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Arrêt
publié le 19 février 2004

Extrait de l'arrêt n° 149/2003 du 19 novembre 2003 Numéro du rôle : 2663 En cause : la question préjudicielle concernant l'article 21, § 3, de la loi du 13 juin 1966(...)

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2004200106
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19/02/2004
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COUR D'ARBITRAGE


Extrait de l'arrêt n° 149/2003 du 19 novembre 2003 Numéro du rôle : 2663 En cause : la question préjudicielle concernant l'article 21, § 3, de la loi du 13 juin 1966Documents pertinents retrouvés type loi prom. 13/06/1966 pub. 20/10/2009 numac 2009000693 source service public federal interieur Loi relative à la pension de retraite et de survie des ouvriers, des employés, des marins naviguant sous pavillon belge, des ouvriers mineurs et des assurés libres. - Coordination officieuse en langue allemande fermer relative à la pension de retraite et de survie des ouvriers, des employés, des marins naviguant sous pavillon belge, des ouvriers mineurs et des assurés libres, tel qu'il a été modifié par l'arrêté royal no 205 du 29 août 1983, posée par la Cour du travail de Liège.

La Cour d'arbitrage, composée du juge L. François, faisant fonction de président, et du président A. Arts, et des juges P. Martens, R. Henneuse, M. Bossuyt, E. De Groot et L. Lavrysen, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le juge L. François, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet de la question préjudicielle et procédure Par arrêt du 4 mars 2003 en cause de l'Office national des pensions contre Y. Dormal et A.-M. Jaspart, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour d'arbitrage le 12 mars 2003, la Cour du travail de Liège a posé la question préjudicielle suivante : « L'article 21, § 3, de la loi du 13 juin 1966Documents pertinents retrouvés type loi prom. 13/06/1966 pub. 20/10/2009 numac 2009000693 source service public federal interieur Loi relative à la pension de retraite et de survie des ouvriers, des employés, des marins naviguant sous pavillon belge, des ouvriers mineurs et des assurés libres. - Coordination officieuse en langue allemande fermer relative à la pension de retraite et de survie des ouvriers, des employés, des marins naviguant sous pavillon belge, des ouvriers mineurs et des assurés libres, tel que modifié par l'arrêté royal no 205 du 29 août 1983 (article 3, 3o), ne viole-t-il pas les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'il prévoit un délai de prescription identique de cinq ans pour l'action en récupération d'un indu réclamé à un pensionné selon que cet indu trouve son origine dans des manoeuvres frauduleuses ou des déclarations fausses ou sciemment incomplètes, d'une part, ou dans l'abstention de produire une déclaration prescrite par une disposition légale ou réglementaire ou résultant d'un engagement souscrit antérieurement, d'autre part, alors que les pensionnés visés par la première hypothèse ont posé un acte conscient de nature frauduleuse tandis que ceux visés par la seconde peuvent n'avoir été confrontés qu'à une simple omission résultant d'une erreur ou d'une mauvaise compréhension non révélatrice d'une quelconque fraude comme ils peuvent aussi avoir de la sorte posé un acte de nature frauduleuse ? Le fait de traiter de la même manière les deux catégories de personnes placées dans des situations fondamentalement différentes, les pensionnés qui, sans malice, ont omis de procéder à la déclaration requise, d'une part, et les pensionnés qui ont voulu tromper l'institution de sécurité sociale compétente, d'autre part, sans laisser à l'administration puis au juge la possibilité de prendre une mesure proportionnée à la gravité de la faute commise, ne constitue-t-il pas une discrimination injustifiée objectivement et hors de proportion avec l'objectif poursuivi ? » (...) III. En droit (...) B.1. L'article 21, § 3, de la loi du 13 juin 1966Documents pertinents retrouvés type loi prom. 13/06/1966 pub. 20/10/2009 numac 2009000693 source service public federal interieur Loi relative à la pension de retraite et de survie des ouvriers, des employés, des marins naviguant sous pavillon belge, des ouvriers mineurs et des assurés libres. - Coordination officieuse en langue allemande fermer relative à la pension de retraite et de survie des ouvriers, des employés, des marins naviguant sous pavillon belge, des ouvriers mineurs et des assurés libres dispose : « L'action en répétition de prestations payées indûment se prescrit par six mois à compter de la date à laquelle le paiement a été effectué.

Lorsque le paiement indu trouve son origine dans l'octroi ou la majoration d'un avantage accordé par un pays étranger ou d'un avantage dans un autre régime que celui visé au § 1er, l'action en répétition se prescrit par six mois à compter de la date de la décision octroyant ou majorant les avantages précités.

Le délai fixé aux alinéas 1er et 2 est porté à cinq ans lorsque les sommes indues ont été obtenues par des manoeuvres frauduleuses ou par des déclarations fausses ou sciemment incomplètes. Il en est de même en ce qui concerne les sommes payées indûment par suite de l'abstention du débiteur de produire une déclaration prescrite par une disposition légale ou réglementaire ou résultant d'un engagement souscrit antérieurement. [...] » La question préjudicielle porte uniquement sur la dernière phrase de l'alinéa 3 de l'article 21, § 3. La Cour limite son examen à cette disposition.

