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Arrêt
publié le 10 décembre 2008

Extrait de l'arrêt n° 154/2008 du 6 novembre 2008 Numéro du rôle : 4405 En cause : le recours en annulation partielle de la loi du 21 avril 2007 relative à l'internement des personnes atteintes d'un trouble mental, introduit par P.H. et aut La Cour constitutionnelle, composée des présidents M. Bossuyt et M. Melchior, et des juges P. Ma(...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 154/2008 du 6 novembre 2008 Numéro du rôle : 4405 En cause : le recours en annulation partielle de la loi du 21 avril 2007Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/04/2007 pub. 13/07/2007 numac 2007009524 source service public federal justice Loi relative à l'internement des personnes atteintes d'un trouble mental fermer relative à l'internement des personnes atteintes d'un trouble mental, introduit par P.H. et autres.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents M. Bossuyt et M. Melchior, et des juges P. Martens, R. Henneuse, E. De Groot, L. Lavrysen, A. Alen, J.-P. Moerman, E. Derycke et J. Spreutels, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président M. Bossuyt, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet du recours et procédure Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 2 janvier 2008 et parvenue au greffe le 3 janvier 2008, un recours en annulation totale ou partielle de certaines dispositions (les articles 26, § 4, alinéa 2, 27, alinéa 2, 34, alinéa 2, 38, § 2, 39, § 3, 40, 42, § 3, alinéa 2, 43, alinéa 2, 53, § 4, alinéa 4, et § 5, alinéa 2, 55, alinéa 2, 58, § 3, alinéa 2, et § 4, alinéa 3, 70, § 2, alinéa 2, et § 3, alinéa 2, 73, § 3, alinéa 2, 74, alinéa 2, 85, § 2, alinéa 2, 86, § 1er, alinéa 2, 98, § 3, alinéa 2, 99, alinéa 2, 110, alinéa 2, et 116, § 1er, alinéa 2) de la loi du 21 avril 2007Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/04/2007 pub. 13/07/2007 numac 2007009524 source service public federal justice Loi relative à l'internement des personnes atteintes d'un trouble mental fermer relative à l'internement des personnes atteintes d'un trouble mental (publiée au Moniteur belge du 13 juillet 2007) a été introduit par P.H., A.C., A. V.H., S.P., R.L., Z.Y., R.R., A.K., J.C. et W. V.R., faisant élection de domicile à 3945 Oostham, Heldenplein 42. (...) II. En droit (...) Quant à la recevabilité B.1. Le Conseil des ministres conteste la recevabilité du recours en annulation en raison de l'absence de preuve de la capacité d'ester en justice des parties requérantes. En vertu des articles 29 et 30 de la loi du 9 avril 1930 « de défense sociale à l'égard des anormaux, des délinquants d'habitude et des auteurs de certains délits sexuels » (ci-après : loi de défense sociale), telle qu'elle a été remplacée par l'article 1er de la loi du 1er juillet 1964, il est possible qu'elles ne disposent plus de la capacité d'ester elles-mêmes en justice, ce qui aurait pour conséquence que leur recours serait irrecevable.

B.2. L'article 29, § 1er, alinéa 1er, de la loi de défense sociale dispose qu'un inculpé qui est interné par application des articles 7 ou 21 et qui n'est ni interdit ni placé sous tutelle, peut, si ses intérêts le commandent, être pourvu d'un administrateur provisoire. En vertu de l'article 30, § 1er, de la même loi, l'administrateur provisoire peut, en vertu d'une autorisation spéciale, accordée par le juge de paix du domicile de l'interné, représenter celui-ci en justice comme demandeur.

Les dispositions précitées ne règlent que l'éventuelle représentation en droit de l'interné pour la gestion de son patrimoine. L'internement des parties requérantes ne les prive par conséquent aucunement de leur capacité d'ester en justice comme demandeur ou défendeur en ce qui concerne leur statut personnel. Les dispositions attaquées concernent la liberté personnelle des internés et les modalités selon lesquelles ceux-ci peuvent contester leur maintien en détention. Elles touchent donc au statut personnel des internés.

