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Arrêt
publié le 22 juillet 2014

Extrait de l'arrêt n° 98/2014 du 30 juin 2014 Numéro du rôle : 5592 En cause : le recours en annulation des articles 4.8.14, 4.8.19, 4.8.20 et 4.8.34, § 2, du Code flamand de l'aménagement du territoire, tels qu'ils ont été remplacés ou La Cour constitutionnelle, composée des présidents A. Alen et J. Spreutels, des juges E. De Groo(...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 98/2014 du 30 juin 2014 Numéro du rôle : 5592 En cause : le recours en annulation des articles 4.8.14, 4.8.19, 4.8.20 et 4.8.34, § 2, du Code flamand de l'aménagement du territoire, tels qu'ils ont été remplacés ou insérés par l'article 5 du décret de la Région flamande du 6 juillet 2012 modifiant diverses dispositions du Code flamand de l'Aménagement du Territoire, en ce qui concerne le Conseil pour les Contestations des Autorisations, introduit par I.T. et autres.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents A. Alen et J. Spreutels, des juges E. De Groot, L. Lavrysen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke, T. Merckx-Van Goey, P. Nihoul, F. Daoût et T. Giet, et, conformément à l'article 60bis de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, du président émérite M. Bossuyt, assistée du greffier F. Meersschaut, présidée par le président émérite M. Bossuyt, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet du recours et procédure Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 22 février 2013 et parvenue au greffe le 25 février 2013, un recours en annulation des articles 4.8.14, 4.8.19, 4.8.20 et 4.8.34, § 2, du Code flamand de l'aménagement du territoire, tels qu'ils ont été remplacés ou insérés par l'article 5 du décret de la Région flamande du 6 juillet 2012 modifiant diverses dispositions du Code flamand de l'Aménagement du Territoire, en ce qui concerne le Conseil pour les Contestations des Autorisations (publié au Moniteur belge du 24 août 2012, deuxième édition), a été introduit par I.T., E.N., A.M., J.S., J.M., A.C. et P.M., tous assistés et représentés par Me P. Vande Casteele, avocat au barreau d'Anvers. (...) II. En droit (...) B.1.1. Le recours en annulation est dirigé contre l'article 5 du décret du 6 juillet 2012 « modifiant diverses dispositions du Code flamand de l'Aménagement du Territoire, en ce qui concerne le Conseil pour les Contestations des Autorisations ». Cette disposition a remplacé l'ensemble du chapitre VIII « Conseil pour les Contestations des Autorisations » du titre IV du Code flamand de l'aménagement du territoire.

B.1.2. Par cette modification, le législateur décrétal voulait : « [...] accélérer et rendre la procédure devant le Conseil plus efficace, par quelques modifications ciblées. Les modifications peuvent grosso modo être réparties en trois groupes : compétences, procédure et fonctionnement.

Concrètement, les modifications ' procédurales ' proposées concernent un règlement adéquat de la procédure de suspension, l'introduction d'une procédure de traitement simplifié pour les recours aisés à trancher et la possibilité pour le Conseil d'infliger une amende pour cause de recours manifestement illégitime.

Les modifications apportées au fonctionnement concernent notamment la composition, la création d'un fondement légal pour la désignation temporaire de conseillers de complément. [...] [...] Il est observé préalablement que l'objectif n'est pas de régler tout dans les moindres détails dans le Code flamand de l'aménagement du territoire. La réglementation figurant dans le décret sera limitée à l'essentiel. Le Gouvernement flamand reçoit chaque fois une délégation appropriée pour procéder à l'exécution de ces règles et à leur mise en oeuvre détaillée » (Doc. parl., Parlement flamand, 2011-2012, n° 1509/1, p. 3).

Quant au premier moyen, relatif au « traitement simplifié » B.2. Le premier moyen est pris de la violation par l'article 4.8.14 du Code flamand de l'aménagement du territoire, tel qu'il a été remplacé par la disposition attaquée, des articles 10, 11 et 23 de la Constitution, combinés ou non avec les principes généraux de bonne administration de la justice, plus précisément le droit à un recours effectif, le droit d'accès à un juge, le droit à un procès public et le droit de défense, avec les articles 6 et 13 de la Convention européenne des droits de l'homme et avec les articles 144, 145, 148, 149, 160 et 161 de la Constitution.

