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Arrêt
publié le 08 décembre 2020

Extrait de l'arrêt n° 103/2020 du 9 juillet 2020 Numéro du rôle : 6963 En cause: les questions préjudicielles concernant l'article 2 de la loi du 27 février 1987 « relative aux allocations aux personnes handicapées », posées par le Tribunal d La Cour constitutionnelle, composée des présidents F. Daoût et A. Alen, et des juges L. Lavrysen(...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 103/2020 du 9 juillet 2020 Numéro du rôle : 6963 En cause: les questions préjudicielles concernant l'article 2 de la loi du 27 février 1987Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/02/1987 pub. 18/10/2004 numac 2004000528 source service public federal interieur Loi relative aux allocations aux handicapés Traduction allemande fermer « relative aux allocations aux personnes handicapées », posées par le Tribunal du travail du Hainaut, division Mons.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents F. Daoût et A. Alen, et des juges L. Lavrysen, J.-P. Moerman, T. Merckx-Van Goey, P. Nihoul, T. Giet, R. Leysen, M. Pâques et Y. Kherbache, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président F. Daoût, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles et procédure Par jugement du 11 juin 2018, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 27 juin 2018, le Tribunal du travail du Hainaut, division Mons, a posé les questions préjudicielles suivantes : « 1) L'article 2 de la loi du 27 février 1987Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/02/1987 pub. 18/10/2004 numac 2004000528 source service public federal interieur Loi relative aux allocations aux handicapés Traduction allemande fermer relative aux allocations aux personnes handicapées ne viole-t-il pas les articles 10, 11 et 22 de la Constitution en ce que le droit aux allocations ne peut être accordé à la personne handicapée majeure n'ayant pas atteint l'âge de 21 ans ? 2) L'article 2 de la loi du 27 février 1987Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/02/1987 pub. 18/10/2004 numac 2004000528 source service public federal interieur Loi relative aux allocations aux handicapés Traduction allemande fermer relative aux allocations aux personnes handicapées viole-t-il les articles 10, 11 et 22 de la Constitution en ce qu'il impose un âge minimal de 21 ans pour ouvrir un droit aux allocations aux personnes handicapées tandis qu'une personne majeure (handicapée ou non) peut ouvrir un droit à l'intégration sociale dès l'âge de 18 ans avec le risque de se voir opposer un refus du CPAS vu les revenus des parents cohabitants alors que les revenus des parents cohabitants d'une personne handicapée ne sont pas pris en compte dans le régime des allocations aux personnes handicapées ? 3) L'article 2 de la loi du 27 février 1987Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/02/1987 pub. 18/10/2004 numac 2004000528 source service public federal interieur Loi relative aux allocations aux handicapés Traduction allemande fermer relative aux allocations aux personnes handicapées offre-t-il un accès suffisant à un minimum de dignité humaine au sens de l'article 23 de la Constitution, y compris un droit minimum à la sécurité sociale en ce que le droit aux allocations ne peut être accordé à la personne handicapée majeure n'ayant pas atteint l'âge de 21 ans ? ». (...) III. En droit (...) Quant à la disposition en cause et à son contexte B.1.1. Depuis son remplacement par l'article 117 de la loi-programme (I) du 24 décembre 2002, remplacé à son tour par l'article 156 de la loi-programme du 9 juillet 2004Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 09/07/2004 pub. 15/07/2004 numac 2004021091 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi-programme fermer, l'article 2 de la loi du 27 février 1987Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/02/1987 pub. 18/10/2004 numac 2004000528 source service public federal interieur Loi relative aux allocations aux handicapés Traduction allemande fermer « relative aux allocations aux personnes handicapées » (ci-après : la loi du 27 février 1987Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/02/1987 pub. 18/10/2004 numac 2004000528 source service public federal interieur Loi relative aux allocations aux handicapés Traduction allemande fermer) dispose : « § 1er. L'allocation de remplacement de revenus est accordée à la personne handicapée qui est âgée d'au moins 21 ans et qui, au moment de l'introduction de la demande, est âgée de moins de 65 ans, dont il est établi que l'état physique ou psychique a réduit sa capacité de gain à un tiers ou moins de ce qu'une personne valide est en mesure de gagner en exerçant une profession sur le marché général du travail.

