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Arrêt
publié le 01 mars 2024

Extrait de l'arrêt n° 125/2023 du 21 septembre 2023 Numéros du rôle : 7860, 7861, 7862, 7863 et 7864 En cause : les questions préjudicielles relatives aux articles 286 et 288 du décret flamand du 22 d(...)

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01/03/2024
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Extrait de l'arrêt n° 125/2023 du 21 septembre 2023 Numéros du rôle : 7860, 7861, 7862, 7863 et 7864 En cause : les questions préjudicielles relatives aux articles 286 et 288 du décret flamand du 22 décembre 2017 « sur l'administration locale » et aux articles 186 et 187 du décret communal flamand du 15 juillet 2005 (dans la version applicable du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2018), posées par le Tribunal de première instance de Flandre orientale, division de Gand.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents L. Lavrysen et P. Nihoul, et des juges Y. Kherbache, S. de Bethune, E. Bribosia, W. Verrijdt et K. Jadin, assistée du greffier N. Dupont, présidée par le président L. Lavrysen, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles et procédure a. Par deux jugements du 6 septembre 2022, dont les expéditions sont parvenues au greffe de la Cour le 15 septembre 2022, le Tribunal de première instance de Flandre orientale, division de Gand, a posé les questions préjudicielles suivantes : « 1.Les articles 286 et 288 du décret sur l'administration locale, dans l'interprétation selon laquelle il pourrait être déduit de ces dispositions que le seul mode de preuve admissible concernant la publication d'un règlement communal est la mention dans le registre spécial tenu par le directeur général, violent-ils les articles 10, 11, 33, 170, 172 et 191 de la Constitution, lus en combinaison avec les articles 105, 108, 159, 162 et 190 de la Constitution et avec les principes de la légalité et de la sécurité juridique, en ce qu'ils privent tant l'autorité communale, en sa qualité d'auteur d'un tel règlement, que toutes les personnes susceptibles d'être soumises à un tel règlement, de la garantie consistant en l'intervention d'une assemblée législative délibérante, à savoir le législateur visé à l'article 190 de la Constitution, pour déterminer la preuve de cette publication et, partant, pour déterminer un élément essentiel relatif au caractère obligatoire des lois, arrêtés et règlements et, dans le cas d'un règlement fiscal communal, relatif à la qualité de contribuable, alors que les auteurs des autres types de normes (lois, arrêtés ou règlements d'administration générale ou provinciale), visés à l'article 190 de la Constitution, et toutes les personnes susceptibles d'être soumises à de telles normes ne sont pas privés de cette garantie ? 2. Les articles 286 et 288 du décret sur l'administration locale, dans l'interprétation selon laquelle la mention dans le registre des publications prévue par le second alinéa de l'article 288 du décret sur l'administration locale constitue le seul mode de preuve admissible concernant la publication d'un règlement fiscal communal (et que cette preuve ne peut donc être produite d'aucune autre manière, par exemple par une preuve numérique), violent-ils les articles 10, 11 et 170 de la Constitution, lus en combinaison avec l'article 190 de celle-ci, en ce que, contrairement à ce qui est le cas pour les normes législatives et les actes administratifs réglementaires adoptés par d'autres autorités, le fait que les règlements communaux aient force obligatoire ne dépend pas seulement de leur publication (en l'espèce, sur le site internet), mais aussi de la mention de cette publication dans le registre des publications des règlements et ordonnances des autorités communales ? 3.Les articles 286 et 288 du décret sur l'administration locale, dans l'interprétation selon laquelle la mention dans le registre des publications prévue par le second alinéa de l'article 288 du décret sur l'administration locale constitue le seul mode de preuve admissible concernant la publication d'un règlement fiscal communal, violent-ils les articles 10, 11 et 170 de la Constitution (et en particulier l'exigence d'un lien raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et l'objectif poursuivi), lus en combinaison avec l'article 190 de la Constitution, en ce que, dans cette interprétation, la publication d'un règlement fiscal communal ne pourrait être établie au moyen d'une preuve numérique (par exemple, une capture d'écran du service d'appui du site internet de la commune), alors que la production d'une preuve numérique offre au moins les mêmes garanties objectives (voire davantage) en ce qui concerne la preuve du fait et la date de la publication ? ». b. Par trois jugements du 6 septembre 2022, dont les expéditions sont parvenues au greffe de la Cour le 15 septembre 2022, le Tribunal de première instance de Flandre orientale, division de Gand, a posé les questions préjudicielles suivantes : « 1.Les articles 186 et 187 du décret communal, dans l'interprétation selon laquelle il pourrait être déduit de ces dispositions que le seul mode de preuve admissible concernant la publication d'un règlement communal est l'annotation dans le registre spécial tenu par le secrétaire communal, violent-ils les articles 10, 11, 33, 170, 172 et 191 de la Constitution, lus en combinaison avec les articles 105, 108, 159, 162 et 190 de la Constitution et avec les principes de la légalité et de la sécurité juridique, en ce qu'ils privent tant l'autorité communale, en sa qualité d'auteur d'un tel règlement, que toutes les personnes susceptibles d'être soumises à un tel règlement de la garantie consistant en l'intervention d'une assemblée législative délibérante, à savoir le législateur visé à l'article 190 de la Constitution, pour déterminer la preuve de cette publication et, partant, pour déterminer un élément essentiel relatif au caractère obligatoire des lois, arrêtés et règlements et, dans le cas d'un règlement fiscal communal, relatif à la qualité de contribuable, alors que les auteurs des autres types de normes (lois, arrêtés ou règlements d'administration générale ou provinciale), visés à l'article 190 de la Constitution, et toutes les personnes susceptibles d'être soumises à de telles normes ne sont pas privés de cette garantie ? 2. Les articles 186 et 187 du décret communal, dans l'interprétation selon laquelle l'annotation dans le registre des publications prévue par le second alinéa de l'article 187 du décret communal constitue le seul mode de preuve admissible concernant la publication d'un règlement fiscal communal (et que cette preuve ne peut donc être produite d'aucune autre manière, par exemple par une preuve numérique), violent-ils les articles 10, 11 et 170 de la Constitution, lus en combinaison avec l'article 190 de celle-ci, en ce que, contrairement à ce qui est le cas pour les normes législatives et les actes administratifs réglementaires adoptés par d'autres autorités, le fait que les règlements communaux aient force obligatoire ne dépend pas seulement de leur publication (en l'espèce, sur le site internet), mais aussi de la mention de cette publication dans le registre des publications des règlements et ordonnances des autorités communales ? 3.Les articles 186 et 187 du décret communal, dans l'interprétation selon laquelle l'annotation dans le registre des publications prévue par le second alinéa de l'article 187 du décret communal constitue le seul mode de preuve admissible concernant la publication d'un règlement fiscal communal, violent-ils les articles 10, 11 et 170 de la Constitution (et en particulier l'exigence d'un lien raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et l'objectif poursuivi), lus en combinaison avec l'article 190 de la Constitution, en ce que, dans cette interprétation, la publication d'un règlement fiscal communal ne pourrait pas être établie au moyen d'une preuve numérique (qui, le cas échéant, peut prévaloir sur un registre tenu avec une certaine négligence ou qui est incomplet), alors que la production d'une preuve numérique offre au moins les mêmes garanties objectives (voire davantage) en ce qui concerne la preuve du fait et de la date de la publication ? ».

