Etaamb.openjustice.be
Arrêt
publié le 08 mai 2019

Extrait de l'arrêt n° 41/2019 du 14 mars 2019 Numéro du rôle : 6758 En cause : le recours en annulation des articles 4, 4°, et 5, litterae e), f) et g), deuxième tiret, de la loi du 30 mars 2017 « modifiant la loi du 30 novembre 1998 organiqu La Cour constitutionnelle, composée des présidents A. Alen et F. Daoût, et des juges L. Lavrysen(...)

source
cour constitutionnelle
numac
2019201385
pub.
08/05/2019
prom.
--
moniteur
https://www.ejustice.just.fgov.be/cgi/article_body(...)
liens
Conseil d'État (chrono)
Document Qrcode

COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 41/2019 du 14 mars 2019 Numéro du rôle : 6758 En cause : le recours en annulation des articles 4, 4°, et 5, litterae e), f) et g), deuxième tiret, de la loi du 30 mars 2017Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/03/2017 pub. 28/04/2017 numac 2017011752 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 30 novembre 1998 organique des services de renseignement et de sécurité et l'article 259bis du Code pénal fermer « modifiant la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer organique des services de renseignement et de sécurité et l'article 259bis du Code pénal » (nouvel article 2, § 3, article 3, 12°, article 3, 12°/1, et article 3, 14°, litterae a) et b), de la loi précitée du 30 novembre 1998), introduit par l'ASBL « Liga voor Mensenrechten ».

La Cour constitutionnelle, composée des présidents A. Alen et F. Daoût, et des juges L. Lavrysen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke, T. Merckx-Van Goey, P. Nihoul, T. Giet, R. Leysen, J. Moerman et M. Pâques, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président A. Alen, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet du recours et procédure Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 26 octobre 2017 et parvenue au greffe le 30 octobre 2017, l'ASBL « Liga voor Mensenrechten », assistée et représentée par Me J. Vander Velpen, avocat au barreau d'Anvers, a introduit un recours en annulation des articles 4, 4°, et 5, litterae e), f) et g), deuxième tiret, de la loi du 30 mars 2017Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/03/2017 pub. 28/04/2017 numac 2017011752 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 30 novembre 1998 organique des services de renseignement et de sécurité et l'article 259bis du Code pénal fermer « modifiant la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer organique des services de renseignement et de sécurité et l'article 259bis du Code pénal » (publiée au Moniteur belge du 28 avril 2017). (...) II. En droit (...) Quant aux articles attaqués de la loi du 30 mars 2017Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/03/2017 pub. 28/04/2017 numac 2017011752 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 30 novembre 1998 organique des services de renseignement et de sécurité et l'article 259bis du Code pénal fermer et à leur contexte B.1.1. La loi attaquée du 30 mars 2017 « modifiant la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer organique des services de renseignement et de sécurité et l'article 259bis du Code pénal » (ci-après : la loi du 30 mars 2017) « vise à améliorer et à clarifier la loi organique [du 30 novembre 1998] en répondant aux problèmes opérationnels rencontrés, sans toucher ni aux méthodes existantes, ni aux garanties prévues pour protéger les droits fondamentaux des citoyens, ni aux différents contrôles » (Doc.parl., Chambre, 2015-2016, DOC 54-2043/001, p. 3).

B.1.2. Aux termes de l'article 2, § 1er, alinéa 1er, de la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer, l'Etat belge compte deux services de renseignement et de sécurité : un service civil de renseignement et de sécurité, appelé « Sûreté de l'Etat », et un service militaire de renseignement et de sécurité, appelé « Service général du renseignement et de la sécurité ».

La mission principale du service civil de renseignement et de sécurité consiste à rechercher, analyser et traiter le renseignement relatif à toute activité qui menace ou pourrait menacer la sûreté intérieure de l'Etat et la pérennité de l'ordre démocratique et constitutionnel, la sûreté extérieure de l'Etat et les relations internationales, le potentiel scientifique ou économique défini par le Conseil national de sécurité, ou tout autre intérêt fondamental du pays défini par le Roi sur proposition du Conseil national de sécurité (article 7, 1°, de la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer).

La mission principale du service militaire de renseignement et de sécurité consiste à rechercher, analyser et traiter le renseignement relatif aux facteurs qui influencent ou peuvent influencer la sécurité nationale et internationale dans la mesure où les Forces armées sont ou pourraient être impliquées, en fournissant un soutien en renseignement à leurs opérations en cours ou à leurs éventuelles opérations à venir, ainsi que le renseignement relatif à toute activité qui menace ou pourrait menacer l'intégrité du territoire national ou la population, les plans de défense militaires, le potentiel scientifique et économique en rapport avec les acteurs, tant personnes physiques que personnes morales, qui sont actifs dans les secteurs économiques et industriels liés à la défense et qui figurent sur une liste approuvée par le Conseil national de sécurité, sur proposition du ministre de la Justice et du ministre de la Défense, l'accomplissement des missions des Forces armées, la sécurité des ressortissants belges à l'étranger, ou tout autre intérêt fondamental du pays défini par le Roi sur proposition du Conseil national de sécurité, et à en informer sans délai les ministres compétents ainsi qu'à donner des avis au gouvernement, à la demande de celui-ci, concernant la définition de sa politique intérieure et étrangère de sécurité et de défense (article 11, § 1er, 1°, de la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer).

Les activités qui constituent une menace potentielle sont précisées aux articles 8 et 11, § 2, de la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer. Dans l'exercice de leurs missions, les services de renseignement et de sécurité veillent au respect et contribuent à la protection des droits et libertés individuels, ainsi qu'au développement démocratique de la société (article 2, § 1er, alinéa 2, de la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer).

B.1.3. La loi du 4 février 2010Documents pertinents retrouvés type loi prom. 04/02/2010 pub. 10/03/2010 numac 2010009144 source service public federal justice Loi relative aux méthodes de recueil des données par les services de renseignement et de sécurité fermer « relative aux méthodes de recueil des données par les services de renseignement et de sécurité » a profondément modifié la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer, pour mettre à la disposition de ces services des moyens légaux supplémentaires leur permettant de mener une politique de sécurité efficace. La modification législative de 2010 a établi une distinction entre trois catégories de méthodes de collecte de données : les méthodes ordinaires, les méthodes spécifiques et les méthodes exceptionnelles.

Ces catégories se différencient par leur caractère plus ou moins intrusif à l'égard de la personne à laquelle la méthode est appliquée.

B.1.4. L'exposé des motifs du projet de loi qui est devenu la loi attaquée du 30 mars 2017 mentionne : « Après cinq années d'application de la loi du 4 février 2010Documents pertinents retrouvés type loi prom. 04/02/2010 pub. 10/03/2010 numac 2010009144 source service public federal justice Loi relative aux méthodes de recueil des données par les services de renseignement et de sécurité fermer relative aux méthodes de recueil des données par les services de renseignement et de sécurité (loi MRD), qui a modifié la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer relative aux services de renseignement et de sécurité (loi organique ou LRS), une première évaluation a été effectuée.

Il en ressort un bilan positif. [...].

Certains problèmes ont néanmoins été pointés du doigt, notamment quant aux procédures à suivre, qui empêchent parfois un recours rapide et efficace aux méthodes. [...] D'autres problèmes se posent simplement parce que certaines dispositions ne sont pas très claires ou parce que certaines situations n'ont pas été envisagées, ou en raison d'évolutions technologiques.

Sans toucher ni aux méthodes existantes, ni aux garanties prévues pour protéger les droits fondamentaux des citoyens, ni aux différents contrôles, le présent projet de loi vise à améliorer et à clarifier la loi organique en répondant aux problèmes opérationnels rencontrés » (Doc. parl., Chambre, 2015-2016, DOC 54-2043/001, pp. 4-5).

Quant au fond En ce qui concerne le premier moyen B.2. Le premier moyen est dirigé contre l'article 2, § 3, de la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer, tel qu'il a été inséré par l'article 4, 4°, de la loi du 30 mars 2017Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/03/2017 pub. 28/04/2017 numac 2017011752 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 30 novembre 1998 organique des services de renseignement et de sécurité et l'article 259bis du Code pénal fermer. Selon la partie requérante, la nouvelle règle en matière de notification au citoyen violerait les articles 10, 11 et 22 de la Constitution, lus ou non en combinaison avec les articles 6, 8 et 13 de la Convention européenne des droits de l'homme, étant donné que le législateur a opté pour une notification « passive », alors que la Cour aurait clairement indiqué par son arrêt n° 145/2011 du 22 septembre 2011 que seule une notification « active » serait conforme aux normes de référence précitées.

