publié le 30 novembre 2004
Extrait de l'arrêt n° 182/2004 du 16 novembre 2004 Numéro du rôle : 2775 En cause : le recours en annulation des articles 28 à 31 de la loi du 7 février 2003 portant diverses dispositions en matière de sécurité routière, introduit par V. C La Cour d'arbitrage, composée des présidents M. Melchior et A. Arts, et des juges P. Martens, R.(...)
Extrait de l'arrêt n° 182/2004 du 16 novembre 2004 Numéro du rôle : 2775 En cause : le recours en annulation des articles 28 à 31 de la loi du 7 février 2003Documents pertinents retrouvés type loi prom. 07/02/2003 pub. 25/02/2003 numac 2003014044 source service public federal mobilite et transports Loi portant diverses dispositions en matière de sécurité routière fermer portant diverses dispositions en matière de sécurité routière, introduit par V. Castelli.
La Cour d'arbitrage, composée des présidents M. Melchior et A. Arts, et des juges P. Martens, R. Henneuse, M. Bossuyt, E. De Groot, L. Lavrysen, A. Alen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke et J. Spreutels, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président M. Melchior, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet du recours et procédure Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 23 août 2003 et parvenue au greffe le 25 août 2003, V. Castelli, demeurant à 4432 Alleur, rue Lambert Dewonck 146, a introduit un recours en annulation des articles 28 à 31 de la loi du 7 février 2003Documents pertinents retrouvés type loi prom. 07/02/2003 pub. 25/02/2003 numac 2003014044 source service public federal mobilite et transports Loi portant diverses dispositions en matière de sécurité routière fermer portant diverses dispositions en matière de sécurité routière (publiée au Moniteur belge du 25 février 2003). (...) II. En droit (...) Quant aux dispositions attaquées B.1. Il ressort de la requête en annulation que seuls sont visés les articles 30 et 31 de la loi du 7 février 2003Documents pertinents retrouvés type loi prom. 07/02/2003 pub. 25/02/2003 numac 2003014044 source service public federal mobilite et transports Loi portant diverses dispositions en matière de sécurité routière fermer portant diverses dispositions en matière de sécurité routière. La Cour limite dès lors son examen à ces deux dispositions.
Les articles 30 et 31 de la loi précitée disposent : «
Art. 30.A l'article 65 des mêmes lois coordonnées, est inséré un § 3bis rédigé comme suit : ' § 3bis. Si l'auteur de l'infraction a sa résidence fixe en Belgique et ne paie pas immédiatement la somme proposée, il dispose d'un délai de cinq jours pour s'acquitter du paiement. Dans ce cas le véhicule conduit par l'auteur de l'infraction peut être retenu, aux frais et risques de celui-ci jusqu'à remise de la somme et justification du paiement des frais éventuels de conservation du véhicule.
A l'expiration de ce délai, la saisie du véhicule peut être ordonnée par le ministère public.
Un avis de saisie est envoyé au propriétaire du véhicule dans les deux jours ouvrables.
Le véhicule reste saisi aux risques et frais de l'auteur de l'infraction pendant la durée de la saisie.
La saisie est levée après justification du paiement de la somme et des frais éventuels de conservation du véhicule. '
Art. 31.Il est inséré dans le titre V des mêmes lois coordonnées un chapitre IIbis, comprenant les articles 65bis et 65ter, rédigé comme suit : ' Chapitre IIbis. Ordre de paiement imposé par le procureur du Roi en raison de certaines infractions commises par une personne qui a un domicile fixe ou une résidence fixe en Belgique
Art. 65bis.§ 1er. Après constatation d'une infraction : 1° de dépassement des vitesses maximales autorisées;2° de franchissement d'un feu de signalisation rouge ou d'un feu jaune-orange fixe;3° à l'article 34 de la présente loi;4° à l'article 37bis, § 1er, 1°, 4° à 6°, de la présente loi; un ordre de paiement d'une somme est imposé s'il n'y a pas de dommages causés à des tiers. Cet ordre de paiement ne peut être imposé que pour autant que la constatation se soit passée de manière automatisée ou avec l'aide d'un moyen technique et pour autant que le procureur du roi juge qu'il n'y a pas de contestation quant à la matérialité des faits ou à l'identité du contrevenant. Dans ce cas, il ne relève pas de la compétence du procureur du Roi de ne pas imposer un ordre de paiement. Si selon son appréciation, la matérialité des faits ou l'identité du conducteur n'est pas du tout établie, la procédure d'ordre de paiement prévue au présent article n'est pas applicable.
