Etaamb.openjustice.be
Arrêt De La Cour Constitutionelle
publié le 03 janvier 2001

Arrêt n° 133/2000 du 13 décembre 2000 Numéro du rôle : 1838 En cause : le recours en annulation des articles 41 et 42 de la loi du 4 mai 1999 portant des dispositions fiscales diverses, qui modifient l'arrêté royal n° 20 du 20 juillet 1970 fi La Cour d'arbitrage, composée des présidents M. Melchior et G. De Baets, et des juges L. Françoi(...)

source
cour d'arbitrage
numac
2000021608
pub.
03/01/2001
prom.
--
moniteur
https://www.ejustice.just.fgov.be/cgi/article_body(...)
Document Qrcode

Arrêt n° 133/2000 du 13 décembre 2000 Numéro du rôle : 1838 En cause : le recours en annulation des articles 41 et 42 de la loi du 4 mai 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 04/05/1999 pub. 12/06/1999 numac 1999003331 source ministere des finances Loi portant des dispositions fiscales diverses type loi prom. 04/05/1999 pub. 04/06/1999 numac 1999003329 source ministere des finances Loi portant des dispositions fiscales et autres fermer portant des dispositions fiscales diverses, qui modifient l'arrêté royal n° 20 du 20 juillet 1970 fixant les taux de la taxe sur la valeur ajoutée et déterminant la répartition des biens et des services selon ces taux, introduit par l'a.s.b.l. Confédération nationale de la construction et la s.a. Maes.

La Cour d'arbitrage, composée des présidents M. Melchior et G. De Baets, et des juges L. François, P. Martens, A. Arts, R. Henneuse et E. De Groot, assistée du greffier L. Potoms, présidée par le président M. Melchior, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet du recours Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 8 décembre 1999 et parvenue au greffe le 9 décembre 1999, un recours en annulation des articles 41 et 42 de la loi du 4 mai 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 04/05/1999 pub. 12/06/1999 numac 1999003331 source ministere des finances Loi portant des dispositions fiscales diverses type loi prom. 04/05/1999 pub. 04/06/1999 numac 1999003329 source ministere des finances Loi portant des dispositions fiscales et autres fermer portant des dispositions fiscales diverses (publiée au Moniteur belge du 12 juin 1999), qui modifient l'arrêté royal n° 20 du 20 juillet 1970 fixant les taux de la taxe sur la valeur ajoutée et déterminant la répartition des biens et des services selon ces taux, a été introduit par l'a.s.b.l. Confédération nationale de la construction, dont le siège social est établi à 1000 Bruxelles, rue du Lombard 39-42, et la s.a. Maes, dont le siège social est établi à 9000 Gand, Toemaattragel 1.

II. La procédure Par ordonnance du 9 décembre 1999, le président en exercice a désigné les juges du siège conformément aux articles 58 et 59 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage.

Les juges-rapporteurs ont estimé n'y avoir lieu de faire application des articles 71 ou 72 de la loi organique.

Le recours a été notifié conformément à l'article 76 de la loi organique, par lettres recommandées à la poste le 18 janvier 2000.

L'avis prescrit par l'article 74 de la loi organique a été publié au Moniteur belge du 25 janvier 2000.

Le Conseil des ministres, rue de la Loi 16, 1000 Bruxelles, a introduit un mémoire, par lettre recommandée à la poste le 16 février 2000.

Ce mémoire a été notifié conformément à l'article 89 de la loi organique, par lettre recommandée à la poste le 2 mai 2000.

Les parties requérantes ont introduit un mémoire en réponse par lettre recommandée à la poste le 2 juin 2000.

Par ordonnances du 31 mai 2000 et du 29 novembre 2000, la Cour a prorogé respectivement jusqu'aux 8 décembre 2000 et 8 juin 2001 le délai dans lequel l'arrêt doit être rendu.

Par ordonnance du 13 juillet 2000, la Cour a déclaré l'affaire en état et fixé l'audience au 25 octobre 2000.

Cette ordonnance a été notifiée aux parties ainsi qu'à leurs avocats, par lettres recommandées à la poste le 14 juillet 2000.

Par ordonnance du 24 octobre 2000, le président en exercice a constaté que le juge E. Cerexhe, légitimement empêché, est remplacé par le juge R. Henneuse.

