publié le 05 octobre 2004
Extrait de l'arrêt n° 102/2004 du 9 juin 2004 Numéro du rôle : 2909 En cause : les questions préjudicielles concernant l'article 46 de la loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail et l'article 18 de la loi du 3 juillet 1978 relative La Cour d'arbitrage, composée des présidents A. Arts et M. Melchior, et des juges P. Martens, R.(...)
COUR D'ARBITRAGE
Extrait de l'arrêt n° 102/2004 du 9 juin 2004 Numéro du rôle : 2909 En cause : les questions préjudicielles concernant l'article 46 de la
loi du 10 avril 1971Documents pertinents retrouvés
type
loi
prom.
10/04/1971
pub.
23/03/2018
numac
2018030615
source
service public federal interieur
Loi sur les accidents du travail
type
loi
prom.
10/04/1971
pub.
17/10/2014
numac
2014000710
source
service public federal interieur
Loi sur les accidents du travail
type
loi
prom.
10/04/1971
pub.
11/06/1998
numac
1998000213
source
ministere de l'interieur
Loi sur les accidents du travail - Traduction allemande
fermer sur les accidents du travail et l'article 18 de la
loi du 3 juillet 1978Documents pertinents retrouvés
type
loi
prom.
03/07/1978
pub.
12/03/2009
numac
2009000158
source
service public federal interieur
Loi relative aux contrats de travail
type
loi
prom.
03/07/1978
pub.
03/07/2008
numac
2008000527
source
service public federal interieur
Loi relative aux contrats de travail Coordination officieuse en langue allemande
fermer relative aux contrats de travail, posées par le Tribunal de première instance de Tongres.
La Cour d'arbitrage, composée des présidents A. Arts et M. Melchior, et des juges P. Martens, R. Henneuse, M. Bossuyt, E. De Groot et J.-P. Moerman, assistée du greffier L. Potoms, présidée par le président A. Arts, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles et procédure Par jugement du 13 janvier 2004 en cause de la société de droit allemand Ford Werke AG et de la s.a. Groupe Josi contre G. Bulen et la s.a. « Mercator en Noordstar » et en présence de R. Fred, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour d'arbitrage le 5 février 2004, le Tribunal de première instance de Tongres a posé les questions préjudicielles suivantes : « L'article 46 de la loi du 10 avril 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1971 pub. 23/03/2018 numac 2018030615 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 17/10/2014 numac 2014000710 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 11/06/1998 numac 1998000213 source ministere de l'interieur Loi sur les accidents du travail - Traduction allemande fermer sur les accidents du travail viole-t-il le principe constitutionnel d'égalité et de non-discrimination, inscrit aux articles 11 et 12 [lire : 10 et 11] de la Constitution en ce que, lorsqu'un accident est causé par l'employeur de la victime ou par un préposé de l'employeur, cette disposition établit une distinction entre les victimes d'un accident du travail et les victimes d'un accident survenu ' sur le chemin ' du travail, en excluant purement sur la base de cette distinction les victimes d'un accident du travail d'une indemnisation intégrale de droit commun à laquelle ont droit tout citoyen et toute victime d'un accident survenu sur le chemin du travail ? » « L'article 18 de la loi sur les contrats de travail viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution en disposant que le travailleur, dans l'exécution de son contrat, ne répond que de son dol et de sa faute lourde, alors que l'article 46, § 1er, 6°, de la loi sur les accidents du travail permet l'action en responsabilité civile à la victime et à ses ayants droit contre l'employeur ou ses préposés, lorsque l'accident du travail est un accident de roulage ? » Le 2 mars 2004, en application de l'article 72, alinéa 1er, de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, les juges-rapporteurs E. De Groot et J.-P. Moerman ont informé la Cour qu'ils pourraient être amenés à proposer de rendre un arrêt de réponse immédiate.