Les poursuites pénales et l'application du chapitre III du titre 1er du livre II du Code d'instruction criminelle sont exclues pour les infractions qui, conformément à l'article 65bis, concernent un ordre de paiement d'une somme, sans préjudice toutefois de la possibilité pour le procureur du Roi, en cas d'infraction visée à l'article 29, § 1er, alinéa 1er, de citer directement l'auteur de l'infraction devant le tribunal de police en vue d'obtenir la déchéance du droit de conduire, prévue à l'article 38. § 2. Le montant de cette somme, qui ne peut être supérieur au maximum de l'amende liée à cette infraction, majorée des décimes additionnels, est déterminé par le Roi, par arrêté délibéré en conseil des Ministres. Le montant ne peut être inférieur à 50 euros.
Si dans l'année à compter de la date de l'ordre de paiement imposé par le procureur du Roi, une nouvelle infraction visée au § 1er, alinéa 1er, est constatée, les montants visés à l'alinéa précédent peuvent être doublés. Dans ce cas, il revient au procureur du Roi soit d'imposer un nouvel ordre de paiement ou d'appliquer l'article 216bis, 216ter ou 216quater du code d'instruction criminelle, ou encore d'entamer des poursuites pénales.
La constatation d'un concours d'infractions visées au § 1er fera l'objet d'un paiement d'une somme unique.
Art. 65ter.§ 1er. Conformément à l'article 62, alinéa 8, une copie du procès-verbal est envoyé au contrevenant dans un délai de quatorze jours après la constatation de l'infraction.
Le contrevenant dispose d'un délai de quatorze jours à compter du jour de l'envoi de la copie du procès-verbal afin de faire connaître au procureur du Roi ses moyens de défense par rapport aux délits qui sont mis à sa charge. § 2. L'ordre de paiement visé à l'article 65bis est imposé et signé par le procureur du Roi et comprend au moins les mentions suivantes : 1° la date;2° l'identité du contrevenant ou la plaque d'immatriculation du véhicule avec lequel l'infraction a été commise;3° les faits mis à charge et les dispositions légales violées;4° la date et le moment et le lieu où l'infraction a été constatée;5° le montant de la somme ainsi que le mode de paiement;6° le jour où la somme doit être payée au plus tard, ainsi que les majorations si elle n'est pas payée à temps;7° les possibilités d'appel auprès du juge du tribunal de police, sous réserve de la possibilité d'exécution de la somme prélevée. § 3. L'ordre de paiement de la somme est envoyé au contrevenant dans un délai de 40 jours après la constatation de l'infraction. Une copie de l'ordre de payement sera envoyée en même temps au receveur des domaines. § 4. Le contrevenant est tenu de payer la somme dans le mois de la notification de l'ordre de paiement. La notification est censée avoir eu lieu le deuxième jour qui suit celui de l'envoi.
Si le contrevenant ne satisfait pas entièrement à l'ordre de paiement dans le délai visé à l'alinéa 1er, le montant en est majoré de 25 % .
Cette majoration n'est pas d'application si le contrevenant interjette appel auprès du tribunal de police.
Le montant ainsi majoré doit être payé dans le mois après avertissement qui reprend le montant majoré conformément à l'alinéa précédent. § 5. Si le contrevenant néglige de payer la somme dans le délai visé au § 4, alinéa 3, l'ordre de paiement de la somme est exécutable de plein droit. La perception se fait par le receveur des amendes pénales. § 6. Si le contrevenant continue à ne pas payer totalement la somme due conformément au § 4, troisième alinéa, après avertissement, le receveur des amendes pénales du domicile ou de la résidence principale du contrevenant ou celui du lieu de l'infraction peut lui-même immobiliser le véhicule avec lequel l'infraction a été commise ou le véhicule immatriculé au nom du contrevenant.
