publié le 15 mars 2010
Arrêté royal portant création d'un service Evaluation spéciale de la Coopération internationale
25 FEVRIER 2010. - Arrêté royal portant création d'un service Evaluation spéciale de la Coopération internationale
ALBERT II, Roi des Belges, A tous, présents et à venir, Salut.
Vu la Constitution, les articles 37 et 107;
Vu l'arrêté royal du 17 février 2003 portant création d'un service « Evaluation spéciale de la Coopération internationale »;
Vu l'arrêté royal du 4 avril 2003 portant à la désignation d'un Evaluateur spécial auprès du service Evaluation spéciale de la Coopération internationale;
Vu l'avis de l'Inspecteur des Finances, donné le 3 juillet 2009;
Vu l'accord du Ministre de la Fonction publique, donné le 7 octobre 2009;
Vu l'accord du Secrétaire d'Etat au Budget, donné le 7 octobre 2009;
Vu le protocole de négociation n° 10/4, du Comité de secteur VII, conclu en date du 22 octobre 2009;
Vu l'avis 47.544/4 du Conseil d'Etat, donné le 18 janvier 2009, en application de l'article 84, § 1er, alinéa 1er, 1° des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées le 12 janvier 1973;
Sur la proposition du Ministre des Affaires étrangères et du Ministre de la Coopération au Développement et de l'avis des Ministres qui en ont délibéré en Conseil, Nous avons arrêté et arrêtons : CHAPITRE Ier. - Institution et missions
Article 1er.Il est institué auprès du Service public fédéral Affaires étrangères, Commerce extérieur et Coopération au Développement un service Evaluation spéciale de la Coopération internationale, nommé ci-après en abrégé service Evaluation spéciale. Ce service est administrativement placé sous l'autorité du Président du Comité de Direction du Service public fédéral Affaires étrangères, Commerce extérieur et Coopération au Développement.
Art. 2.§ 1er. Le service Evaluation spéciale est habilité à évaluer toutes les activités de l'Etat fédéral reconnues comme aide publique au développement par le Comité d'Aide au Développement de l'Organisation pour la Coopération et le Développement économiques.
Au sein de ce domaine de compétence, le service Evaluation spéciale est chargé des tâches suivantes : 1° la planification, l'exécution et le suivi d'évaluations.Ces évaluations peuvent concerner toute forme d'aide, octroyée par tout instrument, organisation ou canal financé ou cofinancé par l'Etat fédéral. Les critères d'évaluation sont notamment : a) la pertinence au développement, l'efficacité, l'efficience, l'impact et la durabilité des interventions;b) l'ajustement aux priorités et aux procédures des pays partenaires, l'harmonisation avec d'autres donateurs, lag gestion axée résultats et l'appropriation par les pays partenaires des résultats de l'aide. Les évaluations peuvent être sectorielles ou thématiques, adaptées à un pays donné ou à plusieurs pays ou régions; elles peuvent être effectuées tant pendant l'exécution qu'à l'issue d'une intervention ou ex-post; 2° la justification vis-à-vis du Parlement et de l'opinion publique à propos de la politique menée et de l'affectation des moyens;3° la rédaction des conclusions des évaluations et la formulation de recommandations exploitables de manière optimale et visant à améliorer et à adapter la politique en matière de coopération au développement;4° la participation à des évaluations communes internationales et à des activités soutenant la capacité d'évaluation dans les pays partenaires. § 2. Sans préjudice des dispositions du présent arrêté, le service Evaluation spéciale exécute ses tâches conformément aux principes et normes approuvés par les pays membres du Comité d'Aide au Développement de l'Organisation pour la Coopération et le Développement économiques et qui sont publiés comme document officiel par l'Organisation pour la Coopération, le Développement économiques.
Il planifiera et effectuera les évaluations en étroite collaboration avec les parties concernées, y compris les pays partenaires.
Le service Evaluation spéciale exécutera ses tâches en application de l'arrêté royal du 16 novembre 1994 relatif au contrôle administratif et budgétaire. § 3. En vue de l'exécution de ses missions, le service Evaluation spéciale établit pour le 30 septembre de chaque année et après concertation avec les services publics, les sociétés de droit public ou de droit privé, les groupements, les associations ou les institutions et les organisations non gouvernementales concernés par la coopération au développement de l'Etat fédéral, un plan stratégique pluriannuel, un programme annuel et un budget annuel des priorités et des activités à exécuter au cours de l'année suivante. § 4. Outre les activités reprises dans le programme annuel mentionné à l'article 2, § 3, le service Evaluation spéciale peut réaliser ou faire réaliser des évaluations ponctuelles à la demande du Conseil des Ministres, du Ministre des Affaires étrangères, du Membre du Gouvernement qui a la Coopération au Développement dans ses attributions ou du Président du Comité de Direction du Service public fédéral Affaires étrangères, Commerce extérieur et Coopération au Développement. CHAPITRE II. - Personnel
Art. 3.§ 1er. Le service Evaluation spéciale est dirigé par un Evaluateur spécial qui, sur proposition du Membre du Gouvernement qui a la Coopération au Développement dans ses attributions et du Ministre des Affaires étrangères, est désigné par Nous, par arrêté royal délibéré en Conseil des Ministres, pour un mandat de six ans.
