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Arrêt
publié le 18 janvier 2023

Extrait de l'arrêt n° 94/2022 du 7 juillet 2022 Numéro du rôle : 7632 En cause : le recours en annulation de la loi du 30 mai 2021 « portant confirmation de l'arrêté roy(...)

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Extrait de l'arrêt n° 94/2022 du 7 juillet 2022 Numéro du rôle : 7632 En cause : le recours en annulation de la loi du 30 mai 2021Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/05/2021 pub. 03/06/2021 numac 2021041366 source service public federal justice Loi portant confirmation de l'arrêté royal du 28 janvier 2021 relatif à la contribution aux frais de fonctionnement, de personnel et d'installation de la Commission des jeux de hasard due par les titulaires de licence de classe A, A+, B, B+, C, E, F1, F1+, F2, G1 et G2 pour l'année civile 2021 fermer « portant confirmation de l'arrêté royal du 28 janvier 2021 relatif à la contribution aux frais de fonctionnement, de personnel et d'installation de la Commission des jeux de hasard due par les titulaires de licence de classe A, A+, B, B+, C, E, F1, F1+, F2, G1 et G2 pour l'année civile 2021 » et, en ordre subsidiaire, de l'article 1er, § 6, alinéa 1er, de l'arrêté royal précité, introduit par la SA « Casino Kursaal Oostende » et l'union professionnelle « Belgian Gaming Association ».

La Cour constitutionnelle, composée des présidents L. Lavrysen et P. Nihoul, et des juges J.-P. Moerman, T. Giet, M. Pâques, Y. Kherbache, T. Detienne, D. Pieters, S. de Bethune et W. Verrijdt, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président L. Lavrysen, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet du recours et procédure Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 8 septembre 2021 et parvenue au greffe le 9 septembre 2021, un recours en annulation de la loi du 30 mai 2021Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/05/2021 pub. 03/06/2021 numac 2021041366 source service public federal justice Loi portant confirmation de l'arrêté royal du 28 janvier 2021 relatif à la contribution aux frais de fonctionnement, de personnel et d'installation de la Commission des jeux de hasard due par les titulaires de licence de classe A, A+, B, B+, C, E, F1, F1+, F2, G1 et G2 pour l'année civile 2021 fermer « portant confirmation de l'arrêté royal du 28 janvier 2021 relatif à la contribution aux frais de fonctionnement, de personnel et d'installation de la Commission des jeux de hasard due par les titulaires de licence de classe A, A+, B, B+, C, E, F1, F1+, F2, G1 et G2 pour l'année civile 2021 » (publiée au Moniteur belge du 3 juin 2021) et, en ordre subsidiaire, de l'article 1er, § 6, alinéa 1er, de l'arrêté royal précité (publié au Moniteur belge du 29 janvier 2021, deuxième édition) a été introduit par la SA « Casino Kursaal Oostende » et l'union professionnelle « Belgian Gaming Association », assistées et représentées par Me M. Ryckman, avocat au barreau de Bruxelles. (...) II. En droit (...) Quant au contexte de la loi attaquée B.1.1. Afin de renforcer la protection du public et le contrôle du secteur des jeux de hasard, le législateur a créé la Commission des jeux de hasard par l'article 9 de la loi du 7 mai 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 07/05/1999 pub. 30/12/1999 numac 1999010222 source ministere de la justice Loi sur les jeux de hasard, les établissements de jeux de hasard et la protection des joueurs type loi prom. 07/05/1999 pub. 30/11/2010 numac 2010000668 source service public federal interieur Loi sur les jeux de hasard, les établissements de jeux de hasard et la protection des joueurs. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer « sur les jeux de hasard, les paris, les établissements de jeux de hasard et la protection des joueurs » (ci-après : la loi du 7 mai 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 07/05/1999 pub. 30/12/1999 numac 1999010222 source ministere de la justice Loi sur les jeux de hasard, les établissements de jeux de hasard et la protection des joueurs type loi prom. 07/05/1999 pub. 30/11/2010 numac 2010000668 source service public federal interieur Loi sur les jeux de hasard, les établissements de jeux de hasard et la protection des joueurs. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer).

La Commission des jeux de hasard a une compétence triple. Elle rend des avis sur les initiatives législatives ou réglementaires relatives aux jeux de hasard, elle délivre les licences aux établissements de jeux de hasard et elle contrôle l'application et le respect de la réglementation concernée (articles 20 et 21 de la loi du 7 mai 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 07/05/1999 pub. 30/12/1999 numac 1999010222 source ministere de la justice Loi sur les jeux de hasard, les établissements de jeux de hasard et la protection des joueurs type loi prom. 07/05/1999 pub. 30/11/2010 numac 2010000668 source service public federal interieur Loi sur les jeux de hasard, les établissements de jeux de hasard et la protection des joueurs. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer).

