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Arrêt
publié le 12 juillet 2023

Extrait de l'arrêt n° 165/2022 du 15 décembre 2022 Numéros du rôle : 7576 et 7610 En cause : les questions préjudicielles relatives aux articles 112 et 114 de la Nouvelle loi communale et aux articles L1133-1 et(...) La Cour constitutionnelle, composée des présidents P. Nihoul et L. Lavrysen, et des juges T. Gie(...)

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Extrait de l'arrêt n° 165/2022 du 15 décembre 2022 Numéros du rôle : 7576 et 7610 En cause : les questions préjudicielles relatives aux articles 112 et 114 de la Nouvelle loi communale (Région de Bruxelles-Capitale) et aux articles L1133-1 et L1133-2 du Code wallon de la démocratie locale et de la décentralisation, posées respectivement par le Tribunal de première instance francophone de Bruxelles et par le Tribunal de première instance du Luxembourg, division de Marche-en-Famenne.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents P. Nihoul et L. Lavrysen, et des juges T. Giet, J. Moerman, M. Pâques, Y. Kherbache, T. Detienne, D. Pieters, S. de Bethune, E. Bribosia, W. Verrijdt et K. Jadin, assistée du greffier F. Meersschaut, présidée par le président P. Nihoul, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles et procédure a. Par jugement du 28 avril 2021, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 17 mai 2021, le Tribunal de première instance francophone de Bruxelles a posé les questions préjudicielles suivantes : « - Dans l'interprétation suivant laquelle il se déduirait des articles 112 et 114 de la nouvelle loi communale que le seul mode de preuve admissible de la publication d'un règlement communal est l'annotation dans le registre spécial tenu par le secrétaire communal et suivant laquelle les articles 112 et 114 de la nouvelle loi communale auraient habilité le Roi à prévoir que, pour valoir preuve de la publication d'un règlement communal, l'annotation dans un registre spécialement tenu à l'effet de constater le fait et la date de la publication des règlements et ordonnances communaux par la voie de l'affichage doit être faite le premier jour de l'affichage, ou à prévoir, au sujet de ce registre et de cette annotation, des règles de forme, portant entre autres sur le moment de l'annotation, prescrites à peine de nullité de la publication elle-même ou à peine de nullité ou d'inopposabilité du règlement, ces dispositions violent-elles les articles 10, 11, 33, 170, 172 et 191 de la Constitution, combinés avec les articles 105, 108, 159, 162 et 190 de la Constitution et avec les principes de légalité et de sécurité juridique, en ce qu'elles privent tant l'autorité communale en qualité d'auteur d'un tel règlement que l'ensemble des personnes susceptibles d'être soumises à un tel règlement, en ce comprise l'autorité communale elle-même, de la garantie de l'intervention d'une assemblée législative délibérante, à savoir le législateur comme le prévoit l'article 190 de la Constitution, dans la détermination des éléments essentiels touchant à la publication des lois, arrêtés et règlements et à la forme de leur publication, en ce comprise la preuve de cette publication, et, partant, dans la détermination d'un élément essentiel touchant au caractère obligatoire des lois, arrêtés et règlements et, dans le cas d'un règlement-taxe communal, à la qualité de redevable de la taxe, alors que les auteurs des autres types de normes (lois, arrêtés ou règlements d'administration générale ou provinciale), visés par l'article 190 de la Constitution, et l'ensemble des personnes susceptibles d'être soumises à de telles normes, ne sont pas privés de cette garantie ? - Interprétés dans le même sens, les articles 112 et 114 de la nouvelle loi communale violent-ils les articles 10, 11, 170 et 172 de la Constitution, combinés avec le principe de proportionnalité, en ce qu'ils imposent une différence de traitement injustifiée entre une commune ayant adopté et publié un règlement dont la publication par la voie de l'affichage a été constatée par une annotation dans un registre spécialement tenu à cet effet, dans la forme et dans le délai déterminés par un arrêté d'exécution de ces dispositions légales, et une commune ayant adopté et publié un règlement dont la publication par la voie de l'affichage a été constatée par une annotation dans un registre spécialement tenu à cet effet, lorsque la forme et le délai déterminés par un arrêté d'exécution de ces dispositions légales n'ont pas été strictement