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Arrêt De La Cour Constitutionelle
publié le 20 juin 2001

Arrêt n° 70/2001 du 30 mai 2001 Numéros du rôle : 1888 et 1977 En cause : les recours en annulation partielle de : - l'article 20 du décret de la Région flamande du 11 mai 1999 modifiant le décret du 23 janvier 1991 relatif à la protection - l'article 9 du décret de la Région flamande du 3 mars 2000 portant modification du décret du 23 j(...)

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Arrêt n° 70/2001 du 30 mai 2001 Numéros du rôle : 1888 et 1977 En cause : les recours en annulation partielle de : - l'article 20 du décret de la Région flamande du 11 mai 1999 modifiant le décret du 23 janvier 1991 relatif à la protection de l'environnement contre la pollution due aux engrais et modifiant le décret du 28 juin 1985 relatif à l'autorisation écologique, - l'article 9 du décret de la Région flamande du 3 mars 2000 portant modification du décret du 23 janvier 1991 relatif à la protection de l'environnement contre la pollution due aux engrais, introduits par l'a.s.b.l. De Vlaamse Landeigendom et autres.

La Cour d'arbitrage, composée des présidents H. Boel et M. Melchior, et des juges L. François, P. Martens, A. Arts et E. De Groot, et, conformément à l'article 60bis de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, du juge émérite E. Cerexhe, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président H. Boel, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des recours a. Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 17 février 2000 et parvenue au greffe le 18 février 2000, un recours en annulation partielle de l'article 20 du décret de la Région flamande du 11 mai 1999 modifiant le décret du 23 janvier 1991 relatif à la protection de l'environnement contre la pollution due aux engrais et modifiant le décret du 28 juin 1985 relatif à l'autorisation écologique (publié au Moniteur belge du 20 août 1999) a été introduit par l'a.s.b.l. De Vlaamse Landeigendom, dont le siège social est établi à 1180 Bruxelles, avenue Van Bever 24/2, l'a.s.b.l.

Organisation de la ruralité et du milieu européen, dont le siège social est établi à 1300 Wavre, avenue Pasteur 23, T. de l'Escaille, demeurant à 3930 Hamont, Lozenweg 100, N. Powis de Tenbossche, demeurant à 3930 Hamont, Lozenweg 104, M. de Broqueville, demeurant à 2400 Mol, Arendonkseweg 40, F. de Broqueville, demeurant à 1150 Bruxelles, avenue des Volontaires 243, et B. de Bidlot Thorn, demeurant à 3530 Houthalen, Luciebos 4.

Cette affaire est inscrite sous le numéro 1888 du rôle de la Cour. b. Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 30 mai 2000 et parvenue au greffe le 31 mai 2000, un recours en annulation partielle de l'article 9 du décret de la Région flamande du 3 mars 2000 portant modification du décret du 23 janvier 1991 relatif à la protection de l'environnement contre la pollution due aux engrais (publié au Moniteur belge du 30 mars 2000) a été introduit par les mêmes parties requérantes. Cette affaire est inscrite sous le numéro 1977 du rôle de la Cour.

II. La procédure a. L'affaire n° 1888 Par ordonnance du 18 février 2000, le président en exercice a désigné les juges du siège conformément aux articles 58 et 59 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage. Les juges-rapporteurs ont estimé n'y avoir lieu de faire application des articles 71 ou 72 de la loi organique.

Le recours a été notifié conformément à l'article 76 de la loi organique, par lettres recommandées à la poste le 12 mai 2000.

L'avis prescrit par l'article 74 de la loi organique a été publié au Moniteur belge du 18 mai 2000. b. L'affaire n° 1977 Par ordonnance du 31 mai 2000, le président en exercice a désigné les juges du siège conformément aux articles 58 et 59 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage. Les juges-rapporteurs ont estimé n'y avoir lieu de faire application des articles 71 ou 72 de la loi organique.

Le recours a été notifié conformément à l'article 76 de la loi organique, par lettres recommandées à la poste le 31 juillet 2000.

L'avis prescrit par l'article 74 de la loi organique a été publié au Moniteur belge du 5 août 2000.

Le Gouvernement flamand, place des Martyrs 19, 1000 Bruxelles, a introduit un mémoire par lettre recommandée à la poste le 11 septembre 2000.

Ce mémoire a été notifié conformément à l'article 89 de la loi organique, par lettre recommandée à la poste le 27 septembre 2000.

Les parties requérantes ont introduit un mémoire en réponse par lettre recommandée à la poste le 24 octobre 2000. c. Les affaires nos 1888 et 1977 Par ordonnance du 5 juillet 2000, la Cour a joint les affaires. Par ordonnances des 29 juin 2000 et 30 janvier 2001, la Cour a prorogé respectivement jusqu'aux 17 février 2001 et 17 août 2001 le délai dans lequel l'arrêt doit être rendu.

Par ordonnance du 7 mars 2001, la Cour a déclaré les affaires en état et fixé l'audience au 28 mars 2001.

Cette ordonnance a été notifiée aux parties ainsi qu'à leurs avocats, par lettres recommandées à la poste le 8 mars 2001.

A l'audience publique du 28 mars 2001 : - ont comparu : . Me D. Ryckbost, avocat au barreau de Bruges, pour les parties requérantes; . Me P. Van Orshoven, avocat au barreau de Bruxelles, pour le Gouvernement flamand; - les juges-rapporteurs E. De Groot et L. François ont fait rapport; - les avocats précités ont été entendus; - les affaires ont été mises en délibéré.

La procédure s'est déroulée conformément aux articles 62 et suivants de la loi organique, relatifs à l'emploi des langues devant la Cour.

III. Objet des dispositions attaquées 1. En adoptant le décret de la Région flamande du 23 janvier 1991 relatif à la protection de l'environnement contre la pollution due aux engrais (ci-après « le décret relatif aux engrais »), le législateur décrétal entendait remédier à la pollution des eaux souterraines et de surface ainsi qu'à la pollution de l'air causées par l'excédent d'engrais principalement d'origine animale, résultant de la croissance explosive du secteur de l'élevage dans la Région flamande. Dans la phase initiale, des normes ont été établies en vue de déterminer les excédents d'engrais et des limites générales de fertilisation ont été fixées de telle sorte que, au niveau de l'ensemble de la Région flamande, il n'y ait plus d'effluents d'élevage excédentaires. Il a été prévu que des limites de fertilisation plus strictes seraient fixées à terme et que la production d'effluents d'élevage pourrait au besoin être limitée. 2. Le décret de la Région flamande du 20 décembre 1995 vise à adapter le décret initial sur les engrais aux nouvelles conceptions, d'une part, et aux objectifs environnementaux, d'autre part.Le décret du 20 décembre 1995 maintient la structure de base du décret initial mais en modifie profondément le contenu. 3. La deuxième réforme fondamentale du décret sur les engrais a été réalisée par le décret du 11 mai 1999. Le renforcement ciblé des normes opéré par ce décret consiste en des normes forfaitaires de fertilisation plus sévères pour les zones dites « zones vulnérables eaux », « zones vulnérables dans les zones agricoles d'intérêt écologique » et « zones vulnérables nature » ainsi que pour les « zones saturées en phosphates ». En vue d'atténuer partiellement les effets de ces mesures, un système de contrat de gestion volontaire et d'indemnités a également été prévu pour ces zones vulnérables.

L'article 20 du décret du 11 mai 1999 a inséré dans le décret relatif aux engrais les articles 15bis à 15octies, dont les dispositions suivantes sont attaquées dans l'affaire n° 1888 : Article 15ter, § 1er : « § 1er. En vue de la conservation et du renforcement des richesses naturelles, toute forme de fertilisation est interdite à partir du 1er janvier 1998 sur les terres arables situées dans des zones naturelles, zones de développement de la nature ou réserves naturelles, telles que désignées sur les plans établis en application du décret relatif à l'aménagement du territoire, coordonné le 22 octobre 1996, à l'exclusion de la fertilisation par évacuation directe en pâturage; une charge de 2 unités de gros bétail (UGB) par ha peut être autorisée sur base annuelle, compte tenu d'un maximum de 2 UGB à tout moment, sauf durant la période du 1er juillet jusqu'au 15 septembre. Sur une parcelle inférieure à 1 ha, un maximum de 2 UGB est autorisé à tout moment, quelle que soit la superficie de la parcelle. » Article 15ter, § 2 : « § 2. Pour les entreprises qui : 1° avaient acquis en 1997 (déclaration 1998) le statut d'élevage familial de bétail, une dispense de l'interdiction visée au § 1er est accordée pour les parcelles au sein de ces zones faisant partie conformément à la déclaration sur du matériel cartographique en 1994 de la superficie de terres arables appartenant à l'entreprise pour autant : - qu'il s'agisse de champs et d'herbages intensifs; - que ces parcelles relevaient de cette dispense le 31 décembre 1998; en cas de dispense, les normes de fertilisation visées au § 8, sont d'application; 2° n'avaient pas acquis le statut d'élevage familial en 1997 (déclaration 1998), bénéficient d'une dérogation à l'interdiction visée au § 1er, jusqu'au 1er janvier 2000, pour les parcelles au sein de ces zones faisant partie conformément à la déclaration sur du matériel cartographique en 1994 de la superficie de terres arables appartenant à l'entreprise pour autant : - qu'il s'agisse de champs et d'herbages intensifs; - que ces parcelles relevaient de cette dérogation le 31 décembre 1998; en cas de dérogation, les normes de fertilisation visées au § 8, sont d'application;

Pour l'application de l'alinéa premier, il convient d'entendre par herbages intensifs, les prairies qui ne relèvent pas des définitions visées à l'article 2, alinéa deux, 49°, 50°, 51°, 52° et 53°, de prairies semi-naturelles, de prairies potentiellement importantes, de prairies Hp*, Hpr*, Hpr+Da, Hr, et de prairies Hpr*+Da, de prairies Hpr* avec des éléments de Mr, Mc, Hu et Hc.

La dérogation à l'interdiction visée au § 1er, est également accordée pour les champs et herbages intensifs au sein de ces zones qui ont été acquis par l'entreprise avant le 1er janvier 1996.

