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Arrêt
publié le 16 mai 2022

Extrait de l'arrêt n° 133/2021 du 7 octobre 2021 Numéro du rôle : 7438 En cause : les questions préjudicielles relatives à l'article 348-11 de l'ancien Code civil, posées par la Cour de cassation. La Cour constitutionnelle, composée de après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles et procéd(...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 133/2021 du 7 octobre 2021 Numéro du rôle : 7438 En cause : les questions préjudicielles relatives à l'article 348-11 de l'ancien Code civil, posées par la Cour de cassation.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents L. Lavrysen et P. Nihoul, des juges J.-P. Moerman, R. Leysen, J. Moerman et Y. Kherbache, et, conformément à l'article 60bis de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, du président émérite F. Daoût, assistée du greffier F. Meersschaut, présidée par le président L. Lavrysen, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles et procédure Par arrêt du 7 septembre 2020, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 28 septembre 2020, la Cour de cassation a posé les questions préjudicielles suivantes : « L'article 348-11 du Code civil, tel qu'il a été modifié par l'article 8 de la loi du 20 février 2017Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/02/2017 pub. 22/03/2017 numac 2017011284 source service public federal justice Loi modifiant le Code civil, en ce qui concerne l'adoption type loi prom. 20/02/2017 pub. 22/03/2017 numac 2017011278 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 26 juin 1990 relative à la protection de la personne des malades mentaux fermer modifiant le Code civil, en ce qui concerne l'adoption, viole-t-il les articles 22 et 22bis de la Constitution, en ce que, sauf dans les cas fixés à l'alinéa 2, il n'autorise le juge de l'adoption à ne pas tenir compte du refus de la mère de l'enfant de consentir à l'adoption que si elle s'est désintéressée de son enfant ou en a compromis la santé, la sécurité ou la moralité, et en ce qu'il ne permet donc pas au juge de l'adoption d'écarter le refus de la mère de consentir à l'adoption, lorsque l'enfant a été placé peu après sa naissance auprès de la personne dont émane la demande d'adoption et qu'il a, depuis lors, longtemps grandi au sein de son ménage, parce que, dans ces circonstances, il ne serait pas dans l'intérêt de l'enfant de le soustraire à l'environnement dans lequel il grandit ? »; « L'article 348-11 du Code civil, tel qu'il a été modifié par l'article 8 de la loi du 20 février 2017Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/02/2017 pub. 22/03/2017 numac 2017011284 source service public federal justice Loi modifiant le Code civil, en ce qui concerne l'adoption type loi prom. 20/02/2017 pub. 22/03/2017 numac 2017011278 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 26 juin 1990 relative à la protection de la personne des malades mentaux fermer modifiant le Code civil, en ce qui concerne l'adoption, viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce qu'il distingue la situation dans laquelle un parent refuse de consentir à l'adoption de l'enfant, auquel cas le juge de l'adoption ne peut, en règle, apprécier l'intérêt de l'enfant, et la situation dans laquelle une autre personne qui est légalement tenue de consentir à l'adoption de l'enfant refuse de le faire, auquel cas le juge de l'adoption doit tenir compte de l'intérêt de l'enfant ? ». (...) III. En droit (...) Quant à la disposition en cause et à son contexte B.1.1. Les questions préjudicielles portent sur l'article 348-11 de l'ancien Code civil, tel qu'il a été modifié par l'article 8 de la loi du 20 février 2017Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/02/2017 pub. 22/03/2017 numac 2017011284 source service public federal justice Loi modifiant le Code civil, en ce qui concerne l'adoption type loi prom. 20/02/2017 pub. 22/03/2017 numac 2017011278 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 26 juin 1990 relative à la protection de la personne des malades mentaux fermer « modifiant le Code civil, en ce qui concerne l'adoption » (ci-après : la loi du 20 février 2017Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/02/2017 pub. 22/03/2017 numac 2017011284 source service public federal justice Loi modifiant le Code civil, en ce qui concerne l'adoption type loi prom. 20/02/2017 pub. 22/03/2017 numac 2017011278 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 26 juin 1990 relative à la protection de la personne des malades mentaux fermer), qui dispose : « Lorsqu'une personne qui doit consentir à l'adoption en vertu des articles 348-2 à 348-7 refuse ce consentement, l'adoption peut cependant être prononcée à la demande de l'adoptant, des adoptants ou du ministère public s'il apparaît au tribunal de la famille que ce refus est abusif.

Toutefois, si ce refus émane de la mère ou du père de l'enfant, le tribunal ne peut prononcer l'adoption, que s'il apparaît, au terme d'une enquête sociale approfondie, que cette personne s'est désintéressée de l'enfant ou en a compromis la santé, la sécurité ou la moralité, sauf lorsqu'il s'agit d'une nouvelle adoption ou lorsqu'il s'agit de l'adoption de l'enfant ou de l'enfant adoptif d'un époux, d'un cohabitant ou d'un ancien partenaire à l'égard duquel un engagement parental commun existe.