respectés ? - Les articles 112 et 114 de la nouvelle loi communale interprétés en ce sens que l'annotation dans le registre des publications prévue par l'alinéa 2 de l'article 114 de la nouvelle loi communale précité constitue le seul mode de preuve admissible de la publication d'un règlement communal et une condition substantielle de la procédure de publication, prévue à peine de l'inopposabilité et de l'inapplicabilité du règlement communal, violent-ils les articles 10, 11 et 170 de la Constitution, combinés avec l'article 190, de la Constitution, en ce qu'à la différence des normes législatives et actes administratifs réglementaires adoptés par les autres autorités, l'acquisition de la force obligatoire des règlements communaux dépend non seulement du fait de leur publication (en l'occurrence par voie d'affichage) mais également de la mention de cette publication dans le registre des publications des règlements et ordonnances des autorités communales, qui plus est dans le respect des conditions formelles prescrites par l`arrêté réglementaire adopté en exécution de l'article 114 précité, parmi lesquelles figure la condition que l'annotation dans le registre ait été faite le premier jour de la publication du règlement ? ».b. Par jugement du 9 juin 2021, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 29 juin 2021, le Tribunal de première instance du Luxembourg, division de Marche-en-Famenne, a posé les questions préjudicielles suivantes : « 1.Dans l'interprétation suivant laquelle il se déduirait des articles L1133-1 et L1133-2 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation que le seul mode de preuve admissible de la publication d'un règlement communal est l'annotation dans le registre spécial tenu par le secrétaire communal et suivant laquelle les articles L1133-1 et L1133-2 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation auraient habilité le Roi [à] prévoir que, pour valoir preuve de la publication d'un règlement communal, l'annotation dans un registre spécialement tenu à l'effet de constater le fait et la date de la publication des règlements et ordonnances communaux par la voie de l'affichage doit être faite le premier jour de l'affichage, ou à prévoir, au sujet de ce registre et de cette annotation, des règles de forme, portant entre autres sur le moment de l'annotation, prescrites à peine de nullité de la publication elle-même ou à peine de nullité ou d'inopposabilité du règlement, ces dispositions violent-elles les articles 10, 11, 33, 170, 172 et 191 de la Constitution, combinés avec les articles 105, 108, 159, 162 et 190 de la Constitution et avec les principes de légalité et de sécurité juridique, en ce qu'elles privent tant l'autorité communale en qualité d'auteur d'un tel règlement que l'ensemble des personnes susceptibles d'être soumises à un tel règlement, en ce compris l'autorité communale elle-même, de la garantie de l'intervention d'une assemblée législative délibérante, à savoir le législateur comme le prévoit l'article 190 de la Constitution, dans la détermination des éléments essentiels touchant à la publication des lois, arrêtés et règlements et à la forme de leur publication, en ce comprise la preuve de cette publication, et, partant, dans la détermination d'un élément essentiel touchant au caractère obligatoire des lois, arrêtés et règlements et, dans le cas d'un règlement-taxe communal, à la qualité de redevable de la taxe, alors que les auteurs des autres types de normes (lois, arrêtés ou règlements d'administration générale ou provinciale), visés par l'article 190 de la Constitution, et l'ensemble des personnes susceptibles d'être soumises à de telles normes, ne sont pas privés de cette garantie ? 2. Interprétés dans le même sens, les articles L1133-1 et L1133-2 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation violent-ils les articles 10, 11, 170 et 172 de la Constitution, combinés avec le principe de proportionnalité, en ce qu'ils imposent une différence de traitement injustifiée entre une commune ayant adopté et publié un règlement dont la publication par la voie de l'affichage a été constatée par une annotation dans un registre spécialement tenu à cet effet, dans la forme et dans le délai déterminés par un arrêté d'exécution de ces dispositions légales, et une commune ayant adopté et publié un règlement dont la publication par la voie de l'affichage a été constatée par une annotation dans un registre spécialement tenu à cet effet, lorsque la forme et le délai déterminés par un arrêté d'exécution de ces dispositions légales n'ont pas été strictement respectés ? 