publié le 09 avril 2019
Extrait de l'arrêt n° 156/2018 du 22 novembre 2018 Numéro du rôle : 6625 En cause : la question préjudicielle relative à l'article 11, § 2, alinéa 1 er , 4°, de la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l' La Cour constitutionnelle, composée des présidents F. Daoût et A. Alen, et des juges L. Lavrysen(...)
COUR CONSTITUTIONNELLE
Extrait de l'arrêt n° 156/2018 du 22 novembre 2018 Numéro du rôle : 6625 En cause : la question préjudicielle relative à l'article 11, § 2, alinéa 1er, 4°, de la
loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés
type
loi
prom.
15/12/1980
pub.
12/04/2012
numac
2012000231
source
service public federal interieur
Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives
type
loi
prom.
15/12/1980
pub.
20/12/2007
numac
2007000992
source
service public federal interieur
Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives
fermer sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers, dans sa version antérieure à la loi du 4 mai 2016, posée par le Conseil d'Etat.
La Cour constitutionnelle, composée des présidents F. Daoût et A. Alen, et des juges L. Lavrysen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke, T. Merckx-Van Goey, P. Nihoul, T. Giet et R. Leysen, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président F. Daoût, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet de la question préjudicielle et procédure Par arrêt n° 237.188 du 26 janvier 2017 en cause de Thierry Mbala Mintyene contre l'Etat belge, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 27 février 2017, le Conseil d'Etat a posé la question préjudicielle suivante : « L'article 11, § 2, de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers, dans sa version applicable au moment des faits, viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce que la décision de retirer le droit au séjour fondée sur le point 1°, 2° ou 3° de l'article 11, § 2, alinéa 1er, ne peut être prise que pendant une période limitée tandis que la décision de retirer le droit au séjour fondée sur le point 4° du même article 11, § 2, alinéa 1er, peut, même lorsque l'étranger concerné n'est pas l'auteur de la fraude, intervenir sans limite de temps ? ». (...) III. En droit (...) B.1.1. La question préjudicielle porte sur la compatibilité, avec les articles 10 et 11 de la Constitution, de l'article 11, § 2, de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers (ci-après : loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer), dans sa version applicable au moment des faits soumis au juge a quo, c'est-à -dire avant sa modification par la loi du 4 mai 2016 « portant des dispositions diverses en matière d'asile et de migration et modifiant la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer sur l'accès au séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers et la loi du 12 janvier 2007 sur l'accueil des demandeurs d'asile et de certaines autres catégories d'étrangers ».
B.1.2. Le juge a quo interroge la Cour sur le fait que la décision de retirer le droit au séjour fondée sur les 1°, 2°, ou 3° de l'article 11, § 2, alinéa 1er, ne peut être prise que pendant une période limitée, tandis que la décision de retirer le droit au séjour fondée sur le 4° du même article peut intervenir sans limite de temps, même lorsque l'étranger concerné n'est pas l'auteur de la fraude.
B.2.1. L'article 11, § 2, de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer trouve son origine dans une modification opérée par l'article 9 de la loi du 15 septembre 2006Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/09/2006 pub. 06/10/2006 numac 2006000703 source service public federal interieur Loi modifiant la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers fermer modifiant la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers.
Il était ainsi rédigé : « Le ministre ou son délégué peut décider que l'étranger qui a été admis à séjourner dans le Royaume sur la base de l'article 10 n'a plus le droit de séjourner dans le Royaume, dans un des cas suivants : 1°cet étranger ne remplit plus une des conditions de l'article 10; 2° cet étranger et l'étranger rejoint n'entretiennent pas ou plus une vie conjugale ou familiale effective;3° cet étranger, admis à séjourner dans le Royaume en tant que partenaire enregistré sur la base de l'article 10, § 1er, 4° ou 5°, ou l'étranger qu'il a rejoint, s'est marié ou à une relation durable avec une autre personne;4° cet étranger a utilisé des informations fausses ou trompeuses ou des documents faux ou falsifiés, ou a recouru à la fraude ou à d'autres moyens illégaux, afin d'être admis au séjour, ou il est établi que le mariage, le partenariat ou l'adoption ont été conclu uniquement pour lui permettre d'entrer ou de séjourner dans le Royaume. La décision fondée sur le point 1°, 2° ou 3° ne peut être prise qu'au cours de l'admission au séjour pour une durée limitée. Dans ce cadre, le motif visé au point 1°, 2° ou 3° constituera une motivation suffisante au cours des deux premières années suivant la délivrance du titre de séjour ou, dans les cas visés à l'article 12bis, § § 3 ou 4, suivant la délivrance du document attestant que la demande a été introduite. Au cours de la troisième année suivant la délivrance du titre de séjour ou, dans les cas visés à l'article 12bis, § § 3 ou 4, suivant la délivrance du document attestant que la demande a été introduite, cette motivation ne sera suffisante que si elle est complétée par des éléments indiquant une situation de complaisance.
