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Arrêt
publié le 25 mars 2019

Extrait de l'arrêt n° 40/2019 du 28 février 2019 Numéro du rôle : 7044 En cause : le recours en annulation du mot « annulé » dans l'article 2244, § 1 er , alinéa 3, du Code civil, introduit par Annick Meurant et autres. La Co composée des présidents A. Alen et F. Daoût, et des juges L. Lavrysen, T. Merckx-Van Goey, P. Nihou(...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 40/2019 du 28 février 2019 Numéro du rôle : 7044 En cause : le recours en annulation du mot « annulé » dans l'article 2244, § 1er, alinéa 3, du Code civil, introduit par Annick Meurant et autres.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents A. Alen et F. Daoût, et des juges L. Lavrysen, T. Merckx-Van Goey, P. Nihoul, T. Giet et J. Moerman, assistée du greffier F. Meersschaut, présidée par le président A. Alen, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet du recours et procédure Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 10 novembre 2018 et parvenue au greffe le 20 novembre 2018, Annick Meurant, Jan Stevens, Guido Van Loon, Denis Malcorps, Jan Creve et Frank Bels, assistés et représentés par Me P. Vande Casteele, avocat au barreau d'Anvers, ont introduit un recours en annulation du mot « annulé » dans l'article 2244, § 1er, alinéa 3, du Code civil.

Le 5 décembre 2018, en application de l'article 72, alinéa 1er, de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, les juges-rapporteurs T. Merckx-Van Goey et P. Nihoul ont informé la Cour qu'ils pourraient être amenés à proposer de mettre fin à l'examen de l'affaire par un arrêt rendu sur procédure préliminaire. (...) II. En droit (...) Quant à la recevabilité B.1. Le Conseil des ministres conteste l'intérêt des parties requérantes.

B.2. Les parties requérantes sont toutes des personnes physiques qui ont introduit des recours en annulation devant le Conseil d'Etat et qui ont agi en tant que parties intervenantes dans l'affaire qui a donné lieu à l'arrêt n° 148/2018 du 8 novembre 2018. Elles justifient de l'intérêt requis.

L'exception est rejetée.

Quant au moyen unique B.3. Le moyen unique est pris de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution par la disposition attaquée, en ce qu'il n'est pas conféré un effet interruptif de la prescription aux recours introduits devant le Conseil d'Etat qui n'aboutissent pas à un arrêt d'annulation.

B.4. Par son arrêt n° 148/2018, la Cour a jugé : « B.6.2. L'article 2244, § 1er, alinéa 3, du Code civil dispose que ' pour l'application de la présente section ', un recours en annulation d'un acte administratif devant le Conseil d'Etat a, à l'égard de l'action en réparation du dommage causé par l'acte administratif annulé, les mêmes effets qu'une citation en justice.

La section dont il est question à l'article 2244, § 1er, alinéa 3, est la section I du Chapitre IV du Titre XX du Code civil, qui contient les articles 2242 à 2250.

B.6.3. L'article 2247 du Code civil dispose : ' Si le demandeur se désiste de sa demande, [...] Ou si sa demande est rejetée, L'interruption est regardée comme non avenue '.

B.7.1. Cette modification de l'article 2244 du Code civil par la loi du 25 juillet 2008Documents pertinents retrouvés type loi prom. 25/07/2008 pub. 22/08/2008 numac 2008009714 source service public federal justice Loi modifiant le Code civil et les lois coordonnées du 17 juillet 1991 sur la comptabilité de l'Etat en vue d'interrompre la prescription de l'action en dommages et intérêts à la suite d'un recours en annulation devant le Conseil d'Etat fermer a été commentée comme suit dans les travaux préparatoires : ' L'arriéré au Conseil d'Etat est un problème qui ne date pas d'hier et qui s'est amplifié, au cours de ces dix dernières années, au point d'en devenir intenable. [...] [...] les citoyens ordinaires, qui sont confrontés à une décision des pouvoirs publics qu'ils considèrent comme illégale, [...] ont [...] la faculté d'introduire des recours en suspension et en annulation devant le Conseil d'Etat.

Malheureusement, l'ampleur de l'arriéré les condamne à rester des années durant dans l'incertitude à propos de leur statut juridique.