B.1.2. Afin de pourvoir au financement de la Commission, le législateur a institué le fonds de la Commission des jeux de hasard.

Ce fonds est alimenté par des contributions que paient les titulaires de licences. Les frais de fonctionnement, de personnel et d'installation de la Commission et de son secrétariat sont donc intégralement à charge des titulaires de licences.

Le Roi fixe par arrêté délibéré en Conseil des ministres le montant des contributions à payer. La Chambre des représentants doit confirmer cet arrêté (article 19, § 2, de la loi du 7 mai 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 07/05/1999 pub. 30/12/1999 numac 1999010222 source ministere de la justice Loi sur les jeux de hasard, les établissements de jeux de hasard et la protection des joueurs type loi prom. 07/05/1999 pub. 30/11/2010 numac 2010000668 source service public federal interieur Loi sur les jeux de hasard, les établissements de jeux de hasard et la protection des joueurs. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer).

B.2.1. La loi attaquée dispose : «

Article 1er.La présente loi règle une matière visée à l'article 74 de la Constitution.

Art. 2.L'arrêté royal du 28 janvier 2021 relatif à la contribution aux frais de fonctionnement, de personnel et d'installation de la Commission des jeux de hasard due par les titulaires de licence de classe A, A+, B, B+, C, E, F1, F1+, F2, G1 et G2 pour l'année civile 2021 est confirmé avec effet à la date de son entrée en vigueur ».

B.2.2. Les griefs formulés par les parties requérantes ne portent pas sur la confirmation de l'arrêté royal, mais sur les dispositions de l'article 1er de l'arrêté confirmé. Du fait de l'entrée en vigueur de la loi attaquée, ces dispositions ont acquis force de loi. L'article 1er de l'arrêté royal du 28 janvier 2021 « relatif à la contribution aux frais de fonctionnement, de personnel et d'installation de la Commission des jeux de hasard due par les titulaires de licence de classe A, A+, B, B+, C, E, F1, F1+, F2, G1 et G2 pour l'année civile 2021 » (ci-après : l'arrêté royal du 28 janvier 2021) dispose : « § 1. Pour l'année civile 2021, la contribution pour une licence de classe A s'élève à 22.085 euros, pour une licence de classe A+ 11.042 euros, pour une licence de classe B 11.042 euros et pour une licence de classe B+ 11.042 euros.

En outre, la contribution pour les titulaires d'une licence de classe A qui exploitent des jeux de hasard automatiques s'élève à 714 euros par appareil avec un minimum de 21.475 euros. § 2. Pour les titulaires d'une licence de classe C octroyée dans le courant de l'année civile 2021, la contribution s'élève à 752 euros. § 3. La contribution pour une licence de classe E est calculée sur base des services fournis.

Pour les titulaires qui prestent exclusivement des services d'entretien, de réparation ou d'équipement de jeux de hasard dont ils ne sont pas propriétaires, elle s'élève à 3.682 euros.

Pour les titulaires de licence de classe E qui fournissent ces services pour l'exploitation des jeux de hasard via la société de l'information, la contribution s'élève à 12.603 euros Pour les autres titulaires d'une licence de classe E, la contribution s'élève à 1.842 euros par tranche entamée de 50 appareils. § 4. La contribution pour une licence de classe F1 s'élève à 12.603 euros, pour une licence de classe F1+ 12.603 euros et pour une licence F2 pour engager des paris dans un établissement de jeux de hasard de classe IV s'élève à 3.780 euros. Pour des titulaires d'une licence F2 qui engagent des paris en dehors d'un établissement de jeux de hasard de classe IV, la contribution s'élève à 1.737 euros.

La contribution pour les jeux automatiques tels que défini[s] à l'article 43/4, § 2, 3e alinéa, de la loi du 7 mai 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 07/05/1999 pub. 30/12/1999 numac 1999010222 source ministere de la justice Loi sur les jeux de hasard, les établissements de jeux de hasard et la protection des joueurs type loi prom. 07/05/1999 pub. 30/11/2010 numac 2010000668 source service public federal interieur Loi sur les jeux de hasard, les établissements de jeux de hasard et la protection des joueurs. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer sur les jeux de hasard, les paris, les établissements de jeux de hasard et la protection des joueurs, s'élève à 446 euros. § 5. Pour une licence de classe G1, la contribution s'élève à 22.085 euros et pour une licence de classe G2 123 euros. § 6. Pour les titulaires d'une licence A, A+, B, B+, E, F1, F1+ et G, les rétributions sont payées une seule fois par an, quelle que soit la durée d'exploitation et ce, pour toute la période de fonctionnement à venir de la commission, qui correspond à une année civile.

