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Arrêt
publié le 24 octobre 2022

Extrait de l'arrêt n° 76/2022 du 9 juin 2022 Numéro du rôle : 7404 En cause : le recours en annulation de la loi du 14 novembre 2019 « modifiant la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale en vue de sup La Cour constitutionnelle, composée des présidents P. Nihoul et L. Lavrysen, et des juges J.-P. (...)

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Extrait de l'arrêt n° 76/2022 du 9 juin 2022 Numéro du rôle : 7404 En cause : le recours en annulation de la loi du 14 novembre 2019Documents pertinents retrouvés type loi prom. 14/11/2019 pub. 20/12/2019 numac 2019015803 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale en vue de supprimer la prescription des infractions sexuelles graves commises sur des mineurs type loi prom. 14/11/2019 pub. 27/05/2022 numac 2022040730 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale en vue de supprimer la prescription des infractions sexuelles graves commises sur des mineurs. - Traduction allemande fermer « modifiant la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale en vue de supprimer la prescription des infractions sexuelles graves commises sur des mineurs » et de la loi du 5 décembre 2019Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/12/2019 pub. 20/12/2019 numac 2019015802 source service public federal justice Loi modifiant l'article 21 du titre préliminaire du Code de procédure pénale type loi prom. 05/12/2019 pub. 27/05/2022 numac 2022040729 source service public federal justice Loi modifiant l'article 21 du titre préliminaire du Code de procédure pénale. - Traduction allemande fermer « modifiant l'article 21 du titre préliminaire du Code de procédure pénale », introduit par l'ASBL « Ligue des droits humains » et l'ASBL « Association Syndicale des Magistrats ».

La Cour constitutionnelle, composée des présidents P. Nihoul et L. Lavrysen, et des juges J.-P. Moerman, T. Giet, J. Moerman, M. Pâques, Y. Kherbache, T. Detienne, D. Pieters, S. de Bethune et E. Bribosia, et, conformément à l'article 60bis de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, de la juge émérite R. Leysen, assistée du greffier F. Meersschaut, présidée par le président P. Nihoul, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet du recours et procédure Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 16 juin 2020 et parvenue au greffe le 18 juin 2020, un recours en annulation de la loi du 14 novembre 2019Documents pertinents retrouvés type loi prom. 14/11/2019 pub. 20/12/2019 numac 2019015803 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale en vue de supprimer la prescription des infractions sexuelles graves commises sur des mineurs type loi prom. 14/11/2019 pub. 27/05/2022 numac 2022040730 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale en vue de supprimer la prescription des infractions sexuelles graves commises sur des mineurs. - Traduction allemande fermer « modifiant la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale en vue de supprimer la prescription des infractions sexuelles graves commises sur des mineurs » et de la loi du 5 décembre 2019Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/12/2019 pub. 20/12/2019 numac 2019015802 source service public federal justice Loi modifiant l'article 21 du titre préliminaire du Code de procédure pénale type loi prom. 05/12/2019 pub. 27/05/2022 numac 2022040729 source service public federal justice Loi modifiant l'article 21 du titre préliminaire du Code de procédure pénale. - Traduction allemande fermer « modifiant l'article 21 du titre préliminaire du Code de procédure pénale » (publiées au Moniteur belge du 20 décembre 2019) a été introduit par l'ASBL « Ligue des droits humains » et l'ASBL « Association Syndicale des Magistrats », assistées et représentées par Me A. Verhoustraeten, avocat au barreau de Bruxelles. (...) II. En droit (...) Quant aux dispositions attaquées et à leur contexte B.1.1. Le recours en annulation introduit par l'ASBL « Ligue des droits humains » et l'ASBL « Association Syndicale des Magistrats » porte sur deux lois qui ont pour objet de modifier le régime de la prescription de l'action publique en ce qui concerne certaines infractions pénales, en particulier les infractions à caractère sexuel commises sur des personnes mineures, qui sont rendues imprescriptibles.