Si, après une annulation, les citoyens en question entendent obtenir des dommages et intérêts, il leur faut intenter une action devant le tribunal civil, puisque le Conseil d'Etat n'est pas habilité à accorder des dommages et intérêts.

Cinq années s'écoulent en moyenne avant que les citoyens concernés soient fixés sur l'annulation ou non d'une décision pour cause d'infraction à la loi, et puissent, en conséquence, prétendre à des dommages et intérêts.

Or, conformément à l'article 2262bis du Code civil, toutes les actions en réparation d'un dommage fondées sur une responsabilité extracontractuelle se prescrivent par cinq ans à partir du jour qui suit celui où la personne lésée a eu connaissance du dommage ou de son aggravation et de l'identité de la personne responsable. [...] Vu la procédure de recours administratif susceptible de s'intercaler, une partie du délai de prescription s'est souvent déjà écoulée avant que le recours en annulation soit introduit devant le Conseil d'Etat. [...] Il y a donc une forte probabilité que l'action en réclamation de dommages et intérêts se prescrive au cours de la procédure en annulation. Beaucoup d'avocats conseilleront par conséquent à leurs clients d'engager une action civile immédiatement après l'introduction du recours en annulation ou au cours de la procédure devant le Conseil d'Etat, et de demander le renvoi de cette action au rôle.

En effet, aux termes de l'article 2244 du Code civil, une citation en justice forme une interruption civile. Conformément à une jurisprudence constante, cette interruption subsiste d'ailleurs tant que l'affaire reste pendante, si bien que le nouveau délai de prescription ne commence à courir qu'après la fin de l'instance en question.

Cette pratique juridique née du mauvais fonctionnement de l'institution n'est cependant pas une bonne chose, dans la mesure où elle rejette entièrement sur le citoyen le risque de la perte du droit à des dommages et intérêts : c'est le citoyen qui devient une victime potentielle de la lenteur anormale de la justice. Par ailleurs, cette façon de faire encombre les rôles des tribunaux civils d'affaires qui ne sont pas en état d'être jugées pendant des années, créant ainsi un surcroît inutile de la charge administrative.

Cela représente en outre un coût supplémentaire inutile à charge du citoyen qui doit constater au bout du compte que la décision contestée des pouvoirs publics n'a pas été annulée ' (Doc. parl., Sénat, S.E. 2007, n° 4-10/1, pp. 1-3).

Le ministre de la Justice a encore exposé, au sein de la commission compétente du Sénat : ' Il y a tout d'abord un problème d'interprétation lié au fait que toute action en réparation d'un dommage fondée sur une responsabilité extracontractuelle se prescrit par cinq ans. Ensuite et surtout, il y a l'interprétation des articles 100 et 101 des lois sur la comptabilité de l'Etat, coordonnées par l'arrêté royal du 17 juillet 1991, qui reprennent le texte de l'article 1er de la loi du 6 février 1970 relative à la prescription des créances à charge ou au profit de l'Etat et des provinces, lequel instaure un délai de prescription de 5 ans sans fixer d'autres conditions. Par arrêt du 16 février 2006, la Cour de cassation a considéré qu'une requête devant le Conseil d'Etat n'a pas d'effet suspensif. Compte tenu de l'arriéré du Conseil d'Etat, il y a donc de fortes chances que le droit de réclamer des dommages et intérêts soit frappé de prescription alors que la procédure d'annulation est encore en cours. Le justiciable se voit donc contraint d'intenter une action au civil immédiatement après avoir introduit son recours en annulation.

Il est peu probable que ce problème soit résolu par la loi du 15 septembre 2006Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/09/2006 pub. 06/10/2006 numac 2006000704 source service public federal interieur Loi réformant le Conseil d'Etat et créant un Conseil du Contentieux des Etrangers fermer réformant le Conseil d'Etat, qui renvoie le contentieux des étrangers devant une autre instance.

A cela vient s'ajouter qu'un arrêt de la Cour de cassation du 16 février 2006 est venu infirmer la thèse admise jusqu'alors selon laquelle une procédure administrative devant le Conseil d'Etat interrompait la prescription du dédommagement civil, par analogie avec l'article 2244 du Code civil. La Cour a estimé que la requête en annulation d'un acte administratif devant le Conseil d'Etat n'interrompt ni ne suspend la prescription du droit de réclamer, devant un tribunal civil, une réparation pour acte public illicite. En effet, le recours devant le Conseil d'Etat a un effet objectif.

