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Arrêt
publié le 17 avril 2020

Extrait de l'arrêt n° 148/2019 du 24 octobre 2019 Numéros du rôle : 6902 et 6909 En cause : les recours en annulation partielle de la loi du 2 octobre 2017 « relative à l'harmonisation de la prise en compte des périodes d'études pour le calcu La Cour constitutionnelle, composée des présidents F. Daoût et A. Alen, et des juges L. Lavrysen(...)

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Extrait de l'arrêt n° 148/2019 du 24 octobre 2019 Numéros du rôle : 6902 et 6909 En cause : les recours en annulation partielle de la loi du 2 octobre 2017Documents pertinents retrouvés type loi prom. 02/10/2017 pub. 24/10/2017 numac 2017013687 source service public federal securite sociale Loi relative à l'harmonisation de la prise en compte des périodes d'études pour le calcul de la pension type loi prom. 02/10/2017 pub. 31/10/2017 numac 2017031388 source service public federal interieur Loi réglementant la sécurité privée et particulière fermer « relative à l'harmonisation de la prise en compte des périodes d'études pour le calcul de la pension », introduits par Joseph François et par Marc Derclaye et autres.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents F. Daoût et A. Alen, et des juges L. Lavrysen, J.-P. Moerman, P. Nihoul, T. Giet et J. Moerman, assistée du greffier F. Meersschaut, présidée par le président F. Daoût, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des recours et procédure a. Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 13 avril 2018 et parvenue au greffe le 16 avril 2018, Joseph François a introduit un recours en annulation de l'article 4, § 1er, alinéa 2, de la loi du 2 octobre 2017Documents pertinents retrouvés type loi prom. 02/10/2017 pub. 24/10/2017 numac 2017013687 source service public federal securite sociale Loi relative à l'harmonisation de la prise en compte des périodes d'études pour le calcul de la pension type loi prom. 02/10/2017 pub. 31/10/2017 numac 2017031388 source service public federal interieur Loi réglementant la sécurité privée et particulière fermer « relative à l'harmonisation de la prise en compte des périodes d'études pour le calcul de la pension » (publiée au Moniteur belge du 24 octobre 2017).b. Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 24 avril 2018 et parvenue au greffe le 26 avril 2018, un recours en annulation des articles 2, § § 1er et 3, 3, § 1er, 3), et § 2, 4 à 9, 10, § 2, et 11 de la même loi a été introduit par Marc Derclaye, Benoît Augustyns, Pascal Pahaut et le Syndicat libre de la fonction publique, assistés et représentés par Me C.Cools et Me H. Herion, avocats au barreau de Bruxelles.

Ces affaires, inscrites sous les numéros 6902 et 6909 du rôle de la Cour, ont été jointes. (...) II. En droit (...) Quant aux dispositions attaquées, à leur contexte et à l'objet des recours B.1.1. Les recours sont dirigés contre les articles 2, § § 1er et 3, 3, § 1er, 3), et § 2, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, § 2, et 11 de la loi du 2 octobre 2017Documents pertinents retrouvés type loi prom. 02/10/2017 pub. 24/10/2017 numac 2017013687 source service public federal securite sociale Loi relative à l'harmonisation de la prise en compte des périodes d'études pour le calcul de la pension type loi prom. 02/10/2017 pub. 31/10/2017 numac 2017031388 source service public federal interieur Loi réglementant la sécurité privée et particulière fermer « relative à l'harmonisation de la prise en compte des périodes d'études pour le calcul de la pension » (ci-après : la loi du 2 octobre 2017Documents pertinents retrouvés type loi prom. 02/10/2017 pub. 24/10/2017 numac 2017013687 source service public federal securite sociale Loi relative à l'harmonisation de la prise en compte des périodes d'études pour le calcul de la pension type loi prom. 02/10/2017 pub. 31/10/2017 numac 2017031388 source service public federal interieur Loi réglementant la sécurité privée et particulière fermer), qui disposent : «

Art. 2.§ 1er. Le présent chapitre s'applique aux pensions qui sont à charge de l'un des pouvoirs ou organismes visés à l'article 1er de la loi du 14 avril 1965Documents pertinents retrouvés type loi prom. 14/04/1965 pub. 18/07/2012 numac 2012000418 source service public federal interieur Loi établissant certaines relations entre les divers régimes de pensions du secteur public. - Coordination officieuse en langue allemande fermer établissant certaines relations entre les divers régimes de pensions du secteur public. [...] § 3. Le présent chapitre est également applicable aux personnes qui, au moment de la date d'introduction de la demande, ne relèvent d'aucun régime légal obligatoire de pension à condition qu'elles aient acquis en dernier lieu la qualité de membre du personnel. [...]

Art. 3.§ 1er. A condition qu'elles aient été sanctionnées respectivement par l'obtention d'un diplôme, d'un doctorat ou d'une qualification professionnelle, un membre du personnel peut régulariser ses périodes d'études comme suit : [...] 3) la durée des périodes d'études visées à l'article 2, § 2, 8°, c) pouvant être régularisées est limitée au nombre minimum de périodes d'études qui était requis pour l'obtention de la qualification professionnelle; [...] § 2. La durée des périodes d'études qui peuvent être régularisées conformément au paragraphe 1er, est le cas échéant diminuée de la durée de la bonification à titre gratuit pour diplôme ou pour études préliminaires telle qu'elle résulte de l'application des articles 393/1 du Code judiciaire, 36quater de la loi du 9 juillet 1969 modifiant et complétant la législation relative aux pensions de retraite et de survie des agents du secteur public, ou 5quater de la loi du 16 juin 1970 relative aux bonifications pour diplômes en matière de pensions des membres de l'enseignement. [...]

Art. 4.§ 1er. En vue de bénéficier de la régularisation des périodes d'études, le membre du personnel doit adresser une demande écrite ou par voie électronique au Service.

La demande doit être introduite avant la date de prise de cours de la pension de retraite.

La demande est censée être introduite à la date de réception par le Service de la demande de régularisation. § 2. Une demande de régularisation est possible pour la totalité ou pour une partie des périodes d'études régularisables.

Pour les périodes d'études visées à l'article 2, § 2, 8°, a) et e), une demande de régularisation ne peut être introduite que pour des années d'études complètes de douze mois.

Par dérogation à l'alinéa 2, une demande de régularisation peut être introduite pour la partie de l'année d'études qui, en raison de l'application de l'article 393/1 du Code judiciaire, de l'article 36quater de la loi du 9 juillet 1969 modifiant et complétant la législation relative aux pensions de retraite et de survie des agents du secteur public, ou de l'article 5quater de la loi du 16 juin 1970 relative aux bonifications pour diplômes en matière de pensions des membres de l'enseignement, ne peut plus donner lieu à l'octroi d'une bonification à titre gratuit, pour autant que l'année d'études considérée soit régularisable entièrement conformément aux dispositions du présent titre. § 3. Un membre du personnel ne peut introduire que deux demandes de régularisation au maximum, tous régimes de pension confondus. § 4. Aucune demande de régularisation n'est admise dans la mesure où elle porte sur des périodes qui ont déjà fait l'objet d'une régularisation dans le régime de pensions des travailleurs salariés ou des travailleurs indépendants. § 5. Pour l'application du présent chapitre, les agents qui prestent des services en qualité de temporaire dans l'enseignement ou en qualité d'agent statutaire en stage non encore assujetti à un régime de pension du secteur public sont considérés comme des membres du personnel au sens de l'article 2, § 2, 6°.

Les régularisations qu'ils effectuent produiront leurs effets dans un régime de pension du secteur public pour autant que ces agents, postérieurement à ces services, fassent l'objet d'une nomination à titre définitif et que leur demande de régularisation ait été introduite soit dans les 10 années qui ont suivi l'obtention du diplôme, du doctorat ou de la qualification professionnelle, soit avant le 1er décembre 2020.

Si les conditions visées à l'alinéa 2 ne sont pas remplies, la régularisation produit ses effets dans le régime de pension des travailleurs salariés. § 6. En cas d'application de l'article 46, § 4, de la loi du 15 mai 1984Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/05/1984 pub. 21/02/2012 numac 2012201027 source service public federal interieur Loi portant mesures d'harmonisation dans les régimes de pensions type loi prom. 15/05/1984 pub. 03/06/2010 numac 2010000322 source service public federal interieur Loi portant mesures d'harmonisation dans les régimes de pensions Coordination officieuse en langue allemande type loi prom. 15/05/1984 pub. 06/02/2015 numac 2015000046 source service public federal interieur Loi portant mesures d'harmonisation dans les régimes de pensions. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/05/1984 pub. 17/11/2015 numac 2015000649 source service public federal interieur Loi portant mesures d'harmonisation dans les régimes de pensions. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer portant mesures d'harmonisation dans les régimes de pensions, la régularisation du membre du personnel visé par cet article produit ses effets dans le régime de pension des travailleurs salariés. [...]