Cette dérogation est accordée jusqu'au 1er janvier 2000, pour les entreprises qui n'avaient pas acquis le statut d'élevage familial de bétail en 1997 (déclaration 1998). Pour les entreprises qui avaient acquis le statut d'élevage familial de bétail en 1997 (déclaration 1998), l'alinéa quatre s'applique par analogie.

En cas de cession de la parcelle en faveur du conjoint de l'utilisateur, ses descendants ou enfants adoptés, les descendants ou enfants adoptés de son conjoint, ou les conjoints des descendants ou enfants adoptés précités, la dispense est également transférée à titre non récurrent, à condition que la Mestbank en soit informée. La notification de la cession doit se faire dans les 6 mois suivant la date de la cession. Les cessions effectuées entre le 1er janvier 1996 et le 1er janvier 1999 doivent être notifiées avant le 1er juin 1999.

Une cession notifiée tardivement met fin à la dispense. Une cession en faveur du conjoint de l'utilisateur, au sein de la même entreprise, n'exclut pas une cession ultérieure aux descendants ou enfants adoptés précités ou à leurs conjoints. Pour la cession à des personnes autres que celles mentionnées ci-avant, la dispense d'office est abrogée. En cas de cession d'une personne physique en faveur d'une personne morale dans la relation familiale décrite ci-avant, la dispense d'office est abrogée de plein droit le 1er janvier 2010. Le Gouvernement flamand peut déterminer les modalités de notification de la cession. » Article 15ter, § 7 : « § 7. En vue de la conservation et du renforcement des richesses naturelles, toute forme de fertilisation est interdite à partir du 1er janvier 1998 sur les prairies semi-naturelles, sur les prairies potentiellement importantes, sur les prairies Hp*, Hpr*, Hp+Da, Hr ainsi que sur les prairies Hpr*+Da, des prairies Hpr* avec des éléments Mr, Mc, Hu et Hc, situées dans des zones forestières telles que désignées sur les plans établis en application du décret relatif à l'aménagement du territoire, coordonné le 22 octobre 1996, à l'exclusion de la fertilisation par évacuation directe en pâturage; une charge de 2 unités de gros bétail (UGB) par ha peut être autorisée sur base annuelle, compte tenu d'un maximum de 2 UGB à tout moment, sauf durant la période du 1er juillet jusqu'au 15 septembre. Sur une parcelle inférieure à 1 ha, un maximum de 2 UGB est autorisé à tout moment, quelle que soit la superficie de la parcelle. » Article 15septies lu conjointement avec l'article 15octies : (Art. 15septies) «

Article 15septies.Le Gouvernement flamand fixe les indemnités pour pertes de revenus, visées à l'article 15sexies, §§ 2 et 3. A cette fin, il part des objectifs et principes formulés dans le chapitre II du Titre Ier du décret du 5 avril 1995 portant des dispositions générales en matière de politique de l'environnement et des dispositions réglementaires en matière d'aménagement du territoire.

L'indemnité est fixée sur la base des éléments suivants, modulés en fonction du type d'entreprise et de la région agricole : 1° les changements de production des cultures suite aux limites de fertilisation plus strictes par rapport à l'épandage qui aurait été appliqué en vertu des normes de fertilisation forfaitaires générales, visées à l'article 14, à l'exception de l'augmentation de la norme de fertilisation de 450 à 500 kg de N/ha pour ' l'azote total ' pour des prairies;2° les frais majorés d'écoulement des engrais suite aux excédents supplémentaires dus aux limites plus strictes en matière d'utilisation d'effluents d'élevage;3° les frais de stockage majorés lorsque les effluents d'élevage doivent être stockés pendant plus de 6 mois;4° l'augmentation de l'utilisation d'engrais artificiels en raison de la restriction de l'utilisation d'effluents d'élevage;5° la diminution de la valeur d'utilisation des terrains;6° le coût augmenté d'achat d'aliments;7° la perte de patrimoine sur base de la valeur vénale. Le Gouvernement flamand peut déterminer des modalités de cumul des indemnités visées du 1° jusqu'au 7°. Le droit aux différents types d'indemnités ne peut être accordé que dans les limites budgétaires.

L'indemnité pour perte de revenus suite à des changements de production, visées à l'alinéa premier, 1°, est basée sur une méthode de calcul objective qui tient compte des changements dans la production agricole actuelle, dans le besoin de travail et les frais variables.

Afin d'entrer en ligne de compte pour ces indemnités, il est tenu compte des conditions suivantes, conformément aux modalités déterminées par le Gouvernement flamand : 1° avoir déclaré les parcelles en 1996 à la Mestbank sur du matériel cartographique tel que visé à l'article 3, § 1er, 5°, sans que la superficie entrant en ligne de compte ne puisse dépasser celle indiquée dans la déclaration de 1996;2° avoir respecté le présent décret.» (Art. 15octies) « § 1er. L'indemnité pour perte de patrimoine est fixée, à la demande de la Mestbank, par les agents de l'administration de la Taxe sur la valeur ajoutée, de l'Enregistrement et des Domaines, déclarée compétente par loi du 18 décembre 1986 habilitant l'Administration de la Taxe sur la Valeur ajoutée, de l'Enregistrement et des Domaines à réaliser certaines opérations patrimoniales pour le compte des institutions communautaires et régionales. L'indemnité pour perte de patrimoine correspond à la différence entre d'une part, la valeur du bien au moment de la cession, mais sans tenir compte de la diminution de valeur découlant des articles 15, 15bis, § 3, et 15ter, ou des mesures adoptées en vertu de ces dispositions, et d'autre part, la valeur convenue ou déclarée lors de la cession, et elle correspond au moins au montant servant de base aux droits d'enregistrement ou de succession levés sur cette cession. L'indemnité devient exigible dès que la cession porte une date définitive.

Le montant que le propriétaire reçoit de la part de la Région flamande en application du présent article, est le cas échéant diminué du montant que le propriétaire a reçu après le 1er janvier 1996 suite aux dommages résultant de la planification spatiale pour le même bien immeuble. Lorsqu'un propriétaire d'un bien immeuble fait usage de la possibilité précitée d'indemnisation de la perte de patrimoine, il ne peut réclamer pour le même bien immeuble des dommages résultant de la planification spatiale, une indemnité ou une obligation d'achat dans le chef de la Région flamande. § 2. L'indemnité pour perte de patrimoine est accordée à titre non récurrent. A cette fin, la Mestbank tient un registre de la cession de terres arables dans le cadre de la perte de patrimoine.

Si le producteur ou l'utilisateur est le propriétaire du bien immeuble à transférer, le nouveau propriétaire ne peut réclamer les indemnités visées à l'article 15septies.

Lorsque le producteur ou l'utilisateur a pris en bail le bien à céder, l'indemnité pour perte de patrimoine est versée au propriétaire. Le producteur ou l'utilisateur peut continuer de réclamer les indemnités visées à l'article 15septies.

En cas de cession du droit de bail ou du bien pris en bail en faveur du conjoint de l'utilisateur, ses descendants ou enfants adoptés, les descendants ou enfants adoptés de son conjoint, les conjoints des descendants ou enfants adoptés précités, le droit aux indemnités telles que visées à l'article 15septies, est également transféré à titre non récurrent. Une cession en faveur du conjoint de l'utilisateur n'exclut pas un droit ultérieur à l'indemnisation telle que visée à l'article 15septies, après la cession aux descendants ou aux enfants adoptés précités, ou aux conjoints de ceux-ci.

En cas de cession du bien affermé ou du droit d'utilisateur en faveur de tiers, le droit à l'indemnité telle que visée à l'article 15septies, est abrogé.

Des cessions dans le cadre de lotissements en vertu de la loi ou d'autres travaux d'infrastructure mis en oeuvre par les pouvoirs publics, pour lesquelles les terrains apportés et les nouveaux terrains acquis sont soumis aux mêmes restrictions en application des articles 15, 15bis, 15ter et 15quater, ne sont pas considérées comme des cessions au sens du présent article.

Pareilles cessions ne donnent dès lors pas lieu au versement d'une indemnité pour perte de patrimoine ni à une cessation du versement des indemnités visées à l'article 15septies. Elles ne portent aucunement préjudice à l'application des dispositions du présent article à toute autre cession.

En cas de transfert du bien vers la Région flamande à l'occasion d'une procédure d'achat obligatoire, définie aux articles 15quinquies, § 3, et 15sexies, § 4, aucune indemnité pour perte de patrimoine ne sera accordée. § 3. La demande d'obtention d'une indemnité pour perte de patrimoine doit être notifiée à la Mestbank par lettre recommandée à la poste.

Dans un délai de deux mois suivant l'envoi de la demande, la Mestbank fait savoir au demandeur si la demande entre en ligne de compte pour l'indemnisation de la perte de patrimoine; cette notification se fait par lettre recommandée.

Dans un délai de quatre mois suivant la fixation définitive du montant ayant servi de base aux droits d'enregistrement ou de succession prélevés sur la cession, l'indemnité unilatéralement fixée est notifiée au demandeur par le comité d'achat, par lettre recommandée à la poste. Dans un délai de deux mois, l'indemnité ainsi fixée est payée au demandeur par la Mestbank. § 4. Conformément aux articles 15quinquies, § 3, et 15sexies, § 4, des propriétaires de parcelles bâties ou de terres arables situées dans les zones visées aux articles 15, § 6, 15bis, § 1er et 15ter, peuvent demander l'ouverture de la procédure d'achat obligatoire, dont l'indemnité est fixée conformément aux règles de la législation en matière d'expropriation. L'indemnité à laquelle s'effectue l'achat obligatoire est fixée conformément aux règles d'indemnisation qui s'appliquent aux expropriations d'intérêt général, compte tenu de la valeur du bien aux dates de référence à déterminer, mais sans tenir compte de la diminution de valeur découlant des articles 15, § 6, 15bis, § 1er et 15ter ou des mesures adoptées sur la base de ces dispositions.

Le Gouvernement flamand peut autoriser la Société terrienne flamande à procéder à l'achat obligatoire, visé à l'alinéa premier, en son nom, pour son compte et selon les conditions déterminées par le Gouvernement.