L'intervenant considère toutefois à cet égard qu'une décision sur un contentieux objectif peut avoir des effets juridiques portant atteinte à des droits subjectifs. En effet, selon la jurisprudence constante de la Cour de cassation, l'arrêt d'annulation apporte la preuve de l'illicéité d'un acte. En ce sens, pareil arrêt a en réalité une portée multiple.

L'on pourrait affirmer que le délai de prescription de 5 ans applicable aux actes publics est constitutif d'une discrimination par rapport aux délais de prescription judiciaires applicables aux actes des personnes privées; pourquoi soumettre les actions dirigées contre les pouvoirs publics à un délai de prescription différent de celui applicable aux autres actions ? ' (Doc. parl., Sénat, 2007-2008, n° 4-10/3, pp. 2-3).

B.7.2. La proposition de loi initialement déposée entendait conférer un caractère suspensif, au civil, à l'introduction d'un recours en annulation devant le Conseil d'Etat, jusqu'à la date de notification de l'arrêt conformément à l'article 36 de l'arrêté du Régent du 23 août 1948 déterminant la procédure devant la section du contentieux administratif du Conseil d'Etat (Doc. parl., Sénat, S.E. 2007, n° 4-10/1, p. 5).

B.7.3. Dans son avis, la section de législation du Conseil d'Etat a observé, à propos du caractère suspensif de la prescription qui était envisagé : ' 3. Lorsqu'un délai de prescription est suspendu, le temps écoulé avant cette suspension doit être comptabilisé dans le délai dont le solde reprend son cours au terme de celle-ci. En revanche, un délai de prescription interrompu recommence entièrement dès que la cause de l'interruption cesse de produire son effet.

Le mécanisme de la suspension ' pendant la période où le recours en annulation des actes administratifs en question est pendant devant le Conseil d'Etat ' placera les destinataires de la règle devant la difficulté de déterminer de manière exacte le laps de temps écoulé et, par voie de conséquence, celui restant à courir, spécialement lorsque la date de l'introduction du recours n'est pas connue. Cette question est pertinente principalement s'il est envisagé qu'un tiers à la procédure devant le Conseil d'Etat bénéficie du régime de suspension.

Il convient notamment de tenir compte du fait que la date de prise de cours du délai de suspension, qui correspondrait à celle de l'introduction du recours devant le Conseil d'Etat, n'est pas toujours déterminable de manière aisée par les tiers puisqu'elle dépend, non pas de la date de l'acte en cause mais, compte tenu de l'article 4, alinéa 3, de l'arrêté du Régent du 23 août 1948 déterminant la procédure devant la section du contentieux administratif du Conseil d'Etat, de la publication, de la notification ou de la prise de connaissance, selon le cas, de cet acte;

Il convient également de prendre en considération notamment les articles 14, § 3, et 19, alinéa 2, des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat. En tout état de cause, la date de la prise de cours du délai de recours en annulation sera plus éloignée que soixante jours après la date de l'acte administratif en cause, parfois dans une mesure importante en cas de tardiveté de la publication, de la notification ou de la prise de connaissance de cet acte, avec la conséquence que cela emporte quant à la détermination du délai écoulé avant la suspension du délai de prescription. Les difficultés ici exposées paraissent devoir être particulièrement importantes dans l'hypothèse, assez fréquente dans la pratique, où c'est la prise de connaissance de l'acte en cause qui fait courir le délai de recours devant le Conseil d'Etat.

Le législateur est invité à examiner, à l'instar de ce que prévoient, mutatis mutandis, l'article 2244 du Code civil et l'article 101, alinéa 1er, des lois coordonnées sur la comptabilité de l'Etat, s'il ne serait pas plus simple de recourir plutôt à un régime d'interruption de la prescription par l'effet de l'introduction d'un recours au Conseil d'Etat, un nouveau délai prenant son envol au terme de la procédure devant cette dernière juridiction. [...] 4. Qu'il soit recouru à un système de suspension ou d'interruption, la question se pose de savoir comment appliquer le mécanisme si le recours introduit devant le Conseil d'Etat est irrecevable ou que celui-ci n'est pas compétent. Selon les termes du projet à l'examen, il suffit qu'un recours soit introduit pour que le délai de prescription soit suspendu, même dans les hypothèses qui sont ici soulevées.

