publié le 25 mars 2019
Extrait de l'arrêt n° 37/2019 du 28 février 2019 Numéro du rôle : 6806 En cause : le recours en annulation de l'ordonnance de la Région de Bruxelles-Capitale du 7 décembre 2017 modifiant l'ordonnance du 2 mai 2013 portant le Code bruxellois d La Cour constitutionnelle, composée des présidents A. Alen et F. Daoût, et des juges L. Lavrysen(...)
COUR CONSTITUTIONNELLE
Extrait de l'arrêt n° 37/2019 du 28 février 2019 Numéro du rôle : 6806 En cause : le recours en annulation de l'ordonnance de la Région de Bruxelles-Capitale du 7 décembre 2017 modifiant l'
ordonnance du 2 mai 2013Documents pertinents retrouvés
type
ordonnance
prom.
02/05/2013
pub.
21/05/2013
numac
2013031357
source
region de bruxelles-capitale
Ordonnance portant le Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie
fermer portant le Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie, introduit par Lode Goukens.
La Cour constitutionnelle, composée des présidents A. Alen et F. Daoût, et des juges L. Lavrysen, J.-P. Snappe, E. Derycke, T. Merckx-Van Goey, P. Nihoul, T. Giet, R. Leysen et M. Pâques, assistée du greffier F. Meersschaut, présidée par le président A. Alen, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet du recours et procédure Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 2 janvier 2018 et parvenue au greffe le 3 janvier 2018, Lode Goukens a introduit un recours en annulation de l'ordonnance de la Région de Bruxelles-Capitale du 7 décembre 2017 modifiant l' ordonnance du 2 mai 2013Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 02/05/2013 pub. 21/05/2013 numac 2013031357 source region de bruxelles-capitale Ordonnance portant le Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie fermer portant le Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie (publiée au Moniteur belge du 14 décembre 2017). (...) II. En droit (...) B.1. La partie requérante demande l'annulation de l'ordonnance de la Région de Bruxelles-Capitale du 7 décembre 2017 « modifiant l' ordonnance du 2 mai 2013Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 02/05/2013 pub. 21/05/2013 numac 2013031357 source region de bruxelles-capitale Ordonnance portant le Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie fermer portant le Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie » (ci-après : l' ordonnance du 7 décembre 2017Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 07/12/2017 pub. 14/12/2017 numac 2017014289 source region de bruxelles-capitale Ordonnance modifiant l'ordonnance du 2 mai 2013 portant le Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie fermer).
B.2.1. L'ordonnance attaquée modifie l'ordonnance de la Région de Bruxelles-Capitale du 2 mai 2013 « portant le Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie » (ci-après : le Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie) afin de permettre la mise en place d'une ou de plusieurs zones permanentes de basses émissions sur le territoire de la Région de Bruxelles-Capitale (Doc. parl., Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, 2017-2018, n° A-572/1, p.1).
B.2.2. L'article 3.1.1 du Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie, complété par l'article 2 de l'ordonnance attaquée, définit la notion de « zone de basses émissions » comme suit : « 41° ' Zone de basses émissions (low emission zone : LEZ) ' : zone au sens de l'article 2.63 de l'arrêté royal du 1er décembre 1975 portant règlement général sur la police de la circulation routière et de l'usage de la voie publique ».
L'article 2.63, précité, de l'arrêté royal du 1er décembre 1975 dispose : « ' Zone de basses émissions ', une zone dont l'accès aux véhicules motorisés fait l'objet d'une politique d'accès sélective justifiée par des motifs liés à la qualité de vie, en particulier à cause des nuisances provoquées par ces véhicules motorisés sur l'environnement et la santé par la mauvaise qualité de l'air; le début de la zone est signalé par le signal F117 et la fin par le signal F118 ».
B.2.3. Il ressort des travaux préparatoires des dispositions attaquées qu'en mettant en place une zone de basses émissions, le législateur ordonnanciel bruxellois cherche à réduire les émissions de polluants de véhicules pour améliorer la qualité de l'air et protéger ainsi la santé publique et l'environnement en Région de Bruxelles-Capitale.
Selon le législateur ordonnanciel, cette mesure de réduction des émissions s'inscrit dans le cadre des efforts nécessaires pour satisfaire aux normes de qualité de l'air qui découlent de la directive 2001/81/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2001 fixant des plafonds d'émission nationaux pour certains polluants atmosphériques et de la directive 2008/50/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2008 concernant la qualité de l'air ambiant et un air pur pour l'Europe (Doc. parl., Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, 2017-2018, n° A-572/1, pp. 1-2).
B.2.4. Le Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie prévoyait déjà précédemment la possibilité pour le Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale de définir des zones de basses émissions. L'ordonnance attaquée adapte ce cadre légal conformément au Plan régional air-climat-énergie, qui prévoit la mise en place d'une zone de basses émissions régionale permanente.
L'ordonnance attaquée fixe non seulement le cadre pour instaurer une ou plusieurs zones de basses émissions permanentes, mais aussi les modalités du contrôle, de la surveillance et des sanctions des infractions (Doc. parl., Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, 2017-2018, n° A-572/1, pp. 3-5).
Quant à la recevabilité du recours en annulation B.3.1. Le Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale fait valoir que le recours en annulation ne serait pas recevable parce qu'il n'est pas manifeste que la partie requérante serait propriétaire d'un véhicule visé par l'ordonnance attaquée. De plus, elle pourrait faire usage de possibilités de transport alternatives pour atteindre la Région de Bruxelles-Capitale.
B.3.2. La Constitution et la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle imposent à toute personne physique ou morale qui introduit un recours en annulation de justifier d'un intérêt. Ne justifient de l'intérêt requis que les personnes dont la situation pourrait être affectée directement et défavorablement par la norme attaquée.
