publié le 28 janvier 2019
Extrait de l'arrêt n° 171/2018 du 29 novembre 2018 Numéro du rôle : 6985 En cause : le recours en annulation de l'article 7 du décret de la Région wallonne du 29 mars 2018 modifiant le Code de la démocratie locale et de la décentralisation en La Cour constitutionnelle, composée des présidents F. Daoût et A. Alen, et des juges L. Lavrysen(...)
COUR CONSTITUTIONNELLE
Extrait de l'arrêt n° 171/2018 du 29 novembre 2018 Numéro du rôle : 6985 En cause : le recours en annulation de l'article 7 du décret de la Région wallonne du 29 mars 2018 modifiant le Code de la démocratie locale et de la décentralisation en vue de renforcer la gouvernance et la transparence dans l'exécution des mandats publics au sein des structures locales et supra-locales et de leurs filiales, introduit par Frédéric Sevrin.
La Cour constitutionnelle, composée des présidents F. Daoût et A. Alen, et des juges L. Lavrysen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke, T. Merckx-Van Goey, P. Nihoul, T. Giet, R. Leysen, J. Moerman et M. Pâques, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président F. Daoût, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet du recours et procédure Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 13 juillet 2018 et parvenue au greffe le 16 juillet 2018, Frédéric Sevrin, assisté et représenté par Me E. Lemmens, avocat au barreau de Liège, a introduit un recours en annulation de l'article 7 du décret de la Région wallonne du 29 mars 2018 modifiant le Code de la démocratie locale et de la décentralisation en vue de renforcer la gouvernance et la transparence dans l'exécution des mandats publics au sein des structures locales et supra-locales et de leurs filiales (publié au Moniteur belge du 14 mai 2018).
Par requête séparée, le requérant demandait également la suspension de la même disposition décrétale. Par l'arrêt n° 131/2018 du 4 octobre 2018, publié au Moniteur belge du 27 novembre 2018, la Cour a rejeté la demande de suspension.
Le Gouvernement wallon, assisté et représenté par Me B. Lombaert et Me A.-S. Bouvy, avocats au barreau de Bruxelles, a introduit un mémoire, le requérant a introduit un mémoire en réponse et le Gouvernement wallon a également introduit un mémoire en réplique. (...) II. En droit (...) Quant à la disposition attaquée et à son contexte B.1.1. Le recours en annulation est dirigé contre l'article 7 du décret de la Région wallonne du 29 mars 2018 modifiant le Code de la démocratie locale et de la décentralisation en vue de renforcer la gouvernance et la transparence dans l'exécution des mandats publics au sein des structures locales et supra-locales et de leurs filiales (ci-après : le décret du 29 mars 2018), qui dispose : « A l'article L1125-1 du même Code, les modifications suivantes sont apportées : 1° le texte actuel qui formera le paragraphe 1er, est complété par un paragraphe 2 rédigé comme suit : ' § 2.Ne peuvent être président du conseil communal ou membre du collège communal : 1° les titulaires d'une fonction dirigeante locale et les titulaires d'une fonction de direction au sein d'une intercommunale, d'une association de pouvoirs publics visée à l'article 118 de la loi du 8 juillet 1976Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/07/1976 pub. 18/04/2016 numac 2016000231 source service public federal interieur Loi organique des centres publics d'action sociale. - Coordination officieuse en langue allemande de la version applicable aux habitants de la région de langue allemande fermer organique des centres publics d'action sociale, d'une régie communale ou provinciale, d'une ASBL communale ou provinciale, d'une association de projet, d'une société de logement, d'une société à participation publique locale significative.Par titulaire d'une fonction de direction, il faut entendre les personnes qui occupent une fonction d'encadrement, caractérisée par l'exercice d'une parcelle d'autorité, un degré de responsabilité et un régime pécuniaire traduisant la place occupée au sein de l'organigramme; 2° les gestionnaires tels que définis à l'article 2 du décret du 12 février 2004 relatif au statut de l'administrateur public et à l'article 2 du décret du 12 février 2004 relatif au statut de l'administrateur public pour les matières réglées en vertu de l'article 138 de la Constitution; 3° les titulaires d'une fonction dirigeante et d'une fonction de direction au sein d'une fondation d'utilité publique pour autant que la participation totale des communes, C.P.A.S., intercommunales ou provinces, seules ou en association avec l'entité régionale wallonne y compris ses unités d'administration publique, directement ou indirectement, atteigne un taux de plus de 50 pourcent de subventions régionales, communales, provinciales, d'intercommunales ou de CPAS sur le total de leurs produits. '; 2° au paragraphe 1er, 11°, les mots ' les secrétaires et receveurs ' sont remplacés par les mots ' les directeurs généraux et financiers ' ». B.1.2. Il résulte de l'article 86 du décret du 29 mars 2018 que la disposition attaquée entre en vigueur après le renouvellement intégral des conseils communaux et provinciaux issus des élections locales du 14 octobre 2018.
