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Extrait de l'arrêt n° 80/2021 du 3 juin 2021 Numéro du rôle : 7376 En cause : la question préjudicielle relative à l'article 17 du Code des droits de succession, avant son abrogation, en ce qui concerne la Région flamande, par l'article 5.0.0 La Cour constitutionnelle, composée des présidents L. Lavrysen et F. Daoût, et des juges T. Merc(...) Extrait de l'arrêt n° 80/2021 du 3 juin 2021 Numéro du rôle : 7376 En cause : la question préjudicielle relative à l'article 17 du Code des droits de succession, avant son abrogation, en ce qui concerne la Région flamande, par l'article 5.0.0 La Cour constitutionnelle, composée des présidents L. Lavrysen et F. Daoût, et des juges T. Merc(...)
COUR CONSTITUTIONNELLE COUR CONSTITUTIONNELLE
Extrait de l'arrêt n° 80/2021 du 3 juin 2021 Extrait de l'arrêt n° 80/2021 du 3 juin 2021
Numéro du rôle : 7376 Numéro du rôle : 7376
En cause : la question préjudicielle relative à l'article 17 du Code En cause : la question préjudicielle relative à l'article 17 du Code
des droits de succession, avant son abrogation, en ce qui concerne la des droits de succession, avant son abrogation, en ce qui concerne la
Région flamande, par l'article 5.0.0.0.1, 4°, du Code flamand de la Région flamande, par l'article 5.0.0.0.1, 4°, du Code flamand de la
fiscalité du 13 décembre 2013, posée par la Cour de cassation. fiscalité du 13 décembre 2013, posée par la Cour de cassation.
La Cour constitutionnelle, La Cour constitutionnelle,
composée des présidents L. Lavrysen et F. Daoût, et des juges T. composée des présidents L. Lavrysen et F. Daoût, et des juges T.
Merckx-Van Goey, P. Nihoul, T. Giet, R. Leysen, J. Moerman, M. Pâques, Merckx-Van Goey, P. Nihoul, T. Giet, R. Leysen, J. Moerman, M. Pâques,
Y. Kherbache et T. Detienne, assistée du greffier F. Meersschaut, Y. Kherbache et T. Detienne, assistée du greffier F. Meersschaut,
présidée par le président L. Lavrysen, présidée par le président L. Lavrysen,
après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant :
I. Objet de la question préjudicielle et procédure I. Objet de la question préjudicielle et procédure
Par arrêt du 13 février 2020, dont l'expédition est parvenue au greffe Par arrêt du 13 février 2020, dont l'expédition est parvenue au greffe
de la Cour le 11 mars 2020, la Cour de cassation a posé la question de la Cour le 11 mars 2020, la Cour de cassation a posé la question
préjudicielle suivante : préjudicielle suivante :
« L'article 17 du Code des droits de succession, avant son abrogation, « L'article 17 du Code des droits de succession, avant son abrogation,
en ce qui concerne la Région flamande, par l'article 5.0.0.0.1, 4°, du en ce qui concerne la Région flamande, par l'article 5.0.0.0.1, 4°, du
décret du 13 décembre 2013 portant le Code flamand de la Fiscalité, décret du 13 décembre 2013 portant le Code flamand de la Fiscalité,
viole-t-il les articles 10, 11 et 172 de la Constitution coordonnée, viole-t-il les articles 10, 11 et 172 de la Constitution coordonnée,
en ce qu'il prévoit que, pour les contribuables, lorsque l'actif de la en ce qu'il prévoit que, pour les contribuables, lorsque l'actif de la
succession d'un habitant du Royaume comprend des biens immobiliers succession d'un habitant du Royaume comprend des biens immobiliers
situés à l'étranger qui donnent lieu, dans le pays où ils sont situés, situés à l'étranger qui donnent lieu, dans le pays où ils sont situés,
à la perception d'un impôt de succession, le droit de succession à la perception d'un impôt de succession, le droit de succession
exigible en Belgique est, dans la mesure où il frappe ces biens, exigible en Belgique est, dans la mesure où il frappe ces biens,
réduit jusqu'à concurrence de l'impôt de succession prélevé dans le réduit jusqu'à concurrence de l'impôt de succession prélevé dans le
pays où ces biens sont situés, alors qu'il ne prévoit pas que, pour pays où ces biens sont situés, alors qu'il ne prévoit pas que, pour
les contribuables, lorsque l'actif de la succession d'un habitant du les contribuables, lorsque l'actif de la succession d'un habitant du
Royaume comporte des biens mobiliers détenus à l'étranger qui donnent Royaume comporte des biens mobiliers détenus à l'étranger qui donnent
lieu, dans le pays où ces biens sont détenus, à la perception d'un lieu, dans le pays où ces biens sont détenus, à la perception d'un
impôt de succession, le droit de succession exigible en Belgique est, impôt de succession, le droit de succession exigible en Belgique est,
dans la mesure où il frappe ces biens, réduit jusqu'à concurrence de dans la mesure où il frappe ces biens, réduit jusqu'à concurrence de
l'impôt de succession prélevé dans ce pays ? ». l'impôt de succession prélevé dans ce pays ? ».