3.Les articles L1133-1 et L1133-2 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation interprétés en ce sens que l'annotation dans le registre des publications prévue par l'alinéa 2 de l'article L1133-2 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation de la nouvelle loi communale précité [lire : de l'article L1332-2 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation précité] constitue le seul mode de preuve admissible de la publication d'un règlement communal et une condition substantielle de la procédure de publication, prévue à peine de l'inopposabilité et de l'inapplicabilité du règlement communal, violent-ils les articles 10, 11 et 170 de la Constitution, combinés avec l'article 190 de la Constitution, en ce qu'à la différence des normes législatives et actes administratifs réglementaires adoptés par les autres autorités, l'acquisition de la force obligatoire des règlements communaux dépend non seulement du fait de leur publication (en l'occurrence par voie d'affichage) mais également de la mention de cette publication dans le registre des publications des règlements et ordonnances des autorités communales, qui plus est dans le respect des conditions formelles prescrites par l'arrêté réglementaire adopté en exécution de l'article L1133-2 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation, parmi lesquelles figure la condition que l'annotation dans le registre ait été faite le premier jour de la publication du règlement ? 4. Les articles L1133-1 et L1133-2 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation, interprétés en ce sens que l'annotation dans le registre des publications prévue par l'alinéa 2 de l'article L1133-2 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation constitue le seul mode de preuve admissible de la publication d'un règlement communal et une condition substantielle de la procédure de publication, prévue à peine de l'inopposabilité et de l'inapplicabilité du règlement communal et que l'acquisition de la force obligatoire des règlements communaux dépend non seulement du fait de leur publication (en l'occurrence par voie d'affichage) mais également de la mention de cette publication dans le registre des publications des règlements et ordonnances des autorités communales, qui plus est dans le respect des conditions formelles prescrites par l'arrêté réglementaire adopté en exécution de l'article L1133-2 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation, parmi lesquelles figure la condition que l'annotation dans le registre ait été faite le premier jour de la publication du règlement, alors que les articles L2213-2 et L2213-3 du même code, dans leur interprétation postérieure à l'arrêt de la Cour constitutionnelle du 12 novembre 2020, prévoient que les règlements et les ordonnances des provinces deviennent obligatoires le huitième jour après celui de l'insertion dans le Bulletin provincial et ce quand bien même la différence de traitement entre le mode de publication des règlements et ordonnances des communes et le mode de publication des règlements et ordonnances des provinces repose sur un critère objectif, à savoir que même si les unes et les autres sont des collectivités politiques territoriales qui sont investies par la Constitution de responsabilités autonomes, il résulte de cette autonomie, de la diversité en ce qui concerne l'ampleur de leurs compétences territoriales et de la diversité de leurs attributions que le législateur décrétal a pu organiser des modes de publication différents pour leurs règlements et ordonnances respectifs, violent-il les articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec le principe de sécurité juridique et le principe de proportionnalité ? ». Ces affaires, inscrites sous les numéros 7576 et 7610 du rôle de la Cour, ont été jointes. (...) III. En droit (...) Quant aux dispositions en cause et à leur contexte B.1. Les questions préjudicielles portent sur la matière de la publication officielle des règlements et ordonnances communaux, en particulier des règlements-taxes. Cette matière a été transférée aux régions par la loi spéciale du 13 juillet 2001 « portant transfert de diverses compétences aux régions et communautés ». Les affaires jointes concernent les législations applicables à la Région de Bruxelles-Capitale ainsi qu'à la Région wallonne. Vu la similarité des dispositions en cause, la Cour examine les questions préjudicielles conjointement.