Pour les titulaires d'une licence C et F2, la contribution doit être payée avant l'octroi de la licence. Le montant de cette contribution correspond à celui d'une contribution couvrant toute la durée de la licence, quelle que soit la durée d'exploitation ».

Quant au premier moyen B.3. Le premier moyen est pris de la violation des règles répartitrices de compétences contenues dans les articles 3, alinéa 1er, 1°, et 4, § 1er, de la loi spéciale du 16 janvier 1989 relative au financement des communautés et des régions (ci-après : la loi spéciale du 16 janvier 1989), du principe de la loyauté fédérale, garanti par l'article 143, § 1er, de la Constitution, et du principe de légalité en matière fiscale, lus isolément ou en combinaison.

Les parties requérantes font valoir en substance que la contribution aux frais de la Commission des jeux de hasard n'est pas une rétribution, mais une taxe sur les jeux et paris, qui relève de la compétence des régions en vertu des articles 3 et 4 de la loi spéciale du 16 janvier 1989. Elles allèguent également que la loi attaquée entrave sérieusement l'exercice des compétences fiscales régionales et viole donc le principe de la loyauté fédérale.

B.4.1. Pour satisfaire aux exigences de l'article 6 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, les moyens de la requête doivent faire connaître, parmi les règles dont la Cour garantit le respect, celles qui seraient violées ainsi que les dispositions qui violeraient ces règles et exposer en quoi ces règles auraient été transgressées par ces dispositions.

B.4.2. Dans leur requête, les parties requérantes n'exposent pas en quoi la loi attaquée violerait le principe de légalité en matière fiscale, lu en combinaison ou non avec les autres normes de référence invoquées au moyen. En ce qu'il est pris de la violation de ce principe, le moyen est irrecevable.

B.5.1. L'article 177 de la Constitution dispose : « Une loi adoptée à la majorité prévue à l'article 4, dernier alinéa, fixe le système de financement des régions.

Les Parlements de région déterminent, chacun pour ce qui le concerne, l'affectation de leurs recettes par les règles visées à l'article 134 ».

B.5.2. L'article 3 de la loi spéciale du 16 janvier 1989 prise en exécution de l'article 177, alinéa 1er, de la Constitution dispose : « Les impôts suivants sont des impôts régionaux : 1° la taxe sur les jeux et paris; [...] Ces impôts sont soumis aux dispositions des articles 4, 5, 8 et 11 ».

L'article 4, § 1er, de la même loi spéciale dispose : « Les régions sont compétentes pour modifier le taux d'imposition, la base d'imposition et les exonérations des impôts visés à l'article 3, alinéa 1er, 1° à 4° et 6° à 9° ».

B.5.3. L'article 143, § 1er, de la Constitution dispose : « Dans l'exercice de leurs compétences respectives, l'Etat fédéral, les communautés, les régions et la Commission communautaire commune agissent dans le respect de la loyauté fédérale, en vue d'éviter des conflits d'intérêts ».

Le respect de la loyauté fédérale suppose que, lorsqu'elles exercent leurs compétences, l'autorité fédérale et les entités fédérées ne perturbent pas l'équilibre de la construction fédérale dans son ensemble. La loyauté fédérale concerne plus que le simple exercice des compétences : elle indique dans quel esprit il doit avoir lieu.

Le principe de la loyauté fédérale oblige chaque législateur à veiller à ce que l'exercice de sa propre compétence ne rende pas impossible ou exagérément difficile l'exercice de leurs compétences par les autres législateurs.

B.6.1. Par l'arrêt n° 72/2019 du 23 mai 2019, la Cour s'est prononcée sur un moyen similaire dirigé contre les articles 1er et 2 de la loi du 21 juillet 2017Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/07/2017 pub. 01/08/2017 numac 2017040475 source service public federal justice Loi portant confirmation de l'arrêté royal du 20 décembre 2016 relatif à la contribution aux frais de fonctionnement, de personnel et d'installation de la Commission des jeux de hasard due par les titulaires de licence de classe A, A+, B, B+, C, E, F1, F1+, F2, G1 et G2 pour l'année civile 2017 fermer « portant confirmation de l'arrêté royal du 20 décembre 2016 relatif à la contribution aux frais de fonctionnement, de personnel et d'installation de la Commission des jeux de hasard due par les titulaires de licence de classe A, A+, B, B+, C, E, F1, F1+, F2, G1 et G2 pour l'année civile 2017 ».

