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Arrêt
publié le 31 décembre 2020

Extrait de l'arrêt n° 120/2020 du 24 septembre 2020 Numéros du rôle : 7142 et 7143 En cause : les questions préjudicielles relatives aux articles 285 et 288 du décret de la Communauté française du 11 avril 2014 « réglementant les titres et fo La Cour constitutionnelle, composée des présidents F. Daoût et A. Alen, et des juges T. Merckx-V(...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 120/2020 du 24 septembre 2020 Numéros du rôle : 7142 et 7143 En cause : les questions préjudicielles relatives aux articles 285 et 288 du décret de la Communauté française du 11 avril 2014 « réglementant les titres et fonctions dans l'enseignement fondamental et secondaire organisé et subventionné par la Communauté française », posées par le Conseil d'Etat.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents F. Daoût et A. Alen, et des juges T. Merckx-Van Goey, T. Giet, R. Leysen, J. Moerman et M. Pâques, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président F. Daoût, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles et procédure Par deux arrêts, nos 243.839 et 243.838, du 28 février 2019, dont les expéditions sont parvenues au greffe de la Cour les 14 et 15 mars 2019, le Conseil d'Etat a posé la question préjudicielle suivante : « Les articles 285 et 288 du décret du 11 avril 2014 réglementant les titres et fonctions dans l'enseignement fondamental et secondaire organisé et subventionné par la Communauté française violent-ils les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'ils permettent aux membres du personnel temporaires prioritaires au sens de l'article 24 du décret du 6 juin 1994 fixant le statut des membres du personnel subsidiés de l'enseignement officiel subventionné disposant d'un titre requis ou d'un titre suffisant A à la veille de l'entrée en vigueur du présent décret de conserver la possibilité d'être nommés, engagés à titre définitif ainsi que désignés en qualité de temporaires prioritaires ou protégés dans les conditions statutaires prévalant avant l'entrée en vigueur du décret (1er septembre 2016) et plus précisément, en ce qu'ils permettent donc que, pour les désignations en cours pour l'année 2016-2017, les enseignants de l'enseignement officiel subventionné titulaires d'un diplôme d'agrégé de l'enseignement secondaire supérieur (AESS) en section éducation physique et les enseignants de l'enseignement officiel subventionné titulaires d'un diplôme d'agrégé de l'enseignement secondaire inférieur (AESI) en section éducation physique, continuent à être mis sur le même pied pour l'attribution des cours généraux d'éducation physique dans le degré supérieur de l'enseignement secondaire ? ».

Ces affaires, inscrites sous les numéros 7142 et 7143 du rôle de la Cour, ont été jointes. (...) III. En droit (...) B.1. Les questions préjudicielles, qui sont identiques, portent sur les articles 285 et 288 du décret de la Communauté française du 11 avril 2014 « réglementant les titres et fonctions dans l'enseignement fondamental et secondaire organisé et subventionné par la Communauté française » (ci-après : le décret du 11 avril 2014).

B.2.1. Le décret du 11 avril 2014 opère une réforme « annoncée depuis plus de 40 ans », emportant la « création d'un régime uniforme de titres et fonctions garantissant la priorité aux titres requis sur les titres suffisants et [la] création d'un régime de titres de pénurie » (Doc. parl., Parlement de la Communauté française, 2013-2014, n° 632/1, p. 9).

Compte tenu de « l'ampleur de la réforme et de ses multiples ramifications », un « important chapitre relatif aux dispositions transitoires » (ibid., p. 15) a été prévu dans le décret du 11 avril 2014.

Les dispositions en cause figurent dans la section III (« Les membres du personnel temporaires prioritaires/protégés ou temporaires non prioritaires comptabilisant l'ancienneté définie dans la présente section, à concurrence d'une charge partielle ou complète »), du chapitre II (« Dispositions transitoires »), du titre III (« Dispositions modificatives, abrogatoires, transitoires et finales ») du décret du 11 avril 2014.

