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Arrêt
publié le 24 décembre 2015

Extrait de l'arrêt n° 123/2015 du 24 septembre 2015 Numéros du rôle : 5932, 5957 et 5958 En cause : les questions préjudicielles concernant l'article 19bis-11, § 2, de la loi du 21 novembre 1989 relative à l'assurance obligatoire de la r La Cour constitutionnelle, composée des présidents A. Alen et J. Spreutels, et des juges L. Lavr(...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 123/2015 du 24 septembre 2015 Numéros du rôle : 5932, 5957 et 5958 En cause : les questions préjudicielles concernant l'article 19bis-11, § 2, de la loi du 21 novembre 1989Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/11/1989 pub. 23/12/2009 numac 2009000839 source service public federal interieur Loi relative à l'assurance obligatoire de la responsabilité civile en matière de véhicules automoteurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer relative à l'assurance obligatoire de la responsabilité en matière de véhicules automoteurs, posées par le Tribunal de police de Louvain et par le Tribunal de police d'Anvers.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents A. Alen et J. Spreutels, et des juges L. Lavrysen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke et F. Daoût, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président A. Alen, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles et procédure 1. Par jugement du 13 juin 2014 en cause de Stephan Liesenborgs contre la SA « Axa Belgium », dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 18 juin 2014, le Tribunal de police de Louvain a posé la question préjudicielle suivante : « L'article 19bis-11, § 2, de la loi du 21 novembre 1989Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/11/1989 pub. 23/12/2009 numac 2009000839 source service public federal interieur Loi relative à l'assurance obligatoire de la responsabilité civile en matière de véhicules automoteurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer relative à l'assurance obligatoire de la responsabilité en matière de véhicules automoteurs viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution, lus isolément ou en combinaison avec l'article 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme, en ce qu'il permet, au profit du conducteur d'un véhicule automoteur, le recours à un régime d'indemnisation automatique tant pour les dommages matériels que pour les dommages résultant de lésions corporelles, indépendamment d'une faute éventuelle de l'intéressé, alors que : a) les victimes qui invoquent l'article 19bis-11, § 1er, 7°, peuvent uniquement obtenir une indemnité réparant les dommages résultant de lésions corporelles (en vertu de l'article 23, § 1er, de l'arrêté royal du 11 juillet 2003 fixant les conditions d'agrément et le fonctionnement du Bureau belge et du Fonds commun de garantie) et b) les autres catégories de personnes qui font usage de la même route - comme les cyclistes - lorsqu'elles sont impliquées dans un accident avec un usager d'une autre catégorie que le conducteur d'un véhicule automoteur et qu'il n'est pas possible de déterminer qui a causé l'accident, ne peuvent bénéficier d'un tel régime d'indemnisation ? ».2. Par jugement du 24 juin 2014 en cause de Alfons Heylen contre la SCRL « P&V Assurances » dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 11 juillet 2014, le Tribunal de police d'Anvers a posé la question préjudicielle suivante : « L'article 19bis-11, § 2, de la loi relative à l'assurance obligatoire de la responsabilité en matière de véhicules automoteurs, interprété en ce sens qu'il n'exige pas la présence d'un élément objectif pour constater que la responsabilité ne peut pas être établie et que, dans un accident impliquant deux ou plusieurs parties, ce constat peut dès lors découler du simple fait que les parties concernées ont inscrit des informations insuffisantes, incomplètes, manquant de précision ou incorrectes ou ont fait des déclarations de cette nature, viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution, dès lors qu'une distinction qui n'est pas raisonnablement justifiée en résulte puisque ces parties se trouvent, de leur propre fait, dans une position plus favorable et peuvent toutes prétendre à l'indemnisation complète de leur dommage alors qu'au contraire, les parties impliquées dans un accident qui inscrivent des informations suffisantes, complètes, précises et correctes ou font des déclarations de telle nature, permettant ainsi l'établissement de la responsabilité, risquent de ne pas être ou de n'être que partiellement indemnisées ? ».3. Par jugement du 25 juin 2014 en cause de Edwin Marien contre la SA « Axa Belgium », dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 11 juillet 2014, le Tribunal de police d'Anvers a posé les questions préjudicielles suivantes : « L'article 19bis-11, § 2, de la loi relative à l'assurance obligatoire de la responsabilité en matière de véhicules automoteurs, interprété