Les dispositions de la loi spéciale précitée relatives à la procédure et à l'emploi des langues ont été appliquées. (...) III. En droit (...) B.1.1. La loi du 24 décembre 1903 sur la réparation des dommages résultant des accidents du travail prévoyait la réparation forfaitaire du dommage résultant d'un accident du travail, le caractère forfaitaire de l'indemnité s'expliquant notamment par une réglementation de la responsabilité s'écartant du droit commun, basée non plus sur la notion de « faute », mais sur celle de « risque professionnel » et sur une répartition de ce risque entre l'employeur et la victime de l'accident du travail.
D'une part, l'employeur était, même en l'absence de toute faute dans son chef, toujours rendu responsable du dommage résultant de l'accident du travail subi par la victime. Ainsi non seulement celle-ci était dispensée de la preuve, souvent très difficile à apporter, de la faute de l'employeur ou de son préposé et de l'existence d'un lien causal entre cette faute et le dommage subi, mais sa propre faute (non intentionnelle) ne faisait pas obstacle à la réparation, et n'entraînait pas sa responsabilité si cette faute causait un accident de travail à un tiers. D'autre part, la victime de l'accident du travail percevait une indemnité forfaitaire, qui ne l'indemnisait que partiellement pour le dommage subi.
A la suite de plusieurs modifications de la loi, le niveau d'indemnisation des 50 p.c. originaires de la « rémunération de base » a été porté à 66 p.c. et à 100 p.c. De même, l'immunité initialement prévue de l'employeur a été adaptée à la suite de l'extension de la réglementation sur les accidents du travail aux accidents sur le chemin du travail.
Lors de l'élaboration de la loi du 10 avril 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1971 pub. 23/03/2018 numac 2018030615 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 17/10/2014 numac 2014000710 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 11/06/1998 numac 1998000213 source ministere de l'interieur Loi sur les accidents du travail - Traduction allemande fermer sur les accidents du travail, le système a été modifié par l'instauration de l'assurance obligatoire, en vertu de laquelle le travailleur ne s'adresse plus à l'employeur mais à « l'assureur-loi ». C'est le préjudice du travailleur et non plus la responsabilité de l'employeur qui est assuré, de sorte que le système se rapproche d'un mécanisme d'assurances sociales.
B.1.2. L'objectif du système forfaitaire, dans le cadre des accidents du travail, est d'assurer une protection du revenu du travailleur contre un risque professionnel censé se réaliser même lorsqu'un accident survient par la faute de ce travailleur ou d'un compagnon de travail, ainsi que de préserver la paix sociale et les relations de travail dans les entreprises en excluant la multiplication des procès en responsabilité.
La protection en cas de faute du travailleur va jusqu'à immuniser celui-ci contre sa propre responsabilité en cas d'accident de travail causé par cette faute. Le forfait couvre en outre ceux dont le législateur estime qu'ils dépendent normalement du revenu du travailleur victime d'un accident mortel. La réparation forfaitaire sera, dans certains cas, plus importante que ce que la victime aurait pu obtenir en intentant une action de droit commun contre l'auteur de la faute qui a causé l'accident et, dans certains cas, moins importante. Le financement du système forfaitaire est assuré par les employeurs, qui sont obligés, depuis 1971, de souscrire une assurance en matière d'accidents du travail et de supporter le coût des primes.
Le souci de ne pas alourdir la charge économique qui en résulte par une éventuelle obligation de réparer issue du droit commun a conduit le législateur à restreindre le champ des hypothèses susceptibles d'engager la responsabilité civile de l'employeur.
B.1.3. Dès lors que le système dérogatoire se justifie dans son principe, il est admissible que sa comparaison trait pour trait avec celui du droit commun fasse apparaître des différences de traitement tantôt dans un sens, tantôt dans l'autre, sous la réserve que chacune des règles en cause doit être conforme à la logique du système auquel elle appartient.