Les biens immeubles acquis en application du présent paragraphe, qui sont situés dans les zones visées aux articles 15bis et 15ter, sont en règle générale désignés comme réserve naturelle flamande, réserve forestière ou bois domanial, ou, après cession de l'utilisation en faveur d'une association agréée de protection de l'environnement gestionnaire de terrains, agréés comme réserve naturelle. § 5. La demande d'achat obligatoire doit être notifiée à la Mestbank par lettre recommandée à la poste. Dans un délai de deux mois, la Mestbank fait savoir au demandeur, par lettre recommandée à la poste, si sa demande entre en ligne de compte pour la procédure d'achat obligatoire. § 6. A défaut de notification visée au § 5 ou lorsque la Mestbank communique que la demande n'entre pas en ligne de compte pour la procédure d'achat obligatoire ou faute de règlement à l'amiable dans un délai de douze mois à compter de la demande, le demandeur peut saisir le juge de la paix du lieu où le bien est situé d'une action en achat obligatoire. Le jugement qui établit que les exigences pour l'achat obligatoire sont remplies, entraîne le transfert de propriété.

La date du jugement tient lieu de date de référence pour la fixation de la valeur vénale du bien.

L'indemnité définitivement fixée par le juge est, en vertu du jugement et sans que celui-ci ne doive être signifié au préalable, versé par la Mestbank à la Caisse de dépôt et de consignation. Ce versement est libératoire.

Sur le seul vu du jugement et du certificat délivré après la date de transcription du jugement constatant que le bien est exempt d'hypothèque, l'agent de la Caisse de Dépôt et de Consignation est tenu de remettre le montant versé aux ayants cause si les sommes versées ne font pas l'objet d'une saisie ou d'une opposition.

Faute de présentation de cette attestation ou faute de preuve que la saisie ou l'opposition a été levée ou lorsque la décision judiciaire fixant la valeur vénale n'a pas réglé les droits respectifs du propriétaire et/ou de l'usufruitier, le paiement ne peut avoir lieu qu'en vertu d'une décision judiciaire.

Le jugement affranchit le bien obligatoirement acheté de toute requête en dissolution ou revendication, ainsi que de toutes les autres actions réelles; le droit des requérants est transféré sur la somme déterminée par le juge comme valeur vénale.

Le créancier dont la créance est garantie par une hypothèque sur un bien immeuble dont l'achat obligatoire est requis, ne peut réclamer le remboursement de l'avance de sa créance exclusivement en raison de la scission de son hypothèque ou de la répartition de son capital. » Article 15sexies, § 3 : « § 3. Pour les terres arables situées dans les zones visées aux articles 15bis et 15ter, les pertes de revenus nées de l'application des dispositions des articles 15bis et 15ter, visant à franchir des pas nouveaux en vue de l'amélioration de l'environnement, sont intégralement indemnisées conformément aux dispositions de l'article 15septies, le cas échéant, après imputation des indemnités accordées en application du décret du 21 octobre 1997 concernant la conservation de la nature et le milieu naturel. » 4. Avant même que le décret du 11 mai 1999 soit entré en vigueur, l'initiative a été prise d'adapter sur certains points les modifications qu'il apportait, ce qui a conduit au décret du 3 mars 2000 portant modification du décret du 23 janvier 1991 relatif à la protection de l'environnement contre la pollution due aux engrais. Certaines de ces adaptations ont trait à l'article 15ter du décret relatif aux engrais, c'est-à-dire au renforcement des normes visant les « zones vulnérables nature ».

L'article 9, partiellement attaqué, du décret du 3 mars 2000 est libellé comme suit : « A l'article 15ter du même décret, inséré par le décret du 11 mai 1999, sont apportées les modifications suivantes : 1. au § 1er, les mots 'toute forme de fertilisation est interdite à partir du 1er janvier 1998', sont remplacés par les mots 'toute forme de fertilisation est interdite à partir du 1er janvier 2000';2. il est ajouté au § 1er, un alinéa deux rédigé comme suit : ' Dans l'attente des plans directeurs de la nature, visés à l'article 15ter, § 5 et par dérogation à l'alinéa premier, une fertilisation supplémentaire d'au maximum 100 kg d'azote provenant d'engrais chimiques par ha et par an peut être autorisée sur les prairies potentiellement importantes, à la condition qu'elle fait l'objet d'un contrat de gestion entre l'agriculteur intéressé et la Division de la Nature d'AMINAL et la Mestbank.Ce contrat de gestion peut subordonner la période d'épandage des engrais chimiques à des conditions supplémentaires. '; 3. au § 2, alinéa premier, le 2° est remplacé par la disposition suivante : ' 2° n'avaient pas acquis le statut d'élevage familial en 1997 (déclaration 1998), et dont la production d'effluents d'élevage est inférieure à 300 kg P2 O5 dans l'année de production 1997, bénéficient d'une dérogation à l'interdiction visée au § 1er, jusqu'au 1er janvier 2002, pour les parcelles au sein de ces zones faisant partie, conformément à la déclaration sur du matériel cartographique en 1994, de la superficie de terres arables appartenant à l'entreprise pour autant : - qu'il s'agit de champs; - que ces parcelles relevaient de cette dérogation le 31 décembre 1998;

En cas de dérogation, les normes de fertilisation visées au § 8, sont d'application. '; 4. au § 2, alinéa trois, les mots ' et herbages intensifs ' sont supprimés et les mots ' 1er janvier 2000 ' sont remplacés par les mots ' 1er janvier 2002 ';5. au § 2, alinéa quatre, les mots ' Les cessions effectuées entre le 1er janvier 1996 et le 1er janvier 1999 doivent être notifiées avant le 1er juin 1999 ' sont remplacés par les mots ' Les cessions effectuées entre le 1er janvier 1996 et le 1er janvier 2000 doivent être notifiées avant le 1er juin 2000.'; [ . ] 7. au § 7, les mots ' 1er janvier 1998 ' sont remplacés par les mots ' 1er janvier 2000 ';8. il est ajouté au § 7, un alinéa deux, rédigé comme suit : ' Dans l'attente des plans directeurs de la nature, visés à l'article 15ter, § 5, une fertilisation supplémentaire d'au maximum 100 kg d'azote provenant d'engrais chimiques par ha et par an peut être autorisée sur les prairies potentiellement importantes, à la condition qu'elle fait l'objet d'un contrat de gestion entre l'agriculteur intéressé et la Division de la Nature d'AMINAL et la Mestbank.Ce contrat de gestion peut subordonner la période d'épandage des engrais chimiques à des conditions supplémentaires. ' » IV. En droit - A Quant à la recevabilité Position des requérants A.1.1. Les parties requérantes indiquent que le recours dans l'affaire n° 1888 est dirigé contre certaines dispositions du décret du 11 mai 1999 modifiant le décret du 23 janvier 1991 relatif à la protection de l'environnement contre la pollution due aux engrais et modifiant le décret du 28 juin 1985 relatif à l'autorisation écologique.Ce décret a été publié au Moniteur belge du 20 août 1999. Le recours en annulation dans l'affaire n° 1977 est dirigé contre certaines dispositions du décret du 3 mars 2000 modifiant le décret du 23 janvier 1991. Ce décret a été publié au Moniteur belge du 30 mars 2000.

Selon les parties requérantes, les deux recours sont recevables ratione temporis.

A.1.2. Les parties requérantes déclarent justifier d'un intérêt à l'annulation des dispositions attaquées.

La première partie requérante, l'a.s.b.l. De Vlaamse Landeigendom, a pour objet « la promotion et la défense des intérêts communs de tous ses membres se rapportant à leurs droits en matière immobilière au sens le plus large du terme. » Selon la première partie requérante, cet objet est suffisamment distinct de l'intérêt général et dépasse les intérêts individuels de chacun des membres de l'association. La première partie requérante justifie par conséquent de l'intérêt requis au recours en annulation.

La deuxième partie requérante est également une association sans but lucratif, à savoir la « European Landowners Organization » ou Organisation de la ruralité et du milieu européen, en abrégé ORME. Cette association sans but lucratif a, en vertu de ses statuts, un objet identique à celui de la première partie requérante, mais en y ajoutant un rayonnement européen. La deuxième partie requérante a par conséquent un intérêt évident.

Les autres parties requérantes sont propriétaires, nus-propriétaires et usufruitiers de biens immobiliers sur lesquels toute forme de fertilisation est interdite, en vertu des dispositions attaquées. Les terres deviennent par conséquent totalement impropres à n'importe quel usage et/ou subissent au moins une très forte dépréciation.

Les propriétaires, nus-propriétaires et usufruitiers sont, selon les parties requérantes, directement et défavorablement atteints dans leurs droits de propriété.

Position du Gouvernement flamand A.2.1. Le Gouvernement flamand soutient que le recours en annulation dans l'affaire n° 1977 est partiellement irrecevable.

Ainsi est demandée notamment l'annulation de l'article 15ter, § 1er, § 2 et § 7, modifié par l'article 9 du décret du 3 mars 2000. Un recours en annulation dirigé contre un décret modificatif ne peut attaquer que les modifications apportées par ce décret et non ce qui est demeuré inchangé dans les dispositions concernées. Le décret du 3 mars 2000 n'a apporté que des modifications limitées à l'article 15ter du décret sur les engrais.

Le Gouvernement flamand estime que, étant donné que les parties non modifiées du texte de l'article 15ter du décret sur les engrais ont été insérées par le décret du 11 mai 1999, le recours en annulation, qui date du 30 mai 2000, est irrecevable ratione temporis en tant qu'il poursuit l'annulation de ces dispositions non modifiées.

A.2.2.1. Selon le Gouvernement flamand, le recours est également irrecevable faute d'un intérêt. En effet, toutes les parties requérantes fondent leur intérêt sur les conséquences, pour elles ou pour ceux pour qui elles prétendent pouvoir intervenir, du renforcement des normes visant spécifiquement les « zones vulnérables nature ». En d'autres termes, toutes les parties requérantes fondent leur intérêt sur les effets de l'article 15ter du décret sur les engrais, inséré par l'article 20 du décret du 11 mai 1999 et modifié par l'article 9 du décret du 3 mars 2000, qui concernerait les parcelles de certaines d'entre elles ou de certains de leurs membres.