en ce sens qu'il n'exige pas la présence d'un élément objectif pour constater que la responsabilité ne peut pas être établie et que, dans un accident entre deux ou plusieurs véhicules automoteurs, ce constat peut dès lors découler du simple fait que l'un des (ou les) conducteurs concernés ont sciemment inscrit des informations insuffisantes, incomplètes, manquant de précision ou incorrectes ou ont fait des déclarations de cette nature, viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution, dès lors qu'une distinction qui n'est pas raisonnablement justifiée en résulte puisque ce ou ces conducteurs concernés se trouvent, de leur propre fait, dans une position plus favorable en ce sens qu'ils peuvent prétendre à tout le moins à l'indemnisation partielle du dommage subi alors qu'au contraire, le ou les conducteurs d'un véhicule automoteur impliqués dans un accident qui inscrivent des informations suffisantes, précises et correctes ou font des déclarations de telle nature, permettant ainsi l'établissement de la responsabilité, courent le risque que le dommage subi ne soit pas ou ne soit que partiellement indemnisé ? L'article 19bis-11, § 2, de la loi relative à l'assurance obligatoire de la responsabilité en matière de véhicules automoteurs, interprété en ce sens qu'il crée un régime d'indemnisation automatique exclusivement au profit des conducteurs de véhicules automoteurs qui ne peuvent pas démontrer leurs fautes respectives, viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution, dès lors qu'une distinction qui n'est pas raisonnablement justifiée se crée ainsi par rapport à d'autres catégories d'usagers de la route à défaut d'une disposition comparable dans le régime de la responsabilité légale ? ». Ces affaires, inscrites sous les numéros 5932, 5957 et 5958 du rôle de la Cour, ont été jointes. (...) III. En droit (...) B.1. L'article 19bis-11 de la loi du 21 novembre 1989Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/11/1989 pub. 23/12/2009 numac 2009000839 source service public federal interieur Loi relative à l'assurance obligatoire de la responsabilité civile en matière de véhicules automoteurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer relative à l'assurance obligatoire de la responsabilité en matière de véhicules automoteurs dispose : « § 1er. Toute personne lésée peut obtenir du Fonds la réparation des dommages causés par un véhicule automoteur : 1°) lorsque l'entreprise d'assurances est déclarée en faillite; 2°) lorsque l'entreprise d'assurances débitrice des indemnités, ayant renoncé à l'agrément en Belgique ou y ayant fait l'objet d'une mesure de révocation ou d'une décision d'interdiction d'activité en application de l'article 71, § 1er, alinéa 3 et § 2, de la loi du 9 juillet 1975Documents pertinents retrouvés type loi prom. 09/07/1975 pub. 24/12/2014 numac 2014000890 source service public federal interieur Loi relative au contrôle des entreprises d'assurances. - Coordination officieuse en langue allemande type loi prom. 09/07/1975 pub. 23/10/2015 numac 2015000557 source service public federal interieur Loi relative au contrôle des entreprises d'assurances. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer relative au contrôle des entreprises d'assurances, est en défaut d'exécuter ses obligations; 3°) lorsqu'aucune entreprise d'assurances n'est obligée à ladite réparation en raison d'un cas fortuit exonérant le conducteur du véhicule qui a causé l'accident; 4°) lorsque, en cas de vol, de violence ou de recel, la responsabilité civile à laquelle le véhicule peut donner lieu n'est pas assurée, conformément à l'exclusion légalement permise; 5°) lorsque, dans un délai de trois mois à compter de la date à laquelle elle a présenté à l'entreprise d'assurances du véhicule dont la participation à la circulation a causé l'accident ou à son représentant chargé du règlement des sinistres une demande d'indemnisation, l'entreprise d'assurances ou son représentant chargé du règlement des sinistres n'a pas donné de réponse motivée aux éléments de la demande; 6°) lorsque l'entreprise d'assurances n'a pas désigné de représentant chargé du règlement des sinistres; 7°) si le véhicule automoteur qui a causé l'accident ne peut pas être identifié; dans ce cas, le Fonds est substitué à la personne responsable; 8°) lorsqu'aucune entreprise d'assurances n'est obligée à ladite réparation soit du fait que l'obligation d'assurance n'a pas été respectée, soit parce que, dans les deux mois après l'accident, il est impossible d'identifier l'entreprise d'assurances. § 2. Par dérogation au 7°) du paragraphe précédent, si plusieurs véhicules sont impliqués dans l'accident et s'il n'est pas possible de déterminer lequel de ceux-ci a causé l'accident, l'indemnisation de la personne lésée est répartie, par parts égales, entre les assureurs couvrant la responsabilité civile des conducteurs de ces véhicules, à l'exception de ceux dont la responsabilité n'est indubitablement pas engagée ».

