publié le 07 avril 2021
Extrait de l'arrêt n° 141/2020 du 22 octobre 2020 Numéro du rôle : 7152 En cause : la question préjudicielle relative à l'article 91, alinéa 1 er , 1°, de la loi du 25 ventôse an XI « contenant organisation du notariat », lu en combi La Cour constitutionnelle, composée du président F. Daoût, des juges T. Merckx-Van Goey, T. Giet(...)
Extrait de l'arrêt n° 141/2020 du 22 octobre 2020 Numéro du rôle : 7152 En cause : la question préjudicielle relative à l'article 91, alinéa 1er, 1°, de la loi du 25 ventôse an XI « contenant organisation du notariat », lu en combinaison avec l'article 1727, § 6, 7°, du Code judiciaire, posée par le Conseil d'État.
La Cour constitutionnelle, composée du président F. Daoût, des juges T. Merckx-Van Goey, T. Giet, R. Leysen, J. Moerman et M. Pâques, et, conformément à l'article 60bis de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, du président émérite A. Alen, assistée du greffier F. Meersschaut, présidée par le président F. Daoût, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet de la question préjudicielle et procédure Par arrêt n° 244.057 du 28 mars 2019, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 2 avril 2019, le Conseil d'État a posé la question préjudicielle suivante : « L'article 91, alinéa 1er, 1°, de la loi du 25 ventôse an XI [contenant organisation du notariat], lu en combinaison avec l'article 1727, § 6, 7°, du Code judiciaire, tel qu'applicable lors de l'adoption du règlement attaqué, viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce qu'il permet que les médiateurs notariaux soient soumis à des règles de déontologie ou de ' bonne conduite ' partiellement différentes de celles applicables aux autres médiateurs agréés, sans que cette différence de traitement repose sur un critère objectif et pertinent ? ». (...) III. En droit (...) B.1. La question préjudicielle porte sur l'article 91, alinéa 1er, 1°, de la loi du 25 ventôse an XI « contenant organisation du notariat » (ci-après : la loi du 25 ventôse an XI), lu en combinaison avec l'article 1727, § 6, 7°, du Code judiciaire, tel qu'il s'appliquait avant son remplacement par l'article 216 de la loi du 18 juin 2018Documents pertinents retrouvés type loi prom. 18/06/2018 pub. 02/07/2018 numac 2018012858 source service public federal justice Loi portant dispositions diverses en matière de droit civil et des dispositions en vue de promouvoir des formes alternatives de résolution des litiges fermer « portant dispositions diverses en matière de droit civil et des dispositions en vue de promouvoir des formes alternatives de résolution des litiges » (ci-après : la loi du 18 juin 2018Documents pertinents retrouvés type loi prom. 18/06/2018 pub. 02/07/2018 numac 2018012858 source service public federal justice Loi portant dispositions diverses en matière de droit civil et des dispositions en vue de promouvoir des formes alternatives de résolution des litiges fermer).
B.2.1. L'article 91 de la loi du 25 ventôse an XI, tel qu'il a été inséré par l'article 41 de la loi du 4 mai 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 04/05/1999 pub. 01/10/1999 numac 1999009663 source ministere de la justice Loi modifiant la loi du 25 ventôse an XI contenant organisation du notariat fermer « modifiant la loi du 25 ventôse an XI contenant organisation du notariat » (ci-après : la loi du 4 mai 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 04/05/1999 pub. 01/10/1999 numac 1999009663 source ministere de la justice Loi modifiant la loi du 25 ventôse an XI contenant organisation du notariat fermer), dispose : « Outre celles qui lui sont confiées par les autres dispositions de la présente loi, la Chambre nationale des notaires a pour attributions : 1° d'établir les règles générales de la déontologie et de définir un cadre réglementaire général pour l'exercice des compétences des compagnies des notaires, visées à l'article 69, 2° et 5°, et des compétences des chambres des notaires, visées à l'article 76, 3° et 5°; [...] Pour être obligatoires, les règles visées au premier alinéa, 1° et 5° et les mesures visées au premier alinéa, 2°, doivent être approuvées par le Roi. Il peut, le cas échéant, y apporter des modifications. [...] ».
B.2.2. L'article 1727 du Code judiciaire, tel qu'il s'appliquait avant son remplacement par l'article 216 de la loi du 18 juin 2018Documents pertinents retrouvés type loi prom. 18/06/2018 pub. 02/07/2018 numac 2018012858 source service public federal justice Loi portant dispositions diverses en matière de droit civil et des dispositions en vue de promouvoir des formes alternatives de résolution des litiges fermer, disposait : « § 1er. Il est institué une commission fédérale de médiation, composée d'une commission générale et de commissions spéciales. § 2. La commission générale est composée de six membres spécialisés en médiation, à savoir : deux notaires, deux avocats et deux représentants des médiateurs qui n'exercent ni la profession d'avocat, ni celle de notaire.