L'Evaluateur spécial ne peut être révoqué que par arrêté royal délibéré en Conseil des Ministres sur proposition du Membre du Gouvernement qui a la Coopération au Développement dans ses attributions et du Ministre des Affaires étrangères suite à des manquements graves dans l'exécution de ses tâches ou lorsqu'il ne répond plus aux conditions de nomination définies au § 2 et § 8 du présent article. § 2. Pour entrer en considération pour la fonction d'Evaluateur spécial, le candidat doit répondre aux conditions suivantes : 1° être Belge;2° être d'une conduite répondant aux exigences de la fonction;3° être porteur d'un diplôme donnant accès aux emplois de niveau A dans les administrations de l'Etat;4° disposer d'une connaissance théorique en méthodologie d'évaluation, ainsi que d'une expérience professionnelle d'au moins dix ans dans le secteur public et/ou dans des programmes socio-économiques, dont au moins cinq années d'expérience dans des études d'appui à la politique et/ou l'évaluation, et dont au moins deux années d'expérience en Coopération au développement;5° jouir de ses droits civils et politiques;6° avoir satisfait aux lois sur la milice; La vacance d'emploi est annoncée par avis au Moniteur belge. Cet avis mentionne le délai dans lequel les candidatures doivent être déposées. § 3. La procédure de sélection se fait conformément à l'arrêté royal du 29 octobre 2001 relatif à la désignation et à l'exercice des fonctions de management dans les services publics fédéraux et les services publics fédéraux de programmation.
La commission de sélection se compose de l'administrateur délégué du SELOR ou de son délégué, du président du Comité de Direction du Service public fédéral Affaires étrangères, Commerce extérieur et Coopération au Développement ou de son délégué, d'un expert d'un service international d'évaluation et d'un universitaire disposant de connaissances en méthodes d'évaluation en matière de coopération au développement.
SELOR communique les résultats de la procédure de sélection au Ministre des Affaires étrangères et au Membre du Gouvernement qui a la Coopération au Développement dans ses attributions.
Un entretien complémentaire est mené par ces ministres avec les candidats du groupe A afin de les comparer quant à leurs compétences spécifiques, leurs aptitudes relationnelles et leurs capacités à diriger par rapport à la description de fonction et au profil de compétence afférents à la fonction d'évaluateur spécial. Un rapport de chaque entretien est rédigé et joint au dossier de désignation. Après épuisement du groupe A, la procédure se répète avec les candidats du groupe B. § 4. Sous réserve des dispositions applicables en matière de sécurité sociale aux agents de l'administration fédérale qui ne sont pas nommés à titre définitif, les dispositions réglant le statut administratif des agents de l'Etat sont applicables à l'Evaluateur spécial, à l'exception toutefois des dispositions en matière de recrutement, de carrière et d'évaluation.
Si l'Evaluateur spécial est agent définitif de la fonction publique administrative fédérale, il est mis d'office en congé pour mission.
Cette mission est reconnue de plein droit d'intérêt général. § 5. Le traitement de l'Evaluateur spécial est déterminé sur base d'une pondération conforme au système de pondération et les critères de pondération définis dans l'Arrêté royal du 11 juillet 2001 relatif à la pondération des fonctions de management et d'encadrement dans les services publics fédéraux et fixant leur traitement. Le Ministre des Affaires étrangères et le Membre du Gouvernement qui a la Coopération au Développement dans ses attributions, déterminent la pondération, après accord du Ministre de la Fonction publique et du Budget § 6. En matière d'allocations et d'indemnités, les arrêtés suivants s'appliquent à l'Evaluateur spécial : 1° Arrêté royal du 24 décembre 1964 fixant les indemnités pour frais de séjour des membres du personnel des services publics fédéraux;2° Arrêté royal du 18 janvier 1965 portant réglementation générale en matière de frais de parcours;3° Arrêté royal du 26 mars 1965 portant réglementation générale des indemnités, allocations et primes quelconques accordées au personnel des services publics fédéraux;4° Arrêté royal du 26 mars 1965 relatif aux allocations familiales allouées à certaines catégories du personnel rétribué par l'Etat ainsi qu'aux membres du personnel du cadre opérationnel et du cadre administratif et logistique des corps de police locale;5° Arrêté royal du 8 juillet 2005 réglant l'octroi d'une indemnité pour frais funéraires en cas de décès d'un membre du personnel d'un service public fédéral;6° Arrêté royal du 30 janvier 1979 relatif à l'octroi d'un pécule de vacances aux agents de l'administration générale du Royaume;7° Arrêté royal du 23 octobre 1979 accordant une allocation de fin d'année à certains titulaires d'une fonction rémunérée à charge du Trésor public. § 7. L'Evaluateur spécial assume la gestion journalière du service Evaluation spéciale. Il dirige et coordonne les tâches mentionnées à l'article 2 et veille à ce qu'elles soient exécutées en toute indépendance et objectivité. § 8. L'Evaluateur spécial ne peut, pendant son occupation dans le cadre du présent arrêté, exercer un mandat auprès d'un partenaire subventionné par la Coopération au Développement belge ou auprès d'un partenaire qui est subventionné par une autre administration fédérale et qui a des activités comptabilisables en aide publique au développement.
