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Arrêt
publié le 04 août 2017

Extrait de l'arrêt n° 60/2017 du 18 mai 2017 Numéro du rôle : 6388 En cause : la question préjudicielle concernant l'article 81, § 1 er , du décret de la Région wallonne du 11 mars 1999 relatif au permis d'environnement, posée p La Cour constitutionnelle, composée des présidents J. Spreutels et E. De Groot, et des juges A. (...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 60/2017 du 18 mai 2017 Numéro du rôle : 6388 En cause : la question préjudicielle concernant l'article 81, § 1er, du décret de la Région wallonne du 11 mars 1999 relatif au permis d'environnement, posée par le Conseil d'Etat.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents J. Spreutels et E. De Groot, et des juges A. Alen, T. Merckx-Van Goey, P. Nihoul, F. Daoût et T. Giet, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président J. Spreutels, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet de la question préjudicielle et procédure Par arrêt n° 234.185 du 21 mars 2016 en cause de l'ASBL « Abbaye Notre-Dame de Saint-Rémy » contre la Région wallonne, parties intervenantes : la SA « Lhoist » et la SA « Lhoist Industrie », dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 30 mars 2016, le Conseil d'Etat a posé la question préjudicielle suivante : « L'article 81, § 1er, du décret du 11 mars 1999 relatif au permis d'environnement viole-t-il les articles 10, 11 et 23 de la Constitution en ce qu'il exclut du régime du permis unique et dès lors des garanties procédurales et matérielles offertes par ce régime les demandes de permis visées à l'article 109, 1°, du CWATUPE, en particulier les demandes de permis concernant ' des biens immobiliers inscrits dans un site Natura 2000 proposé ou arrêté en application de la loi du 12 juillet 1973Documents pertinents retrouvés type loi prom. 12/07/1973 pub. 24/08/2010 numac 2010000473 source service public federal interieur Loi sur la conservation de la nature Traduction en langue allemande de la version fédérale fermer sur la conservation de la nature ' ? ». (...) III. En droit (...) Quant à la disposition en cause et à son contexte B.1. La question préjudicielle porte sur l'article 81, § 1er, du décret de la Région wallonne du 11 mars 1999 relatif au permis d'environnement (ci-après : le décret du 11 mars 1999), tel qu'il était applicable devant le juge a quo, soit avant sa modification par le décret du 23 juin 2016.

Ledit article 81, § 1er, disposait : « Tout projet mixte, à l'exception des projets portant sur des établissements temporaires, d'essai ou relatifs à des biens immobiliers visés à l'article 109 du CWATUP, fait l'objet d'une demande de permis unique ».

B.2. Dans sa version applicable au litige pendant devant le juge a quo, l'article 109 du Code wallon de l'aménagement du territoire, de l'urbanisme et du patrimoine (ci-après : CWATUP), auquel renvoie l'article 81, § 1er, précité, disposait : « Le permis est délivré conformément à l'article 107, mais de l'avis conforme du fonctionnaire délégué : 1° lorsqu'il concerne des biens immobiliers inscrits dans un site Natura 2000 proposé ou arrêté en application de la loi du 12 juillet 1973Documents pertinents retrouvés type loi prom. 12/07/1973 pub. 24/08/2010 numac 2010000473 source service public federal interieur Loi sur la conservation de la nature Traduction en langue allemande de la version fédérale fermer sur la conservation de la nature;2° lorsqu'il concerne des biens immobiliers inscrits sur la liste de sauvegarde, classés, situés dans une zone de protection visée à l'article 209 ou localisés dans un site repris à l'inventaire des sites archéologiques visé à l'article 233;dans les cas et selon les modalités arrêtés par le Gouvernement, le permis est délivré sur la base d'un certificat de patrimoine ou du procès-verbal de synthèse définitif.

Pour la région de langue française, l'avis de la commission visée à l'article 187, 3°, est sollicité préalablement à l'octroi du permis. A défaut pour ladite commission de s'être prononcée dans les délais fixés par le Gouvernement, l'avis est réputé favorable ».

B.3. L'article 109 du CWATUP identifie les actes et travaux qui sont soumis à la procédure de délivrance du permis d'urbanisme dans laquelle le collège communal statue sur avis conforme du fonctionnaire délégué.