Ces affaires, inscrites sous les numéros 7860, 7861, 7862, 7863 et 7864 du rôle de la Cour, ont été jointes. (...) III. En droit (...) Quant aux dispositions en cause et à leur contexte B.1. Les questions préjudicielles portent sur la publication officielle des règlements et ordonnances communaux, en particulier des règlements-taxes. Cette matière a été transférée aux régions par la loi spéciale du 13 juillet 2001 portant transfert de diverses compétences aux régions et communautés. Certaines des affaires jointes concernent la réglementation qui était applicable en Région flamande entre le 1er janvier 2014 et le 31 décembre 2018 (affaires nos 7862, 7863 et 7864) et les autres concernent la réglementation qui y est applicable depuis le 1er janvier 2019 (affaires nos 7860 et 7861).

Compte tenu des similitudes entre les dispositions en cause, la Cour examine les questions préjudicielles conjointement.

B.2.1. Les articles 186 et 187 du décret communal flamand du 15 juillet 2005 (ci-après : le décret du 15 juillet 2005), dans leur version applicable devant la juridiction a quo, disposent : «

Art. 186.Les règlements et ordonnances du conseil communal, du collège des bourgmestre et échevins et du bourgmestre sont publiés par le bourgmestre sur le site web de la commune, avec mention de la date de leur approbation et de la date de leur publication sur le site web.