L'immobilisation est levée au plus tôt le jour du paiement complet de la somme due et des frais éventuels. Il est mis fin à l'immobilisation à la demande du receveur des domaines et du receveur des amendes pénales. En cas d'immobilisation, les articles 53 et 54 sont d'application. Si le contrevenant n'a pas payé la somme due dans les six mois après la constatation de l'infraction, le receveur des amendes pénales peut procéder à la vente forcée du véhicule, à condition que le contrevenant soit le propriétaire du véhicule. § 7. Le contrevenant peut adresser au juge du tribunal de police une requête écrite en vue de retirer l'ordre ou de diminuer le montant de la somme dans un délai de quatorze jours suivant la notification de l'ordre de paiement. Cette requête n'est recevable qu'après paiement complet de la somme imposée conformément au § 4, alinéa 1er, sauf lorsque l'intéressé peut faire appel à l'assistance judiciaire conformément à la partie IV, livre I, du Code judiciaire. Ce recours se fait au moyen d'une requête introduite au greffe du tribunal de police dans le ressort duquel l'infraction a eu lieu.
Le juge du tribunal de police juge la légitimité et la proportionnalité de la somme due. Il peut confirmer, modifier ou retirer la décision du procureur du Roi.
Un recours contre la décision du juge du tribunal de police peut être introduit devant le tribunal correctionnel qui statue en degré d'appel. Ce recours est introduit conformément aux articles 1056 et 1057 du Code judiciaire. Seul un pourvoi en cassation peut être introduit contre le jugement du tribunal correctionnel.
Sous réserve de l'application des alinéas précédents, les dispositions du Code judiciaire sont d'application pour le recours auprès du tribunal correctionnel. ' » Quant à l'intérêt de la partie requérante B.2.1. Le Conseil des ministres conteste l'intérêt de la partie requérante au motif que sa qualité d'usager de la route, titulaire du permis de conduire, ne suffirait pas à fournir la preuve de l'intérêt légalement requis pour postuler l'annulation des dispositions attaquées.
B.2.2. L'article 142, alinéa 3, de la Constitution dispose : « La Cour peut être saisie par toute autorité que la loi désigne, par toute personne justifiant d'un intérêt ou, à titre préjudiciel, par toute juridiction. » Aux termes de l'article 2, 2°, de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, les recours peuvent être introduits par « toute personne physique ou morale justifiant d'un intérêt ».
Les dispositions précitées exigent que la personne physique ou morale qui introduit une requête justifie d'un intérêt à agir devant la Cour.
Ne justifient de l'intérêt requis que les personnes dont la situation pourrait être affectée directement et défavorablement par la norme entreprise.
B.2.3. La partie requérante, qui est titulaire du permis de conduire, pourrait être directement et défavorablement affectée par les dispositions attaquées dans la mesure où celles-ci instaurent une procédure d'ordre de paiement que la partie requérante pourrait se voir appliquer si elle est l'auteur de l'une des infractions visées par la loi.
B.3. L'exception est rejetée.
Quant au premier moyen B.4.1. La partie requérante prend un premier moyen de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution, en ce que le système d'ordre de paiement immédiat ne s'applique à l'auteur d'une infraction que si celui-ci a un domicile fixe ou une résidence fixe en Belgique.
B.4.2. Il peut raisonnablement se justifier que, soucieux de diminuer radicalement le nombre d'accidents de la route, le législateur adopte un certain nombre de mesures qui, pour des raisons administratives, ne pourraient s'appliquer aux personnes qui ne disposent pas d'un domicile fixe ou d'une résidence fixe en Belgique.