Cette procédure diffère des trois autres procédures de délivrance du permis d'urbanisme organisées par le CWATUP dans lesquelles soit le collège communal statue sans avis du fonctionnaire délégué (article 107, § 1er), soit le collège communal statue sur avis préalable du fonctionnaire délégué (article 107, § 2), soit le fonctionnaire délégué ou le gouvernement statue seul (article 127).

B.4. L'article 81, § 1er, en cause, lu en combinaison avec l'article 109, alinéa 1er, 1°, du CWATUP, a pour effet que depuis 2009, les demandes de permis portant sur un projet mixte envisagé dans un site Natura 2000 ou dans un site candidat Natura 2000 ne sont pas soumises à la procédure de permis unique mais, de façon séparée, à l'une des procédures de délivrance du permis d'urbanisme citées en B.3 et à la procédure de permis d'environnement.

Quant à la recevabilité de l'intervention de l'ASBL « Ardennes liégeoises » B.5.1. La SA « Lhoist » et la SA « Lhoist Industrie » contestent la recevabilité de la requête en intervention de l'ASBL « Ardennes liégeoises » au motif que celle-ci ne contiendrait aucun dispositif de nature à indiquer la position défendue par l'ASBL. B.5.2. L'article 87, § 1er, de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle dispose : « Lorsque la Cour constitutionnelle statue, à titre préjudiciel, sur les questions visées à l'article 26, toute personne justifiant d'un intérêt peut adresser un mémoire à la Cour dans les trente jours de la publication prescrite par l'article 74. Elle est, de ce fait, réputée partie au litige ».

Pour justifier d'un intérêt, conformément à l'article 87, § 1er, précité, les personnes qui souhaitent intervenir dans une procédure préjudicielle doivent exposer, dans leur mémoire, suffisamment d'éléments permettant d'établir que la réponse de la Cour aux questions préjudicielles peut avoir une incidence directe sur leur situation personnelle.

B.5.3. L'ASBL " Ardennes liégeoises " a, en vertu de ses statuts, notamment pour objet de « défendre l'environnement des Ardennes liégeoises » et de mettre en oeuvre « des voies de droit et recours qui ont pour objectif d'assurer le respect des textes juridiques ayant pour but ou pour effet de protéger l'environnement ». Un tel objet social est susceptible d'être directement affecté par la réponse que la Cour donnera à une question préjudicielle relative à l'exclusion des sites Natura 2000 et des sites candidats Natura 2000 du régime du permis unique.

Il ressort à suffisance de l'exposé de la requête de la partie intervenante que celle-ci regrette que l'article 81, § 1er, du décret du 11 mars 1999 n'ait pas été adapté suite à la modification de l'article 109 du CWATUP par le décret du 30 avril 2009, entraînant une exclusion des projets mixtes envisagés dans des sites Natura 2000 du champ d'application du régime du permis unique.

Il ressort en outre du mémoire en réponse de la Région wallonne que celle-ci a saisi la portée de la requête en intervention introduite par l'ASBL « Ardennes liégeoises » et a pu y répondre de façon circonstanciée.

Ceci démontre à suffisance que l'intervention de l'ASBL « Ardennes Liégeoises » ne compromet ni le caractère contradictoire de la procédure devant la Cour, ni les droits de la défense des autres parties à la cause.

B.5.4. L'intervention est recevable.

Quant au fond B.6.1. La Cour est interrogée sur la compatibilité de l'article 81, § 1er, du décret du 11 mars 1999 relatif au permis d'environnement avec les articles 10, 11 et 23 de la Constitution, en ce qu'il exclut du régime du permis unique et des garanties procédurales et matérielles offertes par ce régime les demandes de permis concernant des biens immobiliers inscrits dans un site Natura 2000 proposé ou arrêté en application de la loi du 12 juillet 1973Documents pertinents retrouvés type loi prom. 12/07/1973 pub. 24/08/2010 numac 2010000473 source service public federal interieur Loi sur la conservation de la nature Traduction en langue allemande de la version fédérale fermer sur la conservation de la nature.

B.6.2. Contrairement à ce qu'affirme la Région wallonne, il ressort de la motivation de la décision de renvoi que la Cour n'est pas invitée à comparer deux régimes de permis mais bien la situation des tiers qui s'estiment lésés par un projet mixte envisagé dans un site Natura 2000 ou dans un site candidat Natura 2000 avec celle des tiers qui s'estiment lésés par un projet mixte non inscrit dans un tel périmètre.