Art. 5.La régularisation des périodes d'études ne produit ses effets, à partir de la date de prise de cours de la pension, qu'après paiement de la cotisation de régularisation due, fixée conformément à la présente section.

Art. 6.§ 1er. La cotisation de régularisation est fixée à 1 500 EUR par période à régulariser de 12 mois.

Ce montant varie de la manière prévue par la loi du 1er mars 1977Documents pertinents retrouvés type loi prom. 01/03/1977 pub. 05/03/2009 numac 2009000107 source service public federal interieur Loi organisant un régime de liaison à l'indice des prix à la consommation du Royaume de certaines dépenses dans le secteur public. - Coordination officieuse en langue allemande fermer organisant un régime de liaison à l'indice des prix à la consommation du Royaume de certaines dépenses dans le secteur public. Pour l'application de ce titre, il est rattaché au coefficient de majoration en vigueur au 1er décembre 2017 et comprend l'augmentation liée à ce coefficient.

Le montant à prendre en considération est celui qui, à la date d'introduction de la demande de régularisation, résulte de l'application des alinéas 1er et 2. § 2. Pour le calcul de la cotisation de régularisation due pour les périodes d'études visées à l'article 2, § 2, 8°, a) et e) chaque année d'études est égale à douze mois, sauf en cas d'application de l'article 4, § 2, alinéa 3. Pour les périodes d'études visées à l'article 2, § 2, 8°, b), c) et d), ainsi qu'en cas d'application de l'article 4, § 2, alinéa 3, la cotisation due est fixée selon la durée de la période à régulariser. § 3. Si la demande de régularisation est introduite après l'expiration d'un délai de dix ans à partir de l'obtention du diplôme, du doctorat ou de la qualification professionnelle, la cotisation de régularisation correspond à un pourcentage de la valeur actuelle, à la date d'introduction de la demande de régularisation, de l'accroissement du montant de la pension de retraite correspondant aux périodes d'études sur lesquelles porte la demande de régularisation, calculée avec un taux d'intérêt et des tables de mortalité, et compte tenu du traitement de référence qui sert de base pour le calcul de la pension tel que connu au moment de l'introduction de la demande de régularisation.

Le Roi précise le pourcentage de la valeur actuelle pris en compte sans que celui-ci puisse être inférieur à 50 %, le taux d'intérêt de l'actualisation et les tables de mortalité utilisés pour le calcul de la valeur actuelle ainsi que l'âge à partir duquel le montant de la pension de retraite est supposé payé.

Toute demande régulièrement introduite avant le 1er décembre 2020, est considérée comme ayant été introduite dans le délai de dix ans visé à l'alinéa premier.

Art. 7.Le versement de la cotisation de régularisation est effectué en une seule fois, dans les six mois à compter de la date de la décision de régularisation visée à l'article 11.

Art. 8.Le versement de la cotisation de régularisation est effectué au Service, qui l'affectera ensuite au régime de pension du secteur public qui s'applique au membre du personnel à la date de l'introduction de sa demande de régularisation.

Aucun transfert de cotisations ne sera effectué par la suite entre les différents régimes de pension du secteur public. A l'exception des transferts visés dans la loi du 10 février 2003Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/02/2003 pub. 27/03/2003 numac 2003022215 source service public federal securite sociale Loi réglant le transfert de droits à pensions entre des régimes belges de pensions et ceux d'institutions de droit international public fermer réglant le transfert de droits à pensions entre des régimes belges de pensions et ceux d'institutions de droit international public, aucun transfert de cotisations ne sera effectué par la suite vers d'autres régimes de pension belges ou étrangers de sécurité sociale.

Art. 9.La cotisation de régularisation versée conformément à la présente section ne pourra en aucun cas être remboursée.

Art. 10.§ 1er. Par dérogation à l'article 6, § 1er, la cotisation de régularisation due est réduite de quinze pct. si la demande de régularisation est introduite entre le 1er décembre 2017 et le 30 novembre 2019. § 2. Le paragraphe 1er n'est pas d'application aux personnes qui ont fait l'objet d'une nomination définitive ou y assimilée après le 1er décembre 2017. [...]

Art. 11.§ 1er. Le Service instruit la demande de régularisation et notifie sa décision.

A partir de la notification de la décision de régularisation, le membre du personnel est tenu, vis-à-vis du Service, de verser la cotisation de régularisation pour les périodes d'études visées dans cette décision. § 2. Avant de notifier sa décision de régularisation, le Service informe le membre du personnel du montant total de la cotisation qu'il aura à verser compte tenu des périodes d'études pour lesquelles le membre du personnel a introduit une demande de régularisation et, le cas échéant, pour la période complète d'études régularisable.

Si le membre du personnel opte pour la régularisation de plus ou de moins d'années d'études qu'indiquées dans sa demande, le Service lui communique le montant total de la cotisation qu'il aura à verser, calculée en fonction du choix du membre du personnel. § 3. La décision de régularisation du Service tient compte de l'option du membre du personnel exercée après avoir reçu les informations visées au paragraphe 2.

Si le membre du personnel ne paye pas dans le délai déterminé à l'article 7, sa demande de régularisation est définitivement clôturée ».

B.1.2. Le recours introduit dans l'affaire n° 6902 tend à l'annulation de l'article 4, § 1er, précité, de la loi du 2 octobre 2017Documents pertinents retrouvés type loi prom. 02/10/2017 pub. 24/10/2017 numac 2017013687 source service public federal securite sociale Loi relative à l'harmonisation de la prise en compte des périodes d'études pour le calcul de la pension type loi prom. 02/10/2017 pub. 31/10/2017 numac 2017031388 source service public federal interieur Loi réglementant la sécurité privée et particulière fermer, en tant qu'il dispose que la demande de prise en compte des périodes d'études pour le calcul de la pension doit être introduite avant la date de prise de cours de la pension.

Les parties requérantes dans l'affaire n° 6909 reprochent : - à l'article 2, § § 1er et 3, de permettre aux seuls fonctionnaires nommés à titre définitif de régulariser leurs années d'études en vertu de la loi attaquée. Elles critiquent également la définition des périodes d'études contenue dans cet article ; - à l'article 3, § 1er, 3), et § 2, de limiter le nombre d'années d'études régularisables ; - à l'article 4 d'exiger que le fonctionnaire fasse une demande de régularisation ; - à l'article 5 de disposer que la régularisation des périodes d'études ne produit ses effets qu'après le paiement de la cotisation de régularisation ; - à l'article 6 d'établir les montants de ladite régularisation ; - à l'article 7 de prévoir que le paiement de la cotisation doit être effectué dans les six mois de la date de la décision de régularisation et en une seule fois ; - à l'article 8 de prévoir que la cotisation doit être versée auprès du SPF Sécurité sociale ; - à l'article 9 de prévoir que la cotisation ne pourra en aucun cas être remboursée ; - à l'article 10, § 2, de prévoir que les fonctionnaires nommés à titre définitif après le 1er décembre 2017 ne peuvent bénéficier de la réduction de 15 % prévue au paragraphe 1er ; - à l'article 11 de prévoir que le SPF Sécurité sociale rend une décision sur la demande de régularisation qui lie le demandeur.

B.2.1. La bonification pour diplôme a été instaurée pour les agents du secteur public par la loi du 9 juillet 1969 « modifiant et complétant la législation relative aux pensions de retraite et de survie des agents du secteur public ».

L'exposé des motifs de cette loi mentionne : « 4. Bonifications pour études.

Aux termes de l'article 8 de la loi générale du 21 juillet 1844, les pensions de retraite sont liquidées à raison, pour chaque année de service, de 1/60è de la moyenne du traitement afférent aux cinq dernières années de la carrière, s'il s'agit de services sédentaires, et de 1/50è de cette même moyenne s'il s'agit de services dits ' actifs '.

D'autre part, aucune pension ne peut excéder les 3/4 du traitement qui a servi de base à sa liquidation.

Pour pouvoir bénéficier d'une pension complète, 45 années de services sédentaires sont nécessaires, carrière qui ne peut être atteinte que si l'intéressé est entré en fonction au plus tard à l'âge de 20 ans.