En effet, dès lors que la procédure d'ordre de paiement concerne les seules infractions constatées de manière automatisée ou avec l'aide d'un moyen technique (article 65bis, § 1er, alinéa 1er), qu'elle implique que l'ordre de paiement soit envoyé au contrevenant dans un délai de quarante jours après la constatation de l'infraction (article 65ter, § 3), la somme devant être payée dans le mois qui suit la notification de l'ordre de paiement (article 65ter, § 4), le législateur a pu considérer qu'une telle procédure ne pouvait être envisagée à l'encontre des contrevenants dès lors que la recherche de leur domicile ou de leur résidence à l'étranger, ainsi que leur poursuite pourraient entraîner une charge de travail extrêmement lourde pour le parquet et s'avérer, à terme, inefficaces.
B.4.3. Le premier moyen ne peut être accueilli.
Quant au deuxième moyen B.5.1. La partie requérante prend un deuxième moyen de la violation des articles 10 et 11, lus en combinaison avec l'article 151 de la Constitution, par les dispositions attaquées en ce qu'elles retireraient au procureur du Roi tout pouvoir d'appréciation par rapport à l'infraction.
B.5.2. L'article 151, § 1er, de la Constitution dispose : « Les juges sont indépendants dans l'exercice de leurs compétences juridictionnelles. Le ministère public est indépendant dans l'exercice des recherches et des poursuites individuelles, sans préjudice du droit du Ministre compétent d'ordonner des poursuites et d'arrêter des directives contraignantes de politique criminelle, y compris en matière de politique de recherche et de poursuite. » B.5.3. En enlevant au ministère public son pouvoir d'appréciation quant à l'opportunité des poursuites d'une catégorie d'infractions, le législateur introduit une différence de traitement entre deux catégories de citoyens : d'une part, les citoyens qui ont commis une infraction pour laquelle le ministère public dispose de ce pouvoir d'appréciation et, d'autre part, ceux qui sont auteurs d'infractions pour lesquelles le législateur impose au ministère public de poursuivre. Cette deuxième catégorie serait, d'après la partie requérante, privée, de manière discriminatoire, du principe de l'indépendance du ministère public dans l'exercice de ses fonctions, consacré par l'article 151 de la Constitution.
B.5.4. Selon les travaux préparatoires de l'article 151 de la Constitution : « [...] le ministère public est indépendant lorsqu'il intente l'action pénale et, partant, lorsqu'il poursuit des délits, même si le ministère public n'exerce en l'occurrence [...] pas une fonction de juge mais plutôt une fonction de pouvoir exécutif et qu'il relève ainsi de l'autorité et du contrôle du ministre de la Justice. C'est la raison pour laquelle le paragraphe premier réfère à la possibilité pour le ministre de la Justice d'ordonner les poursuites pénales (article 274 Code d'instruction criminelle : le droit d'injonction positif), ainsi qu'à la compétence du ministre de la Justice d'arrêter les directives de la politique criminelle, en ce compris en matière de politique de recherche et de poursuite » (Doc. Parl., Chambre, 1997-1998, n° 1675/1, p. 4).
Comme l'indiquent les travaux préparatoires de l'article 151 de la Constitution (ibid., p. 3 et pp. 27-28), le ministère public peut recevoir des injonctions de poursuivre de la part du ministre de la Justice, de même qu'il doit se soumettre aux directives de politique criminelle que le ministre est susceptible d'adopter, mais en restant « dans le cadre de la loi en tenant compte de la marge d'appréciation que le législateur a prévue dans les dispositions législatives » (projet de loi instituant le Collège des procureurs généraux et créant la fonction de magistrat national, Doc. Parl., Chambre, 1996-1997, n° 867/6, p. 29).
B.5.5.1. Il appartient au législateur d'adopter les mesures qu'il estime nécessaires à l'exercice de la politique répressive qu'il entend mener à l'égard de certaines catégories d'infractions. Ces mesures peuvent impliquer l'obligation, pour le ministère public, de poursuivre l'auteur de l'une de ces infractions sans pouvoir apprécier l'opportunité de cette poursuite.
B.5.5.2. La Cour doit toutefois examiner si, par les mesures qu'il a adoptées, le législateur n'a pas en l'espèce porté atteinte, sans justification raisonnable, aux droits d'une catégorie de citoyens.