B.1.3. Depuis sa modification par l'article 7, attaqué, du décret du 29 mars 2018, l'article L1125-1 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation (ci-après : CDLD) dispose : « § 1er. Ne peuvent faire partie des conseils communaux ni des collèges communaux : 1° les gouverneurs de province, le gouverneur et le vice-gouverneur de l'arrondissement administratif de Bruxelles-Capitale et le gouverneur adjoint de la province du Brabant flamand;2° les membres du collège provincial et les membres du collège institué par l'article 83quinquies, § 2, de la loi spéciale du 12 janvier 1989 relative aux institutions bruxelloises;3° les directeurs généraux;4° les commissaires d'arrondissement; 5° [...]; 6° toute personne qui est membre du personnel ou qui reçoit un subside ou un traitement de la commune, à l'exception des pompiers volontaires;7° les employés de l'administration forestière, lorsque leur compétence s'étend à des propriétés boisées soumises au régime forestier et appartenant à la commune dans laquelle ils désirent exercer leurs fonctions;8° toute personne qui exerce une fonction ou un mandat équivalent à celui de conseiller communal, échevin ou bourgmestre dans une collectivité locale de base d'un autre Etat membre de l'Union européenne.Le Gouvernement dresse une liste non exhaustive des fonctions ou mandats considérés comme équivalents; 9° les membres des cours, tribunaux, parquets et les greffiers de l'Ordre judiciaire;10° les conseillers du Conseil d'Etat;11° les directeurs généraux et financiers du centre public d'action sociale du ressort de la commune;12° les parents ou alliés jusqu'au deuxième degré inclusivement avec le directeur général, le directeur général adjoint et le directeur financier et les personnes unies par les liens du mariage ou de la cohabitation légale avec le directeur général, le directeur général adjoint ou le directeur financier de la commune. Les dispositions de l'alinéa 1er, 1° à 11°, sont également applicables aux ressortissants non belges de l'Union européenne résidant en Belgique pour l'exercice par ceux-ci dans un autre Etat membre de l'Union européenne de fonctions équivalentes à celles qui sont visées dans ces dispositions. § 2. Ne peuvent être président du conseil communal ou membre du collège communal : 1° les titulaires d'une fonction dirigeante locale et les titulaires d'une fonction de direction au sein d'une intercommunale, d'une association de pouvoirs publics visée à l'article 118 de la loi du 8 juillet 1976Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/07/1976 pub. 18/04/2016 numac 2016000231 source service public federal interieur Loi organique des centres publics d'action sociale. - Coordination officieuse en langue allemande de la version applicable aux habitants de la région de langue allemande fermer organique des centres publics d'action sociale, d'une régie communale ou provinciale, d'une ASBL communale ou provinciale, d'une association de projet, d'une société de logement, d'une société à participation publique locale significative.Par titulaire d'une fonction de direction, il faut entendre les personnes qui occupent une fonction d'encadrement, caractérisée par l'exercice d'une parcelle d'autorité, un degré de responsabilité et un régime pécuniaire traduisant la place occupée au sein de l'organigramme; 2° les gestionnaires tels que définis à l'article 2 du décret du 12 février 2004 relatif au statut de l'administrateur public et à l'article 2 du décret du 12 février 2004 relatif au statut de l'administrateur public pour les matières réglées en vertu de l'article 138 de la Constitution; 3° les titulaires d'une fonction dirigeante et d'une fonction de direction au sein d'une fondation d'utilité publique pour autant que la participation totale des communes, C.P.A.S., intercommunales ou provinces, seules ou en association avec l'entité régionale wallonne y compris ses unités d'administration publique, directement ou indirectement, atteigne un taux de plus de 50 pourcent de subventions régionales, communales, provinciales, d'intercommunales ou de CPAS sur le total de leurs produits ».
