publié le 11 octobre 2001
Extrait de l'arrêt n° 80/2001 du 13 juin 2001 Numéros du rôle : 1902 et 2030 En cause : les questions préjudicielles relatives à l'article 35, alinéas 3 et 4, de la loi du 27 juin 1969 révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la s La Cour d'arbitrage, composée des présidents M. Melchior et H. Boel, des juges L. François, P. M(...)
COUR D'ARBITRAGE
Extrait de l'arrêt n° 80/2001 du 13 juin 2001 Numéros du rôle : 1902 et 2030 En cause : les questions préjudicielles relatives à l'article 35, alinéas 3 et 4, de la
loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés
type
loi
prom.
27/06/1969
pub.
24/01/2011
numac
2010000730
source
service public federal interieur
Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande
fermer révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs, tel qu'il a été inséré par l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989, posées par le Tribunal correctionnel de Liège et par le Tribunal correctionnel de Charleroi.
La Cour d'arbitrage, composée des présidents M. Melchior et H. Boel, des juges L. François, P. Martens, A. Arts, R. Henneuse, M. Bossuyt, E. De Groot, L. Lavrysen et A. Alen, et, conformément à l'article 60bis de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, du juge honoraire J. Delruelle et du juge émérite E. Cerexhe, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président M. Melchior, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles a. Par jugement du 3 mars 2000 en cause de l'auditeur du travail contre F.Hala et autres, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour d'arbitrage le 8 mars 2000, le Tribunal correctionnel de Liège a posé la question préjudicielle suivante : « L'article 35, alinéa 3, de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer interprété en ce qu'il oblige le juge pénal, outre le deuxième alinéa qui lui impose de condamner d'office l'employeur à payer à l'O.N.S.S. le montant des cotisations, majorations de cotisations et intérêts de retard qui n'ont pas été versés à l'Office, à condamner d'office l'employeur au paiement à l'O.N.S.S. d'une indemnité égale au triple des cotisations déclarées frauduleusement comme une sanction de nature civile avec pour conséquence l'impossibilité d'y étendre une mesure de suspension ou de sursis, de l'écarter lorsque la peine prononcée est celle prévue par un autre texte par application de l'article 65 du Code pénal, viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution par rapport à la situation de tout autre prévenu susceptible d'être condamné au plan pénal au sens strict et à l'obligation de réparer les conséquences dommageables du fait infractionnel et par rapport à tout employeur qui devant le juge civil ne serait condamné qu'au paiement à l'O.N.S.S. des cotisations éludées, des majorations de cotisations et intérêts de retard ? » Cette affaire est inscrite sous le numéro 1902 du rôle de la Cour. b. Par jugement du 4 septembre 2000 en cause de l'auditeur du travail contre H.Akbar et autres, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour d'arbitrage le 15 septembre 2000, le Tribunal correctionnel de Charleroi a posé la question préjudicielle suivante : « L'article 35, alinéa 4, de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs, tel qu'inséré par l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989, en ce qu'il prévoit une condamnation d'office de l'employeur au paiement d'une indemnité égale au triple des cotisations éludées avec un minimum de 51 000 francs, sachant que, conformément à l'arrêt de la Cour n° 98/99 du 15 septembre 1999 (Moniteur belge du 27 novembre 1999, p. 44.212), il y a lieu de considérer qu'il s'agit là d'une sanction pénale et que, partant, vu le principe de la personnalité des peines et l'impossibilité de retenir la responsabilité pénale d'une personne morale jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi du 4 mai 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 04/05/1999 pub. 22/06/1999 numac 1999009592 source ministere de la justice Loi instaurant la responsabilité pénale des personnes morales fermer, seul l'employeur, personne physique, peut être condamné au paiement de cette indemnité, à l'inverse de l'employeur, personne morale, qui y échappe, ne viole-t-il pas les articles 10 et 11 de la Constitution ? » Cette affaire est inscrite sous le numéro 2030 du rôle de la Cour. (...) IV. En droit (...) Quant aux dispositions en cause B.1. Les questions préjudicielles portent sur la compatibilité avec les articles 10 et 11 de la Constitution des alinéas 3 et 4 de l'article 35 de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs.