Il est veillé, dans la composition de la commission générale, à une représentation équilibrée des domaines d'intervention.
La commission générale comporte autant de membres d'expression française que de membres d'expression néerlandaise.
Pour chaque membre effectif il est désigné un membre suppléant.
Les modalités de la publication des vacances, du dépôt des candidatures et de la présentation des membres sont fixés par arrêté ministériel.
Les membres effectifs et suppléants sont désignés par le Ministre de Justice, sur présentation motivée : - de l'Ordre des barreaux francophones et germanophone pour l'avocat appartenant à cet Ordre; - de l'Orde van Vlaamse balies pour l'avocat appartenant à cet Ordre; - de la fédération royale des notaires, pour les notaires; - des instances représentatives pour les médiateurs qui n'exercent ni la profession d'avocat, ni celle de notaire.
Le mandat de membre effectif a une durée de quatre ans et est renouvelable. Les membres sortants poursuivent leur mandat jusqu'à la désignation des nouveaux membres. [...] § 6. Les missions de la commission générale sont les suivantes : 1° agréer les organes de formation des médiateurs et les formations qu'ils organisent;2° déterminer les critères d'agrément des médiateurs par type de médiation;3° agréer les médiateurs;4° retirer, temporairement ou définitivement, l'agrément accordé aux médiateurs qui ne satisfont plus aux conditions prévues à l'article 1726;5° fixer la procédure d'agrément et de retrait, temporaire ou définitif du titre de médiateur;6° dresser et diffuser la liste des médiateurs auprès des cours et tribunaux;7° établir un code de bonne conduite et déterminer les sanctions qui en découlent. Les décisions de la commission sont motivées. [...] ».
B.3. La Cour est interrogée sur la compatibilité, avec les articles 10 et 11 de la Constitution, de l'article 91, alinéa 1er, 1°, de la loi du 25 ventôse an XI, lu en combinaison avec l'article 1727, § 6, 7°, du Code judiciaire, tel qu'il s'appliquait avant son remplacement par l'article 216 de la loi du 18 juin 2018Documents pertinents retrouvés type loi prom. 18/06/2018 pub. 02/07/2018 numac 2018012858 source service public federal justice Loi portant dispositions diverses en matière de droit civil et des dispositions en vue de promouvoir des formes alternatives de résolution des litiges fermer, en ce que cette disposition permet que les médiateurs notariaux soient soumis à des règles de déontologie ou de « bonne conduite » partiellement différentes de celles applicables aux autres médiateurs agréés.
B.4.1. Dans le cadre du litige porté devant le juge a quo, un recours en annulation a été introduit contre l'arrêté royal du 18 avril 2017 « portant approbation du code de déontologie relatif à la médiation notariale » (ci-après : l'arrêté royal du 18 avril 2017), pris conformément à l'habilitation contenue dans la disposition en cause, et qui dispose : «
Article 1er.Le code de déontologie relatif à la médiation notariale, adopté le 7 octobre 2003 et modifié les 24 octobre 2006 et 22 octobre 2015 par la Chambre nationale des notaires et tel qu'annexé au présent arrêté, est approuvé.
Art. 2.Le présent arrêté entre en vigueur le jour de sa publication au Moniteur belge.
Art. 3.Le ministre qui a la Justice dans ses attributions est chargé de l'exécution du présent arrêté ».
Le recours est introduit par l'« Union belge des Médiateurs professionnels », qui critique notamment les contradictions qui existeraient entre le Code de déontologie approuvé par l'arrêté royal attaqué, et les règles de bonne conduite établies par la commission générale de la commission fédérale de médiation. Un recours analogue, dirigé contre l'arrêté royal du 18 avril 2017, a été rejeté par l'arrêt du Conseil d'État n° 242.183 du 7 août 2018.
B.4.2. Le Code de déontologie relatif à la médiation notariale, annexé à l'arrêté royal du 18 avril 2017, dispose : «
Article 1er.Objet Dans le présent code de déontologie sont définis les principes qui doivent servir de référence pour les médiateurs notariaux.
On entend par médiateurs notariaux les notaires-médiateurs agréés et les notaires sous l'autorité et la responsabilité desquels des collaborateurs-médiateurs agréés proposent ce service.