B.2.1. Il ressort des travaux préparatoires du décret du 29 mars 2018 que le législateur décrétal a entendu fixer « de nouvelles règles en matière de gouvernance et de transparence au sein des structures locales, supra-locales ou dans leurs filiales » (Doc. parl., Parlement wallon, 2017-2018, n° 1047/1, p. 3) : « Le présent projet de décret traduit les orientations du Gouvernement énoncées dans sa Déclaration de politique régionale 2017-2019 ainsi que les recommandations formulées par le rapport de la Commission d'enquête parlementaire chargée d'examiner la transparence et le fonctionnement du Groupe PUBLIFIN du 6 juillet 2017. [...] Le présent projet de décret a pour objectif de renforcer la responsabilité personnelle des mandataires, qu'ils soient élus ou désignés dans des structures locales, supra-locales ou dans leurs filiales. Des règles plus strictes doivent être développées et contrôlées afin d'éviter tout abus.
Parmi ces règles, le texte propose notamment la détermination [...] de nouvelles incompatibilités [...] » (ibid.). « Le présent projet de décret vise également à assurer la transparence quant aux responsabilités exercées par les mandataires auxquels les citoyens ont confié des missions publiques » (ibid., p. 4).
B.2.2. A propos de la disposition attaquée, l'exposé des motifs précise ce qui suit : « La disposition étend l'interdiction d'être président du conseil communal ou membre du collège communal aux titulaires d'une fonction dirigeante locale telle que définie à l'article L5111-1 et [aux] titulaires d'une fonction de direction, aux gestionnaires tels que définis à l'article 2 du décret du 12 février 2004 relatif au statut de l'administrateur public ainsi qu'aux titulaires d'une fonction dirigeante locale et d'une fonction de direction au sein d'une fondation d'utilité publique qui bénéficient d'un subventionnement public local et régional wallon dont le Gouvernement déterminera le taux.
Une fonction de direction constitue une fonction d'encadrement, caractérisée par l'exercice d'une parcelle d'autorité. L'article L1523-27, § 2 prévoit que le régime pécuniaire et les échelles de traitement soient fixés notamment selon l'importance des attributions, le degré de responsabilité et les aptitudes générales et professionnelles requises, compte tenu notamment de la place occupée par les agents dans l'organigramme de l'intercommunale. L'organigramme de l'institution identifiera dès lors ces fonctions de direction. Il est évident que ces éléments (place occupée, niveau de rémunérations et niveau de responsabilités) constituent un tout et sont déterminants dans la qualification de la fonction de direction. S'il devait s'avérer qu'une rémunération conséquente équivalant à l'exercice d'une fonction d'encadrement d'un certain niveau est attribuée, la personne concernée serait de facto considérée comme exerçant une fonction de direction et se trouverait soumise au régime d'incompatibilité.
L'objectif de cette disposition est en effet d'éviter la survenance de situations de conflit d'intérêts nuisibles aux principes entourant la gouvernance. En outre, la modification vise à se conformer à la nouvelle appellation des grades légaux » (ibid., p. 5).