B.1.2. Les articles 2 et 3 de la loi du 14 novembre 2019Documents pertinents retrouvés type loi prom. 14/11/2019 pub. 20/12/2019 numac 2019015803 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale en vue de supprimer la prescription des infractions sexuelles graves commises sur des mineurs type loi prom. 14/11/2019 pub. 27/05/2022 numac 2022040730 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale en vue de supprimer la prescription des infractions sexuelles graves commises sur des mineurs. - Traduction allemande fermer « modifiant la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale en vue de supprimer la prescription des infractions sexuelles graves commises sur des mineurs » (ci-après : la loi du 14 novembre 2019Documents pertinents retrouvés type loi prom. 14/11/2019 pub. 20/12/2019 numac 2019015803 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale en vue de supprimer la prescription des infractions sexuelles graves commises sur des mineurs type loi prom. 14/11/2019 pub. 27/05/2022 numac 2022040730 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale en vue de supprimer la prescription des infractions sexuelles graves commises sur des mineurs. - Traduction allemande fermer) disposent : «

Art. 2.Dans l'article 21, alinéa 1er, de la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale, remplacé par la loi du 5 février 2016 et modifié en dernier lieu par la loi du 11 juillet 2018, les modifications suivantes sont apportées : a) les mots ' Sauf en ce qui concerne les infractions définies dans les articles 136bis, 136ter et 136quater du Code pénal et ' sont abrogés;b) dans le 1°, deuxième tiret, les mots ' 376, alinéa 1er, ' sont abrogés;c) dans le 2°, le deuxième tiret est abrogé.

Art. 3.L'article 21bis de la même loi, inséré par la loi du 13 avril 1995Documents pertinents retrouvés type loi prom. 13/04/1995 pub. 02/07/2009 numac 2009000438 source service public federal interieur Loi contenant des dispositions en vue de la répression de la traite et du trafic des êtres humains. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, remplacé par la loi du 5 février 2016 et modifié par la loi du 5 mai 2019, est remplacé par ce qui suit : '

Art. 21bis.L'action publique ne se prescrit pas : 1° dans les cas visés aux articles 136bis, 136ter et 136quater du Code pénal;2° dans les cas visés aux articles 371/1 à 377, 377quater, 379, 380, 383bis, § 1er, 409 et 433quinquies, § 1er, alinéa 1er, 1°, du Code pénal, ni en cas de tentative de commission de cette dernière infraction si elle visait une personne âgée de moins de dix-huit ans ' ». B.1.3. Les articles 2 et 3 de la loi du 5 décembre 2019Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/12/2019 pub. 20/12/2019 numac 2019015802 source service public federal justice Loi modifiant l'article 21 du titre préliminaire du Code de procédure pénale type loi prom. 05/12/2019 pub. 27/05/2022 numac 2022040729 source service public federal justice Loi modifiant l'article 21 du titre préliminaire du Code de procédure pénale. - Traduction allemande fermer « modifiant l'article 21 du titre préliminaire du Code de procédure pénale » (ci-après : la loi du 5 décembre 2019Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/12/2019 pub. 20/12/2019 numac 2019015802 source service public federal justice Loi modifiant l'article 21 du titre préliminaire du Code de procédure pénale type loi prom. 05/12/2019 pub. 27/05/2022 numac 2022040729 source service public federal justice Loi modifiant l'article 21 du titre préliminaire du Code de procédure pénale. - Traduction allemande fermer) disposent : «

Art. 2.L'article 21, alinéa 1er, 2°, de la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale, remplacé par la loi du 5 février 2016 et modifié en dernier lieu par la loi du 14 novembre 2019Documents pertinents retrouvés type loi prom. 14/11/2019 pub. 20/12/2019 numac 2019015803 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale en vue de supprimer la prescription des infractions sexuelles graves commises sur des mineurs type loi prom. 14/11/2019 pub. 27/05/2022 numac 2022040730 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale en vue de supprimer la prescription des infractions sexuelles graves commises sur des mineurs. - Traduction allemande fermer, est remplacé par ce qui suit : ' 2° après quinze ans s'il s'agit de l'un des crimes visés au 1°, second tiret, ou à l'article 376, alinéa 1er, du Code pénal, s'il a été commis sur une personne âgée d'au moins dix-huit ans; '.

Art. 3.La présente loi entre en vigueur le même jour que la loi du 14 novembre 2019Documents pertinents retrouvés type loi prom. 14/11/2019 pub. 20/12/2019 numac 2019015803 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale en vue de supprimer la prescription des infractions sexuelles graves commises sur des mineurs type loi prom. 14/11/2019 pub. 27/05/2022 numac 2022040730 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale en vue de supprimer la prescription des infractions sexuelles graves commises sur des mineurs. - Traduction allemande fermer modifiant la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale en vue de supprimer la prescription des infractions sexuelles graves commises sur des mineurs ».

B.1.4. Les deux lois attaquées sont entrées en vigueur le 30 décembre 2019.

