publié le 18 avril 2001
Arrêt n° 42/2001 du 29 mars 2001 Numéro du rôle : 1865 En cause : le recours en annulation du décret de la Région flamande du 18 mai 1999 modifiant l'article 257 du Code des impôts sur les revenus, introduit par l'a.s.b.l. Vereniging voor Gre La Cour d'arbitrage, composée des présidents G. De Baets et M. Melchior, des juges P. Martens, E(...)
COUR D'ARBITRAGE
Arrêt n° 42/2001 du 29 mars 2001 Numéro du rôle : 1865 En cause : le recours en annulation du décret de la Région flamande du 18 mai 1999 modifiant l'article 257 du Code des impôts sur les revenus, introduit par l'a.s.b.l. Vereniging voor Grensarbeiders.
La Cour d'arbitrage, composée des présidents G. De Baets et M. Melchior, des juges P. Martens, E. Cerexhe, R. Henneuse, E. De Groot et L. Lavrysen, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président G. De Baets, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet du recours Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 13 janvier 2000 et parvenue au greffe le 14 janvier 2000, l'a.s.b.l.
Vereniging voor Grensarbeiders, dont le siège social est établi à 3930 Hamont-Achel, Haverstraat 65, a introduit un recours en annulation du décret de la Région flamande du 18 mai 1999 modifiant l'article 257 du Code des impôts sur les revenus (publié au Moniteur belge du 16 juillet 1999).
II. La procédure Par ordonnance du 14 janvier 2000, le président en exercice a désigné les juges du siège conformément aux articles 58 et 59 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage.
Les juges-rapporteurs ont estimé n'y avoir lieu de faire application des articles 71 ou 72 de la loi organique.
Le recours a été notifié conformément à l'article 76 de la loi organique, par lettres recommandées à la poste le 1er février 2000.
L'avis prescrit par l'article 74 de la loi organique a été publié au Moniteur belge du 9 février 2000.
Le Gouvernement flamand, place des Martyrs 19, 1000 Bruxelles, a introduit un mémoire par lettre recommandée à la poste le 20 mars 2000.
Ce mémoire a été notifié conformément à l'article 89 de la loi organique, par lettre recommandée à la poste le 5 mai 2000.
La partie requérante a introduit un mémoire en réponse par lettre recommandée à la poste le 6 juin 2000.
Par ordonnances des 29 juin 2000 et 20 décembre 2000, la Cour a prorogé respectivement jusqu'aux 13 janvier 2001 et 13 juillet 2001 le délai dans lequel l'arrêt doit être rendu.
Par ordonnance du 6 février 2001, la Cour a complété le siège par le juge L. Lavrysen.
Par ordonnance du 7 février 2001, la Cour a déclaré l'affaire en état et fixé l'audience au 1er mars 2001.
Cette ordonnance a été notifiée aux parties ainsi qu'à leurs avocats, par lettres recommandées à la poste le 8 février 2001.
A l'audience publique du 1er mars 2001 : - ont comparu : . Me W. Robben loco Me A. Van der Graesen, avocats au barreau de Hasselt, pour la partie requérante; . Me P. Van Orshoven, avocat au barreau de Bruxelles, pour le Gouvernement flamand; - les juges-rapporteurs L. Lavrysen et E. Cerexhe ont fait rapport; - les avocats précités ont été entendus; - l'affaire a été mise en délibéré.
La procédure s'est déroulée conformément aux articles 62 et suivants de la loi organique, relatifs à l'emploi des langues devant la Cour.
III. En droit - A - Quant à la recevabilité A.1. Selon le Gouvernement flamand, le recours est irrecevable à défaut d'intérêt. En effet, la partie requérante défend les travailleurs migrants qui ne sont pas des travailleurs frontaliers. A première vue, la défense de leurs intérêts est conforme à son objet statutaire, qui consiste à défendre « les intérêts des travailleurs migrants ». Ce n'est toutefois que le 19 novembre 1999 que cet objet a remplacé l'ancien objet social, qui consistait à « défendre les intérêts des travailleurs frontaliers ». Le Gouvernement flamand en déduit que la modification des statuts a manifestement été opérée dans l'optique de la recevabilité de l'actuel recours en annulation.