Le ministre ou son délégué peut procéder ou faire procéder à des contrôles en vue de la prorogation ou du renouvellement du titre de séjour, afin de vérifier si l'étranger remplit les conditions de l'article 10. Il peut à tout moment procéder ou faire procéder à des contrôles spécifiques lorsqu'il existe des présomptions fondées de fraude ou que le mariage, le partenariat ou l'adoption a été conclu pour permettre à la personne concernée d'entrer ou de séjourner dans le Royaume. [...] ».
B.2.2. Il ressort de l'exposé des motifs de la loi du 15 septembre 2006Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/09/2006 pub. 06/10/2006 numac 2006000703 source service public federal interieur Loi modifiant la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers fermer que l'objectif était de lutter contre les abus dans le cadre du regroupement familial en général, et contre la fraude en particulier.
Il s'agissait de transposer les possibilités offertes par l'article 16, paragraphe 2, de la directive 2003/86/CE du Conseil du 22 septembre 2003 relative au droit au regroupement familial, qui énonce : « Les Etats membres peuvent également rejeter une demande d'entrée et de séjour aux fins du regroupement familial, ou retirer ou refuser de renouveler le titre de séjour d'un membre de la famille, s'il est établi : a) que des informations fausses ou trompeuses ou des documents faux ou falsifiés ont été utilisés, ou qu'il a été recouru à la fraude ou à d'autres moyens illégaux;b) que le mariage, le partenariat ou l'adoption ont été conclus uniquement pour permettre à la personne concernée d'entrer ou de séjourner dans un Etat membre. Lorsqu'ils procèdent à une évaluation sur ce point, les Etats membres peuvent tenir compte en particulier du fait que le mariage, le partenariat ou l'adoption a eu lieu après l'octroi du titre de séjour au regroupant ».
Selon le même exposé des motifs : « Quant au motif relatif à l'utilisation d'informations fausses ou trompeuses ou de documents faux ou falsifiés, ou au recours à la fraude, il s'agit de la transposition littérale de l'article 16, § 2, a), de la directive et d'une application particulière du principe général de droit ' Fraus omnia corrumpit '. Il va de soi que seuls des éléments remettant fondamentalement en cause la décision de reconnaître le droit au regroupement familial seront à la base de l'application de ce motif.
Conformément à une observation du Conseil d'Etat, ce motif est complété par rapport aux cas visés à l'article 16, § 2, b), de la directive, dans lesquels il est constaté que le mariage, le partenariat ou l'adoption ont été conclus principalement pour permettre à la personne concernée de se voir reconnaître le droit de séjourner en Belgique » (Doc. parl., Chambre, 2005-2006, DOC 51-2478/001, p. 59).
En ce qui concerne le délai dans lequel peut être prise une décision fondée sur les trois premiers motifs mentionnés à l'alinéa 1er, il est dit ce qui suit : « La période au cours laquelle la décision de mettre fin au séjour pourra être prise est limitée, sauf dans les cas de fraude, à la période pendant laquelle le membre de la famille concerné est admis au séjour pour une durée limitée.
En vertu de l'article 13, § 1er, alinéa 2, nouveau [...], il s'agit d'une période de trois ans à partir de la délivrance du titre de séjour. Dans les cas où la demande peut être introduite en Belgique, cette période commencera toutefois à courir à partir de la délivrance du document attestant que la demande a été introduite (et a été considérée recevable parce que complète). A l'expiration de cette période, il ne sera plus possible de mettre fin au séjour de l'intéressé pour les motifs précités, à l'exception du motif lié à la fraude » (ibid., pp. 59-60).
