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Arrêt
publié le 01 mars 2024

Extrait de l'arrêt n° 58/2023 du 30 mars 2023 Numéro du rôle : 7791 En cause : les questions préjudicielles relatives aux articles 286 et 288 du décret flamand du 22 décembre 2017 « sur l'administration locale », posées par le Tribunal de pre La Cour constitutionnelle, composée des présidents L. Lavrysen et P. Nihoul, et des juges T. Gie(...)

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Extrait de l'arrêt n° 58/2023 du 30 mars 2023 Numéro du rôle : 7791 En cause : les questions préjudicielles relatives aux articles 286 et 288 du décret flamand du 22 décembre 2017 « sur l'administration locale », posées par le Tribunal de première instance néerlandophone de Bruxelles.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents L. Lavrysen et P. Nihoul, et des juges T. Giet, J. Moerman, M. Pâques, D. Pieters et E. Bribosia, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président L. Lavrysen, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles et procédure Par jugement du 8 avril 2022, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 20 avril 2022, le Tribunal de première instance néerlandophone de Bruxelles a posé les questions préjudicielles suivantes : « 1° Les articles 286 et 288 du décret sur l'administration locale, dans l'interprétation selon laquelle il pourrait être déduit de ces dispositions que le seul mode de preuve admissible pour la publication d'un règlement communal est la mention dans le registre spécial tenu par le directeur général, violent-ils les articles 10, 11, 33, 170, 172 et 191 de la Constitution, lus en combinaison avec les articles 105, 108, 159, 162 et 190 de la Constitution et avec les principes de la légalité et de la sécurité juridique, en ce qu'ils privent tant l'autorité communale, en sa qualité d'auteur d'un tel règlement, que toutes les personnes susceptibles d'être soumises à un tel règlement de la garantie consistant en l'intervention d'une assemblée législative délibérante, à savoir le législateur visé à l'article 190 de la Constitution, pour déterminer la preuve de cette publication et, partant, pour déterminer un élément essentiel relatif au caractère obligatoire des lois, arrêtés et règlements et, dans le cas d'un règlement fiscal communal, relatif à la qualité de contribuable, alors que les auteurs des autres types de normes (lois, arrêtés ou règlements d'administration générale ou provinciale), visés à l'article 190 de la Constitution, et toutes les personnes susceptibles d'être soumises à de telles normes ne sont pas privés de cette garantie ? 2° Les articles 286 et 288 du décret sur l'administration locale, dans l'interprétation selon laquelle la mention dans le registre des publications prévue par le second alinéa de l'article 288 du décret sur l'administration locale constitue le seul mode de preuve admissible pour la publication d'un règlement fiscal communal (et que cette preuve ne peut donc être produite d'aucune autre manière, par exemple par une preuve informatique), violent-ils les articles 10, 11 et 170 de la Constitution, lus en combinaison avec son article 190, en ce que, contrairement à ce qui est le cas pour les normes législatives et les actes administratifs réglementaires adoptés par d'autres autorités, le fait que les règlements communaux aient force obligatoire ne dépend pas seulement de leur publication (en l'espèce, sur le site internet), mais aussi de la mention de cette publication dans le registre des publications des règlements et ordonnances des autorités communales ? ». (...) III. En droit (...) Quant aux dispositions en cause et à leur contexte B.1. Les questions préjudicielles portent sur la publication officielle des règlements et ordonnances communaux, en particulier des règlements-taxes. Cette matière a été transférée aux régions par la loi spéciale du 13 juillet 2001 portant transfert de diverses compétences aux régions et communautés. L'affaire concerne la législation applicable à la Région flamande. Par ses arrêts nos 164/2022 (ECLI:BE:GHCC:2022:ARR.164) et 165/2022 (ECLI:BE:GHCC:2022:ARR.165) du 15 décembre 2022, la Cour s'est prononcée dans des affaires analogues sur la législation applicable à la Région de Bruxelles-Capitale et à la Région wallonne.

B.2. Les articles 286 et 288 du décret flamand du 22 décembre 2017 « sur l'administration locale » (ci-après : le décret du 22 décembre 2017) règlent le mode de publication et l'entrée en vigueur des règlements et ordonnances communaux en Région flamande : « Art.286. § 1er. Le bourgmestre publie les arrêtés suivants ainsi que leur contenu sur l'application web de la commune : 1° les règlements et ordonnances du conseil communal, du collège des bourgmestre et échevins et du bourgmestre; [...]