B.2.2. L'article 285 du décret du 11 avril 2014 dispose : « Les membres du personnel, titulaires d'une charge partielle ou complète, visés par la présente section sont les suivants : [...] 3° les membres du personnel temporaires prioritaires au sens de l'article 24 du décret du 6 juin 1994 fixant le statut des membres du personnel subsidiés de l'enseignement officiel subventionné disposant d'un titre requis ou d'un titre suffisant A à la veille de l'entrée en vigueur du présent décret; [...] ».

Dans sa version initiale, avant sa modification par le décret du 14 mars 2019, l'article 288 du décret du 11 avril 2014 disposait : « Les membres du personnel visés à la présente section conservent la possibilité d'être nommés, engagés à titre définitif ainsi que désignés en qualité de temporaires prioritaires ou protégés dans les conditions statutaires prévalant avant l'entrée en vigueur du présent décret ».

En vertu de son article 294, le décret du 11 avril 2014 est entré en vigueur le 1er septembre 2016.

B.3. La Cour est interrogée sur la compatibilité des dispositions en cause avec les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce qu'elles permettent aux membres du personnel temporaires prioritaires, au sens de l'article 24 du décret de la Communauté française du 6 juin 1994 « fixant le statut des membres du personnel subsidiés de l'enseignement officiel subventionné » (ci-après : le décret du 6 juin 1994), disposant d'un titre requis ou d'un titre suffisant A à la veille de l'entrée en vigueur du décret du 11 avril 2014, de conserver la possibilité d'être nommés, engagés à titre définitif ainsi que désignés en qualité de temporaire prioritaire ou protégé dans les conditions statutaires prévalant avant l'entrée en vigueur le 1er septembre 2016 du décret du 11 avril 2014, et, plus précisément, en ce qu'elles « permettent donc que, pour les désignations en cours pour l'année 2016-2017, les enseignants de l'enseignement officiel subventionné titulaires d'un diplôme d'agrégé de l'enseignement secondaire supérieur (AESS) en section éducation physique et les enseignants de l'enseignement officiel subventionné titulaires d'un diplôme d'agrégé de l'enseignement secondaire inférieur (AESI) en section éducation physique, continuent à être mis sur le même pied pour l'attribution des cours généraux d'éducation physique dans le degré supérieur de l'enseignement secondaire ».

B.4. Il ressort des faits de la cause soumise au juge a quo et de la formulation des questions préjudicielles que la Cour est invitée à se prononcer sur le régime transitoire prévu par l'article 288 du décret du 11 avril 2014, en ce qu'il s'applique aux membres du personnel visés à l'article 285, 3°, du même décret, pour l'attribution des cours généraux d'éducation physique dans le degré supérieur de l'enseignement secondaire.

La Cour limite son examen à cette situation.

B.5.1. Dans son mémoire en réponse, la partie requérante devant le juge a quo informe la Cour qu'elle a été nommée pour un horaire complet, ce qui pourrait avoir une influence sur son intérêt aux recours pendants devant le Conseil d'Etat.

B.5.2. C'est en règle à la juridiction a quo qu'il appartient d'apprécier si la réponse à la question préjudicielle est utile à la solution du litige. Ce n'est que lorsque tel n'est manifestement pas le cas que la Cour peut décider que la question n'appelle pas de réponse.

B.5.3. En l'espèce, la circonstance nouvelle évoquée par la partie requérante devant le juge a quo et l'incidence éventuelle de cette circonstance sur l'intérêt aux recours pendants devant le juge a quo ne permettent pas de considérer que la réponse aux questions préjudicielles posées n'est manifestement plus utile à la solution des litiges.

B.6.1. L'article 24, § 1er, du décret du 6 juin 1994 dispose : « Pour toute désignation en qualité de membre du personnel temporaire, dans une fonction pour laquelle il possède le titre de capacité prévu à l'article 2, est prioritaire dans un pouvoir organisateur et entre dans un classement au sein de ce pouvoir organisateur, le membre du personnel qui peut faire valoir 360 jours de service effectivement accomplis dans une fonction de la catégorie en cause en fonction principale auprès de ce pouvoir organisateur et répartis sur deux années scolaires au moins et acquis au cours des cinq dernières années scolaires. [...] Les désignations se font dans le respect du classement.