Les fonctionnaires universitaires ou diplômés de l'enseignement supérieur ne peuvent entrer en fonction à cet âge, en raison de leurs études, et il leur est généralement impossible d'obtenir une pension complète à l'âge de 65 ans.

En vue d'éviter le préjudice que leur cause leur entrée tardive au service de l'Etat, il est proposé de valoriser la durée normale des études pour les membres du personnel titulaires d'un diplôme d'au moins 3 ans d'études post-secondaires, pour autant que ce diplôme ait été exigé lors du recrutement. Les pensions en cours seront revues sur cette base » (Doc. parl., Chambre, 1968-1969, n° 368/1, pp. 4-5, et ibid., (rapport) n° 368/2, pp. 5-6).

B.2.2. La bonification pour diplôme des membres du personnel de l'enseignement était réglée par la loi du 16 juin 1970 « relative aux bonifications pour diplômes en matière de pensions des membres de l'enseignement ».

L'exposé des motifs de cette loi précisait : « La loi du 8 avril 1884 attache à la possession de certains diplômes une bonification de temps de service qui intervient dans la liquidation des pensions de retraite des membres de l'enseignement.

Cette loi, qui n'a été complétée qu'une seule fois, en 1912, ne répond plus aux nécessités actuelles ainsi que l'ont souligné, à juste titre, les auteurs de diverses propositions de lois destinées à la compléter ou à la remplacer.

En effet, elle contient une énumération limitative des diplômes donnant lieu à bonification, laquelle ne comprend évidemment pas les titres créés après 1912 ni certains diplômes qui existaient déjà, mais qui n'ont été admis pour l'exercice d'une fonction dans l'enseignement qu'à une époque plus récente.

D'autre part, la jurisprudence administrative, fondée sur les travaux préparatoires de la loi de 1884, limite l'octroi de la bonification aux seuls cas où le diplôme a été requis par une loi organique de l'enseignement pour remplir la fonction exercée.

L'absence de cette condition prive de toute bonification les titulaires de pension de retraite ayant exercé un emploi pour lequel le diplôme était requis par une disposition réglementaire (arrêté royal, arrêté du conseil provincial, délibération du conseil communal) ou n'était pas exigé.

Se trouvent notamment dans ce cas tous les retraités de l'enseignement technique, officiel et libre, de l'enseignement artistique ainsi que les personnes qui bénéficient en vertu du pacte scolaire d'un régime de pension fixé par référence à celui du personnel des établissements libres d'enseignement technique. Il aurait certes été possible de compléter les dispositions de la loi de 1884 et d'en étendre le champ d'application aux catégories d'enseignants exclues jusqu'à présent, mais le gouvernement a estimé qu'il était préférable, dans un but d'uniformisation et de rationalisation, de refondre l'ensemble des dispositions relatives aux bonifications pour diplôme dans les pensions du personnel enseignant en s'inspirant, dans l'élaboration des règles nouvelles, des principes qui sont à la base des mesures adoptées récemment par le législateur en matière de bonification pour diplômes dans les pensions des agents de l'Etat.

Le projet qui vous est soumis présente donc d'évidentes analogies avec les dispositions du chapitre VI de la loi du 9 juillet 1969 dont il ne s'écarte que lorsque des particularités propres à la situation du personnel enseignant justifient des règles différentes de celles applicables aux fonctionnaires » (Doc. parl., Sénat, 1969-1970, n° 231/1, pp. 1-2).

B.3.1. Les articles 3 et 5 de la loi du 28 avril 2015Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/04/2015 pub. 13/05/2015 numac 2015022159 source service public federal securite sociale Loi portant des dispositions concernant les pensions du secteur public fermer « portant des dispositions concernant les pensions du service public » (ci-après : la loi du 28 avril 2015Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/04/2015 pub. 13/05/2015 numac 2015022159 source service public federal securite sociale Loi portant des dispositions concernant les pensions du secteur public fermer) ont supprimé la bonification de temps pour diplôme accordée pour les périodes d'études, ainsi que pour les périodes y assimilées, à l'égard des membres du personnel nommés du secteur public et des membres du personnel de l'enseignement, pour les retraites qui prennent cours à dater du 1er janvier 2030.

Les articles 2 et 4 de la même loi établissent par ailleurs un régime transitoire, en vue de réduire progressivement la bonification de temps pour diplôme pour les membres du personnel concernés, en fonction de la date à laquelle la retraite prend cours et du nombre d'années d'études requises pour le diplôme dont ils sont titulaires.

B.3.2. L'exposé des motifs de la loi du 28 avril 2015Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/04/2015 pub. 13/05/2015 numac 2015022159 source service public federal securite sociale Loi portant des dispositions concernant les pensions du secteur public fermer mentionnait : « Le point 2.3 de l'accord de gouvernement prévoit des adaptations à la réglementation concernant la pension des fonctionnaires.

Un des objectifs poursuivis par la réforme est d'aligner au sein des différents régimes de pension, les conditions de durée de carrière pour bénéficier du droit à la pension de retraite anticipée.

Pour le secteur public, cet alignement consiste notamment à supprimer, pour la détermination du droit à la pension, la prise en considération de la bonification pour diplôme.

Précisons de suite que cette mesure ne concerne en rien le calcul de la pension.

La suppression sera effective pour les pensions qui prennent cours à partir du 1er janvier 2030. Cette suppression concernera également la bonification relative aux stages qui ont permis d'obtenir l'agréation en qualité de médecin-spécialiste.

Un régime transitoire est prévu pour les pensions qui prennent cours entre le 1er janvier 2016 et le 31 décembre 2029.

Le régime transitoire consiste en une réduction progressive de la bonification pour diplôme de 4, 5 ou 6 mois par année calendrier selon que la durée des études est de respectivement soit 2 ans ou moins, soit plus de 2 ans et moins de 4 ans, soit 4 ans et plus. La première réduction est appliquée aux pensions qui prennent cours à partir du 1er janvier 2016. Les réductions sont ensuite augmentées chaque 1er janvier des années ultérieures de 4, 5 ou 6 mois selon la durée des études. A ce sujet il faut faire remarquer qu'étant donné qu'une durée d'études de 3 ans représente 36 mois et que 36 n'est pas divisible par 5 la réduction de l'année 2023 pour un tel diplôme est de 1 mois et pas de 5 mois. Ces réductions sont exprimées sous la forme d'un tableau en fonction de la date de prise de cours de la pension d'une part et d'autre part en fonction de la durée des études liée au diplôme » (Doc. parl., Chambre, 2014-2015, DOC 54-0922/001, pp. 4-5).

Le commentaire consacré à l'article 8 du projet indiquait que, par l'effet des dispositions proposées, il « peut arriver que [...] certaines personnes ne remplissent plus les conditions de durée de carrière pour pouvoir bénéficier d'une pension de retraite anticipée, ou doivent postposer cette mise à la retraite » (Doc. parl., Chambre, 2014-2015, DOC 54-0922/001, p. 7).

B.3.3. Le point 2.3 de l'accord de gouvernement du 9 octobre 2014, auquel l'exposé des motifs de la loi du 28 avril 2015Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/04/2015 pub. 13/05/2015 numac 2015022159 source service public federal securite sociale Loi portant des dispositions concernant les pensions du secteur public fermer renvoie, fait partie du deuxième chapitre, intitulé « Réforme des pensions », dans lequel il est notamment précisé : « Les efforts doivent être complétés par des réformes structurelles qui apportent une contribution suffisante à la viabilité à long terme des finances publiques, notamment par le biais d'une réforme des pensions réalisée en prenant le rapport du groupe d'experts pour la réforme des pensions 2020-2040 comme base scientifique, et d'une réforme des carrières. Ces réformes entreront en vigueur d'ici 2030.

Le vieillissement de la population, la diminution du nombre de jeunes et l'augmentation du nombre de personnes du troisième et quatrième âge suscitent des doutes dans l'esprit des citoyens quant à la viabilité du système de pensions. Il faut un nouveau contrat social qui couvre toutes les tranches d'âge, qui soit le modèle d'une solidarité intergénérationnelle forte. Dès lors, le gouvernement va élaborer une nouvelle réforme des pensions, fondée sur les dix principes du rapport de la Commission de réforme des pensions 2020-2040, en étroite concertation avec les partenaires sociaux. Pour garantir la viabilité financière et sociale du système de pensions, le gouvernement traduira ces dix principes en dix domaines d'action. Durant cette législature, le gouvernement mettra en oeuvre la transition vers un système à points pour le calcul des pensions. Les réformes iront toujours de pair avec des périodes transitoires suffisamment longues.