L'article 35 de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, modifié notamment par la loi du 6 juillet 1989, dispose : « Sans préjudice des articles 269 à 274 du Code pénal, sont punis d'un emprisonnement de huit jours à trois mois et d'une amende de 26 à 500 F ou de l'une de ces peines seulement: 1° l'employeur, ses préposés ou mandataires qui ne se sont pas conformés aux obligations prescrites par la présente loi et ses arrêtés d'exécution;l'amende est appliquée autant de fois qu'il y a de travailleurs à l'égard desquels une infraction a été commise, sans que toutefois le total des amendes puisse excéder 100 000 F; 2° les personnes, visées à l'article 30bis, § 3, et leurs cocontractants, qui ne fournissent pas les renseignements déterminés par le Roi ou ne respectent pas les conditions et modalités d'envoi imposées;3° les personnes, visées à l'article 30bis, § 3, qui omettent de verser les sommes dues dans le délai prescrit;4° toute personne qui met obstacle à la surveillance organisée en vertu de la présente loi. Le juge qui prononce la peine à charge de l'employeur, ses préposés ou mandataires, condamne d'office l'employeur à payer à l'Office national de sécurité sociale le montant des cotisations, majorations de cotisations et intérêts de retard qui n'ont pas été versés à l'Office.
En cas d'assujettissement frauduleux d'une ou de plusieurs personnes à l'application de la présente loi, le juge condamne d'office l'employeur, ses préposés ou mandataires au paiement à l'Office d'une indemnité égale au triple des cotisations déclarées frauduleusement.
En cas de non-assujettissement d'une ou de plusieurs personnes à l'application de la présente loi, le juge condamne d'office l'employeur et, lorsque le cas se présente, l'entrepreneur principal visé à l'article 30ter, pour les personnes occupées par le sous-traitant sur le chantier de l'entrepreneur principal, au paiement à l'Office national de sécurité sociale d'une indemnité égale au triple des cotisations éludées sans qu'elle puisse être inférieure à 51 000 F par personne occupée et ce par mois ou par fraction de mois.
Ce montant est adapté en fonction de l'évolution des salaires et des taux des cotisations de sécurité sociale. » Quant à la question préjudicielle posée dans l'affaire n° 1902 B.2. La discrimination dénoncée proviendrait de la circonstance que le juge répressif, constatant l'assujettissement frauduleux de personnes à l'O.N.S.S. (Office national de sécurité sociale), serait tenu, en vertu de l'article 35, alinéa 3, de prononcer d'office la condamnation à une indemnité égale au triple des cotisations déclarées frauduleusement, sans pouvoir appliquer ni l'article 65 du Code pénal, ni les articles 1er, 3, 6 et 8 de la loi du 29 juin 1964Documents pertinents retrouvés type loi prom. 29/06/1964 pub. 27/11/2009 numac 2009000776 source service public federal interieur Loi concernant la suspension, le sursis et la probation. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, en raison du caractère civil de cette condamnation.
B.3. L'alinéa 3 de l'article 35 de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer traduit la volonté du législateur d'obliger les juges à infliger des sanctions pécuniaires particulièrement lourdes dans un secteur où l'importance et la multiplicité des fraudes portent gravement atteinte aux intérêts de la collectivité et où les entreprises qui éludent leurs obligations font une concurrence illicite à celles qui les respectent. Cette volonté s'est à nouveau manifestée lorsque le législateur a introduit, par la loi du 6 juillet 1989, l'alinéa 4 de l'article 35 de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer qui a pour objet d'accentuer la lutte contre les pourvoyeurs de main-d'oeuvre (Doc. parl., Chambre, 1988-1989, n° 833/1, p. 10).
B.4. La nature particulière des condamnations au triple des cotisations déclarées frauduleusement ou éludées a pu amener à les considérer comme des sanctions civiles et non comme des peines. Cette interprétation avait pour effet de rendre inapplicables toutes les règles propres au droit pénal, qu'il s'agisse de celles qui concernent la prescription, la non-rétroactivité, les circonstances atténuantes, l'absorption des peines, le sursis ou la suspension du prononcé.
B.5. Il s'ensuit que les personnes prévenues d'avoir commis les faits visés par l'article 35, alinéas 3 et 4, de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer étaient traitées différemment d'autres prévenus. Cette différence de traitement, fondée sur un critère objectif et pertinent par rapport à l'objectif rappelé en B.3, pouvait avoir des effets disproportionnés par rapport à cet objectif.