Selon le Gouvernement flamand, ces explications ne sont pas pertinentes.

A.2.2.2. Le Gouvernement flamand indique que les parties requérantes doivent justifier d'un intérêt à l'annulation des dispositions qu'elles sont recevables à attaquer. Les parties requérantes doivent démontrer qu'elles sont directement et défavorablement affectées par les modifications que l'article 9 du décret du 3 mars 2000 a apportées à l'article 15ter du décret sur les engrais. Un éventuel intérêt à l'annulation de l'article 15ter original, inséré par le décret du 11 mai 1999, constitue une autre question qui n'est pas à l'ordre du jour dans l'affaire n° 1977.

A.2.2.3. Par ailleurs, le Gouvernement flamand estime que les parties requérantes qui seraient éventuellement directement et défavorablement affectées par les atteintes initiales au droit de propriété découlant de l'article 15ter du décret sur les engrais ne sont pas nécessairement directement et défavorablement affectées par les modifications apportées à cet article. Le Gouvernement flamand estime que les parties requérantes dans le recours en annulation de l'affaire n° 1977 demeurent totalement en défaut sur ce point. A.2.2.4. Le Gouvernement flamand observe également que les parties requérantes souhaitent en fait que le décret sur les engrais impose des normes plus strictes. Vouloir une réglementation plus sévère signifie que la réglementation attaquée procure un avantage aux parties requérantes et que personne n'est donc lésé.

A.2.2.5. Le Gouvernement flamand soutient en dernier lieu que l'intérêt de l'a.s.b.l. De Vlaamse Landeigendom au recours en annulation du décret du 21 octobre 1997 ne signifie pas ipso facto qu'elle ait un intérêt à attaquer un autre décret. La partie requérante concernée doit donc démontrer qu'elle est directement et défavorablement affectée par les dispositions attaquées dans la présente affaire.

Réponse des parties requérantes A.3.1. Dans leur mémoire en réponse, les parties requérantes indiquent que l'article 15ter du décret sur les engrais a déjà été attaqué une première fois dans le recours en annulation n° 1888, de sorte que le recours en annulation des dispositions non modifiées de l'article 15ter peut tout de même être examiné.

Les parties requérantes estiment que le Gouvernement flamand essaie à tort de traiter séparément les modifications apportées par l'article 9 du décret du 3 mars 2000. Le Gouvernement flamand néglige le fait que les modifications apportées au décret sur les engrais par l'article 20 du décret du 11 mai 1999 et qui ont précédemment déjà été attaquées de manière recevable doivent encore être examinées par la Cour.

A.3.2.1. Les parties requérantes font aussi observer que la thèse du Gouvernement flamand, selon laquelle les parties requérantes ne suggèrent qu'une sévérité accrue du décret sur les engrais, ne peut pas être suivie. En effet, la réglementation visant à l'interdiction de fertilisation implique une limitation indue du droit de propriété, étant donné qu'il n'existe pour cela aucune justification scientifique ou politique correcte. Au contraire, les parties requérantes affirment qu'il semble que ce soit un compromis pour des normes de fertilisation généralement fort laxistes.

Les parties requérantes montrent qu'il existe suffisamment de motifs pour désigner la totalité du territoire flamand comme une zone vulnérable et que la réglementation prévoyant une interdiction de fertiliser doit donc être abandonnée. De ce point de vue, la réglementation constituerait un assouplissement pour les parties requérantes, étant donné que la réglementation qui leur est défavorable serait abrogée.

A.3.2.2. Les parties requérantes estiment, dans leur mémoire en réponse, que l'intérêt des première et deuxième parties requérantes ne peut être contesté. L'intérêt collectif invoqué par la personne morale peut être la somme des intérêts individuels des membres. Un acte qui est contraire aux intérêts des membres sera en même temps aussi contraire à l'objet de l'association. De cette manière, les première et deuxième parties requérantes justifient de l'intérêt requis.

Les parties requérantes conviennent cependant qu'admettre l'intérêt d'une personne morale dans un procédure en annulation déterminée ne lui confère pas ipso facto un intérêt pour n'importe quelle autre procédure. Dans les affaires à l'examen, les première et deuxième parties requérantes ont bien un intérêt à défendre les intérêts de leurs membres en matière de dépréciation et d'atteinte à leur patrimoine immobilier.

Quant au fond L'affaire n° 1888 Premier moyen A.4.1.1. Les parties requérantes prennent un premier moyen de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution et de l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme, considérés tant isolément qu'en combinaison avec l'article 1er du Premier Protocole additionnel à cette Convention. En effet, suite à l'article 15ter, § 1er, lu conjointement avec l'article 15ter, § 7, du décret sur les engrais, inséré par l'article 20 du décret du 11 mai 1999, une distinction est faite entre, d'une part, les terres de culture situées dans des zones forestières, des zones naturelles, des zones de développement de la nature ou des réserves naturelles, sur lesquelles toute forme de fertilisation est interdite, et, d'autre part, les zones auxquelles s'appliquent des normes de fertilisation très peu sévères.

Selon les parties requérantes, il n'existe aucune justification objective et raisonnable pour une telle division de la Flandre et les moyens utilisés ne sont pas proportionnés à l'objectif poursuivi.

A.4.1.2. Les parties requérantes affirment que la réglementation actuelle, qui divise la Flandre en zones dans lesquelles toute forme de fertilisation est interdite, d'une part, et en zones auxquelles s'appliquent des normes de fertilisation peu sévères, d'autre part, n'atteint pas l'objectif de protection de l'environnement poursuivi.

En effet, la directive 91/676/CEE du 12 décembre 1991 (appelée ci-après « directive nitrates ») impose notamment aux Etats membres la cartographie des zones vulnérables. Il ressort clairement de différentes procédures d'infraction que la Région flamande n'a pas désigné les zones vulnérables de manière correcte.

Il faut par ailleurs observer, selon les parties requérantes, que la désignation des zones auxquelles s'applique une interdiction totale de fertilisation a été opérée selon une planification basée sur la législation décrétale relative à l'aménagement du territoire et à l'urbanisme. Il n'a été tenu compte pour cela ni des sols sensibles aux nitrates ni de la charge réelle des sols. En outre, l'interdiction totale de fertilisation imposée dans certaines zones aboutit de facto à rendre toute activité agricole impossible, bien que cette interdiction de fait soit en contradiction avec les dispositions du « Schéma de structure d'aménagement de la Flandre ».

Il ressort de l'avis de la Commission européenne du 9 novembre 1999 et des études réalisées par la « Vlaamse Milieumaatschappij » que l'objectif de protection de l'environnement ne peut être atteint que si toute la Flandre est désignée comme zone vulnérable. Les parties requérantes estiment par conséquent que la division de la Flandre en zones dans lesquelles la fertilisation est totalement interdite et en zones auxquelles s'appliquent des normes de fertilisation peu sévères ne peut pas raisonnablement et objectivement se justifier et que les articles 10 et 11 de la Constitution sont donc violés.

Outre la définition non conforme des zones vulnérables, il faut également mentionner, selon les parties requérantes, que les normes de fertilisation contenues dans le décret flamand sur les engrais sont insuffisantes. Les normes générales de fertilisation applicables aux zones vulnérables dans les zones agricoles d'intérêt écologique sont manifestement moins sévères que les normes prévues dans l'annexe III de la « directive nitrates ».

Etant donné que les normes de fertilisation sur les terrains environnant certaines terres de culture sont très peu sévères, l'interdiction totale de fertilisation n'apportera aucune valeur ajoutée à l'objectif visé, disent les parties requérantes, parce que les eaux souterraines de l'ensemble du territoire se trouvent polluées en raison des normes de fertilisation peu sévères.

Si une même réglementation était appliquée à l'ensemble du territoire, conformément aux prescriptions imposées par la Commission européenne, l'on aboutirait, selon les parties requérantes, à une amélioration globale et, en outre, à une répartition égale de la charge écologique.

L'interdiction totale de fertilisation serait alors superflue, ce qui permettrait de maintenir l'usage différencié des zones concernées et de garantir leur biodiversité.

Selon les parties requérantes, il ressort de ce qui précède que l'article 15ter, § 1er, lu conjointement avec l'article 15ter, § 7, du décret sur les engrais, ne peut être raisonnablement et objectivement justifié. En effet, l'existence d'une telle justification doit s'apprécier par rapport au but et aux effets de la mesure examinée, mais les moyens utilisés ne sont pas proportionnés à l'objectif poursuivi.

A.4.1.3. Les parties requérantes font aussi valoir que l'article 15ter, § 1er, lu conjointement avec l'article 15ter, § 7, du décret sur les engrais, viole le droit au respect des biens garanti par l'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, parce que cet article ne s'applique pas seulement aux expropriations formelles, mais également aux expropriations de facto.

Les parties requérantes estiment qu'il s'agit en l'espèce d'une expropriation de fait, parce que les conséquences qui s'y attachent atteignent les personnes concernées, sur le plan économique, tout autant qu'une expropriation formelle. Pour qu'une privation de propriété soit désormais légitime, elle doit, selon les parties requérantes, remplir quatre conditions : 1) il faut toujours qu'elle poursuive un objectif d'utilité publique; 2) elle doit être conforme aux conditions prévues par la loi; 3) la mesure privative de propriété doit respecter les principes généraux du droit international et 4) il doit exister une proportionnalité raisonnable entre les moyens employés et le but visé.

Les parties requérantes soulignent qu'il n'est pas satisfait à la quatrième condition. La restriction excessive du droit de propriété conduit à une dépréciation radicale pour le propriétaire concerné, sans qu'y corresponde un bénéfice pour l'environnement. La réglementation plus sévère n'apporte par conséquent aucune valeur ajoutée à l'objectif visé.

Deuxième moyen A.4.2.1. Le deuxième moyen formulé par les parties requérantes est pris de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution et de l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme, lus tant pour eux-mêmes qu'en combinaison avec l'article 1er du Premier Protocole additionnel à cette Convention, en ce que l'article 15ter, § 2, du décret sur les engrais, inséré par l'article 20 du décret du 11 mai 1999, crée une distinction entre les entreprises familiales d'élevage de bétail et les entreprises de culture, seules les entreprises familiales d'élevage de bétail pouvant obtenir une dérogation non limitée dans le temps à l'interdiction de fertilisation.