(...) (...)
III. En droit III. En droit
(...) (...)
B.1.1. L'article 17 du Code des droits de succession, tel qu'il est B.1.1. L'article 17 du Code des droits de succession, tel qu'il est
applicable dans l'affaire devant le juge a quo, dispose : applicable dans l'affaire devant le juge a quo, dispose :
« Lorsque l'actif de la succession d'un habitant du royaume comprend « Lorsque l'actif de la succession d'un habitant du royaume comprend
des immeubles situés à l'étranger qui donnent lieu à la perception, au des immeubles situés à l'étranger qui donnent lieu à la perception, au
pays de la situation, d'un impôt successoral, le droit de succession pays de la situation, d'un impôt successoral, le droit de succession
exigible en Belgique est, dans la mesure où il frappe ces biens, exigible en Belgique est, dans la mesure où il frappe ces biens,
réduit à concurrence de l'impôt prélevé par le pays de la situation, réduit à concurrence de l'impôt prélevé par le pays de la situation,
converti en euro à la date du paiement de cet impôt. converti en euro à la date du paiement de cet impôt.
La réduction dont il s'agit est subordonnée au dépôt, chez le receveur La réduction dont il s'agit est subordonnée au dépôt, chez le receveur
qui détient la déclaration de succession, de la quittance dûment datée qui détient la déclaration de succession, de la quittance dûment datée
des droits payés à l'étranger, ainsi que d'une copie, certifiée des droits payés à l'étranger, ainsi que d'une copie, certifiée
conforme par les autorités étrangères compétentes, de la déclaration conforme par les autorités étrangères compétentes, de la déclaration
qui leur a été remise et de la liquidation qu'elles ont établie. qui leur a été remise et de la liquidation qu'elles ont établie.
Si les pièces justificatives visées à l'alinéa précédent ne sont pas Si les pièces justificatives visées à l'alinéa précédent ne sont pas
déposées avant l'échéance des droits, ceux-ci doivent être payés dans déposées avant l'échéance des droits, ceux-ci doivent être payés dans
le délai légal, sauf restitution, le cas échéant, conformément à ce le délai légal, sauf restitution, le cas échéant, conformément à ce
qui est prévu à l'article 135, 2° ». qui est prévu à l'article 135, 2° ».
B.1.2. La disposition en cause doit être lue en combinaison avec B.1.2. La disposition en cause doit être lue en combinaison avec
l'article 15 du Code des droits de succession, aux termes duquel « le l'article 15 du Code des droits de succession, aux termes duquel « le
droit de succession est dû sur l'universalité des biens en quelque droit de succession est dû sur l'universalité des biens en quelque
lieu qu'ils se trouvent, appartenant au défunt ou à l'absent, lieu qu'ils se trouvent, appartenant au défunt ou à l'absent,
déduction faite des dettes et sauf application des articles 16 et 17 déduction faite des dettes et sauf application des articles 16 et 17
». Dans les cas où les biens recueillis d'une succession se trouvent à ». Dans les cas où les biens recueillis d'une succession se trouvent à
l'étranger et où un impôt de succession est prélevé sur ces biens par l'étranger et où un impôt de succession est prélevé sur ces biens par
le pays sur le territoire duquel ils se trouvent, comme dans l'affaire le pays sur le territoire duquel ils se trouvent, comme dans l'affaire
soumise au juge a quo, l'article 15 du Code des droits de succession soumise au juge a quo, l'article 15 du Code des droits de succession
peut donner lieu à la perception d'une double imposition successorale. peut donner lieu à la perception d'une double imposition successorale.