Pour apprécier le caractère abusif du refus de consentement, le tribunal tient compte de l'intérêt de l'enfant ».

B.1.2. Selon l'article 348-3 de l'ancien Code civil, la mère et le père doivent consentir tous deux à l'adoption de leur enfant, lorsque la filiation de l'enfant est établie à l'égard de chacun d'eux.

Lorsque la filiation de l'enfant n'est établie qu'à l'égard d'un de ses parents, seul celui-ci doit consentir à l'adoption. Tant la mère que le père ne peuvent consentir à l'adoption que deux mois après la naissance de l'enfant (article 348-4, alinéa 1er, de l'ancien Code civil).

Selon l'article 348-8 de l'ancien Code civil, toute personne dont le consentement à l'adoption est requis peut l'exprimer soit par déclaration faite en personne au tribunal de la famille, soit par acte passé devant un notaire ou devant le juge de paix. Le consentement peut, selon cette même disposition, être retiré jusqu'au prononcé du jugement et, au plus tard, six mois après le dépôt de la requête en adoption. Le retrait doit être établi dans la même forme que celle qui est requise pour le consentement à l'adoption.

B.2.1. Selon le premier alinéa de la disposition en cause, lorsqu'une personne qui doit consentir à l'adoption refuse de donner ce consentement, l'adoption peut quand même être prononcée s'il apparaît au tribunal de la famille que ce refus est abusif.

B.2.2. Avant son remplacement par l'article 8, 1°, de la loi du 20 février 2017Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/02/2017 pub. 22/03/2017 numac 2017011284 source service public federal justice Loi modifiant le Code civil, en ce qui concerne l'adoption type loi prom. 20/02/2017 pub. 22/03/2017 numac 2017011278 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 26 juin 1990 relative à la protection de la personne des malades mentaux fermer, le deuxième alinéa de la disposition en cause disposait que lorsque le père ou la mère refuse de consentir à l'adoption, le tribunal ne peut prononcer l'adoption que s'il apparaît, au terme d'une enquête sociale approfondie, que cette personne s'est désintéressée de l'enfant ou en a compromis la santé, la sécurité ou la moralité, sauf lorsqu'il s'agit d'une nouvelle adoption.

B.2.3.1. La loi du 20 février 2017Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/02/2017 pub. 22/03/2017 numac 2017011284 source service public federal justice Loi modifiant le Code civil, en ce qui concerne l'adoption type loi prom. 20/02/2017 pub. 22/03/2017 numac 2017011278 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 26 juin 1990 relative à la protection de la personne des malades mentaux fermer a remplacé le deuxième alinéa de la disposition en cause et en a ajouté un troisième. Il ressort des travaux préparatoires que ces modifications ont été motivées par l'objectif de répondre aux objections d'inconstitutionnalité que la Cour avait formulées dans ses arrêts nos 93/2012 et 94/2015 (Doc. parl., Chambre, 2014-2015, DOC 54-1152/001, p. 3; 2015-2016, DOC 54-1152/002, p. 2).

B.2.3.2. Par son arrêt n° 93/2012 du 12 juillet 2012, la Cour a jugé que les articles 348-3 et 348-11 de l'ancien Code civil, dans leur version applicable à l'époque, violent les articles 10, 11, 22 et 22bis de la Constitution, lus en combinaison avec les articles 8 et 14 de la Convention européenne des droits de l'homme, en ce qu'ils ne permettent au juge chargé de prononcer une adoption d'écarter le refus de la mère de consentir à cette adoption que dans l'hypothèse où elle s'est désintéressée de l'enfant ou en a compromis la santé, la sécurité ou la moralité, dans la circonstance où le candidat adoptant est une femme avec qui la mère était mariée au moment de la naissance de l'enfant et du dépôt de la requête en adoption, qui avait signé avec elle une convention conformément à l'article 7 de la loi du 6 juillet 2007Documents pertinents retrouvés type loi prom. 06/07/2007 pub. 17/07/2007 numac 2007023090 source service public federal securite sociale Loi relative à la procréation médicalement assistée et à la destination des embryons surnuméraires et des gamètes fermer « relative à la procréation médicalement assistée et à la destination des embryons surnuméraires et des gamètes » (ci-après : la loi du 6 juillet 2007Documents pertinents retrouvés type loi prom. 06/07/2007 pub. 17/07/2007 numac 2007023090 source service public federal securite sociale Loi relative à la procréation médicalement assistée et à la destination des embryons surnuméraires et des gamètes fermer) et qui a suivi la préparation à l'adoption prévue à l'article 346-2 de l'ancien Code civil, cette adoption concernant un enfant dont il est établi qu'un lien familial effectif existe et persiste avec le candidat adoptant depuis la séparation des épouses.