B.3.3. L'ordonnance attaquée ne spécifie pas quels véhicules n'auraient pas de droit d'accès à une zone de basses émissions. Il appartient au Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale de limiter le droit d'accès des véhicules à une ou plusieurs zones de basses émissions permanentes sur le territoire de la Région de Bruxelles-Capitale sur la base des émissions de polluants atmosphériques de ces véhicules et de prévoir, le cas échéant, des dérogations, conformément à l'article 3.2.16, § 2, du Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie, remplacé par l'article 3 de l' ordonnance du 7 décembre 2017Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 07/12/2017 pub. 14/12/2017 numac 2017014289 source region de bruxelles-capitale Ordonnance modifiant l'ordonnance du 2 mai 2013 portant le Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie fermer.
B.3.4. A l'appui de son intérêt, la partie requérante fait valoir qu'elle se déplace avec une camionnette de l'année 2005, qui est peut-être visée par les dispositions attaquées, et que financièrement, elle ne peut pas se permettre l'achat d'une nouvelle voiture. Elle aurait besoin de la voiture pour des déplacements dans la Région de Bruxelles-Capitale, où elle suit notamment une formation en cours du soir dans un établissement universitaire, ce qui implique des déplacements à des moments où les transports en commun n'offrent pas de solution. Elle démontre ainsi qu'elle pourrait être affectée directement et défavorablement par l' ordonnance du 7 décembre 2017Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 07/12/2017 pub. 14/12/2017 numac 2017014289 source region de bruxelles-capitale Ordonnance modifiant l'ordonnance du 2 mai 2013 portant le Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie fermer, de sorte qu'elle justifie de l'intérêt requis.
B.4.1. Le Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale estime par ailleurs qu'à la lumière des griefs invoqués par la partie requérante, le recours en annulation n'est recevable qu'en ce qu'il est dirigé contre les articles 3, 15 et 18 de l' ordonnance du 7 décembre 2017Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 07/12/2017 pub. 14/12/2017 numac 2017014289 source region de bruxelles-capitale Ordonnance modifiant l'ordonnance du 2 mai 2013 portant le Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie fermer.
B.4.2. La Cour détermine l'étendue du recours en annulation en fonction du contenu de la requête et en particulier sur la base de l'exposé des moyens. La Cour limite son examen aux dispositions contre lesquelles des griefs sont effectivement dirigés.
Il ressort de l'exposé des moyens que la critique de la partie requérante vise exclusivement, d'une part, l'article 3 de l' ordonnance du 7 décembre 2017Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 07/12/2017 pub. 14/12/2017 numac 2017014289 source region de bruxelles-capitale Ordonnance modifiant l'ordonnance du 2 mai 2013 portant le Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie fermer, qui donne à la Région de Bruxelles-Capitale pour mission générale de définir une ou plusieurs zones de basses émissions sur le territoire de la Région de Bruxelles-Capitale et, d'autre part, les articles 15 et 18 de l' ordonnance du 7 décembre 2017Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 07/12/2017 pub. 14/12/2017 numac 2017014289 source region de bruxelles-capitale Ordonnance modifiant l'ordonnance du 2 mai 2013 portant le Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie fermer, qui règlent la sanction en cas d'infraction à la réglementation relative à la zone de basses émissions, de sorte que la Cour limite son examen à ces dispositions.
B.4.3. A supposer qu'au terme de son examen, la Cour estime un ou plusieurs moyens fondés, les autres dispositions attaquées pourraient toutefois être annulées si elles se révélaient indissociables des dispositions précitées.
B.5. Les exceptions sont rejetées.
Quant au fond En ce qui concerne la compétence d'instaurer une zone de basses émissions B.6. Le premier moyen est pris de la violation, par l'article 3 de l'ordonnance attaquée, des règles qui déterminent les compétences respectives de l'autorité fédérale et des régions. Bien que la partie requérante ne précise pas quelles règles répartitrices de compétences seraient violées, il ressort de l'exposé des griefs qu'elle estime que la disposition attaquée porte atteinte à la compétence fédérale en matière de police générale de la circulation routière et en matière de prescriptions techniques relatives aux moyens de communication et de transport.
B.7.1. L'article 3, attaqué, de l' ordonnance du 7 décembre 2017Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 07/12/2017 pub. 14/12/2017 numac 2017014289 source region de bruxelles-capitale Ordonnance modifiant l'ordonnance du 2 mai 2013 portant le Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie fermer remplace l'article 3.2.16 du Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie comme suit : « § 1er. Le Gouvernement définit une ou plusieurs zones de basses émissions sur le territoire de la Région de Bruxelles-Capitale applicable(s) de façon permanente afin d'améliorer la qualité de l'air. § 2. La restriction au droit d'accès des véhicules à la ou aux zones de basses émissions est liée aux émissions de polluants atmosphériques du véhicule à moteur, telles que fixées par le Gouvernement.
Le Gouvernement peut en outre définir des dérogations à la restriction au droit d'accès à la ou aux zones de basses émissions, en fonction de la nature, du type, de l'utilisation faite du véhicule à moteur concerné, de critères socio-économiques, ainsi qu'en cas de situations exceptionnelles et limitées dans le temps.
Le Gouvernement précise la procédure d'octroi des dérogations et désigne les fonctionnaires, statutaires ou contractuels, qui les accorderont.
Sans préjudice de l'enregistrement tel que visé au § 3, le Gouvernement détermine les types de véhicules qui doivent être enregistrés pour avoir accès à la LEZ. Le Gouvernement précise les conditions de l'enregistrement. § 3. Tout véhicule non enregistré dans le répertoire des véhicules tel que mentionné aux articles 6 à 9 inclus de l'arrêté royal du 20 juillet 2001 relatif à l'immatriculation de véhicules, doit être enregistré préalablement pour avoir accès à la ou aux zones de basses émissions.
Le Gouvernement précise les conditions d'enregistrement. § 4. Le placement des signaux indiquant la ou les zones de basses émissions, à savoir les signaux F117 et F118, visés à l'article 71.2 du Code de la route, s'effectue conformément aux dispositions de l' ordonnance du 3 avril 2014Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 03/04/2014 pub. 14/05/2014 numac 2014031337 source region de bruxelles-capitale Ordonnance relative aux règlements complémentaires sur la circulation routière et sur la pose et le coût de la signalisation routière fermer relative aux règlements complémentaires sur la circulation routière et sur la pose et le coût de la signalisation routière. § 5. Le Gouvernement peut établir un système d'accès temporaire à la ou aux zones de basses émissions contre paiement.