B.2. En vertu de l'article 19bis-11, § 2, de la loi du 21 novembre 1989Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/11/1989 pub. 23/12/2009 numac 2009000839 source service public federal interieur Loi relative à l'assurance obligatoire de la responsabilité civile en matière de véhicules automoteurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, si plusieurs véhicules sont impliqués dans un accident de roulage et s'il n'est pas possible de déterminer lequel de ceux-ci a causé l'accident, l'indemnisation de la personne lésée est répartie, par parts égales, entre les assureurs couvrant la responsabilité civile des conducteurs de ces véhicules, à l'exception de ceux dont la responsabilité n'est indubitablement pas engagée.

Il est demandé à la Cour si l'article 19bis-11, § 2, précité est compatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'il : a) prévoit la réparation des dommages matériels et des dommages résultant de lésions corporelles des victimes concernées, ce qui implique que le législateur traite cette catégorie de victimes de manière plus favorable que les victimes visées à l'article 19bis-11, § 1er, 7°, de la même loi (première branche de la question préjudicielle dans l'affaire n° 5932);b) prévoit la réparation des dommages des conducteurs d'un véhicule automoteur, ce qui implique que le législateur traite cette catégorie d'usagers de la route de manière plus favorable que les autres usagers de la route, comme les cyclistes (deuxième branche de la question préjudicielle dans l'affaire n° 5932 et deuxième question préjudicielle dans l'affaire n° 5958);c) a pour conséquence qu'en cas d'accident, les parties concernées qui font sciemment des déclarations insuffisantes, incomplètes, imprécises ou inexactes sont traitées de manière plus favorable que les parties impliquées dans un accident qui font des déclarations suffisantes, complètes, claires et correctes (question préjudicielle dans l'affaire n° 5957 et première question préjudicielle dans l'affaire n° 5958). a) En ce qui concerne la réparation des dommages matériels et des dommages résultant de lésions corporelles B.3. Le Fonds commun de garantie intervient dans l'hypothèse visée à l'article 19bis-11, § 1er, 7°, de la loi du 21 novembre 1989Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/11/1989 pub. 23/12/2009 numac 2009000839 source service public federal interieur Loi relative à l'assurance obligatoire de la responsabilité civile en matière de véhicules automoteurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer lorsque le véhicule qui a causé l'accident n'a pas été identifié. Dans ce cas, le Fonds est substitué à la personne responsable, l'indemnisation étant en principe limitée à la réparation des dommages résultant des lésions corporelles.

B.4. Le but recherché par le législateur était de reprendre, dans l'article 19bis-11 de la loi du 21 novembre 1989Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/11/1989 pub. 23/12/2009 numac 2009000839 source service public federal interieur Loi relative à l'assurance obligatoire de la responsabilité civile en matière de véhicules automoteurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, ce qui était déjà prévu dans l'article 80, § 1er, de la loi du 9 juillet 1975Documents pertinents retrouvés type loi prom. 09/07/1975 pub. 24/12/2014 numac 2014000890 source service public federal interieur Loi relative au contrôle des entreprises d'assurances. - Coordination officieuse en langue allemande type loi prom. 09/07/1975 pub. 23/10/2015 numac 2015000557 source service public federal interieur Loi relative au contrôle des entreprises d'assurances. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer relative au contrôle des entreprises d'assurances, certes avec les modifications qui s'imposaient, eu égard à la réglementation européenne et à la jurisprudence de la Cour. En adoptant la règle contenue dans l'article 19bis-11, § 1er, 7°, le législateur a plus précisément voulu répondre à l'arrêt n° 96/2000, du 20 septembre 2000, dans lequel la Cour a dit pour droit que l'article 80, § 1er, de la loi précitée du 9 juillet 1975 était incompatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'il excluait de l'intervention du Fonds commun de garantie la réparation du dommage corporel d'une personne blessée en cas de non-identification du véhicule.