B.6. Le législateur a en effet constaté, lors du vote de la loi du 26 juin 1992Documents pertinents retrouvés type loi prom. 26/06/1992 pub. 31/03/2011 numac 2011000187 source service public federal interieur Loi portant des dispositions sociales et diverses fermer portant des dispositions sociales et diverses, que la rigidité de mesures comparables à celles de l'article 35, alinéas 3 et 4, aboutissait à multiplier, pour des raisons d'équité, le nombre de classements sans suite (Doc. parl., Sénat, S.E., 1991-1992, n° 315-2, p. 64). Il apparaît ainsi qu'à vouloir empêcher de tenir compte des circonstances propres à chaque poursuite, on en arrive à des conséquences qui, parce qu'elles sont hors de proportion avec le but poursuivi, entraînent une impunité que le législateur entendait précisément éviter.
B.7. Il y a lieu d'examiner si les condamnations au triple des cotisations déclarées frauduleusement ou éludées ne doivent pas être considérées comme des peines, pour les raisons, notamment, exposées dans la jurisprudence développée par la Cour européenne des droits de l'homme quant à la notion de « matière pénale », au sens de l'article 6 de la Convention européenne.
B.8. La Cour constate à cet égard que la sanction prévue par l'alinéa 3 de l'article 35 de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer a un caractère répressif prédominant; elle a pour objet de prévenir et de sanctionner les infractions commises par tous les employeurs, préposés et mandataires, sans distinction aucune, qui ne respectent pas les règles de l'assujettissement à la sécurité sociale; ces personnes, connaissant à l'avance la sanction qu'elles risquent d'encourir, sont incitées à respecter leurs obligations; la mesure est localisée dans la section 4, consacrée aux « sanctions pénales »; elle s'ajoute à une peine prononcée par un juge pénal; elle ne répare pas le dommage causé par l'intéressé à la partie préjudiciée, qui est indemnisée par l'application de l'article 35, alinéa 2.
B.9. Ces constatations amènent à la conclusion que la sanction litigieuse est de nature pénale. Il reste à examiner s'il s'ensuit que toutes les règles du droit pénal lui sont applicables et, dans la négative, si les dérogations qui existeraient à ces règles sont susceptibles de justification.
Quant à l'applicabilité de l'article 65 du Code pénal B.10. Aux termes de l'article 38 de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, toutes les dispositions du Livre Ier du Code pénal, « le chapitre V excepté, mais le chapitre VII et l'article 85 compris », s'appliquent aux condamnations pénales prévues par la loi. L'article 65 du Code pénal, qui est compris dans le chapitre VI du Livre Ier, s'appliquera donc en principe aux condamnations prononcées en application de l'article 35, alinéas 3 et 4, de la loi.
B.11. L'article 65 du Code pénal dispose : « Lorsqu'un même fait constitue plusieurs infractions ou lorsque différentes infractions soumises simultanément au même juge du fond constituent la manifestation successive et continue de la même intention délictueuse, la peine la plus forte sera seule prononcée. [...] » B.12. Lorsque le juge condamne le prévenu aux peines d'amende et/ou d'emprisonnement prévues par l'article 35, alinéa 1er, et qu'il inflige en outre la condamnation d'office prévue par l'article 35, alinéas 3 et 4, la question de l'absorption éventuelle des peines ne se pose pas puisqu'elle ne concerne pas le cumul d'une peine principale et des peines accessoires prévues pour la même infraction.
B.13. En disposant que le juge condamne au paiement d'une « indemnité » égale au triple de toutes les cotisations déclarées frauduleusement (article 35, alinéa 3) ou « au triple des cotisations éludées sans qu'elle puisse être inférieure à 51 000 F par personne occupée et ce par mois ou par fraction de mois » (article 35, alinéa 4), le législateur a exclu que les faits distincts puissent s'analyser comme constituant un concours matériel d'infractions auxquelles s'appliquerait la règle d'absorption prévue par l'article 65 du Code pénal.
B.14. Lorsque le juge condamne le prévenu pour un fait qui constitue à la fois une infraction à l'article 35 de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer et une infraction à une autre disposition pénale, il devrait n'appliquer qu'une seule peine, la plus forte, ainsi que le prévoit l'article 65 du Code pénal en cas de concours idéal d'infractions. Si la peine la plus forte est celle de l'infraction à une autre disposition pénale, le juge ne pourrait ainsi, en principe, infliger les peines accessoires qui font l'objet des alinéas 3 et 4 de l'article 35.