Le marché général du travail ne comprend pas les entreprises de travail adapté. § 2. L'allocation d'intégration est accordée à la personne handicapée qui, au moment de l'introduction de la demande, est âgée d'au moins 21 ans et de moins de 65 ans, dont le manque ou la réduction d'autonomie est établi. § 3. L'allocation pour l'aide aux personnes âgées est accordée à la personne handicapée âgée d'au moins 65 ans dont le manque ou la réduction d'autonomie est établi.

L'allocation pour l'aide aux personnes âgées n'est pas accordée à la personne handicapée qui bénéficie d'une allocation de remplacement de revenus ou d'une allocation d'intégration ».

B.1.2.1. L'allocation de remplacement de revenus, l'allocation d'intégration et l'allocation pour l'aide aux personnes âgées constituent les trois allocations aux personnes handicapées (article 1er, alinéa 1er, de la loi du 27 février 1987Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/02/1987 pub. 18/10/2004 numac 2004000528 source service public federal interieur Loi relative aux allocations aux handicapés Traduction allemande fermer).

L'allocation de remplacement de revenus est accordée aux personnes handicapées dont la capacité de gain est limitée en raison de leur état physique ou psychique. L'allocation d'intégration est destinée aux personnes handicapées qui, en raison de leur manque ou de leur réduction d'autonomie, doivent exposer des frais supplémentaires, par exemple pour acquérir des équipements spéciaux.

B.1.2.2. Les allocations de remplacement de revenus et les allocations d'intégration ont remplacé les allocations ordinaires et les allocations spéciales qui étaient octroyées aux personnes handicapées avant l'entrée en vigueur de la loi du 27 février 1987Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/02/1987 pub. 18/10/2004 numac 2004000528 source service public federal interieur Loi relative aux allocations aux handicapés Traduction allemande fermer.

A cet égard, il ressort des travaux préparatoires que : « a) Pour simplifier et augmenter la transparence du régime, les allocations octroyées aux personnes atteintes d'un handicap avant l'âge de 65 ans, sont remplacées par deux allocations, à savoir : l'allocation de remplacement de revenus et l'allocation d'intégration.

L'allocation de remplacement de revenus est destinée aux handicapés qui ne peuvent disposer d'un revenu suffisant. L'allocation d'intégration est octroyée aux handicapés dont le manque d'autonomie entraine des frais supplémentaires ou nécessite des équipements particuliers en vue de leur intégration. [...] La simplification proposée implique la suppression de la distinction entre allocations ordinaires et allocations spéciales et l'octroi, désormais, des mêmes droits à toutes les catégories de handicapés » (Doc. parl., Chambre, 1985-1986, n° 448/1, pp. 1-2).

B.1.3. Pour obtenir des allocations aux personnes handicapées, la personne handicapée doit satisfaire aux conditions fixées aux articles 2, 4 et 7 de la loi du 27 février 1987Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/02/1987 pub. 18/10/2004 numac 2004000528 source service public federal interieur Loi relative aux allocations aux handicapés Traduction allemande fermer (article 1er, alinéa 2, de la même loi).

Pour obtenir des allocations de remplacement de revenus et des allocations d'intégration, la personne handicapée doit notamment, en vertu de l'article 2 de la même loi, être âgée de 21 ans au moins. Ce critère d'âge figure dans la disposition en cause depuis son origine.

Il ressort des travaux préparatoires que : « L'âge requis pour l'octroi des allocations est porté à 21 ans pour tous les handicapés. L'actuelle allocation spéciale n'est accordée qu'à partir de 25 ans. L'allocation ordinaire pouvait être octroyée dès l'âge de 14 ans, mais pendant tout le temps de la minorité du handicapé, son octroi est fonction des ressources de ses parents, ce qui excluait immédiatement la plupart des mineurs d'âge » (Doc. parl., Chambre, 1985-1986, n° 448/1, p. 2).