Il appartient au législateur d'examiner cette question et de la régler de manière expresse dans le dispositif, en prenant attitude notamment sur l'applicabilité à ces questions des articles 2246 et 2247 du Code civil ' (Doc. parl., Chambre, 2007-2008, DOC 52-0832/004, pp. 8-10).

B.7.4. A la suite de cet avis, un amendement a été déposé en vue d'instaurer un mécanisme d'interruption de la prescription en lieu et place du mécanisme de suspension prévu pour simplifier le décompte du délai de prescription. Cet amendement était justifié comme suit : ' Il est dès lors nécessaire d'apporter la précision, déjà consacrée par la Cour de Cassation dans son arrêt du 11 janvier 1957 (Pas. 1957, p. 523) ainsi que par l'article 101 des lois coordonnées du 17 juillet 1991 sur la comptabilité de l'Etat, selon laquelle l'interruption de la prescription par une citation en justice se prolonge jusqu'à la clôture de l'instance. Il est stipulé qu'un recours en annulation a les mêmes effets juridiques qu'une citation en justice en ce qui concerne l'interruption de la prescription de l'action en réparation d'un dommage formée au motif de l'illégalité de l'acte administratif attaqué.

Il en découle notamment que, comme pour une citation, l'interruption par un recours en annulation se prolongera jusqu'à la clôture de l'instance, c'est-à-dire jusqu'au prononcé de l'arrêt, et qu'elle ne profitera qu'à celui qui a accompli l'acte interruptif ' (Doc. parl., Chambre, 2007-2008, DOC 52-0832/005, p. 2).

B.8.1. Comme il ressort des travaux préparatoires mentionnés en B.7.1, l'objectif du législateur était de ne pas faire peser sur le justiciable les conséquences liées à l'arriéré du Conseil d'Etat.

D'une part, il entendait éviter que l'action en réparation du dommage devant le juge civil soit prescrite si le justiciable obtient l'annulation de l'acte administratif attaqué plus de cinq ans après avoir introduit un recours auprès du Conseil d'Etat. D'autre part, le législateur entendait éviter que le justiciable qui introduit un recours en annulation auprès du Conseil d'Etat soit tenu, à titre conservatoire, d'introduire une action devant le juge civil pour éviter cette prescription, impliquant des coûts supplémentaires liés à l'engagement de cette procédure conservatoire, qui peut par la suite s'avérer inutile.

B.8.2. Le législateur entendait également mettre un terme à une pratique qui encombre les rôles des tribunaux civils d'affaires qui ne sont pas en état d'être jugées.

B.8.3. Il ressort enfin des travaux préparatoires que la loi du 25 juillet 2008Documents pertinents retrouvés type loi prom. 25/07/2008 pub. 22/08/2008 numac 2008009714 source service public federal justice Loi modifiant le Code civil et les lois coordonnées du 17 juillet 1991 sur la comptabilité de l'Etat en vue d'interrompre la prescription de l'action en dommages et intérêts à la suite d'un recours en annulation devant le Conseil d'Etat fermer ne peut être dissociée de deux arrêts de la Cour de cassation du 16 février 2006, par lesquels il a été jugé que ' le recours en annulation formé contre un acte administratif devant le Conseil d'Etat n'interrompt ni ne suspend la prescription du droit de réclamer une indemnisation devant un tribunal civil en se fondant sur un acte illicite des autorités ' (Cass., 16 février 2006, C.05.0022.N et C.05.0050.N). [...] B.12.1. Les motifs pour lesquels le Conseil d'Etat peut rejeter un recours en annulation sans avoir examiné le fond de l'affaire peuvent être nombreux. Il en est ainsi notamment lorsque le requérant perd son intérêt à agir en cours d'instance devant la haute juridiction administrative pour des raisons qui sont indépendantes de sa volonté, tel que c'est le cas dans l'espèce soumise à la juridiction a quo.

Le délai qui s'est écoulé entre la date d'introduction du recours et celle à laquelle le Conseil d'Etat rend son arrêt peut être particulièrement long et résulter lui aussi de circonstances indépendantes de la volonté du requérant, comme c'est le cas dans l'espèce soumise au juge a quo, de sorte que le délai prévu pour introduire une action civile en dédommagement est entre-temps expiré.