Art. 187.Les règlements et ordonnances visés à l'article 186 deviennent obligatoires le cinquième jour qui suit le jour de leur publication, sauf s'ils en disposent autrement.

La publicité et la date de la publication de ces règlements et ordonnances sont constatées par une annotation dans un registre spécialement tenu à cet effet, dans la forme qui sera déterminée par le gouvernement flamand ».

B.2.2. Les articles 286 et 288 du décret flamand du 22 décembre 2017 « sur l'administration locale » (ci-après : le décret du 22 décembre 2017), dans leur version applicable devant la juridiction a quo, disposent : «

Art. 286.§ 1er. Le bourgmestre publie les arrêtés suivants ainsi que leur contenu sur l'application web de la commune : 1° les règlements et ordonnances du conseil communal, du collège des bourgmestre et échevins et du bourgmestre; [...]

Art. 288.Sauf disposition contraire, les règlements et ordonnances visés à l'article 286, § 1er, 1° et 2°, ainsi que les règlements visés à l'article 286, § 2, 1° et 2°, entrent en vigueur le cinquième jour qui suit leur publication.

La publication et la date de publication des règlements et ordonnances visés à l'alinéa premier doivent être attestées par une mention dans un registre tenu conformément à la manière prévue par le Gouvernement flamand ».

B.3.1. Il appartient en règle à la juridiction a quo d'interpréter les dispositions qu'elle applique, sous réserve d'une lecture manifestement erronée des dispositions en cause.

B.3.2. La juridiction a quo interprète l'article 187, alinéa 2, du décret du 15 juillet 2005 et l'article 288, alinéa 2, du décret du 22 décembre 2017 en ce sens que le seul mode de preuve admissible de la publication des règlements ou ordonnances communaux est l'annotation dans le registre spécialement tenu à cet effet. Pour ce faire, elle se fonde sur la jurisprudence de la Cour de cassation qui a jugé en ce sens au sujet des anciennes règles flamandes et des règles wallonnes (Cass., 10 octobre 2019, C.18.0384.N, ECLI:BE:CASS:2019:CONC.20191010.9; 8 novembre 2018, C.17.0604.F, ECLI:BE:CASS:2018:CONC.20181108.10; 21 mai 2015, F.14.0098.F, ECLI:BE:CASS:2015:ARR.20150521.15; 21 mai 2015, F.13.0158.F, ECLI:BE:CASS:2015:ARR.20150521.14).

B.3.3. La Cour examine les dispositions en cause dans l'interprétation que donne la juridiction a quo, laquelle n'est pas manifestement erronée.

Quant à la compétence de la Cour B.4.1. La SA « Proximus », partie demanderesse dans le litige au fond dans l'affaire n° 7861, et la SA « Orange Belgium », partie intervenante, contestent que la Cour soit compétente pour répondre aux questions préjudicielles. Selon elles, les questions préjudicielles portent en réalité sur les arrêtés d'exécution pris par le Gouvernement flamand en vertu soit de l'article 187, alinéa 2, du décret du 15 juillet 2005, soit de l'article 288, alinéa 2, du décret du 22 décembre 2017, et sur la jurisprudence de la Cour de cassation.

B.4.2. La Cour n'est pas compétente pour répondre à une question préjudicielle relative à un arrêté qui n'est pas une norme législative. Elle ne peut pas non plus se prononcer sur les divergences d'interprétation d'un arrêté qui résultent des applications jurisprudentielles de ce dernier. Enfin, la Cour n'est pas compétente pour connaître des modalités d'exécution d'une norme législative.

B.4.3. En vertu de l'article 187, alinéa 2, du décret du 15 juillet 2005 et de l'article 288, alinéa 2, du décret du 22 décembre 2017, la publication et la date de publication d'un règlement communal ou d'une ordonnance communale doivent être attestées par une annotation dans un registre tenu conformément à la manière prévue par le Gouvernement flamand.

La première question préjudicielle concerne l'habilitation faite au Gouvernement flamand dans ces dispositions. Les deuxième et troisième questions préjudicielles concernent l'exigence prévue par ces dispositions selon laquelle la publication et la date de publication doivent être attestées par une annotation dans un registre. Les questions préjudicielles portent donc sur les dispositions en cause.