B.2.1. Les articles 112 et 114 de la Nouvelle loi communale, tels qu'ils sont applicables en Région de Bruxelles-Capitale, disposent : «

Art. 112.Les règlements et ordonnances du conseil communal, du collège des bourgmestre et échevins et du bourgmestre sont publiés par ce dernier par voie d'affichage et par leur mise en ligne sur le site internet de la commune.

Les affiches et le site internet de la commune visés au premier alinéa indiquent l'objet du règlement ou de l'ordonnance, la date de la décision par laquelle le règlement ou l'ordonnance a été adopté, la décision de l'autorité de tutelle et le ou les lieux où le texte du règlement ou de l'ordonnance peut être consulté par le public. Sur le site internet, l'intégralité du règlement ou de l'ordonnance sera publiée.

Le bourgmestre peut également publier les actes visés au premier alinéa par voie de presse.

La publication d'un règlement ou d'une ordonnance sur le site internet de la commune et, le cas échéant, par voie de presse, indique la date de sa publication par voie d'affichage.

Dès leur approbation par le conseil communal, les documents suivants sont publiés sur le site internet de la commune : les plans communaux de développement et les plans communaux d'affectation du sol, le budget annuel, le plan triennal et les comptes.

Si le conseil communal décide de diffuser en version papier ou en version électronique un bulletin d'information communal dans lequel les membres du collège ont la possibilité de faire des communications relatives à l'exercice de leur fonction, un espace est réservé dans chaque parution de ce bulletin afin de permettre aux listes ou formations politiques démocratiques représentées au conseil communal mais n'appartenant pas à la majorité communale, de s'exprimer. Les modalités d'application de cette disposition doivent être définies dans le règlement d'ordre intérieur du conseil communal ou dans un règlement communal spécifique. Une commission composée d'un représentant de chaque groupe politique démocratique représenté au conseil communal sera chargée de remettre annuellement au conseil communal un rapport relatif au respect de cette disposition ». «

Art. 114.Les règlements et ordonnances visés à l'article 112 deviennent obligatoires le cinquième jour qui suit le jour de leur publication par la voie de l'affichage, sauf s'ils en disposent autrement.

Le fait et la date de la publication de ces règlements et ordonnances par la voie de l'affichage sont constatés par une annotation dans un registre spécialement tenu à cet effet, dans la forme qui sera déterminée par arrêté du Gouvernement.

La publication de ces règlements et ordonnances par leur mise en ligne sur le site internet de la commune et, le cas échéant, par voie de presse, n'a pas d'influence sur leur entrée en vigueur ».

B.2.2. Les articles L1133-1 et L1133-2 du Code wallon de la démocratie locale et de la décentralisation disposent : « Art. L1133-1. Les règlements et ordonnances du conseil communal, du collège communal et du bourgmestre sont publiés par ce dernier par la voie d'une affiche indiquant l'objet du règlement ou de l'ordonnance, la date de la décision par laquelle il a été adopté, et, le cas échéant, la décision de l'autorité de tutelle.

L'affiche mentionne également le ou les lieux où le texte du règlement ou de l'ordonnance peut être consulté par le public.

Art. L1133-2. Les règlements et ordonnances visés à l'article L1133-1 deviennent obligatoires le cinquième jour qui suit le jour de leur publication par la voie de l'affichage, sauf s'ils en disposent autrement.

Le fait et la date de la publication de ces règlements et ordonnances sont constatés par une annotation dans un registre spécialement tenu à cet effet, dans la forme qui sera déterminée par arrêté du Gouvernement ».

B.3.1. L'article 190 de la Constitution dispose : « Aucune loi, aucun arrêté ou règlement d'administration générale, provinciale ou communale, n'est obligatoire qu'après avoir été publié dans la forme déterminée par la loi ».

B.3.2. La publication des règlements et ordonnances des communes par la voie d'un affichage entend donner exécution au droit, pour le justiciable, garanti par l'article 190 de la Constitution, de pouvoir prendre connaissance en tout temps de ces textes officiels avant que ceux-ci lui soient opposables. En outre, ce droit est inhérent à l'état de droit puisque c'est cette connaissance qui permet à chacun de s'y conformer. Afin de garantir ce droit, il convient que le législateur compétent veille à ce que le mode d'accès à cette information soit adapté à l'évolution de la société et de la technologie.

L'annotation datée et signée de la publication dans un registre vise à fixer avec certitude la publication du règlement.

B.3.3. Les juridictions a quo n'interrogent toutefois pas la Cour sur la constitutionnalité de la technique d'affichage en soi. Les questions préjudicielles ne portent que sur la constitutionnalité de la portée de l'habilitation que les dispositions en cause confèrent au pouvoir exécutif de déterminer la forme de l'annotation de la publication par voie d'affichage des règlements et ordonnances communaux dans un registre spécialement tenu à cet effet.