B.3. Le Conseil des ministres conteste par ailleurs la recevabilité du recours, parce que les parties requérantes allèguent la violation des articles 10 et 11 de la Constitution, combinés avec les articles 5.4 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, sans indiquer les catégories de personnes entre lesquelles les dispositions attaquées instaureraient une différence de traitement. Elles inviteraient ainsi la Cour à contrôler directement les dispositions attaquées au regard de dispositions conventionnelles, contrôle pour lequel la Cour n'est pas compétente.

B.4. Lorsqu'une partie requérante dénonce, dans le cadre d'un recours en annulation, la violation des articles 10 et 11 de la Constitution, combinés avec une disposition conventionnelle garantissant un droit fondamental, le moyen consiste en ce que cette partie estime qu'une différence de traitement est instaurée, parce que les dispositions qu'elle attaque dans le recours la prive de l'exercice de ce droit fondamental, alors que ce dernier serait garanti sans restriction à tout autre citoyen. Ainsi, cette partie requérante n'invite pas la Cour à contrôler directement les dispositions attaquées au regard de la disposition conventionnelle visée.

B.5. Les exceptions sont rejetées.

Quant au fond B.6. Le premier moyen, dirigé contre les articles 38, § 2, 55 et 110 de la loi du 21 avril 2007Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/04/2007 pub. 13/07/2007 numac 2007009524 source service public federal justice Loi relative à l'internement des personnes atteintes d'un trouble mental fermer relative à l'internement des personnes atteintes d'un trouble mental (ci-après : la loi relative à l'internement), est pris de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution, combinés avec l'article 5.4 de la Convention européenne des droits de l'homme, en ce que les dispositions attaquées priveraient l'interné de la possibilité de faire examiner à bref délai la légalité de sa détention et de faire ordonner sa mise en liberté si la détention est illégale.

L'article 38, § 2, de la loi relative à l'internement dispose : « Au plus tôt dix mois et au plus tard douze mois après la première décision de placement, le directeur rend un avis sur l'éventuelle nécessité de transférer l'interné ou sur le souhait éventuel de celui-ci d'être transféré ainsi que sur l'opportunité des modalités prévues aux articles 18, § 2, 3°, 19, 21, 22 et 23. Les articles 39 et 40 sont d'application ».

L'article 55 de la même loi dispose : « Sauf en cas d'octroi de la détention limitée ou de la surveillance électronique, le tribunal de l'application des peines indique également dans son jugement la date à laquelle le directeur doit émettre un nouvel avis conformément à l'article 38 s'il n'accorde pas la libération à l'essai.

Ce délai s'élève à six mois au minimum et ne peut excéder un an à compter du jugement ».

L'article 110 de la même loi dispose : « Si le tribunal de l'application des peines n'accorde pas la modalité, il indique dans son jugement la date à laquelle le directeur doit émettre un nouvel avis.

Ce délai s'élève à six mois au minimum et ne peut excéder un an à compter du jugement ».

B.7. La loi relative à l'internement prévoit une évaluation périodique de l'internement des personnes et exige à cet égard que le directeur émette un avis motivé sur chacune des diverses modalités de l'internement dont le tribunal de l'application des peines peut décider, à savoir le transfèrement, la permission de sortie en vue de la réinsertion sociale, le congé, la détention limitée, la surveillance électronique et la libération à l'essai, qui doivent toujours précéder une libération définitive. Le directeur doit rendre son avis au plus tôt dix mois et au plus tard douze mois après la première décision de placement et, ensuite, après chaque décision du tribunal de l'application des peines, dans le délai déterminé par celui-ci, qui est de six mois au minimum et d'un an au maximum à dater du jugement. La mesure a été expliquée ainsi dans l'exposé des motifs : « Le directeur est tenu de rendre périodiquement pareil avis jusqu'au moment où l'interné a été placé en détention limitée ou sous surveillance électronique ou qu'il a été libéré à l'essai.