En ce qui concerne les contrôles qui peuvent être effectués, lesquels sont précisés à l'article 11, § 2, alinéa 3, de la loi relative aux étrangers, les travaux préparatoires contiennent ce qui suit : « Conformément à l'article 16, § 4, de la directive, l'article 11, § 2, nouveau, prévoit la possibilité du ministre ou de son délégué d'exercer des contrôles de deux types : - des contrôles spécifiques lorsqu'il existe des présomptions fondées de fraude ou de mariage, partenariat ou adoption de complaisance, conclu en vue de permettre à l'intéressé d'entrer ou de séjourner en Belgique; - des contrôles à vocation plus ' généraliste ' (maintien des conditions du regroupement familial, effectivité de la vie conjugale ou familiale) en vue de la prorogation ou du renouvellement du titre de séjour.
Les contrôles ne seront effectués que dans les cas où cela paraît indiqué. En réponse à une observation du Conseil d'Etat, il en sera par exemple ainsi lorsque l'administration constatera ou sera informée que les conjoints ou partenaires ne résident plus à la même adresse.
Dans ce cas, le contrôle aura pour objet de vérifier cette constatation ou information, en vue d'en tirer les conséquences éventuellement nécessaires.
Comme c'est déjà le cas à l'heure actuelle pendant la période d'examen de la demande de regroupement familial, ce contrôle sera effectué par un agent de police, en général l'agent de quartier, qui vérifiera si les personnes vivent sous le même toit, par une rencontre avec les personnes concernées. Dans ce cadre, cet agent ne peut avoir accès au domicile des personnes concernées que si celles-ci l'y autorisent (cf. circulaire du 29.09.2005 relative au modèle de rapport de cohabitation ou d'installation commune, M.B., 29.09.2005).
Ce type de contrôle ne peut être considéré comme une ingérence dans l'exercice du droit à la vie familiale, dont le respect est - comme le rappelle le Conseil d'Etat dans son avis - garanti par l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 22 de la Constitution, dans la mesure où l'objectif est précisément de vérifier qu'il existe bien une vie familiale, qui conditionne le droit au regroupement familial.
L'immixtion éventuelle dans la vie privée et familiale des intéressés n'est par ailleurs pas disproportionnée par rapport à l'objectif poursuivi. L'objectif est en effet principalement de pouvoir lutter contre les abus rencontrés dans le cadre du regroupement familial et notamment les situations actuelles dans lesquelles l'étranger quitte le conjoint qu'il a rejoint après avoir obtenu le certificat d'inscription au registre des étrangers (CIRE) constatant son droit à séjourner en Belgique. Le regroupement familial ne peut en effet conduire à ce qu'un étranger acquière un titre de séjour pour vivre séparé de son conjoint, alors que la constitution ou la reconstitution de la vie familiale est le motif déterminant de la reconnaissance du droit de séjour.
Le délai de trois ans au cours duquel le contrôle peut être poursuivi n'est pas déraisonnable dans la mesure où celui-ci ne sera effectué que dans les cas où cela paraît indiqué et où le système vise à mettre fin à des situations d'abus qui ne donnent pas lieu, dans la pratique et vu l'arriéré judiciaire, aux décisions d'annulation du mariage qu'elles devraient entraîner » (ibid., pp. 60-61).
B.2.3. Comme le relève le juge a quo, la Cour a rejeté, par son arrêt n° 95/2008 du 26 juin 2008, le moyen pris de la violation de l'article 22 de la Constitution, combiné ou non avec les articles 8 et 12 de la Convention européenne des droits de l'homme ou avec l'article 6, paragraphe 3, de la directive 2003/86/CE, par l'article 11, § 2, de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer, tel qu'il a été remplacé par l'article 9 de la loi du 15 septembre 2006Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/09/2006 pub. 06/10/2006 numac 2006000703 source service public federal interieur Loi modifiant la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers fermer, pour les motifs qui suivent : « B.55. L'article 11, § 2, alinéa 1er, 4°, de la loi relative aux étrangers permet de mettre fin au droit au séjour dans le Royaume d'un étranger qui a utilisé des informations fausses ou trompeuses ou des documents faux ou falsifiés ou a recouru à la fraude ou à d'autres moyens illégaux ou lorsqu'il est établi que le mariage, le partenariat ou l'adoption ont été conclus uniquement pour lui permettre d'entrer ou de séjourner dans le Royaume. Les cas sont définis de manière suffisamment précise, de sorte qu'il est satisfait aux exigences des dispositions visées dans le moyen. La mesure répond en outre aux objectifs de sûreté publique et de défense de l'ordre que le législateur, en vertu de l'article 8.2 de la Convention européenne des droits de l'homme, peut poursuivre lorsqu'il apporte des restrictions au respect du droit à la vie privée et familiale. La circonstance que la mesure peut être appliquée sans limite de temps n'est, enfin, pas disproportionnée par rapport à l'objectif qui consiste à éviter diverses formes d'abus de recours au droit au regroupement familial, qui reposent sur une fraude commise par l'étranger lui-même.