B.2. Dans le texte initial de la loi du 13 juin 1966Documents pertinents retrouvés type loi prom. 13/06/1966 pub. 20/10/2009 numac 2009000693 source service public federal interieur Loi relative à la pension de retraite et de survie des ouvriers, des employés, des marins naviguant sous pavillon belge, des ouvriers mineurs et des assurés libres. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, le législateur avait prévu que l'indu ne pourrait être récupéré après l'écoulement d'une prescription uniforme de deux ans, mettant fin à la prescription trentenaire qui était applicable auparavant.

B.3. Par la loi du 5 juin 1970, le législateur avait porté ce délai à cinq ans « lorsque le paiement indu résulte de dol ou de fraude dans le chef du débiteur ».

B.4. Par la loi du 27 décembre 1973, le délai a été réduit à six mois lorsqu'il n'y a ni dol ni fraude du débiteur.

B.5. Le régime actuellement en vigueur, introduit par l'arrêté royal no 205 du 29 août 1983, fait une distinction entre deux catégories de personnes qui ont perçu des sommes indues. Le délai normal de prescription, qui est de six mois, est porté à cinq ans à l'égard des personnes qui ont obtenu des paiements indus à la suite, soit de manoeuvres frauduleuses, soit de déclarations fausses ou sciemment incomplètes, soit de l'abstention de produire une déclaration que le bénéficiaire était tenu de faire.

B.6. Le juge a quo demande à la Cour s'il n'est pas discriminatoire de soumettre à la même prescription quinquennale celui qui a voulu tromper une institution de sécurité sociale et celui qui a omis de lui faire une déclaration, alors qu'il peut avoir agi par erreur et sans malice, la loi ne permettant pas au juge de prendre une mesure proportionnée à la gravité de la faute.

B.7. En raison du caractère souvent complexe de la réglementation en matière de sécurité sociale, le législateur a pu prévoir un délai de prescription particulièrement court lorsqu'il s'agit de récupérer un indu explicable, la plupart du temps, par une erreur de l'administration que le bénéficiaire n'était pas à même de déceler.

B.8. Tel n'est pas le cas de l'omission de la déclaration qui est exigée par l'article 64, § 2, de l'arrêté royal portant règlement général du régime de pension de retraite et de survie des travailleurs salariés. C'est à la condition que cette déclaration préalable ait été faite que le bénéficiaire de la pension peut être autorisé à cumuler celle-ci avec les revenus d'une activité professionnelle, après que l'administration a pu, grâce à cette déclaration, s'assurer que ces revenus n'y font pas obstacle. L'interdiction de principe de cumuler une activité professionnelle avec le bénéfice d'une pension est suffisamment connue pour que le législateur ait assimilé cette omission à une déclaration fausse ou sciemment incomplète. Il s'est fondé sur un critère objectif en traitant différemment celui qui bénéficie d'une erreur de l'administration et celui dont le manquement rend cette erreur possible.

B.9. Sans doute le système idéal serait-il celui qui permet, dans chaque cas, d'apprécier la gravité de la faute et de permettre au juge de fixer un délai de prescription proportionné à celle-ci. Toutefois, un délai de prescription qui ne serait pas fixé par la loi serait une source d'insécurité. En fixant ce délai, le législateur doit pouvoir faire usage de catégories qui, nécessairement, n'appréhendent la diversité des situations qu'avec un certain degré d'approximation.

B.10. C'est précisément parce que la recherche de l'intention de celui qui n'a pas fait la déclaration exigée se heurte à des difficultés de preuve que le système a été modifié. Le rapport au Roi précédant l'arrêté royal no 205 du 29 août 1983, qui est à l'origine du texte en cause, justifie celui-ci de la manière suivante : « Les notions de dol ou de fraude sont à juste titre d'interprétation restrictive. Il arrive souvent qu'il ne soit pas possible d'y avoir recours afin de poursuivre une action en répétition de l'indu alors que la récupération de sommes payées indûment s'impose.

Ce problème se pose notamment dans le cumul de la pension avec une activité professionnelle.

C'est la raison pour laquelle est prévue une extension des cas dans lesquels il pourra être fait appel au délai de prescription de 5 ans.

L'occasion est saisie pour procéder à l'alignement de la règle prévue en régime salarié sur celle qui est prévue dans les autres régimes. » (Moniteur belge, 6 septembre 1983, p. 11094) B.11. Il se déduit de ces éléments que, en traitant de la même manière, en ce qui concerne le délai de prescription, celui qui a fait une déclaration fausse ou sciemment inexacte et celui qui s'est abstenu de faire une déclaration dont il pouvait s'attendre qu'elle fût obligatoire, le législateur a pris une mesure qui n'est pas dépourvue de justification raisonnable.

B.12. La question préjudicielle appelle une réponse négative.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : L'article 21, § 3, alinéa 3, dernière phrase, de la loi du 13 juin 1966Documents pertinents retrouvés type loi prom. 13/06/1966 pub. 20/10/2009 numac 2009000693 source service public federal interieur Loi relative à la pension de retraite et de survie des ouvriers, des employés, des marins naviguant sous pavillon belge, des ouvriers mineurs et des assurés libres. - Coordination officieuse en langue allemande fermer relative à la pension de retraite et de survie des ouvriers, des employés, des marins naviguant sous pavillon belge, des ouvriers mineurs et des assurés libres ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution.

Ainsi prononcé en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 19 novembre 2003.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux.

Le président f.f., L. François.

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