B.2.3.3. Par son arrêt n° 94/2015 du 25 juin 2015, la Cour a jugé que les articles 348-3 et 348-11 de l'ancien Code civil, dans leur version applicable à l'époque, violent les articles 22 et 22bis de la Constitution, lus en combinaison avec les articles 8 et 14 de la Convention européenne des droits de l'homme, en ce qu'ils ne permettent au tribunal invité à prononcer une adoption d'écarter le refus de la mère à consentir à cette adoption que lorsqu'elle s'est désintéressée de l'enfant ou en a compromis la santé, la sécurité ou la moralité, dans les circonstances suivantes : - la mère a, avec la femme qui introduit la requête en adoption simple, signé une convention conformément à l'article 7 de la loi du 6 juillet 2007Documents pertinents retrouvés type loi prom. 06/07/2007 pub. 17/07/2007 numac 2007023090 source service public federal securite sociale Loi relative à la procréation médicalement assistée et à la destination des embryons surnuméraires et des gamètes fermer; - la mère de l'enfant et cette femme avaient au moins eu une relation affective au moment de la naissance de l'enfant et se sont ensuite mariées; - la mère ne s'est pas désintéressée de l'enfant et n'en a pas compromis la santé, la sécurité ou la moralité; - la mère de l'enfant et la femme qui en demande l'adoption simple étaient mariées au moment de l'introduction de la requête en adoption; - il existe un lien familial effectif entre l'enfant et la demanderesse en adoption qui a continué à exister après la séparation des épouses, entre autres par un accord sur le droit de visite ratifié par le juge de paix.

B.2.4. Depuis les modifications apportées par la loi du 20 février 2017Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/02/2017 pub. 22/03/2017 numac 2017011284 source service public federal justice Loi modifiant le Code civil, en ce qui concerne l'adoption type loi prom. 20/02/2017 pub. 22/03/2017 numac 2017011278 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 26 juin 1990 relative à la protection de la personne des malades mentaux fermer, le deuxième alinéa de la disposition en cause prévoit que, lorsque le père ou la mère de l'enfant refuse de consentir à l'adoption, le tribunal peut prononcer l'adoption non seulement lorsqu'il est apparu, au terme d'une enquête sociale approfondie, que cette personne s'est désintéressée de l'enfant ou en a compromis la santé, la sécurité ou la moralité et lorsqu'il s'agit d'une nouvelle adoption, mais aussi lorsqu'il s'agit de l'adoption de l'enfant ou de l'enfant adoptif d'un époux, d'un cohabitant ou d'un ancien partenaire à l'égard duquel un engagement parental commun existe.

Selon le troisième alinéa de la disposition en cause, inséré par l'article 8, 2°, de la loi du 20 février 2017Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/02/2017 pub. 22/03/2017 numac 2017011284 source service public federal justice Loi modifiant le Code civil, en ce qui concerne l'adoption type loi prom. 20/02/2017 pub. 22/03/2017 numac 2017011278 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 26 juin 1990 relative à la protection de la personne des malades mentaux fermer, le tribunal doit tenir compte de l'intérêt de l'enfant pour apprécier le caractère abusif du refus de consentement.

Quant au fond En ce qui concerne la première question préjudicielle B.3. Il est demandé à la Cour d'examiner si la disposition en cause est compatible avec les articles 22 et 22bis de la Constitution, en ce que, sauf dans le cas où la mère s'est désintéressée de l'enfant ou en a compromis la santé, la sécurité ou la moralité, cette disposition ne permet pas au tribunal d'écarter le refus de la mère de l'enfant de consentir à l'adoption sur la base de la considération qu'il n'est pas dans l'intérêt de l'enfant de le soustraire à l'environnement dans lequel il grandit, dans l'hypothèse où l'enfant a été placé peu après sa naissance chez la personne dont émane la requête en adoption et dans la famille de laquelle il a, depuis lors, grandi pendant une longue période.

B.4. L'affaire pendante devant la juridiction a quo porte sur la requête en adoption plénière d'un enfant, dans le cadre de laquelle (1) la mère de l'enfant avait déjà indiqué au cours de la grossesse vouloir confier son enfant à l'adoption, (2) l'enfant a été placé quelques jours après l'accouchement chez la personne dont émane la requête en adoption, (3) le consentement à l'adoption de la mère de l'enfant a ensuite été formalisé par un acte notarié et (4) ce consentement a par la suite été retiré dans le délai prévu par l'article 348-8 de l'ancien Code civil.Il ressort en outre des faits de l'affaire pendante devant la juridiction a quo que l'enfant a grandi pendant environ dix-huit mois au sein de la famille de la personne dont émane la requête en adoption et que cette personne n'est pas l'époux, le cohabitant ou l'ancien partenaire de la mère de l'enfant.