B.1.3. Les articles 15 et 17 du Code des droits de succession ont été, B.1.3. Les articles 15 et 17 du Code des droits de succession ont été,
en ce qui concerne la Région flamande, abrogés à partir du 1er janvier en ce qui concerne la Région flamande, abrogés à partir du 1er janvier
2015 par le décret du 19 décembre 2014 « portant modification du Code 2015 par le décret du 19 décembre 2014 « portant modification du Code
flamand de la fiscalité du 13 décembre 2013 », et remplacés flamand de la fiscalité du 13 décembre 2013 », et remplacés
respectivement par l'article 2.7.3.2.1 et par l'article 2.7.5.0.4 du respectivement par l'article 2.7.3.2.1 et par l'article 2.7.5.0.4 du
Code flamand de la fiscalité du 13 décembre 2013. Code flamand de la fiscalité du 13 décembre 2013.
B.2. La juridiction a quo interroge la Cour sur la compatibilité de B.2. La juridiction a quo interroge la Cour sur la compatibilité de
l'article 17 du Code des droits de succession, tel qu'il est l'article 17 du Code des droits de succession, tel qu'il est
applicable dans le litige a quo, avec les articles 10, 11 et 172 de la applicable dans le litige a quo, avec les articles 10, 11 et 172 de la
Constitution, en ce que cette disposition prévoit que les Constitution, en ce que cette disposition prévoit que les
contribuables qui recueillent, dans la succession d'un résident en contribuables qui recueillent, dans la succession d'un résident en
Belgique, des biens immobiliers situés à l'étranger voient le droit de Belgique, des biens immobiliers situés à l'étranger voient le droit de
succession exigible en Belgique, frappant ces biens, être réduit succession exigible en Belgique, frappant ces biens, être réduit
jusqu'à concurrence du montant de l'impôt de succession prélevé dans jusqu'à concurrence du montant de l'impôt de succession prélevé dans
le pays où ils sont situés, alors qu'elle ne prévoit pas que les le pays où ils sont situés, alors qu'elle ne prévoit pas que les
contribuables qui recueillent, dans la succession d'un résident en contribuables qui recueillent, dans la succession d'un résident en
Belgique, des biens mobiliers détenus à l'étranger peuvent voir le Belgique, des biens mobiliers détenus à l'étranger peuvent voir le
droit de succession exigible en Belgique être réduit jusqu'à droit de succession exigible en Belgique être réduit jusqu'à
concurrence du montant de l'impôt de succession, frappant ces biens, concurrence du montant de l'impôt de succession, frappant ces biens,
qui est prélevé dans le pays où ils sont situés. qui est prélevé dans le pays où ils sont situés.
B.3.1. Le principe d'égalité et de non-discrimination n'exclut pas B.3.1. Le principe d'égalité et de non-discrimination n'exclut pas
qu'une différence de traitement soit établie entre des catégories de qu'une différence de traitement soit établie entre des catégories de
personnes, pour autant qu'elle repose sur un critère objectif et personnes, pour autant qu'elle repose sur un critère objectif et
qu'elle soit raisonnablement justifiée. qu'elle soit raisonnablement justifiée.
L'existence d'une telle justification doit s'apprécier en tenant L'existence d'une telle justification doit s'apprécier en tenant
compte du but et des effets de la mesure critiquée ainsi que de la compte du but et des effets de la mesure critiquée ainsi que de la
nature des principes en cause; le principe d'égalité et de nature des principes en cause; le principe d'égalité et de
non-discrimination est violé lorsqu'il est établi qu'il n'existe pas non-discrimination est violé lorsqu'il est établi qu'il n'existe pas
de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés
et le but visé. et le but visé.
B.3.2. L'article 172, alinéa 1er, de la Constitution constitue une B.3.2. L'article 172, alinéa 1er, de la Constitution constitue une
application particulière, en matière fiscale, du principe d'égalité et application particulière, en matière fiscale, du principe d'égalité et
de non-discrimination inscrit aux articles 10 et 11 de la de non-discrimination inscrit aux articles 10 et 11 de la
Constitution. Constitution.
B.3.3. Ni les articles 10 et 11 ni l'article 172, alinéa 1er, de la B.3.3. Ni les articles 10 et 11 ni l'article 172, alinéa 1er, de la
Constitution ne comportent une interdiction générale de la double Constitution ne comportent une interdiction générale de la double
imposition. imposition.
B.3.4. Il relève du pouvoir d'appréciation du législateur de B.3.4. Il relève du pouvoir d'appréciation du législateur de
déterminer, lorsqu'il lève un impôt, les exonérations et les modalités déterminer, lorsqu'il lève un impôt, les exonérations et les modalités
de celui-ci. Le législateur ne pourrait cependant, sans violer le de celui-ci. Le législateur ne pourrait cependant, sans violer le
principe d'égalité et de non-discrimination, accorder des exonérations principe d'égalité et de non-discrimination, accorder des exonérations
ou des réductions de l'impôt à certains redevables et les refuser à ou des réductions de l'impôt à certains redevables et les refuser à
d'autres qui leur seraient comparables, si cette différence de d'autres qui leur seraient comparables, si cette différence de
traitement n'est pas objectivement et raisonnablement justifiée. traitement n'est pas objectivement et raisonnablement justifiée.