Selon les parties requérantes, la violation découlerait (1) de l'absence d'une audience publique, (2) de l'absence de débat contradictoire, (3) de l'absence d'une obligation de motivation, (4) de l'absence d'un prononcé public, (5) du constat que le président de chambre propose le « traitement simplifié » et décide de celui-ci, (6) du constat que seul un délai d'ordre s'applique à la proposition du président de chambre tandis qu'un court délai de déchéance de 15 jours est imposé à la partie requérante et (7) de l'éventuelle absence d'un dossier administratif. A l'appui de leur moyen, les parties requérantes comparent la procédure devant le Conseil pour les contestations des autorisations avec la procédure devant le Conseil d'Etat et avec la procédure devant la Cour environnementale de la Région flamande.

B.3.1. L'article 4.8.14 du Code flamand de l'aménagement du territoire, tel qu'il a été remplacé par l'article 5 du décret du 6 juillet 2012, dispose : « § 1er. Après l'enregistrement d'une requête, le président du Conseil ou le conseiller désigné par lui peut examiner d'office si le recours est inutile, manifestement irrecevable ou que le Conseil est manifestement incompétent.

Le greffier transmet les constatations du Conseil au demandeur. § 2. Le demandeur dispose d'une échéance de quinze jours qui prend cours le jour suivant la notification, visée au paragraphe 1er, alinéa deux, pour introduire une note de justification. Cette note de justification est limitée aux constatations citées au paragraphe 1er. § 3. Le Conseil peut décider que l'affaire est prise en considération sans procédure ultérieure.

Le Conseil se prononce immédiatement sur l'irrecevabilité manifeste du recours, sur son incompétence manifeste ou sur l'inutilité du recours.

Lorsque le Conseil ne décide pas que le recours est manifestement irrecevable ou inutile ou qu'il est manifestement incompétent, la procédure est poursuivie, conformément aux articles suivants ».

Un recours est considéré comme inutile lorsqu'il perd son objet durant la procédure, entre autres parce que l'arrêté attaqué a été annulé, rapporté, abrogé ou remplacé (Doc. parl., Parlement flamand, 2011-2012, n° 1509/1, p. 13).

B.3.2. La disposition instaure une procédure de traitement simplifié des recours qui sont inutiles ou manifestement irrecevables et des recours pour lesquels le Conseil est manifestement incompétent.

B.3.3. Avant l'instauration de cette procédure simplifiée, tous les recours, sans exception, devaient suivre la procédure ordinaire, même s'il s'avérait d'emblée, à la simple lecture de la requête, que le recours était irrecevable ou qu'il ne pouvait raisonnablement exister aucun doute quant à l'incompétence du Conseil.

L'instauration de la procédure simplifiée a été justifiée comme suit : « La création d'une procédure adaptée, permettant au Conseil de trancher rapidement de telles affaires simples, sans les diverses notes qui doivent être échangées au cours de la procédure ordinaire, entraînera une augmentation de l'efficacité. Il va de soi qu'il faut que le requérant bénéficie toutefois du contradictoire » (Doc. parl., Parlement flamand, 2011-2012, n° 1509/1, p. 6). « Cette procédure est basée sur le régime applicable devant le Conseil d'Etat.

Il a déjà été jugé que le régime antérieur appliqué au Conseil d'Etat ne portait pas atteinte à l'égalité des armes, aux droits de la défense et au principe du débat contradictoire. Cette jurisprudence peut être étendue à la procédure plus récente devant le Conseil d'Etat et à celle devant le Conseil pour les contestations des autorisations » (ibid., p. 13).

B.4. La différence de traitement entre certaines catégories de personnes qui découle de l'application de règles procédurales différentes, dans des circonstances différentes, n'est pas discriminatoire en soi. Il ne serait question de discrimination que si la différence de traitement qui découle de l'application de ces règles de procédure entraînait une limitation disproportionnée des droits des personnes concernées.

B.5. Le droit à un recours effectif, le droit d'accès au juge et le droit à un procès public font partie du droit à un procès équitable et, par conséquent, des droits de défense. Ces droits peuvent être subordonnés à des conditions, qui ne peuvent cependant aboutir à restreindre ces droits de manière telle qu'ils s'en trouvent atteints dans leur substance même.