La Cour limite son examen à cette hypothèse.

B.5.1. L'article 22 de la Constitution dispose : « Chacun a droit au respect de sa vie privée et familiale, sauf dans les cas et conditions fixés par la loi.

La loi, le décret ou la règle visée à l'article 134 garantissent la protection de ce droit ».

B.5.2. Le Constituant a recherché la plus grande concordance possible entre l'article 22 de la Constitution et l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme (Doc. parl., Chambre, 1992-1993, n° 997/5, p. 2).

La portée de cet article 8 est analogue à celle de la disposition constitutionnelle précitée, de sorte que les garanties que fournissent ces deux dispositions forment un tout indissociable.

B.6. L'article 22bis de la Constitution dispose : « Chaque enfant a droit au respect de son intégrité morale, physique, psychique et sexuelle.

Chaque enfant a le droit de s'exprimer sur toute question qui le concerne; son opinion est prise en considération, eu égard à son âge et à son discernement.

Chaque enfant a le droit de bénéficier des mesures et services qui concourent à son développement.

Dans toute décision qui le concerne, l'intérêt de l'enfant est pris en considération de manière primordiale.

La loi, le décret ou la règle visée à l'article 134 garantissent ces droits de l'enfant ».

B.7.1. L'article 22 de la Constitution et l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme garantissent le droit au respect de la vie privée et familiale, mais pas le droit de fonder une famille ou d'adopter (CEDH, grande chambre, 22 janvier 2008, E.B. c. France, § 41; 15 mars 2012, Gas et Dubois c. France, § 37; 16 décembre 2014, Chbihi Loudoudi et autres c. Belgique, § 89), ni le droit d'être adopté.

Les relations entre un adopté et un adoptant n'en sont pas moins en principe de même nature que les relations familiales protégées par l'article 22 de la Constitution et par l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH, 22 juin 2004, Pini et autres c. Roumanie, § 140;28 juin 2007, Wagner et J.M.W.L. c. Luxembourg, § 121).

Le droit au respect d'une « vie familiale » au sens de ces dispositions présuppose l'existence d'une famille (CEDH, 13 juin 1979, Marckx c. Belgique, § 31) ou, dans des circonstances exceptionnelles, d'une « vie familiale projetée », c'est-à-dire d'une relation potentielle qui aurait pu se développer (CEDH, 22 juin 2004, Pini et autres c. Roumanie, § 143; grande chambre, 22 janvier 2008, E.B. c.

France, § 41; 5 juin 2014, I.S. c. Allemagne, § 69; décision, 8 juillet 2014, D. et autres c. Belgique, § 49), notamment lorsque le fait que la vie familiale n'est pas encore totalement établie n'est pas imputable à la personne dont le respect de la vie familiale est en cause (CEDH, 22 mars 2012, Kautzor c. Allemagne, § 61; 22 mars 2012, Ahrens c. Allemagne, § 58; 12 février 2013, Krisztiàn Barnabàs Tóth c.

Hongrie, § 27) ou lorsqu'il existe, comme dans la vie familiale (CEDH, décision, 31 août 2010, Gas et Dubois c. France, A.2), des liens personnels étroits entre cette personne et celle avec laquelle elle pourrait développer une relation (CEDH, 21 décembre 2010, Anayo c.

Allemagne, § § 57 et 61; 15 septembre 2011, Schneider c. Allemagne, § § 81 et 88).

B.7.2. L'article 22 de la Constitution et l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme tendent pour l'essentiel à prémunir l'individu contre des ingérences arbitraires des pouvoirs publics. Ces dispositions peuvent aussi engendrer des obligations positives inhérentes à un « respect » effectif de la vie familiale (CEDH, grande chambre, 3 octobre 2014, Jeunesse c. Pays-Bas, § 106).

La frontière entre les obligations positives et les obligations négatives qui découlent de ces articles ne se prête toutefois pas à une définition précise. Les principes applicables aux unes et aux autres sont comparables. Dans les deux cas, il faut avoir égard au juste équilibre à ménager entre les intérêts concurrents de l'individu concerné et ceux de la société (CEDH, grande chambre, 16 juillet 2014, Hämäläinen c. Finlande, § 65; grande chambre, 3 octobre 2014, Jeunesse c. Pays-Bas, § 106;16 décembre 2014, Chbihi Loudoudi et autres c.

Belgique, § 92).

Dans certaines circonstances, l'article 22 de la Constitution et l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme font à l'autorité publique l'obligation positive de permettre la formation et le développement de liens familiaux (CEDH, 4 octobre 2012, Harroudj c.

France, § 41; 16 décembre 2014, Chbihi Loudoudi et autres c. Belgique, § 89). Lorsqu'un lien familial avec un enfant est établi, l'autorité publique doit agir de manière à permettre à ce lien de se développer et accorder une protection juridique rendant possible l'intégration de l'enfant dans sa famille (CEDH, 28 juin 2007, Wagner et J.M.W.L. c.