B.5.1. Alors qu'en 1971 le législateur a voulu garantir l'intervention du Fonds commun de garantie parce que, « pour des raisons de justice sociale, il ne convient pas de laisser sans réparation les victimes d'accidents de la circulation qui ne peuvent être dédommagées » (Doc. parl., Sénat, 1970-1971, n° 570, p. 52), en 1975 il a limité cette intervention sur la base de la justification suivante de l'amendement du Gouvernement qui est devenu la disposition en cause : « Le texte du 2° du § 1er de l'article 50, tel qu'il était rédigé dans le Doc. 570 obligeait le Fonds Commun de garantie à intervenir dans n'importe quelle hypothèse de non-intervention d'une compagnie d'assurance agréée; cela visait, par exemple, toutes les restrictions apportées à l'indemnisation des personnes lésées par la législation sur l'assurance de responsabilité civile automobile.

Les conséquences pécuniaires de cette disposition auraient été très lourdes. C'est pourquoi l'amendement reprend le texte du projet de loi primitif sur le contrôle des entreprises d'assurance (Doc., Sénat 269) qui prévoyait l'intervention du Fonds lorsque l'obligation d'assurance n'ayant pas été respectée, aucune entreprise d'assurance agréée n'est obligée par la loi à ladite réparation. Cette version est d'ailleurs celle du projet de loi relatif à l'assurance obligatoire de la responsabilité civile automobile (art. 20, § 1er, 2°), qui a déjà été adopté à la Chambre.

L'amendement introduit en outre une disposition qui traduit la volonté des membres de la Commission des Affaires économiques d'étendre l'obligation d'intervention du Fonds à la réparation des dommages provoqués par un accident de la circulation imputable à un événement fortuit (Doc. Sénat, 570, p. 52) » (Doc. parl., Sénat, 1974-1975, n° 468-2, p. 19).

B.5.2. Compte tenu du but visé par la réglementation et des possibilités budgétaires du Fonds commun de garantie, qui doit être financé par les contributions des entreprises d'assurances autorisées à assurer la responsabilité civile en matière de véhicules automoteurs, il n'est pas déraisonnable que le législateur limite l'intervention du Fonds.

B.5.3. Le législateur n'a ainsi accordé l'intervention du Fonds que dans chacune des hypothèses décrites à l'article 19bis-11, § 1er.

B.6.1. Les deux catégories de personnes visées par l'article 19bis-11, § 1er, 7°, d'une part, et par l'article 19bis-11, § 2, d'autre part, se trouvent dans une situation objectivement différente. La première catégorie est victime d'un accident de roulage dont l'auteur est inconnu et, partant, également son assureur; dans ce cas, l'intervention du Fonds, substitué à la personne responsable, est en principe limitée à la seule réparation des dommages résultant des lésions corporelles; en revanche, la seconde catégorie est victime d'un accident de roulage impliquant plusieurs véhicules dont les auteurs sont connus et, partant, également leurs assureurs, mais dont il est impossible de déterminer la part de responsabilité respective dans l'accident; dans ce cas, l'intervention du Fonds n'est pas requise.

B.6.2. Toutefois, les assureurs ne sont pas confrontés aux limitations budgétaires qui justifient que le Fonds commun de garantie indemnise uniquement les dommages résultant des lésions corporelles. Pour ces assureurs, le risque financier qui résulte du dommage qui découle d'un accident pour lequel il n'est pas possible d'établir quel véhicule a causé l'accident ne diffère pas fondamentalement du risque financier du dommage qui découle d'un accident pour lequel il est possible d'établir quel véhicule a causé l'accident. Dans les deux cas, il s'agit d'un risque qui doit être couvert par les primes d'assurance.

Il est dès lors justifié que ces assureurs soient tenus d'indemniser le dommage matériel subi par la personne lésée.

B.6.3. Le contrôle de la disposition en cause au regard des articles 10 et 11 de la Constitution, combinés avec l'article 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme, n'aboutit pas à une autre conclusion.