B.4. Les Gouvernements de la Région de Bruxelles-Capitale et de la Région wallonne n'ont pas pris de mesure d'exécution à la suite de la régionalisation de la compétence mentionnée en B.1. Par conséquent, c'est l'arrêté royal du 14 octobre 1991 « relatif aux annotations dans le registre de publication des règlements et ordonnances des autorités communales » (ci-après : l'arrêté royal du 14 octobre 1991) qui est applicable. Ce dernier dispose : «

Article 1er.Le fait et la date de la publication des règlements et ordonnances visés à l'article 112 de la nouvelle loi communale sont constatés par une annotation dans un registre spécialement tenu à cet effet par le secrétaire communal.

Art. 2.L'annotation dans le registre est faite le premier jour de la publication du règlement ou de l'ordonnance.

Les annotations sont numérotées d'après l'ordre des publications successives.

Art. 3.L'annotation, datée et signée par le bourgmestre et par le secrétaire communal, est établie dans la forme suivante : ` N° ... Le bourgmestre de la commune (ou de la ville) de ..., province de ..., certifie que le règlement (ou l'ordonnance) du conseil communal (ou du collège des bourgmestre et échevins) (ou du bourgmestre), daté(e) du ... et ayant pour objet ..., a été publié(e), conformément à l'article 112 de la nouvelle loi communale, le ...

A ..., le ... (date) Le Secrétaire, Le Bourgmestre, ' [...] ».

Quant à la première question préjudicielle En ce qui concerne la recevabilité de la question B.5. Les SA « JC Decaux » et « Orange » font valoir que la question préjudicielle n'appelle pas de réponse, en ce que l'inopposabilité d'un règlement-taxe dont il est question ne découle pas des dispositions en cause. Celle-ci résulterait uniquement de l'arrêté royal du 14 octobre 1991, qui est applicable dans les affaires pendantes devant les juridictions a quo.

B.6. La Cour n'est pas compétente pour répondre à une question préjudicielle relative à une disposition d'un arrêté royal, qui, à défaut d'être confirmée par une loi, n'est pas une norme législative.

Elle ne peut pas non plus se prononcer sur les divergences d'interprétation d'un arrêté royal qui résultent des applications jurisprudentielles de ce dernier. Enfin, la Cour n'est pas compétente pour connaître des modalités d'exécution d'une norme législative.

B.7. En vertu de l'article 114 de la Nouvelle loi communale, en Région de Bruxelles-Capitale, et de l'article L1133-2 du Code wallon de la démocratie locale et de la décentralisation, en Région wallonne, le pouvoir exécutif peut déterminer la forme de l'annotation dans le registre dans lequel le fait et la date de la publication des règlements et ordonnances communaux sont constatés. Ces dispositions confèrent donc une habilitation aux Gouvernements wallon et bruxellois, en prévoyant toutefois déjà l'existence du registre et que le fait et la date de la publication des règlements et ordonnances communaux doivent être constatés par une annotation.

B.8. Il résulte des décisions de renvoi que, sur ce point, la Cour est interrogée sur la compatibilité des dispositions précitées en ce qu'elles habilitent le pouvoir exécutif à prévoir des règles de forme d'annotation dans le registre qui sont prescrites à peine d'inopposabilité des règlements et ordonnances communaux. Dans cette interprétation, le grief décrit dans la question préjudicielle découle des dispositions en cause.

B.9. L'exception est rejetée. La Cour examine les dispositions en cause uniquement en ce qu'elles confèrent une habilitation législative au pouvoir exécutif et n'a pas égard au contenu de l'arrêté royal du 14 octobre 1991.

En ce qui concerne l'interprétation des dispositions en cause B.10. La Cour est interrogée sur la compatibilité des dispositions en cause avec les articles 10, 11, 33, 170, 172 et 191 de la Constitution, lus en combinaison avec les articles 105, 108, 159, 162 et 190 de la Constitution, dans l'interprétation selon laquelle, d'une part, elles déterminent l'annotation dans un registre spécial comme seul mode de preuve admissible de la publication d'un règlement communal et, d'autre part, elles autorisent le pouvoir exécutif à prévoir que l'annotation soit faite le premier jour de l'affichage, à créer une condition de forme à peine de nullité de la publication ou du règlement communal et à créer une condition de forme à peine d'inopposabilité du règlement communal.

B.11. Il appartient en règle au juge a quo d'interpréter les dispositions qu'il applique, sous réserve d'une lecture manifestement erronée de la disposition en cause.