Les médiateurs notariaux restent soumis aux règles de la déontologie notariale qui priment, également durant la procédure de médiation.
Chaque disposition doit être interprétée en tenant compte de l'esprit général de ce code et de la déontologie notariale.
Art. 2.Définition de la médiation La médiation est une méthode de résolution des conflits, par laquelle le médiateur assiste les parties en leur prêtant ses compétences, afin que par le dialogue et la négociation elles parviennent elles-mêmes et ensemble à un accord réciproquement acceptable, mettant un terme à leur conflit.
Art. 3.Mission du médiateur notarial Le médiateur notarial a pour mission d'instaurer et de maintenir les conditions permettant aux personnes en conflit de négocier et de trouver elles-mêmes des solutions aux différends qui les opposent.
Le médiateur notarial sert les intérêts de toutes les parties concernées.
Le médiateur notarial accompagne le processus. La solution du conflit reste dans les mains des parties concernées.
Art. 4.Désignation du médiateur notarial Le notaire-médiateur ainsi que le collaborateur notarial qui propose ses services de médiation sous l'autorité et la responsabilité d'un notaire, doivent être agréés par l'instance légalement compétente.
En cas de médiation volontaire, il est désigné sur base d'un choix concerté et librement arrêté par toutes les parties en conflit.
En cas de médiation procédurale, il est désigné par le juge, à la demande conjointe des parties ou à l'initiative du juge mais avec le consentement des parties.
Art. 5.Ethique du médiateur notarial § 1er. Le médiateur notarial a le devoir prioritaire de sauvegarder, sous toutes ses formes, l'indépendance et l'impartialité inhérente à sa fonction.
Le médiateur notarial ne peut participer à une médiation impliquant des membres de sa famille, ses collaborateurs ou ses associés.
Le médiateur notarial ne peut participer à aucune médiation dans laquelle lui-même, un de ses collaborateurs ou un de ses associés ont conseillé une des parties auparavant.
Le cas échéant le médiateur notarial signalera aux parties, tant avant que durant la médiation, les éléments susceptibles de mettre en cause son indépendance et, soit se retirera de la médiation, soit obtiendra l'accord écrit des parties pour la poursuite de la médiation.
Le médiateur notarial ne peut, durant la médiation, accepter aucune autre mission de la part de l'une ou l'autre partie, sauf accord contraire de toutes les parties.
Si pour des raisons personnelles le médiateur notarial estime ne pas pouvoir remplir les conditions liées à son devoir d'indépendance et d'impartialité, il doit alors refuser ou interrompre la médiation. § 2. Le médiateur notarial est tenu au secret professionnel.
Il veille à la confidentialité du dossier.
Le médiateur notarial et les parties signent un protocole de médiation (voir article 6, § 1er), dans lequel ils s'engagent à observer le secret le plus strict sur tout ce qui sera évoqué durant les sessions de médiation ou autrement. § 3. Le médiateur notarial ne peut exercer d'activités incompatibles avec l'indépendance de sa fonction.
Le médiateur notarial ne peut intervenir quand, à cause de ses intérêts personnels matériels ou moraux, il pourrait être suspecté de ne pas remplir sa fonction en conformité avec les règles de déontologie liées à l'indépendance, à l'impartialité ou au secret professionnel.
Art. 6.Organisation de la procédure de médiation notariale § 1er. Avant d'accepter sa mission, le médiateur notarial explique aux parties le processus de la médiation et leur fournit toutes les informations utiles afin que les parties puissent faire le choix de la médiation en connaissance de cause.
Le médiateur notarial examine s'il peut accepter la mission, et si sa désignation est faite sur base du libre choix de toutes les parties.
Le médiateur notarial et toutes les parties concernées signent un ' Protocole de médiation '.
Dans ce protocole de médiation les clauses d'interdiction suivantes seront littéralement reprises : ' Les parties s'interdisent : - d'utiliser, dans une procédure judiciaire, administrative ou arbitrale ou dans toute autre procédure visant à résoudre des conflits, des documents établis et des communications faites au cours d'une procédure de médiation. Ces pièces ne sont pas admissibles comme preuve, pas même comme aveu extrajudiciaire. L'obligation de secret ne peut être levée qu'avec l'accord des parties et du médiateur notarial. - de faire appel au médiateur notarial comme témoin dans une procédure civile ou administrative relative aux faits dont il a pris connaissance au cours de la médiation '. § 2. Au cours de la médiation, le médiateur veille au respect du présent code de déontologie.