Art. 288.Sauf disposition contraire, les règlements et ordonnances visés à l'article 286, § 1er, 1° et 2°, ainsi que les règlements visés à l'article 286, § 2, 1° e 2°, entrent en vigueur le cinquième jour qui suit leur publication.

La publication et la date de publication des règlements et ordonnances visés à l'alinéa premier doivent être attestées par une mention dans un registre tenu conformément à la manière prévue par le Gouvernement flamand ».

B.3.1. Il appartient en règle à la juridiction a quo d'interpréter les dispositions qu'elle applique, sous réserve d'une lecture manifestement erronée des dispositions en cause.

B.3.2. La juridiction a quo interprète l'article 288, alinéa 2, du décret du 22 décembre 2017 en ce sens que le seul mode de preuve admissible de la publication des règlements ou ordonnances communaux est l'annotation dans le registre spécialement tenu à cet effet. Pour ce faire, elle se fonde sur la jurisprudence de la Cour de cassation qui a jugé en ce sens au sujet des anciennes règles flamandes et des règles wallonnes (Cass., 10 octobre 2019, C.18.0384.N, ECLI:BE:CASS:2019:CONC.20191010.9; 8 novembre 2018, C.17.0604.F, ECLI:BE:CASS:2018:CONC.20181108.10; 21 mai 2015, F.14.0098.F, ECLI:BE:CASS:2015:ARR.20150521.15; 21 mai 2015, F.13.0158.F, ECLI:BE:CASS:2015:ARR.20150521.14).

B.3.3. Cette interprétation est contestée par la commune de Ternat, partie défenderesse dans l'affaire au fond. La jurisprudence précitée de la Cour de cassation ne serait plus applicable en Région flamande, du fait que les ordonnances et règlements communaux sont, depuis le 1er janvier 2014, publiés sur le site internet de la commune (article 286 du décret du 22 décembre 2017). Il s'ensuivrait qu'outre l'annotation dans le registre spécial, la preuve de la publication peut également être produite par voie électronique.

B.3.4. La juridiction a quo estime que la jurisprudence précitée de la Cour de cassation est toujours applicable, puisque le régime probatoire spécial pour la publication des ordonnances et règlements communaux est demeuré inchangé (article 288, alinéa 2, du décret du 22 décembre 2017). La Cour examine la disposition en cause dans l'interprétation qu'en donne la juridiction a quo, laquelle n'est pas manifestement erronée.

Quant à la première question préjudicielle B.4. Par la première question préjudicielle, la juridiction a quo souhaite savoir si les articles 286 et 288 du décret du 22 décembre 2017 sont compatibles avec les articles 10, 11, 33, 170, 172 et 191 de la Constitution, lus en combinaison avec les articles 105, 108, 159, 162 et 190 de la Constitution et avec le principe de la légalité et de la sécurité juridique, en ce qu'ils priveraient l'autorité communale et les personnes qui peuvent être soumises à un règlement communal de la garantie consistant en l'intervention d'une assemblée législative délibérante pour déterminer la preuve de cette publication, alors que cette garantie n'est pas refusée aux auteurs de lois, d'arrêtés et de règlements d'administration générale ou provinciale ou aux personnes susceptibles d'être soumises à ces normes.

Il ressort de la décision de renvoi que, par cette question, la juridiction a quo interroge en substance la Cour sur la compatibilité de l'article 288, alinéa 2, du décret du 22 décembre 2017 avec les articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec l'article 190 de la Constitution, en ce qu'il habilite le Gouvernement flamand à déterminer les formalités de l'annotation dans le registre spécialement tenu à cet effet, dans l'interprétation selon laquelle celle-ci est le seul mode de preuve admissible de la publication d'une ordonnance communale ou d'un règlement communal.

B.5.1. L'article 190 de la Constitution dispose : « Aucune loi, aucun arrêté ou règlement d'administration générale, provinciale ou communale, n'est obligatoire qu'après avoir été publié dans la forme déterminée par la loi. ».

B.5.2. La publication des ordonnances et règlements communaux sur le site internet de la commune vise à donner exécution au droit, pour les justiciables, garanti par l'article 190 de la Constitution, de pouvoir prendre connaissance à tout moment de ces textes officiels avant que ceux-ci leur soient opposables. En outre, ce droit est inhérent à l'état de droit puisque c'est cette connaissance qui permet à chacun de s'y conformer.