Luxembourg, § 119; 4 octobre 2012, Harroudj c. France, § 41; 16 décembre 2014, Chbihi Loudoudi et autres c. Belgique, § 89). Ces obligations positives doivent s'interpréter à la lumière de la Convention relative aux droits de l'enfant (CEDH, 4 octobre 2012, Harroudj c. France, § 42) et de l'article 22bis de la Constitution.

B.7.3. Pour être compatible avec l'article 22 de la Constitution et avec l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, l'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice du droit au respect de la vie familiale doit être prévue par une disposition législative suffisamment précise, poursuivre l'un des buts légitimes énoncés au paragraphe 2 de cette dernière disposition et être « nécessaire dans une société démocratique » à la réalisation de ce but.

Une ingérence est, dans ce contexte, considérée comme « nécessaire dans une société démocratique » si elle répond à un « besoin social impérieux » et, en particulier, si elle est proportionnée au but légitime poursuivi et si les motifs invoqués pour la justifier apparaissent « pertinents et suffisants » (CEDH, grande chambre, 12 juin 2014, Fernàndez Martinez c. Espagne).

Pour être proportionnée au but poursuivi, une ingérence doit non seulement ménager un équilibre entre les intérêts concurrents de l'individu et de la société dans son ensemble mais aussi entre les intérêts contradictoires des personnes concernées (CEDH, 6 juillet 2010, Backlund c. Finlande, § 46; 15 janvier 2013, Laakso c. Finlande, § 46; 29 janvier 2013, Röman c. Finlande, § 51).

B.8. L'article 22bis, alinéa 4, de la Constitution impose aux juridictions de prendre en compte, de manière primordiale, l'intérêt de l'enfant dans les procédures le concernant.

Dans toute décision concernant un enfant, l'intérêt supérieur de celui-ci doit primer (CEDH, grande chambre, 26 novembre 2013, X c.

Lettonie, § 96). Sans être déterminant à lui seul, cet intérêt a assurément un poids important (CEDH, grande chambre, 3 octobre 2014, Jeunesse c. Pays-Bas, § 109).

Si l'intérêt de l'enfant doit être une considération primordiale, il n'a pas un caractère absolu. Dans la mise en balance des différents intérêts en jeu, l'intérêt de l'enfant occupe une place particulière du fait qu'il représente la partie faible dans la relation familiale.

Il ne ressort pas de cette place particulière que les intérêts des autres parties en présence ne pourraient pas être pris en compte.

B.9.1. Comme il est dit en B.4, l'affaire pendante devant la juridiction a quo porte sur une requête en adoption plénière d'un enfant, sachant que la personne dont émane la requête en adoption n'est pas l'époux, le cohabitant ou l'ancien partenaire de la mère de l'enfant.

B.9.2. Selon l'article 356-1, alinéas 1er et 2 de l'ancien Code civil, l'adoption plénière confère à l'enfant et à ses descendants un statut comportant des droits et obligations identiques à ceux qu'ils auraient si l'enfant était né de l'adoptant ou des adoptants et l'enfant, sous réserve des empêchements à mariage prévus par les articles 161 à 164 du même Code, cesse d'appartenir à sa famille d'origine.

Toutefois, selon l'article 356-1, alinéa 3, de l'ancien Code civil, les enfants ou les enfants adoptifs du conjoint de l'adoptant, du cohabitant de l'adoptant ou de l'ancien partenaire de l'adoptant ne cessent pas d'appartenir à la famille de ce conjoint, de ce cohabitant ou de cet ancien partenaire.

B.9.3. Les circonstances de l'affaire présentement examinée diffèrent de celles des affaires qui ont donné lieu aux arrêts de la Cour nos 93/2012 et 94/2015, cités en B.2.3.2 et B.2.3.3, en ce que, dans la présente affaire, la requête en adoption n'émane pas d'une personne qui forme ou a formé une famille avec la mère de l'enfant et qui a pour objectif de permettre à l'enfant de bénéficier d'un double lien de filiation juridique, plus précisément à l'égard de la mère et à l'égard du candidat adoptant.

B.10.1. Lorsque, comme dans l'affaire pendante devant la juridiction a quo, un enfant est placé peu de temps après sa naissance chez une personne qui introduit plus tard une requête en adoption de cet enfant et que, avant la décision du tribunal sur la requête en adoption, cet enfant grandit pendant une longue période au sein de la famille de cette personne, la relation entre cette personne et cet enfant peut, même s'il n'existe pas de lien juridique entre eux, être qualifiée dans certaines circonstances de vie familiale au sens de l'article 22 de la Constitution et de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH, 27 avril 2010, Moretti et Benedetti c.

Italie, § § 48-50; 17 janvier 2012, Kopf et Liberda c. Autriche, § § 36-37).