B.6.1. Il découle de l'article 4.8.11, § 1er, alinéa 1er, 1° à 6°, du Code flamand de l'aménagement du territoire, qui énumère les différentes personnes intéressées qui peuvent introduire un recours devant le Conseil pour les contestations des autorisations, que toute personne physique ou morale à qui la décision d'autorisation, de validation ou d'enregistrement est susceptible de causer, directement ou indirectement, des désagréments ou des inconvénients peut exercer un recours.

Compte tenu de ce large accès au Conseil pour les contestations des autorisations, le législateur décrétal a voulu éviter que ce Conseil se trouve dans l'impossibilité de traiter dans un délai raisonnable les recours introduits, parce qu'il doit respecter, pour le traitement de chaque recours, les règles formulées aux articles 4.8.15 à 4.8.32 du Code flamand de l'aménagement du territoire et dans l'arrêté du Gouvernement flamand du 13 juillet 2012 relatif à la procédure devant le Conseil pour les contestations d'autorisations.

Il ressort des travaux préparatoires du décret du 6 juillet 2012 que le législateur décrétal a entendu garantir le respect des droits de défense en prévoyant la notification des constatations du Conseil pour les contestations des autorisations à la partie requérante et en introduisant la possibilité pour la partie requérante de déposer une note de justification (Doc. parl., Parlement flamand, 2011-2012, n° 1509/1, p. 12). Ces constatations du Conseil pour les contestations des autorisations n'ont d'autre objet que de notifier à la partie requérante l'existence d'un problème d'irrecevabilité manifeste, d'incompétence manifeste ou d'inutilité du recours introduit.

Le principe général d'une bonne administration de la justice implique en principe le droit à une audience publique, mais ce droit n'est pas absolu, ainsi qu'il ressort de la jurisprudence relative à l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, dont il est déduit un même droit : « 41. Cela étant, l'obligation de tenir une audience publique n'est pas absolue (Hakansson et Sturesson c. Suède, 21 février 1990, § 66, série A n° 171-A). L'article 6 n'exige pas nécessairement la tenue d'une audience dans toutes les procédures. Tel est notamment le cas pour les affaires ne soulevant pas de question de crédibilité ou ne suscitant pas de controverse sur les faits qui auraient requis une audience, et pour lesquelles les tribunaux peuvent se prononcer de manière équitable et raisonnable sur la base des conclusions présentées par les parties et d'autres pièces (voir, par exemple, Döry c. Suède, n° 28394/95, § 37, 12 novembre 2002;Pursiheimo c. Finlande (déc.), n° 57795/00, 25 novembre 2003; à comparer avec Lundevall c.

Suède, n° 38629/97, § 39, 12 novembre 2002; Salomonsson c. Suède, n° 38978/97, § 39, 12 novembre 2002; voir aussi l'arrêt Göç c. Turquie [GC], n° 36590/97, § 51, CEDH 2002-V, où la Cour a jugé que le requérant aurait dû avoir la possibilité d'expliquer oralement les souffrances qu'il avait subies car celles-ci étaient pertinentes pour la détermination du montant de l'indemnité à accorder). 42. Par ailleurs, la Cour reconnaît que les autorités nationales peuvent tenir compte d'impératifs d'efficacité et d'économie, jugeant par exemple que l'organisation systématique de débats peut constituer un obstacle à la particulière diligence requise en matière de sécurité sociale et, à la limite, empêcher le respect du délai raisonnable visé à l'article 6, § 1 (arrêt Schuler-Zgraggen c.Suisse, 24 juin 1993, § 58, série A n° 263, et les affaires auxquelles il se réfère). Si la Cour a d'abord souligné, dans plusieurs affaires, que dans une procédure se déroulant devant un tribunal statuant en premier et dernier ressort, une audience doit avoir lieu à moins que des circonstances exceptionnelles justifient de s'en dispenser (voir, entre autres, les arrêts Hakansson et Sturesson, précité, § 64, Fredin c. Suède (n° 2), 23 février 1994, § § 21-22, série A n° 283-A, et Allan Jacobsson c.Suède (n° 2), 19 février 1998, § 46, Recueil 1998-I), elle a par la suite précisé que l'existence de pareilles circonstances dépend essentiellement de la nature des questions dont les tribunaux internes se trouvent saisis, et non de la fréquence des litiges où celles-ci se posent. Cela ne signifie pas que le rejet d'une demande tendant à la tenue d'une audience ne puisse se justifier qu'en de rares occasions (Miller c. Suède, n° 55853/00, § 29, 8 février 2005). Il convient ici, comme en toute autre matière, d'avoir égard avant tout au principe d'équité consacré par l'article 6, dont l'importance est fondamentale (voir, mutatis mutandis, Pélissier et Sassi c. France [GC], n° 25444/94, § 52, CEDH 1999-II, et Sejdovic c.