Le gouvernement prendra, en concertation avec les partenaires sociaux et après avoir recueilli leur avis, d'une part, les réformes structurelles nécessaires et, d'autre part, des mesures spécifiques visant à permettre l'allongement de la carrière. [...] En 2015 et 2016, la trajectoire de croissance prévue en termes de conditions d'âge et de carrière pour la pension anticipée est maintenue. Ensuite, la condition de carrière augmente à 41 années en 2017 et à 42 années en 2019.

L'âge auquel on peut prendre sa retraite anticipée est porté à 62,5 ans en 2017 et à 63 ans en 2018. [...] 2.3. Adaptations spécifiques apportées à la réglementation concernant la pension des fonctionnaires La Commission de réforme des pensions écrit : ' Les conditions de durée de carrière à respecter pour accéder à la pension doivent être alignées entre les différents régimes ; toute différence en matière de carrière requise ou d'âge pour l'accès à la pension doit pouvoir être justifiée de manière objective. ' La Commission de réforme des pensions ajoute : ' Le calcul de la pension doit être basé sur les revenus de travail de toute la carrière, et pas uniquement sur la fin de la carrière '.

Le gouvernement procédera dès lors, en concertation étroite avec les partenaires sociaux du secteur public, à des réformes du système de pension visant à aligner ce régime de pension sur ceux du secteur privé.

Cette concertation permettra de déterminer le moment à partir duquel des droits à pension peuvent être constitués dans les deux systèmes selon les mêmes modalités. Dans tous les cas, les droits à pension constitués dans le système public restent acquis.

Les aspects suivants de la pension des fonctionnaires feront l'objet d'une négociation avec les partenaires sociaux du secteur public : - La mesure permettant un phasing-out de six mois par année civile de la bonification pour diplôme, à partir de 2015 pour la condition de carrière dans le cadre de la pension anticipée.

La Commission Nationale des Pensions examinera le phasing-out de la bonification de diplôme pour le calcul de la pension par une régularisation des périodes d'étude via une contribution personnelle. - La durée de la carrière pour le calcul de la pension complète en cas de tantièmes préférentiels. Si cette mesure est adoptée, les droits à pension constitués dans le cadre des tantièmes avantageux sont conservés. Dans le courant de cette législature, une mesure sera prise afin que tous les droits à pension soient constitués au tantième 1/60e, à la fois pour le calcul et l'accès à la pension anticipée, pour les agents qui, sauf pour les métiers lourds dans le secteur public (voir 2.4.) » (http://premier.be/sites/default/files/articles/Accord de Gouvernement - Regeerakkoord.pdf, pp. 28-30 et 33-35).

B.3.4. La loi, attaquée, du 2 octobre 2017 concerne la mesure envisagée dans l'accord du gouvernement précité relative au système de bonification pour diplôme, à savoir le « phasing-out » de la bonification pour diplôme pour le calcul de la pension par une régularisation des périodes d'études via une contribution personnelle.

B.3.5. L'exposé des motifs mentionne : « L'accord de gouvernement prévoit que ' La Commission Nationale des Pensions examinera le phasing out de la bonification pour diplôme pour le calcul de la pension par une régularisation des périodes d'études via une contribution personnelle '.

Au départ du rapport ' Les périodes d'études dans les trois principaux régimes de pension de retraite - un aperçu du cadre légal et une description statistique ' d'avril 2016 du Centre d'Expertise, la question de l'harmonisation de la prise en compte des années d'études dans les régimes de pension pour le calcul de la pension a été discutée tant au sein de la Commission spéciale du secteur public du Comité national des Pensions qu'en séance plénière du Comité. A l'issue de cet échange de vue, il a été convenu d'établir des projets de texte à soumettre à la concertation sociale via les canaux habituels (Comité A, Comité de gestion du Service fédéral des Pensions et Comité général de gestion pour le statut social des indépendants) » (Doc. parl., Chambre, 2016-2017, DOC 54-2378/001, p. 4).

L'exposé des motifs précise encore : « Le présent projet de loi vise donc à harmoniser la prise en compte des périodes d'études dans les trois régimes de pension: pension du secteur public, pension des travailleurs salariés et pension des travailleurs indépendants.

Dispositions relatives aux pensions du secteur public (Titre 2) Le présent titre introduit dans le régime de pension du secteur public les propositions d'harmonisation de la prise en compte des années d'études.

Le présent titre porte sur l'harmonisation de cette prise en compte pour le calcul de la pension. Pour rappel, la loi du 28 avril 2015Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/04/2015 pub. 13/05/2015 numac 2015022159 source service public federal securite sociale Loi portant des dispositions concernant les pensions du secteur public fermer portant des dispositions concernant les pensions du secteur public prévoit la suppression progressive de la prise en compte du diplôme dans la condition de carrière pour pouvoir partir en pension anticipée dans le secteur public.

Le présent titre comporte deux volets. Le premier volet prévoit la fin de la gratuité de la prise en compte du diplôme requis moyennant le maintien des droits acquis. Tel est l'objet du chapitre 2 du présent titre.

Actuellement, la prise en compte des années d'études dans le secteur public est gratuite lorsque le diplôme est requis pour la fonction.

Désormais, la bonification pour diplôme ne sera plus gratuite.

A ce principe, le présent titre prévoit deux exceptions. Tout d'abord, les droits acquis seront préservés. Le présent titre prévoit pour les pensions qui prennent cours à partir du 1er juin 2018 un maintien partiel du système actuel de la bonification pour diplôme. Ce maintien partiel sera fonction des services et périodes admissibles pour l'ouverture du droit à la pension que le membre du personnel totalise au 1er juin 2017.

Ensuite, la gratuité est maintenue pour les personnes qui, au plus tard au 1er juin 2018, remplissent les conditions pour obtenir une pension anticipée. Quel que soit le moment où leur pension de retraite prendra cours, celles-ci pourront bénéficier de la gratuité de la prise en compte du diplôme aux conditions actuelles. Elle est également maintenue pour les personnes qui au 1er juin 2017 se trouvaient à leur demande dans une position de disponibilité, totale ou partielle, préalable à la mise à la retraite ou dans une situation analogue ou pour celles qui, si elles avaient introduit la demande, auraient pu être placées au plus tard le 1er juin 2017 dans une situation similaire.

Le second volet du présent titre prévoit l'instauration de la possibilité d'une prise en compte de périodes d'études moyennant le versement d'une cotisation de régularisation. Tel est l'objet du chapitre 1.

A la différence de ce que proposait la Commission de réforme des pensions 2020-2040, la bonification pour diplôme n'est donc pas supprimée. Les années d'études peuvent toujours être prises en compte pour le calcul de la pension. Elles seront prises en compte moyennant le paiement d'une cotisation de régularisation, à l'instar de ce qui existe actuellement chez les salariés et les indépendants.

Le montant de la cotisation de régularisation est fonction du moment où la demande de régularisation est introduite. Si la demande est introduite pendant les dix ans qui suivent les périodes d'études à régulariser, le montant de la cotisation de régularisation est forfaitaire. Si la demande est introduite passé ce délai, le calcul de la cotisation tient compte de la valeur actuelle, à la date de la demande de régularisation, de l'accroissement de pension correspondant aux périodes d'études sur lesquelles porte la demande de régularisation, calculée avec un taux d'intérêt et des tables de mortalité et compte tenu des traitements pris en compte pour le calcul de la pension de retraite tels que connus au moment de la demande de régularisation.

Le présent titre prévoit une période transitoire de 3 ans (du 1er juin 2017 au 31 mai 2020), au cours de laquelle malgré l'expiration du délai de 10 ans précité, le membre du personnel peut obtenir la prise en compte de périodes d'études dans le calcul de la pension moyennant le versement de la cotisation de régularisation forfaitaire plutôt que de la cotisation de régularisation qui tient compte dans son calcul de la valeur actuelle de l'accroissement de pension.

Il est en outre prévu que si la demande de régularisation est introduite entre le 1er juin 2017 et le 31 mai 2019, le montant forfaitaire de la cotisation de régularisation est réduit de 15 % .

Ne peuvent bénéficier de cette réduction que les agents nommés au plus tard le 1er juin 2017. [...] La mesure en projet fait d'ailleurs partie des réformes structurelles préconisées par la Commission de réforme des pensions 2020-2040 pour une réforme structurelle des régimes de pension dans son rapport ' Un contrat social performant et fiable '. Celle-ci recommande qu'un traitement identique soit réservé aux périodes d'études dans tous les régimes de pension légaux, pas uniquement pour les conditions de carrière, mais aussi pour le calcul de la pension » (ibid., pp. 4 à 6 et 9).