Devant la commission des Pouvoirs locaux, du Logement et des Infrastructures sportives, la ministre a précisé que la fonction de direction n'est pas limitée aux intercommunales. La fonction de direction doit être appréciée par l'exercice d'une parcelle d'autorité : « L'article L1523-27, § 2, prévoit que le régime pécuniaire et les échelles de traitement sont fixés, notamment selon l'importance des attributions, le degré de responsabilité et les aptitudes générales et professionnelles requises, compte tenu également de la place occupée par les agents dans l'organigramme. C'est l'organigramme qui identifiera les fonctions de direction » (Doc. parl., Parlement wallon, 2017-2018, n° 1047/27, p. 31).
Quant à l'intérêt B.3.1. Le requérant est directeur de la régie communale autonome immobilière de la ville de Herstal (URBEO). Il était candidat tête de liste aux élections communales du 14 octobre 2018, dans la commune d'Aywaille.
La disposition attaquée interdit notamment au directeur d'une régie communale autonome d'être président du conseil communal ou membre du collège communal, sans considération de ce que le mandat au sein du collège communal ou la présidence du conseil communal s'exerce au sein d'une commune autre que celle dont relève la régie communale autonome au sein de laquelle est exercée la fonction de direction précitée.
Le requérant peut donc être affecté directement et défavorablement par la disposition attaquée, mais uniquement dans la mesure où l'article L1125-1, § 2, 1°, du CDLD, vise les titulaires d'une fonction de direction au sein d'une régie communale autonome.
B.3.2. La Cour limite donc son examen à l'article L1125-1, § 2, 1°, du CDLD, tel qu'il a été inséré par la disposition attaquée, en ce qu'il ne permet pas aux titulaires d'une fonction de direction au sein d'une régie communale autonome d'exercer la fonction de président du conseil communal ou de membre du collège communal.
Quant au fond B.4.1. Par un moyen unique, le requérant soutient que la disposition attaquée viole les articles 10 et 11 de la Constitution, lus ou non en combinaison avec l'article 25 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
B.4.2. Il reproche tout d'abord à la disposition attaquée d'interdire au directeur d'une régie communale autonome d'être président du conseil communal ou membre du collège communal d'une commune, même si cette commune n'est pas associée à la régie communale autonome dont il est le directeur. La disposition attaquée traiterait ainsi de manière identique deux catégories de personnes qui seraient dans des situations différentes.
Le requérant reproche encore à l'incompatibilité instaurée de s'appliquer sans justification au seul directeur d'une régie communale autonome, et non à tout autre citoyen, serait-il même au service d'une régie communale autonome dans un emploi subalterne.
Le requérant dénonce une troisième différence de traitement que ferait naître la disposition attaquée, l'incompatibilité précitée visant le seul président du conseil communal et non les autres conseillers communaux.
Selon le requérant, l'ensemble de ces discriminations aurait pour conséquence d'empêcher de manière déraisonnable et disproportionnée la possibilité, pour les citoyens de prendre part à la direction des affaires publiques, ce qui constituerait une violation de l'article 25 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, combiné avec les articles 10 et 11 de la Constitution.
B.5.1. Conformément aux articles L1231-4 à L1231-12 du CDLD, certains services communaux peuvent être administrés par des régies communales autonomes dotées de la personnalité juridique.
B.5.2.1. Le Gouvernement détermine les activités à caractère industriel ou commercial pour lesquelles le conseil communal peut créer une régie communale autonome dotée de la personnalité juridique (article L1231-4 du CDLD).