B.6.2. Par cet arrêt, la Cour a jugé : « B.3.2. En vertu de l'article 177, alinéa 1er, de la Constitution et des articles 3, 1°, et 4, § 1er, de la loi spéciale du 16 janvier 1989 relative au financement des communautés et des régions, les régions sont compétentes pour modifier le taux d'imposition, la base d'imposition et les exonérations de la taxe sur les jeux et paris.

B.3.3. Par son arrêt n° 42/2018 du 29 mars 2018, la Cour a jugé que la contribution est une rétribution si elle porte sur la rémunération d'un service accompli par l'autorité publique au bénéfice du redevable de la contribution, considéré isolément, et si elle revêt un caractère purement indemnitaire. Pour ce faire, il faut qu'existe un rapport raisonnable entre le coût ou la valeur du service fourni et le montant dû par le redevable.

Cependant, la Cour a constaté l'existence d'excédents considérables dans le fonds de la Commission des jeux de hasard, ainsi que le transfert de ces excédents aux ressources générales de l'autorité fédérale. Il en ressort que ' la contribution perçue par l'autorité fédérale va bien au-delà de la couverture des frais de fonctionnement effectifs de la Commission des jeux de hasard et qu'il n'existe dès lors plus de rapport raisonnable entre le coût ou la valeur du service fourni et le montant dû par le redevable ' (arrêt n° 42/2018, B.22).

Pour que la contribution corresponde à nouveau à l'objectif du législateur qui consiste à établir une rétribution, la Cour a annulé l'article 2.12.3 de la loi du 12 juillet 2016Documents pertinents retrouvés type loi prom. 12/07/2016 pub. 14/09/2016 numac 2016003280 source service public federal budget et controle de la gestion Loi contenant le premier ajustement du budget général des dépenses pour l'année budgétaire 2016 fermer contenant le premier ajustement du budget général des dépenses pour l'année budgétaire 2016, qui avait créé le transfert précité.

Par suite de cette annulation, la réaffectation d'un montant de 15 618 000,00 euros a été annihilée ab initio et ce montant a été reversé au fonds de la Commission des jeux de hasard. La contribution visée à l'article 19 de la loi du 7 mai 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 07/05/1999 pub. 30/12/1999 numac 1999010222 source ministere de la justice Loi sur les jeux de hasard, les établissements de jeux de hasard et la protection des joueurs type loi prom. 07/05/1999 pub. 30/11/2010 numac 2010000668 source service public federal interieur Loi sur les jeux de hasard, les établissements de jeux de hasard et la protection des joueurs. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer conserve de ce fait le caractère d'une rétribution, à condition que le produit de la contribution soit affecté exclusivement au fonctionnement de la Commission des jeux de hasard, remboursé proportionnellement aux redevables ou pris en compte dans le calcul de leurs futures contributions (arrêt n° 42/2018, B.23).

B.3.4. En vertu de l'article 173 de la Constitution, l'autorité fédérale peut établir une rétribution, dans l'exercice de sa compétence matérielle. Aucun élément ne fait apparaître qu'en fixant cette rétribution, l'autorité fédérale violerait le principe de la loyauté fédérale ou rendrait impossible ou exagérément difficile l'exercice des compétences régionales.

B.3.5. L'article 2.12.8 de la loi du 22 décembre 2017Documents pertinents retrouvés type loi prom. 22/12/2017 pub. 28/12/2017 numac 2017031994 source service public federal strategie et appui Loi contenant le budget général des dépenses pour l'année budgétaire 2018 fermer contenant le budget général des dépenses pour l'année budgétaire 2018 a attribué à nouveau une partie des moyens disponibles du fonds de la Commission des jeux de hasard aux ressources générales de l'autorité fédérale.

Toutefois, cet article a été retiré afin de donner suite à l'arrêt n° 42/2018. Le recours dirigé contre cet article est dès lors devenu sans objet (voir arrêt n° 161/2018 du 22 novembre 2018).

B.3.6. Le premier moyen dans les deux affaires n'est pas fondé ».