Celui-ci est établi sur la base du nombre de jours d'ancienneté de service calculé conformément à l'article 34. [...] ».

Cette disposition instaure un régime de désignation prioritaire, au sein d'un pouvoir organisateur, sur la base d'un classement, des membres du personnel temporaire qui disposent des titres requis ou des titres jugés suffisants pour l'exercice de la fonction, et qui peuvent faire valoir un certain nombre de jours d'ancienneté de service auprès de ce pouvoir organisateur.

B.6.2.1. L'article 6, § 1er, de l'arrêté royal du 30 juillet 1975 « relatif aux titres jugés suffisants dans l'enseignement secondaire dispensé dans les établissements d'enseignement moyen ou d'enseignement normal officiels subventionnés » (ci-après : l'arrêté royal du 30 juillet 1975), avant son abrogation, avec effet au 1er septembre 2016, par l'article 116 du décret de la Communauté française du 30 juin 2016 « rendant applicable aux maîtres et professeurs de religion le décret du 11 avril 2014 réglementant les titres et fonctions dans l'enseignement fondamental et secondaire organisé et subventionné par la Communauté française et portant diverses mesures en matière de titres et fonctions » (ci-après : décret du 30 juin 2016), disposait : « Sans préjudice des dispositions prises en exécution de l'article 22 de la loi du 11 juillet 1973Documents pertinents retrouvés type loi prom. 11/07/1973 pub. 22/01/2010 numac 2010000021 source service public federal interieur Loi améliorant dans certains régimes de sécurité sociale la situation du parent salarié qui cesse temporairement d'être assujetti à la sécurité sociale. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, prérappelée : 1° Un pouvoir organisateur qui procède au recrutement pour une fonction déterminée d'un porteur d'un titre jugé suffisant du groupe B, n'obtient la subvention-traitement pour ce membre du personnel que : a) s'il atteste avoir offert les prestations que comporte l'emploi dans la fonction en cause à tous les membres du personnel de l'établissement concerné, porteurs : - soit des titres requis, - soit des titres jugés suffisants du groupe A; - soit encore des titres jugés suffisants, conformément aux articles 3, 5 et 6 de l'arrêté royal du 14 avril 1964 déterminant les modalités de fixation des subventions-traitements aux membres du personnel des établissements officiels subventionnés d'enseignement moyen et normal, porteurs de titres de capacité jugés suffisants, pour ladite fonction et exerçant dans l'enseignement de plein exercice une fonction principale à prestations incomplètes; b) s'il atteste en outre avoir été dans l'impossibilité de recruter un porteur du titre requis ou un porteur d'un titre jugé suffisant du groupe A ou encore un porteur d'un des titres jugés suffisants conformément aux articles 3, 5 et 6 de l'arrêté royal du 14 avril 1964 prérappelé. Cette impossibilité doit se comprendre aussi dans le respect du caractère de l'enseignement dispensé dans l'établissement que ce pouvoir organise. c) et si le Ministre prend une décision favorable sur avis, selon le cas, de la commission créée en vertu des dispositions du § 3 du présent article ou des services du Gouvernement. Les attestations visées ci-dessus sont établies suivant le modèle annexé au présent arrêté et doivent être envoyées, par lettre recommandée, à la Direction générale qui assume la gestion du dossier du membre du personnel intéressé, au plus tard le 30me jour après l'entrée en fonction de celui-ci ».

En vertu de l'article 11, A, point 3, de l'arrêté royal du 30 juillet 1975, avant son abrogation, avec effet au 1er septembre 2016, par l'article 228, a), du décret du 11 avril 2014, le diplôme d'AESI en éducation physique constituait un titre jugé suffisant du groupe A pour l'accès à la fonction de professeur de cours spéciaux (éducation physique, jeux et sports, activités éducatives complémentaires) dans l'enseignement secondaire supérieur.