B.2.1. Tel qu'il a été remplacé par l'article 3 de la loi du 14 novembre 2019Documents pertinents retrouvés type loi prom. 14/11/2019 pub. 20/12/2019 numac 2019015803 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale en vue de supprimer la prescription des infractions sexuelles graves commises sur des mineurs type loi prom. 14/11/2019 pub. 27/05/2022 numac 2022040730 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale en vue de supprimer la prescription des infractions sexuelles graves commises sur des mineurs. - Traduction allemande fermer, l'article 21bis de la loi du 17 avril 1878 « contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale » dispose : « L'action publique ne se prescrit pas : 1° dans les cas visés aux articles 136bis, 136ter et 136quater du Code pénal;2° dans les cas visés aux articles 371/1 à 377, 377quater, 379, 380, 383bis, § 1er, 409 et 433quinquies, § 1er, alinéa 1er, 1°, du Code pénal, ni en cas de tentative de commission de cette dernière infraction si elle visait une personne âgée de moins de dix-huit ans ». Il ressort du 2°, nouveau, de cette disposition, qui fait l'objet du recours en annulation, qu'un certain nombre d'infractions pénales sont désormais imprescriptibles si elles sont commises sur une personne mineure. Il s'agit du voyeurisme (article 371/1 du Code pénal), de l'attentat à la pudeur et du viol (articles 372 à 377 du Code pénal), de l'infraction de grooming ou de cyberprédation (article 377quater du Code pénal), de la corruption de la jeunesse et de la prostitution (articles 379 et 380 du Code pénal), de la production et de la distribution de matériel pédopornographique (article 383bis, § 1er, du Code pénal), de la mutilation génitale féminine (article 409 du Code pénal) et de la traite des êtres humains à des fins d'exploitation de la prostitution ou d'autres formes d'exploitation sexuelle (article 433quinquies, § 1er, alinéa 1er, 1°, du Code pénal).

B.2.2. Avant l'entrée en vigueur de la loi du 14 novembre 2019Documents pertinents retrouvés type loi prom. 14/11/2019 pub. 20/12/2019 numac 2019015803 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale en vue de supprimer la prescription des infractions sexuelles graves commises sur des mineurs type loi prom. 14/11/2019 pub. 27/05/2022 numac 2022040730 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale en vue de supprimer la prescription des infractions sexuelles graves commises sur des mineurs. - Traduction allemande fermer, qui rend ces infractions imprescriptibles, un délai de prescription de vingt ans était applicable au viol ou à l'attentat à la pudeur ayant causé la mort de la victime et un délai de prescription de quinze ans s'appliquait à toutes les autres infractions à caractère sexuel. Ce délai de prescription prenait en outre cours le jour où la victime atteignait l'âge de dix-huit ans, ou, en cas d'infraction collective, le jour où la plus jeune des victimes atteignait l'âge de dix-huit ans, sauf si le délai qui s'était écoulé entre deux de ces infractions consécutives était supérieur au délai de prescription.

B.3. Les lois attaquées sont issues de propositions de loi et n'ont pas fait l'objet d'avis du Conseil d'Etat. Leurs auteurs justifient l'imprescriptibilité pénale des infractions visées en B.2.1 en ces termes : « Par le passé, la question des délais de prescription a été maintes fois débattue dans cette enceinte dans le cadre des dossiers de pédophilie. A la suite de la création de la Commission spéciale relative au traitement d'abus sexuels et de faits de pédophilie dans une relation d'autorité, en particulier au sein de l'Eglise [ci-après : la Commission Adriaenssens], en 2010, ce débat est revenu au coeur de l'actualité. Diverses propositions ont été déposées pour prolonger le délai de prescription.

La plus poussée émanait du député Landuyt (DOC 53 0314/001) et avait pour objectif de rendre imprescriptibles les faits de pédophilie.

Nous sommes évidemment d'accord qu'il faut que les victimes d'abus fassent une déclaration le plus rapidement possible. C'est la meilleure garantie de (pouvoir) récolter des indices et des preuves, d'identifier les auteurs et de les traduire en justice. Il est dès lors absolument nécessaire de continuer à miser au maximum sur la sensibilisation des victimes en ce qui concerne cette première condition primordiale.

Dans la pratique, force est toutefois de constater que dans un nombre beaucoup trop élevé de cas, la déclaration n'arrive jamais ou n'arrive que longtemps après l'abus. Toutes sortes de raisons (proximité de la famille par rapport à l'auteur, peur de dénoncer les faits en raison de l'influence de l'auteur ou à cause du traumatisme) font en sorte qu'il est souvent impossible pour les victimes de tels abus de porter plainte immédiatement après les faits.

Par ailleurs, il y a lieu selon nous de se demander s'il existe le moindre rapport entre la propension à dénoncer les faits, d'une part, et le délai de prescription, d'autre part.

