publié le 24 mai 2013
Extrait de l'arrêt n° 50/2013 du 28 mars 2013 Numéro du rôle : 5421 En cause : la question préjudicielle relative à l'article 62, alinéa 2, du Code d'instruction criminelle, tel qu'il a été inséré par l'article 3 de la loi du 13 août 2011, po La Cour constitutionnelle, composée des présidents R. Henneuse et M. Bossuyt, et des juges E. De(...)
COUR CONSTITUTIONNELLE
Extrait de l'arrêt n° 50/2013 du 28 mars 2013 Numéro du rôle : 5421 En cause : la question préjudicielle relative à l'article 62, alinéa 2, du Code d'instruction criminelle, tel qu'il a été inséré par l'article 3 de la
loi du 13 août 2011Documents pertinents retrouvés
type
loi
prom.
13/08/2011
pub.
05/09/2011
numac
2011009606
source
service public federal justice
Loi modifiant le Code d'instruction criminelle et la loi du 20 juillet 1990 relative à la détention préventive afin de conférer des droits, dont celui de consulter un avocat et d'être assistée par lui, à toute personne auditionnée et à toute personne privée de liberté
fermer, posée par le Tribunal correctionnel de Liège.
La Cour constitutionnelle, composée des présidents R. Henneuse et M. Bossuyt, et des juges E. De Groot, L. Lavrysen, J.-P. Moerman, P. Nihoul et F. Daoût, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président R. Henneuse, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet de la question préjudicielle et procédure Par jugement du 22 mai 2012 en cause du ministère public contre L.M., dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 15 juin 2012, le Tribunal correctionnel de Liège a posé la question préjudicielle suivante : « L'article 62, alinéa 1er [lire : alinéa 2], du Code d'instruction criminelle, interprété comme s'appliquant immédiatement au litige en cours et comme n'étant pas susceptible de sanction en cas de non-respect de son contenu, viole-t-il les articles 10, 11, 12, alinéa 2, et 13 de la Constitution, combinés avec les articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme et l'article 15 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ? ». (...) III. En droit (...) B.1. La question préjudicielle porte sur l'article 62, alinéa 2, du Code d'instruction criminelle, inséré par l'article 3 de la loi du 13 août 2011Documents pertinents retrouvés type loi prom. 13/08/2011 pub. 05/09/2011 numac 2011009606 source service public federal justice Loi modifiant le Code d'instruction criminelle et la loi du 20 juillet 1990 relative à la détention préventive afin de conférer des droits, dont celui de consulter un avocat et d'être assistée par lui, à toute personne auditionnée et à toute personne privée de liberté fermer « modifiant le Code d'instruction criminelle et la loi du 20 juillet 1990 relative à la détention préventive, afin de conférer des droits, dont celui de consulter un avocat et d'être assistée par lui, à toute personne auditionnée et à toute personne privée de liberté ».
L'article 62 du Code d'instruction criminelle (ci-après : C.I.Cr.) dispose : « Lorsque le juge d'instruction se transportera sur les lieux, il sera toujours accompagné du procureur du Roi et du greffier du tribunal.
Lorsque la descente sur les lieux est organisée en vue de la reconstitution des faits, le juge d'instruction se fait également accompagner par le suspect, la partie civile et leurs avocats. Sans préjudice des droits de la défense, l'avocat est tenu de garder secrètes les informations dont il acquiert la connaissance en assistant à la descente sur les lieux organisée en vue de la reconstitution des faits. Celui qui viole ce secret est puni des peines prévues à l'article 458 du Code pénal ».
B.2.1. Le juge a quo invite la Cour à examiner la compatibilité de cette disposition avec les articles 10, 11, 12, alinéa 2, et 13 de la Constitution, lus en combinaison avec les articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme et avec l'article 15 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, en ce que le non-respect du droit à l'assistance d'un avocat lors d'une descente sur les lieux en vue de la reconstitution des faits ne serait pas susceptible de faire l'objet d'une sanction, alors que le non-respect du droit à l'assistance d'un avocat préalablement aux auditions ou lors de celles-ci, prévu par l'article 47bis, §§ 2, 3 et 5, du C.I.Cr., est sanctionné par le paragraphe 6 de cette disposition.