B.3. L'article 4, 4°, attaqué, de la loi du 30 mars 2017Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/03/2017 pub. 28/04/2017 numac 2017011752 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 30 novembre 1998 organique des services de renseignement et de sécurité et l'article 259bis du Code pénal fermer dispose : « à la place du paragraphe 3, annulé par l'arrêt n° 145/2011 de la Cour constitutionnelle, il est inséré [dans l'article 2] un paragraphe 3 rédigé comme suit : ' § 3. Sans préjudice de la loi du 11 décembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 11/12/1998 pub. 03/02/1999 numac 1999009051 source ministere de la justice Loi transposant la directive 95/46/CE du 24 octobre 1995 du Parlement européen et du Conseil relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement de données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données type loi prom. 11/12/1998 pub. 07/05/1999 numac 1999007004 source ministere de la defense nationale Loi relative à la classification et aux habilitations de sécurité fermer relative à la classification et aux habilitations, attestations et avis de sécurité, de la loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de l'administration et de la loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée à l'égard des traitements de données à caractère personnel et à la requête de toute personne ayant un intérêt personnel et légitime qui relève de la juridiction belge, le dirigeant du service informe par écrit cette personne qu'elle a fait l'objet d'une méthode visée aux articles 18/12, 18/14 ou 18/17, à condition que : 1° une période de plus de dix ans se soit écoulée depuis la fin de la méthode;2° la notification ne puisse nuire à une enquête de renseignement;3° aucun manquement aux obligations visées aux articles 13, alinéa 3, et 13/4, alinéa 2 ne soit commis;4° la notification ne puisse porter atteinte aux relations que la Belgique entretient avec des Etats étrangers et des institutions internationales ou supranationales. Dans l'hypothèse où la requête est irrecevable ou que la personne concernée n'a pas fait l'objet d'une méthode visée aux articles 18/12, 18/14 ou 18/17 ou lorsque les conditions pour la notification ne sont pas remplies, le dirigeant du service informe la personne qu'il n'y a pas lieu de donner suite à sa requête en application du présent paragraphe.

Dans l'hypothèse où la requête est recevable, que la personne a fait l'objet d'une méthode visée aux articles 18/12, 18/14 ou 18/17 et que les conditions pour la notification sont remplies, le dirigeant du service lui indique la méthode mise en oeuvre et sa base légale.

Le dirigeant du service de renseignement et de sécurité concerné informe le Comité permanent R de chaque requête d'information et de la réponse fournie, et transmet une motivation succincte. L'application de cette disposition fait l'objet du rapport du Comité permanent R à la Chambre des représentants visé à l'article 35, § 2, de la loi du 18 juillet 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 18/07/1991 pub. 04/04/2018 numac 2018030682 source service public federal interieur Loi organique du contrôle des services de police et de renseignement et de l'Organe de coordination pour l'analyse de la menace. - Coordination officieuse en langue allemande fermer organique du contrôle des services de police et de renseignement et de l'Organe de coordination pour l'analyse de la menace.

Le Roi fixe, par arrêté délibéré en Conseil des ministres, après avis du Conseil national de sécurité, les modalités auxquelles la requête doit satisfaire. ' ».

B.4.1. L'article 2, § 3, de la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer, dans la rédaction qui était la sienne lorsqu'il a fait l'objet du recours ayant donné lieu à l'arrêt n° 145/2011 de la Cour, disposait : « Sans préjudice de la loi du 11 décembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 11/12/1998 pub. 03/02/1999 numac 1999009051 source ministere de la justice Loi transposant la directive 95/46/CE du 24 octobre 1995 du Parlement européen et du Conseil relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement de données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données type loi prom. 11/12/1998 pub. 07/05/1999 numac 1999007004 source ministere de la defense nationale Loi relative à la classification et aux habilitations de sécurité fermer relative à la classification et aux habilitations, attestations et avis de sécurité, de la loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de l'administration et de la loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée à l'égard des traitements de données à caractère personnel, à la requête de toute personne physique justifiant d'un intérêt légitime, le dirigeant du service avise la personne concernée par écrit qu'elle a fait l'objet d'une méthode visée à l'article 18/2, § § 1er et 2, à condition : 1° qu'un délai de plus de cinq ans se soit écoulé depuis qu'il a été mis fin à la méthode;2° que, depuis qu'il a été mis fin à la méthode, aucune nouvelle donnée n'ait été recueillie au sujet du demandeur. L'information communiquée précise le cadre juridique au sein duquel le service a été autorisé à mettre en oeuvre la méthode.

Le dirigeant du service concerné informe la commission de toute demande d'information et de la réponse donnée.

Le Roi fixe, par arrêté royal délibéré en Conseil des Ministres, après avis du Comité ministériel du renseignement et de la sécurité, les modalités suivant lesquelles l'information visée à l'alinéa 1er est communiquée ».

B.4.2. Par son arrêt n° 145/2011, la Cour a annulé cette disposition sur la base des motifs suivants : « B.86. La question de la notification ultérieure de mesures de surveillance est indissociablement liée au caractère effectif des recours juridictionnels et donc à l'existence de garanties effectives contre les abus; s'il n'est pas avisé des mesures prises à son insu, l'intéressé ne peut guère, en principe, en contester rétrospectivement la légalité en justice. [...] B.88. Le même souci de préserver l'équilibre précité peut justifier qu'un certain délai doive s'écouler entre la fin de la mesure et la notification prévue par la disposition attaquée. La nécessité, résultant de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, d'informer la personne concernée après la cessation de la méthode de renseignement ne peut en effet compromettre l'efficacité de la méthode concernée (CEDH, 29 juin 2006, Weber et Saravia c.

Allemagne, § 135; CEDH, 6 septembre 1978, Klass et autres c.

Allemagne, §§ 57 et 58, et CEDH, 26 mars 1987, Leander c. Suède, § 66). [...] S'il est souhaitable d'informer la personne concernée après la cessation de la méthode spécifique ou exceptionnelle de collecte de données, les dispositions constitutionnelles et conventionnelles invoquées dans le moyen n'exigent pas nécessairement une notification systématique. Une telle obligation peut en effet être de nature à mettre en péril la finalité de la méthode, rompant ainsi de manière disproportionnée le juste équilibre voulu par le législateur. Une notification sur demande permet à la fois de ne pas limiter de manière excessive la confidentialité de l'enquête et de préserver le droit qu'a toute personne de vérifier si elle a fait l'objet d'une telle méthode. Il n'en demeure pas moins que la personne qui a fait l'objet de la méthode doit aussi en être informée dès que, selon la commission administrative, une telle notification est possible sans compromettre le but de la surveillance.

Le deuxième moyen est fondé dans cette mesure.

B.89. Un dernier grief est dirigé contre l'article 2, § 3, attaqué, dans la mesure où celui-ci n'est applicable qu'aux personnes physiques et non aux personnes morales. L'article 2, § 3, mentionne, en effet, expressément ' à la requête de toute personne physique '. [...] B.92. L'article 2, § 3, de la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer viole les articles 10 et 11 de la Constitution, combinés, d'une part, avec l'article 22 de celle-ci et avec l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, en ce qu'il ne prévoit de notification qu'à la requête de toute personne justifiant d'un intérêt légitime, sans prévoir qu'une notification doit également avoir lieu à l'initiative des services concernés dès l'instant où la commission administrative juge qu'une telle notification est possible et, d'autre part, avec les articles 6 et 13 de ladite Convention, en ce qu'il exclut les personnes morales de son champ d'application. [...] ».

B.5.1. L'avant-projet de loi à l'origine de la loi attaquée ne contenait pas de disposition réintroduisant une obligation de notification à la personne concernée qu'elle a fait l'objet d'une méthode de recueil des données (Doc. parl., Chambre, 2015-2016, DOC 54-2043/001, p. 17).