Selon les parties requérantes, cette différence de traitement n'est susceptible d'aucune justification objective et raisonnable et les moyens utilisés ne sont pas proportionnés au but visé.

A.4.2.2. Les parties requérantes soulignent que tant le décret du 23 janvier 1991 que le projet du décret du 11 mai 1999 prévoyaient une possibilité de dispense pour les entreprises qui, pour la seule et unique raison qu'elles produisent moins de 300 kg d'anhydride phosphorique par an, n'avaient pas le statut d' » entreprise familiale d'élevage de bétail ». Après la rédaction définitive du décret du 11 mai 1999, cette possibilité de dispense illimitée a disparu.

Les parties requérantes affirment que, bien que l'objectif de protection de l'environnement contre la pollution due aux engrais soit maintenu, les moyens utilisés à cette fin se trouvent modifiés. En outre, le régime dérogatoire pour les entreprises autres que les entreprises familiales d'élevage de bétail est limité dans le temps, ce qui n'est pas le cas pour les entreprises familiales d'élevage de bétail.

Le législateur décrétal n'a motivé en aucune manière pourquoi la possibilité de dérogation à l'interdiction de fertilisation prévue à l'époque a été modifiée.

A.4.2.3. Selon les parties requérantes, l'article 15ter, § 2, du décret sur les engrais viole aussi le droit au respect des biens garanti par l'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme.

Bien que l'intervention de l'autorité ici visée ne soit pas une expropriation ou une réglementation relative à l'usage des biens, la deuxième phrase du premier alinéa de l'article 1er susdit est violée si la personne concernée n'est pas indemnisée.

Troisième moyen A.4.3.1. Les parties requérantes prennent un troisième moyen de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution et de l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme, considérés tant pour eux-mêmes qu'en combinaison avec l'article 1er du Premier Protocole additionnel à cette Convention. En effet, en vertu de l'article 15octies lu conjointement avec l'article 15septies du décret sur les engrais, insérés par l'article 20 du décret du 11 mai 1999, une indemnité pour la perte patrimoniale n'est accordée au propriétaire qu'au moment de la cession du bien et pour autant seulement que les moyens budgétaires à cette fin soient disponibles.

Selon les parties requérantes, il n'existe aucune justification raisonnable pour cette limitation de l'indemnisation, car toute perte résultant des mesures restrictives de propriété contenues dans le décret sur les engrais occasionne un dommage.

A.4.3.2. Les parties requérantes soutiennent que les propriétaires de terres qui ne procèdent pas à la vente de celles-ci se trouvent aussi confrontés à une privation de facto de leur droit de propriété. En traitant ces propriétaires autrement que les propriétaires qui souhaitent procéder à cette cession, le législateur décrétal flamand viole le principe constitutionnel d'égalité et de non-discrimination.

Selon les parties requérantes, on ne saurait nier que les deux catégories de propriétaires se trouvent dans une situation identique; elles subissent toutes deux une perte patrimoniale, suite aux normes de fertilisation renforcées dans certaines zones.

Les parties requérantes considèrent qu'il n'existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité parce que l'objectif du décret relatif aux engrais est atteint par des moyens qui sont disproportionnés.

La perte se manifeste au moment de l'entrée en vigueur des normes de fertilisation plus sévères et non au moment de la cession. En outre, le législateur décrétal n'a pas pu avoir l'intention d'obliger les propriétaires terriens, dans le cadre d'une politique générale d'acquisition, à céder les terres concernées et de renforcer ainsi le démembrement du terroir, ce qui ne favorise pas l'uniformité et l'efficience de la gestion.

A.4.3.3. L'article 15ter, § 1er, lu conjointement avec l'article 15ter, § 7, du décret sur les engrais, viole aussi, selon les parties requérantes, le droit au respect des biens. Un propriétaire peut, sur la base de l'article 1er, premier alinéa, deuxième phrase, du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, réclamer une indemnité lorsque les restrictions de l'usage qui affectent son bien doivent être qualifiées d'expropriation de fait.

De surcroît, les parties requérantes notent qu'il existe divers exemples de dispositions législatives octroyant un droit à l'indemnisation en raison des restrictions apportées au droit de propriété, sans que l'obtention de l'indemnité soit subordonnée à un transfert préalable de propriété.

Selon les parties requérantes, il peut se déduire de l'arrêt n° 50/93 de la Cour qu'il convient de déroger au principe de la non-indemnisation lorsque l'on se trouve en présence d'une expropriation de fait et que l'un des motifs pour lesquels il peut ne pas être attribué d'indemnité est la possibilité de demander une indemnité réparant un dommage exceptionnel. Il ne peut être fait usage de cette possibilité en l'espèce, parce qu'il ne s'agit pas d'un acte d'une autorité administrative.

Quatrième moyen A.4.4.1. Les parties requérantes prennent un quatrième moyen de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution et de l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme, considérés tant pour eux-mêmes qu'en combinaison avec l'article 1er du Premier Protocole additionnel à cette Convention, en ce que, en vertu des articles 15septies, juncto 15octies du décret sur les engrais, insérés par l'article 20 du décret du 11 mai 1999, le propriétaire ne peut obtenir une indemnité pour la perte de patrimoine subie que si les parcelles concernées ont été déclarées en 1996 à la « Mestbank ».

A.4.4.2. En vertu de l'article 15septies, lu conjointement avec l'article 15octies du décret sur les engrais, le propriétaire n'a pas droit à une indemnité lorsqu'aucune déclaration n'a été faite, bien que ce propriétaire subisse la même perte que le propriétaire dont les terres ont été déclarées. Les parties requérantes soulignent toutefois qu'en vertu de l'article 3, § 1er, du décret du 23 janvier 1991, c'est le producteur/fermier qui devait introduire la déclaration. Le propriétaire dont le locataire a été négligent n'a donc aucun droit à une indemnité pour la perte patrimoniale de ses biens.

Il convient en outre d'observer que si le locataire qui a obtenu une dérogation à l'interdiction de fertilisation en tant qu'entreprise familiale d'élevage de bétail souhaite mettre fin à la convention de bail, le propriétaire doit lui payer une indemnité, conformément aux articles 45 et 46 de la loi sur le bail à ferme. Toutefois, suite au comportement du fermier, le propriétaire subit une dépréciation de son patrimoine, étant donné que la dérogation à l'interdiction de fertilisation obtenue pour l'élevage familial de bétail disparaît avec la fin du bail. Le propriétaire ne peut cependant obtenir une indemnité, vu qu'il ne peut plus faire de déclaration.

Les parties requérantes soutiennent que l'article 15septies du décret sur les engrais viole le principe constitutionnel d'égalité. Il ne peut être nié que les propriétaires dont les terres n'ont pas été déclarées subissent la même perte que les propriétaires dont les terres ont été déclarées et n'ont malgré cela pas droit à une indemnité.

La perte subie doit être considérée indépendamment de la donnée matérielle que constitue la remise ou non de la déclaration. On ne peut pas partir du principe que la perte se manifeste seulement si une déclaration a été faite.

A.4.4.3. Selon les parties requérantes, les articles 15septies et 15octies combinés du décret sur les engrais violent également le droit au respect des biens.

Cinquième moyen A.4.5.1. Les parties requérantes prennent un cinquième moyen de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution et de l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme, considérés tant pour eux-mêmes qu'en combinaison avec l'article 1er du Premier Protocole additionnel à cette Convention. En vertu de l'article 15sexies, § 3, lu conjointement avec l'article 15octies du décret sur les engrais, insérés par l'article 20 du décret du 11 mai 1999, des indemnités sont seulement accordées pour des pertes de revenus nées de l'accomplissement de « nouveaux pas en vue de l'amélioration de l'environnement » allant au-delà des dispositions décrétales.

Il n'existe, selon les parties requérantes, aucune justification raisonnable pour une telle disposition, étant donné que les terres, par suite de l'interdiction totale de fertilisation imposée, deviennent en fait inutilisables, et que le propriétaire se trouve ainsi de facto empêché de prendre des mesures plus strictes.

A.4.5.2. Les parties requérantes estiment que la perte se manifeste au moment où est imposée l'interdiction totale de fertilisation et que le fait de subordonner l'octroi d'une indemnité à la conclusion d'un contrat de gestion constitue une violation du droit au respect des biens. En outre, le champ d'application des contrats de gestion est à ce point limité que l'utilisation de cette faculté et, partant, la possibilité d'indemnisation seront seulement marginales.

Il faut en outre observer, selon les parties requérantes, que le propriétaire qui loue sa terre sera, pour la conclusion d'un contrat de gestion, tributaire de son locataire pour obtenir une indemnité, alors que le propriétaire concerné dont le locataire ne conclut pas de contrat de gestion subit la même perte que le propriétaire dont le locataire conclut un contrat de gestion.

Cette différence de traitement n'est, selon les parties requérantes, susceptible d'aucune justification objective et raisonnable.

L'affaire n° 1977 Premier moyen A.6.1. Les parties requérantes prennent un premier moyen de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution et de l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme, considérés tant isolément qu'en combinaison avec l'article 1er du Premier Protocole additionnel à cette Convention, en ce que, suite à l'article 15ter, § 1er, lu conjointement avec l'article 15ter, § 7, du décret sur les engrais, insérés par l'article 9 du décret du 3 mars 2000, une distinction est faite entre, d'une part, les terres de culture situées dans des zones forestières, des zones naturelles, des zones de développement de la nature ou des réserves naturelles, sur lesquelles toute forme de fertilisation est interdite, et, d'autre part, les zones auxquelles s'appliquent des normes de fertilisation très peu sévères.

Selon les parties requérantes, il n'existe aucune justification objective et raisonnable pour une telle division de la Flandre et les moyens utilisés ne sont pas proportionnés à l'objectif poursuivi.

A.6.2. Les parties requérantes affirment que la réglementation actuelle, qui divise la Flandre en zones dans lesquelles toute forme de fertilisation est interdite, d'une part, et en zones auxquelles s'appliquent des normes de fertilisation peu sévères, d'autre part, n'atteint pas l'objectif de protection de l'environnement poursuivi.