Le médiateur notarial doit informer les parties qu'elles peuvent à tout moment faire appel à un autre expert (avocat, fiscaliste, secrétariat social, assureur, psychologue, conseiller familial, etc.) à condition qu'elles en avertissent le médiateur notarial et les autres parties.
Le médiateur notarial doit inviter les parties à prendre des décisions sur base de renseignements suffisants et adéquats et après avoir recueilli des avis pertinents.
Le médiateur notarial doit veiller à ce que les négociations se déroulent de manière équilibrée, sereine et dans l'intérêt de toutes les parties.
Le médiateur notarial doit s'assurer que chaque partie est consciente de toutes les conséquences liées aux solutions proposées et les comprend. § 3. Le médiateur notarial rédige un accord de médiation, à savoir une convention, dans laquelle sont repris les accords finaux obtenus sur chaque point négocié.
Il informe les parties sur les conséquences liées à la signature de la convention.
Son devoir n'est pas de donner d'avis ' orienté ', mais bien un avis informatif, c'est-à -dire axé sur la régularité de l'accord. Le médiateur notarial doit veiller à ce que la convention soit équitable, équilibrée et honnête, et qu'elle ne soit pas contraire aux règles d'ordre public ou de droit impératif.
Art. 7.Refus et interruption de médiation Le médiateur notarial a le droit de refuser une demande de médiation volontaire.
En cas de désignation par le juge dans le cadre d'une procédure judiciaire, il fait part dans les meilleurs délais, au juge et aux parties, de son refus dûment motivé.
Le médiateur notarial a le devoir de suspendre ou de mettre fin à la médiation lorsque : - la médiation est détournée à des fins impropres ou inadaptées; - le comportement d'une ou de plusieurs parties s'avère incompatible avec le processus de médiation; - la médiation n'offre plus d'utilité; - les parties ou l'une d'entre elles n'est plus en état de participer sérieusement à la médiation ou ne manifeste plus aucun intérêt pour celle-ci; - les parties refusent de rendre leur convention conforme aux règles d'ordre public ou de droit impératif.
Art. 8.Collaboration La médiation peut être organisée au niveau notarial dans le cadre d'un centre notarial distinct, pour autant que ce centre opère comme ' société de moyens ', agréé comme tel par la chambre provinciale des notaires.
La médiation peut être organisée de manière interprofessionnelle, dans la mesure où cette collaboration est occasionnelle et où elle est soumise à l'accord préalable de la chambre provinciale des notaires, qui veillera à ce que cette collaboration n'ait pas un caractère permanent et que les responsabilités respectives soient suffisamment délimitées.
Art. 9.Acte authentique - Libre choix du notaire Si les parties veulent consigner l'accord de médiation conclu sous forme d'acte authentique, par exemple à des fins d'opposabilité et afin de disposer d'un titre exécutoire, le médiateur notarial est alors tenu de leur demander si elles souhaitent à cet effet faire appel à un notaire de leur choix et de les informer de la possibilité de faire soumettre l'accord de médiation au juge compétent conformément à l'article 1733 du Code judiciaire.
Art. 10.Honoraires Au début de la médiation, le médiateur notarial doit informer les parties quant à ses honoraires et tous autres frais relatifs à la médiation.
Art. 11.Mention du titre Afin de faire savoir que le notaire ou un collaborateur répond aux critères d'agrément spécifiques et est agréé à cette fin par l'instance légalement compétente, il lui est permis de mentionner, de façon discrète, la qualité de ' Médiateur agréé '.
Il ne peut pas être fait usage de cette mention de manière abusive, par exemple après suppression de la liste de médiateurs agréés.
Art. 12.Contrôle Les chambres provinciales des notaires veillent à l'observation de ces règles et à l'application de sanctions si elles ne sont pas respectées ».
B.5.1. La question préjudicielle invite à comparer, d'une part, la situation des notaires qui sont également des médiateurs agréés, et qui seraient soumis à des règles partiellement différentes de celles applicables à tous les autres médiateurs agréés et, d'autre part, la situation de tous les autres médiateurs agréés.
B.5.2. Il ressort de la décision de renvoi que la critique des parties requérantes devant le juge a quo concerne l'éventuelle discrimination que créerait la disposition en cause parmi l'ensemble des médiateurs agréés soumis aux règles de bonne conduite établies par la commission fédérale de médiation, en ce que seuls les notaires qui sont également des médiateurs agréés seraient soumis à deux corps de règles, le cas échéant contradictoires, à la différence des autres médiateurs.
La question préjudicielle ne porte dès lors pas sur le principe même d'une habilitation donnée à la Chambre nationale des notaires pour établir les « règles générales de la déontologie » du notariat, qui doivent être approuvées par le Roi, mais uniquement sur les « règles générales de la déontologie » visées par cette habilitation.