C'est ce qui est notamment ressorti du rapport final de la commission Adriaenssens lors de la commission spéciale : une large majorité déclare en effet déplorer l'existence d'un délai de prescription. Et dans l'opinion publique, le fait qu'après un certain temps, l'auteur d'abus ne peut plus être poursuivi - et que la tranquillité lui est ainsi offerte - a clairement donné lieu à un débat de société.

Récemment encore, une victime d'abus commis alors qu'elle était enfant a déclaré ne pas comprendre que les faits puissent être prescrits.

Alors que le simple écoulement du temps confère en quelque sorte ' l'absolution ' à l'auteur, ce n'est pas du tout le cas pour la victime qui portera et devra métaboliser, durant le reste de ses jours, les séquelles - tant physiques que psychiques - de l'atteinte particulièrement grave portée à son intégrité.

Nous avons conscience qu'il ne sera plus possible de trouver des preuves des années après les faits et qu'une action juridique aboutira à un non-lieu faute de preuves. Quoi qu'il en soit, nous estimons que la possibilité de pouvoir encore recourir aux tribunaux revêt une importance symbolique, non seulement pour la société, mais surtout pour le processus d'acceptation des victimes.

La faculté de recourir à tout moment à la justice est conforme à l'essence du droit qui est de rendre justice aux victimes d'infractions graves à caractère sexuel.

L'instauration de l'imprescriptibilité de l'action publique concernant les infractions graves à caractère sexuel, qui doit permettre aux victimes de disposer du temps nécessaire pour dénoncer les faits, ne porte pas atteinte aux droits et libertés fondamentaux garantis par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

En effet, selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, le point de départ du délai raisonnable est le moment ou une accusation est portée. En l'espèce, ce délai commence donc à courir au plus tôt au moment de la plainte de la victime ou de la dénonciation des faits au procureur du Roi. De plus, l'article 21ter de la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale offre au juge la possibilité de prononcer la condamnation par simple déclaration de culpabilité ou de prononcer une peine inférieure à la peine minimale prévue par la loi, et ce, si la durée des poursuites pénales dépasse le délai raisonnable.

A la lumière de ce qui précède, nous estimons que la prescription en matière d'infractions graves a caractère sexuel n'est plus justifiée d'un point de vue social. Nous proposons, par conséquent, d'ajouter l'imprescriptibilité des infractions énumérées dans l'article 21bis de la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale à la liste des infractions imprescriptibles » (Doc. parl., Chambre, 2019, DOC 55-0439/001, pp. 3-5).

Quant à l'intérêt B.4.1. Lorsqu'une association sans but lucratif qui n'invoque pas son intérêt personnel agit devant la Cour, il est requis que son but statutaire soit d'une nature particulière et, dès lors, distinct de l'intérêt général; qu'elle défende un intérêt collectif; que la norme attaquée soit susceptible d'affecter son but; qu'il n'apparaisse pas, enfin, que ce but n'est pas ou n'est plus réellement poursuivi.

B.4.2. Selon ses statuts, la deuxième partie requérante, l'ASBL « Ligue des droits humains », a pour objet de « combattre l'injustice et toute atteinte arbitraire aux droits d'un individu ou d'une collectivité. Elle défend les principes d'égalité, de liberté, de solidarité et d'humanisme sur lesquels se fondent les sociétés démocratiques qui ont été proclamés notamment par la Constitution belge et la [...] Convention européenne pour la sauvegarde des droits de l'Homme [...] ».

B.4.3. Il peut être admis que des dispositions qui suppriment le délai de prescription en matière pénale pour certaines catégories de justiciables sont d'une nature telle qu'elles peuvent affecter le but statutaire de l'association précitée.

B.4.4. Il résulte de ce qui précède que la première partie requérante a intérêt au recours. Dès lors que celle-ci a intérêt au recours, la Cour ne doit pas examiner si l'autre partie requérante justifie également de l'intérêt requis.

Quant au fond En ce qui concerne le premier moyen B.5. Les parties requérantes prennent un premier moyen de la violation, par les lois attaquées, des articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, en ce qu'elles feraient naître plusieurs différences de traitement qui entraîneraient une violation du droit à un procès équitable. Les parties requérantes soulignent une première différence de traitement entre la personne suspectée d'une infraction sexuelle commise sur une personne mineure et la personne suspectée de la même infraction commise sur une personne majeure. En ce qui concerne la deuxième différence de traitement, les parties requérantes comparent la personne suspectée d'une infraction sexuelle commise sur un mineur et la personne suspectée d'une infraction non sexuelle commise sur un mineur. Dans le cadre de la troisième différence de traitement soulevée, elles comparent la victime mineure d'une infraction sexuelle et la victime majeure de la même infraction.