Le Gouvernement : 1° arrête les modalités de ce système et détermine la procédure relative à la demande, à l'octroi et au paiement de cet accès temporaire payant;2° fixe le montant de la redevance qui est due pour cet accès ». B.7.2. Selon l'article 3.2.16 du Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie, le Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale définit une ou plusieurs zones de basses émissions sur le territoire de la Région de Bruxelles-Capitale applicable(s) de façon permanente afin d'améliorer la qualité de l'air ( § 1er). La restriction au droit d'accès des véhicules à la ou aux zones de basses émissions est liée aux émissions de polluants atmosphériques du véhicule à moteur, telles que fixées par le Gouvernement. Celui-ci peut définir des dérogations à la restriction au droit d'accès à la ou aux zones de basses émissions, en fonction de la nature, du type et de l'utilisation faite du véhicule à moteur concerné, de critères socio-économiques, ainsi qu'en cas de situations exceptionnelles et limitées dans le temps ( § 2). De plus, le Gouvernement est chargé de régler l'enregistrement préalable des véhicules ayant accès à la ou aux zones de basses émissions ( § 3) et la possibilité lui est accordée d'établir un système d'accès temporaire à la ou aux zones de basses émissions contre paiement ( § 5). Enfin, la disposition attaquée règle aussi le placement des signaux indiquant la ou les zones de basses émissions ( § 4).
B.8.1. Sur la base de l'article 6, § 1er, II, alinéa 1er, 1°, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, les régions sont compétentes en matière de « protection de l'environnement, notamment celle du sol, du sous-sol, de l'eau et de l'air contre la pollution et les agressions, ainsi que [pour] la lutte contre le bruit ».
En vertu de l'article 4 de la loi spéciale du 12 janvier 1989 relative aux institutions bruxelloises, cette disposition s'applique à la Région de Bruxelles-Capitale.
B.8.2. La Région de Bruxelles-Capitale est donc compétente en matière de protection de l'environnement contre la pollution atmosphérique (CE, avis n° 52.007/VR/3/4 du 16 octobre 2012, Doc. parl., Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, 2012-2013, n° A-353/1, p. 191; avis n° 61.662/1 du 11 juillet 2017, Doc. parl., Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, 2017-2018, n° A-572/1, p. 40).
B.8.3. Il faut considérer que le Constituant et le législateur spécial, dans la mesure où ils n'en disposent pas autrement, ont attribué aux communautés et aux régions toute la compétence d'édicter les règles propres aux matières qui leur ont été transférées. Sauf dispositions contraires, le législateur spécial a transféré aux communautés et aux régions l'ensemble de la politique relative aux matières qu'il a attribuées.
B.9.1. L'autorité fédérale est compétente pour la police générale et la réglementation relative à la circulation et aux transports, et pour les prescriptions techniques en matière de moyens de communication et de transports, bien que les gouvernements régionaux doivent être associés à l'élaboration des règles s'y rapportant (article 6, § 4, 3°, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles).
Selon les travaux préparatoires de cette disposition (Doc. parl., Chambre, S.E. 1988, n° 516/1, p. 21), la « police générale » concerne les réglementations de police applicables aux divers modes de transports, telles que : « - la police de la circulation routière; - le règlement général des voies navigables; - le règlement de police sur les chemins de fer; - la police sur le transport de personnes par tram, pré-métro, métro, autobus et autocar; - la police de la navigation maritime et de la navigation aérienne ».
B.9.2. Les règlements généraux que le Roi peut arrêter sur la base de l'article 1er des lois relatives à la police de la circulation routière, coordonnées par l'arrêté royal du 16 mars 1968, relèvent des règles de la police générale et de la réglementation relative aux communications et aux transports.
B.9.3. En plus de l'habilitation pour arrêter des règlements généraux, la loi relative à la police de la circulation routière prévoit la possibilité d'édicter des règlements complémentaires. Ces règlements complémentaires ont un champ d'application particulier et visent à adapter la réglementation sur la circulation aux circonstances locales ou particulières. De par leur nature même, les règlements complémentaires de circulation ne peuvent contenir des règles de police générale.
B.9.4. Les règlements complémentaires de circulation routière relèvent de la compétence des régions. Ils doivent toutefois être pris dans le respect des compétences de l'autorité fédérale.
B.10.1. Comme il est dit en B.9, la Région de Bruxelles-Capitale est compétente en matière de protection de l'environnement contre la pollution atmosphérique. La mission confiée par le législateur ordonnanciel bruxellois au Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale de définir une ou plusieurs zones de basses émissions, et de limiter le droit d'accès des véhicules à une ou plusieurs zones de basses émissions permanentes sur le territoire de la Région de Bruxelles-Capitale sur la base des émissions de polluants atmosphériques de ces véhicules, a incontestablement pour but d'améliorer la qualité de l'air dans la Région de Bruxelles-Capitale.
Pour définir une zone de basses émissions, le législateur ordonnanciel se réfère à l'article 2.63 de l'arrêté royal du 1er décembre 1975 portant règlement général sur la police de la circulation routière et de l'usage de la voie publique. Etant donné que la mission confiée au Gouvernement vise à adapter la réglementation générale sur la circulation aux circonstances locales et particulières en Région de Bruxelles-Capitale, la disposition attaquée doit être considérée comme une habilitation permettant d'arrêter des règlements complémentaires de circulation (CE, avis n° 52.007/VR/3/4 du 16 octobre 2012, Doc. parl., Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, 2012-2013, n° A-353/1, p. 191; avis n° 61.662/1 du 11 juillet 2017, Doc. parl., Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, 2017-2018, n° A-572/1, pp. 40-41).