L'Evaluateur spécial ne peut obtenir, pendant son occupation dans le cadre du présent arrêté : 1° un congé pour poser sa candidature aux élections du Parlement européen, des chambres législatives fédérales, des conseils des régions et des communautés ou des conseils provinciaux ou pour exercer une fonction dans une cellule stratégique ou dans le cabinet d'un ministre ou d'un secrétaire d'Etat ou dans le cabinet du président ou d'un membre du Gouvernement d'une Communauté, d'une Région, du Collège réuni de la Commission communautaire commune ou du Collège de la Commission communautaire française;2° un congé tel que visé à l'arrêté royal du 12 août 1993 relatif au congé accordé à certains agents des services de l'Etat mis à la disposition du Roi ou des Princes et Princesses de Belgique et à l'arrêté royal du 2 avril 1975 relatif au congé accordé à certains membres du personnel des services publics pour accomplir certaines prestations au bénéfice de groupes politiques reconnus des assemblées législatives nationales, communautaires ou régionales ou au bénéfice des présidents de ces groupes. § 9. Au plus tard six mois avant la fin du mandat de l'Evaluateur spécial, une nouvelle sélection est organisée. Le titulaire du mandat peut à nouveau se porter candidat. Dans aucun cas le titulaire du mandat peut assumer la fonction d'Evaluateur spécial pour une période plus longue que douze ans.
Art. 4.Pour l'accomplissement de ses missions, le service Evaluation spéciale dispose du personnel du service évaluation des dépenses prises en compte à titre d'aide officielle belge de coopération visé à l'article 7 de l'arrêté royal du 3 juin 1999 portant règlement organique du Ministère des Affaires étrangères, du Commerce extérieur et de la Coopération internationale. Ce personnel ainsi que tout autre personnel qui serait mis à la disposition du Service Evaluation spéciale par le Service public fédéral Affaires étrangères, Commerce extérieur et Coopération au Développement est placé sous l'autorité de l'Evaluateur spécial. Toute mise à disposition se fait sur base d'un profil de compétence établi par l'Evaluateur spécial.
L'actuel service évaluation de la Direction générale de la Coopération au Développement, est intégré dans le Service Evaluation spéciale. CHAPITRE III. - Moyens de fonctionnement, assistance et conseils
Art. 5.Dans le cadre du programme annuel visé à l'article 2, § 3, le service Evaluation spéciale établit un budget pour les évaluations et activités prévues. Ces dépenses sont à charge du budget du Membre du Gouvernement qui a la Coopération au Développement dans ses attributions. L'Evaluateur spécial est l'ordonnateur délégué de fonctionnement du service Evaluation spéciale.
Art. 6.Pour l'accomplissement de ses tâches, le service Evaluation spéciale doit se voir garantir l'accès à des informations pertinentes par les différentes instances concernées de l'administration fédérale.
Art. 7.Pour chaque évaluation, le service Evaluation spéciale constitue un comité d'accompagnement composé de représentants des acteurs concernés et d'experts externes indépendants. Ce comité contribue à la qualité, la crédibilité et l'utilité de l'évaluation.
Il donne un avis sur la méthodologie envisagée pour l'évaluation ainsi que sur les constats, les conclusions et les recommandations de l'évaluation. Le cas échéant, il complète ou corrige l'information des évaluateurs. Ses membres contribuent à la diffusion des enseignements de l'évaluation.
A l'issue de l'évaluation, l'évaluateur spécial organise un séminaire, reprenant les résultats et recommandations et mentionnant la réponse de la direction telle que visée à l'article 9. CHAPITRE IV. - Publication des évaluations
Art. 8.Toutes les évaluations du service Evaluation spéciale sont publiées par le service Evaluation spéciale, en même temps que la réponse de la direction de l'instance dont les activités ont été évaluées.