B.7. En sa première branche, la question préjudicielle dans l'affaire n° 5932 appelle une réponse négative. b) En ce qui concerne les catégories d'usagers de la route B.8. L'article en cause implique que les personnes lésées par un accident de roulage sont traitées différemment en fonction de la nature du véhicule au moyen duquel l'accident a été causé. Pour les véhicules automoteurs, au sens de la loi du 21 novembre 1989Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/11/1989 pub. 23/12/2009 numac 2009000839 source service public federal interieur Loi relative à l'assurance obligatoire de la responsabilité civile en matière de véhicules automoteurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, l'assurance est obligatoire. Pour les bicyclettes, l'assurance n'est pas obligatoire; l'assurance de la responsabilité familiale, qui couvre le dommage causé par l'utilisation d'une bicyclette, est une assurance non obligatoire.

B.9. Le législateur a pu estimer que le caractère obligatoire de l'assurance était justifié au regard du risque particulier de lésions corporelles découlant de la présence de véhicules automoteurs dans la circulation, risque qui est moindre en cas de présence de bicyclettes dans la circulation (voy. l'arrêt n° 167/2004 du 28 octobre 2004, B.4.2).

B.10. Il est inhérent au caractère facultatif d'une assurance que la personne lésée ne pourra pas toujours s'adresser à un assureur; en effet, cela n'est possible que si la personne responsable du dommage a souscrit une assurance. En revanche, il découle du caractère obligatoire d'une assurance que la personne lésée a, en principe, la possibilité de s'adresser à un assureur.

La circonstance que la personne lésée ne pourra, le cas échéant, pas s'adresser à un assureur ne l'empêche par ailleurs pas de s'adresser à la personne responsable du dommage pour en obtenir réparation.

B.11. En sa deuxième branche, la question préjudicielle dans l'affaire n° 5932 et la deuxième question préjudicielle dans l'affaire n° 5958 appellent une réponse négative. c) En ce qui concerne les déclarations insuffisantes, incomplètes, imprécises ou inexactes B.12. La question préjudicielle dans l'affaire n° 5957 et la première question préjudicielle dans l'affaire n° 5958 découlent de la préoccupation des juges a quo quant au risque de fraude lié à la disposition en cause, telle qu'elle est interprétée par la jurisprudence. En effet, elle pourrait inciter les parties concernées à occulter ou à présenter différemment le déroulement d'un accident afin de partager l'indemnisation prévue par la disposition.

B.13. La portée de la disposition en cause ne peut être dissociée du contexte de son élaboration ni de son interprétation. Par son arrêt n° 96/2000 précité, la Cour a jugé : « B.2. La question préjudicielle invite la Cour à déterminer s'il est justifié, en ce qui concerne l'intervention du Fonds commun de garantie visant à indemniser le dommage découlant de lésions corporelles causées par un véhicule automoteur, de faire une distinction entre les deux catégories de personnes suivantes : - d'une part, les victimes d'un accident de roulage lorsque l'identité du véhicule automoteur qui a causé l'accident n'a pas été relevée ou lorsqu'aucune entreprise d'assurances n'est obligée à une réparation, soit parce que l'obligation d'assurance n'a pas été respectée, soit en raison d'un cas fortuit ayant mis hors cause le conducteur du véhicule qui a causé l'accident; - d'autre part, les victimes d'un accident de roulage lorsqu'il n'a pas pu être établi lequel des conducteurs impliqués dans l'accident est responsable.

Les dispositions en cause, en particulier l'article 80, § 1er, alinéa 1er, 1° et 2°, ont pour effet que le Fonds commun de garantie doit intervenir à l'égard de la catégorie de personnes citée en premier lieu, alors que cette intervention n'est pas prévue vis-à-vis de la deuxième catégorie de personnes. [...] B.6. Il n'appartient pas à la Cour de dire s'il serait équitable d'ajouter d'autres hypothèses à celles qui sont limitativement prévues par la loi ou d'apprécier l'opportunité d'aggraver les obligations du Fonds. Elle peut seulement examiner si, en ce qu'elles ne permettent pas à la catégorie de personnes indiquée dans la décision de renvoi d'obtenir l'intervention du Fonds, les dispositions litigieuses créent une différence de traitement injustifiée.

B.7.1. Il s'agit de la catégorie des personnes qui ont été blessées alors qu'elles se trouvaient dans un véhicule dont le conducteur n'a commis aucune faute, à la suite d'un accident causé par un autre véhicule couvert par une assurance obligatoire, mais qui ne sont pas indemnisées pour l'unique raison que ni les déclarations des personnes impliquées, ni des témoignages, ni aucun élément matériel ne permettent de déterminer, parmi les conducteurs du deuxième véhicule et d'un troisième également présent sur les lieux de l'accident, lequel a commis une faute en relation avec celui-ci.