Les parties requérantes réitèrent, contre les dispositions attaquées dans l'affaire n° 1977, le premier moyen pris dans l'affaire n° 1888, étant entendu qu'elles font maintenant également référence à l'avis de la Commission européenne du 9 novembre 1999, aux études réalisées par la « Vlaamse Milieumaatschappij » et au rapport final de la Commission européenne « Verification of Vulnerable Zones Identified under the Nitrate Directive and Sensitive Areas Identified under the Urban Waste Water Treatment Directive, Belgium, February 2000 ».

L'insertion, par l'article 9 du décret du 3 mars 2000, d'un alinéa 2 dans l'article 15ter, § 1er, et dans l'article 15ter, § 7, du décret sur les engrais n'offre pas non plus une solution au problème qui se pose, disent les parties requérantes. La dérogation visée ne vaut en effet que pour une période transitoire déterminée, jusqu'à l'établissement des plans directeurs de la nature, et pour en bénéficier il faut remplir diverses conditions.

A.7.1. Le Gouvernement flamand fait valoir que le premier moyen est irrecevable en tant qu'il est pris de la violation de l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme et de l'article 1er du Premier Protocole additionnel à cette Convention, parce que la Cour ne peut connaître que des recours en annulation dénonçant la violation des règles établies par la Constitution ou en vertu de celle-ci pour déterminer les compétences respectives de l'Etat, des communautés et des régions ou la violation des articles 10, 11 et 24 de la Constitution.

A.7.2. En ce qui concerne la différence de traitement critiquée par les parties requérantes entre les terres arables situées dans des zones naturelles, des zones de développement de la nature ou des réserves naturelles et les autres terres arables, le Gouvernement flamand fait observer que cette différence de traitement n'a pas été instaurée ni même reprise dans le décret attaqué du 3 mars 2000 mais a été instaurée par le décret du 11 mai 1999. Il doit être constaté que la disposition attaquée n'instaure pas la différence de traitement critiquée par les parties requérantes, en sorte, dit le Gouvernement flamand, que le moyen manque en fait.

A.7.3. En ordre subsidiaire, le Gouvernement flamand souligne que le choix de ne pas désigner l'ensemble du territoire de la Flandre comme zone vulnérable était une question de priorités et de possibilités. En outre, toute la Flandre n'est pas également vulnérable et la désignation de la Flandre entière comme zone vulnérable conduirait à des catastrophes socio-économiques.

C'est pourquoi, selon le Gouvernement flamand, la différence de traitement attaquée ne peut pas être qualifiée de manifestement déraisonnable. En effet, on ne peut pas oublier que le législateur décrétal dispose, sur ce plan, d'un pouvoir d'appréciation discrétionnaire, en sorte que cette appréciation ne peut être contestée devant la Cour que si elle est manifestement déraisonnable.

A.8.1. Les parties requérantes répondent que la violation des droits et libertés garantis par les dispositions du droit international peuvent entrer dans la sphère de contrôle de la Cour à la condition qu'une telle violation soit invoquée conjointement avec celle des articles 10 et 11 de la Constitution.

A.8.2. Les parties requérantes observent que le Gouvernement flamand perd de vue qu'elles ont déjà introduit une première requête en annulation contre les dispositions attaquées du décret sur les engrais, qui découlent de l'article 20 du décret du 11 mai 1999.

Compte tenu des modifications apportées à ce décret par le décret du 3 mars 2000, un nouveau recours en annulation a été introduit par requête séparée. Vu la requête introduite dans les délais dans la première procédure (affaire n° 1888), la connexité des deux affaires et leur jonction, les renvois opérés dans la seconde requête à l'argumentation développée dans la première requête ne sauraient donner lieu à une absence de fondement.

A.8.3. Dans leur mémoire en réponse, les parties requérantes font encore valoir que ce n'est pas le principe d'un renforcement des mesures en fonction des zones pour les zones vulnérables qui est contesté, mais bien le régime différent, manifestement non justifié, d'interdiction de toute fertilisation pour les zones vulnérables nature comme défini à l'article 15ter.

La nécessité de normes plus strictes pour les zones vulnérables n'est pas, selon les parties requérantes, une question de priorités pour l'autorité flamande mais découle des prescriptions de la « directive nitrates » et des constatations scientifiques établies dans ce domaine.

Il est par ailleurs trop simple d'affirmer que toute la Flandre n'est pas aussi vulnérable.

En outre, il est absolument inadmissible, selon les parties requérantes, que les normes d'interdiction de fertilisation soient utilisées comme monnaie d'échange pour des normes générales de fertilisation trop peu sévères.

Deuxième moyen A.9.1. Les parties requérantes prennent un deuxième moyen de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution et de l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme, lus tant pour eux-mêmes qu'en combinaison avec l'article 1er du Premier Protocole additionnel à cette Convention, en ce que l'article 15ter, § 2, du décret sur les engrais, inséré par l'article 9 du décret du 3 mars 2000, crée une distinction entre les entreprises familiales d'élevage de bétail et les entreprises de culture, permettant uniquement aux premières d'obtenir une dérogation à l'interdiction de fertilisation, sans limite dans le temps.

Selon les parties requérantes, cette différence de traitement n'est susceptible d'aucune justification objective et raisonnable et les moyens utilisés ne sont pas proportionnés au but visé.

A.9.2. Les parties requérantes soulignent que tant le décret du 23 janvier 1991 que le projet du décret du 11 mai 1999 prévoyaient une possibilité de dispense pour les entreprises qui, pour la seule et unique raison qu'elles produisent moins de 300 kg d'anhydride phosphorique par an, n'avaient pas le statut d' » entreprise familiale d'élevage de bétail ». Après la rédaction définitive du décret du 11 mai 1999, cette possibilité de dispense illimitée a disparu.

Les parties requérantes font observer que, bien que l'objectif de protection de l'environnement contre la pollution due aux engrais soit maintenu, les moyens utilisés à cette fin se trouvent modifiés. En outre, le régime dérogatoire pour les entreprises autres que les entreprises familiales d'élevage de bétail est limité dans le temps, ce qui n'est pas le cas pour les entreprises familiales d'élevage de bétail.

Le législateur décrétal n'a motivé en aucune manière pourquoi la possibilité de dérogation à l'interdiction de fertilisation prévue à l'époque a été modifiée.

Selon les parties requérantes, l'article 15ter, § 2, du décret sur les engrais viole aussi le droit au respect des biens garanti par l'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme.

Bien que l'intervention de l'autorité ici visée ne soit pas une expropriation ou une réglementation relative à l'usage des biens, la deuxième phrase du premier alinéa de l'article 1er susdit est violée si la personne concernée n'est pas indemnisée.

A.10.1. Le Gouvernement flamand fait valoir que le deuxième moyen est irrecevable en tant qu'il est pris de la violation de l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme et de l'article 1er du Premier Protocole additionnel à cette Convention, parce que la Cour ne peut connaître que des recours en annulation dénonçant la violation des règles établies par la Constitution ou en vertu de celle-ci pour déterminer les compétences respectives de l'Etat, des communautés et des régions ou la violation des articles 10, 11 et 24 de la Constitution.

A.10.2. En ce qui concerne la différence de traitement critiquée par les parties requérantes entre les entreprises familiales d'élevage de bétail et d'autres entreprises, le Gouvernement flamand fait observer que la différence de traitement n'a pas été instaurée ni même reprise dans le décret attaqué du 3 mars 2000 mais a été instaurée par le décret du 20 décembre 1995 modifiant le décret du 23 janvier 1991 relatif à la protection de l'environnement contre la pollution due aux engrais. Il doit être constaté que la disposition attaquée n'instaure pas la différence de traitement critiquée par les parties requérantes, en sorte, dit le Gouvernement flamand, que le moyen manque en fait.

A.10.3. En ordre subsidiaire, le Gouvernement flamand souligne que la justification de cette distinction a déjà été exposée en son temps et surtout qu'elle a été admise par la Cour dans son arrêt n° 42/97 du 14 juillet 1997.

La justification figurant dans l'article n° 42/97 est a fortiori disponible lorsqu'il s'agit d'utiliser encore cette distinction dans une mesure limitée et extinctive en tant que mesure transitoire pour les entreprises exploitées à l'intérieur des « zones vulnérables nature ». Selon le Gouvernement flamand, la différence contestée n'est pas manifestement déraisonnable.

A.11.1. Les parties requérantes répondent que la violation des droits et libertés garantis par les dispositions du droit international peuvent entrer dans la sphère de contrôle de la Cour à la condition qu'une telle violation soit invoquée conjointement avec celle des articles 10 et 11 de la Constitution.

A.11.2. Les parties requérantes font observer que la distinction attaquée entre la possibilité de dérogation offerte aux entreprises familiales d'élevage de bétail et les entreprises de culture a été prévue pour la première fois par l'article 20 du décret du 11 mai 1999 et a été modifiée ultérieurement par l'article 9 du décret du 3 mars 2000.

Ce ne sont donc pas, disent les parties requérantes, les possibilités de dérogation instaurées par le décret du 20 décembre 1995 qui sont attaquées, comme le prétend à tort le Gouvernement flamand, mais bien les modifications ultérieures apportées à ces mesures et la distinction qui a par conséquent été opérée entre les entreprises familiales d'élevage de bétail et les entreprises de culture, alors que ceci n'était pas prévu à l'origine.

A.11.3. Les parties requérantes constatent que le législateur décrétal n'a motivé en aucune manière pourquoi la possibilité de dérogation à l'interdiction de fertilisation prévue autrefois aussi bien pour les entreprises familiales d'élevage de bétail que pour les entreprises familiales de culture de facto a été modifiée en ce sens que seules les premières peuvent prétendre à une possibilité de dérogation non limitée dans le temps, alors que les entreprises de culture ne peuvent en bénéficier que jusqu'au 1er janvier 2002 au plus tard. - B - Quant à l'intérêt des parties requérantes dans l'affaire n° 1977 B.1.1. Le Gouvernement flamand estime que le recours en annulation dans l'affaire n° 1977 est partiellement irrecevable, parce qu'est demandée notamment l'annulation de l'article 15ter, §§ 1er, 2 et 7, du décret relatif aux engrais, tel qu'il est modifié par l'article 9 du décret du 3 mars 2000. Or, un recours en annulation dirigé contre un décret modificatif ne pourrait attaquer que les modifications apportées par ce décret et non ce qui est demeuré inchangé dans les dispositions en cause.