B.6.3. Il ressort également de la décision de renvoi que le permis d'urbanisme querellé a été délivré par le fonctionnaire délégué sur la base de l'article 127, § 1er, 9°, du CWATUP (actes et travaux projetés dans une zone d'extraction ou relatifs à des travaux d'extraction ou de valorisation de roches ornementales), qui est une disposition dérogatoire à l'article 109 du CWATUP en ce qui concerne la détermination de l'autorité compétente pour délivrer le permis d'urbanisme. Comme le relève le juge a quo, cette circonstance ne fait pas obstacle à l'application de l'article 81, § 1er, du décret du 11 mars 1999 qui renvoie au même article 109 du CWATUP, pour déterminer le champ d'application de la procédure de permis unique.

B.7.1. Un « projet mixte » est un « projet pour lequel il apparaît, au moment de l'introduction de la demande de permis, que sa réalisation requiert un permis d'environnement et un permis d'urbanisme » (article 1er, 11°, du décret du 11 mars 1999, dans sa version applicable au litige pendant devant le juge a quo).

Un « permis unique » est une décision de l'autorité relative à un projet mixte qui est délivrée à l'issue de la procédure visée au chapitre XI du décret du 11 mars 1999 (« Du permis unique ») et qui tient lieu de permis d'environnement et de permis d'urbanisme (article 1er, 12°, du décret du 11 mars 1999).

B.7.2. Le permis unique répond à l'objectif suivant du législateur décrétal : « [...] créer un système d'autorisation couvrant le plus grand nombre de nuisances qu'une installation est susceptible de causer à l'homme ou à l'environnement. Une innovation majeure consiste à organiser dans une procédure unique, l'examen de l'ensemble des préoccupations qu'il faut prendre en compte : l'accent est mis désormais sur l'approche intégrée.

Le système de permis intégré est apparu comme un instrument particulièrement apte à assurer une protection effective de l'environnement dans son ensemble [...] » (Doc. parl., Parlement wallon, 1997-1998, n° 392/1, p. 1).

Cette intégration juridique ne fait que refléter le constat que, dans la pratique, les aspects environnementaux et urbanistiques sont en interaction, de plus en plus difficiles à discerner, et se confondent de plus en plus souvent.

Le permis unique est donc un permis sui generis qui, s'il opère une intégration entre les polices de l'urbanisme et des établissements classés, n'équivaut cependant pas à l'addition pure et simple d'un permis d'urbanisme et d'un permis d'environnement. Le permis unique est un instrument juridique recouvrant un ensemble qui va au-delà de la somme des éléments qui le composent.

B.8. Comme il ressort du texte de l'article 81, § 1er, en cause, celui-ci prévoit que tout projet mixte fait l'objet d'une demande de permis unique, « à l'exception des projets portant sur des établissements temporaires, d'essai ou relatifs à des biens immobiliers visés à l'article 109 du CWATUP ».

B.9.1. L'avant-projet de décret à l'origine de la disposition en cause envisageait dans un premier temps d'exclure uniquement les établissements temporaires et les établissements d'essai de la notion du projet mixte soumis à la procédure de permis unique (Doc. parl., Parlement wallon, 1997-1998, n° 392/1, p. 130; voy. aussi pp. 144-145; n° 392/3, p.2, et n° 392/6).

La section de législation du Conseil d'Etat a indiqué qu'elle ne percevait pas pour quel motif le texte en projet excluait les installations temporaires et les installations d'essai du champ d'application du régime du permis unique (Doc. parl., Parlement wallon, 1997-1998, n° 392/1, p. 78; n° 392/98, pp. 3 et 6).

B.9.2. Finalement, le législateur a décidé d'exclure du régime du permis unique les établissements temporaires et les établissements d'essai, ainsi que les « biens immobiliers visés à l'article 109 du CWATUP ».

L'amendement à l'origine de l'article 81, § 1er, en cause a été justifié comme suit : « [...] La non-inclusion des établissements temporaires, des établissements d'essai et des établissements visés à l'article 109 du CWATUP (biens classés) se justifie compte tenu des délais particuliers qui sont applicables à l'instruction de ce type d'établissements et qui ne se concilient pas avec le régime mis en place par le présent chapitre. [...] » (Doc. parl., Parlement wallon, 1997-1998, n° 392/136, p. 6, n° 392/160 et n° 392/169, p. 273; voir aussi, n° 392/169, pp. 272-275 et 281).