Il ressort de l'exposé des motifs de la loi attaquée que le législateur considérait que la mise en place d'une obligation de notification était difficilement conciliable avec le modus operandi des services de renseignement et qu'elle mettait en danger l'efficacité des activités de ces services, dont le principe même du travail est d'agir « sans attirer l'attention des cibles » (ibid., p. 18). Le législateur estimait par ailleurs que les droits des citoyens étaient suffisamment assurés par d'autres garanties prévues par la loi, telles que les procédures à suivre pour mettre en oeuvre les méthodes de recueil des données; les principes de proportionnalité et de subsidiarité; le contrôle BIM par la commission administrative chargée de la surveillance des méthodes spécifiques et exceptionnelles de recueil de données par les services de renseignement et de sécurité (dite « Commission BIM » ou « Commission MRD », ci-après désignée : « Commission BIM »); le contrôle général du Comité permanent R en application de la loi du 18 juillet 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 18/07/1991 pub. 04/04/2018 numac 2018030682 source service public federal interieur Loi organique du contrôle des services de police et de renseignement et de l'Organe de coordination pour l'analyse de la menace. - Coordination officieuse en langue allemande fermer organique du contrôle des services de police et de renseignement et de l'Organe de coordination pour l'analyse de la menace; la possibilité pour le citoyen de porter plainte auprès du Comité permanent R en application de l'article 43/4 de la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer et de la loi du 18 juillet 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 18/07/1991 pub. 04/04/2018 numac 2018030682 source service public federal interieur Loi organique du contrôle des services de police et de renseignement et de l'Organe de coordination pour l'analyse de la menace. - Coordination officieuse en langue allemande fermer; des dispositions du Code d'instruction criminelle (ibid., p. 19). Il était aussi fait mention de la situation dans d'autres pays européens (ibid., p. 20).

B.5.2. A la suite des avis donnés sur l'avant-projet de loi par la section de législation du Conseil d'Etat, par la Commission BIM, par le Comité permanent R et par la Commission de protection de la vie privée, le législateur a finalement introduit une forme de notification pour certaines méthodes exceptionnelles visées aux articles 18/12, 18/14 et 18/17 de la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer.

Il entendait ainsi « répondre à l'arrêt [n° 145/2011] de la Cour constitutionnelle tout en tentant de trouver un juste équilibre entre le droit à un recours effectif pour toute personne et la protection des missions de sécurité nationale, du modus operandi et des sources des services de renseignement » (ibid., p. 20).

B.5.3. Les travaux préparatoires mentionnent ce qui suit à propos du nouveau système de notification introduit par la loi attaquée : « Le projet suit l'avis de la Commission de la protection de la vie privée qui estime qu'une forme limitée de notification des méthodes exceptionnelles les plus intrusives en tenant compte de plusieurs restrictions pourrait répondre aux exigences de l'article 13 de la Convention européenne des droits de l'homme et de la jurisprudence.

Les méthodes retenues dans le projet sont celles visées aux articles 18/12, 18/14 ou 18/17. Ce choix s'inspire de la loi néerlandaise.

Lorsqu'une de ces méthodes a été mise en oeuvre, d'autres paramètres entrent en ligne de compte pour décider s'il y a lieu de procéder à une notification : - une période de plus de 10 ans s'est écoulée depuis la fin de la méthode; - la notification ne porte pas préjudice à une enquête de renseignement; - la notification ne met pas en danger une source; - la notification ne porte pas atteinte aux relations internationales entretenues par la Belgique.

En outre, la notification ne peut avoir lieu que sans préjudice de la loi du 11 décembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 11/12/1998 pub. 03/02/1999 numac 1999009051 source ministere de la justice Loi transposant la directive 95/46/CE du 24 octobre 1995 du Parlement européen et du Conseil relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement de données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données type loi prom. 11/12/1998 pub. 07/05/1999 numac 1999007004 source ministere de la defense nationale Loi relative à la classification et aux habilitations de sécurité fermer relative à la classification et aux habilitations, attestations et avis de sécurité, [...] de la loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de l'administration et de la loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée à l'égard des traitements de données à caractère personnel.

Par ailleurs, il va de soi que la notification ne peut pas non plus mettre en péril une enquête judiciaire.

Si la requête n'est pas recevable, si la personne n'a pas fait l'objet d'une des trois méthodes visées ou si ces dernières conditions ne sont pas remplies, le service concerné répond qu'il n'y a pas lieu de donner suite à la requête en application de l'article 2, § 3.

Dans le cas contraire, le dirigeant du service indique au requérant la méthode mise en oeuvre et sa base légale, soit les articles 18/12, 18/14 ou 18/17.

Un délai de 10 ans est justifié par l'action sur le long terme des services de renseignement. Il faut observer que beaucoup d'organisations terroristes ou de services de renseignement offensifs effectuent leurs activités criminelles et d'espionnage sur le long terme. Les premières phases d'identification, d'approche, de recrutement et d'activation de personnes cibles ou de cellules dormantes peuvent être espacées par de nombreuses années. Par conséquent, l'écoulement d'un délai de 5 ans, comme fixé dans l'ancienne disposition sur la notification, après la fin d'une méthode exceptionnelle est trop court. Entre-temps, d'autres méthodes sont peut-être toujours en cours ou la personne cible est peut-être simplement dans l'attente d'une activation. Le danger existe encore.

De nombreuses années sont nécessaires avant de pouvoir conclure qu'une information collectée par un service de renseignement peut être notifiée à une personne sans mettre en péril l'ensemble de l'enquête sur l'organisation terroriste surveillée ou sur un réseau d'espions.

Par ailleurs, il est caractéristique des activités d'espionnage et d'ingérence par les services de renseignement étrangers, d'être en cours en permanence et pour les agents étrangers de s'alterner continuellement. Une enquête de renseignement portant sur de tels phénomènes est par [conséquent] toujours active.

Une copie de la notification et la motivation de son contenu sont transmises au Comité R. Le choix du Comité R s'explique pour trois raisons : - pour vérifier si une notification ne porte pas préjudice à une enquête de renseignement, une analyse de l'ensemble du dossier doit être effectuée, et non uniquement des données collectées via les méthodes spécifiques et exceptionnelles. Cela dépasse donc la compétence de la Commission BIM; - c'est le Comité R qui traitera l'éventuelle plainte de la personne concernée en application de l'article 43/4 LRS; - dans ses rapports annuels à la Commission de suivi de la Chambre des représentants, le Comité permanent R devra accorder une attention particulière à manière dont les deux services de renseignement et de sécurité utilisent l'article 2, § 3, LRS. Le Roi fixe les modalités de la requête, notamment les mentions qui doivent y figurer (nom, résidence,...) » (Doc. parl., Chambre, 2015-2016, DOC 54-2043/001, pp. 24-25).

B.6. Comme la notification visée par la disposition annulée par l'arrêt de la Cour n° 145/2011, la notification visée à l'article 2, § 3, précité, de la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer, tel qu'introduit par l'article 4, 4°, attaqué, de la loi du 30 mars 2017Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/03/2017 pub. 28/04/2017 numac 2017011752 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 30 novembre 1998 organique des services de renseignement et de sécurité et l'article 259bis du Code pénal fermer, correspond à une « notification sur demande » et non à une notification active, en ce sens que l'initiative de la notification doit émaner de toute personne ayant un intérêt personnel et légitime qui relève de la juridiction belge, et non du dirigeant du service lui-même.

B.7.1. Le législateur a considéré qu'il était irréalisable de mettre en place une obligation de notification active. Les travaux préparatoires mentionnent : « [...] une notification active n'a pas été prévue. Une telle notification active impliquerait un examen constant et quotidien des dossiers pour vérifier s'il faut informer les personnes concernées.

Etant donné les priorités fixées aux services de renseignement et de sécurité, cette notification active est irréalisable.

Quand bien même la Commission BIM ou le Comité R prendrait cette notification à sa charge, une analyse de l'ensemble de l'enquête devrait toujours être faite in fine par un agent d'un service de renseignement pour s'assurer que la notification ne portera pas préjudice à ladite enquête » (ibid., pp. 20-21).

B.7.2. Lors de l'examen de la disposition attaquée alors en projet au sein de la commission de la Justice de la Chambre, des députés ont interrogé le ministre de la Justice sur le respect de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme et de l'arrêt n° 145/2011 ainsi que sur les raisons pour lesquelles la procédure de notification alternative préconisée par la Commission BIM n'avait pas été retenue (Doc. parl., Chambre, 2015-2016, DOC 54-2043/005, pp. 16 et 22).