Enfin, en ce qui concerne la quatrième différence de traitement soulevée, elles comparent la victime mineure d'une infraction sexuelle et la victime mineure d'une infraction non sexuelle.

B.6. Le principe d'égalité et de non-discrimination n'exclut pas qu'une différence de traitement soit établie entre des catégories de personnes, pour autant qu'elle repose sur un critère objectif et qu'elle soit raisonnablement justifiée.

L'existence d'une telle justification doit s'apprécier en tenant compte du but et des effets de la mesure critiquée ainsi que de la nature des principes en cause; le principe d'égalité et de non-discrimination est violé lorsqu'il est établi qu'il n'existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.

B.7. Il n'existe pas de principe général qui garantisse la prescription de l'action publique. Sous la réserve qu'il ne peut prendre des mesures qui soient manifestement déraisonnables, le législateur démocratiquement élu peut fixer lui-même la politique répressive, qui englobe l'appréciation de la gravité d'un manquement et la sévérité avec laquelle ce manquement peut être puni, y compris les possibilités d'individualisation de la peine et les effets et actions qui y sont attachés, mais également la fixation de différents délais de prescription en fonction de l'infraction considérée. Le législateur peut aussi se montrer sévère dans des matières dans lesquelles les infractions peuvent porter gravement atteinte aux droits fondamentaux des individus et aux intérêts de la collectivité.

Compte tenu de la marge d'appréciation importante dont il dispose en la matière, le législateur, lorsqu'il distingue le régime de prescription applicable selon les infractions concernées, peut avoir égard à un critère autre que celui de la sévérité de la peine que l'auteur peut encourir, pour autant que le critère retenu soit objectif et pertinent et que les droits des personnes concernées ne fassent pas l'objet d'une restriction disproportionnée.

B.8. Les différences de traitement mentionnées en B.5 sont fondées sur un double critère : le caractère sexuel des infractions et la minorité de la victime. Ce double critère est objectif.

B.9.1. Il ressort des travaux préparatoires mentionnés en B.3 que les lois attaquées visent à lutter contre l'impunité des auteurs d'infractions sexuelles commises sur des personnes mineures, à protéger ces dernières en leur laissant disposer du temps nécessaire pour dénoncer les faits et à exercer une pression accrue sur les auteurs de ces actes afin d'éviter qu'ils en commettent ou qu'ils récidivent. Compte tenu de la vulnérabilité de la catégorie des victimes visées, les objectifs poursuivis, notamment en vue d'offrir à ces victimes l'accès à un tribunal nonobstant l'écoulement du temps, sont légitimes.

B.9.2. Contrairement à ce que les parties requérantes soutiennent, le caractère partiellement symbolique des objectifs poursuivis par le législateur ne suffit pas à conclure à leur illégitimité. Il en va de même en ce qui concerne l'éventuelle ineffectivité des poursuites dans le futur. Outre que cet argument repose sur des conjectures impossibles à vérifier, l'efficacité d'une loi pénale mesurée à l'aune de son application par les juridictions et des condamnations prononcées ne constitue pas en soi une condition de sa compatibilité avec les dispositions constitutionnelles et conventionnelles citées au moyen. La possibilité illimitée dans le temps de poursuivre un comportement infractionnel parce qu'il est jugé par le législateur comme étant incompatible avec les valeurs fondamentales de la démocratie peut aussi avoir un effet éducatif et préventif. La recherche de cet effet, par définition non mesurable objectivement, peut en principe justifier l'adoption de mesures de nature pénale.

B.10.1. Il convient d'examiner si le double critère de distinction mentionné en B.8 est pertinent au regard des objectifs poursuivis par le législateur.

B.10.2. Les personnes mineures qui sont victimes d'une infraction à caractère sexuel se trouvent dans une situation spécifique, qui, par comparaison avec la situation de personnes majeures victimes d'une infraction à caractère sexuel ou avec la situation de personnes mineures victimes de toute autre infraction, est unique à bien des égards. Dans les travaux préparatoires, il est relevé qu'il existe une « loi du silence », qui touche particulièrement les enfants victimes d'infractions à caractère sexuel : « la loi du silence s'applique tout particulièrement aux abus sexuels subis durant l'enfance. Le silence est sans doute difficile à comprendre pour les personnes qui n'ont pas subi de tels abus, mais pas pour les nombreuses victimes. [...], souvent, l'enfant abusé n'apprend à parler de ce qu'il a subi que plusieurs décennies plus tard. [...] Beaucoup estiment que les victimes doivent être incitées à dénoncer l'abus rapidement et que la suppression du délai de prescription diminue la pression exercée pour qu'elles le fassent. Le travail qu'elle a effectué, en tant que psychologue et sexologue, avec des victimes d'infractions sexuelles tant en Belgique qu'à l'étranger lui a toutefois clairement montré que cette approche est diamétralement opposée au ressenti des victimes. [...] 90 % des victimes ne déclarent pas l'abus; ce chiffre est encore plus élevé chez les enfants, ce qui est dû aux manipulations des auteurs. La société ne peut pas contribuer à cette situation » (Doc. parl., Chambre, 2019-2020, DOC 55-0439/003, pp. 8-9).