B.10.1. Au moment de l'adoption de l'article 81, § 1er, du décret du 11 mars 1999 ainsi amendé, l'article 109 du CWATUP visait uniquement les biens faisant l'objet d'une mesure de protection patrimoniale.

Seuls les projets mixtes relatifs à cette catégorie de biens étaient de la sorte exclus du régime du permis unique, par l'effet du renvoi à cette disposition par l'article 81, § 1er, en cause.

A cette époque, l'article 109 du CWATUP prévoyait en effet : « Le permis est délivré conformément à l'article 108 s'il concerne des biens immobiliers inscrits sur la liste de sauvegarde, classés, situés dans une zone de protection visée à l'article 205 ou localisés dans un site mentionné à l'atlas visé à l'article 215. Le permis est délivré sur la base d'un certificat de patrimoine, dans les cas et selon les modalités arrêtés par le Gouvernement.

Pour la région de langue française, l'avis de la commission visée à l'article 185, 3°, est sollicité préalablement à l'octroi du permis. A défaut pour ladite commission de s'être prononcée dans les délais fixés par le Gouvernement, l'avis est réputé favorable ".

B.10.2. Les biens immobiliers inscrits dans un site Natura 2000 ou dans un site candidat Natura 2000 n'ont été ajoutés à la liste des actes et travaux visés à l'article 109 du CWATUP qu'en 2009, par le décret du 30 avril 2009.

Cet ajout a été justifié comme suit : « L'alinéa 1er est complété pour ajouter à la liste des actes et travaux qui requièrent un permis d'urbanisme délivré par le collège communal de l'avis conforme du fonctionnaire délégué, à savoir lorsque ces actes et travaux concernent des biens immobiliers inscrits dans un site Natura 2000 proposé ou arrêté en application de la loi du 12 juillet 1973Documents pertinents retrouvés type loi prom. 12/07/1973 pub. 24/08/2010 numac 2010000473 source service public federal interieur Loi sur la conservation de la nature Traduction en langue allemande de la version fédérale fermer sur la conservation de la nature.

Par souci de lisibilité, l'article en projet a été entièrement réécrit bien que les dispositions existantes relatives aux biens immobiliers inscrits sur la liste de sauvegarde, classés, situés dans une zone de protection visée à l'article 209 ou localisés dans un site repris à l'inventaire des sites archéologiques visé à l'article 233, en ce compris pour ce qui concerne l'habilitation donnée au Gouvernement pour déterminer les cas et les modalités relatives aux certificats de patrimoine, aient été maintenues telles quelles » (Doc. parl., Parlement wallon, 2008-2009, n° 972/1, p. 30).

Lors de l'examen du projet de décret par la Commission de l'Aménagement du Territoire, des Transports, de l'Energie et du Logement, le ministre a précisé : « Enfin, quelques dispositions moins spectaculaires sont prévues : [...] C'est aussi, c'est ce que [...] et d'autres avaient souhaité pour la zone Natura 2000, le fait que le permis soit à nouveau de prérogative communale, au niveau du Collège, mais avec avis conforme du fonctionnaire délégué. Comme cela, on ne retire pas toutes ces zones des prérogatives communales mais, à l'inverse, on se protège d'éventuels abus ou de facilités accordées à la légère par certains Collèges » (Doc. parl., Parlement wallon, 2008-2009, n° 972/20, p. 17).

B.10.3. Il ressort des travaux préparatoires précités que la modification de l'article 109 du CWATUP avait pour objectif de rétablir la compétence de principe du collège communal pour statuer sur les demandes de permis d'urbanisme pour des actes et travaux envisagés dans un site Natura 2000, laquelle avait été supprimée par un décret du 8 mai 2008.

L'incidence que cette modification allait produire sur le champ d'application du régime du permis unique défini à l'article 81, § 1er, en cause, n'a pas été évoquée lors des travaux préparatoires du décret du 30 avril 2009.

B.11. Le principe d'égalité et de non-discrimination n'exclut pas qu'une différence de traitement soit établie entre des catégories de personnes, pour autant qu'elle repose sur un critère objectif et qu'elle soit raisonnablement justifiée.

L'existence d'une telle justification doit s'apprécier en tenant compte du but et des effets de la mesure critiquée ainsi que de la nature des principes en cause; le principe d'égalité est violé lorsqu'il est établi qu'il n'existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.