B.10.2. L'article 3.2.16 du Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie, remplacé par l'article 3, attaqué, de l' ordonnance du 7 décembre 2017Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 07/12/2017 pub. 14/12/2017 numac 2017014289 source region de bruxelles-capitale Ordonnance modifiant l'ordonnance du 2 mai 2013 portant le Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie fermer, relève donc de la compétence de la région en matière d'environnement et en matière d'élaboration de règlements complémentaires de circulation, et n'empiète pas, en tant que tel, sur les compétences fédérales en matière de police générale et de réglementation relative aux communications et aux transports, et en matière de prescriptions techniques relatives aux moyens de communication et de transport.
B.10.3. Par ailleurs, le législateur ordonnanciel ne saurait être présumé avoir habilité le Gouvernement à prendre des mesures en violation des dispositions de la loi spéciale du 8 août 1980 réglant la répartition des compétences entre l'autorité fédérale et les régions.
Il revient au Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale, sous le contrôle, le cas échéant, du juge compétent, de faire usage de l'habilitation qui lui est conférée par la disposition attaquée de manière conforme aux règles répartitrices de compétences entre l'autorité fédérale et les régions.
B.11. Le premier moyen n'est pas fondé.
En ce qui concerne l'accès temporaire à la zone de basses émissions moyennant paiement et l'amende administrative en cas d'infraction B.12. Dans le deuxième moyen, la partie requérante soutient que la compétence octroyée au Gouvernement pour mettre en place un système d'accès temporaire à la zone de basses émissions moyennant paiement, ainsi que l'amende administrative imposée en cas d'infraction, doivent être considérées comme de nouveaux impôts frappant l'usage d'un véhicule, en sus des accises fédérales, taxes et impôts déjà appliqués, et conduisent ainsi à une double imposition interdite.
La partie requérante n'indique pas quelles dispositions constitutionnelles ou légales seraient violées par les dispositions attaquées. Il peut se déduire de l'exposé des griefs que la partie requérante fait probablement référence à l'article 170, § 2, de la Constitution, qui attribue aux régions une compétence fiscale propre, sous la réserve que la loi n'ait pas déterminé ou ne détermine pas ultérieurement les exceptions dont la nécessité est démontrée.
Le contrôle des dispositions attaquées au regard de la disposition constitutionnelle précitée exige d'examiner en premier lieu si le législateur ordonnanciel a instauré de nouveaux impôts.
B.13.1. En vertu de l'article 3.2.16, § 5, du Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie, remplacé par l'article 3, attaqué, de l' ordonnance du 7 décembre 2017Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 07/12/2017 pub. 14/12/2017 numac 2017014289 source region de bruxelles-capitale Ordonnance modifiant l'ordonnance du 2 mai 2013 portant le Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie fermer, le Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale peut établir un système d'accès temporaire à la ou aux zones de basses émissions contre paiement. Le Gouvernement arrête les modalités de ce système et la procédure relative à la demande, à l'octroi et au paiement de cet accès temporaire payant, et fixe le cas échéant « le montant de la redevance qui est due pour cet accès ».
B.13.2. En soi, le fait que le législateur ordonnanciel qualifie de « redevance » la contribution à payer pour bénéficier d'un accès temporaire à une zone de basses émissions ne suffit pas à conclure qu'il ne s'agit pas d'un impôt.
B.13.3. Pour qu'une perception puisse être qualifiée de redevance, il n'est pas seulement requis qu'il s'agisse de la rémunération d'un service accompli par l'autorité au bénéfice du redevable considéré isolément, mais il faut également qu'elle ait un caractère purement indemnitaire, de sorte qu'un rapport raisonnable doit exister entre le coût ou la valeur du service fourni et le montant dû par le redevable.
B.13.4. Les travaux préparatoires indiquent ce qui suit à propos du système d'accès temporaire à la ou aux zones de basses émissions moyennant paiement : « Le présent amendement vise la création d'une base légale pour l'introduction d'un système de pass d'une journée permettant à des véhicules motorisés d'entrer dans la zone de basses émissions une ou plusieurs fois par an.
Le pass d'une journée remplit une fonction sociale importante. Le pass d'une journée permet en effet à des véhicules qui n'entrent qu'exceptionnellement dans la Région, par exemple lors d'une occasion spéciale, d'accéder temporairement à la zone de basses émissions » (Doc. parl., Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, 2017-2018, n° A-572/2, p.52).
B.13.5. Le système d'accès temporaire à la ou aux zones de basses émissions moyennant paiement doit permettre au redevable d'entrer temporairement dans la zone de basses émissions, même si son véhicule ne remplit pas les conditions en matière d'émissions de polluants atmosphériques. Cette redevance est justifiée par les frais particuliers de contrôle et de surveillance qu'implique la mise en place de zones de basses émissions, et par le fait que le système d'accès temporaire procure un avantage individuel au conducteur qui veut faire usage de son véhicule non conforme.
L'instauration d'un pass d'une journée moyennant paiement peut donc être considérée comme une redevance à condition qu'il existe un rapport raisonnable entre le coût ou la valeur du service fourni et le montant dû par le redevable.
Le législateur ordonnanciel a confié la fixation du montant du pass d'un jour au pouvoir exécutif. Il revient au Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale, sous le contrôle du juge compétent, de faire usage de l'habilitation qui lui est conférée par l'article 3.2.16, § 5, du Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie de manière conforme à la Constitution et de fixer un montant de la redevance qui est raisonnablement proportionné au coût ou à la valeur du service fourni.
B.14.1. Lorsqu'une infraction est commise à la réglementation relative à la ou aux zones de basses émissions, une amende administrative de 350 euros peut être imposée. Le Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale peut toutefois prévoir des périodes de tolérance et des périodes transitoires.
B.14.2. L'article 3.4.1/1 du Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie, inséré par l'article 15, attaqué, de l' ordonnance du 7 décembre 2017Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 07/12/2017 pub. 14/12/2017 numac 2017014289 source region de bruxelles-capitale Ordonnance modifiant l'ordonnance du 2 mai 2013 portant le Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie fermer, dispose : « § 1er. Une amende administrative est infligée pour toute infraction aux articles 3.2.16 à 3.2.27 et à leurs arrêtés d'exécution.