B.6.3. Par l'arrêt n° 156/2019 du 24 octobre 2019, la Cour s'est prononcée dans le même sens au sujet d'un moyen analogue qui était dirigé contre l'article 2 de la loi du 25 juin 2018Documents pertinents retrouvés type loi prom. 25/06/2018 pub. 04/07/2018 numac 2018040230 source service public federal justice Loi portant confirmation de l'arrêté royal du 22 décembre 2017 relatif à la contribution aux frais de fonctionnement, de personnel et d'installation de la Commission des jeux de hasard due par les titulaires de licence de classe A, A+, B, B+, C, E, F1, F1+, F2, G1 et G2 pour l'année civile 2018 fermer « portant confirmation de l'arrêté royal du 22 décembre 2017 relatif à la contribution aux frais de fonctionnement, de personnel et d'installation de la Commission des jeux de hasard due par les titulaires de licence de classe A, A+, B, B+, C, E, F1, F1+, F2, G1 et G2 pour l'année civile 2018 » (B.3.2 à B.3.6).

B.7. Sauf en ce qui concerne la contribution pour une licence de classe A+, le montant des contributions attaquées en l'espèce ne diffère pas substantiellement de celui des contributions que la Cour a appréciées par les arrêts nos 72/2019 et 156/2019. Le montant de la contribution pour une licence de classe A+ est nettement inférieur à celui des contributions que la Cour a appréciées par ces arrêts.

B.8.1. Les parties requérantes soutiennent qu'en ce qui concerne la question de la qualification comme « impôt » ou comme « rétribution » de la contribution attaquée, il convient de tenir compte, en l'espèce, de l'article 2.12.7 de la loi du 22 décembre 2020Documents pertinents retrouvés type loi prom. 22/12/2020 pub. 29/12/2020 numac 2020044220 source service public federal strategie et appui Loi contenant le budget général des dépenses pour l'année budgétaire 2021 fermer « contenant le budget général des dépenses pour l'année budgétaire 2021 » (ci-après : la loi du 22 décembre 2020Documents pertinents retrouvés type loi prom. 22/12/2020 pub. 29/12/2020 numac 2020044220 source service public federal strategie et appui Loi contenant le budget général des dépenses pour l'année budgétaire 2021 fermer), aux termes duquel « les moyens disponibles du Fonds de la Commission des jeux de hasard (programme 12-62-5) sont désaffectés, à concurrence d'un montant de 870 000 euros, et sont ajoutés aux ressources générales du Trésor ».

B.8.2. S'il est vrai, comme le fait valoir le Conseil des ministres, que l'article 2.12.7 de la loi du 22 décembre 2020Documents pertinents retrouvés type loi prom. 22/12/2020 pub. 29/12/2020 numac 2020044220 source service public federal strategie et appui Loi contenant le budget général des dépenses pour l'année budgétaire 2021 fermer ne fait pas l'objet du recours présentement examiné, il convient de tenir compte de ce qu'une réaffectation des moyens du fonds de la Commission des jeux de hasard peut, comme la Cour l'a déjà jugé par les arrêts nos 42/2018 et 3/2020, avoir une incidence sur la qualification comme « impôt » ou comme « rétribution » de la contribution attaquée, et donc sur la compétence du législateur fédéral, lorsque la désaffectation des moyens du fonds et leur transfert aux ressources générales du Trésor sont d'une importance telle qu'il en résulterait que la contribution que l'autorité fédérale impose aux établissements de jeux de hasard n'est pas raisonnablement proportionnée au coût ou à la valeur du service fourni, et qu'elle ne constitue dès lors pas une rétribution mais un impôt.

B.9.1. Par l'arrêt n° 3/2020 du 16 janvier 2020, la Cour s'est prononcée sur l'article 2.12.4 de la loi du 11 juillet 2018Documents pertinents retrouvés type loi prom. 11/07/2018 pub. 18/07/2018 numac 2018012879 source service public federal strategie et appui Loi contenant le premier ajustement du budget général des dépenses de l'année budgétaire 2018 type loi prom. 11/07/2018 pub. 16/07/2018 numac 2018040260 source service public federal strategie et appui Loi contenant le premier ajustement du budget des Voies et Moyens de l'année budgétaire 2018 fermer « contenant le premier ajustement du budget général des dépenses de l'année budgétaire 2018 », aux termes duquel « les moyens disponibles du Fonds de la Commission des jeux de hasard (programme 12-62-5) sont désaffectés, à concurrence d'un montant de 290 000 euros, et sont ajoutés aux ressources générales du Trésor ».

B.9.2. Par cet arrêt, la Cour a jugé : « B.18. Pour l'année budgétaire 2018, la disposition attaquée désaffecte des moyens financiers jusqu'à concurrence de 290 000 euros du fonds de la Commission des jeux de hasard et les ajoute aux ressources générales de l'autorité fédérale.