B.10.2. En ce qu'elle ne permet pas au tribunal qui doit statuer dans de telles circonstances sur une requête en adoption de l'enfant d'écarter comme abusif le refus de la mère de consentir à l'adoption, sauf dans le cas où la mère s'est désintéressée de l'enfant ou en a compromis la santé, la sécurité ou la moralité, la disposition en cause constitue une ingérence dans le droit au respect de la vie familiale du candidat adoptant. Cette ingérence est prévue par une disposition législative suffisamment précise.

B.10.3. Toutefois, la relation entre la mère biologique et son enfant doit également, au moins au moment de la naissance de l'enfant, être qualifiée en principe de vie familiale au sens des dispositions constitutionnelle et conventionnelle précitées (CEDH, 5 juin 2014, I.S. c. Allemagne, § 68). L'acte par lequel la mère biologique confie irrévocablement son enfant à l'adoption aboutit cependant à ce que la relation entre eux ne réponde plus à la notion de « vie familiale » (ibid.).

B.10.4. Il ressort des faits de l'affaire pendante devant la juridiction a quo que la mère biologique a retiré son consentement à l'adoption de son enfant, qu'elle avait initialement donné par acte notarié, dans le délai prévu par l'article 348-8 de l'ancien Code civil. Comme il est dit en B.1.2, cette disposition prévoit que les personnes dont le consentement à l'adoption est requis peuvent retirer le consentement qu'elles ont préalablement donné jusqu'au prononcé du jugement relatif à la requête en adoption et, au plus tard, six mois après le dépôt de cette requête.

Tant que le délai précité n'a pas expiré, l'acte par lequel la mère biologique consent à l'adoption de son enfant ne peut être considéré comme irrévocable et la relation entre la mère biologique et son enfant est susceptible d'être qualifiée de vie familiale au sens de l'article 22 de la Constitution et de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme. Comme il est dit en B.7.1, dans certaines circonstances, ces dispositions protègent en effet également une « vie familiale projetée », c'est-à-dire une vie familiale qui n'a pas encore pu être totalement établie.

B.10.5. Le deuxième alinéa de la disposition en cause est notamment dicté par l'objectif de protéger la vie familiale de la mère biologique et poursuit ainsi l'un des buts énoncés par l'article 8, paragraphe 2, de la Convention européenne des droits de l'homme, plus précisément la protection des droits et libertés d'autrui.

B.11. Il découle de ce qui précède que, dans les circonstances décrites en B.4, tant la vie familiale de la mère que celle du candidat adoptant sont en cause. Pour être compatible avec l'article 22 de la Constitution et avec l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, une réglementation législative qui confère au tribunal de la famille la compétence de prendre des décisions dans de telles circonstances doit reposer sur un juste équilibre entre les intérêts concurrents des différentes parties. Dans le cadre de cet équilibre, il y a lieu de tenir compte tout particulièrement de l'article 22bis, alinéa 4, de la Constitution, selon lequel, dans toute décision qui le concerne, l'intérêt de l'enfant est pris en considération de manière primordiale.

B.12.1. L'« intérêt de l'enfant » mentionné dans l'article 22bis, alinéa 4, de la Constitution ne saurait être considéré indépendamment des droits de l'enfant, garantis notamment par la Convention relative aux droits de l'enfant et, en ce qui concerne l'adoption des enfants, par la Convention européenne du 27 novembre 2008 en matière d'adoption des enfants (révisée).

L'article 9, paragraphe 1, de la Convention relative aux droits de l'enfant dispose : « Les Etats parties veillent à ce que l'enfant ne soit pas séparé de ses parents contre leur gré, à moins que les autorités compétentes ne décident, sous réserve de révision judiciaire et conformément aux lois et procédures applicables, que cette séparation est nécessaire dans l'intérêt supérieur de l'enfant. Une décision en ce sens peut être nécessaire dans certains cas particuliers, par exemple lorsque les parents maltraitent ou négligent l'enfant, ou lorsqu'ils vivent séparément et qu'une décision doit être prise au sujet du lieu de résidence de l'enfant ».

L'article 21 de la même Convention dispose : « Les Etats parties qui admettent et/ou autorisent l'adoption s'assurent que l'intérêt supérieur de l'enfant est la considération primordiale en la matière, et a) Veillent à ce que l'adoption d'un enfant ne soit autorisée que par les autorités compétentes, qui vérifient conformément à la loi et aux procédures applicables et sur la base de tous les renseignements fiables relatifs au cas considéré, que l'adoption peut avoir lieu eu égard à la situation de l'enfant par rapport à ses père et mère, parents et représentants légaux et que, le cas échéant, les personnes intéressées ont donné leur consentement à l'adoption en connaissance de cause, après s'être entourées des avis nécessaires; [...] ».