B.6. Le principe d'égalité et de non-discrimination n'exclut pas qu'une différence de traitement soit établie entre des catégories de personnes, pour autant qu'elle repose sur un critère objectif et qu'elle soit raisonnablement justifiée.
L'existence d'une telle justification doit s'apprécier en tenant compte du but et des effets de la mesure critiquée ainsi que de la nature des principes en cause; le principe d'égalité et de non-discrimination est violé lorsqu'il est établi qu'il n'existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.
B.7.1. La disposition en cause confie à la Chambre nationale des notaires la mission d'établir les règles générales de déontologie du notariat, ces règles devant être approuvées par arrêté royal.
B.7.2. Comme il est dit en B.2.1, cette disposition a été insérée par l'article 41 de la loi du 4 mai 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 04/05/1999 pub. 01/10/1999 numac 1999009663 source ministere de la justice Loi modifiant la loi du 25 ventôse an XI contenant organisation du notariat fermer, qui visait notamment à « renforcer [...] la discipline notariale » et à « garantir un meilleur exercice de la profession par la création d'une Chambre nationale des notaires » (Doc. parl., Chambre, 1997-1998, nos 1432/1 et 1433/1, p. 6).
La création d'une Chambre nationale des notaires répondait à la demande de la « Fédération Royale du Notariat belge » qui estimait, notamment, qu'il était « indispensable de définir des ' normes déontologiques qui devront pouvoir être rendues obligatoires dans tout le pays ' », « pour éviter une diversité lors de l'application de principes déontologiques et de certaines procédures » (ibid., pp. 19-20). L'objectif est « systématiquement de veiller à l'uniformisation des compétences que les associations et les chambres sont appelées à exercer » (Doc. parl., Sénat, 1998-1999, n° 1-1276/3, p. 6). Le ministre de la Justice a précisé que « les termes ' règles générales de la déontologie ' doivent être interprétés au sens large aux fins de pouvoir appréhender les règles relatives aux obligations résultant de l'exercice de la profession pour compte personnel ou en société » et que la compétence de la Chambre nationale des notaires « vise toute matière professionnelle d'intérêt national » (Doc. parl., Chambre, 1997-1998, n° 1432/19, p. 113).
B.7.3. Il résulte de ce qui précède que la compétence de la Chambre nationale des notaires pour déterminer les « règles générales de déontologie » a été conçue de manière large, englobant toute activité professionnelle que le notaire est susceptible d'accomplir, en ce compris, dès lors, la médiation.
B.7.4. Le fait que des règles déontologiques spécifiques en matière de médiation puissent s'appliquer aux notaires est d'ailleurs confirmé par l'article 37 du Code de déontologie, tel qu'il a été adopté le 22 juin 2004 par l'assemblée générale de la Chambre nationale des notaires et approuvé par l'arrêté royal du 21 septembre 2005 (Moniteur belge du 3 novembre 2005).
Cette disposition constitue l'unique article du chapitre X, intitulé « Des règles spécifiques à la médiation », et dispose : « Le notaire qui pratique la médiation respecte strictement les règles déontologiques en la matière émanant de la Chambre nationale ».
Le commentaire relatif à l'article 1er du Code de déontologie précité précise également à cet égard : « Parmi les attributions confiées par le législateur à la Chambre nationale des notaires figure celle d'établir les règles générales de la déontologie. C'est l'objet du présent code.
Le présent code n'est cependant pas exhaustif. On notera qu'il existe par ailleurs des règles déontologiques faisant l'objet de règlements particuliers édictés ou à édicter par la Chambre nationale, en matière de publicité, de négociation immobilière et de médiation (voy. articles 35, 36 et 37 ci-après), ainsi qu'un Code européen de déontologie notariale, adopté par la Conférence des Notariats de l'Union européenne ».
B.7.5. Les notaires ne sont par ailleurs pas les seuls médiateurs agréés soumis à deux corps de règles déontologiques. Ainsi, le Code de déontologie des avocats, rendu obligatoire par le règlement de l'ordre des barreaux francophones et germanophone du 12 novembre 2012 (Moniteur belge du 17 janvier 2013), contient, en ses articles 2.11 à 2.19, des dispositions qui sont également consacrées à l'activité spécifique de la médiation.
B.8.1. Le Code judiciaire prévoit deux formes de médiation, la médiation extrajudiciaire (articles 1730 à 1733) et la médiation judiciaire (articles 1734 à 1737).
L'intervention d'un médiateur agréé s'inscrit dans ces deux formes de médiation.