B.4.1. La disposition en cause comporte non pas une exonération de B.4.1. La disposition en cause comporte non pas une exonération de
l'impôt de succession sur un bien immobilier situé à l'étranger, mais l'impôt de succession sur un bien immobilier situé à l'étranger, mais
seulement une réduction de l'impôt de succession dû en Belgique seulement une réduction de l'impôt de succession dû en Belgique
jusqu'à concurrence de l'impôt de succession payé à l'étranger sur ce jusqu'à concurrence de l'impôt de succession payé à l'étranger sur ce
même bien. Si l'impôt de succession payé à l'étranger est inférieur à même bien. Si l'impôt de succession payé à l'étranger est inférieur à
l'impôt de succession dû en Belgique, un impôt de succession doit l'impôt de succession dû en Belgique, un impôt de succession doit
encore être payé partiellement en Belgique. Ce n'est que dans le cas encore être payé partiellement en Belgique. Ce n'est que dans le cas
où l'impôt de succession payé à l'étranger est égal ou supérieur à où l'impôt de succession payé à l'étranger est égal ou supérieur à
l'impôt de succession dû en Belgique que plus rien n'est dû en l'impôt de succession dû en Belgique que plus rien n'est dû en
Belgique sur le bien immobilier situé à l'étranger. Si un impôt de Belgique sur le bien immobilier situé à l'étranger. Si un impôt de
succession plus élevé a été payé à l'étranger, le montant qui dépasse succession plus élevé a été payé à l'étranger, le montant qui dépasse
l'impôt de succession dû en Belgique ne peut pas être déduit de l'impôt de succession dû en Belgique ne peut pas être déduit de
l'impôt de succession dû en Belgique. l'impôt de succession dû en Belgique.
L'imputation de l'impôt de succession prélevé à l'étranger requiert L'imputation de l'impôt de succession prélevé à l'étranger requiert
que les héritiers fournissent la preuve que des droits successoraux que les héritiers fournissent la preuve que des droits successoraux
ont effectivement été payés. A cet effet, ils doivent soumettre une ont effectivement été payés. A cet effet, ils doivent soumettre une
preuve de paiement dûment datée, ainsi qu'une copie de la déclaration preuve de paiement dûment datée, ainsi qu'une copie de la déclaration
certifiée conforme par l'autorité étrangère compétente et le calcul de certifiée conforme par l'autorité étrangère compétente et le calcul de
l'impôt de succession étranger. l'impôt de succession étranger.
B.4.2. L'article 17 du Code des droits de succession a été instauré B.4.2. L'article 17 du Code des droits de succession a été instauré
par la loi du 10 août 1923 « apportant des modifications aux lois sur par la loi du 10 août 1923 « apportant des modifications aux lois sur
les droits de timbre, d'enregistrement, de greffe, d'hypothèque et de les droits de timbre, d'enregistrement, de greffe, d'hypothèque et de
succession ». Dans les travaux préparatoires, cette législation est succession ». Dans les travaux préparatoires, cette législation est
justifiée comme suit : justifiée comme suit :
« Dans cet état de notre législation, les immeubles situés hors de nos « Dans cet état de notre législation, les immeubles situés hors de nos
frontières et qui sont transmis par le décès d'un habitant du Royaume frontières et qui sont transmis par le décès d'un habitant du Royaume
sont, en règle, soumis à une double perception : l'une en Belgique, sont, en règle, soumis à une double perception : l'une en Belgique,
l'autre au pays de la situation des biens. l'autre au pays de la situation des biens.
Cette double perception pour un même fait est évidemment rigoureuse et Cette double perception pour un même fait est évidemment rigoureuse et
a donné lieu à de fréquentes et légitimes protestations. [...] a donné lieu à de fréquentes et légitimes protestations. [...]