B.15. Il y a lieu cependant d'examiner si, dans la matière particulière des fraudes à la sécurité sociale, le législateur n'a pas entendu déroger à cette application du droit pénal commun.
B.16. Les travaux préparatoires de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer révèlent que le législateur a entendu que la condamnation prévue par l'article 35, alinéa 3, soit prononcée d'office par le juge : un amendement qui proposait de supprimer cette dérogation au droit commun de la procédure pénale a été rejeté (Doc. parl., Chambre, 1986-1987, n° 390, p. 29).Cette volonté constante de maintenir et d'aggraver les pénalités s'est encore manifestée dans l'exposé des motifs de la loi du 23 mars 1994Documents pertinents retrouvés type loi prom. 23/03/1994 pub. 15/01/2010 numac 2009000838 source service public federal interieur Loi portant certaines mesures sur le plan du droit du travail contre le travail au noir fermer, qui tend à lutter contre le travail au noir, où il est affirmé que « si les sanctions ne sont pas assez dissuasives, beaucoup prendront le risque d'être pris sur le fait étant donné que, même dans ce cas, leur soi-disant ' avantage économique ' est toujours plus important que le montant des amendes à payer » (Doc. parl., Chambre, 1992-1993, n° 1157/7, p. 5).
B.17. C'est cette même volonté d'infliger une peine pécuniaire d'un montant supérieur au profit procuré par la fraude qui explique que cette peine soit multipliée de la façon exposée en B.13 et qu'en cas de récidive dans l'année, conformément à l'article 36, elle puisse être portée au double du maximum.
B.18. Enfin, l'obligation d'infliger en toute hypothèse les condamnations prévues à l'article 35, alinéas 3 et 4, correspond également au souci d'atténuer la perte que les fraudes font subir au système de la sécurité sociale.
B.19. Il se déduit de ces éléments qu'en disposant que le juge condamne « d'office » à une indemnité égale au triple des cotisations déclarées frauduleusement ou éludées, le législateur a entendu l'obliger à infliger cette condamnation, même dans l'hypothèse où la peine prévue par l'article 35, alinéa 1er, serait absorbée par la peine, plus forte, prononcée en application d'une autre disposition pénale. Toute autre interprétation aboutirait à créer une différence de traitement inadmissible en ce que celui qui, par hypothèse, a commis un fait plus grave, puisque ce fait est susceptible de deux incriminations, échapperait aux condamnations d'office et se trouverait ainsi dispensé de verser les sommes qui reviennent à l'O.N.S.S. B.20. Il s'ensuit que la condamnation d'office mentionnée à l'article 35, alinéa 3, - de même qu'à l'article 35, alinéa 4 - de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer n'est pas susceptible de se voir appliquer la règle d'absorption prévue par l'article 65 du Code pénal et que la différence de traitement qui en résulte est raisonnablement justifiée.
Quant à l'applicabilité de la loi du 29 juin 1964Documents pertinents retrouvés type loi prom. 29/06/1964 pub. 27/11/2009 numac 2009000776 source service public federal interieur Loi concernant la suspension, le sursis et la probation. - Coordination officieuse en langue allemande fermer B.21. Les articles 1er, 3, 6 et 8 de la loi du 29 juin 1964Documents pertinents retrouvés type loi prom. 29/06/1964 pub. 27/11/2009 numac 2009000776 source service public federal interieur Loi concernant la suspension, le sursis et la probation. - Coordination officieuse en langue allemande fermer règlent le sursis à l'exécution des peines et la suspension du prononcé de la condamnation.
B.22. L'article 3 permet au juge de suspendre le prononcé de la condamnation en faveur du prévenu qui n'a pas encouru antérieurement de condamnation à une peine criminelle ou à un emprisonnement correctionnel principal de plus de six mois. L'article 8 permet au juge d'ordonner qu'il sera sursis à l'exécution du jugement si le prévenu n'a pas encouru antérieurement de condamnation à une peine criminelle ou à un emprisonnement principal de plus de douze mois.