Italie [GC], n° 56581/00, § 90, CEDH 2006-II) » (CEDH, grande chambre, 23 novembre 2006, Jussila c. Finlande, §§ 41-42).

La possibilité de prendre en compte des motifs de simplification de la procédure est également admise en matière d'aménagement du territoire (CEDH, 18 juillet 2013, Schädler-Eberle c. Autriche, § § 97-109).

L'article 4.8.14 du Code flamand de l'aménagement du territoire prévoit un traitement simplifié du recours, qui porte uniquement sur l'irrecevabilité manifeste ou l'inutilité du recours et sur l'incompétence manifeste du Conseil pour les contestations des autorisations. Comme il a déjà été mentionné, un recours est considéré comme inutile lorsqu'il perd son objet durant la procédure, entre autres parce que l'arrêté attaqué a été annulé, rapporté, abrogé ou remplacé. Il découle de la nature même des questions de droit soulevées dans le cadre du traitement simplifié qu'il peut y être répondu simplement sur la base des pièces introduites. L'obligation d'organiser une audience publique porterait atteinte à l'objectif d'efficacité de la procédure, étant donné que le traitement accéléré d'affaires simples, qui est le but poursuivi, serait à nouveau compromis.

L'absence d'audience publique ne porte dès lors pas une atteinte disproportionnée aux droits de la partie requérante devant le Conseil pour les contestations des autorisations. La possibilité dont dispose la partie requérante d'exposer son point de vue, dans une note justificative, sur le problème soulevé garantit de manière suffisante le caractère contradictoire de la procédure.

B.6.2. Etant donné que l'obligation de motivation s'applique tant aux juridictions judiciaires qu'aux juridictions administratives, la différence de traitement invoquée par les parties requérantes en la matière est inexistante.

B.6.3. Quant à la publicité du prononcé, l'article 4.8.28, § 3, du Code flamand de l'aménagement du territoire dispose que tous les prononcés du Conseil pour les contestations des autorisations sont publics, sans faire à cet égard de distinction, selon que le prononcé fait suite à une procédure de traitement simplifié ou à une procédure ordinaire.

Par conséquent, la différence de traitement invoquée par les parties requérantes n'existe pas.

Il résulte de ce qui précède que le moyen, en ses quatre premières branches, n'est pas fondé.

B.6.4.1. La cinquième branche du premier moyen repose sur le constat que la décision sur l'irrecevabilité manifeste, l'incompétence manifeste ou l'inutilité serait prise par le président, ou le conseiller que celui-ci aura désigné, qui aura également soulevé cette irrecevabilité manifeste, incompétence manifeste ou inutilité.

B.6.4.2. Une bonne administration de la justice garantit au justiciable que sa cause soit entendue par un juge indépendant et impartial. Ceci implique non seulement que le juge doit être impartial, mais aussi qu'il y ait suffisamment de garanties pour exclure tout doute légitime quant à l'impartialité de ce dernier. Une violation du principe d'impartialité ne requiert pas que la preuve de la partialité soit apportée; une apparence de partialité peut suffire.

A cet égard, selon la Cour européenne des droits de l'homme, l'optique du justiciable « entre en ligne de compte mais ne joue pas un rôle décisif. L'élément déterminant consiste à savoir si les appréhensions de l'intéressé peuvent passer pour objectivement justifiées » (CEDH, 21 décembre 2000, Wettstein c. Suisse, § 44).

Pour apprécier si le principe d'impartialité a été suffisamment pris en compte dans le cadre du traitement simplifié, il y a lieu d'avoir égard à la nature et aux effets du constat d'un traitement simplifié et à l'ensemble de la procédure. Il convient de tenir compte notamment de la composition et de l'organisation du Conseil pour les contestations des autorisations.