L'annotation datée et signée de la publication dans un registre vise à attester avec certitude la publication du règlement.

B.6. Au sujet de la manière dont le registre des ordonnances et règlements de l'administration locale est tenu, l'arrêté du Gouvernement flamand du 20 avril 2018 « relatif à la publication et les possibilités de consultation d'arrêtés et de pièces de l'administration locale, concernant la manière dont les règlements et ordonnances de l'administration locale sont tenus au registre et concernant les possibilités de consultation des arrêtés des zones policières et des zones de secours » (ci-après : l'arrêté du 20 avril 2018) dispose : « Art.3. Dans un registre spécialement tenu à cet effet, le directeur général note la publication et la date de publication des règlements ou ordonnances de la commune et du centre public d'action sociale, visés à l'article 286, § 1er, 1° et 2°, et § 2, 1° et 2°, et l'article 553 du décret du 22 décembre 2017 sur l'administration locale. Cette annotation se fait le jour de la publication du règlement ou de l'ordonnance. Les annotations sont numérotées dans l'ordre des publications consécutives. [...]

Art. 4.Le bourgmestre et le directeur général datent et signent l'annotation des règlements et ordonnances de la commune, visés à l'article 286, § 1er, 1° et 2°, et l'article 553 du décret du 22 décembre 2017 sur l'administration locale.

Le président du bureau permanent et le directeur général datent et signent l'annotation des règlements du centre public d'action sociale, visés à l'article 286, § 2, 1° et 2°, du décret précité. [...] L'annotation, visée aux alinéas 1er à 3 inclus, mentionne au moins : 1° l'organe ayant pris le règlement ou l'ordonnance, en particulier le conseil communal, le collège des bourgmestre et échevins, le bourgmestre, le conseil de l'aide sociale, le bureau permanent, le conseil de district, le collège de district ou le bourgmestre de district;2° la date du règlement ou de l'ordonnance;3° l'objet du règlement ou de l'ordonnance;4° la date de publication du règlement ou de l'ordonnance ». B.7.1. La SA « Proximus », partie demanderesse dans l'affaire au fond, fait valoir que la question préjudicielle n'appelle pas de réponse, étant donné qu'elle concernerait en réalité l'arrêté du 20 avril 2018 et la jurisprudence de la Cour de cassation citée en B.3.2.

B.7.2. La Cour n'est pas compétente pour répondre à une question préjudicielle relative à un arrêté qui n'est pas une norme législative. Elle ne peut pas non plus se prononcer sur les divergences d'interprétation d'un arrêté qui résultent des applications jurisprudentielles de ce dernier. Enfin, la Cour n'est pas compétente pour connaître des modalités d'exécution d'une norme législative.

B.7.3. En vertu de l'article 288, alinéa 2, du décret du 22 décembre 2017, le Gouvernement flamand détermine la forme de l'annotation dans le registre dans lequel le fait et la date de la publication des règlements et ordonnances communaux sont constatés. Cette disposition confère donc une habilitation au Gouvernement flamand, en prévoyant toutefois déjà l'existence du registre et que le fait et la date de la publication des règlements et ordonnances communaux doivent être constatés par une annotation.

B.7.4. Comme il est dit en B.4, la juridiction a quo interroge en substance la Cour sur la compatibilité de la disposition en cause en ce qu'elle habilite le Gouvernement flamand à fixer des formalités pour l'annotation dans un registre spécialement tenu à cet effet, dans l'interprétation selon laquelle ce registre est le seul mode de preuve admissible de la publication d'une ordonnance ou d'un règlement communal. La question préjudicielle porte donc effectivement sur la disposition en cause.

B.7.5. L'exception est rejetée.

B.8. Interprété comme faisant de l'annotation dans le registre le seul mode de preuve de la publication d'une ordonnance ou d'un règlement communal, l'article 288, alinéa 2, du décret du 22 décembre 2017 n'a pas pour objectif l'organisation et le mode de fonctionnement de l'administration mais vise à protéger l'administré, et donc le redevable dans le cadre d'un règlement-taxe. Ceci est de nature à renforcer l'objectif général visé par l'article 190 de la Constitution (voy. arrêt n° 165/2022, B.15).

B.9. En vue de protéger l'administré et donc le redevable dans le cadre d'un règlement-taxe, le législateur décrétal a pu estimer qu'il était pertinent d'organiser un régime probatoire unique et exclusif, qui ne souffre d'aucune ambiguïté, à savoir la production d'une annotation dans un registre spécifique.