B.6.2.2. Il découle des articles 6 et 11 de l'arrêté royal du 30 juillet 1975 que les titulaires d'un diplôme d'AESI en éducation physique disposaient d'un titre jugé suffisant du groupe A leur permettant d'acquérir l'ancienneté de service pour le classement, en qualité de membre du personnel temporaire prioritaire visé à l'article 24 du décret du 6 juin 1994, en vue d'une désignation dans la fonction de professeur d'éducation physique dans des établissements d'enseignement secondaire supérieur de l'enseignement officiel subventionné.

B.6.3.1. Comme il est dit en B.2.1, le décret du 11 avril 2014 opère une grande réforme des titres et fonctions, uniforme pour les différents réseaux d'enseignement, qui garantit notamment la priorité des titres requis sur les titres suffisants.

L'exposé des motifs mentionne : « Chaque niveau d'enseignement (maternel, primaire, DI et DS) est marqué par des titres de capacité dont la composante pédagogique est sinon spécifique à ce niveau, celle(s) qui est (sont) le plus fréquemment reconnue(s) comme adéquate(s). Ainsi au niveau : [...] - secondaire supérieur, les composantes pédagogiques considérées comme adéquates sont d'une part l'AESS et d'autre part le CAP pour les titres de capacité dont la composante ' compétence disciplinaire ' n'ouvre pas l'accès à l'agrégation » (Doc. parl., Parlement de la Communauté française, 2013-2014, n° 632/1, p. 12).

B.6.3.2. En ce qui concerne la fonction de professeur d'éducation physique dans l'enseignement secondaire supérieur, l'article 228 du décret du 11 avril 2014 abroge, au 1er septembre 2016, l'article 11, A, point 3, de l'arrêté royal du 30 juillet 1975. Il ressort par ailleurs des annexes de l'arrêté du Gouvernement de la Communauté française du 5 juin 2014 « relatif aux fonctions, titres de capacité et barèmes portant exécution des articles 7, 16, 50 et 263 du décret du 11 avril 2014 réglementant les titres et fonctions dans l'enseignement fondamental et secondaire organisé et subventionné par la Communauté française » (ci-après : l'arrêté du 5 juin 2014) que les cours d'éducation physique sont devenus des cours généraux pour lesquels, dans l'enseignement secondaire supérieur, le titre requis est le diplôme d'AESS en éducation physique.

Il découle de cette réforme que le diplôme d'AESI en éducation physique ne constitue plus un titre jugé suffisant pour accéder à la fonction de professeur d'éducation physique dans l'enseignement secondaire supérieur.

B.6.4. Les dispositions en cause instaurent cependant un régime transitoire, qui tient compte de « l'ampleur de la réforme et de ses multiples ramifications », afin de préserver les droits acquis des membres du personnel concernés.

Dans l'exposé des motifs, la logique de ce régime transitoire est expliquée comme suit : « Compte tenu de l'ampleur de la réforme et de ses multiples ramifications, ce chapitre a nécessité un ' screening ' précis de nombreux décrets et arrêtés.

Sans entrer dans le détail de toutes ces mesures, cet exposé des motifs est une opportunité de mettre en évidence la logique qui a prévalu dans l'important chapitre relatif aux dispositions transitoires applicables aux membres des personnels en place au moment de l'entrée en application de la réforme.

Les mesures transitoires vont aussi loin que possible dans le respect du principe ' on ne change pas les règles en cours de jeu '. On a donc non seulement voulu maintenir l'intégralité des droits des personnes nommées ou engagées à titre définitif, mais également tenir compte, autant que possible, des perspectives qui s'ouvraient aux enseignants au moment de leur engagement ou de leur recrutement.