Quant à la recevabilité B.4.1. Le Conseil des ministres soutient que le recours dans l'affaire n° 6902 serait irrecevable, faute d'intérêt de la partie requérante. Il estime que la partie requérante, qui est déjà retraitée, ne relève pas de l'application de l'article 4, § 1er, de la loi du 2 octobre 2017Documents pertinents retrouvés type loi prom. 02/10/2017 pub. 24/10/2017 numac 2017013687 source service public federal securite sociale Loi relative à l'harmonisation de la prise en compte des périodes d'études pour le calcul de la pension type loi prom. 02/10/2017 pub. 31/10/2017 numac 2017031388 source service public federal interieur Loi réglementant la sécurité privée et particulière fermer, qu'elle attaque, dans la mesure où la demande de régularisation de la pension pour années d'études qu'elle aurait pu faire doit, aux termes de cette disposition, avoir été introduite avant la date de prise de cours de la pension.

B.4.2. La partie requérante, qui fait valoir que l'article 4, § 1er, attaqué, viole l'article 11 de la Constitution en ce qu'il ne prévoit aucune disposition transitoire qui permettrait à des personnes qui, comme elle, ont atteint l'âge de la pension peu de temps avant l'entrée en vigueur de la loi attaquée, le 1er décembre 2017, de bénéficier du droit à la régularisation, a un intérêt à ce que la Cour examine le moyen qu'elle invoque qui, s'il était déclaré fondé, pourrait conduire à une annulation partielle de la loi, laquelle lui serait favorable.

B.5. L'exception est rejetée.

Quant au fond En ce qui concerne le principe d'égalité et de non-discrimination B.6.1. Le premier moyen dans l'affaire n° 6909 est pris de la violation des articles 10, 11 et 23 de la Constitution, lus isolément ou en combinaison avec l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme, avec l'article 20 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, avec le principe de légalité, avec le principe de sécurité juridique et avec le principe de proportionnalité.

B.6.2. Aucun développement dans ce moyen n'étant consacré à la manière dont l'article 23 de la Constitution serait violé, pas plus qu'à la violation de l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme ou de l'article 20 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, la Cour limite son examen du premier moyen à celui de la compatibilité des dispositions attaquées avec les articles 10 et 11 de la Constitution.

B.7. En substance, les parties requérantes font valoir que la suppression de la bonification gratuite pour diplôme dans le calcul de la pension viole le principe d'égalité et de non-discrimination en ce qu'elle aurait pour effet de traiter de la même manière des agents des niveaux A et B, pour lesquels l'obtention d'un diplôme était une condition à l'exercice de leur fonction, et des agents des niveaux C et D, qui ne doivent pas satisfaire à cette condition, alors que ces deux catégories d'agents se trouveraient dans des situations différentes.

Dans une seconde branche, elles font valoir que cette même suppression aurait pour effet de traiter de la même manière certains agents du service public et l'ensemble des citoyens bénéficiant d'une pension légale, alors que ces deux catégories de personnes ne seraient pas suffisamment comparables.

B.8. Le principe d'égalité et de non-discrimination n'exclut pas qu'une différence de traitement soit établie entre des catégories de personnes, pour autant qu'elle repose sur un critère objectif et qu'elle soit raisonnablement justifiée. Ce principe s'oppose, par ailleurs, à ce que soient traitées de manière identique, sans qu'apparaisse une justification raisonnable, des catégories de personnes se trouvant dans des situations qui, au regard de la mesure critiquée, sont essentiellement différentes.

L'existence d'une telle justification doit s'apprécier en tenant compte du but et des effets de la mesure critiquée ainsi que de la nature des principes en cause; le principe d'égalité et de non-discrimination est violé lorsqu'il est établi qu'il n'existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.

B.9. Il appartient au législateur d'apprécier dans quelle mesure il est opportun d'adopter des dispositions en vue de réaliser des économies dans le domaine des pensions de retraite et de survie. Il dispose à cet égard d'un pouvoir d'appréciation d'autant plus large lorsque la réglementation concernée a fait l'objet d'une concertation sociale (voy. le Protocole n° 197/1 du 30 janvier 2015 du Comité commun à l'ensemble des services publics, Doc. parl., Chambre, DOC 54-0922/003, annexe, pp. 40-47 et 48-55).

Bien que la concertation sociale au sein du Comité A, de la Commission entreprises publiques et du Comité de négociation du personnel militaire n'ait pas conduit à un accord, la concertation sociale a néanmoins entraîné certaines modifications telles que : le maintien des droits acquis (la gratuité de la bonification est préservée en fonction de la carrière professionnelle prestée au 1er juin 2017), la possibilité de régulariser les années d'études même si le diplôme n'est pas requis pour la fonction, la réduction accordée aux fonctionnaires sur le montant de la cotisation forfaitaire pendant les deux premières années de la période transitoire est portée à 15 % (au lieu des 10 % initialement prévus), la possibilité pour les fonctionnaires qui auraient pu se trouver au plus tard le 1er juin 2017 dans une position de disponibilité préalable à la retraite (même s'ils ne l'ont pas exercée) de continuer à pouvoir bénéficier de la bonification pour diplôme à titre gratuit pour l'ensemble de la carrière (Doc. parl., Chambre, 2014-2015, DOC 54-0922/006, p. 29).

B.10. Par la loi du 9 juillet 1969, le législateur a tenu compte du fait que les candidats à une fonction publique pour lesquels un diplôme est requis par la loi ou par un règlement, ont dû suivre un certain nombre d'années d'études supérieures pour entrer en ligne de compte pour ce poste, à tel point que la carrière de cette catégorie de personnes se présente nécessairement de manière différente dans la mesure où elles n'ont pu l'entamer qu'après ces études.

La bonification de temps pour diplôme de ces agents de la fonction publique entendait tenir compte de cette situation.

B.11. Comme il ressort des travaux préparatoires mentionnés en B.3.5, le législateur a entendu, par les dispositions attaquées, franchir une nouvelle étape dans l'harmonisation des régimes de retraite des travailleurs du secteur privé et du secteur public, en particulier en ce qui concerne les conditions de durée de carrière. En effet, un système de bonification de temps gratuite et automatique des années d'études n'existe pas au profit des personnes engagées dans les liens d'un contrat de travail.

B.12. Comme il ressort également des mêmes travaux préparatoires, la réglementation attaquée s'inscrit dans le cadre de réformes structurelles des pensions destinées à assurer à long terme la viabilité des finances publiques, en tenant compte du coût budgétaire du vieillissement de la population.

B.13. Le principe d'égalité et de non-discrimination ne s'oppose pas à ce que le législateur revienne sur ses objectifs initiaux pour en poursuivre d'autres. D'une manière générale, les pouvoirs publics doivent d'ailleurs pouvoir adapter leur politique aux circonstances changeantes de l'intérêt général.

B.14.1. La suppression pour les agents publics de la bonification gratuite des années d'études est une mesure pertinente, eu égard à l'évolution démographique dont le législateur a voulu tenir compte et de l'identité de traitement qu'il a entendu réaliser avec le régime applicable aux travailleurs sous contrat.

B.14.2. Comme il est dit en B.3.5, la Commission de réforme des pensions 2020-2040 estimait elle aussi qu'il n'existe plus à l'heure actuelle de raison objective qui justifierait de traiter différemment les fonctionnaires, les travailleurs salariés et les travailleurs indépendants, en ce qui concerne la prise en compte des périodes d'études dans les trois régimes.

B.15. La Cour doit toutefois encore examiner si les effets de la suppression de la bonification gratuite des années d'études et le système du rachat possible de ces années d'études ne sont pas disproportionnés à l'égard de certains agents nommés de la fonction publique, en particulier les agents des niveaux A et B qui, comme les parties requérantes dans l'affaire n° 6909, pourraient être incités à payer une cotisation de régularisation élevée pour maintenir le montant de leur pension.

B.16.1. Comme il est dit en B.9, la bonification gratuite des années d'études est préservée pour les agents publics en fonction de la carrière professionnelle prestée au 1er juin 2017.

B.16.2. Par ailleurs, certains agents du service public, y compris des niveaux A et B, peuvent valoriser leur diplôme même si celui-ci n'était pas requis pour l'exercice de leur fonction.