Le Gouvernement flamand ajoute que le nouvel objet n'a pas encore été publié au Moniteur belge. Il s'ensuit en premier lieu que la partie requérante, en vertu de l'article 26, juncto l'article 9, de la loi du 27 juin 1921Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1921 pub. 19/08/2013 numac 2013000498 source service public federal interieur Loi sur les associations sans but lucratif, les associations internationales sans but lucratif et les fondations. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer « accordant la personnalité civile aux associations sans but lucratif et aux établissements d'utilité publique », ne peut invoquer sa personnalité civile « et ne peut, a fortiori, pas davantage invoquer son objet social, à tout le moins pas son nouvel objet social, qui n'a pas été publié, de sorte qu'elle n'est en tout cas pas recevable à ester en justice en vue de défendre les intérêts des travailleurs migrants qui ne sont pas des travailleurs frontaliers ». Par ailleurs, il s'ensuit que la partie requérante n'a, par le passé, pas défendu - a fortiori de manière durable - les intérêts des travailleurs migrants qui ne sont pas des travailleurs frontaliers.
Elle n'aurait d'ailleurs pas pu le faire, car elle aurait de ce fait excédé le cadre de son objet social tel qu'il existait à l'époque. Le Gouvernement flamand souligne ensuite qu'au vu du rapport de la délibération relative à la modification statutaire du 19 novembre 1999, la partie requérante, dénommée « Vereniging voor Grensarbeiders [association de travailleurs frontaliers] », est composée de quatre membres, dont il est certain que personne n'est « travailleur migrant non frontalier ».
Enfin, le Gouvernement flamand observe que le décret présentement attaqué répond au grief formulé à l'époque par la partie requérante - lorsqu'elle défendait encore les intérêts des travailleurs frontaliers - dans son recours en annulation du décret du 9 juin 1998. En d'autres termes, dans l'intérêt des travailleurs migrants qui ne sont pas travailleurs frontaliers, la partie requérante souhaite à présent porter atteinte aux intérêts des travailleurs frontaliers.
A.2. L'a.s.b.l. Vereniging voor Grensarbeiders produit la preuve de la publication de ses statuts et des modifications des statuts aux annexes du Moniteur belge et de la décision du conseil d'administration d'introduire un recours en annulation du décret entrepris. Aux termes de l'article 3 de ses statuts, elle a pour objet « la défense des intérêts des travailleurs migrants et ce dans tous les domaines de la société ». L'objet originaire de l'association portait, il est vrai, sur « les intérêts des travailleurs frontaliers », mais, selon la partie requérante, la notion de « travailleur frontalier » n'était pas définie en droit (fiscal) belge. Cette notion était dès lors dépourvue de portée juridique explicite aux yeux des fondateurs de l'association requérante, mais elle visait la situation d'un travailleur qui travaillait au delà de la frontière. Ce n'est que par l'adoption du décret entrepris que cette notion reçut une signification plus restrictive en droit fiscal régional. Sur ce, la partie requérante a précisé son objet social. Elle ajoute qu'elle défend les intérêts de ses membres non seulement au niveau fiscal mais dans tous les domaines de la société, si bien qu'il est illogique de vouloir comprendre uniquement au sens fiscal, du moins telle que cette notion est décrite dans le décret entrepris, la notion de travailleurs frontaliers, telle qu'elle figurait à l'origine dans l'objet social de l'association.
La partie requérante estime avoir défendu de manière durable les intérêts des travailleurs migrants. Dans le cadre du recours en annulation du décret du 9 juin 1998, introduit par la partie requérante, celle-ci a déjà souligné que le décret présentement entrepris établissait une nouvelle discrimination (arrêt n° 126/99, A.11). Elle renvoie ensuite au fait « qu'elle adresse régulièrement des écrits à ses membres, diffuse une revue destinée aux membres, a organisé une journée d'étude et contacte régulièrement les responsables politiques (belges et étrangers) » aux fins de défendre les intérêts des travailleurs qui travaillent au delà de la frontière.
A titre d'exemple, la partie requérante a joint à son mémoire en réponse quelques lettres qui doivent étayer l'activité durable de l'association dans l'intérêt des travailleurs migrants.
La partie requérante réfute la thèse du Gouvernement flamand selon laquelle elle porterait atteinte, par son recours en annulation, aux intérêts des travailleurs frontaliers. Sa requête dénonce essentiellement le fait que la distinction entre les travailleurs frontaliers définis dans le décret entrepris et les autres travailleurs qui travaillent au delà de la frontière est discriminatoire. En outre, l'annulation de la définition restrictive de la notion de « travailleur frontalier » n'implique pas qu'ils perdent leur droit à une modération du précompte immobilier. Pareille annulation aurait uniquement pour effet que la réduction accordée s'applique à tous les travailleurs qui travaillent au delà de la frontière.