B.6.4.3. Le principe d'impartialité est violé lorsqu'un membre du Conseil pour les contestations des autorisations doit statuer dans une affaire dont il a déjà connu auparavant dans une autre qualité.

Cependant, toute intervention préalable du juge n'est pas de nature à éveiller, chez le justiciable, une présomption justifiée de partialité. Pour que le principe d'impartialité soit méconnu, cette intervention du juge doit être de nature à créer l'impression qu'il a préjugé du fond de l'affaire.

B.6.4.4. L'article 4.8.14, § 1er, du Code flamand de l'aménagement du territoire dispose que c'est le président, ou un conseiller désigné par lui, qui examine d'office si le recours est inutile, est manifestement irrecevable ou si le Conseil est manifestement incompétent. Le greffier transmet les constatations à la partie requérante. Après réception de la note de justification de la partie requérante, le Conseil peut ensuite décider soit que l'affaire doit être délibérée sans autre procédure, soit que le recours introduit est recevable ou n'est pas inutile ou relève de la compétence du Conseil, auquel cas la procédure ordinaire est poursuivie.

L'examen, par le président ou le conseiller désigné, en vue de l'application du traitement simplifié, peut être comparé à une exception ou un moyen soulevé d'office, sur lequel le juge statue après que la partie requérante a pu exposer son point de vue à ce sujet. Le juge qui soulève le problème de recevabilité, d'inutilité ou d'incompétence doit veiller à ne pas formuler le constat de manière péremptoire, mais avec la circonspection propre aux exceptions d'office. L'obligation de remplacer le président ou le conseiller qui a procédé à l'examen d'office par un autre membre du Conseil des contestations des autorisations pour la suite de procédure porterait atteinte à l'objectif d'efficacité de la procédure, étant donné que le traitement accéléré d'affaires simples, qui est le but poursuivi, serait à nouveau compromis.

Le premier moyen, en sa cinquième branche, n'est pas fondé.

B.6.5. La sixième branche du premier moyen concerne le délai indéterminé qui vaut pour l'examen d'office du recours et le délai de déchéance qui s'applique à la partie requérante pour introduire une note de justification.

La procédure de traitement simplifié ne peut s'appliquer que lorsque il s'avère « sur la base d'une simple lecture de la requête ou des pièces jointes » que le recours est inutile ou manifestement irrecevable ou ne relève manifestement pas de la compétence du Conseil (voy. le rapport au Gouvernement flamand accompagnant l'arrêté du Gouvernement flamand du 13 juillet 2012 relatif à la procédure devant le Conseil pour les contestations des autorisations) et, de surcroît, la note de justification doit se borner aux constatations du Conseil, de sorte qu'un délai de quinze jours ne saurait être qualifié de déraisonnable pour réfuter les constatations faites après une simple lecture de la requête.

En outre, le Conseil pour les contestations des autorisations admet, à l'instar de la jurisprudence du Conseil d'Etat, que ce délai de déchéance puisse être dépassé, en application du principe général de droit selon lequel la sévérité du décret peut être atténuée en cas de force majeure ou d'erreur invincible.

Le premier moyen, en sa sixième branche, n'est pas fondé.

B.6.6. Enfin, quant à l'éventuelle absence du dossier administratif, il suffit de renvoyer à ce qui a été dit en B.6.5 concernant le champ d'application de la procédure de traitement simplifié. Ce n'est que dans la mesure où une simple lecture de la requête ou des pièces jointes fait apparaître que le recours introduit est inutile ou manifestement irrecevable ou ne relève manifestement pas de la compétence du Conseil pour les contestations des autorisations qu'il peut être fait application de la procédure de traitement simplifié. Il résulte de la nature de ce constat que la décision de justice peut être prise sans consulter le dossier administratif.

Le premier moyen, en sa septième branche, n'est pas fondé.