B.5.5.3. La différence de traitement dénoncée par la partie requérante repose sur un critère objectif : le moyen utilisé pour constater les quatre catégories d'infractions visées par l'article 65bis, § 1er, alinéa 1er, de la loi attaquée.
En imposant au ministère public de poursuivre l'auteur d'une de ces infractions, le législateur a entendu renforcer l'efficacité des poursuites à l'égard de comportements « dérangeants et dangereux avec souvent des conséquences catastrophiques pour les victimes » et que les conducteurs continuent à adopter malgré les campagnes de prévention et les poursuites via le circuit pénal classique (Doc. parl., Chambre, 2001-2002, DOC 50-1915/001, p. 20).
C'est ainsi qu'il a opté pour « une procédure sui generis qui est le juste milieu entre un système de sanction purement administratif (tel que prévu par la loi du 21 décembre 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/12/1998 pub. 03/02/1999 numac 1999000028 source ministere de l'interieur Loi relative à la sécurité lors des matches de football fermer sur la sécurité lors des rencontres de football ou la loi du 13 mai 1999 introduisant les sanctions administratives communales) et un système de traitement pénal classique ». Il a estimé que « ce juste milieu permet qu'un système administratif de sanctions soit aussi appliqué et imposé par la magistrature du parquet, ce qui offre encore plus de garanties en termes de procédure et de respect des droits de la défense » (Doc. parl., Chambre, 2001-2002, DOC 50-1915/001, p. 19).
B.5.6. Il peut raisonnablement se justifier, au regard de l'objectif décrit et compte tenu de la nature des infractions en cause et de leurs effets, que le législateur restreigne le pouvoir d'appréciation dont dispose le ministère public dans la poursuite de ces infractions.
Une telle mesure ne serait discriminatoire que si elle avait pour effet, en enlevant au ministère public le pouvoir d'apprécier s'il est opportun de poursuivre l'auteur d'une infraction dont la matérialité des faits est établie et dont l'auteur est identifié, de lui ôter le pouvoir d'apprécier s'il s'agit d'une infraction.
En vertu des articles 70 et 71 du Code pénal, il n'y a pas d'infraction lorsque le fait est justifié par une des causes qui y sont mentionnées. Il s'ensuit que, alors même qu'il ne peut apprécier s'il est opportun de poursuivre, le procureur du Roi ne peut se dispenser d'examiner s'il n'existe pas une cause de justification, auquel cas les faits ne constituent pas une infraction.
La loi ne pouvant avoir pour effet d'empêcher le procureur du Roi d'apprécier s'il existe une cause de justification, elle n'est pas incompatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution.
B.6. Le deuxième moyen ne peut être accueilli.
Quant aux troisième et quatrième moyens B.7.1. La partie requérante fait grief à l'article 65ter, § 7, d'imposer le paiement complet de la somme réclamée dans l'ordre de paiement comme condition de recevabilité de la requête introduite auprès du tribunal de police en vue de retirer cet ordre ou de diminuer le montant qui y est fixé.
Dans le troisième moyen, la partie requérante allègue la violation des articles 10 et 11 de la Constitution en ce que seules les personnes pouvant faire appel à l'assistance judiciaire sont dispensées de ce paiement préalable.
Le quatrième moyen est pris de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution, combinés avec l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, en ce que les dispositions attaquées dissuaderaient le contrevenant d'avoir recours à un tribunal impartial en lui imposant le paiement préalable de la somme visée dans l'ordre de paiement, en ce que le délai de quatorze jours dans lequel la requête écrite doit être déposée au greffe du tribunal de police serait insuffisant et en ce que le recours introduit devant le tribunal de police n'est pas suspensif.