Enfin, la partie requérante s'oppose à l'insinuation selon laquelle elle ne compterait que quatre membres. Ainsi qu'il ressort des statuts de l'association, seuls les membres effectifs ont le droit de vote à l'assemblée générale. Outre les membres effectifs, l'association requérante compte environ 900 membres non effectifs « qui versent annuellement une contribution (financière) et qui sont régulièrement assistés dans leur situation particulière du travail hors frontière ».
Quant au fond A.3. Selon la partie requérante, le décret entrepris est contraire aux articles 10 et 11 de la Constitution en ce que, s'agissant de la modération du précompte immobilier, le décret établit une distinction entre deux catégories de contribuables travaillant à l'étranger dont les enfants ne sont pas admis au bénéfice des allocations familiales en vertu de la législation du pays d'occupation, selon qu'ils habitent et travaillent ou non dans la zone frontalière. Le critère de distinction n'est pas raisonnablement justifiable, compte tenu du but et des effets de la mesure et des principes en cause.
Avant l'adoption du décret entrepris, une réduction d'impôt n'était accordée que pour les enfants admis au bénéfice des allocations familiales. Etant donné que, dans certains pays, les allocations familiales sont conçues autrement qu'en Belgique, certains enfants n'étaient, en vertu de la législation étrangère applicable, pas admis au bénéfice des allocations familiales, alors qu'ils le seraient en vertu de la législation belge. Le décret entrepris entendait « supprimer l'éventuelle discrimination à l'égard de ce groupe (certes limité) de travailleurs frontaliers ».
A l'estime de la partie requérante, le critère du « travailleur frontalier » est toutefois sans pertinence, étant donné que la condition de base pour l'octroi d'une réduction d'impôt - « enfants admis au bénéfice des allocations familiales » - n'est pas fondée sur le statut fiscal du contribuable (être reconnu ou non comme travailleur frontalier), mais sur son statut social (en l'espèce déterminé par le pays d'occupation). Compte tenu de l'objectif poursuivi par le législateur décrétal, la distinction entre travailleurs frontaliers et travailleurs migrants ne peut être justifiée. En effet, les deux catégories ne se distinguent que par le fait d'habiter ou non dans la zone frontalière ou de travailler ou non dans cette zone, alors que ces circonstances sont sans la moindre pertinence pour l'octroi ou non de la modération du précompte immobilier pour charge d'enfant.
A.4. Selon le Gouvernement flamand, le moyen manque en fait étant donné que les travailleurs migrants qui ne sont pas des travailleurs frontaliers ne seraient pas privés du bénéfice de la réduction d'impôt. Certes, le nouvel article 257, § 2, 4°, du Code des impôts sur les revenus ne vise que les travailleurs frontaliers, sans doute parce qu'il s'agit du quod plerumque fit du problème qui surgirait lors de l'application de l'article 257, § 1er, 2°, et que le législateur décrétal entendait résoudre, mais cela n'empêche pas que tous, en ce compris les travailleurs occupés à l'étranger, peuvent encore invoquer l'article 257, § 1er, 2°, pour bénéficier de la réduction en question. Le Gouvernement flamand renvoie à cet égard au considérant B.5.4 de l'arrêt n° 126/99.
A.5. La partie requérante estime quant à elle que les contribuables qui ne travaillent pas ou n'habitent pas dans la zone frontalière ne peuvent bénéficier d'une modération du précompte immobilier en vertu de l'article 257, § 1er, 2°, du Code des impôts sur les revenus. Toute autre appréciation reviendrait à « vider de tout sens le décret entrepris » : ce décret a uniquement été adopté parce que le législateur décrétal estimait que l'article 257, § 1er, 2°, n'était pas applicable aux travailleurs frontaliers dont les enfants ne sont pas admis au bénéfice des allocations familiales en vertu de la législation du pays d'occupation. La partie requérante renvoie à cet égard aux travaux préparatoires du décret entrepris. - B - Les dispositions entreprises B.1. Les dispositions entreprises modifient l'article 257 du Code des impôts sur les revenus 1992, tel qu'il a été remplacé par l'article 3 du décret de la Région flamande du 9 juin 1998 « contenant des dispositions modifiant le Code des impôts sur les revenus, pour ce qui concerne le précompte immobilier », qui prévoit un système de réductions du précompte immobilier. Dans certains cas, la réduction est automatique (article 257, § 1er). Dans d'autres cas, elle doit être demandée (article 257, § 2).