B.1.4. Le critère d'âge de 21 ans a fait l'objet d'amples discussions au cours des travaux préparatoires. Plusieurs amendements ont été déposés en vue de l'abaissement de cet âge à 18 ans. Le secrétaire d'Etat a toutefois voulu maintenir l'âge de 21 ans. En commission, il a justifié ce choix en ces termes : « [...] le choix de l'âge de 21 ans s'inscrit dans une quadruple logique : tout d'abord, 21 ans est l'âge de la majorité dans la législation actuelle; ensuite, ce chiffre sert également de critère dans le régime des allocations familiales; d'autre part, c'est également à partir de 21 ans qu'il est possible de bénéficier du minimum de moyens d'existence; enfin, il faut inciter les handicapés à prolonger leur scolarité au maximum. Tant dans le cas d'un handicap mental que dans le cas d'un handicap physique, il est terminé le temps où l'on pensait que le développement des handicapés avait un plafond. [...] [...] la législation doit être univoque. Il est dès lors préférable de fixer l'âge requis pour l'octroi des allocations aux handicapés à 21 ans. Si l'âge de la majorité était abaissé à 18 ans dans le futur, il serait alors toujours possible de modifier également les critères d'âge pour le bénéfice des allocations » (Doc. parl., Chambre, 1985-1986, n° 448/4, p. 13).

Toujours en commission, le secrétaire d'Etat a indiqué : « L'âge minimal est porté à 21 ans pour les deux allocations et aligné ainsi sur l'âge minimal requis pour l'octroi d'autres allocations sociales (par exemple le minimum de moyens d'existence) ou pour l'obtention de majorations (par exemple, de certaines allocations de chômage) » (Doc. parl., Sénat, 1985-1986, n° 335/2, p. 5).

Et : « [...] - les handicapés ont droit aux allocations familiales jusqu'à 21 ans; - les handicapés doivent pouvoir bénéficier d'une formation jusqu'à l'âge de 21 ans au moins. Cela augmentera leurs chances d'intégration; - le montant de l'allocation de remplacement de revenus correspond au montant du minimum de moyens d'existence. La limite d'âge est de 21 ans également pour cette dernière prestation » (ibid., p. 18).

Quant au fond B.2. Par la première question préjudicielle, le juge a quo invite la Cour à examiner la compatibilité de la disposition en cause avec les articles 10, 11 et 22 de la Constitution, en ce qu'elle fixe à 21 ans l'âge à partir duquel des allocations de remplacement de revenus et des allocations d'intégration peuvent être octroyées aux personnes handicapées.

B.3. Ni la question préjudicielle ni la décision de renvoi ne font apparaître le rapport entre la disposition en cause et le droit au respect de la vie privée garanti par l'article 22 de la Constitution.

En conséquence, la Cour examine uniquement la compatibilité de la disposition en cause avec les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce qu'elle fait naître une différence de traitement entre les personnes handicapées majeures, selon qu'elles ont ou non 21 ans accomplis.

B.4. Le principe d'égalité et de non-discrimination n'exclut pas qu'une différence de traitement soit établie entre des catégories de personnes, pour autant qu'elle repose sur un critère objectif et qu'elle soit raisonnablement justifiée.

L'existence d'une telle justification doit s'apprécier en tenant compte du but et des effets de la mesure critiquée ainsi que de la nature des principes en cause; le principe d'égalité et de non-discrimination est violé lorsqu'il est établi qu'il n'existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.

B.5. Comme il ressort des travaux préparatoires cités en B.1.4, le législateur a fixé à 21 ans l'âge à partir duquel une personne handicapée peut solliciter une allocation de remplacement de revenus et une allocation d'intégration, et ce, pour quatre raisons.

Concrètement, le législateur a voulu : - premièrement, faire correspondre cet âge à l'âge de la majorité civile, qui était fixée à 21 ans lorsqu'il a adopté la loi du 27 février 1987Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/02/1987 pub. 18/10/2004 numac 2004000528 source service public federal interieur Loi relative aux allocations aux handicapés Traduction allemande fermer; - deuxièmement, aligner cet âge sur l'âge à partir duquel une personne handicapée n'ouvre plus le droit à des allocations familiales majorées; - troisièmement, calquer cet âge sur l'âge à partir duquel il est possible de solliciter le « minimum de moyens d'existence », devenu le « droit à l'intégration sociale » au sens de la loi du 26 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 26/05/2002 pub. 31/07/2002 numac 2002022559 source ministere des affaires sociales, de la sante publique et de l'environnement Loi concernant le droit à l'intégration sociale fermer « concernant le droit à l'intégration sociale » (ci-après : la loi du 26 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 26/05/2002 pub. 31/07/2002 numac 2002022559 source ministere des affaires sociales, de la sante publique et de l'environnement Loi concernant le droit à l'intégration sociale fermer); et - quatrièmement, inciter les personnes handicapées à prolonger leur scolarité le plus longtemps possible.