B.7.2. On peut lire dans les travaux préparatoires relatifs à la disposition incriminée : « L'objectif est que [l'ordre de paiement] suive rapidement l'infraction et qu'il soit effectivement payé. Cet objectif tente de répondre au projet de loi au moyen de mesures concomitantes : - Si l'intéressé ne paie pas, l'amende est majorée d'office de 25 % - Si l'intéressé souhaite contester l'ordre de paiement, il en a le droit (voir ci-après), il doit cependant d'abord satisfaire à l'ordre de paiement. A cet égard, cette procédure diverge essentiellement de la perception immédiate que de l'arrangement à l'amiable qui toutes les deux doivent obtenir l'accord du contrevenant. - L'ordre de paiement est en soi un titre exécutoire. En d'autres mots, il n'est plus nécessaire pour la perception réelle de l'amende d'obtenir un titre exécutoire auprès du tribunal civil. On peut remettre l'ordre aux mains d'un huissier de justice si nécessaire pour exécution.
Tout cela ne signifie pas que l'on ne donne pas les garanties nécessaires au contrevenant. Il a ainsi le droit de faire connaître dans les 15 jours après la constatation de l'infraction ses moyens de défense au procureur du Roi. Exemple typique : si celui à qui est envoyé un PV peut prouver que ce n'était pas lui, mais quelqu'un d'autre qui conduisait au moment de la constatation des faits. Le contrevenant a ensuite le droit, conformément à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, d'interjeter appel contre l'ordre de paiement devant un collège juridictionnel de pleine juridiction, à savoir ici le tribunal de police. Afin d'avoir encore plus de garanties, l'intéressé peut encore interjeter appel devant le tribunal correctionnel siégeant en degré d'appel. En d'autres mots, il n'est pas du tout sûr que le contrevenant dispose de moins de droits que si les voies juridiques classiques étaient appliquées. Dans ce cas, l'ordre est imposé par un magistrat du parquet et un appel est possible auprès de deux instances juridiques qui disposent du pouvoir de pleine juridiction. Dans le circuit pénal classique, on ignore l'échelon du ministère public et une amende peut seule être imposée par le tribunal. » (Doc. parl. Chambre, 2001-2002, DOC 50-1915/001, pp. 18-19) B.7.3. Il y a lieu d'examiner si la sanction prévue par le législateur est de nature pénale.
La Cour constate que la sanction prévue par l'article 31 de la loi du 7 février 2003Documents pertinents retrouvés type loi prom. 07/02/2003 pub. 25/02/2003 numac 2003014044 source service public federal mobilite et transports Loi portant diverses dispositions en matière de sécurité routière fermer a un caractère répressif prédominant; elle a pour objet de prévenir et de sanctionner les infractions commises par tous les conducteurs d'un véhicule automoteur qui seraient auteurs de l'une de ces infractions; ces personnes, connaissant à l'avance la sanction qu'elles risquent d'encourir, sont incitées à respecter leurs obligations; la mesure est insérée dans la loi relative à la police de la circulation routière, coordonnée le 16 mars 1968. Ces constatations amènent à la conclusion que la sanction litigieuse est de nature pénale.
B.7.4. La mesure qui subordonne au paiement complet de la somme due le recours du contrevenant auprès du tribunal de police en vue d'obtenir le retrait de l'ordre ou la diminution de la somme, sauf lorsque l'intéressé peut faire appel à l'assistance judiciaire, prive, sans justification raisonnable, le justiciable de son droit à ce qu'une accusation en matière pénale portée contre lui soit soumise à un tribunal indépendant et impartial. Le justiciable perd en effet toute possibilité d'introduire un recours recevable lorsqu'il se trouve aux prises avec des difficultés financières, fussent-elles passagères, qu'il ne remplit pas les conditions légales pour pouvoir prétendre à l'assistance judiciaire, et qu'il n'est pas en mesure de réunir la somme nécessaire dans le délai de quatorze jours suivant la notification de l'ordre de paiement.
B.7.5. Le quatrième moyen est fondé.
B.7.6. Le troisième moyen ne doit, en conséquence, pas être examiné.
Quant au cinquième moyen B.8.1. La partie requérante allègue la violation des articles 10 et 11 de la Constitution par l'article 31 de la loi du 7 février 2003Documents pertinents retrouvés type loi prom. 07/02/2003 pub. 25/02/2003 numac 2003014044 source service public federal mobilite et transports Loi portant diverses dispositions en matière de sécurité routière fermer en ce qu'il instaure deux procédures de poursuites différentes pour des infractions identiques, selon que ces infractions ont été constatées soit de manière automatisée ou avec l'aide d'un moyen technique, soit par un agent de la force publique.