Quant au deuxième moyen, relatif à la demande de suspension B.7. Le deuxième moyen est pris de la violation, par les articles 4.8.19 et 4.8.20 du Code flamand de l'aménagement du territoire, tels qu'ils ont été remplacés par la disposition attaquée, des articles 10, 11 et 23 de la Constitution, combinés ou non avec les principes généraux de bonne administration de la justice, plus précisément le droit d'accès à un juge, le droit à un recours effectif, le droit de défense et le droit d'égalité des armes, avec les articles 6 et 13 de la Convention européenne des droits de l'homme et avec les articles 144, 145, 160 et 161 de la Constitution, en ce que le délai de déchéance de quinze jours dans lequel les intéressés, en concertation avec leur avocat, doivent déposer une demande de continuation, comparé au délai de trente jours qui s'applique dans la procédure devant le Conseil d'Etat, serait trop court pour adopter un point de vue motivé.

B.8.1. Les articles 4.8.19 et 4.8.20 du Code flamand de l'aménagement du territoire, tels qu'ils ont été remplacés par l'article 5 du décret du 6 juillet 2012, disposent : « Art. 4.8.19. Lorsque le conseil a suspendu la décision contestée, le défendeur ou la partie intervenante doit introduire une demande de continuation de la procédure dans une échéance de quinze jours.

Lorsqu'aucune demande de continuation n'est introduite, le conseil peut annuler la décision contestée, conformément à une procédure accélérée fixée par le Gouvernement flamand.

Lorsque le Conseil n'a pas suspendu la décision contestée, le demandeur doit introduire une demande de [continuation] dans une échéance de quinze jours. Lorsqu'il n'introduit pas de demande de continuation, il s'applique à son égard une présomption irréfragable de renonciation au recours.

Le délai de quinze jours prend cours le jour suivant la notification de l'arrêt se prononçant sur la suspension.

Art. 4.8.20. Le Gouvernement flamand fixe les modalités concernant le traitement de la demande de suspension ».

B.8.2. Les articles précités font partie de la sous-section 4 (« Suspension ») de la section 3 (« Procédure ») dudit Code. L'article 4.8.19 du Code flamand de l'aménagement du territoire traite de la procédure accélérée qui suit la décision du Conseil pour les contestations des autorisations sur la suspension demandée et l'article 4.8.20 du même Code traite de la procédure préalable à la décision relative à la suspension.

B.8.3. Selon les travaux préparatoires, « la pratique des deux années de travail précédentes a montré que la procédure [était] réglée de façon trop sommaire et insuffisante dans le Code flamand de l'aménagement du territoire » pour « garantir aux parties au procès une procédure efficace et de qualité, en ce compris le traitement du dossier dans un délai raisonnable ». Un exemple patent de lacune à cet égard était, selon le législateur décrétal, les « règles très sommaires de la demande de suspension » (Doc. parl., Parlement flamand, 2011-2012, n° 1509/1, p. 2). La mise en oeuvre de la procédure de suspension a été exposée comme suit : « En outre, suivant l'exemple de la procédure devant le Conseil d'Etat, la procédure d'annulation ne sera poursuivie que si la partie qui aura succombé dans la procédure de suspension dépose une demande de continuation. Si le Conseil a ordonné la suspension, le défendeur ou la partie intervenante devront demander la continuation pour ne pas voir la décision relative au permis attaqué annulée selon une procédure accélérée. Si la demande de suspension est rejetée, c'est alors le requérant qui doit demander la continuation; à défaut, il sera présumé de manière irréfragable avoir renoncé à son recours.

C'est le ' couperet ' principal dans la procédure qu'instaure la présente proposition » (ibid., p. 6). « Cette demande de continuation constitue de cette manière un filtre vers la procédure d'annulation. Les parties doivent ainsi prendre un rôle plus actif dans la procédure » (ibid., p. 15).

L'utilisation du terme « peut » dans l'article 4.8.19 du Code flamand de l'aménagement du territoire n'implique pas que le Conseil pour les contestations des autorisations dispose d'un pouvoir d'appréciation : « Ce pouvoir d'appréciation est limité aux cas de force majeure ou d'erreur invincible. C'est pourquoi le verbe ' pouvoir ' a été utilisé. Pour le surplus, il ne dispose d'aucune marge de manoeuvre supplémentaire » (ibid., p. 16).