En ce qu'il est dirigé contre l'article 11, § 2, alinéa 1er, 4°, de la loi relative aux étrangers, le moyen n'est pas fondé.
B.56. Les délais visés à l'article 11, § 2, alinéa 2, doivent permettre de vérifier tant la stabilité du regroupement familial que les conditions auxquelles il peut se réaliser, ce qui constitue un but licite, du point de vue de l'article 8.2 de la Convention européenne des droits de l'homme, que l'article 16, paragraphe 1, de la directive 2003/86/CE autorise expressément. En effet, l'autorisation de séjour a précisément été délivrée afin de permettre à l'étranger de rejoindre sa famille dans des circonstances conformes à la dignité humaine.
La mesure est pertinente pour vérifier si le droit au séjour n'a pas été détourné de cet objectif et si les conditions sont remplies pour que l'objectif puisse continuer à être réalisé.
La mesure n'est pas disproportionnée puisqu'elle ne peut en principe être appliquée qu'au cours des deux premières années, et uniquement si elle paraît indiquée, et que l'application au cours de la troisième année est soumise à la condition supplémentaire de la présence d'éléments qui indiquent une situation de complaisance et qui ont été définis de manière suffisamment précise dans l'exposé des motifs mentionné en B.54.1, sur la base des exemples qui ont été donnés.
En ce qu'il est dirigé contre l'article 11, § 2, alinéa 2, de la loi relative aux étrangers, le moyen n'est pas fondé ».
B.3. L'article 11, § 2, de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer a ensuite été remplacé par l'article 5 de la loi du 8 juillet 2011Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/07/2011 pub. 12/09/2011 numac 2011000547 source service public federal interieur Loi modifiant la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers en ce qui concerne les conditions dont est assorti le regroupement familial fermer modifiant la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers en ce qui concerne les conditions dont est assorti le regroupement familial. Il s'agit de la version applicable aux faits du litige soumis au juge a quo : « Le ministre ou son délégué peut décider que l'étranger qui a été admis à séjourner dans le Royaume sur la base de l'article 10 n'a plus le droit de séjourner dans le Royaume, dans un des cas suivants : 1° l'étranger ne remplit plus une des conditions de l'article 10;2° l'étranger et l'étranger rejoint n'entretiennent pas ou plus une vie conjugale ou familiale effective;3° l'étranger, admis à séjourner dans le Royaume en tant que partenaire enregistré sur la base de l'article 10, § 1er, 4° ou 5°, ou l'étranger qu'il a rejoint, s'est marié avec une autre personne ou est lié à une autre personne par un partenariat enregistré conformément à une loi;4° l'étranger ou la personne qu'il rejoint a utilisé des informations fausses ou trompeuses ou des documents faux ou falsifiés, ou a recouru à la fraude ou à d'autres moyens illégaux, qui ont été déterminants pour la reconnaissance du droit de séjour, ou il est établi que le mariage, le partenariat ou l'adoption ont été conclus uniquement pour lui permettre d'entrer ou de séjourner dans le Royaume. La décision fondée sur le point 1°, 2° ou 3° ne peut être prise qu'au cours des trois premières années suivant la délivrance du titre de séjour ou, dans les cas visés à l'article 12bis, § § 3 ou 4, suivant la délivrance du document attestant que la demande a été introduite. [...] ».
B.4. Il ressort des faits de la cause soumise au juge a quo qu'il a été mis fin au droit de séjour d'un étranger qui avait obtenu ce droit sur la base du regroupement familial avec une ressortissante d'un pays tiers qui résidait en Belgique, dans les conditions prévues par l'article 10 de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer. Après qu'il a été constaté que le regroupant avait obtenu son droit de séjour sur la base d'une fraude, en l'occurrence par le biais d'un mariage de complaisance, il a été décidé que le regroupant et le membre de sa famille n'avaient plus le droit, ni l'un ni l'autre, de séjourner dans le Royaume. La Cour limite son examen à ce cas.