Le ministre de la Justice leur a répondu : « En ce qui concerne l'obligation de notification, le ministre estime que la Cour constitutionnelle a fait preuve d'une grande sévérité. Il paraît quand même étrange d'informer en tout cas après dix ans des personnes dangereuses ou potentiellement dangereuses du fait que les services de renseignement les considéraient comme telles. En matière de contrôle des services de renseignement, la Belgique est l'un des pays les plus progressistes du Conseil de l'Europe » (ibid., p. 31). « [...] il est évident qu'une notification active [...] est une obligation lourde qui peut mettre l'enquête en péril. En effet, ce n'est pas parce qu'un délai de 5 ou 10 ans s'est écoulé que la personne en question n'est pour autant plus impliquée. C'est pour cette raison que le projet de loi ne prévoit pas de système de notification active.

De plus, [le ministre] fait remarquer que la procédure initiale a été élargie aux personnes morales.

S'il a été décidé de ne pas tenir compte des remarques de certaines instances, c'est parce que le gouvernement est convaincu que l'équilibre de notre système, à savoir la protection juridique du citoyen d'une part et la sécurité de l'Etat et de la population d'autre part, a été assuré par la procédure mise en oeuvre dans le projet de loi.

Comme souligné lors de la discussion générale, l'ordre juridique belge contient plusieurs garanties qui, placées dans une perspective internationale en matière de protection juridique, sont extraordinaires. Ainsi, les procédures en matière d'informations ordinaires, spécifiques et exceptionnelles, le contrôle indépendant de la Commission MRD et le contrôle juridictionnel du Comité R, la surveillance générale des procédures dans le chef du Comité R, les procédures juridictionnelles auprès de l'organe d'appel pour autorisation de sécurité et auprès du Conseil d'Etat, la procédure d'avis préjudiciel auprès du Comité R dans le cadre d'une procédure devant les instances correctionnelles et le droit de regard par le biais de la Commission vie privée. Le gouvernement estime que cet équilibre et cette protection juridique musclée contrebalancent, dans le respect du principe de proportionnalité, le système de notification passive.

Le contrôle externe est suffisamment assuré dans la mesure où le service de renseignement doit informer le Comité R de chaque demande de renseignement. [...] Selon le ministre, ce qui précède justifie le fait qu'une notification passive est suffisante, voire même indiquée » (ibid., pp. 36-37).

B.8.1. L'article 22 de la Constitution dispose : « Chacun a droit au respect de sa vie privée et familiale, sauf dans les cas et conditions fixés par la loi.

La loi, le décret ou la règle visée à l'article 134 garantissent la protection de ce droit ».

L'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme dispose : « 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ». B.8.2. Le Constituant a recherché la plus grande concordance possible entre l'article 22 de la Constitution et l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme (Doc. parl., Chambre, 1992-1993, n° 997/5, p. 2).

La portée de cet article 8 est analogue à celle de la disposition constitutionnelle précitée, de sorte que les garanties que fournissent ces deux dispositions forment un tout indissociable.

B.8.3. Le droit au respect de la vie privée et familiale a pour objet essentiel de protéger les personnes contre les immixtions dans leur intimité, leur vie familiale, leur domicile ou leur correspondance. La proposition qui a précédé l'adoption de l'article 22 de la Constitution insistait sur « la protection de la personne, la reconnaissance de son identité, l'importance de son épanouissement et celui de sa famille », et elle soulignait la nécessité de protéger la vie privée et familiale « des risques d'ingérence que peuvent constituer, notamment par le biais de la modernisation constante des techniques de l'information, les mesures d'investigation, d'enquête et de contrôle menées par les pouvoirs publics et organismes privés, dans l'accomplissement de leurs fonctions ou de leurs activités » (Doc. parl., Sénat, S.E. 1991-1992, n° 100-4/2°, p. 3).

Cette proposition indiquait également que le législateur « ne pourrait en aucun cas vider de sa substance le droit au respect de la vie privée et familiale, sous peine d'enfreindre la règle constitutionnelle, en plus des règles internationales » (ibid.).

B.8.4. L'article 22 de la Constitution, lu en combinaison avec l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, exige que toute ingérence des autorités dans le droit au respect de la vie privée soit prescrite par une disposition législative, suffisamment précise, corresponde à un besoin social impérieux et soit proportionnée à l'objectif légitime poursuivi par celle-ci. Ces dispositions engendrent de surcroît l'obligation positive, pour l'autorité publique, de prendre des mesures qui assurent le respect effectif de la vie privée, même dans la sphère des relations entre les individus (CEDH, 27 octobre 1994, Kroon et autres c. Pays-Bas, § 31; grande chambre, 12 novembre 2013, Söderman c. Suède, § 78).

La frontière entre les obligations positives et les obligations négatives qui découlent des dispositions précitées ne se prête toutefois pas à une définition précise. Les principes applicables aux unes et aux autres sont comparables. Dans les deux cas, il faut avoir égard au juste équilibre à ménager entre les intérêts concurrents de l'individu concerné et ceux de la société.

B.9. L'article 2, § 3, alinéa 1er, de la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer prévoit qu'à la requête de toute personne ayant un intérêt personnel et légitime qui relève de la juridiction belge, le dirigeant du service informe par écrit cette personne qu'elle a fait l'objet d'une méthode visée aux articles 18/12, 18/14 ou 18/17 de la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer.

Il s'en déduit que le mécanisme de « notification sur demande » prévu par la disposition attaquée concerne exclusivement certaines méthodes exceptionnelles de collecte de données, à savoir (1) l'inspection de lieux non accessibles au public à l'aide ou non de moyens techniques et du contenu d'objets verrouillés ou non qui s'y trouvent, ainsi que l'enlèvement de ces objets et le replacement de ceux-ci (article 18/12), (2) l'ouverture et la prise de connaissance du courrier confié ou non à un opérateur postal (article 18/14) et (3) l'interception, la prise de connaissance et l'enregistrement de communications (article 18/17). En revanche, il ne s'applique ni aux méthodes ordinaires, ni aux méthodes spécifiques, ni aux méthodes exceptionnelles visées aux articles 18/11, 18/13, 18/15 et 18/16 de la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer.

En outre, quatre conditions doivent être réunies pour qu'une notification puisse intervenir : (1°) une période de plus de dix ans doit s'être écoulée depuis la fin de la méthode; (2°) la notification ne peut nuire à une enquête de renseignement; (3°) aucun manquement aux obligations visées aux articles 13, alinéa 3, et 13/4, alinéa 2, ne doit avoir été commis et (4°) la notification ne peut porter atteinte aux relations que la Belgique entretient avec des Etats étrangers et des institutions internationales ou supranationales (article 2, § 3, alinéa 1er, in fine).

Lorsque le dirigeant du service constate que la requête est recevable, que la personne a fait l'objet d'une méthode visée aux articles 18/12, 18/14 ou 18/17 et que les quatre conditions pour la notification précitées sont remplies, il indique à la personne concernée la méthode mise en oeuvre et sa base légale (article 2, § 3, alinéa 3). Dans le cas contraire, il informe la personne qu'il n'y a pas lieu de donner suite à sa requête (article 2, § 3, alinéa 2).

B.10. L'examen et le contrôle des méthodes de surveillance secrète peuvent intervenir à trois stades : lorsqu'on ordonne la surveillance, pendant qu'on la mène ou après qu'elle a cessé (CEDH, 13 septembre 2018, Big brother watch et autres c. Royaume-Uni, § 309; 19 juin 2018, Centrum för Rättvisa c. Suède, § 105; grande chambre, 4 décembre 2015, Roman Zakharov c. Russie, § 233).

En ce qui concerne le troisième stade, c'est-à-dire lorsque la surveillance a cessé, la Cour européenne des droits de l'homme a jugé : « [...] la question de la notification a posteriori de mesures de surveillance est indissolublement liée à celle de l'effectivité des recours judiciaires et donc à l'existence de garanties effectives contre les abus des pouvoirs de surveillance. La personne concernée ne peut guère, en principe, contester rétrospectivement devant la justice la légalité des mesures prises à son insu, sauf si on l'avise de celles-ci (Klass et autres, précité, § 57, et Weber et Saravia, décision précitée, § 135) ou si - autre cas de figure -, soupçonnant que ses communications font ou ont fait l'objet d'interceptions, la personne a la faculté de saisir les tribunaux, ceux-ci étant compétents même si le sujet de l'interception n'a pas été informé de cette mesure (Kennedy, précité, § 167) » (CEDH, grande chambre, 4 décembre 2015, Roman Zakharov c. Russie, § 234. Voir aussi : CEDH, 13 septembre 2018, Big brother watch et autres c. Royaume-Uni, § 310; 19 juin 2018, Centrum för Rättvisa c. Suède, § 106).