Ce silence est précisément lié au jeune âge des victimes et à l'aspect traumatisant d'une atteinte à leur intégrité sexuelle.

De plus, ces situations sont particulières, en ce que l'auteur de l'infraction à caractère sexuel sur une personne mineure entretient, dans une grande proportion des cas, une relation d'ascendance ou d'autorité sur sa victime.

B.10.3. La spécificité de la catégorie des infractions sexuelles est reconnue par la Cour européenne des droits de l'homme, qui a relevé en la matière une obligation positive dans le chef des Etats membres d'organiser une pénalisation effective (CEDH, 15 mars 2016, M.G.C. c.

Roumanie, § 59; 24 janvier 2012, P.M. c. Bulgarie, § 63; 4 décembre 2003, M.C. c. Bulgarie, § 166).

B.10.4. Les enfants sont considérés de longue date par la Cour européenne des droits de l'homme comme étant particulièrement vulnérables et la protection que leur offrent les Etats membres contre les ingérences graves dans leur intégrité personnelle doit être effective (CEDH, 15 mars 2016, M.G.C. c. Roumanie, § 56; 10 mai 2012, R.I.P. et D.L.P. c. Roumanie, § 58; 15 novembre 2011, M. P. et autres c. Bulgarie, § 108;3 juin 2004, BatCi et autres c. Turquie, § 133).

La Convention exige que l'intérêt supérieur de l'enfant soit respecté, de même que le droit à la dignité humaine et à l'intégrité psychologique requiert une attention particulière lorsqu'un enfant est victime de violence (CEDH, 20 mars 2012, C.A.S. et C.S. c. Roumanie, § 82).

B.10.5. La Cour européenne des droits de l'homme lie d'ailleurs les deux critères mentionnés en B.8. Dès 1996, elle a constaté qu'il est pris « de plus en plus conscience depuis quelques années de tous les problèmes que causent les sévices sexuels à enfants [sic] et de leurs effets psychologiques sur les victimes » et qu' « il est possible que des Etats membres du Conseil de l'Europe aient, dans un proche avenir, à amender les règles sur la prescription des actions qu'ils appliquent afin d'édicter des dispositions spéciales pour ce groupe de plaignants » (CEDH, 22 octobre 1996, Stubbings et autres c. Royaume-Uni, § 56).

De même, elle a jugé qu'« une dissuasion effective contre un acte aussi grave que le viol, qui met en jeu des valeurs fondamentales et des aspects essentiels de la vie privée, appelle des dispositions pénales efficaces. Les enfants et autres personnes vulnérables, en particulier, doivent bénéficier d'une protection effective » (CEDH, 4 décembre 2003, M.C. c. Bulgarie, § 150).

B.10.6. L'imprescriptibilité des infractions visées par les lois attaquées constitue dès lors une mesure pertinente pour permettre à la justice de traiter ces affaires sans pâtir d'un délai de prescription qui, compte tenu de la situation particulière des victimes et du délai parfois considérable qui peut leur être nécessaire pour prendre conscience de la gravité des faits qu'elles ont subis et pour les dénoncer, est très régulièrement dépassé pour ce type de faits.

B.11. Il appartient encore à la Cour d'examiner si les lois attaquées ne produisent pas des effets disproportionnés à l'égard de certaines catégories de personnes, en particulier en ce qui concerne le droit à un procès équitable des personnes suspectées de ces infractions.

B.12.1. La prescription vise tant à protéger la personne suspectée d'une infraction contre des poursuites tardives qu'à préserver l'ordre social en déterminant le moment à partir duquel la sécurité juridique et la paix sociale doivent l'emporter sur la poursuite des infractions.

B.12.2. Ni la Constitution ni la Convention européenne des droits de l'homme ne prévoient toutefois une obligation pour les Etats parties de mettre en place un système de prescription en matière pénale.