B.5.1. Dans son mémoire, la partie requérante devant le juge a quo conteste la compatibilité de la disposition en cause avec les articles 10, 11 et 22 de la Constitution, lus en combinaison avec les articles 8 et 12 de la Convention européenne des droits de l'homme et avec les articles 16, paragraphe 2, et 17 de la directive 2003/86/CE. B.5.2. Il n'appartient pas aux parties de modifier le contenu de la question préjudicielle posée à la Cour. La Cour limite dès lors son examen au contrôle de la disposition en cause au regard des articles 10 et 11 de la Constitution.
B.6.1. En ordre principal, le Conseil des ministres fait valoir que les étrangers qui réunissaient les conditions fixées à l'article 10 de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer pour pouvoir prétendre au regroupement familial mais dont la situation a évolué depuis lors, comme c'est le cas dans les hypothèses décrites aux 1° à 3° de l'article 11, § 2, alinéa 1er, de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer, ne sont pas comparables aux étrangers visés à l'article 11, § 2, alinéa 1er, 4°, puisque dans ce dernier cas, le droit de séjour a été obtenu sur la base d'une fraude, que l'auteur de cette fraude soit l'étranger ou la personne que ce dernier rejoint.
B.6.2. En ce qui concerne la possibilité, pour le ministre ou son mandataire, de décider qu'un étranger n'a plus le droit de séjourner dans le Royaume, les catégories de personnes précitées sont suffisamment comparables. La Cour doit dès lors examiner si la différence de traitement au sujet de laquelle elle est interrogée est raisonnablement justifiée.
B.7.1. Comme il ressort des travaux préparatoires de la loi du 15 septembre 2006Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/09/2006 pub. 06/10/2006 numac 2006000703 source service public federal interieur Loi modifiant la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers fermer, cités en B.2.2, l'adoption de l'article 11, § 2, en cause, visait à la transposition de l'article 16, paragraphe 2, de la directive 2003/86/CE, en vertu duquel les Etats membres peuvent retirer ou refuser un titre de séjour d'un membre de la famille si des informations fausses ou trompeuses ont été fournies, si des documents faux ou falsifiés ont été utilisés, ou s'il a été recouru à la fraude ou à d'autres moyens illégaux. En vertu de l'article 16, paragraphe 3, de la directive précitée, les Etats membres peuvent retirer ou refuser de renouveler le titre de séjour d'un membre de la famille lorsque le séjour du regroupant touche à son terme et que le membre de la famille ne bénéficie pas encore d'un droit au titre de séjour autonome.
B.7.2. Alors que la loi du 15 septembre 2006Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/09/2006 pub. 06/10/2006 numac 2006000703 source service public federal interieur Loi modifiant la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers fermer habilitait le ministre compétent à mettre fin au droit de séjour avec ordre de quitter le territoire, sans limite dans le temps, à l'égard de l'étranger qui avait obtenu une autorisation de séjour sur la base d'une fraude qu'il avait commise, la loi du 8 juillet 2011Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/07/2011 pub. 12/09/2011 numac 2011000547 source service public federal interieur Loi modifiant la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers en ce qui concerne les conditions dont est assorti le regroupement familial fermer a permis de mettre fin à une autorisation de séjour lorsque l'étranger ou la personne qu'il rejoint a commis une fraude qui a été déterminante pour la reconnaissance du droit de séjour. Ainsi, la fraude commise par le regroupant peut également conduire à ce qu'il soit mis fin au séjour des personnes qui l'ont rejoint, à la condition que cette fraude ait été déterminante pour la reconnaissance de leur droit de séjour.
B.8.1. Un étranger qui souhaite former une famille avec un étranger séjournant déjà sur le territoire peut obtenir un droit de séjour en Belgique à certaines conditions. Il s'agit d'un droit dérivé, qu'il tire exclusivement de son statut de membre de la famille d'un étranger séjournant déjà légalement sur le territoire.
B.8.2. Pour pouvoir prétendre à un droit de séjour sur la base du regroupement familial, le regroupant doit séjourner légalement sur le territoire et disposer de moyens de subsistance stables et suffisants.