Les membres du personnel concernés par les mesures transitoires peuvent être répertoriés en quatre catégories : - Les MDP nommés ou engagés à titre définitif (TR, TSA, TSB ou autre TP (art 20, etc...)) à concurrence d'une charge partielle ou complète.

Les droits liés à leur nomination seront maintenus; - Les MDP désignés ou engagés, à concurrence d'une charge partielle ou complète, en qualité de temporaires prioritaires/protégés ou temporaires non prioritaires comptant une certaine ancienneté.

L'ancienneté acquise sera maintenue et les possibilités d'être nommés seront maintenues aux conditions précédant la réforme; - Les MDP temporaires non prioritaires/protégés ne répondant pas aux conditions d'ancienneté. Ils feront l'objet d'un nouvel engagement et ne pourront être nommés que dans les conditions en vigueur après la réforme; - Les MDP dont la situation devra être examinée par la CITICAP car non couverts par les mesures transitoires » (Doc. parl., Parlement de la Communauté française, 2013-2014, n° 632/1, p. 15).

En ce qui concerne l'article 285, en cause, du décret du 11 avril 2014, l'exposé des motifs mentionne : « Cet article définit le champ d'application rationne personae des mesures transitoires ' étendues ' en ce qui concerne les membres du personnel temporaire.

Par mesures transitoires ' étendue[s] ', on entend la possibilité pour le membre du personnel visé d'être nommé ou engagé à titre définitif selon les règles statutaires prévalant avant l'entrée en vigueur du présent décret et la possibilité de conserver la rémunération attachée à la fonction antérieure au présent décret si celle-ci est plus élevée.

Ce champ d'application porte sur les membres du personnel temporaires prioritaires et protégés au sens des différents statuts applicables aux membres du personnel de l'enseignement.

Dans l'enseignement subventionné, on vise également les membres du personnel temporaires non prioritaires disposant d'un titre requis ou d'un titre suffisant A à la veille de l'entrée en vigueur du présent décret et d'une ancienneté de fonction de 315 jours sur minimum 2 années scolaires, acquises dans les 5 dernières années scolaires. » (ibid., p. 43).

En ce qui concerne l'article 288, en cause, du décret du 11 avril 2014, l'exposé des motifs mentionne que cet article « port[e] sur le contenu des mesures transitoires ' étendues ' » (ibid., p. 43) : « Les membres du personnel entrant dans le champ d'application de ces mesures transitoires étendues peuvent : - récupérer l'ancienneté acquise dans les fonctions existant antérieurement à l'entrée en vigueur du présent décret selon les règles définies à la section 2, - être nommés ou engagés à titre définitif, et partant, d'être désignés en qualité de temporaires prioritaires ou protégés, selon les règles applicables avant l'entrée en vigueur du présent décret » (ibid.).

B.7.1. Conformément aux dispositions en cause, les membres du personnel temporaires prioritaires, au sens de l'article 24 du décret du 6 juin 1994, disposant d'un titre requis ou d'un titre suffisant A à la veille de l'entrée en vigueur du décret du 11 avril 2014, conservent la possibilité d'être nommés, engagés à titre définitif ainsi que désignés en qualité de temporaire prioritaire ou protégé dans les conditions statutaires prévalant avant l'entrée en vigueur du décret du 11 avril 2014.

B.7.2. La Cour doit examiner si, en maintenant les droits acquis à la veille de l'entrée en vigueur, le 1er septembre 2016, du décret du 11 avril 2014, des membres temporaires prioritaires comptant une certaine ancienneté de service, visés à l'article 24 du décret du 6 juin 1994, et en permettant ainsi que les enseignants titulaires d'un diplôme d'AESI en éducation physique continuent à être mis sur le même pied que les enseignants titulaires d'un diplôme d'AESS en éducation physique pour une désignation dans la fonction de professeur d'éducation physique dans l'enseignement secondaire supérieur, les dispositions en cause sont compatibles avec les articles 10 et 11 de la Constitution.