Si elle souligne l'importance que de tels délais peuvent revêtir, la Cour européenne des droits de l'homme raisonne, en la matière, au regard des autres droits tirés de la Convention. Elle a notamment jugé : « 50. La Cour rappelle que les délais légaux de péremption ou de prescription, qui figurent parmi les restrictions légitimes au droit a un tribunal, ont plusieurs finalités importantes : garantir la sécurité juridique en fixant un terme aux actions, mettre les défendeurs potentiels à l'abri de plaintes tardives peut-être difficiles a contrer, et empêcher l'injustice qui pourrait se produire si les tribunaux étaient appelés a se prononcer sur des événements survenus loin dans le passe à partir d'éléments de preuve auxquels on ne pourrait plus ajouter foi et qui seraient incomplets en raison du temps écoulé (voir, par exemple, Stubbings et autres c. Royaume-Uni, 22 octobre 1996, § § 51-52, Recueil des arrêts et décisions 1996-IV, Stagno c. Belgique, no 1062/07, § 26, 7 juillet 2009, et Howald Moor et autres c. Suisse, nos 52067/10 et 41072/11, § § 71-72, 11 mars 2014). [...] 56. On est donc en l'espèce dans une situation où un droit qu'une personne tire de la Convention se trouve confronté à un droit qu'une autre personne tire également de la Convention : le droit à la sécurité juridique de la société requérante d'un côté, et le droit à un tribunal de X de l'autre.57. Dans un tel cas de figure, la mise en balance des intérêts contradictoires des uns et des autres est difficile à faire, ce qui plaide en faveur de la reconnaissance d'une marge d'appréciation importante au bénéfice de l'État (voir, par exemple, mutatis mutandis, MGN Limited c.Royaume-Uni, n° 39401/04, § 142, 18 janvier 2011, et Ashby Donald et autres c. France, n° 36769/08, § 40, 10 janvier 2013).

S'agissant en particulier de la balance à faire dans le contexte de la prescription de l'action en réparation entre le droit d'accès à la justice de la victime et le droit à la sécurité juridique du défendeur, la Cour a par ailleurs souligne qu'en appliquant les règles de procédure pertinentes, les juridictions internes devaient éviter à la fois un excès de formalisme, qui porterait atteinte à l'équité de la procédure, et une souplesse excessive, qui aboutirait à supprimer les conditions de procédure établies par les lois (Esim, précité, § 21) » (CEDH, 13 février 2020, Sanofi Pasteur c.France, également dans l'arrêt CEDH, 9 janvier 2013, Oleksandr Volkov c. Ukraine, § 137).

B.13. Les lois attaquées ne produisent pas, en soi, des effets disproportionnés en ce qui concerne le droit à un procès équitable, puisqu'il est entendu que la suppression du délai de prescription de l'action publique ne pourra avoir pour effet ni de pallier d'éventuelles négligences de la part des autorités chargées de la poursuite de ces infractions, ni de dispenser le législateur de prendre les mesures législatives adéquates et de procurer à ces autorités les moyens nécessaires au bon accomplissement de leurs missions. De même, les autres garanties inhérentes au procès équitable, telles qu'elles sont notamment ancrées dans l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, ne disparaissent pas par la seule adoption des lois attaquées. Ainsi, les juridictions d'instruction et les juridictions de jugement qui constatent qu'en raison de l'écoulement du temps, l'administration de la preuve ou les droits de la défense du prévenu sont gravement et irrémédiablement affectés, de sorte qu'un procès pénal équitable n'est plus possible, constatent l'irrecevabilité de l'action publique. Même si le droit à un procès équitable n'est pas gravement et irrémédiablement affecté, la juridiction de jugement qui constate que l'administration de la preuve à charge ou à décharge est devenue impossible en raison de l'écoulement du temps doit en tirer les conséquences. Enfin, contrairement à ce que les parties requérantes soutiennent, la présomption d'innocence n'est pas non plus mise à mal par la seule mesure d'imprescriptibilité.

B.14. Le premier moyen n'est pas fondé.

En ce qui concerne le deuxième moyen B.15.1. Les parties requérantes prennent un deuxième moyen de la violation des articles 12 et 14 de la Constitution, lus en combinaison avec l'article 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, en ce que l'article 21bis, 2°, du titre préliminaire du Code de procédure pénale, tel qu'il a été modifié par la loi du 14 novembre 2019Documents pertinents retrouvés type loi prom. 14/11/2019 pub. 20/12/2019 numac 2019015803 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale en vue de supprimer la prescription des infractions sexuelles graves commises sur des mineurs type loi prom. 14/11/2019 pub. 27/05/2022 numac 2022040730 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale en vue de supprimer la prescription des infractions sexuelles graves commises sur des mineurs. - Traduction allemande fermer, serait ambigu et entaché de plusieurs erreurs.