B.10. En outre, la Cour n'aperçoit aucune difficulté d'ordre pratique qui rendrait ce régime de preuve disproportionné à l'objectif poursuivi. Il en va d'autant plus ainsi que la preuve de la publication d'une norme ne se confond pas avec la validité de celle-ci (voy. arrêt n° 165/2022, B.17). Par ailleurs, le registre peut être tenu sous format papier ou sous format numérique, selon le choix de la commune, tant qu'il contient les mentions obligatoires.

B.11. Enfin, la simple circonstance que certaines juridictions ont pu considérer que d'autres moyens de preuve n'étaient en réalité pas exclus par les dispositions en cause n'entraîne pas ipso facto l'inconstitutionnalité de celles-ci. En effet, la Cour les examine dans l'interprétation de la juridiction a quo mentionnée en B.3.2.

B.12. En ce qu'elles font de l'annotation dans le registre le seul mode de preuve de la publication d'un règlement communal, les dispositions en cause ne sont pas incompatibles avec les articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec l'article 190 de la Constitution.

B.13. En tant qu'elles ont trait à la publication des normes au sens large, les dispositions en cause portent sur une matière que l'article 190 de la Constitution réserve au législateur. Cette disposition constitutionnelle n'empêche toutefois pas que la forme de la publication fasse l'objet d'une habilitation au pouvoir exécutif, pour autant que celle-ci soit décrite de manière suffisamment précise et porte sur l'exécution de mesures dont les éléments essentiels ont été préalablement établis par le pouvoir législatif (voy. arrêt n° 165/2022, B.20).

B.14. En l'espèce, aux termes de l'article 288, alinéa 2, du décret du 22 décembre 2017, l'habilitation ne porte pas sur le mode de publication sur le site internet de la commune en tant que tel, mais sur la manière dont la preuve de cette publication doit être apportée.

B.15. Etant donné que le législateur décrétal a prévu que le mode de publication doit être la mise en ligne sur le site internet de la commune et que la preuve de celle-ci doit être apportée au moyen d'une annotation dans un registre spécialement tenu à cet effet, il a réglé lui-même les éléments essentiels de la forme de la publication. La délégation ne porte que sur la forme de l'annotation dans le registre (voy. arrêt n° 165/2022, B.22).

B.16. La forme de l'annotation dans le registre n'emporte aucune conséquence sur la régularité d'une norme communale publiée sur le site internet de la commune. En ce qui concerne l'inopposabilité éventuelle du règlement dont la publication n'a pas été constatée dans le respect des dispositions prises en vertu de l'habilitation à l'exécutif, elle doit être considérée comme une conséquence de l'absence de preuve de la publication et ne doit pas être confondue avec la nullité de l'acte. De plus, cette inopposabilité découle principalement des dispositions en cause, qui consacrent l'annotation comme seul mode de preuve de la publication des règlements et ordonnances communaux, et non de l'habilitation ou des dispositions réglementaires. Or, pour les motifs mentionnés en B.8 à B.12, cette exclusivité probatoire n'est pas incompatible avec la Constitution.

Dès lors, l'habilitation conférée au pouvoir exécutif n'emporte pas d'effets manifestement disproportionnés (voy. arrêt n° 165/2022, B.23).

B.17. Il découle de ce qui précède que le législateur décrétal a déterminé les éléments essentiels des mesures dont l'exécution est confiée au pouvoir exécutif et que, partant, cette habilitation n'est pas contraire au principe de légalité contenu dans l'article 190 de la Constitution.

B.18. La Cour est également interrogée sur la compatibilité de l'habilitation contenue dans l'article 288, alinéa 2, du décret du 22 décembre 2017, lorsqu'elle vise les règlements-taxes communaux, avec les articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec l'article 170 de la Constitution.

B.19. L'article 170, § 4, de la Constitution, dispose : « Aucune charge, aucune imposition ne peut être établie par l'agglomération, par la fédération de communes et par la commune que par une décision de leur conseil.

La loi détermine, relativement aux impositions visées à l'alinéa 1er, les exceptions dont la nécessité est démontrée ».

B.20. En vertu de cette disposition, lue en combinaison avec les articles 41 et 162 de la Constitution, l'établissement d'un impôt communal est une matière d'intérêt communal qu'il revient au conseil communal de régler.