B.11. Lorsqu'elles mettent en balance l'intérêt de l'Etat défendeur à protéger la sécurité nationale au moyen de méthodes de surveillance secrète, d'une part, et la gravité de l'ingérence dans l'exercice du droit au respect de la vie privée, d'autre part, les autorités nationales disposent d'une certaine marge d'appréciation dans le choix des moyens propres à atteindre le but légitime que constitue la protection de la sécurité nationale (CEDH, 13 septembre 2018, Big brother watch et autres c. Royaume-Uni, § 308; 19 juin 2018, Centrum för Rättvisa c. Suède, § 104; grande chambre, 4 décembre 2015, Roman Zakharov c. Russie, § 232. Voir aussi : CEDH, 12 janvier 2016, Szabó et Vissy c. Hongrie, § 57; 18 mai 2010, Kennedy c. Royaume-Uni, § § 153-154; décision, 29 juin 2006, Weber et Saravia c. Allemagne, § 106; 6 septembre 1978, Klass et autres c. Allemagne, § § 49, 50 et 59).

Selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, il incombe au premier chef aux Etats, conformément au principe de subsidiarité, de garantir le respect des droits et libertés définis dans la Convention, les autorités nationales, en particulier les juges nationaux, étant en principe mieux placées pour évaluer la proportionnalité d'une limitation aux droits et libertés au regard des faits et des réalités qui caractérisent la société concernée.

Il en découle que l'appréciation d'une limitation à un droit fondamental par le juge national peut conduire à ce que le niveau de protection imposé au regard de la situation nationale soit supérieur à celui que la Cour européenne des droits de l'homme prévoit.

B.12. Par son arrêt n° 145/2011 du 22 septembre 2011, la Cour a jugé que l'ancien article 2, § 3, de la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer, tel qu'introduit par l'article 2, 3°, de la loi du 4 février 2010Documents pertinents retrouvés type loi prom. 04/02/2010 pub. 10/03/2010 numac 2010009144 source service public federal justice Loi relative aux méthodes de recueil des données par les services de renseignement et de sécurité fermer, viole les articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec l'article 22 de celle-ci et avec l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, en ce qu'il ne prévoit de notification qu'à la requête de toute personne justifiant d'un intérêt légitime, sans prévoir qu'une notification doit également avoir lieu à l'initiative des services concernés dès l'instant où une telle notification est possible sans compromettre le but de la surveillance (B.86, B.88 et B.92).

B.13. La même conclusion s'impose pour l'article 2, § 3, de la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer, tel qu'il a été inséré par l'article 4, 4°, de la loi du 30 mars 2017Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/03/2017 pub. 28/04/2017 numac 2017011752 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 30 novembre 1998 organique des services de renseignement et de sécurité et l'article 259bis du Code pénal fermer.

B.14. En effet, la circonstance que l'ingérence dans le droit au respect de la vie privée d'une personne est effectuée à son insu en augmente la gravité, ce qui implique qu'elle soit entourée des garanties les plus élevées.

La circonstance qu'une méthode de surveillance secrète a pris fin ne fait pas disparaitre l'ingérence importante dans le droit au respect de la vie privée de cette personne. Une certaine information donnée a posteriori à la personne ne fait pas davantage disparaître cette ingérence. En effet, le fait qu'elle en ait été informée ne signifie pas qu'elle y ait consenti.

B.15.1. Comme la Cour l'a jugé par l'arrêt n° 145/2011 (B.86), la question de la notification ultérieure de méthodes de surveillance est indissociablement liée au caractère effectif des recours juridictionnels et donc à l'existence de garanties effectives contre les abus; s'il n'est pas avisé des méthodes appliquées à son insu, l'intéressé ne peut guère, en principe, en contester rétrospectivement la légalité en justice.

L'absence de notification a posteriori aux personnes touchées par des méthodes de surveillance secrète, dès la levée de celles-ci, ne saurait en soi justifier la conclusion que l'ingérence n'est pas conforme aux normes de référence citées en B.2, car c'est précisément cette absence d'information qui assure l'efficacité de la méthode constitutive de l'ingérence.

En revanche, il y a lieu d'aviser la personne concernée après la levée des méthodes de surveillance dès que la notification peut être donnée sans compromettre le but de la restriction.

B.15.2. La notification d'une méthode de surveillance secrète sert à informer la personne concernée qu'elle a fait l'objet d'une telle mesure, ainsi que des fondements qui l'ont motivée, le cas échéant pour permettre à cette personne de contester la légalité de la méthode en justice en connaissance de cause.

A défaut de notification active, la possibilité pour les justiciables qui ont fait l'objet d'une mesure de surveillance secrète d'avoir accès à un organe juridictionnel pour contester la légalité de celle-ci est uniquement théorique. En effet, en vertu de la disposition attaquée, les personnes soumises à certains types de méthodes exceptionnelles de collecte de données reçoivent notification du fait qu'elles ont fait l'objet d'une telle méthode uniquement à la suite de la requête d'information qu'elles adressent d'initiative au dirigeant du service et si les conditions énumérées en B.9 sont réunies. Parmi celles-ci figurent l'exigence que la requête soit recevable et celle qu'un délai de plus de dix ans se soit écoulé depuis la fin de la méthode. Il est toutefois peu probable qu'une personne qui n'a pas été informée du fait qu'elle a fait l'objet d'une mesure de surveillance secrète cherche à vérifier d'initiative et à intervalles réguliers si elle a ou non fait l'objet d'une telle méthode plus de dix ans auparavant.

B.15.3. Dès lors que la levée du secret est un préalable indispensable à l'exercice d'un recours effectif contre une méthode de surveillance secrète, il appartient au législateur de prévoir un mécanisme de notification active par lequel l'organe qu'il désigne porte à la connaissance de la personne concernée qu'elle a fait l'objet d'une méthode de surveillance secrète, dès que cette notification peut être donnée sans compromettre le but de la restriction.

B.16. Le premier moyen est fondé.

Il y a lieu d'annuler l'article 2, § 3, de la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer, tel qu'il a été inséré par l'article 4, 4°, de la loi du 30 mars 2017Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/03/2017 pub. 28/04/2017 numac 2017011752 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 30 novembre 1998 organique des services de renseignement et de sécurité et l'article 259bis du Code pénal fermer.

En ce qui concerne le deuxième moyen B.17. Le deuxième moyen est pris de la violation, par les articles 3, 12°, et 3, 12°/1, de la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer, tels qu'ils ont été insérés par l'article 5, e) et f), de la loi du 30 mars 2017Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/03/2017 pub. 28/04/2017 numac 2017011752 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 30 novembre 1998 organique des services de renseignement et de sécurité et l'article 259bis du Code pénal fermer, des articles 10, 11, 12, 15, 22 et 29 de la Constitution, lus ou non en combinaison avec divers articles de la Convention européenne des droits de l'homme et de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, avec l'article 17 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, avec les principes généraux de droit de la sécurité juridique, de la proportionnalité et de l'« autodétermination informationnelle » et avec l'article 5, paragraphe 4, du Traité sur l'Union européenne.

Selon la partie requérante, la loi attaquée donne une définition d'un « lieu accessible au public » et d'un « lieu non accessible au public non soustrait à la vue », mais la description de ce dernier serait à ce point imprécise qu'elle serait contraire à l'article 22 de la Constitution. Les mots « moyen ou artifice » utilisés dans cette même description seraient eux aussi insuffisamment précis.

B.18.1. Le Conseil des ministres estime que le deuxième moyen est irrecevable, étant donné qu'il n'y est formulé aucun grief concernant l'éventuelle inconstitutionnalité de la définition d'un « lieu accessible au public », inscrite à l'article 3, 12°, de la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer.

En ce qui concerne l'article 3, 12°/1, de la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer, le Conseil des ministres soutient que l'article attaqué ne met en oeuvre aucune disposition de droit européen et qu'il n'est pas démontré de quelle manière la situation de la partie requérante présenterait un point de rattachement avec le droit de l'Union européenne.