B.4.4. L'exception est rejetée.

Quant à la première question préjudicielle B.5. Par la première question préjudicielle, la juridiction a quo souhaite savoir si les dispositions en cause sont compatibles avec les articles 10, 11, 33, 170, 172 et 191 de la Constitution, lus en combinaison avec les articles 105, 108, 159, 162 et 190 de la Constitution et avec le principe de la légalité et de la sécurité juridique, en ce qu'elles priveraient l'autorité communale et les personnes qui peuvent être soumises à un règlement communal de la garantie consistant en l'intervention d'une assemblée législative délibérante pour déterminer la preuve de cette publication, alors que cette garantie n'est pas refusée aux auteurs de lois, d'arrêtés et de règlements d'administration générale ou provinciale ou aux personnes susceptibles d'être soumises à ces normes.

Il ressort des décisions de renvoi que, par cette question, la juridiction a quo interroge en substance la Cour sur la compatibilité de l'article 187, alinéa 2, du décret du 15 juillet 2005 et de l'article 288, alinéa 2, du décret du 22 décembre 2017 avec les articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec l'article 190 de la Constitution, en ce qu'ils habilitent le Gouvernement flamand à déterminer les formalités de l'annotation dans le registre spécialement tenu à cet effet, dans l'interprétation selon laquelle celle-ci est le seul mode de preuve admissible de la publication d'une ordonnance communale ou d'un règlement communal.

B.6.1. L'article 190 de la Constitution dispose : « Aucune loi, aucun arrêté ou règlement d'administration générale, provinciale ou communale, n'est obligatoire qu'après avoir été publié dans la forme déterminée par la loi ».

B.6.2. La publication des ordonnances et règlements communaux sur le site internet de la commune vise à donner exécution au droit, pour les justiciables, garanti par l'article 190 de la Constitution, de pouvoir prendre connaissance à tout moment de ces textes officiels avant que ceux-ci leur soient opposables. En outre, ce droit est inhérent à l'Etat de droit puisque c'est cette connaissance qui permet à chacun de s'y conformer.

L'annotation datée et signée de la publication dans un registre vise à attester avec certitude la publication du règlement.

B.7.1. Au sujet de la manière dont le registre des ordonnances et règlements de l'administration locale est tenu, l'arrêté du Gouvernement flamand du 18 janvier 2008 « relatif aux annotations dans le registre de publication des règlements et ordonnances des autorités communales » (ci-après : l'arrêté du 18 janvier 2008), qui était applicable jusqu'au 31 décembre 2018, dispose : «

Art. 2.L'annotation dans le registre se fait le jour de la publication du règlement ou de l'ordonnance. Les annotations sont numérotées dans l'ordre des publications consécutives.

Art. 3.L'annotation datée et signée par le bourgmestre et le secrétaire communal est établie de la manière suivante : ` N° ... Le bourgmestre de la commune (ou de la ville) ..., province ..., confirme que le règlement (ou l'ordonnance) du conseil communal (ou du collège des bourgmestre et échevins) (ou du bourgmestre), daté(e) ..., ayant pour objet ..., a été publié(e), conformément à l'article 186 [du] Décret communal le ... ..., ... (date) Le secrétaire communal, Le bourgmestre, ' ».

B.7.2. L'arrêté du Gouvernement flamand du 20 avril 2018 « relatif à la publication et les possibilités de consultation d'arrêtés et de pièces de l'administration locale, concernant la manière dont les règlements et ordonnances de l'administration locale sont tenus au registre et concernant les possibilités de consultation des arrêtés des zones policières et des zones de secours » (ci-après : l'arrêté du 20 avril 2018), qui a remplacé l'arrêté du 18 janvier 2008, tel qu'il était applicable au litige pendant devant la juridiction a quo, dispose : «

Art. 3.Dans un registre spécialement tenu à cet effet, le directeur général note la publication et la date de publication des règlements ou ordonnances de la commune et du centre public d'action sociale, visés à l'article 286, § 1er, 1° et 2°, et § 2, 1° et 2°, et l'article 553 du décret du 22 décembre 2017 sur l'administration locale. Cette annotation se fait le jour de la publication du règlement ou de l'ordonnance. Les annotations sont numérotées dans l'ordre des publications consécutives. [...]