B.1.2. Le recours en annulation dans l'affaire n° 1977 est dirigé contre l'article 9 du décret du 3 mars 2000 modifiant le décret relatif aux engrais, en tant, plus précisément, qu'il modifie partiellement l'article 15ter, §§ 1er, 2 et 7. Ce décret a été publié au Moniteur belge du 30 mars 2000 et attaqué par les parties requérantes le 30 mai 2000. Vu l'article 3, § 1er, de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, le recours est recevable ratione temporis. Le recours ne porte que sur les adaptations apportées aux articles en question, ces derniers n'ayant pas été repris dans leur intégralité dans le décret attaqué.

B.2.1. Le Gouvernement flamand soutient que les parties requérantes doivent démontrer qu'elles sont directement et défavorablement affectées par les modifications que l'article 9 du décret du 3 mars 2000 a apportées à l'article 15ter, § 2, du décret relatif aux engrais.

B.2.2. L'intérêt des mêmes parties requérantes dans l'affaire n° 1888 n'est pas contesté. Les parties requérantes ont un intérêt au recours en annulation dans l'affaire n° 1977, étant donné que les dispositions attaquées leur sont applicables et sont susceptibles d'affecter défavorablement leur situation dans la mesure où ces dispositions modificatives confirment les dispositions du décret du 11 mai 1999 attaquées dans l'affaire n° 1888.

B.3.1. Le Gouvernement flamand objecte en particulier que, dans l'affaire n° 1977, les parties requérantes souhaitent en réalité que le décret relatif aux engrais impose des normes plus sévères. Demander une réglementation plus sévère signifierait que les dispositions attaquées sont avantageuses, selon les parties requérantes, et que personne ne serait donc lésé.

B.3.2. Les parties requérantes soutiennent que si l'on appliquait à l'ensemble du territoire de la Flandre les normes de fertilisation imposées par la Commission européenne, il ne serait pas nécessaire d'imposer une mesure d'interdiction totale de fertilisation dans les « zones vulnérables nature ».

Contrairement à ce que prétend le Gouvernement flamand, les parties requérantes ne souhaitent donc pas une sévérité accrue des dispositions en cause; elles observent seulement qu'un renforcement des mesures de fertilisation permettrait d'assouplir les dispositions applicables.

Les parties requérantes justifient dès lors de l'intérêt requis.

B.4.1. Dans l'affaire n° 1977, le Gouvernement flamand conteste aussi l'intérêt de l'a.s.b.l. De Vlaamse Landeigendom.

B.4.2. Il ressort des statuts de l'a.s.b.l. De Vlaamse Landeigendom que celle-ci a notamment pour objet social de « promouvoir et défendre les intérêts communs de tous ses membres en ce qui concerne leurs droits en matière immobilière au sens le plus large du terme ».

La partie requérante démontre qu'une partie au moins des propriétés de la catégorie de personnes dont son objet social est de défendre les intérêts est susceptible d'être soumise à l'interdiction totale de fertilisation. L'association a un intérêt à attaquer les restrictions au droit de propriété et les limites à l'indemnisation imposées par le décret.

B.5. Les exceptions d'irrecevabilité soulevées par le Gouvernement flamand dans l'affaire n° 1977 sont rejetées.

Quant au fond Affaires nos 1888 et 1977 En ce qui concerne l'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme B.6.1. Les parties requérantes invoquent dans tous leurs moyens la violation des articles 10 et 11 de la Constitution combinés avec l'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme.

B.6.2. La Cour examinera cette branche des moyens après l'examen de la première branche des cinq moyens formulés dans le cadre de l'affaire n° 1888. Affaire n° 1888 Premier moyen, relatif à l'article 15ter, §§ 1er et 7 B.7. Les parties requérantes invoquent la violation des articles 10 et 11 de la Constitution par l'article 15ter, §§ 1er et 7, du décret relatif aux engrais, inséré par l'article 20 du décret du 11 mai 1999, en ce qu'une distinction est faite, sur la base de ces dispositions, entre, d'une part, les terres de culture situées dans des zones forestières, des zones naturelles, des zones de développement de la nature ou des réserves naturelles, sur lesquelles toute forme de fertilisation est interdite, et, d'autre part, des zones dans lesquelles sont appliquées des normes de fertilisation très souples, alors qu'il n'existe aucune justification objective et raisonnable pour cette distinction et que les moyens utilisés ne sont pas proportionnés à l'objectif poursuivi.

B.8.1. Selon les travaux préparatoires du décret du 11 mai 1999, celui-ci vise, en exécution de l'article 14, § 5, du décret relatif aux engrais, à adapter celui-ci sur la base des résultats de l'évaluation réalisée par le Comité directeur de la problématique flamande en matière d'engrais (Doc., Conseil flamand, 1998-1999, n° 1317/1, p. 3).

Le législateur décrétal décide à cette fin de procéder, dans l'article 20 attaqué, à des renforcements des normes relatives aux engrais dans des zones déterminées, et ce dans une « Section 2 - Zones vulnérables dans des zones agricoles à intérêt écologique », formée par le nouvel article 15bis, une « Section 3 - Zones vulnérables nature », formée par le nouvel article 15ter, et une « Section 4 - Zones saturées en phosphates », formée par le nouvel article 15quater.

Cette modification a été expliquée comme suit : « Deux raisons de principe commandent que la politique des engrais généralement applicable soit renforcée en fonction des zones. En premier lieu, il existe manifestement des zones qui, en raison de la nature du sol, du type de sous-sol, de la situation hydrologique ou de l'histoire de leur fertilisation, sont beaucoup plus sensibles que d'autres à l'infiltration des phosphates ou au dégorgement des nitrates vers les eaux souterraines. Une norme plus stricte est nécessaire dans ces cas, afin que la qualité de base générale de l'environnement puisse tout de même être respectée. En second lieu, il existe des zones qui demandent une concentration moindre en nutriments, avant tout pour des raisons écologiques, en vue de diminuer et/ou de prévenir les effets d'eutrophisation indésirables » (Doc., Conseil flamand, 1998-1999, n° 1317/1, p. 80).

B.8.2. Les parties requérantes attaquent cette modification en affirmant que les nouvelles mesures n'atteindront pas l'objectif prévu par la directive européenne 91/676/CEE et que seule une norme instaurée pour l'ensemble de la Flandre pourrait y parvenir. Les parties requérantes renvoient à cet égard à un avis de la Commission européenne du 9 novembre 1999 ainsi qu'au rapport annuel de la « Vlaamse Milieumaatschappij » pour 1998.

Ni ce rapport annuel ni cet avis de la Commission (rendu dans une procédure entamée en 1994) ne démontrent que les modifications effectuées par le législateur décrétal ne seraient pas justifiées. Le législateur décrétal a d'ailleurs précisé dans l'article 13bis, non entrepris, « que l'objectif de ladite directive CE est traduit par la norme générale coordinatrice de 50 mg de nitrate/l d'eau » (Doc., Conseil flamand, 1998-1999, n° 1317/1, p. 9).

B.8.3. Il relève du pouvoir discrétionnaire du législateur décrétal de prendre en l'espèce une décision d'opportunité qui, sauf caractère déraisonnable manifeste qui n'est aucunement démontré en l'espèce, ne peut être soumise à l'appréciation de la Cour.

B.8.4. Le premier moyen, en sa première branche, n'est pas fondé.

Deuxième moyen, relatif à l'article 15ter, § 2 B.9. Les parties requérantes invoquent une violation des articles 10 et 11 de la Constitution par l'article 15ter, § 2, du décret relatif aux engrais, inséré par l'article 20 du décret du 11 mai 1999, en ce qu'une distinction est instaurée, sur la base de cette disposition, entre les entreprises familiales d'élevage de bétail et les entreprises de culture, les premières seules pouvant bénéficier aujourd'hui d'une réglementation écologique moins sévère et obtenir, en particulier, une levée de l'interdiction de fertilisation illimitée dans le temps, alors qu'il n'existe aucune justification objective et raisonnable pour cette distinction et que les moyens employés ne sont pas proportionnés à l'objectif poursuivi.

B.10.1. La distinction entre les entreprises familiales d'élevage de bétail et les autres entreprises, instaurée par le décret de 1995, est partiellement maintenue dans le décret attaqué. Des normes plus favorables sur certains points s'appliquent aux entreprises qui, en 1997, sous l'empire du décret précédent, ont obtenu le statut d'entreprise familiale d'élevage de bétail.

B.10.2. La distinction est dictée, d'une part, par les objectifs écologiques explicitement énoncés à l'article 2, alinéa 1er, du décret relatif aux engrais et, d'autre part, par des considérations socio-économiques.

La différence de traitement dénoncée est donc notamment justifiée par le souci du législateur décrétal de ne pas compromettre la viabilité des petites entreprises indépendantes disposant de moyens économiques moins importants. Il a raisonnablement pu estimer que ces entreprises sont proportionnellement moins responsables des excédents d'engrais contre lesquels le législateur décrétal veut lutter, d'autant que le problème des engrais est principalement imputé à l'industrialisation et à l'intensification de l'élevage intégré.

B.10.3. Ne change rien à ce qui précède, le fait que le décret du 11 mai 1999 a abrogé la réglementation antérieure qui prévoyait également un régime dérogatoire pour les entreprises qui n'avaient pas demandé ou n'avaient pu obtenir le statut d'entreprise familiale d'élevage de bétail pour le seul et unique motif que la production annuelle de l'entreprise doit comporter au minimum 300 kg d'anhydride phosphorique.

Toute modification d'une législation serait impossible si la Cour devait conclure à une violation du principe d'égalité sur la simple base d'une comparaison avec des réglementations antérieures.

B.10.4. Le deuxième moyen, en sa première branche, n'est pas fondé.