B.6.1. Le critère de l'âge de la majorité civile justifiant la limitation de l'octroi des allocations de remplacement de revenus et des allocations d'intégration aux personnes handicapées de 21 ans accomplis n'est plus pertinent, dès lors que la loi du 19 janvier 1990 « abaissant à dix-huit ans l'âge de la majorité civile » a fixé cet âge à 18 ans.

B.6.2. Le critère d'âge de 21 ans n'est plus pertinent non plus au regard de l'objectif consistant à calquer l'âge minimal pour l'octroi des allocations de remplacement de revenus et des allocations d'intégration sur l'âge à partir duquel le « minimum de moyens d'existence », devenu le « droit à l'intégration sociale », peut être octroyé. En effet, celui-ci peut être accordé à partir de l'âge de 18 ans, c'est-à-dire aux personnes majeures ou y assimilées (article 3, 2°, de la loi du 26 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 26/05/2002 pub. 31/07/2002 numac 2002022559 source ministere des affaires sociales, de la sante publique et de l'environnement Loi concernant le droit à l'intégration sociale fermer).

B.6.3.1. Il existe certes une cohérence entre le système des allocations familiales et le système des allocations aux personnes handicapées, en ce que ce dernier ne prend cours que quand le premier a pris fin pour des personnes handicapées. Les articles 47 et 63 de la loi générale du 19 décembre 1939 « relative aux allocations familiales », les articles 5, § 2, et 16 du décret de la Région wallonne du 8 février 2018 « relatif à la gestion et au paiement des prestations familiales », les articles 9, § 2, 21 et 22, du décret de la Communauté germanophone du 23 avril 2018 « relatif aux prestations familiales », les articles 8, § 2, 2°, et 16 du décret flamand du 27 avril 2018 « réglant les allocations dans le cadre de la politique familiale » et l'article 12 de l'ordonnance de la Commission communautaire commune du 25 avril 2019 « réglant l'octroi des prestations familiales » prévoient en effet une majoration des allocations familiales de base en faveur de la personne handicapée âgée de moins de 21 ans.

B.6.3.2. La cohérence entre les deux régimes ne peut toutefois pas constituer un argument déterminant pour justifier le maintien du critère d'âge de 21 ans pour l'octroi de l'allocation de remplacement de revenus et de l'allocation d'intégration. D'une part, depuis la loi spéciale du 6 janvier 2014 relative à la Sixième Réforme de l'Etat, le législateur fédéral n'est plus compétent en ce qui concerne le régime des allocations familiales, de sorte que, contrairement à ce qui était le cas dans le passé, il ne peut plus garantir la cohérence des deux régimes. D'autre part, les communautés sont libres d'adapter leur politique en matière d'allocations familiales à une modification du critère d'âge précité. A cet égard, il peut être souligné qu'à la suite de l'adoption de la loi du 27 février 1987Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/02/1987 pub. 18/10/2004 numac 2004000528 source service public federal interieur Loi relative aux allocations aux handicapés Traduction allemande fermer, le législateur a adapté le critère d'âge de 21 ans permettant de bénéficier des allocations familiales majorées pour personnes handicapées au critère d'âge qui a été fixé dans la loi précitée, et non l'inverse (Doc. parl., Chambre, 1985-1986, n° 448/1, p. 8, et n° 448/4, p. 11).

B.6.4. Enfin, pour justifier le critère d'âge de 21 ans, les travaux préparatoires de l'article 2, § § 1er et 2, de la loi du 27 février 1987Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/02/1987 pub. 18/10/2004 numac 2004000528 source service public federal interieur Loi relative aux allocations aux handicapés Traduction allemande fermer renvoient à l'objectif qui consiste à inciter les personnes handicapées à poursuivre leur scolarité le plus longtemps possible. Si cet objectif est certainement légitime, le critère d'âge de 21 ans, en cause, n'est pas pertinent pour atteindre cet objectif.