Art. 9.Le service Evaluation spéciale transmet avant le 31 mars de chaque année au Membre du Gouvernement qui a la Coopération au Développement dans ses attributions un rapport sur les activités réalisées pendant l'année écoulée, accompagné d'une synthèse des résultats. Ce Membre du Gouvernement dispose d'un délai d'un mois pour communiquer le rapport et son éventuel commentaire au Parlement.
Le rapport annuel du service Evaluation spéciale résume et analyse la réponse de la direction aux différentes évaluations et assure le suivi de la mise en oeuvre des recommandations des évaluations précédentes. CHAPITRE V. - Evaluation du service Evaluation spéciale
Art. 10.Régulièrement et au moins dans la cinquième année de son mandat, l'Evaluateur spécial organise une évaluation indépendante des activités du service Evaluation spéciale, conformément aux principes applicables pour les Peer Reviews de fonctions d'évaluation, développés par le Comité d'Aide au Développement de l'Organisation pour la Coopération et le Développement économiques.
Art. 11.L'arrêté royal du 17 février 2003 portant création d'un service Evaluation spéciale de la Coopération internationale est abrogé.
Art. 12.Le Ministre qui a les Affaires étrangères dans ses attributions et le Ministre qui a la Coopération au Développement dans ses attributions sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent arrêté.
Bruxelles, le 25 février 2010.
ALBERT Par le Roi : Le Ministre des Affaires étrangères, S. VANACKERE Le Ministre de la Coopération au Développement, Ch. MICHEL
ANNEXE Principes du DAC pour l'évaluation de l'aide au développement (1). ((1) Development Assistance Committee. Principles for evaluation of Development Assistance. OECD 1991 (OECD/GD(91)208).) I. Introduction 1. L'aide au développement est une entreprise menée en coopération par les donneurs et des pays d'accueil qui agissent en partenaires.Les pays du tiers monde ont la responsabilité de leur propre développement et l'aide ne peut être qu'un élément subsidiaire et complémentaire de leurs propres efforts. L'aide soutient des activités dont les pays en développement sont des maîtres d'ouvrage et dont ils assument la responsabilité en dernier ressort. 2. Les résultats des projets dépendent des actions aussi bien des donneurs que des pays d'accueil.Les uns et les autres ont intérêt à ce que les rares fonds publics soient utilisés au mieux et il leur appartient d'y veiller. Les donneurs comme les pays d'accueil doivent donc s'intéresser à l'évaluation en la considérant comme un exercice permettant non seulement de rationaliser l'emploi des ressources consacrées au développement en tirant parti des leçons de l'expérience mais aussi de justifier les activités auprès des autorités politiques et du grand public. 3. Les principes énoncés ci-après sont destinés surtout aux organismes d'aide pour l'évaluation des activités financées par les donneurs.Ils devraient cependant être également utiles aux autorités des pays en développement pour leurs propres travaux d'évaluation concernant les activités financées par l'aide et, de fait, d'autres programmes et projets publics. 4. Les principes sont axés sur l'évaluation d'activités en cours et achevées.Ils viennent compléter d'autres principes précédemment convenus par le CAD pour la gestion de l'aide au développement, notamment les principes pour l'examen préalable des projets adoptés en 1988, les principes pour l'aide-programme et les principes pour la coopération technique. Ces ensembles de principes contiennent tous des recommandations concernant les évaluations auxquelles devraient être soumis les instruments d'aide spécifiques qu'ils visent. Les principes ci-après donnent des indications générales sur le rôle de l'évaluation dans la gestion de l'aide, en faisant ressortir l'importance centrale des aspects suivants : - Les organismes d'aide doivent avoir une politique d'évaluation s'accompagnant de lignes directrices et de méthodes clairement énoncées, et ils devraient préciser le rôle et les tâches de l'évaluation ainsi que la place de cette fonction dans les structures institutionnelles. - La fonction d'évaluation doit être impartiale et être indépendante des mécanismes mis en place pour l'élaboration des politiques d'aide, l'acheminement et la gestion des concours. - L'exercice d'évaluation doit être aussi ouvert que possible et ses résultats doivent être largement diffusés. - Les évaluations ne sont utiles que si elles sont exploitées. Il est donc essentiel que leurs résultats parviennent aussi bien aux décideurs qu'aux agents opérationnels. - Le partenariat avec les pays d'accueil et la coopération entre donneurs revêtent une importance capitale pour l'évaluation : ce sont là des aspects importants de l'édification de l'appareil institutionnel des pays d'accueil et des mécanismes de coordination de l'aide, qui sont susceptibles d'alléger les tâches administratives pesant sur les pays d'accueil. - L'évaluation de l'aide et les éléments connexes qu'elle exige doivent faire partie intégrante des tout premiers travaux de planification. Une activité d'aide ne peut donner lieu à une évaluation objective que si les buts qui lui sont assignés sont identifiés avec précision.