B.18.2. Dans le deuxième moyen, la partie requérante formule uniquement des griefs en ce qui concerne les notions de « lieu non accessible au public non soustrait à la vue » et de « moyen ou [d']artifice », de sorte qu'il y a lieu de limiter l'examen de constitutionnalité à l'article 3, 12°/1, tel qu'il a été inséré par l'article 5, f), attaqué, de la loi du 30 mars 2017Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/03/2017 pub. 28/04/2017 numac 2017011752 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 30 novembre 1998 organique des services de renseignement et de sécurité et l'article 259bis du Code pénal fermer.

La compatibilité de dispositions législatives avec les articles 7, 8, 11 et 52, paragraphe 1, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, lus en combinaison avec des dispositions constitutionnelles analogues ou avec les articles 10 et 11 de la Constitution, ne peut être examinée par la Cour qu'en ce que les dispositions attaquées mettent en oeuvre le droit de l'Union (CJUE, grande chambre, 26 février 2013, C-617/10, Aklagaren, points 17 et suivants).

Etant donné que la partie requérante ne démontre pas un lien de rattachement avec la mise en oeuvre du droit de l'Union, le moyen est irrecevable en ce qu'il est pris de la violation de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

B.18.3. Par conséquent, le deuxième moyen n'est recevable que dans la mesure où il fait valoir que l'article 3, 12°/1, de la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer, tel qu'il a été inséré par l'article 5, f), de la loi du 30 mars 2017Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/03/2017 pub. 28/04/2017 numac 2017011752 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 30 novembre 1998 organique des services de renseignement et de sécurité et l'article 259bis du Code pénal fermer, viole l'article 22 de la Constitution, lu ou non en combinaison avec l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme et avec l'article 17 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

B.19. L'article 17 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques dispose : « 1. Nul ne sera l'objet d'immixtions arbitraires ou illégales dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d'atteintes illégales à son honneur et à sa réputation. 2. Toute personne a droit à la protection de la loi contre de telles immixtions ou de telles atteintes ». B.20.1. L'article 5, f), attaqué, de la loi du 30 mars 2017Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/03/2017 pub. 28/04/2017 numac 2017011752 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 30 novembre 1998 organique des services de renseignement et de sécurité et l'article 259bis du Code pénal fermer dispose : « Dans l'article 3 de la [ loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer], modifié par les lois des 4 février 2010, 6 décembre 2015 et 21 avril 2016, les modifications suivantes sont apportées : [...] f) le 12°/1 est inséré, rédigé comme suit : ' 12°/1 " lieu non accessible au public non soustrait à la vue " : tout lieu auquel le public n'a pas accès et qui est visible de tous à partir de la voie publique sans moyen ou artifice, à l'exception de l'intérieur des bâtiments non accessibles au public;' ».

B.20.2. La modification législative précitée a pour conséquence que l'observation d'un « lieu non accessible au public non soustrait à la vue » au sens de l'article 3, 12°/1, de la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer, sans pénétrer dans ce lieu, est à présent possible à l'aide d'une méthode spécifique de renseignement et ne nécessite plus une méthode exceptionnelle de renseignement.

B.20.3. La définition des notions de « lieu accessible au public » et de « lieu non accessible au public non soustrait à la vue » est nécessaire pour délimiter les méthodes de renseignement spécifiques et exceptionnelles d'observation (Doc. parl., Chambre, 2015-2016, DOC 54-2043/001, p. 27). Le nouveau concept tend à permettre qu'un certain type d'observation, à savoir l'observation d'un lieu non accessible au public qui n'est pas soustrait à la vue, soit possible à l'aide d'une méthode spécifique de renseignement, alors qu'auparavant seule une méthode exceptionnelle de renseignement permettait d'y recourir : « L'assimilation est proposée dès lors que jusqu'à présent l'application d'une méthode exceptionnelle était requise en l'espèce, méthode bien trop lourde pour observer un jardinet, par exemple. Cela peut effectivement dépendre de la taille des personnes ou du fait qu'elles portent ou non des talons, mais chacun comprend bien que le but n'est pas d'utiliser des moyens, tels que des échelles » (Doc. parl., Chambre, 2016-2017, DOC 54-2043/005, p. 31).

La notion de « lieu non accessible au public non soustrait à la vue » est nouvelle : « L'objectif de cette modification est en lien avec l'application des articles 18/4 et 18/11 [...]. Lorsque, par exemple, une personne est suivie en rue, à partir du moment où elle se rend dans l'allée d'un domicile, il faut demander une méthode exceptionnelle. L'allée d'un domicile est en effet considérée comme une dépendance d'un domicile et elle bénéficie dès lors de la même protection légale que ce domicile.

Cette protection est exagérée dans la mesure où quiconque peut voir ce qui s'y passe si l'allée est visible à partir de la rue. Il est dès lors proposé que l'observation de l'allée, si elle n'est pas soustraite à la vue à partir de la rue, soit une méthode spécifique.

On considère une allée ou un jardinet comme "soustrait à la vue" lorsque, par exemple, celui-ci est caché derrière une haie de sapins et que l'occupant peut raisonnablement penser que sa vie privée sera respectée (' reasonable expectation of privacy ') » (Doc. parl., Chambre, 2015-2016, DOC 54-2043/001, pp. 27-28).

La loi dit explicitement que dès qu'il faut des moyens ou artifices pour observer un lieu non accessible au public, ce lieu doit être considéré comme soustrait à la vue.

Les travaux préparatoires précisent également que « le terme ' artifice ' est utilisé dans la loi dans son sens habituel à savoir manoeuvre, manipulation, truc, comportement sournois, savoir-faire pour obtenir quelque chose. Il est donc évidemment question d'artifice quand un agent se trouve sur une échelle ou le toit d'une voiture pour pouvoir regarder dans un jardin ou quand il doit pousser une haie ou quand un drone est utilisé. Il est également précisé que la notion ' non soustrait à la vue ' sera interprétée de manière restrictive » (ibid., p. 28).

B.21.1. L'article 8, paragraphe 2, de la Convention européenne des droits de l'homme n'admet d'ingérence dans l'exercice du droit au respect de la vie privée que pour des raisons de sécurité nationale, à condition que cette ingérence soit notamment prévue par une loi et que cette loi soit accessible à l'intéressé et précise. Ces exigences d'accessibilité et de prévisibilité de la loi visent à éviter tout arbitraire de la part de l'autorité publique. La loi est précise si les termes dont elle use permettent au citoyen d'estimer sans ambiguïté les conséquences qui peuvent découler de son application. La législation doit donner à chacun une indication suffisante sur les circonstances dans lesquelles et les conditions auxquelles elle habilite la puissance publique à recourir à des mesures affectant les droits protégés par la Convention (CEDH, grande chambre, 12 juin 2014, Fernàndez Martinez c. Espagne, § 117).

B.21.2. En conséquence, il doit être prévu de manière suffisamment précise dans quelles circonstances une observation est autorisée (CEDH, grande chambre, 4 mai 2000, Rotaru c. Roumanie, § 57; grande chambre, 4 décembre 2008, S. et Marper c. Royaume-Uni, § 99).

Le niveau requis de précision de la législation concernée - laquelle ne peut du reste parer à toute éventualité - dépend notamment, selon la Cour européenne des droits de l'homme, du domaine qu'elle est censée couvrir et du nombre et de la qualité de ses destinataires (CEDH, grande chambre, 4 décembre 2008, S. et Marper c. Royaume-Uni, §§ 95 et 96). Ainsi, la Cour européenne des droits de l'homme a jugé que l'exigence de prévisibilité dans des domaines liés à la sécurité nationale ne pouvait avoir la même portée que dans d'autres domaines (CEDH, 26 mars 1987, Leander c. Suède, § 51; 8 juin 2006, Lupsa c.

Roumanie, § 33).

De même, par son arrêt R.E. c. Royaume-Uni du 27 octobre 2015, la Cour européenne des droits de l'homme a jugé : « 122. Dans le contexte particulier des mesures de surveillance secrète, la Cour a estimé que la ' prévisibilité ' exige que le droit interne soit assez clair pour indiquer à tous de manière suffisante en quelles circonstances et sous quelles conditions il habilite la puissance publique à prendre pareilles mesures (voir, par exemple, la décision de recevabilité dans Weber et Saravia c. Allemagne (déc.), n° 54934/00, § 93 [...]). Il s'agit là d'un critère très semblable au critère - et qui est parfois examiné conjointement avec celui-ci - permettant de décider si une ingérence est ' nécessaire dans une société démocratique ' dans la poursuite d'un but légitime, à savoir si les garanties minimales contre les abus de pouvoir que la loi doit renfermer sont adéquates (voir Klass et autres c. Allemagne, précité, § 50; et Weber et Saravia c. Allemagne, précité, § 95) » (traduction libre).

