publié le 29 mars 2017
Extrait de l'arrêt n° 11/2017 du 25 janvier 2017 Numéros du rôle : 6394, 6395, 6396, 6397, 6398, 6399, 6400, 6401, 6402, 6403, 6404, 6405, 6406, 6407 et 6408 En cause : les questions préjudicielles relatives à l'article 581, 8°, du Code judic La Cour constitutionnelle, composée des présidents J. Spreutels et E. De Groot, et des juges L. (...)
COUR CONSTITUTIONNELLE
Extrait de l'arrêt n° 11/2017 du 25 janvier 2017 Numéros du rôle : 6394, 6395, 6396, 6397, 6398, 6399, 6400, 6401, 6402, 6403, 6404, 6405, 6406, 6407 et 6408 En cause : les questions préjudicielles relatives à l'article 581, 8°, du Code judiciaire, posées par le Tribunal d'arrondissement du Luxembourg.
La Cour constitutionnelle, composée des présidents J. Spreutels et E. De Groot, et des juges L. Lavrysen, A. Alen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke, T. Merckx-Van Goey, P. Nihoul et F. Daoût, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président J. Spreutels, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles et procédure Par quinze jugements du 21 mars 2016 en cause respectivement de la SA « Thomas & Piron Rénovation » contre l'ASBL « Group-S-Casi », la SA « T.P. Management » contre l'Institut national d'assurances sociales pour travailleurs indépendants (INASTI), la SPRL « Frenesagri » contre l'ASBL « Caisse wallonne d'assurances sociales de l'UCM », la SPRL « M2J » contre l'Institut national d'assurances sociales pour travailleurs indépendants (INASTI), la SPRL « Fondetre » contre l'ASBL « Zenito, caisse d'assurances sociales », la SPRL « TP Gestion » contre l'ASBL « Zenito, caisse d'assurances sociales », la SCA « Elempe » contre l'ASBL « Zenito, caisse d'assurances sociales », la SA « Pisciculture de la Houille » contre l'ASBL « Zenito, caisse d'assurances sociales », la SPRL « François Piron » contre l'ASBL « Zenito, caisse d'assurances sociales », la SPRL « Elempe » contre l'ASBL « Zenito, caisse d'assurances sociales », la SA « Thomas et Piron Home » contre l'ASBL « Zenito, caisse d'assurances sociales », la SA « Thomas et Piron Holding » contre l'ASBL « Zenito, caisse d'assurances sociales », la SPRL « SIDE » contre l'ASBL « Zenito, caisse d'assurances sociales », la SA « Espaces promotion » contre l'ASBL « Zenito, caisse d'assurances sociales » et la SA « Efimo » contre l'ASBL « Zenito, caisse d'assurances sociales », dont les expéditions sont parvenues au greffe de la Cour le 11 avril 2016, le Tribunal d'arrondissement du Luxembourg a posé la question préjudicielle suivante : « Eu égard aux arrêts de la Cour constitutionnelle des 16 décembre 2010 (n° 142/2010) et 16 juin 2011 (n° 103/2011), l'article 581, 8° du Code judiciaire, qui attribue au tribunal du travail la compétence pour connaître des contestations relatives à l'obligation pour les sociétés de payer une cotisation destinée au statut social des travailleurs indépendants en vertu du chapitre III du titre III de la loi du 26 juin 1992Documents pertinents retrouvés type loi prom. 26/06/1992 pub. 31/03/2011 numac 2011000187 source service public federal interieur Loi portant des dispositions sociales et diverses fermer portant des dispositions sociales et diverses, et du chapitre II du titre III de la loi du 30 décembre 1992Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/12/1992 pub. 18/06/2012 numac 2012000355 source service public federal interieur Loi portant des dispositions sociales et diverses. - Coordination officieuse en langue allemande d'extraits fermer portant des dispositions sociales et diverses, viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution ? ».