En vertu de l'article 257, § 1er, 2°, une réduction du précompte immobilier est accordée pour l'habitation occupée le 1er janvier de l'exercice d'imposition par une famille comptant au moins deux enfants, qui y sont domiciliés d'après l'inscription au registre de la population et qui ont droit aux allocations familiales.
L'article 2 du décret entrepris insère dans l'article 257, § 2, un 4°, qui dispose : « § 2. Sur demande de l'intéressé : [ . ] 4° la réduction du précompte immobilier, telle que visée au § 1er, 2°, [est] accordée pour les enfants des travailleurs frontaliers, qui, en vertu de la législation du pays où ces derniers sont occupés, sont exclus de tout régime d'allocations familiales, pour autant que ces enfants, aux termes de la législation belge relative aux allocations familiales, soient admis au bénéfice des allocations familiales.» L'article 3 du décret entrepris ajoute à l'article 257, § 3, un alinéa 3, qui dispose : « Par travailleur frontalier au sens du § 2, 4°, on entend la personne occupée dans une région frontalière d'un pays voisin et qui est domiciliée le 1er janvier de l'exercice d'imposition, d'après l'inscription au registre de la population, dans la région frontalière de la Belgique où elle retourne d'habitude chaque jour ou au moins une fois par semaine. » Quant à la recevabilité B.2.1. Le Gouvernement flamand objecte que la partie requérante, à défaut d'avoir publié la modification apportée à son objet social, ne peut se prévaloir de sa personnalité juridique.
B.2.2. La partie requérante a annexé à son mémoire en réponse une copie de la publication de la modification statutaire dans les annexes du Moniteur belge.
L'exception est rejetée.
B.3.1. Le Gouvernement flamand conteste l'intérêt de la partie requérante à son recours. Il fait valoir que l'association a modifié ses statuts dans la perspective de l'introduction de l'actuel recours et qu'elle ne compterait parmi ses membres aucun travailleur migrant autre que des travailleurs frontaliers.
B.3.2. Lorsqu'une association sans but lucratif se prévaut d'un intérêt collectif, il est requis que son objet social soit d'une nature particulière et, dès lors, distinct de l'intérêt général; que cet intérêt ne soit pas limité aux intérêts individuels des membres; que la norme entreprise soit susceptible d'affecter l'objet social.
B.3.3. L'association requérante avait, aux termes de l'article 3 de ses statuts, pour objet « la défense des intérêts des travailleurs frontaliers et ce dans tous les domaines de la société ». Depuis le 19 novembre 1999, les mots « travailleurs frontaliers » sont remplacés par les mots « travailleurs migrants ».
Il n'appartient pas à la Cour d'examiner les motifs d'une modification statutaire. Elle doit dès lors uniquement prendre en compte la définition actuelle et opposable de l'objet social.
L'objet social se distingue de l'intérêt général et peut être affecté par la norme entreprise. L'intérêt dont se prévaut en l'espèce l'association porte sur l'interdiction de discrimination des contribuables travaillant à l'étranger qui n'habitent ou ne travaillent pas dans la zone frontalière. Elle agit dès lors en vue de préserver un intérêt collectif qui ne se limite pas aux intérêts individuels des membres.
Sauf un nombre minimum, la loi du 27 juin 1921Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1921 pub. 19/08/2013 numac 2013000498 source service public federal interieur Loi sur les associations sans but lucratif, les associations internationales sans but lucratif et les fondations. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer relative aux associations sans but lucratif n'impose pas de conditions de quantité ou de qualité auxquelles les membres d'une association doivent satisfaire. Dès lors, l'association qui a pour objet la défense des travailleurs migrants n'est pas obligée de compter parmi ses membres des travailleurs migrants qui ne sont pas des travailleurs frontaliers.
L'exception est rejetée.
Quant au fond B.4. Selon les parties requérantes, les dispositions entreprises violent les articles 10 et 11 de la Constitution en ce que les contribuables travaillant à l'étranger qui n'habitent ou ne travaillent pas dans la zone frontalière seraient exclus de la réduction du précompte immobilier si leurs enfants ne sont pas admis au bénéfice des allocations familiales en vertu de la législation du pays d'occupation.