Il importe de faire disparaître le grief que soulève à cet égard notre Il importe de faire disparaître le grief que soulève à cet égard notre
législation. Tel est le but de la disposition qui est l'objet de législation. Tel est le but de la disposition qui est l'objet de
l'article 33 du projet. Cette disposition exempte, en fait, du droit l'article 33 du projet. Cette disposition exempte, en fait, du droit
de succession la partie du montant net de l'héritage qui est fournie de succession la partie du montant net de l'héritage qui est fournie
par des immeubles situés hors de notre territoire, et ce à concurrence par des immeubles situés hors de notre territoire, et ce à concurrence
du droit similaire que les héritiers ou légataires justifieront avoir du droit similaire que les héritiers ou légataires justifieront avoir
payé du chef des dits immeubles dans le pays de leur situation. C'est payé du chef des dits immeubles dans le pays de leur situation. C'est
dire qu'il y aura remise totale du droit dû en Belgique d'après la loi dire qu'il y aura remise totale du droit dû en Belgique d'après la loi
existante, lorsque le droit perçu par l'Etat étranger sera égal ou existante, lorsque le droit perçu par l'Etat étranger sera égal ou
supérieur, et que la remise sera d'une somme égale à ce dernier droit supérieur, et que la remise sera d'une somme égale à ce dernier droit
dans l'hypothèse contraire » (Doc. parl., Chambre, 1922-1923, n° 138, dans l'hypothèse contraire » (Doc. parl., Chambre, 1922-1923, n° 138,
p. 9). p. 9).
B.4.3. Au cours des discussions relatives au projet de loi qui a B.4.3. Au cours des discussions relatives au projet de loi qui a
abouti à la loi du 10 août 1923, il a été demandé au sein de la abouti à la loi du 10 août 1923, il a été demandé au sein de la
commission de la Chambre si la réduction de l'impôt de succession ne commission de la Chambre si la réduction de l'impôt de succession ne
devait pas aussi intégrer l'impôt de succession payé pour les biens devait pas aussi intégrer l'impôt de succession payé pour les biens
mobiliers détenus à l'étranger. Toutefois, le rapporteur a répondu ce mobiliers détenus à l'étranger. Toutefois, le rapporteur a répondu ce
qui suit : qui suit :
« Il n'a pas été possible [...] de vérifier si et dans quelle mesure « Il n'a pas été possible [...] de vérifier si et dans quelle mesure
des pays étrangers perçoivent des droits de succession sur les valeurs des pays étrangers perçoivent des droits de succession sur les valeurs
mobilières qui dépendent de la succession d'un habitant de notre pays. mobilières qui dépendent de la succession d'un habitant de notre pays.
Il est, en général, admis, que la succession est, en droit civil, Il est, en général, admis, que la succession est, en droit civil,
régie quant aux meubles tant corporels qu'incorporels par la loi du régie quant aux meubles tant corporels qu'incorporels par la loi du
domicile de leur propriétaire. domicile de leur propriétaire.
Donc, on peut soutenir qu'il est juste d'intégralement appliquer le Donc, on peut soutenir qu'il est juste d'intégralement appliquer le
tarif successoral belge à l'ensemble du patrimoine mobilier délaissé tarif successoral belge à l'ensemble du patrimoine mobilier délaissé
par un habitant du Royaume » (Doc. parl., Chambre, 1922-1923, n° 279, par un habitant du Royaume » (Doc. parl., Chambre, 1922-1923, n° 279,
p. 31). p. 31).
B.5.1. Comme il est dit en B.4.2, l'introduction de la disposition en B.5.1. Comme il est dit en B.4.2, l'introduction de la disposition en
cause visait à éviter une double imposition successorale. Cet objectif cause visait à éviter une double imposition successorale. Cet objectif
est légitime. est légitime.
B.5.2. La différence de traitement repose également sur un critère de B.5.2. La différence de traitement repose également sur un critère de
distinction objectif, à savoir le caractère immobilier ou mobilier du distinction objectif, à savoir le caractère immobilier ou mobilier du
bien qui fait partie de la succession. bien qui fait partie de la succession.
B.5.3. Ainsi qu'il ressort des travaux préparatoires mentionnés en B.5.3. Ainsi qu'il ressort des travaux préparatoires mentionnés en
B.4.3, lors de l'introduction de l'article 17 du Code des droits de B.4.3, lors de l'introduction de l'article 17 du Code des droits de
succession, l'exclusion des biens mobiliers détenus à l'étranger a été succession, l'exclusion des biens mobiliers détenus à l'étranger a été
estimée justifiée pour deux raisons. D'une part, il a été souligné que estimée justifiée pour deux raisons. D'une part, il a été souligné que
c'est le droit du domicile du défunt qui détermine la transmission c'est le droit du domicile du défunt qui détermine la transmission
successorale en droit civil. D'autre part, il aurait été difficile à successorale en droit civil. D'autre part, il aurait été difficile à
ce moment-là de déterminer si ces pays prélevaient un impôt de ce moment-là de déterminer si ces pays prélevaient un impôt de
succession sur des biens mobiliers détenus à l'étranger. succession sur des biens mobiliers détenus à l'étranger.