Ces affaires, inscrites sous les numéros 6394, 6395, 6396, 6397, 6398, 6399, 6400, 6401, 6402, 6403, 6404, 6405, 6406, 6407 et 6408 du rôle de la Cour, ont été jointes. (...) III. En droit (...) B.1. L'article 581, 8°, du Code judiciaire dispose : « Le tribunal du travail connaît : [...] 8° des contestations relatives à l'obligation pour les sociétés de payer une cotisation destinée au statut social des travailleurs indépendants en vertu du chapitre III du titre III de la loi du 26 juin 1992Documents pertinents retrouvés type loi prom. 26/06/1992 pub. 31/03/2011 numac 2011000187 source service public federal interieur Loi portant des dispositions sociales et diverses fermer portant des dispositions sociales et diverses, et du chapitre II du titre III de la loi du 30 décembre 1992Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/12/1992 pub. 18/06/2012 numac 2012000355 source service public federal interieur Loi portant des dispositions sociales et diverses. - Coordination officieuse en langue allemande d'extraits fermer portant des dispositions sociales et diverses ». B.2. Le Tribunal d'arrondissement du Luxembourg interroge la Cour sur la compatibilité de cette disposition avec les articles 10 et 11 de la Constitution, « eu égard aux arrêts de la Cour constitutionnelle des 16 décembre 2010 (n° 142/2010) et 16 juin 2011 (n° 103/2011) ».
B.3. Il ressort des motifs des décisions de renvoi que le Tribunal d'arrondissement du Luxembourg a été saisi par le Tribunal de première instance du Luxembourg, chambre fiscale, qui s'interroge sur sa compétence matérielle pour connaître d'actions tendant à faire condamner différentes caisses d'assurances sociales au remboursement de cotisations spéciales, instaurées par l'article 78 de la loi du 26 juin 1992Documents pertinents retrouvés type loi prom. 26/06/1992 pub. 31/03/2011 numac 2011000187 source service public federal interieur Loi portant des dispositions sociales et diverses fermer portant des dispositions sociales et diverses, remplacée par la loi du 30 décembre 1992Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/12/1992 pub. 18/06/2012 numac 2012000355 source service public federal interieur Loi portant des dispositions sociales et diverses. - Coordination officieuse en langue allemande d'extraits fermer portant des dispositions sociales et diverses, à charge de plusieurs sociétés, sur la base de l'article 569, alinéa 1er, 32°, du Code judiciaire.
B.4. L'article 569, alinéa 1er, 32°, du Code judiciaire dispose : « Le tribunal de première instance connaît : [...] 32° des contestations relatives à l'application d'une loi d'impôt ». B.5.1. Selon le Tribunal d'arrondissement du Luxembourg, juge a quo, il y a une concurrence entre les compétences exclusives attribuées, d'une part, au tribunal de première instance par l'article 569, alinéa 1er, 32°, du Code judiciaire et, d'autre part, au tribunal du travail par l'article 581, 8°, de ce Code. Il revient au tribunal d'arrondissement saisi conformément aux articles 639 et 640 du Code judiciaire de trancher ce conflit de compétences.
B.5.2. Pour répondre aux questions préjudicielles, la Cour doit vérifier si l'article 581, 8°, du Code judiciaire est compatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'il attribue au tribunal du travail la compétence de connaître des contestations relatives à l'obligation pour les sociétés de payer une cotisation destinée au statut social des travailleurs indépendants visées par cette disposition, alors que la Cour a qualifié cette cotisation d'impôt et que l'article 569, alinéa 1er, 32°, du Code judiciaire attribue au tribunal de première instance la compétence de connaître des contestations relatives à l'application d'une loi d'impôt.
B.6. L'article 91 de la loi du 30 décembre 1992Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/12/1992 pub. 18/06/2012 numac 2012000355 source service public federal interieur Loi portant des dispositions sociales et diverses. - Coordination officieuse en langue allemande d'extraits fermer portant des dispositions sociales et diverses, tel qu'il a été modifié par l'article 279 de la loi-programme du 22 décembre 2003Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 22/12/2003 pub. 31/12/2003 numac 2003021248 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi-programme fermer et par l'article 23 de la loi du 29 mars 2012Documents pertinents retrouvés type loi prom. 29/03/2012 pub. 30/03/2012 numac 2012021057 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi portant des dispositions diverses (1) fermer portant des dispositions diverses (I), dispose : « Les sociétés sont tenues de verser une cotisation annuelle forfaitaire.
Le Roi fixe, pour ce que ce soit d'application à partir de 2004, par arrêté délibéré en Conseil des ministres, les cotisations dues par les sociétés, sans que celles-ci ne puissent toutefois dépasser 868 EUR. Pour ce faire, il peut opérer une distinction sur la base de critères qui tiennent compte de la taille de la société ».