B.2. La première question préjudicielle concerne l'article 46 de la loi du 10 avril 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1971 pub. 23/03/2018 numac 2018030615 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 17/10/2014 numac 2014000710 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 11/06/1998 numac 1998000213 source ministere de l'interieur Loi sur les accidents du travail - Traduction allemande fermer, sans qu'il soit toutefois précisé si c'est la version antérieure ou la version postérieure aux modifications apportées à cet article par les lois du 20 mai 1998, du 25 janvier 1999 et du 24 décembre 1999 qui est visée. Compte tenu de la date de l'accident qui est à l'origine de l'instance principale et de la formulation de la question elle-même, qui est identique à celle examinée dans l'arrêt n° 3/97 du 16 janvier 1997, la Cour considère que c'est la première version qui est soumise à son contrôle. La Cour ne peut dès lors se prononcer, dans les limites de sa saisine, sur la différence de traitement qui pourrait résulter du prescrit de l'article 46, § 1er, 6°, tel qu'il a été inséré par la loi du 20 mai 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/05/1998 pub. 01/08/1998 numac 1998022456 source ministere des affaires sociales, de la sante publique et de l'environnement Loi modifiant l'article 46 de la loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail type loi prom. 20/05/1998 pub. 29/10/1998 numac 1998009576 source ministere de la justice Loi modifiant l'article 519 du Code judiciaire et abrogéant les articles 520 et 522 du même Code fermer et remplacé par la loi du 25 janvier 1999, entre les accidents de la circulation intervenant sur la voie publique et les accidents de la circulation ayant lieu sur des terrains ouverts seulement à un certain nombre de personnes ayant le droit de les fréquenter, telles les installations privées de parking par exemple. Il est loisible au juge a quo de poser une nouvelle question préjudicielle à ce sujet.
B.3.1. L'article 46 de la loi du 10 avril 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1971 pub. 23/03/2018 numac 2018030615 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 17/10/2014 numac 2014000710 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 11/06/1998 numac 1998000213 source ministere de l'interieur Loi sur les accidents du travail - Traduction allemande fermer sur les accidents du travail (Moniteur belge du 24 avril 1971) s'énonce comme suit : « § 1er. Indépendamment des droits découlant de la présente loi, une action en justice peut être intentée, conformément aux règles de la responsabilité civile, par la victime ou ses ayants droit : 1° contre l'employeur qui a causé intentionnellement l'accident du travail ou causé intentionnellement un accident ayant entraîné un accident du travail;2° contre l'employeur, dans la mesure où l'accident du travail a causé des dommages aux biens du travailleur;3° contre le mandataire ou le préposé de l'employeur qui a causé intentionnellement l'accident du travail;4° contre les personnes autres que l'employeur, ses mandataires ou préposés, qui sont responsables de l'accident;5° contre l'employeur, ses mandataires ou préposés, lorsque l'accident est survenu sur le chemin du travail. § 2. Indépendamment des dispositions du § 1er, l'assureur reste tenu du paiement des indemnités résultant de la présente loi, dans les délais fixés aux articles 41 et 42.
La réparation en droit commun qui ne peut se rapporter à l'indemnisation des dommages corporels, telle qu'elle est couverte par la présente loi, peut se cumuler avec les indemnités résultant de la présente loi. » B.3.2. L'article 7 de la loi du 10 avril 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1971 pub. 23/03/2018 numac 2018030615 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 17/10/2014 numac 2014000710 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 11/06/1998 numac 1998000213 source ministere de l'interieur Loi sur les accidents du travail - Traduction allemande fermer sur les accidents du travail définit l'accident du travail comme suit : « Pour l'application de la présente loi, est considéré comme accident du travail, tout accident qui survient à un travailleur dans le cours et par le fait de l'exécution du contrat de louage de travail et qui produit une lésion.