Le regroupant doit aussi disposer d'un logement suffisant pour lui-même et pour les membres de sa famille, et d'une assurance maladie couvrant également les risques des membres de sa famille (article 10 de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer). Ainsi, le droit au regroupement familial est subordonné à la condition que le regroupant puisse supporter financièrement les membres de sa famille qui souhaitent séjourner avec lui en Belgique, afin qu'ils ne tombent pas à charge du Trésor.
B.9.1. Il ressort des travaux préparatoires de la loi du 8 juillet 2011Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/07/2011 pub. 12/09/2011 numac 2011000547 source service public federal interieur Loi modifiant la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers en ce qui concerne les conditions dont est assorti le regroupement familial fermer que le législateur a voulu restreindre l'immigration basée sur le regroupement familial, afin de maîtriser la pression migratoire et de décourager les abus. Il poursuit ainsi un but légitime.
B.9.2. La différence de traitement entre les étrangers visés à l'article 11, § 2, alinéa 1er, 1° à 3°, de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer, d'une part, et ceux qui sont visés à l'article 11, § 2, alinéa 1er, 4°, d'autre part, en ce que ce n'est que dans le dernier cas que la possibilité de mettre fin au droit de séjour n'est pas limitée dans le temps, repose sur un critère de distinction objectif, étant donné que, dans ce dernier cas, contrairement aux trois premiers cas, l'étranger ou la personne qu'il rejoint a commis une fraude qui a été déterminante pour la reconnaissance du droit de séjour.
B.10.1. Eu égard à l'objectif poursuivi par le législateur, qui consiste à décourager les fraudes commises dans le but d'obtenir un droit de séjour, il est pertinent de prendre en considération non seulement la fraude commise par la personne qui a obtenu un droit de séjour sur la base du regroupement familial, mais également la fraude commise par le regroupant lorsque, comme la loi l'exige, cette fraude a été déterminante pour la reconnaissance du droit de séjour.
B.10.2. La possibilité d'obtenir un droit de séjour sur la base du regroupement familial vise à permettre la vie de famille et n'a d'autre raison d'être. Lorsqu'il est mis fin au droit de séjour du regroupant pour fraude et que ce dernier reçoit l'ordre de quitter le territoire, la raison d'être du droit de séjour des membres de sa famille sur le territoire disparaît par conséquent. Comme il est dit en B.8.1, un droit de séjour accordé sur la base d'un regroupement familial ne peut être tiré que du statut de membre de la famille d'un étranger séjournant légalement sur le territoire. Comme il est dit en B.8.2, le regroupant doit en outre supporter financièrement les membres de sa famille, afin que ceux-ci ne tombent pas à charge du Trésor.
B.11.1. Le constat d'une fraude commise par le regroupant n'a pas automatiquement pour effet de mettre un terme à son séjour ni à celui des membres de sa famille. La disposition en cause en octroie seulement la possibilité aux autorités compétentes. De même, la possibilité de mettre fin au droit de séjour du regroupant qui a commis une fraude n'entraîne pas nécessairement la perte du droit de séjour pour les membres de sa famille.
Lorsque le ministre ou son délégué envisage de prendre une telle décision, il doit apprécier, sous le contrôle du juge, la situation individuelle de l'étranger concerné et les caractéristiques spécifiques de sa situation (C.E., 4 août 2016, n° 235.583), notamment à la lumière du droit au respect de la vie privée.
B.11.2. De plus, les étrangers dont il est mis fin au droit de séjour pour fraude du regroupant ne sont pas privés de tout droit de séjour en Belgique. Ils peuvent formuler une nouvelle demande de séjour et obtenir un droit de séjour s'ils satisfont aux conditions qui s'appliquent de la même manière à tous les étrangers qui souhaitent séjourner légalement sur le territoire.
B.12. Sous réserve de ce qui est mentionné en B.11.1, la différence de traitement n'est pas sans justification raisonnable.
La question préjudicielle appelle une réponse négative.
Par ces motifs, la Cour dit pour droit : Sous réserve de ce qui est mentionné en B.11.1, l'article 11, § 2, alinéa 1er, 4°, de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers, dans la version applicable avant sa modification par la loi du 4 mai 2016 « portant des dispositions diverses en matière d'asile et de migration et modifiant la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers et la loi du 12 janvier 2007 sur l'accueil des demandeurs d'asile et de certaines autres catégories d'étrangers », ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution.
Ainsi rendu en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 22 novembre 2018.
Le greffier, P.-Y. Dutilleux Le président, F. Daoût