Définition 5. L'évaluation est une fonction qui consiste à porter une appréciation, aussi systématique et objective que possible, sur un projet en cours ou achevé, un programme ou un ensemble de lignes d'action, sa conception, sa mise en oeuvre et ses résultats.Il s'agit de déterminer la pertinence des objectifs et leur degré de réalisation, l'efficience au regard du développement, l'efficacité, l'impact et la viabilité. Une évaluation doit fournir des informations crédibles et utiles, permettant d'intégrer les enseignements tirés aux mécanismes d'élaboration des décisions tant des pays d'accueil que des donneurs.
II. Finalité de l'évaluation 6. Les principaux objectifs de l'évaluation sont les suivants : - améliorer les politiques, programmes et projets des années futures grâce à la prise en compte des enseignements tirés du passé; - fournir des éléments en vue de la justification des actions menées, avec des informations destinées au public. 7. L'évaluation des échecs comme des réussites fournit des informations précieuses qui, si elles sont convenablement prises en compte, sont susceptibles d'améliorer à l'avenir les programmes et projets d'aide.Les fonds destinés au développement sont maigres eu égard aux besoins et les personnes qui, dans les pays donneurs comme dans les pays d'accueil, sont chargées de les gérer devraient pouvoir s'appuyer au maximum sur les enseignements de l'expérience pour en optimiser l'emploi. 8. Dans le contexte de l'évaluation, la justification des actions entreprises est considérée sous l'angle des résultats pour le développement et de l'impact de l'aide au développement.Il s'agit d'une notion différente de l'obligation de justifier l'utilisation des deniers publics, dans un sens comptable et juridique, ces questions étant habituellement du ressort des services de vérification des comptes. Les résultats de l'aide au développement doivent être portés à la connaissance du grand public et des milieux influents tant dans les pays donneurs que dans les pays bénéficiaires. 9. L'une des fonctions importantes de l'évaluation est d'appeler l'attention des décideurs sur les contraintes auxquelles se heurtent les efforts d'aide en raison des imperfections ou des éléments de rigidité des politiques suivies par les donneurs et par les pays bénéficiaires, de l'insuffisance de la coordination et de l'efficacité d'autres pratiques telles que les modes de passations des marchés.10. L'évaluation favorise le dialogue et améliore la coopération entre les pays partenaires du processus de développement grâce au partage de données d'expérience à tous les niveaux. III. Impartialité et indépendance 11. Le processus d'évaluation, de par sa fonction doit être impartial et indépendant des mécanismes mis en place pour l'élaboration des politiques, l'acheminement et la gestion des concours d'aide au développement.12. L'impartialité concourt à la crédibilité des évaluations car elle est un gage de l'objectivité des constatations, des analyses et des conclusions présentées.L'indépendance donne une légitimité à l'évaluation et diminue les risques de conflits d'intérêts qui pourraient se produire si les décideurs et les gestionnaires étaient les seuls à pouvoir porter un jugement sur leurs propres actions. 13. L'impartialité et l'indépendance sont des impératifs qui s'imposent à toutes les étapes du processus d'évaluation : planification du programme d'évaluations, énoncé du mandat des évaluateurs, sélection et approbations des membres de l'équipe d'évaluation.L'indépendance des évaluations peut être encore renforcée lorsque les rapports sont diffusés sous le nom de leur auteur. 14. L'efficacité de l'évaluation dépend de manière cruciale de la structure mise en place pour la gestion du processus.Celle-ci doit permettre de répondre aux trois exigences suivantes : élaborer une politique et un ensemble de lignes directrices en matière d'évaluation; veiller à l'impartialité et à l'indépendance des études; rattacher les constatations de l'évaluation aux activités futures. 15. Il arrive souvent que certains types d'organisation tendent à privilégier telle exigence au détriment des autres.Par exemple, le fait de vouloir assurer l'indépendance du processus risque de nuire à la possibilité d'établir une liaison étroite entre les constatations de l'évaluation et la prise des décisions. Il convient de rechercher la solution optimale en faisant un arbitrage entre toutes les exigences. 16. Le meilleur moyen d'assurer l'impartialité et l'indépendance du processus et de séparer la fonction d'évaluation des services d'exécution responsables de la planification et de la gestion de l'aide au développement.Pour ce faire, on pourrait constituer une cellule centrale d'évaluation rendant directement compte au ministre de la Coopération ou au chef de l'organisme d'aide au développement, ou encore au conseil d'administration ou au conseil des gouverneurs dudit organisme. Dans la mesure où certaines fonctions d'évaluation sont attachées à des services techniques, il faudrait qu'il soit rendu compte des travaux à un niveau suffisamment élevé de la direction ou à un comité de gestion dont dépendent des décisions relatives au programme. Dans ce cas de figure, il faudrait prendre toutes les