B.16.3. En ce qui concerne les effets de la suppression de la bonification gratuite des années d'études sur le montant de la pension dont les agents publics peuvent bénéficier, les travaux préparatoires mentionnent : « En réponse à cette remarque du Conseil d'Etat, il convient de considérer que les dispositions en projet cumulées à celles précédemment adoptées n'emportent pas un recul significatif dans le droit de la pension. Des simulations effectuées, il ressort en effet que si l'on compare la situation en vigueur avant le début de la législature et celle compte tenu des mesures déjà adoptées et de celle en projet, un fonctionnaire ne perd pas de droit de pension, voire augmente ses droits de pension.

Exemple 1 : un fonctionnaire en service d'un service public fédéral (SPF) de niveau B à l'échelle BA3, né le 17 mai 1970. Il a 5 ans de carrière dans le privé et est entré en service au SPF le 1er juin 1996. Il a obtenu un diplôme de 3 ans requis pour sa fonction.Le traitement de référence indexé est de 54 343 EUR. Avant le début de la législature, il aurait obtenu, à la première date possible de prise de cours de sa pension (ci-après la date ' P '), un montant annuel brut indexé de pension de 33 512 EUR. Compte tenu des réformes déjà adoptées en ce compris celle en projet, il obtiendra un montant annuel brut indexé de pension de 35 091 EUR. S'il paie la cotisation de régularisation, le montant annuel brut indexé de pension sera porté à 36 229 EUR. Exemple 2 : un fonctionnaire en service d'un service public fédéral (SPF) de niveau A à l'échelle A 25, né le 17 mai 1960. Il est entré en service au SPF le 1er juin 1983. Il a obtenu un diplôme de 5 ans requis pour sa fonction. Le traitement de référence indexé est de 72 777 EUR. Avant le début de la législature, il aurait obtenu, à la date ' P ', un montant annuel brut indexé de pension de 50 944 EUR. Compte tenu des réformes déjà adoptées en ce compris celle en projet, il obtiendra un montant annuel brut indexé de pension de 53 123 EUR. S'il paie la cotisation de régularisation, le montant annuel brut indexé de pension sera porté à 54 583 EUR (soit le maximum relatif correspondant à 75 % du traitement qui sert de base pour le calcul de la pension). [...] Exemple 4 : un licencié de la Communauté française dont le traitement de référence indexé est de 61 736 EUR. Il est né le 17 mai 1962. Il a travaillé trois ans dans le privé. Il est entré en service comme licencié le 1er juin 1987. Il a obtenu un diplôme de 4 ans requis pour sa fonction.

Avant le début de la législature, il aurait obtenu, à la date ' P ', un montant annuel brut indexé de pension de 43 776 EUR. Compte tenu des réformes déjà adoptées en ce compris celle en projet, il obtiendra un montant annuel brut indexé de pension de 45 963 EUR. S'il paie la cotisation de régularisation, le montant annuel brut indexé de pension sera porté à 46 302 EUR (soit le maximum relatif correspondant à 75 % du traitement qui sert de base pour le calcul de la pension). [...] Exemple 7 : un fonctionnaire en service d'un service public fédéral (SPF) de niveau B à l'échelle BA3, né le 17 mai 1990. Il est entré en service au SPF le 1er juin 2011. Il a obtenu un diplôme de 3 ans requis pour sa fonction. Le traitement de référence indexé est de 54 343 EUR. Avant le début de la législature, il aurait obtenu, à la date ' P ', un montant annuel brut indexé de pension de 38 040 EUR. Compte tenu des réformes déjà adoptées en ce compris celle en projet, il obtiendra un montant annuel brut indexé de pension de 38 412 EUR. S'il paie la cotisation de régularisation, le montant annuel brut indexé de pension sera porté à 40 757 EUR (soit le maximum relatif correspondant à 75 % du traitement qui sert de base pour le calcul de la pension).

Il convient par ailleurs de noter que le présent titre a prévu une mesure transitoire qui s'étend sur la durée d'une carrière complète.

En outre, s'il est vrai que la prise en compte du diplôme n'est plus (que partiellement) gratuite, le montant de la cotisation de régularisation forfaitaire reste au regard des droits de pension que son paiement génère favorable. Une année d'études régularisée à concurrence du montant unique de 1 500 EUR génère une augmentation annuelle de droit de pension récurrente correspondant à 1/60 (voire 1/55ème pour les enseignants âgés de 55 ans et plus en 2017) du traitement qui sert de référence au calcul de la pension.

Cet effet des réformes déjà adoptées est confirmé par le rapport du Centre d'Expertise des pensions sur l'analyse des effets de la réforme des pensions et du chômage avec complément d'entreprise de septembre 2015. Il ressort en effet de ce rapport que les réformes en matière de pension déjà adoptées (celle en projet non comprise) induisent un relèvement du montant de la pension moyenne et que cet effet est plus prononcé dans le régime de la fonction publique que dans les régimes salariés et indépendants, en raison de la prolongation plus importante des carrières suite à la suppression de la bonification pour diplôme dans l'évaluation de la condition de carrière pour une retraite anticipée (cfr.notamment pages 5 et 43) » (Doc. parl., Chambre, 2016-2017, DOC 54-2378/001, pp. 6-9).

Il ressort de ces exemples que les mesures attaquées ne produisent pas des effets disproportionnés sur le montant de la pension dont bénéficieront la plupart des fonctionnaires.

B.16.4. Par ailleurs, la cotisation de régularisation, qu'elle soit forfaitaire ou non, est assimilée à une cotisation de sécurité sociale fiscalement déductible.

B.16.5. Même si le législateur doit tenir compte des attentes légitimes des fonctionnaires, ceux-ci ne peuvent raisonnablement pas s'attendre, compte tenu notamment de la loi de la mutabilité du service public et des impératifs budgétaires, à ce que leur statut en matière de retraite ne soit pas réformé entre leur entrée en service et leur mise à la retraite.

B.17. Le premier moyen dans l'affaire n° 6909 n'est pas fondé.

B.18. La partie requérante dans l'affaire n° 6902 prend un moyen unique de la violation, par l'article 4, § 1er, de la loi du 2 octobre 2017Documents pertinents retrouvés type loi prom. 02/10/2017 pub. 24/10/2017 numac 2017013687 source service public federal securite sociale Loi relative à l'harmonisation de la prise en compte des périodes d'études pour le calcul de la pension type loi prom. 02/10/2017 pub. 31/10/2017 numac 2017031388 source service public federal interieur Loi réglementant la sécurité privée et particulière fermer, de l'article 11 de la Constitution, lu en combinaison avec l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme. La partie requérante, dont la pension a pris cours le 1er octobre 2017, soit avant l'entrée en vigueur de la loi attaquée, reproche à la disposition attaquée de prévoir que la demande de bonification pour années d'études, y compris pour les agents qui, comme elle, ont exercé une fonction pour laquelle n'était pas requis le diplôme dont les agents peuvent dorénavant se prévaloir pour choisir d'opter pour la bonification, doit être introduite avant la date de prise de cours de la pension, sans prévoir de disposition transitoire pour les personnes qui auraient atteint l'âge de la pension peu de temps avant l'entrée en vigueur de la loi, le 1er décembre 2017. Il en résulterait une discrimination entre ces agents et les autres agents qui peuvent se prévaloir du même diplôme, non requis pour l'exercice de leur fonction, qui seront admis à la pension après le 1er décembre 2017.

B.19.1. C'est le propre d'une nouvelle règle d'établir une distinction entre les personnes qui sont concernées par des situations juridiques qui entraient dans le champ d'application de la règle antérieure et les personnes qui sont concernées par des situations juridiques qui entrent dans le champ d'application de la nouvelle règle. Semblable distinction ne viole pas en soi les articles 10 et 11 de la Constitution. A peine de rendre impossible toute modification de la loi, il ne peut être soutenu qu'une disposition nouvelle violerait ces dispositions constitutionnelles par cela seul qu'elle modifie les conditions d'application de la législation ancienne.

B.19.2. Par ailleurs, si le législateur estime qu'un changement de politique s'impose, il peut décider de lui donner un effet immédiat et, en principe, il n'est pas tenu de prévoir un régime transitoire.

Les articles 10 et 11 de la Constitution ne sont violés que si l'absence d'une mesure transitoire entraîne une différence de traitement qui n'est pas susceptible de justification raisonnable ou s'il est porté une atteinte excessive au principe de la confiance légitime. Ce principe est étroitement lié au principe de la sécurité juridique, qui interdit au législateur de porter atteinte sans justification objective et raisonnable à l'intérêt que possèdent les sujets de droit d'être en mesure de prévoir les conséquences juridiques de leurs actes.