La période transitoire terminée, le montant de l'amende s'élève à 350 euros. § 2. Période de tolérance Par dérogation au § 1er, le Gouvernement est habilité à prévoir des périodes de tolérance. Pendant ces périodes ininterrompues, aucune amende administrative n'est infligée pour toute infraction commise avec le même véhicule.
L'introduction d'un recours ne suspend pas cette période de tolérance. § 3. Période transitoire Par dérogation au § 1er, le Gouvernement est habilité à prévoir des périodes d'application transitoire. Pendant ces périodes ininterrompues au début de chaque nouvelle phase de la zone de basses émissions, aucune amende administrative n'est infligée pour toute infraction commise.
Les contrôles restent effectifs durant ces périodes mais des avertissements seront adressés aux conducteurs et/ou propriétaires des véhicules en infraction en lieu et place des amendes. § 4. Les redevables sont tenus de fournir verbalement ou par écrit, sur réquisition des fonctionnaires concernés par la législation relative aux zones de basses émissions dans la Région de Bruxelles-Capitale, tous renseignements qui leur sont réclamés aux fins de vérifier l'exacte perception des montants visés au § 1er à leur charge ou à charge de tiers. Tout refus de communiquer les renseignements demandés et toute communication de renseignements inexacts ou incomplets entraînent une amende administrative de 25 euros.
Ces renseignements doivent être fournis dans le mois de la demande de renseignements ou directement en cas de contrôle sur la voie publique.
Le non-respect de cette obligation entraîne une amende administrative de 25 euros.
Tout renseignement inexact ou incomplet fourni lors d'un enregistrement relatif à la ou aux zones de basses émissions donnera lieu, le cas échéant, à une amende administrative de 25 euros. § 5. Par dérogation à l'article 3.4.2, les modalités des procédures d'amende et la procédure de recours sont celles déterminées par les articles 3.2.16 à 3.2.27 et le présent article. § 6. Le non-respect de l'obligation d'enregistrement préalable à l'accès à la ou aux zones de basses émissions entraîne une amende administrative de 150 euros en dehors des périodes transitoires ».
B.14.3. L'article 18, attaqué, de l' ordonnance du 7 décembre 2017Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 07/12/2017 pub. 14/12/2017 numac 2017014289 source region de bruxelles-capitale Ordonnance modifiant l'ordonnance du 2 mai 2013 portant le Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie fermer ajoute à l'article 29, § 2, de la loi relative à la police de la circulation routière un quatrième alinéa rédigé comme suit : « L'infraction aux règlements visés à l'alinéa 1er afférente à une zone de basses émissions, telle que visée à l'article 2.63 de l'arrêté royal du 1er décembre 1975 portant règlement général sur la police de la circulation routière et de l'usage de la voie publique, n'est pas pénalement sanctionnée ».
B.14.4. Selon la partie requérante, l'amende administrative de 350 euros imposée le cas échéant en cas d'infraction à la réglementation relative à la zone de basses émissions serait en réalité un impôt sur l'usage d'un véhicule.
B.14.5. Une amende administrative est à distinguer d'un impôt. Cette distinction tient au caractère de sanction de l'amende administrative : un impôt est perçu sur le simple fait imposable qui, lorsqu'il se produit, ne doit pas en soi être répréhensible, tandis que la mesure prévue par l'article 15, attaqué, de l' ordonnance du 7 décembre 2017Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 07/12/2017 pub. 14/12/2017 numac 2017014289 source region de bruxelles-capitale Ordonnance modifiant l'ordonnance du 2 mai 2013 portant le Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie fermer réprime un manquement à une obligation. En outre, cette mesure ne vise pas en premier lieu à acquérir des moyens afin de couvrir une dépense d'intérêt général. Il ressort donc de la nature de la mesure attaquée qu'il ne s'agit pas d'un impôt.
B.15. Le deuxième moyen n'est pas fondé.
En ce qui concerne le droit de propriété B.16.1. Dans le quatrième moyen, la partie requérante fait valoir que la mise en place d'une ou de plusieurs zones de basses émissions permanentes dans la Région de Bruxelles-Capitale viole le droit à la protection de la propriété, en ce qu'il s'agit en fait d'une expropriation sans indemnité.
B.16.2. L'article 16 de la Constitution dispose : « Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique, dans les cas et de la manière établis par la loi, et moyennant une juste et préalable indemnité ».
L'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme dispose : « Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens.
Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international.
Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes ».
B.16.3. L'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme ayant une portée analogue à celle de l'article 16 de la Constitution, les garanties qu'il contient forment un ensemble indissociable avec celles qui sont inscrites dans cette disposition constitutionnelle, de sorte que la Cour en tient compte lors de son contrôle des dispositions attaquées.
B.16.4. L'article 1er du Protocole précité offre une protection non seulement contre l'expropriation ou la privation de propriété (alinéa 1er, seconde phrase), mais également contre toute ingérence dans le droit au respect des biens (alinéa 1er, première phrase) et contre toute réglementation de l'usage des biens (alinéa 2).
B.16.5. Une zone de basses émissions est une zone où l'accès aux véhicules motorisés fait l'objet d'une politique sélective justifiée par des motifs liés à la qualité de vie, en particulier à cause des nuisances provoquées par ces véhicules motorisés sur l'environnement et la santé par la mauvaise qualité de l'air (article 2.63 de l'arrêté royal du 1er décembre 1975). Etant donné que la mise en place d'une ou de plusieurs zones de basses émissions permanentes dans la Région de Bruxelles-Capitale a pour conséquence que les propriétaires de véhicules qui ne satisfont pas aux normes d'émission fixées par le Gouvernement ne peuvent en principe plus avoir accès à la ou aux zones de basses émissions, la mesure attaquée constitue une réglementation de l'usage des biens au sens de l'alinéa 2 de l'article 1er du Premier Protocole additionnel, et relève donc du champ d'application de cette disposition conventionnelle, combinée avec l'article 16 de la Constitution.