L'accident survenu dans le cours de l'exécution du contrat est présumé, jusqu'à preuve du contraire, survenu par le fait de cette exécution. » L'article 8, § 1er, ajoute, en son alinéa 1er : « Est également considéré comme accident du travail l'accident survenu sur le chemin du travail ». Il définit, en son alinéa 2, le chemin du travail comme le « trajet normal que le travailleur doit parcourir pour se rendre de sa résidence au lieu de l'exécution du travail, et inversement ».
L'article 8, § 1er, alinéa 3, énumère les cas dans lesquels le trajet demeure normal lorsque le travailleur effectue les détours nécessaires et raisonnablement justifiables. Le trajet de la résidence au lieu du travail commence dès que le travailleur franchit le seuil de sa résidence principale ou secondaire et finit dès qu'il en franchit de nouveau le seuil (article 8, § 1er, alinéa 4). L'article 8, § 2, mentionne enfin les déplacements assimilés au chemin du travail.
B.4.1. En son § 1er, l'article 46 de la loi du 10 avril 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1971 pub. 23/03/2018 numac 2018030615 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 17/10/2014 numac 2014000710 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 11/06/1998 numac 1998000213 source ministere de l'interieur Loi sur les accidents du travail - Traduction allemande fermer sur les accidents du travail instaure, à l'égard des personnes qui sont victimes d'un accident de roulage causé involontairement par l'employeur, ses mandataires ou ses préposés et qui peuvent prétendre à l'indemnisation garantie par la loi sur les accidents du travail, une différence de traitement entre les victimes d'un accident du travail et les victimes d'un accident survenu sur le chemin du travail, en ce que seule cette dernière catégorie de victimes peut intenter en justice, outre les actions fondées sur les droits découlant de la loi précitée, une action en responsabilité civile contre l'employeur, ses mandataires ou ses préposés.
B.4.2. Cette distinction avait déjà été instaurée par la loi du 11 juin 1964 modifiant l'article 19 de la loi sur les accidents du travail.
Ainsi qu'il a déjà été exposé au B.1.1, la loi du 24 décembre 1903 sur la réparation des dommages résultant des accidents du travail prévoyait la réparation forfaitaire du dommage résultant d'un accident du travail, le caractère forfaitaire de l'indemnité s'expliquant par la conception d'un partage des risques entre l'employeur et la victime de l'accident du travail.
Le législateur de 1964 a toutefois estimé ne pas devoir maintenir le régime d'indemnisation forfaitaire des accidents survenus sur le chemin du travail, dérogatoire aux articles 1382 et suivants du Code civil, considérant que les difficultés de preuve n'étaient plus totalement insurmontables pour cette sorte d'accidents, que les employeurs organisaient de plus en plus fréquemment des transports vers le lieu du travail, que ces accidents avaient augmenté tant en nombre qu'en gravité et que cette limitation de l'indemnisation bénéficiait en fait à l'organisme assureur avec qui l'auteur de l'accident avait obligatoirement contracté en vue de couvrir un risque illimité alors que le risque se trouvait limité par les stipulations de la loi de 1903 sur les accidents du travail (Doc. parl., Chambre, 1962-1963, n° 593/1, p. 2, et n° 593/2, p. 2).
La loi du 11 juin 1964 a instauré au bénéfice des victimes de tels accidents un régime mixte dans lequel les victimes et leurs ayants droit, d'une part, conservent le bénéfice de l'indemnisation forfaitaire qui constitue un minimum acquis, sans devoir prouver une faute éventuelle de l'auteur de l'accident, et, d'autre part, peuvent obtenir réparation pour le reste du dommage dont il pourrait être démontré, selon les règles du droit commun, qu'il a été causé par la faute d'un tiers, même si ce dernier appartient à la même entreprise (ibid. ).
B.5. Les règles constitutionnelles de l'égalité et de la non-discrimination n'excluent pas qu'une différence de traitement soit établie entre des catégories de personnes, pour autant qu'elle repose sur un critère objectif et qu'elle soit raisonnablement justifiée.