Le législateur n'a jamais prévu que des fonctionnaires déjà retraités, tels que la partie requérante, pourraient opter pour la régularisation de la pension pour années d'études.

Pour le surplus, l'examen du premier moyen dans l'affaire n° 6909 a montré que la disposition attaquée par la partie requérante dans l'affaire n° 6902 fait l'objet d'un ensemble de dispositions qui sont raisonnablement justifiées et qui ne produisent pas des effets disproportionnés sur la situation des agents de la fonction publique concernés.

B.20. Le moyen unique dans l'affaire n° 6902 n'est pas fondé.

En ce qui concerne l'obligation de standstill B.21. Dans l'affaire n° 6909, les parties requérantes prennent un deuxième moyen de la violation de l'article 23 de la Constitution, lu isolément ou en combinaison avec la directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 « portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail », avec le principe de légalité, avec le principe de la sécurité juridique et avec le principe de proportionnalité. Elles soutiennent, d'une part, que les dispositions attaquées porteraient préjudice aux membres du personnel de la fonction publique en les incitant à payer une cotisation de régularisation élevée pour maintenir le montant de leur pension et, d'autre part, que les dispositions attaquées réduiraient significativement les conditions sociales et de travail de ce personnel sans qu'existe pour ce faire un motif d'intérêt général.

B.22.1. L'article 23 de la Constitution dispose : « Chacun a le droit de mener une vie conforme à la dignité humaine.

A cette fin, la loi, le décret ou la règle visée à l'article 134 garantissent, en tenant compte des obligations correspondantes, les droits économiques, sociaux et culturels, et déterminent les conditions de leur exercice.

Ces droits comprennent notamment : 1° le droit au travail et au libre choix d'une activité professionnelle dans le cadre d'une politique générale de l'emploi, visant entre autres à assurer un niveau d'emploi aussi stable et élevé que possible, le droit à des conditions de travail et à une rémunération équitables, ainsi que le droit d'information, de consultation et de négociation collective ;2° le droit à la sécurité sociale, à la protection de la santé et à l'aide sociale, médicale et juridique ; [...] ».

B.22.2. En matière de conditions de travail et de rémunération équitables, l'article 23 de la Constitution contient une obligation de standstill qui interdit au législateur compétent de réduire significativement le degré de protection offert par la législation applicable, sans qu'existent pour ce faire des motifs d'intérêt général.

Il en va de même pour le droit à la sécurité sociale.

B.22.3. L'article 23 de la Constitution ne précise pas ce qu'il faut entendre par une « rémunération équitable ». Il ne précise pas davantage le niveau qui doit être atteint par les allocations sociales relevant du droit à la sécurité sociale. Il impose au législateur compétent de garantir ces deux droits et de déterminer leurs conditions d'exercice en vue de permettre à chacun de « mener une vie conforme à la dignité humaine ».

B.22.4. Les développements de la proposition de révision de la Constitution qui a conduit à l'insertion, dans le titre II de celle-ci, de l'article 23 (numéroté 24bis à l'époque) exposent, au sujet du droit à une juste rémunération : « Le droit à une juste rémunération constitue un des éléments essentiels des objectifs économiques de l'activité humaine. [...] Cette rémunération doit tenir compte des besoins sociaux, culturels et économiques fondamentaux des travailleurs et de leur famille. A côté de ces besoins fondamentaux, la rémunération doit permettre au travailleur de s'inscrire dans des activités plus élevées et complexes, telles que l'enseignement, les avantages culturels et sociaux.

La juste rémunération se détermine, d'une part, par le travail accompli et, d'autre part, par les besoins du travailleur et de sa famille » (Doc. parl., Sénat, S.E. 1991-1992, n° 100-2/3°, p. 16).

Au sujet du droit à la sécurité sociale, il est indiqué : « L'inscription de ce droit fondamental dans notre Constitution constitue le couronnement d'un siècle de luttes sociales et s'inscrit dans une évolution axée sur le bien-être et le progrès. [...] En vertu du texte proposé, toute personne exerçant une activité professionnelle a droit à la sécurité sociale. [...] Il importe de souligner que l'exercice d'un tel droit reste en tout cas lié à l'obligation de cotiser et qu'il appartient aux pouvoirs publics de fixer les modalités d'exercice de ce droit, en concertation avec les interlocuteurs sociaux reconnus » (ibid., p. 18).

B.23. D'abord, les dispositions attaquées créent des droits nouveaux pour les agents de la fonction publique qui peuvent valoriser un diplôme de l'enseignement supérieur même si celui-ci n'est pas requis pour l'exercice de leur fonction, ce qui n'était pas possible dans le cadre de la législation antérieure.

Par ailleurs, comme il est dit en B.16.3, le législateur a rencontré l'interrogation formulée par le Conseil d'Etat dans son avis n° 60.770/4 du 5 janvier 2017. Les mesures attaquées n'entraînent pas un recul significatif du montant de la pension pour la majorité des fonctionnaires, sans compter que la validation de ce diplôme par le rachat de leurs années d'études peut avoir un effet positif sur le montant de la pension de certains agents publics.

Enfin, les objectifs, mentionnés en B.3.3 et en B.3.5, d'harmoniser les régimes de retraite des travailleurs du secteur privé et des agents du secteur public, ainsi que d'assurer à long terme la viabilité des finances publiques, justifient que les autorités prévoient la fin de la gratuité de la prise en compte du diplôme requis, tout en maintenant les droits acquis et tout en permettant la prise en compte de la bonification du diplôme pour le calcul de la pension, moyennant le paiement d'une cotisation de régularisation.

B.24. Le deuxième moyen n'est pas fondé.

En ce qui concerne le droit de l'Union européenne B.25. Les parties requérantes dans l'affaire n° 6909 prennent un troisième moyen de la violation des articles 10, 11 et 23 de la Constitution, lus isolément ou en combinaison avec l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme, avec les articles 1er et 2 de la directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 « portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail », avec les articles 20 et 21, paragraphe 1, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, avec le principe de légalité, avec le principe de la sécurité juridique et avec le principe de proportionnalité.

Elles soutiennent en substance que les dispositions attaquées auraient pour objet de priver du bénéfice du calcul du montant de la pension valorisant le droit à la pension complète certains agents du secteur public qui, comme elles, n'ont pas eu la possibilité d'accéder aux emplois publics avant un certain âge. Elles critiquent le fait que cet âge étant déterminé par la durée des études suivies pour être recruté et nommé dans la fonction qui donne accès au régime des pensions du secteur public, les études réalisées par ces derniers ne sont plus prises en compte dans la détermination du montant de leur pension, à moins qu'ils aient les moyens financiers de payer le montant d'une cotisation de régularisation ou qu'ils travaillent plus longtemps pour compenser le changement du montant initial de la pension à laquelle ils ont droit, alors qu'aucune discrimination fondée sur l'âge ne serait admissible.

Elles soutiennent que la loi attaquée constituerait une discrimination indirecte, au sens de l'article 2, paragraphe 2, b), de la directive précitée, en ce qu'elle désavantagerait pour des personnes d'un âge donné en fonction de la date à laquelle celles-ci ont pu entamer leur carrière au sein de la fonction publique.

B.26. Contrairement à ce que soutiennent les parties requérantes, il est inexact d'affirmer que tous les agents du service public qui ont effectué des études avant de commencer leur carrière sont préjudiciés dans le calcul de leur pension par rapport à ceux qui ont pu entamer cette carrière tout de suite.

S'il est vrai que ces derniers ont pu entamer leur carrière plus tôt et que les premières années sont comptabilisées dans le calcul de leur pension, le traitement dont ils ont pu bénéficier et qui compte aussi dans le calcul de leur pension, était moindre, durant leur carrière, que celui des agents diplômés.

En outre, les agents ayant dû obtenir un diplôme pour entamer leur carrière ne sont pas privés du droit de faire prendre en compte ces années d'études, dès lors qu'il existe un système de rachat de celles-ci, moyennant le paiement d'une cotisation de régularisation.

B.27. Dès lors que les griefs sont pris de la violation de la directive 2000/78/CE et de la violation de l'article 21 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, il y a lieu d'observer qu'il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice que, pour adopter des mesures qui relèvent de l'application de cette directive - laquelle concrétise en matière d'emploi et de travail le principe de non-discrimination en fonction de l'âge - les Etats membres doivent tenir compte de cette directive (voy. en ce sens les arrêts CJUE, 13 septembre 2011, C-447/09, Prigge e.a., point 48, et 7 juin 2012, C-132/11, Tyrolean Airways Tiroler Luftfahrt, point 22). Il en résulte que, dans le cadre des rapports entre les particuliers et les autorités publiques d'un Etat membre, comme c'est le cas en l'espèce, seule la directive 2000/78/CE doit être prise en considération (CJUE, 21 janvier 2015, C-529/13, Felber, point 17).