B.5.4. Pour justifier la différence de traitement sur laquelle la Cour B.5.4. Pour justifier la différence de traitement sur laquelle la Cour
est interrogée, le Gouvernement flamand fait encore valoir que la est interrogée, le Gouvernement flamand fait encore valoir que la
disposition en cause vise à éviter la fraude fiscale. disposition en cause vise à éviter la fraude fiscale.
B.6.1. Indépendamment du fait que d'autres pays prélevaient ou non en B.6.1. Indépendamment du fait que d'autres pays prélevaient ou non en
1923 un impôt de succession sur des biens mobiliers détenus par des 1923 un impôt de succession sur des biens mobiliers détenus par des
non-résidents sur leur territoire, il apparaît qu'à l'heure actuelle, non-résidents sur leur territoire, il apparaît qu'à l'heure actuelle,
plusieurs pays dont l'Espagne prélèvent un tel impôt de succession. plusieurs pays dont l'Espagne prélèvent un tel impôt de succession.
En outre, la mobilité internationale tant des personnes que des biens En outre, la mobilité internationale tant des personnes que des biens
et des capitaux a sensiblement augmenté depuis 1923. De ce fait, les et des capitaux a sensiblement augmenté depuis 1923. De ce fait, les
Belges détiennent actuellement beaucoup plus de biens mobiliers à Belges détiennent actuellement beaucoup plus de biens mobiliers à
l'étranger qu'au moment de l'adoption de la disposition en cause. Ces l'étranger qu'au moment de l'adoption de la disposition en cause. Ces
biens peuvent avoir une valeur considérable, notamment lorsqu'il biens peuvent avoir une valeur considérable, notamment lorsqu'il
s'agit d'avoirs bancaires ou d'actions. s'agit d'avoirs bancaires ou d'actions.
B.6.2. En droit civil, le droit du domicile du défunt détermine en B.6.2. En droit civil, le droit du domicile du défunt détermine en
règle générale non seulement la transmission successorale règle générale non seulement la transmission successorale
transfrontalière de biens mobiliers, mais aussi celle de biens transfrontalière de biens mobiliers, mais aussi celle de biens
immobiliers. Par ailleurs, ce principe de droit civil n'a pas de immobiliers. Par ailleurs, ce principe de droit civil n'a pas de
rapport avec le traitement fiscal de ces biens, qui repose sur une rapport avec le traitement fiscal de ces biens, qui repose sur une
logique fiscale propre. logique fiscale propre.
B.6.3. La mobilité inhérente aux biens mobiliers et la possibilité de B.6.3. La mobilité inhérente aux biens mobiliers et la possibilité de
transférer ceux-ci vers l'étranger après le décès du défunt pour transférer ceux-ci vers l'étranger après le décès du défunt pour
échapper à l'impôt de succession en Belgique n'empêche pas que la échapper à l'impôt de succession en Belgique n'empêche pas que la
disposition en cause ne règle pas une exonération fiscale, mais une disposition en cause ne règle pas une exonération fiscale, mais une
simple imputation. Rien ne justifie que le législateur compétent simple imputation. Rien ne justifie que le législateur compétent
continue à traiter le contribuable qui hérite de biens mobiliers continue à traiter le contribuable qui hérite de biens mobiliers
différemment du contribuable qui hérite de biens immobiliers. différemment du contribuable qui hérite de biens immobiliers.
B.6.4. Selon le Gouvernement flamand, l'extension de la disposition en B.6.4. Selon le Gouvernement flamand, l'extension de la disposition en
cause aux biens mobiliers qui sont détenus à l'étranger pourrait cause aux biens mobiliers qui sont détenus à l'étranger pourrait
donner lieu à une fraude fiscale, au motif que les héritiers seraient donner lieu à une fraude fiscale, au motif que les héritiers seraient
incités, après le décès du défunt, à déplacer des biens mobiliers à incités, après le décès du défunt, à déplacer des biens mobiliers à
l'étranger afin d'échapper à l'impôt de succession belge. l'étranger afin d'échapper à l'impôt de succession belge.