L'existence d'une telle justification doit s'apprécier en tenant compte du but et des effets de la mesure critiquée ainsi que de la nature des principes en cause; le principe d'égalité est violé lorsqu'il est établi qu'il n'existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.
B.6. La distinction établie par le législateur entre les victimes d'un accident du travail et les victimes d'un accident survenu sur le chemin du travail répond à un objectif légitime, à savoir le souci de garantir à toutes les victimes l'indemnité de base fixée par la loi sur les accidents du travail et d'offrir à la victime, dans les cas où il n'existe aucun motif de maintenir les restrictions prévues par la loi, une réparation aussi complète que possible du dommage.
En fondant la distinction entre les deux catégories de victimes sur la constatation que la difficulté d'apporter la preuve du dommage et du lien causal entre le dommage et la faute de l'employeur, de ses mandataires ou de ses préposés diffère pour ces deux sortes d'accidents et que, dans le cas d'un accident du travail, la preuve est souvent difficile à faire sans porter atteinte à la paix sociale et aux relations de travail dans les entreprises, le législateur a établi une différence de traitement sur la base de critères qui justifient objectivement et raisonnablement l'établissement de cette différence entre les deux catégories de victimes.
Le législateur a instauré de la sorte une différence de traitement qui n'est pas incompatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution.
B.7.1. De la lecture conjointe des articles 7 et 8 de la loi du 10 avril 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1971 pub. 23/03/2018 numac 2018030615 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 17/10/2014 numac 2014000710 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 11/06/1998 numac 1998000213 source ministere de l'interieur Loi sur les accidents du travail - Traduction allemande fermer sur les accidents du travail, la jurisprudence a toutefois déduit une autre distinction entre les victimes d'un accident de roulage, à savoir, d'une part, les victimes d'un accident de roulage survenu alors que la victime se trouve sous l'autorité de l'employeur et qui est considéré comme un accident du travail parce qu'il est survenu pendant et par le fait de l'exécution du contrat de travail et, d'autre part, les victimes d'un accident de roulage survenant alors que la victime ne se trouve pas sous l'autorité de l'employeur.
Dans le premier cas, la victime ne peut prétendre qu'à l'indemnisation forfaitaire prévue pour les accidents du travail; dans le second cas, elle conserve la faculté d'exercer l'action de droit commun, ainsi qu'il est indiqué à l'article 46 de la loi sur les accidents du travail (voy. notamment Cass., 14 mars 1968, Pas., 1968, pp. 880-882;
Cass., 19 septembre 1972, Pas., 1973, I, pp. 67-69; Cass., 28 janvier 1975, Pas., 1975, pp. 552-555).
L'existence d'un rapport d'autorité est appréciée par le juge du fond sur la base de différents critères. Ils portent principalement sur le caractère obligatoire ou non du transport organisé par l'employeur, au cours duquel l'accident se produit, sur le paiement ou non d'une rémunération pour la durée du trajet et parfois même sur le fait que le lieu où le travail s'effectue a été atteint ou non.
B.7.2. Que la victime se trouve ou non sous l'autorité de l'employeur constitue un critère de distinction objectif. Toutefois, compte tenu du but et des effets de la disposition législative en cause, ce critère de distinction n'est pas pertinent. En effet, la circonstance qu'un travailleur se trouve ou non sous l'autorité de son employeur n'influence en aucune manière l'existence et l'accroissement du nombre d'accidents de roulage qui avaient justifié que le législateur déroge au régime d'indemnisation forfaitaire; cette circonstance ne présente aucun lien avec la gravité du dommage qui résulte de ces accidents pour les travailleurs et n'a pas davantage d'incidence sur la difficulté d'apporter la preuve du dommage subi et du lien de causalité entre ce dommage et la faute de l'employeur, de ses mandataires ou de ses préposés.