L'article 6, paragraphe 1, premier alinéa, de la directive précitée précise que les Etats membres peuvent prévoir qu'une différence de traitement fondée sur l'âge ne constitue pas une discrimination lorsqu'elle est objectivement et raisonnablement justifiée, dans le cadre du droit national, par un objectif légitime - notamment par des objectifs légitimes de politique de l'emploi, du marché du travail et de la formation professionnelle - et que les moyens destinés à atteindre cet objectif sont appropriés et nécessaires. La Cour de justice a jugé à plusieurs reprises qu'en ce qui concerne le point de savoir si l'objectif poursuivi par une mesure soumise à l'examen est légitime, les Etats membres disposent d'un large pouvoir d'appréciation dans le choix non seulement de la poursuite d'un objectif déterminé parmi d'autres en matière de politique sociale et de l'emploi, mais également dans la définition des mesures susceptibles de le réaliser (CJUE, 19 juin 2014, C-501/12 à C-506/12, C-540/12 et C-541/12, Specht e.a., point 46 et la jurisprudence qui y est mentionnée; CJUE, 21 janvier 2015, C-529/13, Felber, point 30).

Par conséquent, l'examen des mesures attaquées au regard des articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec la directive précitée, ne conduit pas à une autre conclusion.

B.28. Comme il est dit en B.9, la législation attaquée est objectivement et raisonnablement justifiée dans le cadre du droit national par des objectifs légitimes, les moyens destinés à atteindre ces objectifs étant, comme il a été constaté en B.14 et B.16.5, pertinents et non disproportionnés.

B.29. Le troisième moyen dans l'affaire n° 6909 n'est pas fondé.

En ce qui concerne le respect du principe de légalité B.30. Le Gouvernement de la Communauté française invoque, en application de l'article 85 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, un moyen pris de la violation par l'article 6, § 3, alinéa 2, de la loi du 2 octobre 2017Documents pertinents retrouvés type loi prom. 02/10/2017 pub. 24/10/2017 numac 2017013687 source service public federal securite sociale Loi relative à l'harmonisation de la prise en compte des périodes d'études pour le calcul de la pension type loi prom. 02/10/2017 pub. 31/10/2017 numac 2017031388 source service public federal interieur Loi réglementant la sécurité privée et particulière fermer des articles 10, 11, 23, 33, 105 et 108 de la Constitution, du principe de légalité, du principe de la sécurité juridique et du principe de proportionnalité.

Il soutient que la disposition attaquée aurait donné au Roi un blanc-seing excédant les limites des pouvoirs qui peuvent Lui être attribués et qu'elle traiterait ainsi de manière discriminatoire les agents de la fonction publique qui seraient privés de la garantie de voir le montant de leur cotisation inscrit dans la loi, contrairement aux agents qui peuvent introduire leur demande de régularisation dans un délai de dix ans à dater de leur diplôme ou avant le 1er décembre 2020.

B.31. L'article 23 de la Constitution garantit le droit de mener une vie conforme à la dignité humaine.

L'article 23, alinéas 2 et 3, 2°, de la Constitution oblige le législateur compétent à garantir le droit à la sécurité sociale et à déterminer les conditions d'exercice de ce droit.

Cette disposition constitutionnelle n'interdit cependant pas à ce législateur d'accorder des délégations au pouvoir exécutif, pour autant qu'elles portent sur l'exécution de mesures dont le législateur a déterminé l'objet.

Cette disposition constitutionnelle n'impose pas au législateur de régler tous les éléments essentiels du droit à la sécurité sociale et ne lui interdit pas d'habiliter le pouvoir exécutif à régler ceux-ci.

B.32.1. En l'espèce, l'article 6, § 3, précité, de la loi attaquée contient expressément la formule arithmétique permettant de calculer le montant de la cotisation de régularisation à l'issue de la période transitoire de dix ans et il confère au Roi le seul pouvoir de préciser les paramètres spécifiques à prendre en considération dans la formule de calcul. La loi habilite seulement le Roi à fixer le pourcentage de la valeur actuelle de l'accroissement du montant de la pension correspondant aux périodes d'études sur lesquelles porte la régularisation, en respectant le minimum de 50 % imposé par elle, le taux d'intérêt, les tables de mortalité ainsi que l'âge à partir duquel le montant de la pension est supposé payé.

B.32.2. S'il est vrai que le montant exact de la cotisation de régularisation fixée selon des règles actuarielles est plus difficile à calculer que le montant forfaitaire applicable pendant la période de transition de dix ans, il est néanmoins déterminable au moyen de la formule légalement établie, dont la teneur est expliquée dans les travaux préparatoires en ces termes : « Lorsque la régularisation intervient à l'issue d'une période de dix ans à compter de la fin des études, la cotisation sera calculée sur la base des règles actuarielles. Cela signifie que la cotisation de régularisation sera fixée en proportion des droits de pension qui sont générés par la prise en compte du diplôme.

Dans le secteur public, ces droits de pension correspondent à la formule suivante : 1/60ème (tantième applicable) x le traitement de référence connu au moment de la demande de régularisation x le nombre d'années d'études à régulariser. Ces droits de pension correspondent à un montant de pension supplémentaire qui est payable annuellement au fonctionnaire. Sur la base des règles actuarielles, tenant compte d'un taux d'intérêt technique et d'une table de mortalité, ce montant annuel de pension est converti en capital. La cotisation de régularisation correspondra à un certain pourcentage du capital, qui ne pourra toutefois pas être inférieur à 50 % de ce capital.

Le ministre donne un exemple concret: si un fonctionnaire introduit une demande de régularisation à l'âge de 35 ans en dehors de la période transitoire, qu'il a obtenu un diplôme à l'âge de 23 ans après 5 ans d'études, que son traitement de référence s'élève à 27 921,79 euros, que l'on prend en compte les tables de mortalité XR (avec une correction d'âge de 5 ans) et un taux d'intérêt technique de 1 %, et que la pension de retraite lui est versée à partir de ses 65 ans, la rente annuelle constituée s'élève à 2 326,82 euros. Pour pouvoir verser annuellement ce montant au fonctionnaire à partir de ses 65 ans, il doit disposer d'un capital de 34 484,43 euros à ses 35 ans. Le fonctionnaire devra payer une cotisation dont le montant ne peut être inférieur à 50 % de ce capital, soit 17 242,22 euros (au lieu de 7 500 euros en cas de cotisation de régularisation forfaitaire).

Le calcul actuariel tient compte d'un taux d'intérêt de 1 % et ne renvoie donc pas, par exemple, à un taux d'intérêt à long terme. Un taux d'intérêt de 1 % est parfaitement justifié, compte tenu de la faiblesse actuelle des taux d'intérêt. Si une modification est requise, le taux d'intérêt pourra être modifié par arrêté royal. Il est également plus simple pour le Service fédéral des Pensions d'utiliser un taux d'intérêt préalablement établi, plutôt qu'un taux d'intérêt variable, comme le préconise l'Inspection des Finances.

L'utilisation d'un taux d'intérêt fixe permettra également de rendre le système plus transparent pour les citoyens.

Les paramètres du calcul de la cotisation de régularisation à payer à l'issue d'une période de 10 ans après la fin des études seront identiques pour les fonctionnaires, les travailleurs salariés et les travailleurs indépendants. La seule différence est que ce calcul sera établi à partir de droits de pension différents: la pension des fonctionnaires est en effet plus élevée que celle des travailleurs salariés et des travailleurs indépendants » (Doc. parl., Chambre, 2016-2017, DOC 54-2378/006, pp. 32-34).

B.33. Il résulte de l'ensemble de ces éléments que les cotisations de régularisation sont définies par la loi tant pendant la période de transition de dix ans qu'au-delà de cette période, les premières au moyen d'un montant forfaitaire, les secondes au moyen d'une formule arithmétique invariable, de sorte que le principe de légalité et le principe d'égalité et de non-discrimination entre les agents du secteur public selon la date d'introduction de leur demande de régularisation sont respectés.

B.34. Le moyen invoqué par le Gouvernement de la Communauté française n'est pas fondé.

Par ces motifs, la Cour rejette les recours.

Ainsi rendu en langue française, en langue néerlandaise et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 24 octobre 2019.

Le greffier, F. Meersschaut Le président, F. Daoût

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