B.16.6. Toute ingérence dans le droit de propriété doit réaliser un juste équilibre entre les impératifs de l'intérêt général et ceux de la protection du droit au respect des biens. Il faut qu'existe un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but poursuivi.
B.17.1. Les dispositions attaquées visent à réduire les émissions de polluants atmosphériques engendrées par le trafic, afin d'améliorer la qualité de l'air (article 3.2.16 du Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie, modifié par l'article 3 de l' ordonnance du 7 décembre 2017Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 07/12/2017 pub. 14/12/2017 numac 2017014289 source region de bruxelles-capitale Ordonnance modifiant l'ordonnance du 2 mai 2013 portant le Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie fermer), et poursuivent donc un objectif d'intérêt général.
B.17.2. L'article 23, alinéa 3, 2° et 4°, de la Constitution charge les législateurs compétents de garantir le droit à la protection de la santé et le droit à la protection d'un environnement sain. Afin de protéger la santé humaine et l'environnement, il est particulièrement important d'éviter, de prévenir ou de réduire les émissions de polluants atmosphériques nocifs.
B.17.3. Bien que la Convention européenne des droits de l'homme ne mentionne pas formellement le droit à un environnement sain, sa protection relève d'une préoccupation sociale essentielle (CEDH, 27 novembre 2007, Hamer c. Belgique, § 79). De plus, il y a atteinte au droit au respect de la vie privée et familiale lorsque la pollution atmosphérique affecte des personnes directement et très gravement. Les polluants atmosphériques nocifs émis par des véhicules engendrent effectivement un risque d'incidence négative grave sur la santé, en particulier dans les régions à forte densité de population où le trafic est important (CEDH, décision, 12 mai 2009, Greenpeace e.V. and others c. Allemagne, § 1). Des impératifs économiques et même certains droits fondamentaux, comme le droit de propriété, ne doivent pas nécessairement se voir accorder la primauté face à des considérations relatives à la protection de l'environnement et de la santé publique.
Ainsi, des contraintes sur le droit de propriété peuvent être admises, à condition certes de respecter un juste équilibre entre les intérêts individuels en cause et ceux de la société dans son ensemble (CEDH, 27 novembre 2007, Hamer c. Belgique, § § 79-80).
B.18.1. Les travaux préparatoires indiquent ce qui suit à propos de la mise en place d'une ou de plusieurs zones de basses émissions permanentes dans la Région de Bruxelles-Capitale : « La qualité de l'air est un des grands défis de la Région de Bruxelles-Capitale. Il est question de se conformer aux prescrits européens des directives 2001/81/CE et 2008/50/CE en vue de protéger la santé publique et l'environnement en Région de Bruxelles-Capitale.
Au cours de ces dernières années, l'exposition des Bruxellois à certains polluants a déjà pu être réduite, permettant ainsi de respecter les normes européennes en termes d'émissions et de concentration pour la majorité des polluants. Il faut noter, plus particulièrement, la valeur limite journalière européenne pour les PM10 (50 µg/m3, 35 dépassements autorisés); valeur qui a été respectée en 2014, 2015 et 2016.
Des efforts sont encore nécessaires pour assurer le respect des normes européennes relatives aux concentrations annuelles de dioxydes d'azote (40µg/m3 NO2) pour lesquelles la Région a été mise en demeure par la Commission européenne le 28 avril 2016. Il est à noter que les émissions régionales de NO2 sont principalement dues aux gaz d'échappement des véhicules, en particulier des véhicules diesel (70 % des émissions de NOx proviennent du transport routier (Source : Bruxelles Environnement, Inventaires des émissions 2014).
De même, il est important de diminuer les émissions de black carbon, polluant particulièrement nocif pour la santé puisqu'il sert de support aux autres polluants.
Les polluants pénètrent dans les poumons. Ils peuvent ainsi entraîner une dégradation du système respiratoire. Ils peuvent aussi favoriser, voire aggraver certaines maladies telles que l'asthme (la concentration annuelle moyenne en particules fines et en dioxyde d'azote est significativement associée à l'apparition d'un asthme nouveau chez les jeunes enfants).
En outre, 12 000 morts prématurées par an seraient imputables à la pollution atmosphérique en Belgique.
Le concept de zone de basses émissions s'inscrit dans la lignée des recommandations européennes en matière de lutte contre la pollution atmosphérique issue des émissions de véhicules automobiles. Et ce, au-delà de dispositifs visant à pallier [les] pics de pollutions.
De nombreuses villes en Europe ont adopté ce concept urbain qui a fait ses preuves : Berlin, Londres, Paris, Anvers et en tout, plus de 80 villes européennes réparties dans dix Etats membres. Les villes de taille, à géographie et population comparables à la Région de Bruxelles-Capitale, avec des parcs de véhicules importants, qui ont mis en oeuvre des zones de basses émissions, ont vu des effets bénéfiques avérés au niveau des évolutions de concentrations de particules fines et de dioxyde d'azote » (Doc. parl., Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, 2017-2018, n° A-572/1, pp. 2-3).
B.18.2. La mesure attaquée contribue aux efforts nécessaires pour satisfaire aux normes de qualité de l'air découlant de la directive 2001/81/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2001 fixant des plafonds d'émission nationaux pour certains polluants atmosphériques, et de la directive 2008/50/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2008 concernant la qualité de l'air ambiant et un air pur pour l'Europe.
La mise en place de zones de basses émissions est formellement mentionnée dans les annexes à la directive 2008/50/CE comme l'une des mesures possibles pour limiter les émissions dues aux transports grâce à la planification et à la gestion du trafic en vue d'atteindre les objectifs de qualité de l'air.
B.18.3. La Cour de justice de l'Union européenne a jugé que les Etats membres doivent prendre toutes les mesures nécessaires pour se conformer aux valeurs limites fixées pour la qualité de l'air par la directive 2008/50/CE (CJUE, 19 novembre 2014, C-404/13, ClientEarth, points 30-31).