B.12.1. En ce qui concerne la détermination de l'annotation dans le registre spécial comme mode de preuve exclusif de la publication d'un règlement communal, la Cour de cassation a jugé que « le seul mode de preuve admissible de la publication d'une ordonnance ou d'un règlement communal est l'annotation dans le registre spécial » (Cass., 21 mai 2015, F.14.0098.F et 21 mai 2015, F.13.0158.F). Dès lors, il n'est donc pas manifestement erroné d'interpréter les dispositions en cause en ce sens.

B.12.2. En ce qui concerne le fait de prévoir que l'annotation doit être faite le premier jour de l'affichage, il n'est pas manifestement erroné de considérer que l'habilitation législative en cause puisse être interprétée comme l'incluant.

B.12.3. Quant à la création d'une condition de forme à peine de nullité de la publication ou du règlement communal, la Cour de cassation a jugé : « Il résulte de la combinaison de l'ensemble de ces dispositions que le caractère obligatoire des actes visés par l'article 112 de la nouvelle loi communale et par l'article L1133-1 du Code wallon de la démocratie locale et de la décentralisation résulte uniquement de la publication de ces règlements et ordonnances par la voie de l'affichage et que, en revanche, l'annotation de ces actes dans le registre prévu à l'article 1er de l'arrêté royal du 14 octobre 1991 portant exécution de l'article 114, alinéa 2, de la nouvelle loi communale du 24 juin 1988 ne concerne que la preuve de la publication, cette annotation et l'inscription de ces actes dans le registre [...] ne constituant pas une condition du caractère obligatoire de ces actes » (Cass., 21 mai 2015, F.13.0158.F).

Il ressort de la jurisprudence précitée que, d'une part, le caractère obligatoire des ordonnances et règlements communaux est tout entier réglé par les dispositions en cause en dehors de l'habilitation à l'exécutif et, d'autre part, que le régime probatoire de la publication des règlements et ordonnances communaux n'a aucune incidence sur leur validité. Il est dès lors manifestement erroné d'interpréter les dispositions en cause, lorsqu'elles sont relatives à l'annotation, comme visant la nullité de la publication ou la nullité du règlement.

B.12.4. Enfin, en ce qui concerne la création d'une condition de forme à peine d'inopposabilité du règlement communal, les dispositions en cause peuvent raisonnablement être interprétées comme en comprenant la possibilité.

B.13. Par conséquent, la Cour n'examine la question préjudicielle que dans la mesure où elle repose sur une interprétation qui n'est pas manifestement erronée.

En ce qui concerne la réponse à la première question préjudicielle B.14. La Cour examine d'abord la question de l'annotation dans le registre spécial comme seul mode de preuve admissible de la publication d'un règlement communal, puis la question de l'habilitation au pouvoir exécutif.

Annotation dans le registre spécial comme seul mode de preuve admissible de la publication d'un règlement communal B.15. Interprétées comme faisant de l'annotation dans le registre le seul mode de preuve de la publication d'un règlement communal, les dispositions en cause n'ont pas pour objectif l'organisation et le mode de fonctionnement de l'administration mais la protection de l'administré, et du redevable dans le cadre d'un règlement-taxe. Ceci est de nature à renforcer l'objectif général visé par l'article 190 de la Constitution.

B.16. Compte tenu de la nature particulière de l'affichage, dont la constatation est concrètement moins aisée que celle de la publication dans un journal officiel et pour lequel les risques d'altération sont plus importants, le législateur a pu estimer qu'il était pertinent d'organiser un régime probatoire unique et exclusif, qui ne souffre d'aucune ambiguïté, à savoir la production d'une annotation dans un registre spécifique.

B.17. En outre, la Cour n'aperçoit aucune difficulté d'ordre pratique qui rendrait ce régime de preuve disproportionné à l'objectif poursuivi. Il en est d'autant plus ainsi que la preuve de la publication d'une norme ne se confond pas avec la validité de celle-ci.

B.18. Enfin, contrairement à ce que soutiennent certaines des parties, la simple circonstance que certaines juridictions ont pu considérer que d'autres moyens de preuve n'étaient en réalité pas exclus par les dispositions en cause n'entraîne pas ipso facto l'inconstitutionnalité de celles-ci. En effet, la Cour les examine dans l'interprétation des juridictions a quo mentionnée en B.10.