B.15.2. Les parties requérantes visent spécifiquement, dans la version française de l'article 21bis, 2°, précité, la présence du pronom personnel « elle », erronément employé pour renvoyer au terme « cas », ainsi que l'absence d'une virgule entre les termes « dernière infraction » et « elle », qui pourraient faire comprendre que la condition de minorité de la victime ne concerne que la tentative d'infraction consacrée à l'article 433quinquies, § 1er, alinéa 1er, 1°, du Code pénal. Ces erreurs n'existent pas dans la version néerlandaise du même texte.

B.16.1. L'article 12, alinéa 2, de la Constitution dispose : « Nul ne peut être poursuivi que dans les cas prévus par la loi, et dans la forme qu'elle prescrit ».

B.16.2. En attribuant au pouvoir législatif la compétence pour déterminer dans quels cas des poursuites pénales sont possibles, l'article 12, alinéa 2, de la Constitution garantit à tout citoyen qu'aucun comportement ne sera punissable qu'en vertu de règles adoptées par une assemblée délibérante, démocratiquement élue.

En outre, le principe de légalité en matière pénale qui découle de la disposition constitutionnelle précitée procède de l'idée que la loi pénale doit être formulée en des termes qui permettent à chacun de savoir, au moment où il adopte un comportement, si celui-ci est punissable ou non. Il exige que le législateur indique, en des termes suffisamment précis, clairs et offrant la sécurité juridique, quels faits sont sanctionnés, afin, d'une part, que celui qui adopte un comportement puisse évaluer préalablement, de manière satisfaisante, quelle sera la conséquence pénale de ce comportement et afin, d'autre part, que ne soit pas laissé au juge un trop grand pouvoir d'appréciation.

Toutefois, le principe de légalité en matière pénale n'empêche pas que la loi attribue un pouvoir d'appréciation au juge. Il faut en effet tenir compte du caractère de généralité des lois, de la diversité des situations auxquelles elles s'appliquent et de l'évolution des comportements qu'elles répriment.

La condition qu'une infraction doit être clairement définie par la loi se trouve remplie lorsque le justiciable peut savoir, à partir du libellé de la disposition pertinente et, au besoin, à l'aide de son interprétation par les juridictions, quels actes et omissions engagent sa responsabilité pénale.

Ce n'est qu'en examinant une disposition pénale spécifique qu'il est possible de déterminer, en tenant compte des éléments propres aux infractions qu'elle entend réprimer, si les termes généraux utilisés par le législateur sont à ce point vagues qu'ils méconnaîtraient le principe de légalité en matière pénale.

B.17. Il ressort à suffisance du libellé de la loi du 14 novembre 2019Documents pertinents retrouvés type loi prom. 14/11/2019 pub. 20/12/2019 numac 2019015803 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale en vue de supprimer la prescription des infractions sexuelles graves commises sur des mineurs type loi prom. 14/11/2019 pub. 27/05/2022 numac 2022040730 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale en vue de supprimer la prescription des infractions sexuelles graves commises sur des mineurs. - Traduction allemande fermer, qui vise spécifiquement à supprimer la prescription « des infractions sexuelles graves commises sur des mineurs », ainsi que de la version néerlandaise du texte, que la condition de minorité de la victime est attachée à toutes les infractions énumérées à l'article 21bis, 2°, du titre préliminaire du Code de procédure pénale. Rien ne permet de supposer que les juridictions pourraient adopter une interprétation contraire.

B.18. Le deuxième moyen n'est pas fondé.

En ce qui concerne le troisième moyen B.19. Les parties requérantes prennent un troisième moyen de la violation, par les lois attaquées, des articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec le devoir de minutie et avec la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, en ce qu'il n'a pas été organisé de débat de qualité avant l'adoption des lois attaquées.

B.20. Sauf à l'égard des mécanismes de fédéralisme coopératif visés à l'article 30bis de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, la Cour n'est pas compétente pour contrôler le processus ou les modalités d'élaboration d'une loi.

B.21. Dès lors que le grief des parties requérantes porte sur l'absence d'un débat préalable à l'adoption des lois attaquées, le troisième moyen est irrecevable.

Par ces motifs, la Cour rejette le recours.

Ainsi rendu en langue française, en langue néerlandaise et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 9 juin 2022.

Le greffier, F. Meersschaut Le président, P. Nihoul

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