B.21.3. De plus, la Cour européenne des droits l'homme a défini, dans son arrêt Weber et Saravia c. Allemagne du 29 juin 2006, les garanties minimales que la loi doit prévoir afin d'éviter tout abus de pouvoir : « 95. Dans sa jurisprudence relative aux mesures de surveillance secrète, la Cour énonce les garanties minimales suivantes contre les abus de pouvoir que la loi doit renfermer : la nature des infractions susceptibles de donner lieu à un mandat d'interception, la définition des catégories de personnes susceptibles d'être mises sur écoute, la fixation d'une limite à la durée de l'exécution de la mesure, la procédure à suivre pour l'examen, l'utilisation et la conservation des données recueillies, les précautions à prendre pour la communication des données à d'autres parties, et les circonstances dans lesquelles peut ou doit s'opérer l'effacement ou la destruction des enregistrements (voir, notamment, Huvig, précité, § 34, Amann, précité, § 76, Valenzuela Contreras, précité, § 46, et Prado Bugallo c. Espagne, n° 58496/00, § 30, 18 février 2003) ». Par son arrêt R.E. c. Royaume-Uni du 27 octobre 2015, la Cour européenne des droits de l'homme a également jugé : « 127. Il est exact que la Cour n'a généralement appliqué les critères stricts dégagés par l'arrêt Valenzuela Contreras que dans le contexte de l'interception des communications. Toutefois, elle a suggéré que la précision requise au niveau de la législation dépendra de toutes les circonstances de la cause et, en particulier, du degré d'ingérence dans les droits de l'individu protégés par l'article 8 de la Convention » (traduction libre).

B.22.1. L'article 3, 12°/1, de la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer définit un « lieu non accessible au public non soustrait à la vue » de manière positive, à savoir un lieu où « quiconque peut voir ce qui s'y passe » (Doc. parl., Chambre, 2015-2016, DOC 54-2043/001, p. 28) ou encore un lieu visible de tous à partir de la voie publique.

Il résulte de l'ensemble des explications figurant en B.20.3 que le législateur entendait par là la visibilité pour un simple passant présent par hasard sur la voie publique. Par conséquent, les mots « visible de tous à partir de la voie publique » renvoient à un lieu visible depuis la voie publique pour une personne dont la taille et la vue sont normales. En outre, le membre de phrase « non soustrait à la vue » doit être interprété de manière restrictive, ce qui a pour conséquence que dès que l'on peut raisonnablement douter du fait qu'un simple passant présent par hasard sur la voie publique puisse effectivement voir le lieu non public, il convient de considérer que ce lieu est soustrait à la vue.

Par ailleurs, l'article 3, 12°/1, mentionne aussi deux critères négatifs. Premièrement, la méthode spécifique de renseignement consistant à observer (article 18/4, § 2) un lieu non accessible au public, visible depuis la voie publique, ne peut être utilisée s'il s'agit de l'intérieur de ce lieu. Deuxièmement, cette méthode ne peut pas non plus être utilisée si le lieu non accessible au public n'est visible de tous à partir de la voie publique qu'à l'aide d'un « moyen ou artifice ».

Il convient donc de définir un « moyen » au sens de l'article 3, 12°/1, comme un outil qu'un simple passant présent par hasard et qui n'a pas d'intérêt particulier pour le lieu non accessible au public n'a pas sur lui, ou à tout le moins qu'il n'utiliserait pas pour voir ce lieu. Un « artifice » doit être défini comme une manoeuvre, une manipulation, un truc, un comportement sournois, une astuce qu'un simple passant présent par hasard et qui n'a pas d'intérêt particulier pour le lieu non accessible au public n'utiliserait pas pour voir ce lieu.

En conséquence, une telle interprétation d'un lieu « visible de tous à partir de la voie publique sans moyen ou artifice » est suffisamment claire et précise.

B.22.2. Par ailleurs, l'observation sans limite d'un « lieu non accessible au public non soustrait à la vue » n'est pas possible, étant donné que la méthode spécifique de l'observation est assortie de garanties minimales (articles 18/3, 43/2, 43/4 et 43/6 de la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer). Ces dernières suffisent en tant que garanties minimales légales (arrêt n° 145/2011 du 22 septembre 2011, B.40 à B.64).

B.22.3. En outre, la constatation qu'une observation est actuellement possible dans certains cas à l'aide d'une méthode spécifique de renseignement, rendant inutile le recours à une méthode exceptionnelle de renseignement, n'emporte en soi aucune violation. La modification d'une loi suppose nécessairement que la situation de ceux qui étaient soumis à la loi ancienne soit différente de la situation de ceux qui sont soumis à la loi nouvelle. Une telle différence de traitement n'est pas contraire en soi aux articles 10 et 11 de la Constitution, lus ou non en combinaison avec l'article 22 de la Constitution.

La différence de traitement entre certaines catégories de personnes qui découle de l'application de règles procédurales différentes dans des circonstances différentes n'est pas discriminatoire en soi. Il ne pourrait être question de discrimination que si la différence de traitement qui découle de l'application de ces règles de procédure entraînait une limitation disproportionnée des droits des personnes concernées, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

B.23. Il résulte de ce qui précède que la disposition attaquée ne viole pas l'article 22 de la Constitution, lu en combinaison avec l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme et avec l'article 17 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Le deuxième moyen n'est pas fondé.

En ce qui concerne le troisième moyen B.24. Le troisième moyen est pris de la violation, par l'article 3, 14°, a) et b), de la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer, tel qu'il a été inséré par l'article 5, g), de la loi du 30 mars 2017Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/03/2017 pub. 28/04/2017 numac 2017011752 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 30 novembre 1998 organique des services de renseignement et de sécurité et l'article 259bis du Code pénal fermer, des articles 10, 11, 12, 15, 22 et 29 de la Constitution, lus ou non en combinaison avec divers articles de la Convention européenne des droits de l'homme et de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, avec l'article 17 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, avec les principes généraux du droit de la sécurité juridique, de la proportionnalité et de l'« autodétermination informationnelle » ainsi qu'avec l'article 5, paragraphe 4, du Traité sur l'Union européenne.

La loi attaquée prévoit l'extension de l'article 3, 14°, de la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer. Alors que seul « un appareil utilisé pour la prise de photographies » n'était auparavant pas considéré comme un moyen technique, « un appareil mobile utilisé pour la prise d'images animées » n'est désormais plus non plus considéré comme un moyen technique dans certaines circonstances. Selon la partie requérante, la disposition attaquée permet aux services de renseignement de filmer à l'aide d'un appareil mobile des personnes, des choses ou des événements sans aucune limite de temps et sans contrôle externe dès que le dirigeant du service ou son délégué estime que la discrétion et la sécurité des agents ne sauraient être garanties.

La partie requérante fait également valoir qu'en réalité, le nouvel article 3, 14°, b), de la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer est superflu. Dans les cas où le service de renseignement sait au préalable que la discrétion et la sécurité de l'agent ne sauraient être garanties, l'on pourrait avoir recours à une méthode spécifique ou exceptionnelle de renseignement qui offre les garanties légales nécessaires. Si malgré tout, il apparaissait durant une observation que la discrétion et la sécurité de l'agent ne sauraient être garanties, il serait toujours possible de faire appel à la procédure d'extrême urgence partiellement verbale (articles 18/3, § 3, et 18/10, § 4, de la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer), qui offrirait bien plus de sécurité juridique et de garanties.

B.25.1. Le Conseil des ministres soutient que le troisième moyen est partiellement irrecevable. Les griefs formulés par la partie requérante ne porteraient que sur la prétendue violation de la vie privée (article 22 de la Constitution et article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme) et sur la violation du principe d'égalité, en conséquence de quoi les autres normes de référence invoquées par la partie requérante ne devraient pas être examinées.

B.25.2. Les griefs formulés par la partie requérante sont pris de la « violation grave de [la] vie privée » du citoyen, de sorte que seule l'éventuelle violation des articles 10, 11 et 22 de la Constitution, lus en combinaison avec l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, doit être examinée.