Il ressort des travaux préparatoires mentionnés en B.1.3 qu'en ce qui concerne le montant précité, il y a lieu d'établir une distinction entre, d'une part, une somme de 200 000 euros qui correspond à des dépenses dans le cadre du règlement collectif de dettes et, d'autre part, une somme de 90 000 euros qui concerne des dépenses de personnel à charge du Service public fédéral Economie. [...] B.20.1. Il ressort de l'article 20, § 3, de la loi du 5 juillet 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/07/1998 pub. 07/10/1998 numac 1998003328 source ministere des finances Loi contenant le deuxième ajustement du Budget général des dépenses de l'année budgétaire 1998 type loi prom. 05/07/1998 pub. 31/07/1998 numac 1998011215 source ministere des affaires economiques Loi relative au règlement collectif de dettes et à la possibilité de vente de gré à gré des biens immeubles saisis fermer et de l'article 19, § 1er, de la loi du 7 mai 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 07/05/1999 pub. 30/12/1999 numac 1999010222 source ministere de la justice Loi sur les jeux de hasard, les établissements de jeux de hasard et la protection des joueurs type loi prom. 07/05/1999 pub. 30/11/2010 numac 2010000668 source service public federal interieur Loi sur les jeux de hasard, les établissements de jeux de hasard et la protection des joueurs. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer que la Commission des jeux de hasard perçoit la contribution annuelle due dans le cadre du règlement collectif de dettes pour le compte des établissements de jeux de hasard, qui sont ainsi les véritables redevables de cette contribution.

B.20.2. Cette contribution constitue un élément essentiel d'un système qui, en cas de surendettement, vise à protéger les débiteurs et les créanciers, notamment lorsque ces dettes sont la conséquence de jeux de hasard, et à pallier ainsi les risques que les jeux et paris font courir aux joueurs et à la société. Cette contribution doit dès lors être considérée comme la rémunération d'un service accompli par l'autorité publique au bénéfice des établissements de jeux de hasard, ainsi que de leurs clients. En décidant que le financement doit se faire dans le cadre du règlement collectif de dettes à l'aide d'une contribution à charge des établissements de jeux de hasard, le législateur fédéral n'a pas établi une taxe « sur les jeux et paris » au sens de l'article 3 de la loi spéciale du 16 janvier 1989 relative au financement des communautés et des régions.

B.20.3. La répartition de la contribution sur les établissements de jeux de hasard est fixée annuellement dans l'arrêté royal qui détermine la contribution aux frais de fonctionnement, de personnel et d'installation de la Commission des jeux de hasard, en utilisant la même clé de répartition que celle contenue dans cet arrêté royal (Doc. parl., Chambre, 2009-2010, DOC 52-2278/001, pp. 113-115). Lors de l'établissement de la contribution, il est tenu compte des licences et du chiffre d'exploitation des établissements de jeux de hasard, ce qui doit garantir l'existence d'un rapport raisonnable entre le coût du service fourni et le montant dû par le redevable.

B.21. L'étendue de la réaffectation des moyens qui résulte de la disposition attaquée ne permet pas de déduire que la contribution imposée aux établissements de jeux de hasard dans le cadre du règlement collectif de dettes ne constituerait pas une rétribution au sens de l'article 173 de la Constitution. Le fait que, par souci de simplification administrative, la Commission des jeux de hasard perçoit la contribution pour le compte des établissements de jeux de hasard et doit reverser le montant perçu au Trésor ne modifie pas ce constat.

B.22. En désaffectant les moyens disponibles du fonds de la Commission des jeux de hasard jusqu'à concurrence de 200 000 euros et en les ajoutant aux ressources générales du Trésor, le législateur fédéral ne viole donc pas les normes de référence mentionnées en B.15.

B.23.1. Il résulte également de la disposition attaquée que les moyens disponibles du fonds de la Commission des jeux de hasard sont également désaffectés jusqu'à concurrence d'un montant de 90 000 euros qui est ajouté aux ressources générales du Trésor.

Selon les travaux préparatoires de la disposition attaquée, mentionnés en B.1.3, cette somme correspond aux charges de personnel résiduelles du SPF Economie, après la suppression du Fonds Jeux de hasard auprès de ce service.

B.23.2. Comme il est dit en B.6, le Fonds « Jeux de hasard » du budget du SPF Economie avait été conçu comme un instrument pour financer les contrôles d'agréation de modèle et les contrôles subséquents menés auprès des établissements de jeux de hasard. L'article 26 de la loi-programme (I) du 26 décembre 2015 a abrogé ce Fonds parce que les contrôles précités ont été confiés à la Commission des jeux de hasard.