La disposition en cause ne peut porter que sur des biens qui se La disposition en cause ne peut porter que sur des biens qui se
trouvent déjà à l'étranger au moment du décès du défunt. En outre, le trouvent déjà à l'étranger au moment du décès du défunt. En outre, le
risque de voir certains contribuables se rendre coupable de fraude risque de voir certains contribuables se rendre coupable de fraude
fiscale ne saurait justifier, en tant que tel, que des contribuables fiscale ne saurait justifier, en tant que tel, que des contribuables
qui sont de bonne foi soient exclus du bénéfice de la disposition en qui sont de bonne foi soient exclus du bénéfice de la disposition en
cause. Si le champ d'application de la disposition en cause était cause. Si le champ d'application de la disposition en cause était
étendu aux biens mobiliers détenus à l'étranger, les héritiers étendu aux biens mobiliers détenus à l'étranger, les héritiers
devraient apporter la preuve, pour pouvoir bénéficier de l'imputation devraient apporter la preuve, pour pouvoir bénéficier de l'imputation
de l'impôt de succession, qu'un impôt de succession a effectivement de l'impôt de succession, qu'un impôt de succession a effectivement
été payé dans un autre pays, ce qui implique nécessairement qu'ils été payé dans un autre pays, ce qui implique nécessairement qu'ils
devraient informer les diverses autorités fiscales de l'existence des devraient informer les diverses autorités fiscales de l'existence des
biens mobiliers détenus à l'étranger. biens mobiliers détenus à l'étranger.
B.7. Comme il est dit en B.4.2, la disposition en cause a été B.7. Comme il est dit en B.4.2, la disposition en cause a été
instaurée pour tempérer la sévérité d'une double imposition instaurée pour tempérer la sévérité d'une double imposition
successorale et elle a été inspirée par un souci d'équité. Au regard successorale et elle a été inspirée par un souci d'équité. Au regard
de cet objectif et compte tenu de ce qui est dit en B.6, il n'apparaît de cet objectif et compte tenu de ce qui est dit en B.6, il n'apparaît
pas que la différence de traitement qui découle de l'article 17 du pas que la différence de traitement qui découle de l'article 17 du
Code des droits de succession, selon que l'impôt de succession porte Code des droits de succession, selon que l'impôt de succession porte
sur des biens immobiliers ou mobiliers, repose sur un critère de sur des biens immobiliers ou mobiliers, repose sur un critère de
distinction pertinent. distinction pertinent.
Par conséquent, la différence de traitement en cause n'est pas Par conséquent, la différence de traitement en cause n'est pas
raisonnablement justifiée. raisonnablement justifiée.
B.8. La question préjudicielle appelle une réponse affirmative. B.8. La question préjudicielle appelle une réponse affirmative.
Dans l'attente d'une intervention du législateur, il appartient au Dans l'attente d'une intervention du législateur, il appartient au
juge a quo de mettre fin à l'inconstitutionnalité constatée par la juge a quo de mettre fin à l'inconstitutionnalité constatée par la
Cour, étant donné que ce constat est exprimé en des termes Cour, étant donné que ce constat est exprimé en des termes
suffisamment clairs et complets pour permettre que la disposition en suffisamment clairs et complets pour permettre que la disposition en
cause soit appliquée dans le respect des articles 10 et 11 de la cause soit appliquée dans le respect des articles 10 et 11 de la
Constitution. Constitution.
Quant au maintien des effets Quant au maintien des effets
B.9.1. A titre subsidiaire, le Gouvernement flamand demande, en cas de B.9.1. A titre subsidiaire, le Gouvernement flamand demande, en cas de
constat d'inconstitutionnalité, de maintenir les effets de la constat d'inconstitutionnalité, de maintenir les effets de la
disposition en cause pour le passé, afin de garantir la sécurité disposition en cause pour le passé, afin de garantir la sécurité
juridique. Il soutient que si la disposition en cause est purement et juridique. Il soutient que si la disposition en cause est purement et
simplement déclarée inconstitutionnelle, des contestations peuvent simplement déclarée inconstitutionnelle, des contestations peuvent
naître concernant l'applicabilité de l'article 17 du Code des droits naître concernant l'applicabilité de l'article 17 du Code des droits
de succession à des successions comprenant des biens immobiliers de succession à des successions comprenant des biens immobiliers
situés à l'étranger, où l'impôt de succession dû a été perçu depuis situés à l'étranger, où l'impôt de succession dû a été perçu depuis
longtemps, ainsi que concernant les refus d'appliquer cet article à longtemps, ainsi que concernant les refus d'appliquer cet article à
des successions contenant des biens mobiliers détenus à l'étranger. des successions contenant des biens mobiliers détenus à l'étranger.