D'abord, les études supérieures peuvent être à durée variable et peuvent être effectuées à des rythmes différents, de sorte que le choix de l'âge de 21 ans ne permet pas de saisir adéquatement la situation de la personne handicapée majeure qui souhaite encore étudier au-delà de l'âge de 18 ans.

Par ailleurs, une personne handicapée peut poursuivre ou non des études au-delà de l'âge de 18 ans. A partir de cet âge, la personne handicapée n'est plus soumise à l'obligation scolaire et peut dès lors entamer une activité professionnelle. Une compensation dès ce moment de la limitation de la capacité de gain par l'allocation de remplacement de revenus peut donc s'avérer nécessaire.

Une personne handicapée majeure peut aussi avoir besoin, à partir de l'âge de 18 ans, d'une allocation d'intégration qui favorise son autonomie, et ce, indépendamment du fait de savoir si elle souhaite encore étudier au-delà de cet âge. A cet égard, il convient de tenir compte de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées et du Protocole facultatif à cette Convention, qui sont entrés en vigueur en Belgique le 1er août 2009. Selon l'article 12, paragraphes 1 et 2, de ladite Convention, les Etats parties reconnaissent que les personnes handicapées jouissent de la capacité juridique dans tous les domaines, sur la base de l'égalité avec les autres, et ils prennent des mesures appropriées pour donner aux personnes handicapées accès à l'accompagnement dont elles peuvent avoir besoin pour exercer leur capacité juridique.

B.7.1. Il découle de ce qui est dit en B.6 qu'eu égard aux objectifs que le législateur poursuivait lorsqu'il a adopté l'article 2, § § 1er et 2, de la loi du 27 février 1987Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/02/1987 pub. 18/10/2004 numac 2004000528 source service public federal interieur Loi relative aux allocations aux handicapés Traduction allemande fermer, le critère d'âge de 21 ans ne saurait plus être considéré comme un critère de distinction pertinent pour l'octroi aux personnes handicapées des allocations de remplacement de revenus et des allocations d'intégration.

B.7.2. Par ailleurs, il n'apparaît pas non plus d'autres éléments que les évolutions sociétales qui sont intervenues depuis lors peuvent conduire à une autre conclusion.

A cet égard, pour justifier le maintien dans la disposition attaquée du critère d'âge de 21 ans, le Conseil des ministres allègue notamment que la plupart des enfants quittent aujourd'hui le foyer familial vers cet âge pour mener une existence plus indépendante. Les besoins de personnes handicapées majeures peuvent toutefois être fondamentalement différents de ceux de jeunes de leur âge qui ne sont pas atteints d'un handicap et d'importantes différences peuvent apparaître au sein du groupe de personnes handicapées en ce qui concerne les possibilités d'autonomie et d'existence indépendante. Les besoins financiers de personnes handicapées majeures peuvent, à cet égard, être tout aussi importants avant qu'après l'âge de 21 ans.

Enfin, la circonstance que le droit à l'intégration sociale peut actuellement aussi être octroyé à des personnes handicapées à partir de l'âge de 18 ans ne saurait justifier le maintien du critère d'âge de 21 ans pour les allocations aux personnes handicapées. Le droit à l'intégration sociale ne tient en effet pas compte des besoins spécifiques de ces personnes.

B.7.3. L'article 2, § § 1er et 2, de la loi du 27 février 1987Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/02/1987 pub. 18/10/2004 numac 2004000528 source service public federal interieur Loi relative aux allocations aux handicapés Traduction allemande fermer n'est dès lors pas compatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce qu'il fait naître une différence de traitement injustifiée entre des personnes handicapées majeures, selon qu'elles ont ou non 21 ans accomplis.

B.8. Compte tenu de ce qui est dit en B.7.3, les deuxième et troisième questions préjudicielles n'appellent pas de réponse.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : L'article 2, § § 1er et 2, de la loi du 27 février 1987Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/02/1987 pub. 18/10/2004 numac 2004000528 source service public federal interieur Loi relative aux allocations aux handicapés Traduction allemande fermer « relative aux allocations aux personnes handicapées » viole les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce qu'il fixe à 21 ans l'âge minimal pour l'octroi d'une allocation de remplacement de revenus et d'une allocation d'intégration aux personnes handicapées majeures.

Ainsi rendu en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 9 juillet 2020.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux Le président, F. Daoût

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