Par conséquent, s'agissant de la possibilité d'intenter une action en responsabilité civile de droit commun, la distinction instaurée entre les victimes d'un accident de roulage causé involontairement par l'employeur, ses mandataires ou préposés, selon qu'elles se trouvent ou non sous l'autorité de l'employeur n'est pas justifiée, ce critère de distinction étant dénué de la pertinence qu'exige la Constitution.
B.8.1. Les travaux préparatoires de la loi du 11 juin 1964 ne semblent toutefois pas avoir exclu que l'action en responsabilité civile puisse être accordée, en application de l'article 46 de la loi sur les accidents du travail, à la victime d'un accident de roulage causé involontairement par l'employeur, ses mandataires ou préposés et survenu alors que la victime se trouvait sous l'autorité de l'employeur.
Dans les développements de la proposition de loi, il est en effet expressément observé que « les difficultés dans l'ordre de la preuve n'offrent plus un caractère quasi insurmontable lorsque les accidents se produisent en dehors des lieux du travail et en dehors de l'activité professionnelle du travailleur » et qu' « il arrive de plus en plus fréquemment que les ouvriers d'une entreprise se rendent de leur domicile à leur lieu de travail dans un véhicule conduit par leur patron ou par un préposé de celui-ci » (Doc. parl., Chambre, 1962-1963, n° 593/1, p. 2).
B.8.2. Puisque le problème de la charge de la preuve ne se présente pas différemment lorsque l'accident de roulage se produit alors que le travailleur se trouve, fût-ce indirectement, sous l'autorité de l'employeur, et compte tenu de l'évolution des relations de travail qui exigent du travailleur une mobilité toujours plus grande, il est permis, conformément aux travaux préparatoires, d'entendre par « accident sur le chemin du travail » : tout accident qui se produit lors de l'exécution d'une mission à laquelle le travailleur est tenu en vertu de son contrat de travail, sur la voie publique, « en dehors des lieux du travail et en dehors de l'activité professionnelle du travailleur » (Doc. parl., Chambre, 1962-1963, n° 593/1, p. 2).
Dans cette interprétation de l'article 46 de la loi sur les accidents du travail, la distinction entre les victimes d'un accident du travail et les victimes d'un accident survenu sur le chemin du travail ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution.
B.9. La seconde question préjudicielle porte sur l'article 18 de la loi du 3 juillet 1978Documents pertinents retrouvés type loi prom. 03/07/1978 pub. 12/03/2009 numac 2009000158 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail type loi prom. 03/07/1978 pub. 03/07/2008 numac 2008000527 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail Coordination officieuse en langue allemande fermer relative aux contrats de travail, qui énonce : « En cas de dommages causés par le travailleur à l'employeur ou à des tiers dans l'exécution de son contrat, le travailleur ne répond que de son dol et de sa faute lourde.
Il ne répond de sa faute légère que si celle-ci présente dans son chef un caractère habituel plutôt qu'accidentel.
A peine de nullité, il ne peut être dérogé à la responsabilité fixée aux alinéas 1er et 2 que par une convention collective de travail rendue obligatoire par le Roi, et ce uniquement en ce qui concerne la responsabilité à l'égard de l'employeur.
L'employeur peut, dans les conditions prévues par l'article 23 de la loi du 12 avril 1965Documents pertinents retrouvés type loi prom. 12/04/1965 pub. 08/03/2007 numac 2007000126 source service public federal interieur Loi concernant la protection de la rémunération des travailleurs fermer concernant la protection de la rémunération des travailleurs, imputer sur la rémunération les indemnités et dommages-intérêts qui lui sont dus en vertu du présent article et qui ont été, après les faits, convenus avec le travailleur ou fixés par le juge. » B.10.1. En vertu de l'article 18 de la loi relative aux contrats de travail, le travailleur, dans le cadre de l'exécution du contrat de travail, est responsable à l'égard des tiers en cas de dol, de faute lourde et de faute légère habituelle. Ce régime de responsabilité est une application particulière des principes contenus aux articles 1382 et suivants du Code civil. L'article 18 de la loi du 3 juillet 1978Documents pertinents retrouvés type loi prom. 03/07/1978 pub. 12/03/2009 numac 2009000158 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail type loi prom. 03/07/1978 pub. 03/07/2008 numac 2008000527 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail Coordination officieuse en langue allemande fermer ne déroge pas à l'article 1384, alinéa 3, du Code civil, qui dispose que le maître est responsable de ses préposés.