dispositions voulues pour préserver l'objectivité du processus et de ses résultats. Quelle que soit la démarche retenue, les structures et procédures organisationnelles devraient faciliter l'établissement d'un lien entre les constatations de l'évaluation d'une part et, de l'autre, les décisions concernant la programmation et les grandes orientations des politiques d'aide. 17. Les organismes d'aide doivent mettre au point une politique d'évaluation prenant en compte les questions évoquées ci-dessus et contenant, notamment la communication des résultats. IV. Crédibilité 18. La crédibilité de l'évaluation dépend des compétences professionnelles et de l'indépendance des évaluateurs ainsi que du degré de transparence du processus.Pour être crédible, l'évaluation doit porter aussi bien sur les cas de réussite que sur les cas d'échec. En règle générale, les pays d'accueil devraient participer pleinement à l'évaluation car l'exercice gagnerait en crédibilité et susciterait un engagement plus fort. 19. Les organismes d'aide doivent avoir une masse critique d'évaluateurs professionnels de manière à disposer d'un éventail suffisamment large de compétences pour couvrir leurs divers domaines d'activité et à assurer la crédibilité du processus.20. La transparence de l'exercice d'évaluation est un aspect décisif de sa crédibilité et de sa légitimité.Pour qu'il y ait transparence, il faut : - que le processus d'évaluation pris dans son ensemble soit aussi ouvert que possible et que ses résultats soient largement communiqués; - que les rapports d'évaluation fassent apparaître séparément les résultats et les recommandations. Les éléments d'information à l'appui des constatations devraient être cités de manière à ne pas compromettre les sources.
V. Utilité 21. Pour que les résultats des évaluations pèsent véritablement sur la prise des décisions, ils doivent être perçus comme pertinents et utiles, et ils doivent être présentés de manière claire et concise. Ils doivent refléter les intérêts et besoins différents des multiples parties prenantes à la coopération pour le développement. La commodité d'accès est également un aspect crucial de l'utilité. Le processus d'évaluation est en soi un moyen de clarifier les objectifs, d'améliorer la communication, d'enrichir les connaissances et de préparer la voie aux actions ultérieures. 22. Les études d'évaluation doivent intervenir à point nommé, c'est-à-dire qu'elles doivent être disponibles au moment où des décisions sont à prendre.Cette remarque donne à penser que l'évaluation a un rôle important à jouer tout au long des diverses étapes de l'exécution d'un projet ou programme et qu'elle ne doit pas être conduite uniquement en tant qu'exercice rétrospectif. C'est aux agents des services opérationnels qu'il appartient de suivre le déroulement des activités en cours. Les dispositions prises pour faire intervenir des évaluateurs indépendants permettent de compléter utilement le suivi régulier des opérations.
VI. Participation des donneurs et des pays d'accueil 23. Conformément au principe de partenariat mis en relief ci-dessus, il faut, chaque fois que cela est possible, que les donneurs et les pays d'accueil participent au processus d'évaluation.Les résultats des exercices intéressant les deux parties, les mandats des évaluations doivent prendre en compte les préoccupations de chacun des partenaires; les études doivent refléter leurs points de vue respectifs quant à l'efficacité et l'impact des activités en cause. Le principe d'impartialité et d'indépendance en cours d'évaluation doit s'appliquer tout autant aux bénéficiaires qu'aux donneurs. La participation et l'impartialité concourent à la qualité de l'évaluation, ce qui a des conséquences importantes pour la viabilité à long terme étant donné que les pays d'accueil deviennent les seuls responsables du projet après le départ du donneur. 24. Chaque fois que les circonstances s'y prêtent, les opinions et connaissances spéciales des groupes touchés doivent faire partie intégrante des données de l'évaluation.25. La participation de toutes les parties concernées est une occasion d'apprentissage pragmatique et contribue à renforcer les qualifications et capacités des pays d'accueil, objectif important qu'il conviendrait également de poursuivre grâce à des actions de formation et à d'autres formes d'appui au développement des institutions et des capacités de gestion. VII. Coopération entre donneurs 26. Il est essentiel que les donneurs collaborent de manière à enrichir mutuellement leurs connaissances et éviter les doubles emplois.Il convient d'encourager les donneurs à collaborer afin de mettre au point des méthodes d'évaluation, de partager leurs rapports et informations, et d'améliorer l'accès aux résultats des études d'évaluation. Les donneurs devraient s'attacher à faire des évaluations conjointes qui offrent le double avantage de favoriser une meilleure compréhension mutuelle des procédures et approches utilisées par les différents organismes d'aide et d'alléger le fardeau administratif pesant sur le pays d'accueil. Les donneurs devraient échanger leurs plans d'évaluations, de manière systématique et bien avant la date d'exécution, afin de faciliter la planification des exercices conjoints.