B.8.2. La commission fédérale de la médiation est seule compétente pour agréer les médiateurs. L'article 1726 du Code judiciaire établit les conditions pour être agréé comme médiateur par la commission fédérale de la médiation visée à l'article 1727 du même Code.
La commission fédérale de la médiation est également seule compétente pour retirer l'agrément des médiateurs qui ne satisfont plus aux conditions de l'article 1726 du Code judiciaire (article 1727, § 6, 1° et 4°, du Code judiciaire, tel qu'il s'appliquait avant sa modification par la loi du 18 juin 2018Documents pertinents retrouvés type loi prom. 18/06/2018 pub. 02/07/2018 numac 2018012858 source service public federal justice Loi portant dispositions diverses en matière de droit civil et des dispositions en vue de promouvoir des formes alternatives de résolution des litiges fermer).
B.8.3. L'article 1727 du Code judiciaire a été inséré par l'article 11 de la loi du 21 février 2005Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/02/2005 pub. 22/03/2005 numac 2005009173 source service public federal justice Loi modifiant le Code judiciaire en ce qui concerne la médiation fermer « modifiant le Code judiciaire en ce qui concerne la médiation » (ci-après : la loi du 21 février 2005Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/02/2005 pub. 22/03/2005 numac 2005009173 source service public federal justice Loi modifiant le Code judiciaire en ce qui concerne la médiation fermer). Les travaux préparatoires de la loi du 21 février 2005Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/02/2005 pub. 22/03/2005 numac 2005009173 source service public federal justice Loi modifiant le Code judiciaire en ce qui concerne la médiation fermer précisaient que, « si la médiation semble une mission naturelle du notaire ou de l'avocat, on ne voit pas pourquoi ceux-ci devraient nécessairement en détenir le monopole », mais qu'« un certain nombre de garanties d'honnêteté, de probité, de qualification, d'expérience, d'indépendance et d'impartialité doivent être établies » (Doc. parl., Chambre, 2003-2004, DOC 51-0327/001, p. 11).
L'article 1727 du Code judiciaire trouve son origine dans un amendement déposé par le Gouvernement, tendant à « instaurer un système d'agréation et de contrôle fédéral, délégué à une commission spécialisée » (Doc. parl., Chambre, 2003-2004, DOC 51-0327/003, p. 11) : « Si un système d'agréation est mis au point, il faut pouvoir contrôler qu'une personne agréée continue à remplir les qualités requises au fil du temps. Après une période transitoire, la commission fédérale de médiation sera chargée de cette mission, aidée en cela par les organes qui dispensent des formations au médiateur, organes qui seront agréés par la commission elle-même.
Outre les qualifications en matière de médiation, il existe un besoin certain de veiller à ce que la loi soit observée. La commission devra veiller à sa bonne application, et le cas échéant, retirer temporairement ou définitivement l'agréation des médiateurs qui y contreviennent.
L'instauration d'une commission fédérale est incontournable pour assurer une uniformité des exigences posées pour obtenir l'agrément de médiateur dans le cadre judiciaire » (ibid.).
La ministre de la Justice a également indiqué que la commission fédérale de la médiation « sera responsable des agréments et veillera à l'application de la loi » (Doc. parl., Chambre, 2003-2004, DOC 51-0327/007, p. 27); ses membres « sont nommés par le ministre sur la présentation des ordres des avocats, de la fédération royale des notaires et des instances représentatives des médiateurs-tiers » (ibid.).
B.8.4. En exécution de l'article 1727, § 6, 7°, du Code judiciaire, la commission fédérale de la médiation a adopté, par décision du 18 octobre 2007, le Code de bonne conduite du médiateur agréé.
Conformément aux travaux préparatoires précités, ce Code de bonne conduite s'applique à l'ensemble des médiateurs agréés par la commission fédérale de la médiation.
B.9.1. En ce qui concerne le Code de bonne conduite du médiateur agréé, les travaux préparatoires de la loi du 21 février 2005Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/02/2005 pub. 22/03/2005 numac 2005009173 source service public federal justice Loi modifiant le Code judiciaire en ce qui concerne la médiation fermer indiquent : « Les travaux de la commission devront par ailleurs être guidés par les instruments européens déjà existants, soit deux recommandations de 1998 et de 2001, ainsi que par le code de conduite pour les médiateurs, lequel est en cours d'élaboration à l'échelon européen » (Doc. parl., Chambre, 2003-2004, DOC 51-0327/007, p. 13).