Art. 4.Le bourgmestre et le directeur général datent et signent l'annotation des règlements et ordonnances de la commune, visés à l'article 286, § 1er, 1° et 2°, et l'article 553 du décret du 22 décembre 2017 sur l'administration locale.

Le président du bureau permanent et le directeur général datent et signent l'annotation des règlements du centre public d'action sociale, visés à l'article 286, § 2, 1° et 2°, du décret précité. [...] L'annotation, visée aux alinéas 1er à 3 inclus, mentionne au moins : 1° l'organe ayant pris le règlement ou l'ordonnance, en particulier le conseil communal, le collège des bourgmestre et échevins, le bourgmestre, le conseil de l'aide sociale, le bureau permanent, le conseil de district, le collège de district ou le bourgmestre de district;2° la date du règlement ou de l'ordonnance;3° l'objet du règlement ou de l'ordonnance;4° la date de publication du règlement ou de l'ordonnance ». B.8.1. La SA « Telenet Group », partie demanderesse dans le litige au fond dans l'affaire n° 7860, fait valoir que la question préjudicielle n'appelle pas de réponse, étant donné qu'elle repose sur une prémisse erronée et qu'elle n'est pas utile à la solution du litige au fond.

Selon la SA « Telenet Group », la question préjudicielle repose sur la prémisse erronée selon laquelle elle postule que le décret du 22 décembre 2017 ne dispose pas lui-même que la publication d'un règlement-taxe ne peut être prouvée que par une annotation dans le registre. Elle estime que la question préjudicielle n'est pas utile, étant donné que, dans le litige au fond dans l'affaire n° 7860, la commune de Zwalm n'est pas en mesure de présenter une annotation dans le registre.

B.8.2. L'examen de l'exception coïncide avec l'examen du fond de l'affaire. La Cour les examine dès lors conjointement.

B.9. En tant qu'elles ont trait à la publication des normes au sens large, les dispositions en cause portent sur une matière que l'article 190 de la Constitution réserve au législateur. Cette disposition constitutionnelle n'empêche toutefois pas que la forme de la publication fasse l'objet d'une habilitation au pouvoir exécutif, pour autant que celle-ci soit décrite de manière suffisamment précise et porte sur l'exécution de mesures dont les éléments essentiels ont été préalablement établis par le pouvoir législatif.

B.10. En l'espèce, aux termes de l'article 187, alinéa 2, du décret du 15 juillet 2005 et de l'article 288, alinéa 2, du décret du 22 décembre 2017, l'habilitation ne porte pas sur le mode de publication sur le site internet de la commune en tant que tel, mais sur la manière dont la preuve de cette publication doit être apportée.

B.11. Etant donné que le législateur décrétal a prévu que le mode de publication doit être la mise en ligne sur le site internet de la commune et que la preuve de celle-ci doit être apportée au moyen d'une annotation dans un registre spécialement tenu à cet effet, il a réglé lui-même les éléments essentiels de la forme de la publication. La délégation ne porte que sur la forme de l'annotation dans le registre.

B.12. La forme de l'annotation dans le registre n'emporte aucune conséquence sur la régularité d'une norme communale publiée sur le site internet de la commune. En ce qui concerne l'inopposabilité éventuelle du règlement dont la publication n'a pas été constatée dans le respect des dispositions prises en vertu de l'habilitation à l'exécutif, elle doit être considérée comme une conséquence de l'absence de preuve de la publication et ne doit pas être confondue avec la nullité de l'acte. De plus, cette inopposabilité découle principalement des dispositions en cause, qui consacrent l'annotation comme seul mode de preuve de la publication des règlements et ordonnances communaux, et non de l'habilitation ou des dispositions réglementaires.

B.13. Il découle de ce qui précède que le législateur décrétal a déterminé les éléments essentiels des mesures dont l'exécution est confiée au pouvoir exécutif et que, partant, cette habilitation n'est pas contraire aux articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec le principe de légalité contenu dans l'article 190 de la Constitution.

B.14. La Cour est également interrogée sur la compatibilité de l'habilitation contenue dans l'article 187, alinéa 2, du décret du 15 juillet 2005 et dans l'article 288, alinéa 2, du décret du 22 décembre 2017, lorsqu'elle vise les règlements-taxes communaux, avec les articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec l'article 170 de la Constitution.