B.5.2.2. L'article 1er de l'arrêté royal du 10 avril 1995 déterminant les activités à caractère industriel ou commercial pour lesquelles le conseil communal peut créer une régie communale autonome dotée de la personnalité juridique, tel qu'il s'applique en Région wallonne, dispose : « Constituent des activités à caractère industriel ou commercial pour lesquelles le conseil communal peut créer une régie de la personnalité juridique : 1° la fourniture et la distribution d'eau, de gaz, d'électricité ou de vapeur;2° les ventes d'arbres et de bois provenant d'une exploitation forestière;3° l'exploitation de ports, de voies navigables et d'aéroports;4° l'exploitation de parkings, d'entrepôts ou de terrains de camping;5° l'exploitation d'un réseau de radiodistribution et de télédistribution;6° l'exploitation d'un abattoir;7° l'exploitation d'infrastructures affectées à des activités culturelles, sportives, touristiques ou de divertissement, à l'enseignement, à des activités sociales, scientifiques ou de soins;8° l'acquisition d'immeubles, la constitution de droits réels immobiliers, la construction, la rénovation, la transformation, la location ou location-financement de biens immobiliers en vue de la vente, de la location, de la location-financement ou d'autres actes juridiques relatifs à ces immeubles;9° l'exploitation d'établissements de vente à l'encan, telles les minques;10° les fournitures de biens et les prestations de services afférentes aux convois et aux pompes funèbres;11° l'exploitation de marchés publics;12° l'organisation d'événements à caractère public;13° l'exploitation de transports par eau, par terre et par air;14° les livraisons de biens et les prestations de services concernant l'informatique et l'imprimerie;15° la gestion du patrimoine immobilier de la commune;16° l'accueil, l'intégration, la réintégration, la mise et la remise au travail de personnes sans emploi ou à la recherche d'un emploi ». B.5.2.3. Conformément à l'article L1231-9, § 1er, alinéa 1er, du CDLD, tel qu'il a été remplacé par l'article 28bis du décret de la Région wallonne du 26 avril 2012 modifiant certaines dispositions du Code de la démocratie locale et de la décentralisation, la commune conclut un contrat de gestion avec la régie communale autonome. Ce contrat précise au minimum la nature et l'étendue des tâches que la régie communale autonome devra assumer, ainsi que les indicateurs permettant d'évaluer la réalisation de ses missions. Le contrat de gestion est établi pour une durée de trois ans et est renouvelable.
Le plan d'entreprise et le rapport d'activité, établis par le conseil d'administration, sont communiqués au conseil communal (article L1231-9, § 1er, alinéa 2, du CDLD).
Si la régie communale autonome dispose d'une autonomie de gestion (article L1231-8 du CDLD), le contrôle de la situation financière et des comptes annuels de la régie communale autonome est confié à un collège de trois commissaires désignés par le conseil communal (article 1231-6 du CDLD).
Le conseil communal peut, à tout moment, demander au conseil d'administration un rapport sur les activités de la régie communale autonome (article L1231-9, § 2, du CDLD).
B.5.3.1. En vertu de l'article L1231-5, § 1er, du CDLD, tel qu'il a été modifié par l'article 11, 1°, non attaqué, du décret du 29 mars 2018, les régies communales autonomes sont gérées par un conseil d'administration et un bureau exécutif.
B.5.3.2. Le conseil d'administration a le pouvoir d'accomplir tous les actes utiles ou nécessaires à la réalisation de l'objet de la régie communale autonome (article L1231-5, § 2, alinéa 1er, du CDLD) et contrôle la gestion assurée par le bureau exécutif (article L1231-5, § 2, alinéa 1er, du CDLD, tel qu'il a été modifié par l'article 11, 2°, non attaqué, du décret du 29 mars 2018).
L'article L1231-5, § 2, alinéas 3 et 4, tel qu'il a été modifié par l'article 11, 3° et 4°, non attaqué, du décret du 29 mars 2018, dispose : « Le conseil communal désigne en son sein les membres du conseil d'administration de la régie communale autonome. Le conseil d'administration est composé de la moitié au plus du nombre de conseillers communaux, sans que ce nombre puisse dépasser douze. La majorité du conseil d'administration est composée de membres du conseil communal.
Les administrateurs représentant le conseil communal sont désignés à la proportionnelle du conseil communal conformément aux articles 167 et 168 du Code électoral ».
Le conseil d'administration choisit un président et éventuellement un vice-président parmi ses membres (article L1231-5, § 2, alinéa 8, du CDLD, tel qu'il a été remplacé par l'article 11, 6°, non attaqué, du décret du 29 mars 2018).