Troisième et quatrième moyens, relatifs à l'article 15septies, lu conjointement avec l'article 15octies B.11.1. Les parties requérantes invoquent une violation des articles 10 et 11 de la Constitution par les articles 15septies et 15octies combinés du décret relatif aux engrais, insérés par l'article 20 du décret du 11 mai 1999, en ce que, en vertu de ces dispositions, l'indemnité destinée à compenser la perte de patrimoine n'est accordée au propriétaire qu'au moment de la cession du bien, pour autant seulement que les moyens budgétaires à cette fin soient disponibles et à la condition que la parcelle concernée ait été déclarée à la « Mestbank » en 1996, alors qu'il n'existe aucune justification raisonnable pour cette limitation, étant donné que toute perte subie à la suite des mesures de restriction de la propriété contenues dans le décret relatif aux engrais occasionne un dommage.

B.11.2. La Cour constate que c'est à tort que les parties requérantes considèrent dans leur troisième moyen que l'indemnité pour perte de patrimoine réglée par l'article 15octies dépend de la disponibilité des moyens budgétaires nécessaires, comme il est prévu à l'article 15septies, alinéa 2. Cette dernière disposition s'applique uniquement à l'indemnité pour perte de revenu et non à l'indemnité pour perte de patrimoine.

B.11.3. La Cour constate également que, dans leur quatrième moyen, les parties requérantes postulent à tort que « le propriétaire ne peut obtenir une indemnité pour la perte de patrimoine subie par suite de la mise hors d'usage des terres résultant de l'interdiction totale d'épandage que si les parcelles concernées ont été déclarées en 1996 à la ` Mestbank ' ».

L'article 15septies, dernier alinéa, prévoit la condition de déclaration à la « Mestbank » pour la seule obtention d'une indemnité pour perte de revenu et non pour l'indemnité pour une perte de patrimoine.

B.11.4. Comme les parties requérantes ne contestent dans ces moyens que la réglementation de l'indemnité pour perte de patrimoine et qu'à cet égard les renvois précités à la réglementation des pertes de revenus fixée à l'article 15septies ne sont pas pertinents, la Cour rejette le quatrième moyen et limite son examen du troisième moyen à l'article 15octies, qui fixe la réglementation en matière d'indemnité pour perte de patrimoine.

B.12.1. L'article 15octies du décret relatif aux engrais vise à « indemniser le dommage subi à la suite des renforcements axés sur les zones » (Doc., Conseil flamand, 1998-1999, n° 1317/1, p. 9).

B.12.2. Le critère de distinction sur lequel est fondée la différence de traitement entre les propriétaires qui peuvent être indemnisés pour la perte de patrimoine subie et ceux qui ne le peuvent pas est le moment de la cession du bien concerné. Ce critère est objectif. Si un propriétaire qui subit une dépréciation à cause des dispositions de l'article 15, de l'article 15bis, § 3, ou de l'article 15ter du décret relatif aux engrais ou en raison des mesures prises sur la base de ces dispositions ne veut pas céder son bien, il n'a pas droit à une indemnité pour la perte de patrimoine subie.

B.12.3. Le critère de distinction est également pertinent à l'égard de l'objectif du législateur décrétal, dès lors que l'indemnité pour dépréciation se base sur la « valeur convenue ou déclarée lors de la cession, et [qu']elle correspond au moins au montant servant de base aux droits d'enregistrement ou de succession levés sur cette cession. » B.12.4. La mesure contestée n'est pas manifestement disproportionnée, dès lors que le législateur décrétal prévoit des indemnités aussi bien pour une perte de revenus que pour un dommage causé au patrimoine et que la dépréciation en cas de dommage causé au patrimoine n'est en réalité ressentie qu'au moment d'une cession. De surcroît, les propriétaires de parcelles bâties ou de terres arables situées dans les zones visées à l'article 15ter peuvent demander, conformément aux articles 15quinquies, § 3, et 15sexies, § 4, l'ouverture de la procédure d'achat obligatoire.

B.12.5. Le troisième moyen, en sa première branche, n'est pas fondé.

Cinquième moyen, relatif à l'article 15sexies, § 3 B.13.1. Les parties requérantes invoquent une violation des articles 10 et 11 de la Constitution par l'article 15sexies, § 3, lu conjointement avec l'article 15octies du décret relatif aux engrais, inséré par l'article 20 du décret du 11 mai 1999, en ce que, sur la base de cette disposition, une indemnité n'est accordée que pour les pertes de revenus résultant de l'accomplissement par le propriétaire de « progrès dans l'amélioration de l'environnement » qui vont au-delà des dispositions décrétales, alors qu'il n'existe aucune justification raisonnable pour cette limitation, étant donné que les terres sont devenues en fait inutilisables par suite de l'interdiction totale de fertilisation, et que le propriétaire se trouve ainsi de facto empêché d'accomplir de tels progrès.

B.13.2. Les parties requérantes limitent le moyen à une comparaison entre propriétaires et postulent que l'article 15sexies, § 3, renvoie à un règlement d'indemnité pour perte de revenus dans le chef du propriétaire-non-utilisateur, ce qui est contraire au contenu de cette disposition, qui ne vise une perte de revenus que dans le chef d'utilisateurs-producteurs.

B.13.3. Le moyen, en sa première branche, ne peut être retenu.

Quant aux articles 10 et 11 de la Constitution lus en combinaison avec l'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme B.14.1. Dans une seconde branche des cinq moyens, les parties requérantes invoquent la violation des articles 10 et 11 de la Constitution lus en combinaison avec l'article 1er du Premier Protocole additionnel, en ce qu'elles seraient confrontées à une expropriation de fait sans indemnisation.

B.14.2. L'article 1er du Premier Protocole additionnel dispose : « Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens.

Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international.

Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes. » B.14.3. Les parties requérantes ne démontrent pas et la Cour n'aperçoit pas en quoi les mesures litigieuses (l'interdiction d'épandage dans les zones vulnérables « nature », l'exemption partielle pour les entreprises familiales d'élevage de bétail et la cession comme condition d'octroi d'une indemnité couvrant le dommage patrimonial) pourraient être considérées comme une privation de propriété au sens de l'article 1er, alinéa 1er, du Premier Protocole additionnel.

Les mesures litigieuses doivent être considérées comme une réglementation de « l'usage des biens conformément à l'intérêt général » au sens de l'alinéa 2 du même article; en considération des éléments exposés relativement à la première branche des moyens, cette réglementation n'affecte pas de manière excessive les droits des propriétaires concernés.

B.14.4. Les cinq moyens, en leur deuxième branche, ne sont pas fondés.

Affaire n° 1977 Premier moyen, relatif aux modifications apportées à l'article 15ter, §§ 1er et 7, et à l'ajout apporté à l'article 15ter, § 1er B.15. Les parties requérantes invoquent une violation des articles 10 et 11 de la Constitution par l'article 15ter, §§ 1er et 7, du décret relatif aux engrais, inséré par l'article 9 du décret du 3 mars 2000, en ce qu'une distinction est faite, sur la base de cette disposition, entre, d'une part, les terres de culture situées dans des zones forestières, des zones naturelles, des zones de développement de la nature et des réserves naturelles, sur lesquelles toute forme de fertilisation est interdite, et, d'autre part, les zones auxquelles s'appliquent des normes de fertilisation très peu sévères, alors qu'il n'existe aucune justification objective et raisonnable pour une telle distinction et que les moyens utilisés ne sont pas proportionnés à l'objectif poursuivi.

B.16.1. Les parties requérantes avancent seulement des arguments qui concernent les modifications apportées à l'article 15ter, §§ 1er et 7, du décret relatif aux engrais par l'article 20 du décret du 11 mai 1999 et n'en avancent pas qui aient spécifiquement trait aux modifications apportées aux dispositions susdites par l'article 9 du décret du 3 mars 2000.

B.16.2. Le premier moyen ne peut être admis.

Deuxième moyen, relatif à l'article 15ter, § 2 B.17. Les parties requérantes invoquent une violation des articles 10 et 11 de la Constitution par l'article 15ter, § 2, du décret relatif aux engrais, inséré par l'article 9 du décret du 3 mars 2000, en ce qu'une distinction est instaurée, sur la base de cette disposition, entre les entreprises familiales d'élevage de bétail et les entreprises de culture, les élevages familiaux de bétail étant désormais les seuls à pouvoir obtenir une levée illimitée dans le temps de l'interdiction de fertilisation, tandis que les entreprises de culture ne peuvent obtenir une telle dérogation que jusqu'au 1er janvier 2002. Il n'existerait aucune justification objective et raisonnable pour cette distinction et les moyens utilisés ne seraient pas proportionnés à l'objectif poursuivi.

B.18.1. La Cour constate que les modifications apportées à l'article 15ter, § 2, par le décret attaqué du 3 mars 2000 sont limitées à : - (point 3) un ajout à la dérogation à l'interdiction de fertilisation jusqu'au 1er janvier 2002 pour les entreprises qui n'avaient pas acquis le statut d'entreprise familiale d'élevage de bétail et qui avaient une production d'engrais inférieure à 300 kg P2 05 au cours de l'année de production 1997; - (point 4) une prolongation de deux ans jusqu'au 1er janvier 2002 de la dérogation d'interdiction de fertilisation pour les entreprises de culture mais à l'exclusion des « herbages intensifs »; - (point 5) une prolongation d'un an, plus précisément jusqu'au 1er juin 2000, de la cession de parcelles avec dérogation à l'interdiction de fertilisation en faveur du conjoint de l'utilisateur et en faveur de certains de ses descendants.

B.18.2. En ce qui concerne ces dispositions, les parties requérantes font uniquement valoir qu'elles impliquent la confirmation de la différence de traitement précitée.

Les parties requérantes ne font pas valoir d'autres arguments que ceux qu'elles ont développés dans le deuxième moyen de l'affaire n° 1888.

B.18.3. Pour les motifs retenus lors de l'appréciation du deuxième moyen invoqué dans le cadre de l'affaire n° 1977, le moyen n'est pas fondé.

Par ces motifs, la Cour rejette les recours.

Ainsi prononcé en langue néerlandaise, en langue française et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 30 mai 2001.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux.

Le président, H. Boel.

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