L'article 5 de la Convention européenne du 27 novembre 2008 en matière d'adoption des enfants (révisée) dispose : « 1. Sous réserve des paragraphes 2 à 5 du présent article, l'adoption n'est prononcée que si au moins les consentements suivants ont été donnés et n'ont pas été retirés : a) le consentement de la mère et du père;ou, s'il n'y a ni père ni mère qui puisse consentir, le consentement de toute personne ou de tout organisme qui est habilité à consentir à la place des parents; [...] 3. L'autorité compétente ne peut se dispenser du consentement ou passer outre le refus de consentement de l'une des personnes ou de l'un des organismes visés au paragraphe 1, sinon pour des motifs exceptionnels déterminés par la législation.Toutefois, il est permis de se dispenser du consentement d'un enfant atteint d'un handicap qui l'empêche d'exprimer un consentement valable. [...] ».

B.12.2. Il ressort des dispositions précitées de la Convention relative aux droits de l'enfant qu'un enfant dispose en principe du droit de ne pas être séparé de ses parents contre leur volonté et que l'adoption d'un enfant qui entraîne une telle séparation n'est en principe possible que si les parents y consentent. Toutefois, le droit d'un enfant de ne pas être séparé de ses parents contre leur gré n'est pas absolu, puisque selon l'article 9, paragraphe 1, de la même Convention, les autorités compétentes peuvent décider conformément aux lois et aux procédures applicables que la séparation de l'enfant de ses parents est dans l'intérêt de cet enfant. Cette même disposition renvoie à cet égard notamment à la situation dans laquelle « les parents maltraitent ou négligent l'enfant ». Il ressort de l'article 5 de la Convention européenne en matière d'adoption des enfants (révisée) que les autorités compétentes pour l'adoption ne peuvent passer outre le refus des parents de consentir à l'adoption de leur enfant, sinon pour des motifs exceptionnels déterminés par la législation.

B.12.3. Il découle de ce qui précède qu'il est en principe dans l'intérêt de l'enfant que celui-ci ne soit pas séparé de ses parents contre leur gré, de même que l'adoption d'un enfant qui entraîne une telle séparation ne puisse en principe pas avoir lieu sans le consentement des parents de l'enfant. Ce n'est que dans des circonstances exceptionnelles, notamment « lorsque les parents maltraitent ou négligent l'enfant », qu'il peut être dans l'intérêt de l'enfant de le séparer de ses parents, contre leur volonté, au moyen d'une adoption.

B.13.1. La disposition en cause, telle qu'elle est interprétée par la juridiction a quo, a pour effet que lorsque la mère de l'enfant refuse de consentir à l'adoption ou retire son consentement, le juge ne peut écarter le refus de consentement au motif qu'il est abusif, eu égard à l'intérêt de l'enfant, sauf lorsqu'il s'agit d'une nouvelle adoption, lorsqu'il s'agit de l'adoption de l'enfant ou de l'enfant adoptif d'un époux, d'un cohabitant ou d'un ancien partenaire à l'égard duquel un engagement parental commun existe, ou lorsque la mère s'est désintéressée de l'enfant ou en a compromis la santé, la sécurité ou la moralité.

B.13.2. Dès lors qu'il est en principe dans l'intérêt de l'enfant qu'il ne soit pas séparé de sa mère contre la volonté de celle-ci, sauf dans des circonstances exceptionnelles comme lorsqu'il est question de maltraitance ou de négligence de l'enfant, la disposition en cause repose sur un juste équilibre entre les intérêts concurrents de toutes les parties concernées en ce qu'elle prévoit que, sauf dans le cas d'une nouvelle adoption ou de l'adoption de l'enfant ou de l'enfant adoptif d'un époux, d'un cohabitant ou d'un ancien partenaire à l'égard duquel un engagement parental commun existe, le juge ne peut écarter le refus de la mère de consentir à l'adoption au motif qu'il est abusif que lorsque la mère s'est désintéressée de l'enfant ou en a compromis la santé, la sécurité ou la moralité.

B.14. Compte tenu de ce juste équilibre, la disposition en cause est compatible avec les articles 22 et 22bis de la Constitution.

B.15. La première question préjudicielle appelle une réponse négative.

En ce qui concerne la seconde question préjudicielle B.16. Compte tenu des faits de l'affaire qui est pendante devant la juridiction a quo, il est demandé à la Cour d'examiner si la disposition en cause est compatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce que, sauf dans les cas où il s'agit d'une nouvelle adoption ou de l'adoption de l'enfant ou de l'enfant adoptif d'un époux, d'un cohabitant ou d'un ancien partenaire à l'égard duquel un engagement parental commun existe, cette disposition fait naître une différence de traitement entre les personnes qui introduisent une requête en adoption, selon que le refus de consentir à l'adoption émane d'un parent de l'enfant ou d'une autre personne qui est légalement tenue de donner son consentement. A supposer que le refus de consentir à l'adoption émane d'un parent de l'enfant, le juge ne pourrait pas apprécier, en règle, l'intérêt de l'enfant, alors qu'il le pourrait si ce refus émanait d'une autre personne qui est légalement tenue de consentir à l'adoption.