B.10.2. Ainsi qu'il est indiqué ci-dessus au B.1.1, la loi sur les accidents du travail prévoit une réparation forfaitaire, inspirée par un régime de responsabilité dérogatoire au droit commun qui ne repose plus sur la notion de faute. Ce régime diffère donc fondamentalement, pour ce qui concerne son fondement juridique, de l'article 18 de la loi du 3 juillet 1978Documents pertinents retrouvés type loi prom. 03/07/1978 pub. 12/03/2009 numac 2009000158 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail type loi prom. 03/07/1978 pub. 03/07/2008 numac 2008000527 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail Coordination officieuse en langue allemande fermer, qui repose, lui, sur la notion de faute. Les deux régimes ne sauraient dès lors être comparés de manière pertinente en ce qui concerne les effets qu'ils attachent à une faute lourde, à une faute intentionnelle ou à une faute légère habituelle commise par le travailleur.
B.10.3. La deuxième question préjudicielle appelle une réponse négative.
Par ces motifs, la Cour dit pour droit : - L'article 46 de la loi du 10 avril 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1971 pub. 23/03/2018 numac 2018030615 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 17/10/2014 numac 2014000710 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 11/06/1998 numac 1998000213 source ministere de l'interieur Loi sur les accidents du travail - Traduction allemande fermer sur les accidents du travail viole les articles 10 et 11 de la Constitution s'il est interprété comme refusant une réparation intégrale de son préjudice, selon les règles du droit commun relatives à la responsabilité civile, au travailleur victime d'un accident de roulage causé involontairement par son employeur, les mandataires ou préposés de celui-ci, alors que ce travailleur se trouve sous l'autorité de son employeur. - L'article 46 de la loi du 10 avril 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1971 pub. 23/03/2018 numac 2018030615 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 17/10/2014 numac 2014000710 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 11/06/1998 numac 1998000213 source ministere de l'interieur Loi sur les accidents du travail - Traduction allemande fermer sur les accidents du travail ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution s'il est interprété comme accordant une réparation intégrale de son préjudice, selon les règles du droit commun relatives à la responsabilité civile, au travailleur victime d'un accident de roulage causé involontairement par son employeur, les mandataires ou préposés de celui-ci, même lorsque ce travailleur se trouve sous l'autorité de son employeur. - L'article 18 de la loi du 3 juillet 1978Documents pertinents retrouvés type loi prom. 03/07/1978 pub. 12/03/2009 numac 2009000158 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail type loi prom. 03/07/1978 pub. 03/07/2008 numac 2008000527 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail Coordination officieuse en langue allemande fermer relative aux contrats de travail ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution en tant qu'il dispose que le travailleur, dans l'exécution de son contrat de travail, ne répond à l'égard de tiers que de son dol, de sa faute lourde ou de sa faute légère présentant un caractère habituel, alors que l'article 46, § 1er, 6°, de la loi du 10 avril 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1971 pub. 23/03/2018 numac 2018030615 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 17/10/2014 numac 2014000710 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 11/06/1998 numac 1998000213 source ministere de l'interieur Loi sur les accidents du travail - Traduction allemande fermer sur les accidents du travail permet l'action en responsabilité civile contre l'employeur, son mandataire ou son préposé lorsque l'accident est un accident de roulage.
Ainsi prononcé en langue néerlandaise et en langue française, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 9 juin 2004.
Le greffier, L. Potoms.
Le président, A. Arts.