B.7.1. La cotisation en cause à charge des sociétés au profit du régime de sécurité sociale des travailleurs indépendants a été instaurée à l'origine comme cotisation forfaitaire unique de 7 000 francs par l'article 78 de la loi du 26 juin 1992Documents pertinents retrouvés type loi prom. 26/06/1992 pub. 31/03/2011 numac 2011000187 source service public federal interieur Loi portant des dispositions sociales et diverses fermer portant des dispositions sociales et diverses.
Un recours en annulation a été introduit contre cette disposition. Par son arrêt n° 77/93 du 3 novembre 1993, portant rejet de ce recours, la Cour a jugé : « B.3.2. L'instauration, par les dispositions attaquées, d'une cotisation forfaitaire à charge des sociétés peut se justifier par la considération que, si les personnes exerçaient en qualité de travailleur indépendant l'activité qu'elles exercent en société, elles seraient tenues au payement des cotisations sociales dues en vertu du statut social des travailleurs indépendants; le législateur a d'ailleurs pris en compte la circonstance que la diminution de la base de ces cotisations résultait précisément du fait que de nombreux indépendants s'étaient soustraits aux charges pesant sur les personnes physiques en fondant une société ou en recourant au procédé dit de la ' société unipersonnelle ' (déclaration du ministre des petites et moyennes entreprises et de l'agriculture en commission du Sénat, Doc. parl., Sénat, rapport, S.E. 1991-1992, n° 315/4, p. 11; dans le même sens, pp. 6 et 10; exposé des motifs, n° 315/1, p. 28; Chambre, rapport, S.E. 1991-1992, n° 480/7, pp. 9 et 12).
B.3.3. Il appartient au législateur, en présence d'un important déficit du ' statut social ' des indépendants (Sénat, n° 315/4, précité, p. 4), d'apprécier dans quelle mesure il est opportun, plutôt que d'augmenter les cotisations sociales des indépendants (idem, p. 14) ou de modifier le statut fiscal des sociétés (Chambre, n° 480/7, précité, p.9), d'imposer à celles-ci l'obligation de contribuer au financement du régime de sécurité sociale des indépendants lorsque l'équilibre financier de celle-ci est menacé par la transformation, rendue possible par une législation distincte, d'activités professionnelles indépendantes en activités sociétaires ou réputées telles. Ce faisant, le législateur ne peut cependant méconnaître la portée des articles 6 et 6bis de la Constitution en recourant à un moyen disproportionné au but visé.
B.3.4. La notion de forfait, telle qu'elle apparaît dans la disposition attaquée, se situe à l'opposé de celle de proportion. L'on peut cependant admettre qu'en matière sociale notamment, des considérations d'efficacité et de coût empêchent le législateur de tenir compte de l'extrême diversité de situation des sociétés, d'autant que l'élaboration et la mise en oeuvre de mesures affinées eussent été de nature, sinon à mettre en cause la réalisation de l'objectif, du moins à la retarder (Sénat, n° 315/4, précité, p. 17).
Compte tenu de la petite taille ou de la situation difficile de bon nombre de sociétés, une simplification aussi radicale n'aurait pu être admise pour l'instauration d'une cotisation d'un montant sensiblement plus élevé ».
B.7.2. La loi du 30 décembre 1992Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/12/1992 pub. 18/06/2012 numac 2012000355 source service public federal interieur Loi portant des dispositions sociales et diverses. - Coordination officieuse en langue allemande d'extraits fermer portant des dispositions sociales et diverses (Moniteur belge, 9 janvier 1993) a remplacé la cotisation unique par une cotisation annuelle.
Il est exposé ce qui suit dans les travaux préparatoires : « Pour l'année 1992, une cotisation forfaitaire a été mise à charge des sociétés, destinée au statut social des travailleurs indépendants.
Cette mesure a été prise en raison de l'importance croissante du nombre de sociétés ainsi qu'en raison de la situation financière précaire dans laquelle se trouvait le statut social des travailleurs indépendants.
Vu que les tendances esquissées ci-dessus se confirment et en vue d'obtenir un équilibre financier durable dudit statut, cette cotisation est maintenue » (Doc. parl., Sénat, 1992-1993, n° 526-1, p. 27).