B.8.4. Dans la proposition de décret originale, il était prévu un délai de déchéance de trente jours, tel qu'il s'applique également devant le Conseil d'Etat. Par voie d'amendement, le délai figurant à l'article 4.8.19 du Code flamand de l'aménagement du territoire a été modifié. Il a été précisé que l'abrègement du délai à quinze jours ne violerait pas les droits des parties au procès. « Ce délai sert uniquement à transmettre au Conseil une demande de continuation formelle sans qu'il faille transmettre au Conseil des pièces quant au fond de l'affaire.

Dans l'hypothèse où il appartient à la partie défenderesse ou à la partie intervenante de déposer la demande de continuation, il s'agit d'une formalité très simple à remplir.

Dans l'hypothèse où c'est la partie requérante qui doit déposer la demande de continuation, le délai de dépôt d'une note en réponse rédigée par la partie défenderesse et le dépôt d'un exposé écrit par la partie intervenante ne débutera, selon le règlement de la procédure, qu'après la signification à toutes les parties en cause de la demande de continuation de la procédure par la partie requérante » (Doc. parl., Parlement flamand, 2011-2012, n° 1509/3, p. 10).

B.9. Le deuxième moyen ne concerne que le délai de déchéance de quinze jours, que les parties requérantes jugent trop court et qui, de surcroît, ne serait pas suspendu durant les vacances judiciaires, et non l'article 4.8.20 du Code flamand de l'aménagement du territoire, qui délègue au Gouvernement flamand le pouvoir de fixer les modalités du traitement de la demande de suspension.

Le deuxième moyen peut uniquement être réputé concerner l'article 4.8.19 du Code flamand de l'aménagement du territoire, de sorte qu'il est irrecevable en ce qui concerne l'article 4.8.20 du même Code.

B.10.1. Il ressort des travaux préparatoires qu'en instaurant une « procédure-couperet » supplémentaire, dont le respect peut aisément être vérifié par le Conseil pour les contestations des autorisations, le législateur décrétal poursuit un objectif légitime, celui de limiter, quant au fond, l'examen du Conseil pour les contestations des autorisations aux seules actions qui, à l'issue d'un premier examen au cours de la procédure de suspension, sont susceptibles d'annulation (article 4.8.3 du Code flamand de l'aménagement du territoire).

La Cour doit toutefois veiller à ce que la mesure attaquée ne porte pas atteinte de manière disproportionnée au droit d'accès à un juge, eu égard notamment aux effets que la violation de ce droit peut emporter pour la situation des parties au procès.

B.10.2. Un délai de déchéance de quinze jours, qui débute le jour suivant le jour de la signification de l'arrêt de suspension, oblige les parties concernées à adopter une attitude très active au cours de la procédure devant le Conseil pour les contestations des autorisations. Même si ces parties sont seulement invitées à déposer une demande de continuation formelle, sans prise de position quant au fond, un délai de forclusion aussi court pourrait être de nature à porter atteinte aux droits de la défense s'il ne leur permet pas de se concerter de manière satisfaisante avec leur avocat; il ne constitue en tout cas pas une mesure pertinente au regard de l'objectif poursuivi par le législateur décrétal, étant donné que la brièveté du délai est de nature à amener les parties à introduire dans tous les cas une demande de continuation, privant ainsi la « procédure-couperet » de son utilité.

B.11. Le deuxième moyen est fondé.

Quant au troisième moyen, relatif à l'indépendance des membres du Conseil pour les contestations des autorisations B.12. Le troisième moyen est pris de la violation, par l'article 4.8.34, § 2, du Code flamand de l'aménagement du territoire, tel qu'il a été inséré par la disposition attaquée, des articles 10 et 11 de la Constitution, combinés ou non avec ses articles 144, 145, 151, 152, 154, 160 et 161, avec les articles 6 et 13 de la Convention européenne des droits de l'homme et avec le principe général de droit de l'indépendance du juge et des juridictions, en ce qu'il délègue au Gouvernement flamand le pouvoir de fixer les rémunérations, allocations et indemnités des conseillers.

B.13.1. L'article 4.8.34, § 2, du Code flamand de l'aménagement du territoire, inséré par l'article 5 du décret du 6 juillet 2012, dispose : « Les conseillers reçoivent la rémunération, les allocations et les indemnités que fixe le Gouvernement flamand ».