B.18.4. Comme en attestent les travaux préparatoires mentionnés ci-avant, la Commission européenne a mis le 28 avril 2016 l'Etat belge en demeure par rapport à la mise en oeuvre de la directive 2008/50/CE, pour le non-respect de la valeur limite annuelle fixée pour le dioxyde d'azote (NO2) dans la zone de Bruxelles, en violation des obligations découlant de l'article 13, paragraphe 1, de la directive précitée.
Selon la Commission, les émissions de dioxyde d'azote (NO2) en Région de Bruxelles-Capitale, qui sont à la base des dépassements des valeurs limites annuelles depuis 2010, ont pour source principale les gaz d'échappement des véhicules, et en particulier des véhicules diesel.
La Commission a en outre estimé que les autorités de la Région de Bruxelles-Capitale n'avaient pas adopté toutes les mesures appropriées pour répondre aux obligations imposées par l'article 23, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la directive précitée.
B.18.5. Pour justifier la mesure attaquée, le Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale fait référence à des études scientifiques récentes sur lesquelles le législateur ordonnanciel s'est basé pour élaborer le cadre législatif, et dont il ressort que la mise en place d'une zone de basses émissions dans la Région de Bruxelles-Capitale entraînerait des réductions d'émissions significatives, et que des zones de basses émissions déjà mises en oeuvre ont conduit à une amélioration considérable de la qualité de l'air dans d'autres villes européennes.
B.19.1. Quant à la proportionnalité de la mesure attaquée, il ressort des travaux préparatoires que la Région de Bruxelles-Capitale vise une mise en place progressive de la ou des zones de basses émissions, qui démarrera en 2018, les normes d'émission étant renforcées chaque année jusqu'en 2025. Cette mise en place progressive sera couplée à des périodes transitoires et à des périodes de tolérance, ainsi qu'à des mesures d'accompagnement prévues pour les particuliers et les entreprises (Doc. parl., Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, 2017-2018, n° A-572/2, p. 6).
B.19.2. L'article 3.4.1/1 du Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie, inséré par l'article 15 de l' ordonnance du 7 décembre 2017Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 07/12/2017 pub. 14/12/2017 numac 2017014289 source region de bruxelles-capitale Ordonnance modifiant l'ordonnance du 2 mai 2013 portant le Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie fermer, dispose que le Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale peut prévoir des périodes transitoires. Pendant ces périodes ininterrompues au début de chaque nouvelle phase de la zone de basses émissions, aucune amende administrative n'est infligée pour toute infraction commise. Les contrôles restent effectifs durant ces périodes, mais des avertissements seront adressés aux conducteurs et/ou propriétaires des véhicules en infraction en lieu et place des amendes ( § 3). De plus, le Gouvernement est habilité à prévoir des périodes de tolérance. Pendant ces périodes ininterrompues, aucune amende administrative n'est infligée pour toute infraction commise avec le même véhicule ( § 2).
B.19.3. En outre, l'article 3.2.16 du Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie, modifié par l'article 3 de l' ordonnance du 7 décembre 2017Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 07/12/2017 pub. 14/12/2017 numac 2017014289 source region de bruxelles-capitale Ordonnance modifiant l'ordonnance du 2 mai 2013 portant le Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie fermer, prévoit la possibilité pour le Gouvernement de définir des dérogations à la restriction au droit d'accès à la ou aux zones de basses émissions, en fonction de la nature, du type, de l'utilisation faite du véhicule à moteur concerné, et de critères socio-économiques, ainsi qu'en cas de situations exceptionnelles et limitées dans le temps ( § 2). Le Gouvernement peut de plus établir un système d'accès temporaire à la ou aux zones de basses émissions contre paiement ( § 5).
B.19.4. Enfin, l'article 3.2.27 du Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie, modifié par l'article 14 de l' ordonnance du 7 décembre 2017Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 07/12/2017 pub. 14/12/2017 numac 2017014289 source region de bruxelles-capitale Ordonnance modifiant l'ordonnance du 2 mai 2013 portant le Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie fermer, dispose que le Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale peut prévoir des mesures d'accompagnement dans le cadre de la mise en oeuvre de la ou des zones de basses émissions.
B.20. Il ressort de ce qui précède qu'il existe un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé. Les dispositions attaquées ménagent un juste équilibre entre les exigences de la protection du droit de propriété, d'une part, et les exigences de l'intérêt général et d'autres intérêts individuels en cause, d'autre part.
B.21. Le quatrième moyen n'est pas fondé.
En ce qui concerne le principe d'égalité et de non-discrimination B.22.1. Le troisième moyen est pris de la violation, par l'article 3 de l'ordonnance attaquée, des articles 10 et 11 de la Constitution, en ce que la mise en place de la zone de basses émissions est applicable de manière générale et ne tiendrait pas compte de la situation spécifique de personnes vulnérables financièrement ou souffrant d'un handicap qui disposent d'une vieille voiture et ne peuvent se permettre de la remplacer. De plus, la mesure attaquée serait constitutive d'une discrimination indirecte sur la base de l'appartenance ethnique et du travail puisque les personnes les plus touchées sont les minorités, les travailleurs défavorisés et les indépendants.
B.22.2. Le principe d'égalité et de non-discrimination n'exclut pas qu'une différence de traitement soit établie entre des catégories de personnes, pour autant qu'elle repose sur un critère objectif et qu'elle soit raisonnablement justifiée. Ce principe s'oppose, par ailleurs, à ce que soient traitées de manière identique, sans qu'apparaisse une justification raisonnable, des catégories de personnes se trouvant dans des situations qui, au regard de la mesure critiquée, sont essentiellement différentes.
L'existence d'une telle justification doit s'apprécier en tenant compte du but et des effets de la mesure critiquée ainsi que de la nature des principes en cause; le principe d'égalité et de non-discrimination est violé lorsqu'il est établi qu'il n'existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.