B.7.2. Ces personnes se trouvent dans une situation qui, au regard des objectifs du législateur, est en tous points semblable à celles qui sont mentionnées à l'article 80, § 1er, alinéa 1er, de la loi. La seule circonstance qu'il n'a pas été possible de déterminer le responsable de l'accident, alors que cet article ne mentionne que l'hypothèse où ce responsable n'a pas été identifié, n'est pas pertinente pour justifier la différence de traitement critiquée.

B.8. La question préjudicielle appelle une réponse positive dans les limites précisées en B.7.1 ».

B.14. Ainsi qu'il a été rappelé plus haut, la disposition en cause, telle qu'elle a été insérée par la loi du 22 août 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 22/08/2002 pub. 17/09/2002 numac 2002011312 source ministere des affaires economiques Loi portant diverses dispositions relatives à l'assurance obligatoire de la responsabilité en matière de véhicules automoteurs fermer portant diverses dispositions relatives à l'assurance obligatoire de la responsabilité en matière de véhicules automoteurs, vise à répondre à l'arrêt n° 96/2000. Par son arrêt n° 21/2011 du 3 février 2011, la Cour a jugé ce qui suit au sujet de la portée de cette disposition : « B.6.1. L'arrêt n° 96/2000 concernait la situation de la ' catégorie de personnes qui ont été blessées alors qu'elles se trouvaient dans un véhicule dont le conducteur n'a commis aucune faute, à la suite d'un accident causé par un autre véhicule couvert par une assurance obligatoire, mais qui ne sont pas indemnisées pour l'unique raison [qu'il n'est pas possible de déterminer], parmi les conducteurs du deuxième véhicule et d'un troisième également présent sur les lieux de l'accident, lequel a commis une faute en relation avec celui-ci ', mais cette situation ne diffère pas fondamentalement de la situation des conducteurs ou propriétaires d'un véhicule qui ont subi des dommages, lorsque l'accident implique un seul autre véhicule et qu'il est impossible de déterminer quel véhicule a causé cet accident. Dans les deux cas, l'impossibilité de déterminer le véhicule qui a causé l'accident a pour effet que la personne lésée ne peut être indemnisée selon les règles du droit commun en matière de responsabilité.

B.6.2. La circonstance que l'arrêt n° 96/2000 visait la situation de la ' catégorie de personnes qui [...] se trouvaient dans un véhicule dont le conducteur n'a commis aucune faute ' n'y change rien, étant donné qu'aucun des conducteurs impliqués ne saurait être tenu pour responsable de l'accident lorsqu'à la suite d'un accident impliquant plusieurs véhicules - qu'il s'agisse de deux véhicules ou plus -, il a été établi, par décision judiciaire, qu'il est impossible de déterminer le véhicule qui a causé cet accident.

B.7. Les travaux préparatoires ne contiennent aucune justification d'une différence de traitement découlant du nombre de véhicules impliqués dans l'accident. Selon le Conseil des ministres, le législateur n'entendait pas limiter le champ d'application de l'article 19bis-11, § 2, de la loi du 21 novembre 1989Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/11/1989 pub. 23/12/2009 numac 2009000839 source service public federal interieur Loi relative à l'assurance obligatoire de la responsabilité civile en matière de véhicules automoteurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer aux accidents impliquant plus de deux véhicules.

B.8. L'article 19bis-11, § 2, de la loi du 21 novembre 1989Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/11/1989 pub. 23/12/2009 numac 2009000839 source service public federal interieur Loi relative à l'assurance obligatoire de la responsabilité civile en matière de véhicules automoteurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, interprété en ce sens qu'il ne peut s'appliquer lorsque deux véhicules seulement sont impliqués dans un accident, n'est dès lors pas compatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution.

B.9. Une lecture combinée de la disposition en cause et de l'article 4, § 1er, alinéa 2, de la loi du 21 novembre 1989Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/11/1989 pub. 23/12/2009 numac 2009000839 source service public federal interieur Loi relative à l'assurance obligatoire de la responsabilité civile en matière de véhicules automoteurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer ne conduit pas à une autre conclusion.