B.23.3. L'étendue du montant temporairement réaffecté par la disposition attaquée n'est pas à ce point considérable qu'il faut en déduire que les contributions dues par les établissements de jeux de hasard ne peuvent plus être qualifiées de rétribution.

En désaffectant les moyens disponibles du fonds de la Commission des jeux de hasard jusqu'à concurrence de 90 000 euros et en les ajoutant aux ressources générales du Trésor, le législateur fédéral ne viole donc pas les normes de référence mentionnées en B.15 ».

B.9.3. Il en ressort que la Cour a estimé que la réaffectation, en ce qui concerne l'année budgétaire 2018, des moyens du fonds de la Commission des jeux de hasard à concurrence d'un montant de 290 000 euros n'a pas eu pour effet d'empêcher la qualification comme « rétribution » des contributions dues par les établissements de jeux de hasard.

B.10.1. Quant à la réaffectation, en ce qui concerne l'année budgétaire 2021, des moyens du fonds de la Commission des jeux de hasard à concurrence d'un montant de 870 000 euros, les travaux préparatoires de la loi du 22 décembre 2020Documents pertinents retrouvés type loi prom. 22/12/2020 pub. 29/12/2020 numac 2020044220 source service public federal strategie et appui Loi contenant le budget général des dépenses pour l'année budgétaire 2021 fermer mentionnent : « Cette disposition permet de désaffecter 870 000 EUR des recettes relatives aux rétributions des licences des jeux de hasard pour compenser les dépenses dans le cadre de la lutte contre le surendettement à charge des crédit[s] normaux du SPF Economie suite à l'article 20 et 20bis de la loi du 5 juillet 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/07/1998 pub. 07/10/1998 numac 1998003328 source ministere des finances Loi contenant le deuxième ajustement du Budget général des dépenses de l'année budgétaire 1998 type loi prom. 05/07/1998 pub. 31/07/1998 numac 1998011215 source ministere des affaires economiques Loi relative au règlement collectif de dettes et à la possibilité de vente de gré à gré des biens immeubles saisis fermer au règlement collectif de dettes et à la possibilité de vente de gré à gré des biens immeubles saisis et les charges de personnel résiduelles du SPF Economie après la suppression du Fonds Jeux de hasard auprès de ce SPF. Ce montant de 870 000 EUR comprend la compensation pour les années 2019 à 2021 inclus (290 000 EUR sur base annuelle) » (Doc. parl., Chambre, 2020-2021, DOC 55-1578/001, p. 27).

B.10.2. Il en ressort que la réaffectation, en ce qui concerne l'année budgétaire 2021, des moyens du fonds de la Commission des jeux de hasard est dictée par les mêmes motifs que la réaffectation des moyens pour l'année budgétaire 2018. Il en ressort également que le montant de 870 000 euros doit être considéré comme une compensation des dépenses de l'autorité fédérale y afférentes pour les années 2019, 2020 et 2021, à concurrence d'un montant de 290 000 euros par an.

B.11. Compte tenu de ces considérations, la réaffectation, par l'article 2.12.7 de la loi du 22 décembre 2020Documents pertinents retrouvés type loi prom. 22/12/2020 pub. 29/12/2020 numac 2020044220 source service public federal strategie et appui Loi contenant le budget général des dépenses pour l'année budgétaire 2021 fermer, des moyens du fonds de la Commission des jeux de hasard n'est pas, pour les mêmes motifs que ceux qui sont mentionnés dans l'arrêt n° 3/2020, de nature à empêcher la qualification comme « rétribution » des contributions dues par les établissements de jeux de hasard.

B.12. Eu égard notamment à ce qui précède, le premier moyen n'est pas fondé, pour les mêmes motifs que ceux qui sont mentionnés dans les arrêts nos 72/2019 et 156/2019.

Quant au deuxième moyen B.13. Le deuxième moyen est pris de la violation du principe de proportionnalité et des articles 49 et 56 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (ci-après : le TFUE).

B.14.1. En vertu de l'article 142, alinéa 2, de la Constitution et de l'article 1er de la loi spéciale du 6 janvier 1989, la Cour est compétente pour statuer sur les recours en annulation d'une loi, d'un décret ou d'une règle visée à l'article 134 de la Constitution pour cause de violation des règles qui sont établies par la Constitution ou en vertu de celle-ci pour déterminer les compétences respectives de l'autorité fédérale, des communautés et des régions et pour cause de violation des articles du titre II (« Des Belges et de leurs droits ») et des articles 143, § 1er, 170, 172 et 191 de la Constitution.