B.15. L'article 170, § 4, de la Constitution, dispose : « Aucune charge, aucune imposition ne peut être établie par l'agglomération, par la fédération de communes et par la commune que par une décision de leur conseil.

La loi détermine, relativement aux impositions visées à l'alinéa 1er, les exceptions dont la nécessité est démontrée ».

B.16. En vertu de cette disposition, lue en combinaison avec les articles 41 et 162 de la Constitution, l'établissement d'un impôt communal est une matière d'intérêt communal qu'il revient au conseil communal de régler.

Cette compétence du conseil communal implique qu'il détermine les éléments essentiels de l'impôt, dont font partie la désignation des contribuables, la matière imposable, la base d'imposition, le taux d'imposition et les éventuelles exonérations d'impôt.

B.17. L'habilitation contenue dans les dispositions en cause ne permet aucunement qu'un règlement-taxe communal soit adopté par une autorité autre que le conseil communal.

B.18. Au surplus, la forme de l'annotation dans le registre de la publication des règlements-taxes communaux, même si elle peut avoir des effets quant à la preuve de la publication et à l'opposabilité de ces règlements, ne fait pas partie des éléments essentiels de l'impôt mentionnés en B.16.

B.19. Dès lors, les dispositions en cause sont compatibles avec l'article 170, § 4, de la Constitution.

B.20. L'examen des dispositions en cause au regard des articles 33, 105, 108, 159, 162, 172 et 191 de la Constitution, au sujet desquels ni la juridiction a quo ni les parties n'exposent en quoi ils seraient violés, ne conduit pas à une autre conclusion.

Quant à la deuxième question préjudicielle B.21. Par la deuxième question préjudicielle, la juridiction a quo souhaite savoir si les dispositions en cause, interprétées en ce sens que l'annotation dans le registre spécialement tenu à cet effet est le seul mode de preuve admissible de la publication d'un règlement-taxe communal, sont compatibles avec les articles 10, 11 et 170 de la Constitution, lus en combinaison avec l'article 190 de la Constitution, en ce que la force obligatoire de règlements communaux dépend non seulement de leur publication, mais également de la mention de la publication dans le registre spécialement tenu à cet effet, alors que cette condition ne s'applique pas aux normes adoptées par d'autres autorités.

B.22.1. La question préjudicielle part du postulat qu'une norme communale acquiert sa force obligatoire par la conjonction de deux conditions, à savoir la publication proprement dite et l'annotation, alors que les autres normes, dont la publication a lieu dans un journal officiel, ne supposent aucune autre formalité.

La question préjudicielle contient donc les éléments nécessaires permettant à la Cour de statuer. L'exception du Gouvernement flamand et de la SA « Proximus », partie demanderesse dans le litige au fond dans l'affaire n° 7861, sur ce point est rejetée.

B.22.2. Aux termes des dispositions en cause, les règlements et ordonnances communaux acquièrent leur force obligatoire exclusivement par le biais de la publication sur le site internet de la commune, à savoir le cinquième jour qui suit le jour de leur publication, sauf disposition contraire. Aucune autre condition n'est requise.

L'annotation dans le registre spécialement tenu à cet effet constitue le mode de preuve de cette publication, notamment devant un tribunal.

Selon la jurisprudence de la Cour de cassation, le non-respect des règles relatives à la forme de l'annotation dans le registre entraîne l'absence de preuve de la publication et, par conséquent, l'inopposabilité du règlement communal (Cass., 10 octobre 2019, C.18.0384.N, précité; 21 mai 2015, F.14.0098.F, précité; 21 mai 2015, F.13.0158.F, précité).

La publication dans un journal officiel est, de la même façon, la seule condition de la force obligatoire des normes publiées par ce biais. La seule circonstance que la preuve de l'existence de la publication au journal officiel est plus aisée à apporter ne signifie pas que ce type de publication n'est soumise à aucun régime probatoire.

B.22.3. En ce qu'elle considère que la force obligatoire des règlements et ordonnances communaux en Région flamande dépend d'une double condition de publication et d'annotation, la question préjudicielle part d'une prémisse erronée. La différence de traitement qui y est décrite est dès lors inexistante.

B.23. La deuxième question préjudicielle n'appelle pas de réponse.