B.12. Comme il est dit en B.6.2, la Cour est invitée à comparer la situation des tiers qui s'estiment lésés par un projet mixte envisagé dans un site Natura 2000 ou dans un site candidat Natura 2000 avec celle des tiers qui s'estiment lésés par un projet mixte non inscrit dans un tel périmètre. Dans les deux cas, il s'agit de catégories de personnes lésées par un projet mixte.

B.13. La circonstance que le bien immobilier sur lequel porte le projet mixte est situé - ou non - dans un périmètre désigné ou proposé comme site Natura 2000 constitue un critère objectif.

B.14. La Cour examine si la différence de traitement est raisonnablement justifiée au regard de l'objectif poursuivi par le législateur.

B.15. Par son arrêt n° 159/2012, du 20 décembre 2012, la Cour a jugé qu'eu égard aux caractéristiques du permis unique, « le législateur décrétal wallon a pu considérer que la procédure de délivrance ou de refus du permis unique soit différente de la procédure qui aboutit à la délivrance ou au refus d'un permis d'urbanisme ».

L'une des particularités de la procédure applicable au permis unique réside dans le fait que les tiers ont accès au recours administratif prévu à l'article 95 du décret du 11 mars 1999. A l'occasion de celui-ci, ils peuvent critiquer les aspects urbanistiques et environnementaux contenus dans le permis unique, ou l'un de ces aspects seulement.

Un tel recours saisit le Gouvernement de l'ensemble de l'affaire, ce qui lui permet de refuser le permis unique pour un motif d'urbanisme, même dans l'hypothèse où le recours ne concernerait que le volet environnemental du projet (C.E., n° 187.451, du 29 octobre 2008, Debuysser, p. 9/13).

A l'inverse, les tiers ne disposent pas de la possibilité d'introduire un tel recours contre la décision d'octroi ou de refus du permis d'urbanisme.

B.16. Les travaux préparatoires du décret du 30 avril 2009 cités en B.10.2 et B.10.3 ne font nullement apparaître quelle considération justifierait l'exclusion décrite en B.4.

B.17.1. L'article 81, § 1er, en cause a fait l'objet d'une modification récente en ce sens par le décret du 23 juin 2016 « modifiant le Code de l'Environnement, le Code de l'Eau et divers décrets en matière de déchets et de permis d'environnement », dans le but d'étendre le régime du permis unique aux projets mixtes envisagés dans un site Natura 2000.

B.17.2. L'article 91 de ce décret dispose : « A l'article 81, § 1er, du même décret, les mots ' des établissements temporaires, d'essai ou relatifs à des biens immobiliers visés à l'article 109 du CWATUP ' sont remplacés par les mots ' des établissements temporaires ou d'essai ou relatifs à des biens immobiliers visés à l'article 109, alinéa 1er, 2°, du CWATUP ' ».

B.17.3. L'amendement à l'origine de cette disposition a été justifié en ces termes lors des travaux préparatoires : « Les projets mixtes (permis d'environnement, permis d'urbanisme) sont en général soumis à permis unique, sauf dans certains cas spécifiques.

Ainsi, une procédure dissociée est prévue pour des projets situés en zone Natura 2000. Cette procédure dissociée repose sur le principe d'exception prévu à l'article 81 du décret du 11 mars 1999 qui, lui-même, renvoie à l'article 109 du CWATUP. Historiquement, les sites Natura 2000 ont été ajoutés à la liste des biens classés repris à l'article 109 du CWATUP sans percevoir l'implication indirecte sur le décret du 11 mars 1999 relatif au permis d'environnement par le biais de cet article 81.

Chacun s'accorde à reconnaître que la volonté du législateur n'a jamais été de dissocier la procédure de permis unique pour les projets situés en zone Natura 2000. Cette situation est d'ailleurs contraire à l'objectif recherché par le décret du 11 mars 1999 qui vise l'unicité de traitement pour un projet nécessitant un permis d'urbanisme et un permis d'exploiter. Il faut par ailleurs noter que le projet de Code de Développement territorial apporte une correction à cette situation.

Le Conseil d'Etat, saisi de recours pour de tels dossiers, a posé une question préjudicielle à la Cour constitutionnelle au sujet de la procédure dissociée appliquée aux projets situés en zone Natura 2000.

La réponse n'est pas attendue avant un à deux ans.

Sans attendre la décision de la Cour constitutionnelle et l'entrée en vigueur du Code de Développement territorial, il serait judicieux de corriger la situation en proposant une modification de l'article 81 du décret du 11 mars 1999.