B.23. Dès lors que les condamnations prévues par l'article 35, alinéas 3 et 4, s'analysent comme des sanctions de nature pénale, aucune disposition n'interdit au juge, dans l'état actuel de la législation, d'appliquer au prévenu la loi du 29 juin 1964Documents pertinents retrouvés type loi prom. 29/06/1964 pub. 27/11/2009 numac 2009000776 source service public federal interieur Loi concernant la suspension, le sursis et la probation. - Coordination officieuse en langue allemande fermer. Ni le texte de la loi ni ses travaux préparatoires ne révèlent que le législateur aurait considéré que cette application serait inconciliable avec les objectifs de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer.
B.24. Il s'ensuit que, en ce qui concerne l'applicabilité de la loi du 29 juin 1964Documents pertinents retrouvés type loi prom. 29/06/1964 pub. 27/11/2009 numac 2009000776 source service public federal interieur Loi concernant la suspension, le sursis et la probation. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, les personnes poursuivies en vertu de l'article 35 de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer ne sont pas traitées différemment des autres prévenus.
Quant à la question préjudicielle posée dans l'affaire n° 2030 B.25. La question porte sur la compatibilité avec les articles 10 et 11 de la Constitution de l'article 35, alinéa 4, de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, interprété par la Cour, dans son arrêt n° 98/99, comme instaurant une sanction de nature pénale.
La discrimination dénoncée résulterait de ce que, avant l'entrée en vigueur de la loi du 4 mai 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 04/05/1999 pub. 22/06/1999 numac 1999009592 source ministere de la justice Loi instaurant la responsabilité pénale des personnes morales fermer instaurant la responsabilité pénale des personnes morales, seul l'employeur personne physique pouvait encourir la condamnation d'office de l'article 35, alinéa 4, contrairement à l'employeur personne morale.
B.26. A la différence des autres alinéas de l'article 35 de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, qui visent « l'employeur, ses préposés ou mandataires », l'alinéa 4 porte condamnation d'office du seul employeur.
B.27. Dans l'interprétation retenue par la juridiction a quo, une différence de traitement injustifiée est créée entre employeurs, selon qu'ils ont pris la forme d'une personne morale ou qu'ils agissent en tant que personne physique, quant à la condamnation qu'ils encourent en cas d'infraction à l'article 35, alinéas 1er et 4, de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer. Dans cette interprétation, l'article 35, alinéa 4, viole les articles 10 et 11 de la Constitution.
B.28. La Cour constate cependant que le terme « employeur » visé à l'article 35, alinéa 4, est susceptible de recevoir une autre interprétation. Dès lors que cette disposition s'analyse comme une mesure pénale, le terme « employeur » a une signification autonome. La condamnation d'office prévue par l'article 35, alinéa 4, ne s'appliquera donc pas à celui qui peut être qualifié d'employeur selon les règles du droit civil ou du droit du travail, mais à l'organe ou préposé personne physique, qui a en fait commis l'infraction.
B.29. Dans cette interprétation, l'article 35, alinéa 4, de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution.
Par ces motifs, la Cour dit pour droit : - L'article 35, alinéa 3, de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'il ne permet pas d'écarter, en faisant application de l'article 65 du Code pénal, la condamnation d'office qu'il prévoit lorsque la peine principale prononcée est celle prévue par une autre disposition. - La question préjudicielle est sans objet en ce qu'elle interroge la Cour au sujet de l'applicabilité de la loi du 29 juin 1964Documents pertinents retrouvés type loi prom. 29/06/1964 pub. 27/11/2009 numac 2009000776 source service public federal interieur Loi concernant la suspension, le sursis et la probation. - Coordination officieuse en langue allemande fermer concernant la suspension, le sursis et la probation. - L'article 35, alinéa 4, de la loi précitée du 27 juin 1969, interprété comme ne prévoyant que la condamnation de l'employeur personne physique, viole les articles 10 et 11 de la Constitution. - L'article 35, alinéa 4, de la même loi, interprété comme prévoyant la condamnation de l'employeur personne physique ou de la personne physique organe ou préposé de l'employeur personne morale, qui a commis en fait l'infraction que cet article réprime, ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution.
Ainsi prononcé en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 13 juin 2001, par le siège précité, dans lequel le juge émérite E. Cerexhe est remplacé, pour le prononcé, par le juge J.-P. Snappe, conformément à l'article 110 de la même loi.
Le greffier, P.-Y. Dutilleux Le président, M. Melchior