Ce contrôle périodique de l'état de l'interné est une recommandation de la Commission Internement qui a pour but d'éviter que les internés soient ' oubliés '. La Commission ayant constaté que certains internés ne sollicitent jamais leur comparution devant la commission de défense sociale, la procédure doit obligatoirement être lancée sur l'initiative du directeur et non à la demande de l'interné ou de son conseil » (Doc. parl., Chambre, 2006-2007, DOC 51-2841/001, p. 40).

L'affaire est examinée lors d'une audience qui doit avoir lieu au plus tard deux mois après la réception de l'avis du directeur (article 42, § 1er, de la loi relative à l'internement) et le tribunal de l'application des peines rend sa décision dans les quatorze jours de la mise en délibéré (article 46 de la loi relative à l'internement).

Sans préjudice de la possibilité pour le tribunal de l'application des peines de remettre une seule fois l'examen de l'affaire à une audience ultérieure, sans que cette audience puisse avoir lieu plus de deux mois après la remise (article 45 de la loi relative à l'internement), il s'écoule entre deux décisions du tribunal de l'application des peines au maximum quatorze mois et demi.

B.8. En vertu de l'article 5.4 de la Convention européenne des droits de l'homme, toute personne qui est privée de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d'introduire un recours devant un tribunal, afin qu'il statue à bref délai sur la légalité de sa détention et qu'il ordonne sa libération si la détention est illégale.

Pour que la détention d'un malade mental soit légale, trois conditions minimales doivent être remplies selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme : il faut démontrer, sur la base d'une expertise médicale objective, qu'il existe un trouble mental réel et permanent; ce trouble doit en outre être de nature à justifier l'internement; l'internement peut uniquement se prolonger tant que le trouble persiste, en ce sens que l'interné doit avoir la possibilité d'être libéré dès qu'il est à nouveau sain d'esprit (CEDH, 24 octobre 1979, Winterwerp c. Pays-Bas, § 37). Lorsque le législateur national prévoit le contrôle automatique de la légalité de la détention - ce qui arrive généralement lorsqu'une personne est internée pour une longue durée ou une durée indéterminée en raison d'une maladie psychique ou en raison du danger qu'elle représente pour elle-même et pour la société, comme le détermine en l'espèce la loi relative à l'internement -, ce contrôle doit intervenir à intervalles raisonnables (CEDH, 24 septembre 2000, Herczegfalvy c. Autriche, § 75).

Il ne peut être déduit de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, et notamment des arrêts de celle-ci que citent les parties requérantes (CEDH, 26 septembre 2000, Oldham c. Royaume-Uni, §§ 30, 31 et 37; 24 juillet 2001, Hirst c. Royaume-Uni, §§ 37, 38 et 44; 21 juin 2005, Blackstock c. Royaume-Uni, § 44), que le délai maximum de quatorze mois et demi prévu par les dispositions attaquées serait en soi déraisonnable à la lumière de l'article 5.4 de la Convention européenne des droits de l'homme. L'appréciation du caractère raisonnable des intervalles, par lequel il est satisfait à l'exigence d'une décision « à bref délai », visée à l'article 5.4 précité, appartient en premier lieu aux instances nationales et doit être examinée in concreto. Les délais introduits par les dispositions attaquées, dont les durées minimale et maximale sont fixées, permettent au directeur, après qu'une première décision a été prise, et au tribunal de l'application des peines, à l'occasion de décisions ultérieures relatives à la gestion de l'internement, de déterminer concrètement la durée de ces intervalles en fonction des circonstances propres à la cause.

Il s'ensuit que les parties requérantes ne sont pas discriminées dans l'exercice du droit fondamental protégé par cette disposition.

Le premier moyen n'est pas fondé.