La modification vise ainsi à apporter cette correction à l'article 81 du décret du 11 mars 1999 relatif au permis d'environnement. L'article [109,] alinéa 1er, 1°, du CWATUP n'est de ce fait plus visé par la disposition.

En lien avec la modification apportée à l'article 81 du décret du 11 mars 1999 relatif au permis d'environnement, l'insertion d'un article 100quater vise à prévoir une disposition transitoire. Celle-ci permettra de simplifier la gestion administrative de certains dossiers, tout en évitant des problèmes potentiels lors de recours pour ce type de dossiers tant que la Cour constitutionnelle ne s'est pas prononcée sur la question préjudicielle posée par le Conseil d'Etat » (Doc. parl., Parlement wallon, 2015-2016, n° 484/7, p. 2).

Lors du débat au sein de la commission de l'Environnement, les auteurs de l'amendement ont expliqué que celui-ci « vise à ce que les demandes de permis mixtes - d'environnement et d'urbanisme - situées en zone Natura 2000 puissent bénéficier - comme les autres - d'une demande de permis unique afin d'éviter l'examen parallèle de deux demandes de permis, ce dans un but de simplification administrative » (Doc. parl., Parlement wallon, 2015-2016, n° 484/10, pp. 16-17).

Ils ont ajouté, lors du débat en séance publique : « [...] Cette disposition vient régler une situation, pas dans l'urgence, mais de manière immédiate. En ce qui concerne les projets mixtes, ceux soumis à la fois à un permis d'environnement et à un permis d'urbanisme, ces projets sont généralement soumis à une procédure de permis unique, si ce n'est pour certaines exceptions, dont une qui concerne les projets situés en zone Natura 2000.

C'est peut-être quelque chose qui n'avait pas été prévu par le législateur à l'époque, c'est une conséquence d'une disposition législative. Ce n'est pas un dommage collatéral, mais un effet non désiré d'une réforme qui a fait en sorte que les projets situés en zone Natura 2000 doivent faire l'objet à la fois d'une procédure de permis d'urbanisme et d'une procédure de permis d'environnement et ne peuvent pas bénéficier, dans l'état actuel de la législation, de l'unicité de procédure prévue pour les permis uniques. [...] C'est le sens de cet amendement qui rencontre le souhait de simplification administrative évoqué par [...], puisque l'on corrige une erreur, une scorie ou un effet non désiré pour faire en sorte que, même dans les zones Natura 2000, les projets mixtes fassent l'objet d'une seule et unique procédure, tel que c'est prévu pour les autres projets » (Doc. parl., Parlement wallon, 2015-2016, CRIC, n° 186, p. 24).

B.18. Il résulte de ce qui précède qu'en ce qu'il exclut du champ d'application du régime du permis unique les projets mixtes portant sur des biens immobiliers inscrits dans un site Natura 2000 proposé ou arrêté en application de la loi du 12 juillet 1973Documents pertinents retrouvés type loi prom. 12/07/1973 pub. 24/08/2010 numac 2010000473 source service public federal interieur Loi sur la conservation de la nature Traduction en langue allemande de la version fédérale fermer sur la conservation de la nature, l'article 81, § 1er, du décret du 11 mars 1999, tel qu'il était applicable avant sa modification par le décret du 23 juin 2016, prive, sans justification raisonnable, les tiers susceptibles d'être lésés par de tels projets des garanties inhérentes au régime du permis unique et notamment, de la possibilité d'introduire un recours en réformation contre les aspects urbanistiques du projet.

B.19. La question préjudicielle appelle une réponse positive.

Il n'y a pas lieu de procéder à un examen de la compatibilité de la disposition en cause avec l'article 23 de la Constitution, qui ne pourrait conduire à un constat d'inconstitutionnalité plus étendu.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : L'article 81, § 1er, du décret de la Région wallonne du 11 mars 1999 relatif au permis d'environnement, tel qu'il était applicable avant sa modification par le décret du 23 juin 2016, viole les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'il exclut du champ d'application du régime du permis unique les projets mixtes portant sur des biens immobiliers inscrits dans un site Natura 2000 proposé ou arrêté en application de la loi du 12 juillet 1973Documents pertinents retrouvés type loi prom. 12/07/1973 pub. 24/08/2010 numac 2010000473 source service public federal interieur Loi sur la conservation de la nature Traduction en langue allemande de la version fédérale fermer sur la conservation de la nature.

Ainsi rendu en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 18 mai 2017.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux Le président, J. Spreutels

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