Quant à la troisième question préjudicielle B.24. Par la troisième question préjudicielle, la juridiction a quo souhaite savoir si les dispositions en cause, interprétées en ce sens que l'annotation dans le registre spécialement tenu à cet effet constitue le seul mode de preuve admissible de la publication d'un règlement-taxe communal, sont compatibles avec les articles 10, 11 et 170 de la Constitution, lus en combinaison avec l'article 190 de la Constitution, en ce que, dans cette interprétation, la publication d'un règlement-taxe communal ne peut pas être démontrée au moyen d'une preuve informatique, alors qu'une telle preuve est au moins aussi fiable.

B.25. Le postulat sur lequel repose la question préjudicielle est qu'il existe une différence de traitement entre les communes qui souhaitent prouver la publication du règlement-taxe au moyen d'une annotation dans un registre spécialement tenu à cet effet et les communes qui souhaitent démontrer la publication au moyen d'une preuve informatique. Seules les communes de la première catégorie pourront prouver la publication de manière effective.

B.26. La question préjudicielle comporte les éléments nécessaires pour permettre à la Cour de statuer. L'exception du Gouvernement flamand, de la SA « Telenet Group » (partie demanderesse dans le litige au fond dans l'affaire n° 7860), de la SA « Proximus » (partie demanderesse dans le litige au fond dans l'affaire n° 7861) et de la SA « Orange Belgium » (partie intervenante) sur ce point est rejetée.

B.27. Le principe d'égalité et de non-discrimination n'exclut pas qu'une différence de traitement soit établie entre des catégories de personnes, pour autant qu'elle repose sur un critère objectif et qu'elle soit raisonnablement justifiée.

L'existence d'une telle justification doit s'apprécier en tenant compte du but et des effets de la mesure critiquée ainsi que de la nature des principes en cause; le principe d'égalité et de non-discrimination est violé lorsqu'il est établi qu'il n'existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.

B.28. Interprétés comme faisant de l'annotation dans le registre le seul mode de preuve de la publication d'une ordonnance ou d'un règlement communal, l'article 187, alinéa 2, du décret du 15 juillet 2005 et l'article 288, alinéa 2, du décret du 22 décembre 2017 n'ont pas pour objectif l'organisation et le mode de fonctionnement de l'administration mais visent à protéger l'administré, et donc le redevable dans le cadre d'un règlement-taxe. Ceci est de nature à renforcer l'objectif général visé par l'article 190 de la Constitution.

B.29. En vue de protéger l'administré, et donc le redevable dans le cadre d'un règlement-taxe, le législateur décrétal a pu estimer qu'il était pertinent d'organiser un régime probatoire unique et exclusif, qui ne souffre d'aucune ambiguïté, à savoir la production d'une annotation dans un registre spécifique.

B.30. En outre, la Cour n'aperçoit aucune difficulté d'ordre pratique qui rendrait ce régime de preuve disproportionné à l'objectif poursuivi. Il en va d'autant plus ainsi que la preuve de la publication d'une norme ne se confond pas avec la validité de celle-ci. Par ailleurs, le registre peut être tenu sous format papier ou sous format numérique, selon le choix de la commune, tant qu'il contient les mentions obligatoires.

B.31. Enfin, la simple circonstance que certaines juridictions ont pu considérer que d'autres moyens de preuve n'étaient en réalité pas exclus par les dispositions en cause n'entraîne pas ipso facto l'inconstitutionnalité de celles-ci. En effet, la Cour les examine dans l'interprétation de la juridiction a quo mentionnée en B.3.2.

B.32. En ce qu'elles font de l'annotation dans le registre le seul mode de preuve de la publication d'un règlement communal, les dispositions en cause ne sont pas incompatibles avec les articles 10, 11 et 170 de la Constitution, lus en combinaison avec l'article 190 de la Constitution.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : - Les articles 186 et 187 du décret communal flamand du 15 juillet 2005 et les articles 286 et 288 du décret flamand du 22 décembre 2017 « sur l'administration locale » ne violent pas les articles 10, 11 et 170 de la Constitution, lus en combinaison avec l'article 190 de la Constitution. - La deuxième question préjudicielle n'appelle pas de réponse.

Ainsi rendu en langue néerlandaise et en langue française, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 21 septembre 2023.

Le greffier, Le président, N. Dupont L. Lavrysen

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