B.17.1. Bien que la question préjudicielle ne précise pas les personnes qu'il y a lieu d'entendre par « une autre personne qui est légalement tenue de consentir à l'adoption », il peut se déduire du mémoire qui a été déposé à la Cour par M.C., le demandeur devant la juridiction a quo qui a demandé à cette juridiction de poser les questions préjudicielles à la Cour, que les personnes visées sont celles qui sont mentionnées à l'article 348-5 de l'ancien Code civil.

Selon cette disposition, le consentement à l'adoption est donné par le tuteur lorsque la filiation d'un enfant n'est pas établie ou lorsque le père et la mère d'un enfant, ou le seul parent à l'égard duquel la filiation est établie, sont décédés, présumés absents, sans aucune demeure connue, dans l'impossibilité ou incapables d'exprimer leur volonté. En cas d'adoption par le tuteur, le consentement est donné par le subrogé tuteur. Si les intérêts du subrogé tuteur sont en opposition avec ceux du mineur, le consentement est donné par un tuteur ad hoc désigné par le tribunal à la requête de toute personne intéressée ou du procureur du Roi.

B.17.2. La seconde question préjudicielle concerne dès lors la différence de traitement que la disposition en cause fait naître entre les candidats adoptants, selon que le refus de consentir à l'adoption émane d'un parent de l'enfant ou qu'il émane du tuteur, du subrogé tuteur ou du tuteur ad hoc.

B.18. Le principe d'égalité et de non-discrimination n'exclut pas qu'une différence de traitement soit établie entre des catégories de personnes, pour autant qu'elle repose sur un critère objectif et qu'elle soit raisonnablement justifiée.

L'existence d'une telle justification doit s'apprécier en tenant compte du but et des effets de la mesure critiquée ainsi que de la nature des principes en cause; le principe d'égalité et de non-discrimination est violé lorsqu'il est établi qu'il n'existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.

B.19.1. La différence de traitement en cause repose sur un critère objectif, plus précisément l'existence ou non d'un lien de filiation au premier degré entre l'enfant et la personne qui doit consentir à l'adoption : alors que la relation entre l'enfant et ses parents se caractérise par l'existence d'un lien de filiation au premier degré, ce n'est pas le cas de la relation existant entre l'enfant, d'une part, et le tuteur, le subrogé tuteur ou le tuteur ad hoc, d'autre part.

B.19.2. L'examen de la première question préjudicielle a fait apparaître que le deuxième alinéa de la disposition en cause est dicté par l'objectif d'éviter que, sauf circonstances exceptionnelles, un enfant soit séparé de ses parents contre leur gré, ainsi que par l'objectif de protéger la vie familiale des parents. Ces objectifs sont légitimes. La différence de traitement en cause est également pertinente au regard de ces objectifs. En outre, dès lors que le tribunal de la famille doit écarter le refus de la mère ou du père de consentir à l'adoption s'il apparaît, au terme d'une enquête sociale approfondie, que cette personne s'est désintéressée de l'enfant ou en a compromis la santé, la sécurité ou la moralité, la disposition en cause n'est pas disproportionnée aux objectifs poursuivis. La différence de traitement visée dans la seconde question préjudicielle est dès lors raisonnablement justifiée.

B.20. La disposition en cause est compatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution.

B.21. La seconde question préjudicielle appelle une réponse négative.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : L'article 348-11 de l'ancien Code civil, tel qu'il a été modifié par l'article 8 de la loi du 20 février 2017Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/02/2017 pub. 22/03/2017 numac 2017011284 source service public federal justice Loi modifiant le Code civil, en ce qui concerne l'adoption type loi prom. 20/02/2017 pub. 22/03/2017 numac 2017011278 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 26 juin 1990 relative à la protection de la personne des malades mentaux fermer « modifiant le Code civil, en ce qui concerne l'adoption », ne viole pas les articles 10, 11, 22 et 22bis de la Constitution, en ce que, sauf dans les cas où il s'agit d'une nouvelle adoption ou de l'adoption de l'enfant ou de l'enfant adoptif d'un époux, d'un cohabitant ou d'un ancien partenaire à l'égard duquel un engagement parental commun existe, il ne permet au tribunal de la famille d'écarter le refus de la mère de l'enfant de consentir à l'adoption que lorsque la mère s'est désintéressée de l'enfant ou en a compromis la santé, la sécurité ou la moralité.

Ainsi rendu en langue néerlandaise et en langue française, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 7 octobre 2021.

Le greffier, F. Meersschaut Le président, L. Lavrysen

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