B.26.1. L'article 5, g), attaqué, de la loi du 30 mars 2017Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/03/2017 pub. 28/04/2017 numac 2017011752 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 30 novembre 1998 organique des services de renseignement et de sécurité et l'article 259bis du Code pénal fermer dispose : « Dans l'article 3 de la [ loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer], modifié par les lois des 4 février 2010, 6 décembre 2015 et 21 avril 2016, les modifications suivantes sont apportées : [...] g) au 14°, les modifications suivantes sont apportées : - dans le texte néerlandais, le mot ' hulpmiddel ' est remplacé par le mot ' middel '; - les mots ' à l'exception d'un appareil utilisé pour la prise de photographies ' sont remplacés par les mots ' à l'exception d ' : a) un appareil utilisé pour la prise de photographies;b) un appareil mobile utilisé pour la prise d'images animées lorsque la prise de photographies ne permet pas de garantir la discrétion et la sécurité des agents et à la condition que cette utilisation ait été préalablement autorisée par le dirigeant du service ou son délégué. Seules les images fixes jugées pertinentes sont conservées. Les autres images sont détruites dans le mois qui suit le jour de l'enregistrement; ' ».

B.26.2. L'article 5, g), de la loi du 30 mars 2017Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/03/2017 pub. 28/04/2017 numac 2017011752 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 30 novembre 1998 organique des services de renseignement et de sécurité et l'article 259bis du Code pénal fermer introduit une nouvelle exception à la notion de « moyen technique ». Avant cette modification législative, il avait déjà été précisé qu'un « appareil utilisé pour la prise de photographies » ne pouvait être considéré comme un moyen technique au sens de l'article 3, 14°, de la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer. L'article attaqué a ajouté à cela qu'un « appareil mobile utilisé pour la prise d'images animées » ne peut pas non plus être considéré comme un « moyen technique » au sens de l'article 3, 14°, si les deux conditions suivantes sont remplies cumulativement.

Premièrement, la prise de photographies ne permet pas de garantir la discrétion et la sécurité des agents. Deuxièmement, l'utilisation d'une caméra mobile pour la prise d'images animées est uniquement possible dans la mesure où elle a été autorisée au préalable par le dirigeant du service ou son délégué. L'article 3, 14°, précise encore que « seules les images fixes jugées pertinentes sont conservées » et que les « autres images sont détruites dans le mois qui suit le jour de l'enregistrement ».

L'effet de la modification législative précitée est limité, étant donné qu'elle a pour seule conséquence qu'à certaines conditions, les services de renseignement et de sécurité peuvent observer, au moyen d'une méthode ordinaire de renseignement, en utilisant une caméra mobile, des lieux accessibles au public, ainsi que les personnes et les objets qui s'y trouvent et les événements qui s'y déroulent (article 16/1, § 1er, de la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer).

B.26.3. Selon les travaux préparatoires, la « raison de cette exclusion est qu'il n'est pas toujours possible de savoir au préalable si une caméra sera nécessaire pour des raisons de discrétion ou de sécurité ou si un appareil photo sera suffisant. Si les services de renseignement et de sécurité doivent systématiquement demander l'utilisation d'une caméra mobile lors d'une surveillance pour le ' cas où ', la surveillance est alors toujours au minimum une méthode spécifique. Cela ne se justifie pourtant pas car l'atteinte à la vie privée n'est pas vraiment plus importante avec une caméra utilisée à titre temporaire par un agent que lors d'une surveillance avec un appareil photo. Par contre, quand une caméra est placée/fixée pendant toute la durée de la surveillance, l'atteinte à la vie privée est plus importante et justifie le recours à une méthode spécifique ou exceptionnelle. L'intrusion plus limitée dans la vie privée lors de l'utilisation d'une caméra mobile pour raison de discrétion et de sécurité s'explique également par le fait que l'agent qui décide de filmer à la place de prendre plusieurs photos cible les prises d'images, ce que ne fait pas une caméra fixe » (Doc. parl., Chambre, 2015-2016, DOC 54-2043/001, p. 29).

L'extension est aussi justifiée par « l'objectif [...] de réduire les risques pour la personne qui prend les photos » (Doc. parl., Chambre, 2016-2017, DOC 54-2043/005, p. 31). Utiliser une caméra mobile est « plus discret, et partant, moins dangereux » (ibid., pp. 37-38).

B.27. L'extension aux « appareils mobiles » de l'exception à la définition de la notion de « moyen technique » va de pair avec plusieurs garanties légales minimales.

Premièrement, il résulte de l'utilisation des mots « appareils mobiles » que l'exception ne concerne pas des caméras fixes observant un lieu déterminé durant une plus longue période sans être actionnées par un agent. L'observation d'un lieu accessible au public avec une caméra fixe revient à utiliser un moyen technique, ce qui n'est possible que par une méthode spécifique de renseignement (article 18/4, § 1er).

Deuxièmement, l'utilisation d'un appareil mobile est limitée à la situation dans laquelle la prise de photographies ne permet pas de garantir la discrétion et la sécurité des agents. L'utilisation d'un appareil mobile n'est donc autorisée que lorsqu'il n'est pas possible d'utiliser un appareil photographique pour observer un lieu accessible au public.

Troisièmement, l'utilisation d'un appareil mobile est soumise à l'autorisation préalable du dirigeant du service ou de son délégué; cette autorisation doit être donnée par écrit, sauf en cas d'extrême urgence (ibid., p. 38). L'autorisation préalable précitée est une garantie non prévue pour d'autres méthodes ordinaires de renseignement et fait office de garantie minimale compensatoire pour l'utilisation d'un appareil mobile.

Quatrièmement, seules les images fixes jugées pertinentes, autrement dit des photographies issues des enregistrements, peuvent être conservées. Les autres images doivent être détruites dans le mois qui suit le jour de l'enregistrement : « Les données récoltées par ces caméras mobiles ne pourront pas être conservées. Seules des photos pourront être reproduites via les caméras mobiles » (ibid., p. 38).

B.28.1. Ainsi que le fait valoir la partie requérante, il peut être admis que l'extension de l'exception à la définition de « moyen technique » est superflue en soi, étant donné que l'utilisation d'un appareil mobile lors d'une observation est toujours possible par une méthode spécifique ou exceptionnelle de renseignement.

Cependant, l'intention du législateur était précisément de permettre l'observation d'un lieu accessible au public à l'aide d'une méthode ordinaire de renseignement même lorsqu'il existe un risque que l'utilisation d'un appareil photographique ne suffise pas pour garantir la discrétion ou la sécurité de l'agent.

B.28.2. Compte tenu du fait que les méthodes ordinaires de renseignement sont moins attentatoires au droit au respect de la vie privée que les méthodes spécifiques et exceptionnelles de collecte de données et du fait que le législateur a entendu laisser une certaine souplesse dans le fonctionnement opérationnel des services de renseignement et de sécurité, il n'est pas sans justification raisonnable, pour l'utilisation de la méthode ordinaire, d'étendre l'exception à la définition de « moyen technique » et d'autoriser dans certaines circonstances l'utilisation d'un appareil mobile.

B.29. La partie requérante soutient également qu'« une énorme discordance est née entre l'observation dans le cadre de la procédure pénale et l'observation effectuée par les services de renseignement, alors qu'elle emporte dans les deux régimes une grave atteinte à la vie privée du citoyen ».

La partie requérante n'indique pas clairement de quelle manière la « discordance » en question créerait une limitation disproportionnée des droits des personnes concernées.

B.30. Le troisième moyen n'est pas fondé.

Par ces motifs, la Cour - annule l'article 2, § 3, de la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer « organique des services de renseignement et de sécurité », tel qu'il a été inséré par l'article 4, 4°, de la loi du 30 mars 2017Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/03/2017 pub. 28/04/2017 numac 2017011752 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 30 novembre 1998 organique des services de renseignement et de sécurité et l'article 259bis du Code pénal fermer « modifiant la loi du 30 novembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/11/1998 pub. 18/12/1998 numac 1998007272 source ministere de la defense nationale Loi organique des services de renseignement et de sécurité type loi prom. 30/11/1998 pub. 01/01/1999 numac 1998010046 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code judicaire relatives à la procédure en matière de louage de choses et de la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion fermer organique des services de renseignement et de sécurité et l'article 259bis du Code pénal »; - rejette le recours pour le surplus.

Ainsi rendu en langue néerlandaise, en langue française et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 14 mars 2019.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux Le président, A. Alen

^