B.19. En ce qu'elles font de l'annotation dans le registre le seul mode de preuve de la publication d'un règlement communal, les dispositions en cause ne sont pas incompatibles avec les articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec l'article 190 de la Constitution.

Habilitation au pouvoir exécutif B.20. En tant qu'elles ont trait à la publication des normes au sens large, les dispositions en cause portent sur une matière que l'article 190 de la Constitution réserve au législateur. Cette disposition constitutionnelle n'empêche toutefois pas que la forme de la publication fasse l'objet d'une habilitation au pouvoir exécutif, pour autant que celle-ci soit décrite de manière suffisamment précise et porte sur l'exécution de mesures dont les éléments essentiels ont été préalablement établis par le pouvoir législatif.

B.21. En l'espèce, aux termes des articles 114 de la Nouvelle loi communale et L1133-2 du Code wallon de la démocratie locale et de la décentralisation, l'habilitation ne porte pas sur le mode de publication par affichage en tant que tel, mais sur la manière dont la preuve de cet affichage doit être apportée.

B.22. Etant donné que le législateur fédéral et le législateur décrétal wallon ont chacun prévu que le mode de publication doit être un affichage et que la preuve de celui-ci doit être apportée au moyen d'une annotation dans un registre spécialement tenu à cet effet, ils ont réglé eux-mêmes les éléments essentiels de la forme de la publication. Les délégations ne portent que sur la forme de l'annotation dans le registre.

B.23. Contrairement à ce que certaines parties soutiennent, et conformément à ce qui est dit en B.12.3, la forme de l'annotation dans le registre n'emporte aucune conséquence sur la régularité d'une norme communale publiée par affichage. En ce qui concerne l'inopposabilité éventuelle du règlement dont la publication n'a pas été constatée dans le respect des dispositions prises en vertu de l'habilitation à l'exécutif, elle doit être considérée comme une conséquence de l'absence de preuve de la publication et ne doit pas être confondue avec la nullité de l'acte. De plus, cette inopposabilité découle principalement des dispositions en cause, qui consacrent l'annotation comme seul mode de preuve de la publication des règlements et ordonnances communaux, et non de l'habilitation ou des dispositions réglementaires. Or, pour les motifs mentionnés en B.15 à B.19, cette exclusivité probatoire n'est pas incompatible avec la Constitution.

Dès lors, l'habilitation conférée au pouvoir exécutif n'emporte pas d'effets manifestement disproportionnés.

B.24. Il découle de ce qui précède que les législateurs ont déterminé les éléments essentiels des mesures dont l'exécution au pouvoir exécutif et que, partant, ces habilitations ne sont pas contraires au principe de légalité contenu dans l'article 190 de la Constitution.

B.25. La Cour est également interrogée sur la compatibilité de l'habilitation contenue dans les dispositions en cause, lorsqu'elle vise les règlements-taxes communaux, avec les articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec l'article 170 de la Constitution.

B.26. L'article 170, § 4, dispose : « Aucune charge, aucune imposition ne peut être établie par l'agglomération, par la fédération de communes et par la commune que par une décision de leur conseil.

La loi détermine, relativement aux impositions visées à l'alinéa 1er, les exceptions dont la nécessité est démontrée ».

B.27. La matière fiscale est une compétence que la Constitution réserve à la loi, le législateur étant tenu de déterminer les éléments essentiels de l'impôt. Font partie des éléments essentiels de l'impôt, la désignation des contribuables, la matière imposable, la base d'imposition, le taux d'imposition et les éventuelles exonérations d'impôt.

B.28. L'habilitation contenue dans les dispositions en cause ne permet aucunement qu'un règlement-taxe communal soit adopté par une autorité autre que le conseil communal.

B.29. Au surplus, la forme de l'annotation dans le registre de la publication des règlements-taxes communaux, même si elle peut avoir des effets sur la preuve de la publication et l'opposabilité desdits règlements, ne fait pas partie des éléments essentiels de l'impôt mentionnés en B.27.

B.30. Dès lors, les dispositions en cause ne sont pas contraires au principe de légalité contenu dans l'article 170 de la Constitution.