B.9.2. Il ressort par ailleurs des travaux préparatoires de la loi du 21 février 2005Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/02/2005 pub. 22/03/2005 numac 2005009173 source service public federal justice Loi modifiant le Code judiciaire en ce qui concerne la médiation fermer que le législateur avait envisagé la question de l'articulation du Code de bonne conduite avec l'existence d'autres règles, légales ou déontologiques, qui seraient applicables aux médiateurs agréés.
La ministre de la Justice avait précisé à cet égard : « Le problème de la déontologie n'est pas nouveau. Il se pose par exemple de la même façon pour un avocat qui est curateur d'une entreprise en faillite. Dans ce cas, les règles de déontologie priment. Toutes les autres règles sont donc subsidiaires. Il en irait de même pour la médiation.
La commission de médiation, indépendante mais rattachée techniquement au Service public fédéral de la Justice, aurait du reste les mêmes pouvoirs que l'Institut néerlandais, à la différence près que la composition de la commission belge serait déterminée par la loi. Elle ne définirait pas de règles de déontologie, mais seulement un code de bonne conduite, qui s'ajouterait aux règles qui sont définies dans la loi (notamment le secret professionnel) » (ibid., p. 15).
Ainsi que : « [Dans] la médiation familiale, l'Ordre des barreaux francophones et germanophone a établi un règlement spécial à usage des avocats agissant en tant que médiateurs. L'avocat médiateur dispose donc de règles qui adaptent la déontologie à la fonction particulière qu'il exerce » (ibid., p. 17).
B.9.3. Il résulte de ce qui précède que les règles contenues dans le Code de bonne conduite du médiateur agréé ont été conçues comme s'ajoutant aux règles légales ou déontologiques applicables aux fonctions assumées à titre principal par les personnes agréées en qualité de médiateur.
B.10. Dès lors que les notaires qui exercent des activités de médiateurs agréés cumulent deux activités soumises à des corps de règles distincts, il est justifié qu'ils soient soumis aux corps de règles applicables aux différentes fonctions qu'ils cumulent. Il est par conséquent justifié qu'ils soient soumis, d'une part, aux règles de déontologie établies par la Chambre nationale des notaires, en ce compris dans le cadre de la médiation, et, d'autre part, au Code de bonne conduite du médiateur agréé établi par la commission fédérale de médiation.
La différence de traitement éventuelle entre les notaires qui sont également médiateurs agréés et les autres médiateurs agréés, qui ne seraient quant à eux soumis qu'au Code de bonne conduite, est par conséquent justifiée par le cumul de l'activité de médiateur agréé avec une autre fonction soumise à des règles déontologiques.
B.11. Le fait que les notaires-médiateurs agréés soient soumis à deux corps de règles n'entraîne pas d'effets disproportionnés au regard des objectifs, poursuivis par ces deux ensembles de règles, d'assurer une uniformité dans les devoirs et exigences respectifs d'une fonction réglementée.
Ce cumul de règles n'est d'ailleurs pas susceptible de générer des contradictions pour leurs destinataires, dès lors que, comme l'indique le juge a quo dans son arrêt de renvoi et comme il l'avait déjà jugé dans son arrêt n° 242.183 du 7 août 2018, le Code de déontologie relatif à la médiation notariale constitue une lex specialis par rapport aux règles de bonne conduite applicables à la médiation en général.
B.12. Il convient à cet égard de constater que les règles de bonne conduite édictées par la commission fédérale de la médiation sont conçues comme un cadre de règles uniformes applicables à tous les médiateurs agréés par la commission fédérale de la médiation.
Dans ce contexte, les règles déontologiques du notariat, applicables à l'activité spécifique de la médiation, peuvent compléter ou préciser les règles de bonne conduite applicables aux médiateurs agréés, mais ne pourraient toutefois pas diminuer les exigences contenues dans le Code de bonne conduite établi par la commission fédérale de la médiation, sous peine d'empiéter sur la compétence de la commission fédérale de médiation, reconnue dans l'article 1727, § 6, 7°, du Code judiciaire, tel qu'il s'appliquait avant son remplacement par l'article 216 de la loi du 18 juin 2018Documents pertinents retrouvés type loi prom. 18/06/2018 pub. 02/07/2018 numac 2018012858 source service public federal justice Loi portant dispositions diverses en matière de droit civil et des dispositions en vue de promouvoir des formes alternatives de résolution des litiges fermer, d'adopter des règles de bonne conduite qui soient applicables uniformément à l'ensemble des médiateurs agréés.