Par ailleurs, le Gouvernement flamand attire aussi l'attention sur le Par ailleurs, le Gouvernement flamand attire aussi l'attention sur le
fait que l'article 2.7.5.0.4 du Code flamand de la fiscalité comporte fait que l'article 2.7.5.0.4 du Code flamand de la fiscalité comporte
à l'heure actuelle un régime identique à celui qui figurait dans la à l'heure actuelle un régime identique à celui qui figurait dans la
disposition en cause. disposition en cause.
B.9.2. Le maintien des effets doit être considéré comme une exception B.9.2. Le maintien des effets doit être considéré comme une exception
à la nature déclaratoire de l'arrêt rendu au contentieux préjudiciel. à la nature déclaratoire de l'arrêt rendu au contentieux préjudiciel.
Avant de décider de maintenir les effets de la disposition en cause, Avant de décider de maintenir les effets de la disposition en cause,
la Cour doit constater que l'avantage tiré de l'effet du constat la Cour doit constater que l'avantage tiré de l'effet du constat
d'inconstitutionnalité non modulé est disproportionné par rapport à la d'inconstitutionnalité non modulé est disproportionné par rapport à la
perturbation qu'il impliquerait pour l'ordre juridique. perturbation qu'il impliquerait pour l'ordre juridique.
B.9.3. Il convient d'abord d'observer que la Cour ne peut pas se B.9.3. Il convient d'abord d'observer que la Cour ne peut pas se
prononcer sur le maintien des effets de l'article 2.7.5.0.4 du Code prononcer sur le maintien des effets de l'article 2.7.5.0.4 du Code
flamand de la fiscalité, étant donné que cette disposition n'est pas flamand de la fiscalité, étant donné que cette disposition n'est pas
en cause dans la présente affaire. en cause dans la présente affaire.
B.9.4. En ce qui concerne l'article 17 du Code des droits de B.9.4. En ce qui concerne l'article 17 du Code des droits de
succession, le Gouvernement flamand ne démontre pas qu'un constat, non succession, le Gouvernement flamand ne démontre pas qu'un constat, non
modulé, d'inconstitutionnalité pourrait à ce point compromettre la modulé, d'inconstitutionnalité pourrait à ce point compromettre la
sécurité juridique que, lorsqu'elle répond à la question sécurité juridique que, lorsqu'elle répond à la question
préjudicielle, la Cour doive décider de maintenir les effets de cette préjudicielle, la Cour doive décider de maintenir les effets de cette
disposition. Par ailleurs, en ce qui concerne la Région flamande, la disposition. Par ailleurs, en ce qui concerne la Région flamande, la
disposition en cause n'est plus applicable depuis le 1er janvier 2015. disposition en cause n'est plus applicable depuis le 1er janvier 2015.
B.9.5. La demande de maintien des effets doit dès lors être rejetée. B.9.5. La demande de maintien des effets doit dès lors être rejetée.
Par ces motifs, Par ces motifs,
la Cour la Cour
dit pour droit : dit pour droit :
L'article 17 du Code des droits de succession, avant son abrogation, L'article 17 du Code des droits de succession, avant son abrogation,
en ce qui concerne la Région flamande, par l'article 5.0.0.0.1, 4°, du en ce qui concerne la Région flamande, par l'article 5.0.0.0.1, 4°, du
Code flamand de la fiscalité du 13 décembre 2013, viole les articles Code flamand de la fiscalité du 13 décembre 2013, viole les articles
10, 11 et 172 de la Constitution, en ce qu'il ne prévoit pas que les 10, 11 et 172 de la Constitution, en ce qu'il ne prévoit pas que les
contribuables qui recueillent, dans la succession d'un résident en contribuables qui recueillent, dans la succession d'un résident en
Belgique, des biens mobiliers détenus à l'étranger peuvent voir le Belgique, des biens mobiliers détenus à l'étranger peuvent voir le
droit de succession exigible en Belgique, qui frappe ces biens, être droit de succession exigible en Belgique, qui frappe ces biens, être
réduit jusqu'à concurrence du montant de l'impôt de succession prélevé réduit jusqu'à concurrence du montant de l'impôt de succession prélevé
dans le pays où ces biens sont détenus. dans le pays où ces biens sont détenus.
Ainsi rendu en langue néerlandaise et en langue française, Ainsi rendu en langue néerlandaise et en langue française,
conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur
la Cour constitutionnelle, le 3 juin 2021. la Cour constitutionnelle, le 3 juin 2021.
Le greffier, Le greffier,
F. Meersschaut F. Meersschaut
Le président, Le président,
L. Lavrysen L. Lavrysen
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