B.8.2. D'après les travaux préparatoires de la loi attaquée, les quatre catégories d'infractions visées par la loi peuvent être constatées automatiquement : « la prise d'alcool, de drogue, au moyen des alcooltests, des prises de sang, des tests d'urine. Les infractions liées à la vitesse, le franchissement d'un feu rouge via les radars ou autres appareils automatiques (prises de photos).
Dans 99 % des cas, il n'y a donc aucune discussion sur la matérialité des faits puisque la constatation de l'infraction associe l'action policière à l'utilisation de moyens techniques supplémentaires dont les résultats sont parfaitement contrôlables. » (Doc. parl., Chambre, 2001-2002, DOC 50-1915/001, p. 17) B.8.3. En adoptant un régime spécifique pour la poursuite des infractions constatées de manière automatique ou à l'aide de moyens techniques, lorsque le procureur du Roi juge qu'il n'y a pas de contestation quant à la matérialité des faits ou à l'identité du contrevenant, le législateur entendait renforcer l'efficacité de la répression pénale à l'égard d'infractions qui sont les plus fréquentes et qui peuvent avoir des conséquences catastrophiques pour les usagers de la route. Le fait que le législateur ait dérogé à la procédure de droit commun n'est pas discriminatoire en soi.
Toutefois, les contrevenants auxquels la procédure dérogatoire est appliquée sont discriminés dans la mesure indiquée en B.7.4.
B.8.4. Dans cette mesure, le cinquième moyen est fondé.
En ce qui concerne le sixième moyen B.9.1. La partie requérante allègue la violation des articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'en fonction du moyen utilisé pour constater l'infraction, des peines différentes seraient applicables.
B.9.2. L'article 65bis, § 2, prévoit que le montant de la somme imposée dans l'ordre de paiement ne peut être supérieur au maximum de l'amende liée à l'infraction commise, majorée des décimes additionnels, et qu'il ne peut être inférieur à 50 euros. D'après la même disposition, le montant doit être déterminé par le Roi, par arrêté délibéré en Conseil des ministres.
B.9.3. Dès lors qu'il habilitait le Roi à fixer le montant des amendes, le législateur devait, sous peine de méconnaître le principe de légalité, en fixer au moins le minimum et le maximum. Le pouvoir d'appréciation, ainsi limité, qu'il laisse au Roi n'est pas de nature à créer une discrimination par rapport aux auteurs d'infractions constatées autrement que « de manière automatisée ou avec l'aide d'un moyen technique ». Dans ces autres cas, la peine prévue comporte également un minimum et elle ne peut dépasser le même maximum, le juge disposant du pouvoir de fixer la peine dans les limites déterminées par la loi. Il s'ensuit que, en ce qui concerne la détermination de la peine, les deux catégories de personnes font l'objet de traitements qui ne diffèrent pas de manière essentielle.
B.10. Le sixième moyen ne peut être accueilli.
Par ces motifs, la Cour - annule, dans l'article 65ter, § 7, des lois relatives à la police de la circulation routière, coordonnées le 16 mars 1968, inséré par l'article 31 de la loi du 7 février 2003Documents pertinents retrouvés type loi prom. 07/02/2003 pub. 25/02/2003 numac 2003014044 source service public federal mobilite et transports Loi portant diverses dispositions en matière de sécurité routière fermer portant diverses dispositions en matière de sécurité routière, la phrase : « Cette requête n'est recevable qu'après paiement complet de la somme imposée conformément au § 4, alinéa 1er, sauf lorsque l'intéressé peut faire appel à l'assistance judiciaire conformément à la partie IV, livre I, du Code judiciaire. »; - rejette le recours pour le surplus.
Ainsi prononcé en langue française, en langue néerlandaise et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 16 novembre 2004.
Le greffier, P.-Y. Dutilleux.
Le président, M. Melchior.