B.31. L'examen des dispositions en cause au regard des articles 33, 105, 108, 159, 162, 172 et 191 de la Constitution, au sujet desquels ni les juges a quo ni les parties n'exposent en quoi ils seraient violés, ne conduit pas à une autre conclusion.

Quant à la deuxième question préjudicielle B.32. La Cour est interrogée sur la différence de traitement qui serait créée par les dispositions en cause entre d'une part, les communes qui respectent l'arrêté royal du 14 octobre 1991 et, d'autre part, celles qui ne respectent pas cet arrêté royal.

B.33. La différence de traitement précitée ne résulte pas du texte des dispositions en cause, qui imposent les mêmes obligations à toutes les communes concernées, mais du respect, ou non, par certaines communes, de l'arrêté royal du 14 octobre 1991. Dès lors, la question préjudicielle ne relève pas de la compétence de la Cour.

B.34. La deuxième question préjudicielle n'appelle pas de réponse.

Quant à la troisième question préjudicielle B.35. La Cour est invitée à statuer sur la compatibilité des dispositions en cause notamment avec les articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec l'article 190 de la Constitution, en ce qu'elles font dépendre l'acquisition de la force obligatoire des règlements et ordonnances communaux de leur publication par affichage mais également de l'annotation dans le registre, alors que les actes des autres autorités acquièrent leur force obligatoire par la seule publication.

B.36.1. La question préjudicielle part du postulat qu'une norme communale acquiert sa force obligatoire par la conjonction de deux conditions, à savoir la publication proprement dite et l'annotation, alors que les autres normes, dont la publication a lieu dans un journal officiel, ne supposent aucune autre formalité.

B.36.2. Aux termes de l'article 114 de la Nouvelle loi communale et de l'article L1133-2 du Code wallon de la démocratie locale et de la décentralisation, les règlements et ordonnances communaux acquièrent leur force obligatoire exclusivement par le biais de la publication par affichage, à savoir le cinquième jour qui suit le jour de leur publication par cette voie. Aucune autre condition n'est requise.

L'annotation dans le registre spécialement tenu à cet effet constitue le mode de preuve de cet affichage, notamment devant un tribunal.

Selon la jurisprudence de la Cour de cassation mentionnée en B.12.3, le non-respect des règles relatives à la forme de l'annotation dans le registre entraîne l'absence de preuve quant à l'affichage et, par conséquent, l'inopposabilité du règlement communal.

La publication dans un journal officiel est, de la même façon, la seule condition de la force obligatoire des normes publiées par ce biais. La seule circonstance que la preuve de l'existence de la publication au journal officiel est plus aisée à apporter ne signifie pas que ce type de publication n'est soumise à aucun régime probatoire.

B.36.3. En ce qu'elle considère que la force obligatoire des règlements et ordonnances communaux en Région de Bruxelles-Capitale et en Région wallonne dépend d'une double condition de publication et d'annotation, la question préjudicielle part d'une prémisse erronée.

La différence de traitement qui y est décrite est dès lors inexistante.

B.37. La troisième question préjudicielle n'appelle pas de réponse.

Quant à la quatrième question préjudicielle B.38. La Cour est invitée à statuer sur la compatibilité des dispositions en cause avec les articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec l'article 190 de la Constitution, en ce qu'elles font dépendre l'acquisition de la force obligatoire des règlements et ordonnances communaux de leur publication par affichage mais également de l'annotation dans le registre, alors que les actes des autorités provinciales acquièrent leur force obligatoire par la seule publication dans le Bulletin provincial.

B.39. Pour les motifs mentionnés en B.36.1 à B.36.3, la question préjudicielle part d'une prémisse erronée. La différence de traitement qui y est décrite est dès lors inexistante.

B.40. La quatrième question préjudicielle n'appelle pas de réponse.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : 1. Les articles 112 et 114 de la Nouvelle loi communale et les articles L1133-1 et L1133-2 du Code wallon de la démocratie locale et de la décentralisation ne violent pas les articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec les articles 170 et 190 de la Constitution.2. Les deuxième, troisième et quatrième questions préjudicielles n'appellent pas de réponse. Ainsi rendu en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 15 décembre 2022.

Le greffier, F. Meersschaut Le président, P. Nihoul

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