B.13.1. Cette répartition des compétences pour adopter des règles déontologiques, entre la commission fédérale de médiation et la Chambre nationale des notaires, est d'ailleurs confirmée par la loi du 18 juin 2018Documents pertinents retrouvés type loi prom. 18/06/2018 pub. 02/07/2018 numac 2018012858 source service public federal justice Loi portant dispositions diverses en matière de droit civil et des dispositions en vue de promouvoir des formes alternatives de résolution des litiges fermer, qui a renforcé la protection de l'exercice de la profession de médiateur agréé et de son titre, les modes alternatifs de règlement des conflits, comme la médiation, étant encouragés « afin de décharger les tribunaux » (Doc. parl., Chambre, 2017-2018, DOC 54-2919/001, p. 55).
Parmi les conditions pour être agréé comme médiateur, figure désormais celle de « déclarer par écrit adhérer au code de déontologie établi par la commission fédérale de médiation et le respecter pendant toute la durée de l'agrément » (article 1726, § 1er, 6°, du Code judiciaire, tel qu'il a été inséré par l'article 215, 4°, de la loi du 18 juin 2018Documents pertinents retrouvés type loi prom. 18/06/2018 pub. 02/07/2018 numac 2018012858 source service public federal justice Loi portant dispositions diverses en matière de droit civil et des dispositions en vue de promouvoir des formes alternatives de résolution des litiges fermer). La commission fédérale de la médiation reçoit par ailleurs la compétence de fixer un « code de déontologie » (article 1727, § 2, 5°, du Code judiciaire, tel qu'il a été remplacé par l'article 216 de la loi du 18 juin 2018Documents pertinents retrouvés type loi prom. 18/06/2018 pub. 02/07/2018 numac 2018012858 source service public federal justice Loi portant dispositions diverses en matière de droit civil et des dispositions en vue de promouvoir des formes alternatives de résolution des litiges fermer). Enfin, l'article 227quater du Code pénal, tel qu'il a été inséré par l'article 238 de la loi du 18 juin 2018Documents pertinents retrouvés type loi prom. 18/06/2018 pub. 02/07/2018 numac 2018012858 source service public federal justice Loi portant dispositions diverses en matière de droit civil et des dispositions en vue de promouvoir des formes alternatives de résolution des litiges fermer, incrimine spécifiquement le fait d'agir professionnellement « en tant que médiateur au sens du Code judiciaire, sans figurer sur la liste des médiateurs agréés visée à l'article 1727 ».
B.13.2. Dans ce contexte, « la procédure disciplinaire et la déontologie sont aussi renforcées » (Doc. parl., Chambre, 2017-2018, DOC 54-2919/001, p. 56; voy. aussi Doc. parl., Chambre, 2017-2018, DOC 54-2919/006, p. 76).
Le ministre de la Justice a précisé également qu'« il est évident que les dispositions déontologiques élaborées par la commission fédérale de médiation doivent être respectées par chaque médiateur agréé et ceci, indépendamment de règles déontologiques spécifiques auxquelles le médiateur agréé serait soumis conformément à son autre profession » (Doc. parl., Chambre, 2017-2018, DOC 54-2919/001, p. 248).
Bien que la loi du 18 juin 2018Documents pertinents retrouvés type loi prom. 18/06/2018 pub. 02/07/2018 numac 2018012858 source service public federal justice Loi portant dispositions diverses en matière de droit civil et des dispositions en vue de promouvoir des formes alternatives de résolution des litiges fermer soit postérieure au litige pendant devant le juge a quo, elle confirme que la commission fédérale de médiation est l'organe chargé de déterminer, de manière uniforme, les règles de bonne conduite ou les règles de déontologie encadrant, de manière générale, l'activité de médiateur agréé.
B.14. Sous réserve de ce qui est dit en B.12, la question préjudicielle appelle une réponse négative.
Par ces motifs, la Cour dit pour droit : Sous réserve de ce qui est dit en B.12, l'article 91, alinéa 1er, 1°, de la loi du 25 ventôse an XI « contenant organisation du notariat », lu en combinaison avec l'article 1727, § 6, 7°, du Code judiciaire, tel qu'il s'appliquait avant son remplacement par l'article 216 de la loi du 18 juin 2018Documents pertinents retrouvés type loi prom. 18/06/2018 pub. 02/07/2018 numac 2018012858 source service public federal justice Loi portant dispositions diverses en matière de droit civil et des dispositions en vue de promouvoir des formes alternatives de résolution des litiges fermer « portant dispositions diverses en matière de droit civil et des dispositions en vue de promouvoir des formes alternatives de résolution des litiges », ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution.
Ainsi rendu en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 22 octobre 2020.
Le greffier, F. Meersschaut Le président, F. Daoût