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Arrêt
publié le 24 décembre 2015

Extrait de l'arrêt n° 129/2015 du 24 septembre 2015 Numéro du rôle : 6067 En cause : la question préjudicielle concernant l'article 25 du décret de la Région flamande du 20 avril 2001 relatif à l'organisation du transport de personnes par la La Cour constitutionnelle, composée des présidents A. Alen et J. Spreutels, et des juges E. De G(...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 129/2015 du 24 septembre 2015 Numéro du rôle : 6067 En cause : la question préjudicielle concernant l'article 25 du décret de la Région flamande du 20 avril 2001 relatif à l'organisation du transport de personnes par la route, posée par le Tribunal correctionnel néerlandophone de Bruxelles.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents A. Alen et J. Spreutels, et des juges E. De Groot, L. Lavrysen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke, T. Merckx-Van Goey, P. Nihoul, F. Daoût, T. Giet et R. Leysen, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président A. Alen, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet de la question préjudicielle et procédure Par jugement du 16 octobre 2014 en cause du procureur du Roi contre Abdellah Arraoui, la SPRL « A.R.S.H. » et Mohammed Larbi Ibn El Cadi, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 24 octobre 2014, le Tribunal correctionnel néerlandophone de Bruxelles a posé la question préjudicielle suivante : « L'article 25 du décret de la Région flamande du 20 avril 2001 relatif à l'organisation du transport de personnes par la route, interprété en ce sens qu'il interdit à l'exploitant d'un service de taxi dont le siège d'exploitation se trouve dans la Région de Bruxelles-Capitale et qui a, lors d'un trajet en taxi, transporté des personnes vers un endroit situé en Région flamande, d'embarquer à cet endroit en Région flamande des personnes pour les transporter vers un endroit situé dans la Région de Bruxelles-Capitale s'il ne dispose pas d'une autorisation délivrée conformément au décret précité de la Région flamande, viole-t-il l'article 6, § 1er, VI, alinéa 3, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles et l'article 4 de la loi spéciale du 12 janvier 1989 relative aux institutions bruxelloises (union économique) ? ». (...) III. En droit (...) B.1. L'article 25 du décret de la Région flamande du 20 avril 2001 relatif à l'organisation du transport de personnes par la route dispose : « Personne ne peut, sans autorisation, exploiter un service de taxi à l'aide [d'un] ou [de] plusieurs véhicules à partir de la voie publique ou à tout autre endroit non ouvert aux transports en commun [lire : non ouvert à la circulation publique] qui se situe sur le territoire de la Région flamande ».

B.2. Le juge a quo demande à la Cour si cette disposition viole l'article 6, § 1er, VI, alinéa 3, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles et l'article 4 de la loi spéciale du 12 janvier 1989 relative aux institutions bruxelloises.

L'article 6, § 1er, VI, alinéa 3, précité, dispose : « En matière économique, les Régions exercent leurs compétences dans le respect des principes de la libre circulation des personnes, biens, services et capitaux et de la liberté de commerce et d'industrie, ainsi que dans le respect du cadre normatif général de l'union économique et de l'unité monétaire, tel qu'il est établi par ou en vertu de la loi, et par ou en vertu des traités internationaux ».

En vertu de l'article 4 de la loi spéciale du 12 janvier 1989 relative aux institutions bruxelloises, cette disposition est d'application dans la Région de Bruxelles-Capitale.

B.3. Le juge a quo soumet l'article 25 du décret du 20 avril 2001 à la Cour dans l'interprétation selon laquelle il interdit à l'exploitant d'un service de taxi dont le siège d'exploitation se trouve dans la Région de Bruxelles-Capitale et qui a, lors d'un trajet en taxi, transporté des personnes vers un endroit situé en Région flamande, d'embarquer à cet endroit des personnes pour les transporter vers un endroit situé dans la Région de Bruxelles-Capitale s'il ne dispose pas d'une autorisation délivrée conformément au décret précité.

B.4. Il ressort du texte et des travaux préparatoires de l'article 25 qu'une autorisation n'est requise que pour l'exploitation de services de taxis « à partir de la voie publique ou à tout autre endroit non ouvert aux transports en commun [lire : non ouvert à la circulation publique] qui se situe sur le territoire de la Région flamande ».

Cette disposition n'empêche pas que les services de taxis dont le siège d'exploitation est situé en dehors de la Région flamande puissent poursuivre leurs courses sur le territoire de la Région flamande, sans qu'une autorisation soit requise à cette fin (Doc. parl., Parlement flamand, 2000-2001, n° 435/1, p. 20).

B.5. Dans l'arrêt n° 85/2008 du 27 mai 2008, la Cour a estimé « que le critère utilisé par le législateur décrétal flamand, à savoir le ' siège d'exploitation ', constitue un critère de rattachement pertinent, permettant de localiser exclusivement la matière réglée par le décret sur la mobilité dans la sphère de compétence territoriale de la Région flamande ».

Le juge a quo en déduit que l'exploitant d'un service de taxi dont le siège d'exploitation se trouve dans la Région de Bruxelles-Capitale, et qui n'a pas de siège d'exploitation en Région flamande, ne pourrait obtenir l'autorisation visée à l'article 25 du décret du 20 avril 2001.

B.6. La notion de « critère de rattachement » n'a pas la portée que lui donne le juge a quo. Cette notion vise à localiser toute norme adoptée par un législateur dans le territoire de sa compétence, de sorte que toute relation et toute situation concrètes soient réglées par un seul législateur.