B.7.3. L'article 91 de la loi précitée du 30 décembre 1992 a été remplacé par l'article 279 de la loi-programme du 22 décembre 2003Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 22/12/2003 pub. 31/12/2003 numac 2003021248 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi-programme fermer.
La nouvelle rédaction de l'article 91 est la conséquence de l'adoption d'un amendement, justifié comme suit : « Par la loi du 30 décembre 1992Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/12/1992 pub. 18/06/2012 numac 2012000355 source service public federal interieur Loi portant des dispositions sociales et diverses. - Coordination officieuse en langue allemande d'extraits fermer a été introduite, à la suite de la cotisation unique, une cotisation annuelle à charge des sociétés destinée au statut social des travailleurs indépendants.
Cette cotisation annuelle a été fixée au départ à 7.000 BEF pour ensuite, par arrêté royal du 18 novembre 1996, être portée à 12.500 BEF (converti en 310 euros conformément à l'arrêté royal du 20 juillet 2000). Par suite de l'indexation, la cotisation s'élève pour l'année 2003 à 335 euros.
Par le présent amendement, la compétence pour fixer la cotisation annuelle à charge des sociétés, destinée au statut social des travailleurs indépendants, est confiée au Roi. Dorénavant, différentes cotisations annuelles pourront être fixées, par arrêté délibéré en Conseil des ministres, en fonction notamment de la taille de société.
Le Roi peut ainsi fixer des critères qui opèrent une distinction entre divers types de sociétés, en fonction de leur taille. Suivant le type de société auquel on appartient, ce sera l'une ou l'autre cotisation qui sera due » (Doc. parl., Chambre, 2003-2004, DOC 51-0473/018, p. 11).
Il ressort des travaux préparatoires que le ministre compétent a marqué son accord sur l'amendement. Le ministre a répondu comme suit à une question d'un parlementaire : « [...] le forfait sera fixé en fonction de la taille de l'entreprise.
Les critères concrets ne sont pas encore fixés. Au début de la Table ronde, des problèmes se sont posés. Aussi une concertation a-t-elle été organisée préalablement. Lors de la première réunion, il s'est avéré qu'un des problèmes du secteur des classes moyennes concernait les cotisations. C'est pourquoi il a été proposé de moduler ces cotisations. Les décisions du conclave gouvernemental seront exécutées. Les petites sociétés acquitteront des cotisations moins élevées » (Doc. parl., Chambre, 2003-2004, DOC 51-0473/031, pp. 15-16).
B.7.4. Interrogée sur la compatibilité de cette disposition avec les articles 10, 11, 170, 172 et 173 de la Constitution, la Cour a examiné la nature de cette cotisation dans ses arrêts nos 142/2010 et 103/2011. Elle a ainsi jugé par son arrêt n° 103/2011 : « B.4.1. La Cour doit d'abord examiner si la cotisation en cause doit être considérée comme un impôt ou comme une cotisation de sécurité sociale. En effet, ce n'est que dans le premier cas que peut être invoquée une violation des articles 170, 172 et 173 de la Constitution.
B.4.2. Les articles 170, 172 et 173 de la Constitution contiennent le principe de légalité en matière d'impôts et de rétributions. Ils ne sont pas applicables aux cotisations à la sécurité sociale. Bien que les impôts et les cotisations de sécurité sociale puissent avoir des caractéristiques communes, du fait de leur caractère obligatoire, ils diffèrent toutefois fondamentalement : les impôts servent à couvrir les dépenses générales d'intérêt public, tandis que les cotisations de sécurité sociale sont exclusivement affectées au financement de régimes d'allocations de remplacement ou de complément des revenus du travail.
Le paiement de la cotisation en cause ne fait pas naître de droits complémentaires sur le plan de la sécurité sociale, de sorte qu'un lien avec la sécurité sociale des personnes redevables fait défaut. Il s'ensuit que la cotisation en cause n'est pas une cotisation à la sécurité sociale, mais un impôt au sens des articles 170 et 172 de la Constitution.
Contrairement à ce qu'affirme le Conseil des ministres, ce constat n'est pas remis en cause par le fait que le produit de cette cotisation est destiné au financement du régime de la sécurité sociale des travailleurs indépendants, ni par la déductibilité fiscale de cette cotisation ».