B.9. Le deuxième moyen, dirigé contre les articles 39, § 3, et 40 de la loi relative à l'internement, est pris de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution, combinés avec l'article 5.4 de la Convention européenne des droits de l'homme, en ce que les dispositions attaquées, qui prescrivent qu'une copie des avis du directeur et du ministère public est communiquée à l'interné, et non à son conseil, ne tiendraient pas compte de la nature particulière de la privation de liberté des malades mentaux, qui, souvent, ne peuvent agir pour eux-mêmes. Pour les mêmes raisons, les parties requérantes prennent un troisième moyen, de la violation des mêmes dispositions, contre les articles 26, § 4, in fine, 34, in fine, 42, § 3, in fine, 53, § 4, in fine, 58, § 3, in fine, 70, § 2, in fine, 73, § 3, in fine, 85, § 2, in fine, et 98, § 3, in fine, de la loi relative à l'internement, qui tous disposent que l'interné peut obtenir, à sa demande, une copie du dossier.

B.10.1. Si l'article 5.4 de la Convention européenne des droits de l'homme n'oblige pas, en règle, les Etats à communiquer les avis et autres pièces du dossier au conseil de la personne sur la détention de laquelle le juge doit statuer, il découle cependant de cette disposition que des garanties procédurales particulières peuvent s'avérer nécessaires aux intérêts des personnes qui, eu égard à leurs troubles mentaux, ne sont pas pleinement capables d'agir pour elles-mêmes (CEDH, 24 octobre 1979, Winterwerp c. Pays-Bas, § 60). Par ailleurs, le principe général de droit de la défense implique le droit à l'assistance d'un avocat en vue de comparaître devant une juridiction lorsqu'il ressort des circonstances qu'il est très improbable que la personne concernée puisse défendre utilement sa cause. Tel est le cas lorsqu'il s'agit de personnes privées de leur liberté en raison d'un trouble mental, dont on ne peut raisonnablement attendre qu'elles soient à même de prendre elles-mêmes les décisions qui s'imposent en matière de procédure.

C'est dès lors à bon droit que le législateur a estimé que l'assistance obligatoire d'un avocat est justifiée « parce qu'il s'agit dans chaque cas de décisions importantes pour l'interné » et « vu sa situation et l'impossibilité de faire appel de ces décisions » (Doc. parl., Chambre, 2006-2007, DOC 51-2841/001, p. 67) et qu'il a prévu, à l'article 118 de la loi relative à l'internement, que les juridictions ne peuvent statuer sur les demandes d'internement que si les intéressés sont assistés ou représentés par un conseil et que le tribunal de l'application des peines et la Cour de cassation ne peuvent statuer à l'égard d'un interné et sur l'internement d'un condamné que si ceux-ci sont assistés ou représentés par un conseil.

B.10.2. En omettant de prévoir que l'avis du directeur et l'avis du ministère public sont obligatoirement communiqués également au conseil de l'interné, les articles 39, § 3, et 40 attaqués placent toutefois cet avocat dans l'impossibilité de remplir correctement sa mission de conseil et de défense de la personne concernée. Il ne peut en effet être présumé, en raison de la situation de celle-ci, qu'elle sera dans tous les cas à même d'apprécier la portée et l'importance des documents qui lui sont adressés et de les communiquer sans retard à son conseil.

Les dispositions attaquées présentent en outre une incohérence avec les dispositions qui prévoient que si l'avis du directeur n'est pas communiqué dans le délai fixé, le président du tribunal de première instance peut, à la demande écrite du conseil de l'interné, condamner le ministre ou la personne morale à émettre son avis et à en communiquer copie à l'interné et à son conseil (article 39, § 4), et qui disposent que le conseil est informé des lieu, jour et heure de l'audience (article 42, § 2).

B.10.3. En ne prévoyant pas que l'avis du directeur et l'avis du ministère public sont communiqués au conseil de l'interné, les articles 39, § 3, et 40 de la loi attaquée privent sans justification les personnes concernées de l'exercice effectif du droit garanti par l'article 5.4 de la Convention européenne des droits de l'homme, de sorte que les articles 10 et 11 de la Constitution sont violés.

Le deuxième moyen est fondé. Il convient dès lors d'annuler les articles 39, § 3, et 40 en ce qu'ils ne prévoient pas que l'avis du directeur et l'avis du ministère public soient communiqués au conseil de l'interné.