B.5.1. Parce qu'« il a été constaté qu'un grand nombre de réductions en matière de précompte immobilier auxquelles ont droit certaines personnes n'ont pas été demandées », le législateur décrétal a choisi, en vue d'assurer un « régime plus transparent et, partant, plus équitable », d'accorder de manière automatique les réductions du précompte immobilier « par le biais de l'utilisation des banques de données existantes » (Doc., Parlement flamand, 1997-1998, n° 927/1, p. 2).
Pour pouvoir faire usage des banques de données existantes, la réduction est dorénavant accordée pour les enfants « admis au bénéfice des allocations familiales ».
B.5.2. En vertu de l'article 13 du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil du 14 juin 1971 relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, la législation de l'Etat membre où l'intéressé exerce ses activités salariées est applicable même s'il réside sur le territoire d'un autre Etat membre.
Etant donné que dans certains pays, comme les Pays-Bas, les allocations familiales sont conçues d'une manière différente de celle qui a cours en Belgique, certains enfants n'entrent pas en ligne de compte, en vertu de la législation étrangère, pour les allocations familiales, alors qu'ils seraient pris en compte à cette fin en vertu de la législation belge. Par suite de la disposition entreprise, certains contribuables seraient donc exclus de la réduction du précompte immobilier.
B.5.3. Dans son arrêt n° 126/99, la Cour a toutefois estimé que l'article 257, § 1er, 2°, du Code des impôts sur les revenus tel qu'il a été remplacé par l'article 3 du décret de la Région flamande du 9 juin 1998 « contenant des dispositions modifiant le Code des impôts sur les revenus, pour ce qui concerne le précompte immobilier », accorde la réduction pour « tous les enfants qui, en Belgique, sont ou seraient admis au bénéfice des allocations familiales, sans aucune [limitation] aux allocations familiales d'origine belge et indépendamment des conditions auxquelles ces allocations sont accordées dans le pays où est exercé l'emploi ».
Il s'ensuit que la réduction est accordée non seulement pour les enfants qui sont admis au bénéfice des allocations familiales en Belgique et pour les enfants qui sont admis au bénéfice des allocations familiales dans le pays où l'intéressé est occupé, mais également pour les enfants qui ne sont pas admis au bénéfice des allocations familiales dans le pays d'occupation mais qui le seraient en Belgique.
B.5.4. Pareille portée ne vide pas le décret présentement entrepris de tout sens. En effet, en prévoyant que la réduction du précompte immobilier doit être demandée par l'intéressé, le législateur décrétal a entendu remédier à un problème d'ordre pratique : « Etant donné que le groupe d'enfants en question n'est pas automatiquement détectable par le biais des bases de données consultées, l'ayant droit (à la réduction du précompte immobilier) devra annuellement prouver son droit en produisant une attestation de scolarité. C'est pour cette raison que la réduction n'est accordée qu'à la demande de l'intéressé. » (Doc., Parlement flamand, 1998-1999, n° 1359/1, p.2, et n° 1359/2, p. 3) La circonstance que cette procédure de demande ne soit pas applicable à toutes les catégories qui ne sont pas détectables par le biais des banques de données susvisées ne prive pas le décret entrepris de toute justification. Il appartient au législateur décrétal de déterminer à quelles catégories de contribuables la réduction du précompte immobilier n'est pas accordée automatiquement, mais uniquement sur demande.
L'exclusion de l'attribution automatique ne saurait être considérée comme une conséquence disproportionnée de la mesure critiquée : elle n'a pas pour effet que les contribuables qui remplissent les conditions de la réduction d'impôt mais qui n'entrent pas en ligne de compte pour son attribution automatique parce qu'ils ne figurent pas dans les banques de données existantes, soient privés pour cette raison du bénéfice de la réduction.
B.6. Il résulte de ce qui précède que les contribuables travaillant à l'étranger qui n'habitent ou ne travaillent pas dans la zone frontalière ne sont pas exclus de la réduction du précompte immobilier. Le moyen ne peut être accueilli.
Par ces motifs, la Cour rejette le recours.
Ainsi prononcé en langue néerlandaise, en langue française et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 29 mars 2001, par le siège précité, dans lequel pour le prononcé, le président G. De Baets, admis à la retraite postérieurement au délibéré, est remplacé par le président H. Boel et le juge E. Cerexhe par le juge J. Delruelle, conformément à l'article 110 de la même loi.
Le greffier, Le président, P.-Y. Dutilleux H. Boel