B.7.5. La Cour a dès lors dit pour droit par ces arrêts que l'article 91 de la loi du 30 décembre 1992Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/12/1992 pub. 18/06/2012 numac 2012000355 source service public federal interieur Loi portant des dispositions sociales et diverses. - Coordination officieuse en langue allemande d'extraits fermer portant des dispositions sociales et diverses, tel qu'il a été modifié par l'article 279 de la loi-programme du 22 décembre 2003Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 22/12/2003 pub. 31/12/2003 numac 2003021248 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi-programme fermer, viole l'article 170 de la Constitution, mais uniquement dans la mesure où il contient le mot « notamment ». Cette disposition habilitait, en effet, le Roi à prendre en considération d'autres critères que la taille de la société.
B.7.6. Le mot « notamment » a ensuite été abrogé par l'article 23 de la loi du 29 mars 2012Documents pertinents retrouvés type loi prom. 29/03/2012 pub. 30/03/2012 numac 2012021057 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi portant des dispositions diverses (1) fermer précitée.
B.8.1. La disposition en cause, l'article 581, 8°, du Code judiciaire, trouve son origine dans l'article 102 de la loi du 30 décembre 1992Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/12/1992 pub. 18/06/2012 numac 2012000355 source service public federal interieur Loi portant des dispositions sociales et diverses. - Coordination officieuse en langue allemande d'extraits fermer précitée.
Cette disposition fait partie des règles qui s'appliquent à la cotisation en cause, règles que le législateur a calquées sur celles du statut social des travailleurs indépendants, dans le prolongement du but poursuivi par l'instauration de cette cotisation, tel qu'il a été rappelé en B.7.1 à B.7.4.
B.8.2. En confiant au tribunal du travail les contestations relatives à l'obligation pour les sociétés de payer une cotisation destinée au statut social des travailleurs indépendants, la disposition en cause traite de manière différente les sociétés redevables de cette cotisation, que la Cour a qualifiée d'impôt, et les autres contribuables dès lors que l'article 569, alinéa 1er, 32°, du Code judiciaire confie au tribunal de première instance la compétence de connaître des contestations relatives à l'application d'une loi d'impôt. La situation de ces sociétés et celle des autres contribuables sont comparables.
B.8.3. La Cour doit dès lors vérifier si cette différence de traitement est compatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution.
B.8.4. Compte tenu du lien entre la cotisation en cause et le statut social des travailleurs indépendants, il est pertinent que, malgré la qualification de la cotisation en cause comme impôt, le contentieux relatif à cette cotisation ait été confié au tribunal du travail. Bien que de nature fiscale, au sens des articles 170 et 172 de la Constitution, la cotisation en cause reste apparentée à une cotisation sociale par sa raison d'être, avec pour conséquence son intégration dans le système du statut social des travailleurs indépendants.
B.9. La Cour doit encore vérifier si l'article 581, 8°, du Code judiciaire ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit d'accès au juge.
La disposition en cause assure aux justiciables un traitement de leur cause par une juridiction indépendante et impartiale qui a pleine juridiction pour examiner leurs griefs et doit notamment vérifier la correcte application de la loi. Le fait que les juridictions du travail ne sont pas spécialisées en matière fiscale n'entraîne pas une différence injustifiée entre les redevables de la cotisation litigieuse et les redevables d'un autre impôt. Il ne résulte d'ailleurs pas des articles 170 et 172 de la Constitution que toutes les contestations relatives aux impôts doivent être soumises à une même juridiction. Rien n'indique encore que les justiciables ne disposent pas des mêmes moyens de défense selon que leur litige est porté devant le tribunal du travail ou devant le tribunal de première instance.
Le droit d'accès à un juge ne comprend pas le droit d'accéder à un juge de son choix. Il relève du pouvoir d'appréciation du législateur de décider quel juge est le plus apte à trancher un type donné de contestations.
B.10. L'attribution au tribunal du travail des contestations relatives à l'obligation pour les sociétés de payer une cotisation destinée au statut social des travailleurs indépendants est par conséquent raisonnablement justifiée.
B.11. Les questions préjudicielles appellent une réponse négative.
Par ces motifs, la Cour dit pour droit : L'article 581, 8°, du Code judiciaire ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution.
Ainsi rendu en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 25 janvier 2017.
Le greffier, P.-Y. Dutilleux Le président, J. Spreutels