Le système de la répartition exclusive des compétences territoriales s'oppose en l'espèce à ce qu'une autorité régionale prenne unilatéralement des dispositions se rapportant à l'exercice, sur le territoire d'une région, d'activités de services de taxis exploités au départ d'endroits qui ne sont pas situés sur le territoire de cette région. Pour le règlement des questions relatives aux services de taxis, et non aux courses, qui s'étendent sur le territoire de plus d'une région, l'article 92bis, § 2, c), de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles exige un accord de coopération (voy. l'arrêt n° 85/2008, B.6.2).

B.7. Le critère de rattachement du règlement en question empêche donc le législateur décrétal flamand de régler l'exploitation de services de taxis à partir du territoire de la Région de Bruxelles-Capitale, mais n'empêche pas l'exploitant d'un service de taxi dans la Région de Bruxelles-Capitale d'obtenir une autorisation pour exploiter des services de taxis en Région flamande.

Selon le Gouvernement flamand, c'était également l'objectif du législateur décrétal, comme en atteste l'article 26, § 2, du décret du 20 avril 2001 qui dispose : « Aux conditions fixées par le conseil communal, l'autorisation ou le renouvellement de l'autorisation pour l'exploitation d'un service taxi est délivré par le collège des bourgmestre et échevins de la commune où l'exploitant a l'intention d'exploiter son service de taxi, à appeler ci-après ' le collège compétent ' ».

Les travaux préparatoires précisent ce qui suit : « Si le candidat-exploitant souhaite exploiter des services de taxis dans plusieurs communes, il est tenu de disposer des autorisations respectives délivrées par ces communes. Dans ce cas, le candidat-exploitant devra généralement disposer de plusieurs véhicules. En effet, l'utilité publique au bénéfice de laquelle l'autorisation a été accordée exige que le véhicule en question soit disponible » (Doc. parl., Parlement flamand, 2000-2001, n° 435/1, p. 21).

Le collège compétent ne peut délivrer qu'une seule autorisation par exploitant. L'autorisation mentionne le nombre de véhicules pour lesquels elle a été délivrée et s'il peut être fait usage ou non d'emplacements sur la voie publique (article 26, § 5, du décret du 20 avril 2001). L'autorisation pour l'exploitation d'un service de taxi comprend l'autorisation de stationnement à n'importe quel emplacement qui n'est pas situé sur la voie publique, mais dont l'exploitant dispose, ou à un quelconque emplacement sur la voie publique dans la commune octroyant l'autorisation qui est réservé aux taxis et qui est libre, à condition que l'autorisation, conformément à l'article 26, § 5, en mentionne explicitement l'utilisation (article 38, § 1er, du décret du 20 avril 2001). Lorsqu'elle délivrera les autorisations, la commune devra donc tenir compte du nombre d'emplacements sur les voies publiques dépendant de son territoire (Doc. parl., Parlement flamand, 2000-2001, n° 435/1, p. 25).

B.8. En l'espèce, le critère de rattachement peut être déterminé avec davantage de précision, comme le confirme l'arrêt n° 40/2012 du 8 mars 2012, par lequel la Cour a jugé « que le critère utilisé par les auteurs de l'ordonnance, à savoir le point de départ du service de taxi, constitue un critère de rattachement pertinent, permettant de localiser la matière réglée par cette ordonnance dans la sphère de compétence territoriale de la Région de Bruxelles-Capitale ».

Dans cet arrêt, la Cour s'est prononcée sur l'article 3, alinéa 1er, de l'ordonnance de la Région de Bruxelles-Capitale du 27 avril 1995 relative aux services de taxis et aux services de location de voitures avec chauffeur, dont les termes sont pratiquement identiques à ceux de la disposition actuellement en cause : « Nul ne peut, sans autorisation du Gouvernement, exploiter un service de taxis au moyen d'un ou de plusieurs véhicules au départ d'une voie publique ou de tout autre endroit non ouvert à la circulation publique, qui se situe sur le territoire de la Région de Bruxelles-Capitale ».

La Cour a jugé que cette disposition ne porte pas atteinte aux principes de la libre circulation des personnes, biens, services et capitaux et de la liberté de commerce et d'industrie, ni au principe de l'union économique et monétaire (article 6, § 1er, VI, alinéa 3, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles), d'autant qu'il s'agit de services d'utilité publique qu'il convient d'intégrer dans des mesures portant sur la régulation et la coordination des transports (B.8.4).

La Cour a également jugé que cette disposition ne porte pas atteinte aux droits que les intéressés tirent des articles 49 et 56 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, qui garantissent la liberté d'établissement et la libre prestation des services (B.11.2).

B.9. Il ressort de ce qui précède que le décret de la Région flamande et l'ordonnance de la Région de Bruxelles-Capitale appliquent le même critère de rattachement et qu'ils n'interdisent pas d'accorder une autorisation à des personnes qui exploitent leurs services de taxis à partir du territoire d'une autre région.

En soi, l'exigence d'une autorisation ne peut être jugée contraire aux garanties consacrées par l'article 6, § 1er, VI, alinéa 3, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles.

B.10. La question préjudicielle appelle une réponse négative.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : L'article 25 du décret de la Région flamande du 20 avril 2001 relatif à l'organisation du transport de personnes par la route ne viole pas l'article 6, § 1er, VI, alinéa 3, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles et l'article 4 de la loi spéciale du 12 janvier 1989 relative aux Institutions bruxelloises.

Ainsi rendu en langue néerlandaise et en langue française, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 24 septembre 2015.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux Le président, A. Alen

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