B.23. Comme il est dit en B.17.1, en mettant en place une ou plusieurs zones de basses émissions permanentes sur le territoire de la Région de Bruxelles-Capitale, le législateur ordonnanciel cherche à réduire les émissions de polluants atmosphériques engendrées par le trafic, afin d'améliorer la qualité de l'air. Il poursuit donc un objectif légitime.
La restriction au droit d'accès de véhicules à la ou aux zones de basses émissions permanentes mises en place dans la Région de Bruxelles-Capitale est liée aux émissions de polluants atmosphériques du véhicule à moteur (article 3.2.16, § 2, alinéa 1er, du Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie, remplacé par l'article 3, attaqué, de l' ordonnance du 7 décembre 2017Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 07/12/2017 pub. 14/12/2017 numac 2017014289 source region de bruxelles-capitale Ordonnance modifiant l'ordonnance du 2 mai 2013 portant le Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie fermer). A la lumière de l'objectif précité, le traitement identique de personnes, quelle que soit leur capacité financière, est objectif et pertinent.
B.24.1. Cependant, pour être en conformité avec les articles 10 et 11 de la Constitution, il faut qu'il existe également un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.
B.24.2. La disposition attaquée vise à une mise en place progressive de la ou des zones de bases émissions dans la Région de Bruxelles-Capitale, couplée à des périodes transitoires et de tolérance, afin de permettre aux conducteurs des véhicules touchés par la mesure attaquée de remplacer leur véhicule ou de réaliser la transition vers des possibilités de mobilité alternatives. Dans une première phase, seuls les véhicules les plus polluants seront bannis conformément aux normes établies en la matière par la réglementation européenne.
B.24.3. Le Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale peut en outre définir des dérogations temporaires ou permanentes à la restriction au droit d'accès à la ou aux zones de basses émissions, de manière à permettre quand même à certains véhicules d'accéder à de telles zones, même s'ils ne répondent pas aux conditions d'accès en vigueur. De plus, le Gouvernement doit tenir compte de la nature, du type et de l'utilisation qui est faite du véhicule, ainsi que de critères socio-économiques et de situations exceptionnelles (article 3.2.16, § 2, alinéa 2, du Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie, remplacé par l'article 3, attaqué, de l' ordonnance du 7 décembre 2017Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 07/12/2017 pub. 14/12/2017 numac 2017014289 source region de bruxelles-capitale Ordonnance modifiant l'ordonnance du 2 mai 2013 portant le Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie fermer).
B.24.4. Afin de compenser dans une certaine mesure l'impact négatif subi par des particuliers et des entreprises à la suite de la mise en place des zones de basses émissions, le Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale peut également prévoir des mesures d'accompagnement (article 3.2.27 du Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie, tel qu'introduit par l'article 14 de l' ordonnance du 7 décembre 2017Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 07/12/2017 pub. 14/12/2017 numac 2017014289 source region de bruxelles-capitale Ordonnance modifiant l'ordonnance du 2 mai 2013 portant le Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie fermer).
Les travaux préparatoires indiquent ce qui suit à cet égard : « A titre d'exemples, le Gouvernement pourra encadrer certains aménagements adressés aux ménages et aux entreprises, tels que : - un droit d'accès payant à la zone de basses émissions, limité dans le temps; - des aides financières pour les particuliers (afin notamment de favoriser un changement modal); - des aides financières pour les entreprises; - des points d'information et d'accompagnement à destination des citoyens et entreprises » (Doc. parl., Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, 2017-2018, n° A-572/1, p. 23).
B.24.5. Enfin, le Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale peut établir un système d'accès temporaire à la ou aux zones de basses émissions contre paiement, afin de permettre à des personnes dont le véhicule ne remplit pas les conditions en matière d'émissions de polluants atmosphériques d'avoir quand même un accès temporaire aux zones en question (article 3.2.16, § 5, du Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie, remplacé par l'article 3, attaqué, de l' ordonnance du 7 décembre 2017Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 07/12/2017 pub. 14/12/2017 numac 2017014289 source region de bruxelles-capitale Ordonnance modifiant l'ordonnance du 2 mai 2013 portant le Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie fermer).
Il est souligné dans les travaux préparatoires que le pass d'une journée remplit une fonction sociale importante et permet à des véhicules qui n'entrent qu'exceptionnellement dans la Région de Bruxelles-Capitale, par exemple lors d'une occasion spéciale, d'accéder temporairement à la zone de basses émissions (Doc. parl., Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, 2017-2018, n° A-572/2, p. 52). B.24.6. Il ressort de ce qui précède que le législateur ordonnanciel permet au Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale de prendre des mesures visant à alléger l'impact socio-économique de la zone de basses émissions vis-à -vis de personnes qui n'ont pas la capacité financière d'acquérir immédiatement un nouveau véhicule répondant aux normes d'émission fixées par le Gouvernement ou qui, pour d'autres raisons, sont particulièrement vulnérables sur le plan de la mobilité.
Il existe donc un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.
Il revient au Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale, sous le contrôle du juge compétent, de faire usage de l'habilitation qui lui a été conférée par les dispositions précitées de manière conforme aux articles 10 et 11 de la Constitution.
B.25. Le troisième moyen n'est pas fondé.
En ce qui concerne la libre circulation B.26.1. Le cinquième moyen est pris de la violation, par l'ordonnance attaquée, des articles 28, paragraphe 1, et 30 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. La partie requérante reproche à l'ordonnance attaquée de restreindre la libre circulation des personnes, des biens et des services dans l'Union européenne, et d'instaurer un péage inadmissible.
B.26.2. Ni l'article 142 de la Constitution, ni la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle n'attribuent à la Cour la compétence d'examiner des dispositions législatives directement au regard de dispositions du droit international ou du droit de l'Union européenne. Partant, la Cour n'est pas compétente pour examiner directement les dispositions attaquées au regard des articles conventionnels mentionnés dans le moyen.
B.27. Le cinquième moyen n'est pas recevable.
Par ces motifs, la Cour rejette le recours.
Ainsi rendu en langue néerlandaise, en langue française et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 28 février 2019.
Le greffier, F. Meersschaut Le président, A. Alen