B.8. Il appartient en principe au législateur, lorsqu'il décide d'introduire une nouvelle réglementation, d'estimer s'il est nécessaire ou opportun d'assortir celle-ci de dispositions transitoires. Le principe d'égalité et de non-discrimination n'est violé que si le régime transitoire ou son absence entraîne une différence de traitement dénuée de justification raisonnable ou s'il est porté une atteinte excessive au principe de la confiance légitime.

B.9.1. La mesure transitoire contenue dans les dispositions en cause a un caractère général et repose sur un critère objectif, à savoir le fait d'avoir le statut de membre du personnel temporaire prioritaire, au sens de l'article 24 du décret du 6 juin 1994, disposant d'un titre requis ou d'un titre suffisant A à la veille de l'entrée en vigueur du décret du 11 avril 2014.

B.9.2. Comme il est dit en B.6.3, le décret du 11 avril 2014 opère une réforme d'ampleur des titres et fonctions dans l'enseignement. En exécution de ce décret, les cours d'éducation physique sont devenus des cours généraux, pour lesquels, dans l'enseignement secondaire supérieur, le titre requis est le diplôme d'AESS. Il ressort des travaux préparatoires cités en B.6.4 que les dispositions en cause s'inscrivent dans un ensemble de mesures transitoires visant à respecter le principe selon lequel « on ne change pas les règles en cours de jeu ». Les dispositions en cause visent dès lors à maintenir les droits acquis au 31 août 2016, c'est-à-dire à la veille de l'entrée en vigueur du décret du 11 avril 2014, par les membres du personnel temporaires prioritaires, visés à l'article 24 du décret du 6 juin 1994. Un tel objectif de préserver les droits acquis et espérances légitimes des enseignants concernés est légitime, dès lors que ceux-ci pouvaient, sur la base des dispositions prévalant avant l'entrée en vigueur du décret du 11 avril 2014, escompter une nomination dans une fonction pour laquelle ils disposaient d'un titre jugé suffisant du groupe A au moment où ils ont acquis au sein d'un pouvoir organisateur une ancienneté de service leur permettant de bénéficier du statut et du classement visés à l'article 24 du décret du 6 juin 1994.

Compte tenu de l'ampleur de la réforme opérée par le décret du 11 avril 2014 et du fait que le statut de membre du personnel temporaire prioritaire, visé à l'article 24 du décret du 6 juin 1994, requiert une certaine ancienneté de service, il est raisonnablement justifié de préserver les droits acquis de ces enseignants.

B.9.3. Enfin, une telle mesure ne porte pas une atteinte disproportionnée aux attentes légitimes des enseignants titulaires d'un diplôme d'AESS en éducation physique. En effet, les dispositions en cause se limitent à maintenir, à titre transitoire, le régime qui existait avant la réforme opérée par le décret du 11 avril 2014, dans le cadre duquel les enseignants titulaires d'un diplôme d'AESS en éducation physique n'ignoraient pas qu'ils étaient mis sur le même pied que les enseignants titulaires d'un diplôme d'AESI en éducation physique pour l'acquisition d'une ancienneté de service qui leur permettait de bénéficier du statut et du classement visés à l'article 24 du décret du 6 juin 1994 en vue d'une désignation dans la fonction de professeur d'éducation physique dans l'enseignement secondaire supérieur. Ces enseignants titulaires d'un diplôme d'AESS en éducation physique ne pouvaient donc pas escompter, avant l'entrée en vigueur du décret du 11 avril 2014, être nommés prioritairement par rapport aux enseignants temporaires prioritaires mieux classés titulaires d'un diplôme d'AESI en éducation physique.

B.10. Les questions préjudicielles appellent une réponse négative.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : Les articles 285, 3°, et 288 du décret de la Communauté française du 11 avril 2014 « réglementant les titres et fonctions dans l'enseignement fondamental et secondaire organisé et subventionné par la Communauté française » ne violent pas les articles 10 et 11 de la Constitution.

Ainsi rendu en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 24 septembre 2020.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux Le président, F. Daoût

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