B.10. Dans l'interprétation de la disposition en cause mentionnée en B.3, la question préjudicielle appelle une réponse affirmative.

B.11.1. L'article 19bis-11, § 2, de la loi du 21 novembre 1989Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/11/1989 pub. 23/12/2009 numac 2009000839 source service public federal interieur Loi relative à l'assurance obligatoire de la responsabilité civile en matière de véhicules automoteurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer peut toutefois aussi être interprété en ce sens que son application requiert que l'accident implique deux véhicules ou plus. Dans la version néerlandaise de cette disposition, le mot ' verscheidene ' peut en effet signifier ' plus d'un ', ce que confirme l'emploi du terme ' plusieurs ' dans la version française.

B.11.2. L'article 4, § 1er, alinéa 2, de la loi du 21 novembre 1989Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/11/1989 pub. 23/12/2009 numac 2009000839 source service public federal interieur Loi relative à l'assurance obligatoire de la responsabilité civile en matière de véhicules automoteurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, en vertu duquel le conducteur d'un véhicule automoteur peut être exclu du bénéfice de l'indemnisation lorsqu'il n'a pas subi de lésions corporelles, ne porte pas atteinte à cette interprétation. Cet article, en cas d'application de l'article 19bis-11, § 2, de cette loi, ainsi interprété, n'entraîne pas que l'assureur qui couvre la responsabilité civile du conducteur lésé ne serait pas tenu d'indemniser les dommages conformément à cette dernière disposition.

L'article 19bis-11, § 2, de la loi du 21 novembre 1989Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/11/1989 pub. 23/12/2009 numac 2009000839 source service public federal interieur Loi relative à l'assurance obligatoire de la responsabilité civile en matière de véhicules automoteurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer ne contient ni une quelconque limitation en ce qui concerne la qualité de la ' personne lésée ' à l'égard des assureurs tenus à réparation, ni un renvoi à l'article 4, § 1er, alinéa 2, de cette loi. Tandis que cette dernière disposition s'inscrit dans le cadre d'un régime basé sur la responsabilité et sur les assurances de la responsabilité, la règle contenue dans l'article 19bis-11, § 2, de la loi du 21 novembre 1989Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/11/1989 pub. 23/12/2009 numac 2009000839 source service public federal interieur Loi relative à l'assurance obligatoire de la responsabilité civile en matière de véhicules automoteurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer peut être considérée comme un régime d'indemnisation automatique que la loi impose aux assureurs de la responsabilité civile des conducteurs de véhicules automoteurs (à l'exception des assureurs des conducteurs dont la responsabilité civile n'est indubitablement pas engagée).

B.12. Dans cette interprétation de la disposition en cause, la question préjudicielle appelle une réponse négative ».

B.15. Il ressort de ce qui précède que le législateur a, par la disposition en cause, poursuivi un but légitime, consistant à garantir la réparation du dommage subi par la personne lésée. Cette disposition n'est pas incompatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution au seul motif que les parties impliquées dans un accident pourraient la détourner sciemment de sa finalité en faisant des déclarations insuffisantes, incomplètes, imprécises ou inexactes.

Certes, il peut être attendu de la part du législateur qu'il vise à empêcher et punisse les comportements frauduleux, mais une disposition législative qui est en soi justifiée ne devient pas discriminatoire du seul fait qu'elle pourrait avoir pour conséquence, en raison d'un risque inhérent de collusion, que les personnes qui respectent son prescrit seraient lésées par rapport aux personnes qui l'enfreindraient.

Il appartient aux juges a quo, en cas de constat de fraude et de collusion, d'y attacher les conséquences adéquates. Le principe fraus omnia corrumpit s'oppose en effet à ce que la fraude procure un avantage à son auteur.

B.16. La question préjudicielle dans l'affaire n° 5957 et la première question préjudicielle dans l'affaire n° 5958 appellent une réponse négative.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : L'article 19bis-11, § 2, de la loi du 21 novembre 1989Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/11/1989 pub. 23/12/2009 numac 2009000839 source service public federal interieur Loi relative à l'assurance obligatoire de la responsabilité civile en matière de véhicules automoteurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer relative à l'assurance obligatoire de la responsabilité en matière de véhicules automoteurs ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution, combinés ou non avec l'article 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme.

Ainsi rendu en langue néerlandaise et en langue française, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 24 septembre 2015.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux Le président, A. Alen

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