VIII. Programmation des évaluations 27. Les organismes d'aide doivent établir un plan général pour l'évaluation de leurs activités d'aide au développement.A cette fin, ils devraient regrouper les diverses activités à évaluer en catégories appropriées. Ils fixeraient ensuite un ordre de priorité pour l'évaluation des différentes catégories et établiraient un calendrier en conséquence. 28. Ces catégories doivent représenter les divers domaines couverts par les activités d'aide au développement.Les évaluations les plus fréquentes seront probablement celles qui porteront sur des projets ou des activités visant l'appareil institutionnel mais il y a peu de chances qu'elles puissent à elles seules satisfaire à la totalité des besoins d'évaluation en raison de la spécificité de leurs résultats.
La programmation des évaluations doit tenir compte des demandes particulières de la haute direction et des décideurs, et des études faisant la synthèse des enseignements tirés doivent être prévues. 29. Les moyens consacrés à l'évaluation doivent permettre de réaliser un large éventail d'études portant sur les grandes lignes d'action, les activités réalisées au titre des programmes et projets, ainsi que sur des secteurs, des thèmes et des questions recoupant plusieurs domaines.Les procédures et méthodes de gestion de l'organisme d'aide doivent également faire l'objet d'évaluations. 30. Pour des raisons administratives et financières, il est indispensable de fixer l'ordre de priorité des études.Un calendrier d'exécution doit figurer dans le plan des évaluations. Les utilisateurs des résultats devraient prendre part aux décisions touchant l'organisation et le calendrier des activités d'évaluation, pour que leurs besoins puissent être pris en compte. Le plan des activités d'évaluation doit recevoir l'appui et l'approbation de la haute direction. 31. Les organismes d'aide qui ne l'ont pas encore fait devraient établir des lignes directrices et/ou des plans-types pour les évaluations.Ces documents doivent donner des indications générales et définir les normes minimales à respecter pour la réalisation des études et l'établissement des rapports.
IX. Conception et mise en oeuvre des évaluations 32. Il faut planifier chaque évaluation et en établir le mandat de manière à : i.définir l'objet et la portée de l'évaluation, avec notamment l'indication des personnes auxquelles sont destinés les résultats; ii. décrire les méthodes à employer durant l'évaluation; iii. recenser les normes par références auxquelles les performances des projets/programmes seront évaluées; iv. déterminer les ressources à mobiliser et le temps requis pour mener l'exercice à son terme. 33. L'objet de l'évaluation doit être expliqué, c'est-à-dire qu'il faut préciser s'il s'agit d'améliorer les politiques, procédures et techniques, ou de déterminer s'il y a lieu soit de poursuivre, soit d'interrompre des activités spécifiques en cours.34. Une évaluation doit définir l'activité qui en est l'objet - par exemple projets, institutions, secteurs ou programmes - et donner des renseignements sur, par exemple, les origines, les objectifs, les activités, les dépenses, l'impact et les effets escomptés.35. Il faut absolument déterminer les questions qui seront traitées dans l'étude, ce que l'on appelle souvent les "thèmes de l'évaluation".Ces thèmes traceront un cadre commode pour la conduite de l'exercice et seront les fondements d'un énoncé clair d'un ensemble de conclusions et de recommandations. Ces thèmes peuvent être regroupés sous les grandes rubriques suivantes : - Raison d'être. La mise en oeuvre se justifie-t-elle ? Les objectifs poursuivis sont-ils pertinents et réalistes ? Y aurait-il lieu d'envisager de les remplacer par d'autres ? - Réalisation des objectifs. Il est très difficile de faire une évaluation si les objectifs du projet/programme évalué n'ont pas été clairement posés et si la collecte de données de base pertinentes n'a pas été prévue dans l'accord de projet, dans le plan d'opérations ou dans des dispositions spéciales. Dans quelle mesure les objectifs initiaux ont-ils été atteints ? ou ont-ils des chances de l'être ? Quels ont été les principaux facteurs ayant pesé sur la réalisation ou la non-réalisation des objectifs ? Dans l'hypothèse où les objectifs n'ont pas été énoncés en termes suffisamment précis pour qu'il soit possible d'en évaluer le degré de réalisation, il faudrait néanmoins s'employer à apprécier l'impact et les effets des activités réalisées. - Impact et effets. Que s'est-il passé à la suite du projet/programme ? Il s'agit non seulement des résultats directs mais aussi, ce qui est extrêmement important, de l'impact et des effets essentiels exercés par l'activité sur des indicateurs sociaux, économiques, environnementaux et autres. L'examen devrait porter à la fois sur les résultats attendus et involontaires, et il doit également expliciter l'impact négatif et positif exercé par des facteurs extérieurs tels que des changements intervenus dans les grands axes fondamentaux de l'action publique, dans les circonstances économiques et financières générales. 