B.11.1. Les dispositions attaquées dans le troisième moyen omettent de prévoir que le conseil de l'interné peut obtenir une copie du dossier, ce droit n'appartenant qu'à l'interné lui-même.

B.11.2. Pour les mêmes motifs que ceux qui sont exposés en B.10.2, en ne prévoyant pas qu'une copie du dossier peut être demandée et obtenue par le conseil de l'interné, les dispositions attaquées empêchent celui-ci de remplir efficacement la mission qui lui a été confiée.

B.11.3. Le troisième moyen est fondé. Il convient dès lors d'annuler les articles 26, § 4, alinéa 2, 34, alinéa 2, 42, § 3, alinéa 2, 53, § 4, alinéa 4, 58, § 3, alinéa 2, 70, § 2, alinéa 2, 73, § 3, alinéa 2, 85, § 2, alinéa 2, et 98, § 3, alinéa 2, en ce qu'ils ne prévoient pas qu'une copie du dossier peut être demandée et obtenue par le conseil de l'interné.

B.12. Le quatrième moyen, pris de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution, combinés avec l'article 5.4 de la Convention européenne des droits de l'homme, est dirigé contre les articles 27, 43, 53, § 5, 58, § 4, 70, § 3, 74, 86, § 1er, et 99 de la loi relative à l'internement, en ce que les dispositions attaquées exigent que l'interné comparaisse en personne, au motif que ces dispositions négligent elles aussi la nature particulière de la privation de liberté des personnes malades mentales qui, souvent, ne peuvent agir par elles-mêmes.

B.13. L'article 5.4 de la Convention européenne des droits de l'homme n'oblige pas les Etats à dispenser ceux qui estiment être détenus illégalement d'une comparution en personne devant le juge qui doit décider de la légalité du maintien de la détention. Le mode spécifique de détention qu'est l'internement exige précisément que le juge puisse s'assurer personnellement de l'état dans lequel l'interné se trouve au moment où le juge doit décider de l'internement, du maintien ou des modalités de celui-ci. En outre, les dispositions législatives attaquées tiennent compte des problèmes spécifiques auxquels pourrait donner lieu une comparution en personne de l'interné, notamment lors de l'examen de questions médico-psychiatriques liées à l'état de l'interné, ainsi qu'il ressort entre autres des articles 43 et 86, § 1er, de la loi relative à l'internement.

Le quatrième moyen n'est pas fondé.

B.14. Le cinquième moyen, qui est dirigé contre l'article 116, § 1er, alinéas 2 et 3, de la loi relative à l'internement, est pris de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution, combinés avec l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, en ce que le droit à un procès équitable serait violé par la limitation des délais dans lesquels un pourvoi en cassation peut être introduit contre la décision du tribunal de l'application des peines et un mémoire peut être déposé devant la Cour de cassation.

L'article 116, § 1er, de la loi relative à l'internement dispose : « Le ministère public se pourvoit en cassation dans un délai de vingt-quatre heures à compter du jour où la décision est portée à sa connaissance.

Le conseil de l'interné se pourvoit en cassation dans un délai de vingt-quatre heures à compter du jour de la notification du jugement par pli judiciaire. Les moyens de cassation sont proposés dans un mémoire qui doit parvenir au greffe de la Cour de cassation au plus tard le cinquième jour qui suit la date du pourvoi.

Les pourvois sont introduits par déclaration au greffe du tribunal de l'application des peines ».

B.15.1. Dans le système mis en place par la loi attaquée, le pourvoi en cassation constitue l'unique recours ouvert contre les décisions du tribunal de l'application des peines. Il ressort de l'exposé des motifs du projet de loi que le législateur a entendu ouvrir largement l'accès à la Cour de cassation, en compensation de la suppression du recours qui existait auparavant en cette matière : « Actuellement, les décisions des commissions de défense sociale concernant la libération à l'essai sont susceptibles de recours devant la commission supérieure de défense sociale. Les décisions de la commission supérieure peuvent faire l'objet d'un pourvoi en cassation.