B.12.2. Comme l'appelant devant la juridiction a quo le souligne, au moment de l'introduction de son recours devant le Conseil d'Etat, le requérant n'est pas en mesure de prévoir les circonstances qui peuvent aboutir à ce qu'un arrêt de rejet soit rendu ni le délai dans lequel le Conseil d'Etat va statuer. Si la procédure devant le Conseil d'Etat dure plus de cinq ans, l'absence d'effet interruptif de la prescription qui découle, en cas d'arrêt de rejet, de la disposition en cause a pour effet de priver le justiciable de toute possibilité d'introduire devant le juge civil, dans les délais, une action en réparation du dommage contre l'autorité administrative.

Le seul moyen dont dispose le requérant pour préserver ses droits est l'intentement d'une action devant le juge civil, parallèlement à l'introduction d'un recours en annulation auprès du Conseil d'Etat, ce qui ferait toutefois échec à l'économie procédurale précisément recherchée par le législateur.

B.12.3. Contrairement à ce que soutient le Conseil des ministres, l'absence d'effet interruptif de la prescription liée à un arrêt de rejet rendu par le Conseil d'Etat ne pourrait être justifiée par le souci d'harmoniser le régime en cause avec celui prévu en matière de citation en justice à l'article 2247 du Code civil.

Comme il est dit en B.2, l'article 101 des lois sur la comptabilité de l'Etat renvoie aux règles du droit commun pour l'interruption de la prescription, soit celles qui sont prescrites par la section I du chapitre IV, titre XX, livre III du Code civil, sous les articles 2242 à 2250 du Code. Bien que l'article 2244 dudit Code renvoie aux règles de cette section, y compris celle prévue à l'article 2247, il y a lieu de relever que, lorsque le justiciable introduit une citation devant le juge civil, ce dernier est appelé à statuer sur l'affaire dans le cadre d'une seule et même procédure portant sur des droits subjectifs au cours de laquelle le justiciable a pu faire valoir l'ensemble de ses arguments. La circonstance que, par l'application de l'article 2247 du Code civil, l'interruption de la prescription soit regardée comme non avenue en cas de rejet de l'action judiciaire pour des motifs de fond ou de forme, n'a pas entaché l'examen du fondement de la demande. Le justiciable n'a pas pu, en pareil cas, être d'une quelconque manière victime d'un retard de la juridiction judiciaire saisie puisque c'est précisément ce juge qui statue avec une interruption du délai de prescription tant que la décision n'est pas rendue.

B.12.4. En revanche, le justiciable qui saisit le Conseil d'Etat d'un recours en annulation, au contentieux objectif, peut voir ce recours rejeté pour un motif étranger au fond de l'affaire. Il doit introduire une nouvelle procédure, au contentieux subjectif cette fois, devant les juridictions civiles pour obtenir un dédommagement s'il démontre l'illégalité de l'acte administratif contesté, ce qui nécessite un examen du fond de l'affaire par le juge civil saisi.

Un tel recours lui est toutefois refusé si la procédure devant le Conseil d'Etat dure plus de cinq ans, de sorte que, par suite de l'application de l'article 2244, § 1er, alinéa 3, du Code civil, combiné avec les articles 100 et 101 des lois sur la comptabilité de l'Etat, le délai pour introduire son action en réparation devant le juge civil a expiré.

B.13. Il résulte de ce qui précède qu'en ce qu'elle ne confère un effet interruptif de la prescription qu'aux recours introduits devant le Conseil d'Etat qui aboutissent à un arrêt d'annulation, la disposition en cause n'est pas pertinente par rapport aux objectifs mentionnés en B.7 et B.8, dès lors qu'elle oblige toujours le justiciable qui choisit d'attaquer un acte administratif devant le Conseil d'Etat à introduire également une action en réparation du dommage devant le juge civil, à titre conservatoire, pour éviter la prescription de son action ».

B.5. Pour des motifs identiques à ceux qui sont contenus dans l'arrêt n° 148/2018 précité, le moyen unique est fondé. Par ces motifs, la Cour annule le mot « annulé » dans l'article 2244, § 1er, alinéa 3, du Code civil.

Ainsi rendu en langue néerlandaise, en langue française et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 28 février 2019.

Le greffier, F. Meersschaut Le président, A. Alen

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