois, et sans indemnité à la fin de cette période. 5. Position du Conseil de la concurrence Attendu que par sa décision du 28 juin 2002, le Conseil a constaté que la concentration notifiée présentait des doutes sérieux quant à son admissibilité et décidé d'engager la procédure prévue à l'article 34 de la L.P.C.E.;

Attendu qu'au stade actuel de la procédure, il importe pour le Conseil d'examiner s'il y a lieu de faire droit à la demande de prorogation et, à défaut, de dire si la concentration est ou non admissible et, en cas de non admissibilité, de préciser si des conditions et charges doivent ou non être imposées. 5.1. Quant à la demande de prorogation Attendu que le Conseil considère que la cause est en état d'être jugée et qu'il n'y a, en conséquence, pas lieu de faire droit à la demande de prorogation des parties. 5.2. Analyse concurrentielle Attendu que le Conseil constate que les parties bénéficient d'avantages évidents de par leur position historique monopolistique à tous les niveaux du marché de l'électricité, de la production à la fourniture;

Que l'entrée effective sur le marché d'autres fournisseurs d'électricité implique la modification en profondeur de la structure qui a existé jusqu'à ce jour, ce qui ne peut se faire brutalement alors que la libéralisation est en cours de réalisation;

Que les concurrents doivent consentir d'importants investissements pour pénétrer le marché;

Qu'il s'agit d'avoir l'accès au marché de la production d'électricité (marché qui ne concerne pas directement la présente concentration) et d'obtenir l'ensemble des informations nécessaires pour faire une offre comme le profil de consommation, les conditions d'accès et de raccordement au réseau, les coûts de transport et de distribution.

Attendu que le Conseil constate qu'actuellement, ces informations ne sont pas encore complètement disponibles, non pas du fait de l'opération notifiée, mais principalement du retard pris dans la transposition de la directive européenne;

Que, comme le relève la CREG et la CwaPE, on ne peut que regretter que la mise en oeuvre des dispositions ne soit pas plus rapide (absence de désignation des gestionnaires des réseaux, lenteur de la mise en place des normes régissant la structure des coûts).

Attendu que la position dominante des parties notifiantes a été reconnue par le Conseil au travers de sa décision du 28 juin 2002;

Attendu qu'il importe d'examiner si cette position dominante sortira ou non renforcée de l'opération de concentration;

Qu'ECS, quoique nouvel entrant sur le marché concerné de la fourniture aux clients éligibles, est favorisé par la détention des informations que ne possèdent pas ses concurrents potentiels.

Que cette position déjà favorable est renforcée par sa désignation comme "fournisseur par défaut" (ce qui lui permet d'acquérir sans investissement une clientèle encore peu ou mal informées des possibilités qui s'ouvrent à elle) et la confusion possible avec l'identité du producteur;

Attendu qu'il résulte de ces considérations que la concentration a pour effet de renforcer la position dominante des parties.

Attendu qu'en raison ce renforcement de position dominante, il importe pour le Conseil d'examiner s'il n'est pas de nature à constituer une entrave à la concurrence effective sur le marché belge.

Attendu que l'opération est la mise en oeuvre par l'opérateur historique des dispositions légales prises à ce jour pour amorcer la libéralisation du marché de l'électricité, libéralisation qui à ce jour est incomplète, et que les diverses conventions et documents communiqués au Conseil dans le cadre de cette notification respectent la lettre du décret du 12 avril 2001 et de ses arrêtés d'application;

Que le Conseil estime qu'il n'y aura pas d'entrave significative à la concurrence effective sur le marché belge pour autant que les parties respectent certaines conditions de nature à faciliter la pénétration de concurrents sur le marché, en attendant l'achèvement du processus réglementaire de libéralisation.

Attendu que le Conseil remarque que certaines dispositions réglementaires récentes apportent un début de réponses aux légitimes demandes des concurrents, notamment l'arrêté royal du 11 juillet 2002 relatif à la structure tarifaire et à la publication des tarifs, et l'arrêté du gouvernement wallon du 21 mars 2002 (Moniteur belge du 27 avril 2002) qui impose l'établissement d'un inventaire des clients qui deviennent éligibles, la communication de cet inventaire à tout intéressé et l'information à donner au client concernant ses possibilités de choix d'un fournisseur;

Que les conditions à l'admissibilité telle qu'elles seront définies ci-après s'avèrent malgré cela nécessaires;

Que dans l'examen de celles-ci, le Conseil a été plus spécialement attentif à l'accès à la clientèle et à la souplesse des contrats.

Attendu enfin que dans le cadre des autres procédures de concentration, le Conseil se réserve le droit d'examiner le cas échéant d'autres conditions et engagements selon l'évolution des parts de marché, de la réglementation, les interventions éventuelles des organes de contrôle et de régulation et des propositions qu'ils pourraient faire notamment en ce qui concerne les facultés d'approvisionnement des entrants tant auprès du producteur Electrabel (qui doit s'abstenir de toute discrimination) qu'auprès des producteurs étrangers via les capacités d'interconnexion.

PAR CES MOTIFS Le Conseil de la concurrence Constate que la concentration telle que notifiée renforce la position des parties sur le marché de la fourniture d'électricité aux clients éligibles.

Décide toutefois de ne pas s'y opposer et la déclare en conséquence admissible pour autant que les parties respectent les conditions et charges suivantes : - six mois à l'avance chaque client, par courrier séparé, de la date de sa prochaine éligibilité et de la liberté de choix qui s'offre à lui en lui communiquant la liste et les coordonnées complètes des fournisseurs ayant obtenu une licence de livraison (à ce jour, 7 entreprises) et en l'informant de la possibilité d'obtenir sans frais son profil détaillé de consommation; - Accorder aux clients qui ont signé un contrat d'une durée de trois ans et plus, un droit de résiliation unilatérale moyennant un préavis de six mois et sans indemnité. - Aviser les clients de cette modification aux conditions contractuelles.

Ainsi statué le 30 août 2002 par la chambre du Conseil de la concurrence composée de Monsieur Patrick De Wolf, président de chambre, Mesdames Marie-Claude Grégoire et Messieurs Jacques Schaar et Pierre Battard, membres.

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