Cette compétence du conseil communal implique qu'il détermine les éléments essentiels de l'impôt, dont font partie la désignation des contribuables, la matière imposable, la base d'imposition, le taux d'imposition et les éventuelles exonérations d'impôt.

B.21. L'habilitation contenue dans les dispositions en cause ne permet aucunement qu'un règlement-taxe communal soit adopté par une autorité autre que le conseil communal (voy. arrêt n° 165/2022, B.28).

B.22. Au surplus, la forme de l'annotation dans le registre de la publication des règlements-taxes communaux, même si elle peut avoir des effets sur la preuve de la publication et l'opposabilité desdits règlements, ne fait pas partie des éléments essentiels de l'impôt mentionnés en B.20 (voy. arrêt n° 165/2022, B.29).

B.23. Dès lors, les dispositions en cause sont compatibles avec l'article 170, § 4, de la Constitution.

B.24. L'examen des dispositions en cause au regard des articles 33, 105, 108, 159, 162, 172 et 191 de la Constitution, au sujet desquels ni la juridiction a quo ni les parties n'exposent en quoi ils seraient violés, ne conduit pas à une autre conclusion.

Quant à la seconde question préjudicielle B.25. Par la seconde question préjudicielle, la juridiction a quo souhaite savoir si les articles 286 et 288 du décret du 22 décembre 2017, interprétés en ce sens que l'annotation dans le registre spécialement tenu à cet effet est le seul mode de preuve admissible de la publication d'un règlement-taxe communal sont compatibles avec les articles 10, 11 et 170 de la Constitution, lus en combinaison avec l'article 190 de la Constitution, en ce que la force obligatoire de règlements communaux dépend non seulement de leur publication, mais également de la mention de la publication dans le registre spécialement tenu à cet effet, alors que cette condition ne s'applique pas aux normes adoptées par d'autres autorités.

B.26.1. La question préjudicielle part du postulat qu'une norme communale acquiert sa force obligatoire par la conjonction de deux conditions, à savoir la publication proprement dite et l'annotation, alors que les autres normes, dont la publication a lieu dans un journal officiel, ne supposent aucune autre formalité.

La question préjudicielle contient donc les éléments nécessaires permettant à la Cour de statuer. L'exception du Gouvernement flamand sur ce point est rejetée.

B.26.2. Aux termes des articles 286 et 288 du décret du 22 décembre 2017, les règlements et ordonnances communaux acquièrent leur force obligatoire exclusivement par le biais de la publication sur le site internet de la commune, à savoir le cinquième jour qui suit le jour de leur publication, sauf disposition contraire. Aucune autre condition n'est requise.

L'annotation dans le registre spécialement tenu à cet effet constitue le mode de preuve de cette publication, notamment devant un tribunal.

Selon la jurisprudence de la Cour de cassation, le non-respect des règles relatives à la forme de l'annotation dans le registre entraîne l'absence de preuve de la publication et, par conséquent, l'inopposabilité du règlement communal (Cass., 10 octobre 2019, C.18.0384.N, ECLI:BE:CASS:2019:ARR.20191010.9; 21 mai 2015, F.14.0098.F, ECLI:BE:CASS:2015:CONC.20150521.15; 21 mai 2015, F.13.0158.F, ECLI:BE:CASS:2015:CONC.20150521.14).

La publication dans un journal officiel est, de la même façon, la seule condition de la force obligatoire des normes publiées par ce biais. La seule circonstance que la preuve de l'existence de la publication au journal officiel est plus aisée à apporter ne signifie pas que ce type de publication n'est soumise à aucun régime probatoire.

B.26.3. En ce qu'elle considère que la force obligatoire des règlements et ordonnances communaux en Région flamande dépend d'une double condition de publication et d'annotation, la question préjudicielle part d'une prémisse erronée. La différence de traitement qui y est décrite est dès lors inexistante.

B.27. La seconde question préjudicielle n'appelle pas de réponse.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : 1. Les articles 286 et 288 du décret flamand du 22 décembre 2017 « sur l'administration locale » ne violent pas les articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec les articles 170 et 190 de la Constitution.2. La seconde question préjudicielle n'appelle pas de réponse. Ainsi rendu en langue néerlandaise et en langue française, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 30 mars 2023.

Le greffier, Le président, P.-Y. Dutilleux L. Lavrysen

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