La possibilité de formuler un recours contre une décision du tribunal de l'application des peines n'est pas prévue, par analogie avec le statut juridique externe des condamnés à une peine privative de liberté. Rappelons que le dossier de l'interné fait quand même toujours l'objet d'un examen périodique, sans que l'interné ne doive prendre la moindre initiative à cet effet.

Le pourvoi en cassation dont dispose l'interné, limité aujourd'hui aux seules décisions de la commission supérieure concernant la libération à l'essai, est en revanche considérablement étendu. Il deviendra possible contre toute décision du tribunal de l'application des peines portant sur une modalité qui permet à l'interné de quitter l'établissement » (Doc. parl., Chambre, 2006-2007, DOC 51-2841/001, p. 66).

B.15.2. Il relève du pouvoir d'appréciation du législateur de déterminer quels recours doivent être ouverts contre les décisions du tribunal de l'application des peines.

Il peut veiller à unifier les délais de recours afin d'éviter l'insécurité juridique qui naît de la coexistence de délais différents dans des procédures comparables.

B.15.3. La fixation des délais extrêmement brefs prévus par l'article 116, § 1er, de la loi attaquée a été justifiée par le souci de les aligner, soit, ainsi qu'il fut déclaré dans les travaux préparatoires précités, sur les délais qui concernent « le statut externe du condamné à une peine privative de liberté » (article 97 de la loi du 17 mai 2006Documents pertinents retrouvés type loi prom. 17/05/2006 pub. 15/06/2006 numac 2006009456 source service public federal justice Loi relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté et aux droits reconnus à la victime dans le cadre des modalités d'exécution de la peine (2) fermer relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté et aux droits reconnus à la victime dans le cadre des modalités d'exécution de la peine), soit, comme le fait valoir le Conseil des ministres, sur les délais prévus en matière de détention préventive (article 31 de la loi du 20 juillet 1990 relative à la détention préventive).

B.15.4. Toutefois, la fixation de délais aussi courts n'est pas raisonnablement justifiée dans la matière de l'internement des personnes atteintes d'un trouble mental.

Dans cette matière, le législateur a permis d'introduire un pourvoi en cassation, qui est le seul recours désormais offert par la loi, non à l'interné mais à son conseil, ce qui suppose que celui-ci prenne la décision de l'introduire dans l'intérêt d'une personne avec laquelle, en raison de son trouble mental, la communication sera souvent difficile.

La fixation de tels délais ne tient ainsi pas compte « des garanties spéciales de procédure [qui] peuvent s'imposer pour protéger ceux qui, en raison de leurs troubles mentaux, ne sont pas entièrement capables d'agir pour leur propre compte » (CEDH, 24 octobre 1979, Winterwerp c.

Pays-Bas, § 60).

B.16. Le cinquième moyen est fondé. Il y a lieu d'annuler l'alinéa 2 de l'article 116, § 1er, de la loi attaquée.

Par ces motifs, la Cour 1. Annule dans la loi du 21 avril 2007Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/04/2007 pub. 13/07/2007 numac 2007009524 source service public federal justice Loi relative à l'internement des personnes atteintes d'un trouble mental fermer relative à l'internement des personnes atteintes d'un trouble mental : - les articles 39, § 3, et 40, en ce qu'ils ne prévoient pas que l'avis du directeur et l'avis du ministère public sont communiqués au conseil de l'interné; - les articles 26, § 4, alinéa 2, 34, alinéa 2, 42, § 3, alinéa 2, 53, § 4, alinéa 4, 58, § 3, alinéa 2, 70, § 2, alinéa 2, 73, § 3, alinéa 2, 85, § 2, alinéa 2, et 98, § 3, alinéa 2, en ce qu'ils ne prévoient pas qu'une copie du dossier peut être demandée et obtenue par le conseil de l'interné; - l'article 116, § 1er, alinéa 2. 2. Rejette le recours pour le surplus. Ainsi prononcé en langue néerlandaise, en langue française et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989, à l'audience publique du 6 novembre 2008.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux.

Le président, 4M. Bossuyt.

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