B.14.2. La Cour n'est donc pas compétente pour contrôler des normes législatives directement au regard du principe de proportionnalité et des articles 49 et 56 du TFUE. B.15. Le deuxième moyen n'est pas recevable.

Quant au troisième moyen B.16. Le troisième moyen est pris de la violation du principe de proportionnalité et des articles 49 et 56 du TFUE, ainsi que de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution, en ce qu'en confirmant l'article 1er, § 6, alinéa 1er, de l'arrêté royal du 28 janvier 2021, la loi attaquée soumet les exploitants d'établissements de jeux de hasard au paiement d'une contribution annuelle qui ne tient pas compte de la durée de l'exploitation de l'établissement.

B.17. Selon l'article 1er, § 6, alinéa 1er, de l'arrêté royal du 28 janvier 2021, confirmé par la loi attaquée, les rétributions sont payées une seule fois par an pour les titulaires d'une licence des classes A, A+, B, B+, E, F1, F1+ et G, quelle que soit la durée de l'exploitation et ce, pour toute la période de fonctionnement à venir de la Commission, qui correspond à une année civile, et le montant des rétributions est fixé chaque année.

B.18. Les parties requérantes font valoir que l'on n'aperçoit pas clairement comment l'article 1er, § 6, alinéa 1er, de l'arrêté royal du 28 janvier 2021 doit être interprété si un établissement de jeux de hasard est exploité par deux entreprises successives pendant l'année civile 2021. Selon elles, la question qui se pose en particulier est celle de savoir si, en pareil cas, la contribution doit être payée par la seule entreprise qui a exploité l'établissement en premier ou par les deux entreprises. Elles allèguent en substance que, dans les deux interprétations, l'article attaqué est contraire aux normes de référence invoquées au moyen.

B.19. Le principe d'égalité et de non-discrimination n'exclut pas qu'une différence de traitement soit établie entre des catégories de personnes, pour autant qu'elle repose sur un critère objectif et qu'elle soit raisonnablement justifiée. Ce principe s'oppose, par ailleurs, à ce que soient traitées de manière identique, sans qu'apparaisse une justification raisonnable, des catégories de personnes se trouvant dans des situations qui, au regard de la mesure critiquée, sont essentiellement différentes.

L'existence d'une telle justification doit s'apprécier en tenant compte du but et des effets de la mesure critiquée ainsi que de la nature des principes en cause; le principe d'égalité et de non-discrimination est violé lorsqu'il est établi qu'il n'existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.

B.20.1. Dans le cas d'une rétribution, qui a un caractère purement indemnitaire et qui requiert l'existence d'un rapport raisonnable entre le coût ou la valeur du service fourni et le montant dû par le redevable, il appartient en règle au législateur de préciser les catégories de redevables et de déterminer les modalités du paiement, compte tenu de l'objectif de la rétribution concernée et dans le respect du principe constitutionnel d'égalité et de non-discrimination.

B.20.2. Etant donné que, comme il est dit en B.1.2, les rétributions prévues dans la loi attaquée visent à financer l'intégralité des frais de fonctionnement, de personnel et d'installation de la Commission des jeux de hasard et de son secrétariat, le législateur a pu raisonnablement considérer que l'exploitant d'un établissement de jeux de hasard est tenu de payer une contribution annuelle, quelle que soit la durée de l'exploitation et pour toute l'année de fonctionnement à venir. La circonstance que l'exploitation d'un établissement de jeux de hasard ne coïncide pas avec toute la période de fonctionnement ne saurait à elle seule permettre de déduire que la rétribution ne serait plus raisonnablement proportionnée au coût ou à la valeur des services fournis par la Commission des jeux de hasard.

B.21. Le moyen, pris de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison ou non avec le principe de proportionnalité et avec les articles 49 et 56 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, n'est pas fondé.

Quant à la demande d'octroi d'une indemnité de procédure B.22. Les parties requérantes demandent à la Cour de condamner la partie défenderesse au paiement d'une indemnité de procédure.

B.23.1. Ni les dispositions de la loi spéciale du 6 janvier 1989 ni aucune autre disposition ne confèrent à la Cour le pouvoir de condamner une partie au paiement d'une indemnité de procédure.

B.23.2. La demande est rejetée.

Par ces motifs, la Cour rejette le recours.

Ainsi rendu en langue néerlandaise, en langue française et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 7 juillet 2022.

Le greffier, Le président, P.-Y. Dutilleux L. Lavrysen

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