Les travaux préparatoires du décret du 29 mars 2018 indiquent, au sujet de cette délégation : « Le conseil d'administration désigne le titulaire de la fonction dirigeante locale et peut lui déléguer sous sa responsabilité la gestion journalière. La délibération relative à la délégation de la gestion journalière précise les actes de gestion qui sont délégués et la durée de la délégation. Cette délégation est votée à la majorité simple, elle est publiée au Moniteur belge et notifiée aux associés et aux administrateurs » (Doc. parl., Parlement wallon, 2017-2018, n° 1047/27, p. 4).
Les conseillers communaux dont le mandat prend fin sont réputés démissionnaires de plein droit de la régie communale autonome (article L1231-7 du CDLD).
B.5.3.3. En vertu de l'article L1231-5, § 3, alinéa 1er, du CDLD, tel qu'il a été remplacé par l'article 11, 7°, non attaqué, du décret du 29 mars 2018, le bureau exécutif ou à défaut le président est chargé de la gestion journalière, de la représentation quant à cette gestion, ainsi que de l'exécution des décisions du conseil d'administration. Le président et le vice-président éventuel du conseil d'administration ne perçoivent aucune rémunération pour cette gestion journalière.
Le bureau exécutif est composé au maximum de trois administrateurs, en ce compris le président et le vice-président éventuel, choisis par le conseil d'administration en son sein. Le président assure la présidence du bureau exécutif. En cas de partage de voix au bureau exécutif, sa voix est prépondérante (article L1231-5, § 3, alinéa 2, du CDLD, tel qu'il a été remplacé par l'article 11, 7°, non attaqué, du décret du 29 mars 2018).
B.5.4. Les modifications apportées par l'article 11, non attaqué, du décret du 29 mars 2018 à l'article L1231-5 du CDLD sont entrées en vigueur le 25 mai 2018, conformément à l'article 86 de ce même décret.
En vertu de l'article 88 du décret du 29 mars 2018, les statuts des régies communales autonomes seront mis en concordance au plus tard pour le 1er juillet 2018.
B.6. Il résulte des travaux préparatoires cités en B.2 que le législateur décrétal a voulu renforcer la gouvernance et la transparence dans l'exercice des mandats publics au sein des structures locales en instaurant de nouvelles incompatibilités et qu'il a ainsi entendu éviter, de manière plus large, les conflits d'intérêts liés à l'exercice de plusieurs mandats, donnant dès lors suite aux recommandations formulées par la commission d'enquête parlementaire chargée d'examiner la transparence et le fonctionnement du Groupe « Publifin », dans son rapport dénonçant les abus liés à ces conflits.
En adoptant la disposition attaquée, le législateur décrétal a entendu en particulier prévenir les conflits d'intérêts qui pourraient se présenter entre les fonctions de direction au sein d'une régie communale autonome, d'une part, et les fonctions exécutives exercées au sein des communes ou celle de président du conseil communal, d'autre part.
B.7. Quand un législateur instaure des incompatibilités qui limitent l'accès à une fonction dans une institution publique afin de renforcer l'indépendance de ses membres, la seule constatation que des incompatibilités identiques ne limitent pas de la même manière l'accès d'autres personnes aux mêmes fonctions ou à des fonctions semblables, le cas échéant, dans d'autres institutions, ne suffit pas à justifier l'annulation de la mesure.
Le principe d'égalité et de non-discrimination n'impose pas au législateur de n'établir des incompatibilités que par une mesure générale applicable à toute institution comparable relevant de ses compétences et il relève de son pouvoir d'appréciation de fixer ses priorités en cette matière.
B.8. Il convient tout d'abord de rappeler que la disposition attaquée n'empêche pas le titulaire d'une fonction de direction au sein d'une régie communale autonome de se présenter aux élections communales ni d'être élu conseiller communal. Elle ne porte donc pas atteinte au droit de ce dernier d'être élu.