B.2.2. L'article 47bis, § 6, du C.I.Cr., tel qu'il avait été inséré par l'article 2, 2°, de la loi du 13 août 2011Documents pertinents retrouvés type loi prom. 13/08/2011 pub. 05/09/2011 numac 2011009606 source service public federal justice Loi modifiant le Code d'instruction criminelle et la loi du 20 juillet 1990 relative à la détention préventive afin de conférer des droits, dont celui de consulter un avocat et d'être assistée par lui, à toute personne auditionnée et à toute personne privée de liberté fermer, disposait : « Aucune condamnation ne peut être prononcée contre une personne sur le seul fondement de déclarations qu'elle a faites en violation des §§ 2, 3 et 5 à l'exclusion du § 4, en ce qui concerne la concertation confidentielle préalable ou l'assistance d'un avocat au cours de l'audition ».
Par l'arrêt n° 7/2013 du 14 février 2013, la Cour a annulé dans cette disposition le mot « seul ».
B.2.3. La sanction ainsi établie vise : - la violation du droit du suspect non arrêté à une concertation confidentielle avec un avocat avant la première audition (article 47bis, § 2); - la violation du droit du suspect privé de liberté à une concertation confidentielle avec un avocat avant la première audition et de son droit d'être assisté par un avocat lors des auditions jusqu'à la délivrance éventuelle d'un mandat d'arrêt par le juge d'instruction (article 47bis, § 3); - la violation du droit du suspect privé de liberté, qui fait l'objet d'une décision de prolongation de la privation de liberté en application de l'article 15bis de la loi relative à la détention préventive, à une concertation confidentielle préalable avec un avocat et de son droit d'être assisté par un avocat lors des auditions durant la nouvelle période de vingt-quatre heures de privation de liberté (article 47bis, § 3); - la violation du droit de la personne qui n'était pas considérée initialement comme un suspect et qui acquiert cette qualité en cours d'audition de bénéficier d'une concertation confidentielle préalable avec un avocat et, si elle est privée de liberté, de bénéficier de l'assistance d'un avocat au cours de l'audition (article 47bis, § 5).
En revanche, le non-respect du droit à l'assistance d'un avocat lors de la reconstitution des faits, garanti par la disposition en cause, n'est explicitement sanctionné par aucune disposition spécifique.
B.3. Par son arrêt n° 7/2013 précité, la Cour a examiné plusieurs moyens dénonçant l'absence de toute sanction relative à la violation du droit pour le suspect d'être assisté par son avocat lors d'une descente sur les lieux en vue d'une reconstitution des faits. Les requérants estimaient que cette lacune violait notamment les dispositions citées par la question préjudicielle.
La Cour a rejeté ces moyens pour les motifs suivants : « L'absence de sanction, dans la loi attaquée, de la violation du droit du suspect d'être assisté de son avocat lors d'une reconstitution des faits ne porte pas atteinte au fait qu'il revient au juge du fond d'examiner la régularité des preuves sur lesquelles est fondée l'action publique et de garantir le droit du prévenu au procès équitable. Il lui appartient dans ce cadre, s'il constate que la prise en considération des éléments de preuve recueillis lors d'une reconstitution des faits menée en violation du droit du suspect à être assisté par son avocat porte atteinte au droit du prévenu à un procès équitable, de ne pas les retenir pour fonder une éventuelle condamnation ».
B.4. Sans qu'il soit nécessaire d'examiner les exceptions d'irrecevabilité soulevées par le Conseil des ministres et par le procureur du Roi près le Tribunal de première instance de Liège, il y a lieu de répondre pour les mêmes motifs par la négative à la question préjudicielle.
Par ces motifs, la Cour dit pour droit : L'article 62, alinéa 2, du Code d'instruction criminelle ne viole pas les articles 10, 11, 12, alinéa 2, et 13 de la Constitution, lus en combinaison avec les articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme et avec l'article 15 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
Ainsi prononcé en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, à l'audience publique du 28 mars 2013.
Le greffier, P.-Y. Dutilleux Le président, R. Henneuse