B.13.2. Il ressort des travaux préparatoires que le nouvel article 4.8.34, § 2, du Code flamand de l'aménagement du territoire reproduit l'ancien article 4.8.5, § 2 (Doc. parl., Parlement flamand, 2011-2012, n° 1509/1, p.21).

En outre, le rapport observe que « la question d'une réglementation décrétale des rémunérations n'est pas examinée. Il semble recommandé, aux auteurs de la proposition, de ne pas inscrire ce point dans la présente proposition de décret mais de l'examiner quant au fond lors de l'élaboration de la juridiction administrative flamande » (Doc. parl., Parlement flamand, 2011-2012, n° 1509/4, p. 13).

B.13.3. Il apparaît des travaux préparatoires du décret du 27 mars 2009 adaptant et complétant la politique d'aménagement du territoire, des autorisations et du maintien que « le Gouvernement flamand [règle lui-même] le statut pécuniaire des conseillers mais s'inspirera à cet égard de fonctions ayant des responsabilités et une importance analogues au sein de l'autorité flamande. On pense à un régime au sein de l'échelle A311, laquelle s'applique aux secrétaires généraux, aux administrateurs généraux, aux administrateurs-délégués ou bien à certains responsables du personnel du secrétariat d'un conseil consultatif stratégique » (Doc. parl., Parlement flamand, 2008-2009, n° 2011/1, p.216).

B.14.1. Le seul fait que le Conseil pour les contestations des autorisations ne fasse pas partie du pouvoir judiciaire ne permet pas de conclure qu'il ne doit pas satisfaire aux exigences d'indépendance et d'impartialité, ainsi qu'il a été rappelé en B.6.4.2. Le principe général de droit selon lequel le juge doit être indépendant et impartial s'applique en effet à toutes les juridictions.

B.14.2. L'article 146 de la Constitution dispose que « nulle juridiction contentieuse ne peut être établi[e] qu'en vertu d'une loi ». L'article 161 de la Constitution dispose qu'« Aucune juridiction administrative ne peut être établie qu'en vertu d'une loi ».

Il découle de ces dispositions constitutionnelles, ainsi que de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH, 28 novembre 2002, Lavents c. Lettonie, § 114) que le législateur compétent doit régler lui-même les principes essentiels. En font partie, dans le cadre de la création d'une juridiction, en vue de son indépendance, les traitements de ses membres, quoique, en la matière, la référence à une échelle ou à un barème peut suffire.

En confiant l'intégralité du système de rémunération au Gouvernement flamand, l'article attaqué viole les articles 10 et 11 de la Constitution, combinés avec les dispositions constitutionnelles précitées et avec le principe général de droit de l'indépendance du juge.

B.15. Le troisième moyen est fondé.

B.16.1. En cas d'annulation de la disposition attaquée, le Gouvernement flamand demande d'en maintenir les effets.

B.16.2. Afin d'assurer la continuité et la sécurité juridique, les effets de l'article 4.8.34, § 2, du Code de l'aménagement du territoire sont maintenus jusqu'à l'entrée en vigueur du décret de la Région flamande du 4 avril 2014 « relatif à l'organisation et à la procédure de certaines juridictions administratives flamandes », et au plus tard jusqu'au 31 décembre 2014.

Par ces motifs, la Cour - annule, dans l'article 4.8.19, alinéas 1er, 2 et 3, du Code flamand de l'aménagement du territoire, remplacé par l'article 5 du décret de la Région flamande du 6 juillet 2012 « modifiant diverses dispositions du Code flamand de l'Aménagement du Territoire, en ce qui concerne le Conseil pour les contestations des autorisations », les mots « quinze jours »; - annule l'article 4.8.34, § 2, du Code flamand de l'aménagement du territoire, inséré par l'article 5, précité, du décret du 6 juillet 2012; - maintient les effets de l'article 4.8.34, § 2, annulé, du Code flamand de l'aménagement du territoire jusqu'à l'entrée en vigueur du décret de la Région flamande du 4 avril 2014 « relatif à l'organisation et à la procédure de certaines juridictions administratives flamandes », et au plus tard jusqu'au 31 décembre 2014; - rejette le recours pour le surplus.

Ainsi rendu en langue néerlandaise, en langue française et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 30 juin 2014.

Le greffier, F. Meersschaut Le président, M. Bossuyt

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