36. Le fait de poser ces questions répond au souci de veiller à ce que l'évaluateur soit à même de porter un jugement sur l'information et de formuler des conclusions et recommandations concernant les points suivants : - Résultats globaux.Quel a été le degré de réussite de l'action ? Pour quelles raisons ? L'impact et les effets observés justifient-ils les coûts ? Les objectifs ont-ils été atteints dans les délais prévus et dans les limites du budget fixé ? Y a-t-il eu des insuffisances majeures ? A-t-on enregistré des réalisations particulièrement notables ? - Viabilité. La question de la viabilité à long terme des résultats acquis est d'une importance fondamentale. - Solutions-variantes. Existe-t-il de meilleurs moyens d'atteindre les résultats ? - Enseignements tirés. Quels sont les enseignements généraux que l'on peut tirer et que l'on aurait intérêt à garder présents à l'esprit pour le lancement d'autres programmes à l'avenir ? 37. Durant cette phase, il faut aussi définir les méthodes et les techniques à appliquer pour traiter les thèmes retenus.Etant donné la nature de l'aide au développement, il est permis de penser que, dans la plupart des cas, il faudra combiner des techniques quantitatives et qualitatives. En règle générale, les méthodes utilisées pour l'examen préalable d'une activité devraient être également appliquées pour l'évaluation ex post. 38. Dans bien des cas, il est difficile d'imputer clairement la responsabilité de l'issue de l'activité étant donné que des raisons extérieures peuvent avoir joué ou non un rôle décisif sans qu'il soit possible de les isoler d'un point de vue méthodologique.Il est certain que le processus d'évaluation est complexe mais il faut néanmoins essayer de déceler les relations de cause à effet.
X. Etablissement des rapports, communication des résultats et rétroaction de l'information 39. Les rapports d'évaluation doivent être rédigés dans un style clair, éviter le plus possible le jargon technique et comporter les éléments suivants : un résumé analytique, un profil de l'activité évaluée;une description des méthodes d'évaluation utilisées; les principales constatations; les enseignements tirés; les conclusions et recommandations (qui peuvent être présentées séparément du corps du rapport). 40. Les constatations et conclusions de l'évaluation sont les réponses aux questions posées et retenues aux fins de l'exercice.Les enseignements tirés et les recommandations établissent le lien entre les résultats de l'évaluation et la mise au point des grandes lignes d'action et des programmes pour les années futures. 41. Les résultats doivent être communiqués de manière systématique, condition indispensable pour améliorer la planification et la mise en oeuvre des activités d'aide au développement.Ils peuvent être présentés non seulement dans le rapport d'évaluation proprement dit mais ailleurs aussi : rapports annuels faisant une synthèse des constatations, ou condensés/sommaires donnant une synopsis des résultats. 42. La rétroaction est une composante essentielle du processus d'évaluation dans la mesure où elle crée un lien entre les activités passées et futures.Pour veiller à ce que les résultats des évaluations soient exploités aux fins de la mise au point des grandes lignes d'action et programmes futurs, il faut absolument mettre en place des mécanismes de rétroaction faisant intervenir toutes les parties concernées. Cela appelle des mesures telles que la constitution de commissions d'évaluation, l'organisation de séminaires et d'ateliers, la création de systèmes automatisés, l'adoption de procédures pour l'élaboration des rapports et les actions de suivi.
Des moyens informels peuvent consister à établir des réseaux et des lignes de communication internes pour la diffusion des idées et de l'information. Pour être effectifs, les mécanismes de rétroaction doivent être doté des moyens humains et financiers nécessaires et recevoir l'appui de la haute direction comme des autres acteurs. 43. La communication de l'information et sa rétroaction doivent constituer des aspects dynamiques et continus faisant partie intégrante du processus d'évaluation. XI. Application des principes et suivi 44. Les Membres du CAD conviennent : i.de revoir leurs politiques et procédures d'évaluation en vue de les adapter, si besoin est, aux principes énoncés ci-dessus; ii. de revoir leurs politiques et procédures d'évaluation dans le cadre des examens de l'aide et d'autres travaux pertinents du CAD; iii. d'appeler l'attention de leurs partenaires du monde en développement sur les principes qui devraient être considérés comme un code de bonnes pratiques d'évaluation à appliquer chaque fois que cela est possible.
Vu pour être annexé à notre arrêté du 25 février 2010.
ALBERT Par le Roi : Le Ministre des Affaires étrangères, S. VANACKERE Le Ministre de la Coopération au Développement, Ch. MICHEL