Cependant, dans l'hypothèse où il serait présenté comme membre du collège communal ou comme président du conseil communal, elle lui impose de faire un choix entre cette fonction et celle de directeur d'une régie communale autonome, dès lors que ces fonctions sont désormais incompatibles.
B.9.1. Comme l'indiquent les travaux préparatoires mentionnés en B.2, la mesure attaquée est justifiée par l'objectif légitime recherché par le législateur décrétal, qui est d'éviter que naissent des conflits d'intérêts nuisibles aux principes entourant la gouvernance.
B.9.2. En l'espèce, le législateur décrétal a estimé devoir garantir particulièrement l'indépendance des membres des collèges communaux et celle du président du conseil communal par rapport au personnel qui exerce une fonction de direction au sein d'une régie communale autonome, et ce, dans le but d'éviter des conflits d'intérêts.
B.10. En ce qui concerne la première discrimination invoquée, l'objectif recherché par le législateur décrétal, qui est d'éviter que naissent des conflits d'intérêts nuisibles aux principes de bonne gouvernance, justifie que l'incompatibilité prévue par la disposition attaquée s'applique à toutes les régies communales autonomes, même si elles ne sont pas associées à la commune dans laquelle le directeur de cette régie communale autonome souhaiterait exercer un mandat au sein du collège communal ou présider le conseil communal.
B.11. En ce qui concerne la deuxième discrimination invoquée, il ne pourrait davantage être reproché au législateur décrétal d'avoir limité l'incompatibilité critiquée aux fonctions hiérarchiquement les plus élevées au sein d'une régie communale autonome, puisque c'est à ce niveau que le risque de conflits d'intérêts est le plus élevé. En effet, une fonction de direction est caractérisée par l'exercice d'une parcelle de l'autorité, ce qui implique un niveau important de responsabilités et de rémunération.
Par ailleurs, sans qu'il soit nécessaire d'examiner si, comme le soutient la partie requérante, les citoyens qui travaillent dans le secteur privé peuvent obtenir un congé politique pour exercer les mandats soumis à l'incompatibilité contestée, le législateur décrétal a pu raisonnablement estimer que, compte tenu, d'une part, de la position hiérarchique du directeur d'une régie communale autonome et, d'autre part, de la mission d'impulsion politique assumée, sur le plan local, par les membres des collèges communaux et par le président du conseil communal, l'incompatibilité ne frappe pas l'ensemble des citoyens de la commune qui, alors qu'ils exercent une autre profession, peuvent cumuler l'exercice des mandats visés et celui de leur profession.
B.12. En ce qui concerne la troisième discrimination invoquée, il ne pourrait davantage être reproché au législateur décrétal d'avoir limité l'incompatibilité critiquée à la présidence du conseil communal. En effet, la désignation, comme président du conseil, d'un conseiller communal se porte généralement sur un conseiller qui dispose d'un réseau de relations étendu et vu que le président du conseil dispose en outre de prérogatives importantes, le législateur décrétal a pu raisonnablement considérer au regard de l'objectif poursuivi, que seule cette fonction, à l'exclusion de celle de conseiller communal, devait faire l'objet de l'incompatibilité critiquée.
B.13. Pour le surplus, il appartient au seul législateur décrétal de fixer les incompatibilités qu'il estime nécessaires ou souhaitables pour atteindre l'objectif de nature politique qu'il s'est fixé, à savoir celui de la bonne gouvernance et de la transparence des pouvoirs locaux. A ce titre, il peut privilégier soit la prévention de conflits d'intérêts, soit le libre exercice de mandats électifs. La Cour ne peut censurer un tel choix que s'il est manifestement déraisonnable, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.
B.14. Le moyen unique n'est pas fondé.
Par ces motifs, la Cour, rejette le recours.
Ainsi rendu en langue française, en langue néerlandaise et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 29 novembre 2018.
Le greffier, P.-Y. Dutilleux Le président, F. Daoût