A l'audience publique du 25 octobre 2000 : - ont comparu : . Me J.-M. Dethy, avocat au barreau de Bruxelles, pour les parties requérantes; . B. Druart, auditeur général des Finances, pour le Conseil des ministres; - les juges-rapporteurs L. François et E. De Groot ont fait rapport; - les parties précitées ont été entendues; - l'affaire a été mise en délibéré.

La procédure s'est déroulée conformément aux articles 62 et suivants de la loi organique, relatifs à l'emploi des langues devant la Cour.

III. En droit - A - Quant à l'intérêt des parties requérantes A.1.1. Les parties requérantes estiment qu'elles justifient de l'intérêt requis pour demander l'annulation de dispositions qui font bénéficier d'un taux réduit de T.V.A. égal à 6 p.c. les biens et les services livrés ou fournis par des organismes à caractère social alors que ces organismes sont, en vertu des dispositions attaquées, agréés par l'autorité compétente sur la base de critères que ces dispositions ne précisent pas et sont susceptibles d'exercer des activités au moins partiellement identiques à celles des entreprises de construction; les prestations de celles-ci étant facturées à un taux de T.V.A. de 21 p.c., les conditions normales de concurrence sont susceptibles de s'en trouver profondément affectées.

A.1.2. Le Conseil des ministres estime que l'article 4 des statuts de la Confédération nationale de la construction ne lui permet pas de défendre en justice les intérêts de ses membres et que l'acte attaqué ne porte pas atteinte aux prérogatives de cette première requérante quant à l'organisation professionnelle des entrepreneurs en cause.

Cette exception d'irrecevabilité pour défaut d'intérêt n'a évidemment de sens que si la s.a. Maes, deuxième requérante, se désistait de son recours ou tombait dans l'un des cas où une décision nouvelle quant à la poursuite de l'action devait être prise.

A.1.3. Les requérantes répliquent qu'aucun élément concret et probant n'est avancé par le Conseil des ministres, alors que l'article 4 des statuts de la première requérante vise la défense des véritables intérêts de la profession, ce qui implique la faculté d'agir en justice (comme le Conseil d'Etat l'a admis plusieurs fois) et correspond bien à la présente action, les dispositions attaquées modifiant les conditions de concurrence dans les activités en cause.

Quant au premier moyen A.2.1. Le premier moyen est pris de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution et du principe général relatif à la sécurité juridique.

Les parties requérantes exposent que les dispositions attaquées subordonnent l'application du taux de T.V.A. réduit à 6 p.c. en ce qui concerne les biens et les services livrés ou fournis par les organismes qu'elles visent à trois conditions : - l'organisme doit être reconnu conjointement par le ministre des Finances et par un ministre fédéral, régional ou communautaire compétent en la matière, comme ayant un caractère social et engagé dans des oeuvres d'assistance aux personnes déshéritées; - l'organisme doit être géré et administré par des personnes n'ayant, par elles-mêmes ou par personnes interposées, aucun intérêt financier personnel direct ou indirect dans les résultats d'exploitation; - les produits financiers générés par les livraisons de biens et les prestations de services doivent être intégralement affectés à la réalisation de l'objet social de l'organisme pour autant que ses statuts stipulent qu'en cas de liquidation la totalité de l'actif net est réinvestie dans un autre organisme reconnu.

Elles estiment que la première condition ne définit pas les critères d'appréciation de l'autorité compétente et que la troisième condition ne précise pas si l'objet social à la réalisation duquel doivent être intégralement affectés les produits financiers générés par les livraisons de biens ou prestations de services, doit être exclusivement consacré à des activités sociales ou s'il peut également viser d'autres activités.

Les dispositions en cause violent les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'elles ne fixent pas les critères objectifs de reconnaissance, de telle sorte que les administrés ne peuvent juger de leur intérêt à introduire une demande pour bénéficier de ce statut et sont, dès lors, placés dans une situation d'insécurité juridique qui est, par elle-même, source d'une discrimination contraire aux articles 10 et 11 de la Constitution.

A.2.2. Le Conseil des ministres estime que le moyen ne peut être soulevé que par les organismes pouvant bénéficier du tarif réduit, non par les professionnels qui ne peuvent invoquer l'insécurité juridique incriminée.

A.2.3. Les parties requérantes estiment que la question de l'intérêt au moyen étant indissociable de son examen, il y a lieu d'y répondre ensemble.

A.2.4. Le Conseil des ministres estime que le législateur - qui ne peut être obligé de préciser tout jusque dans les moindres détails - n'avait pas à préciser les critères auxquels la requête fait référence parce qu'ils relèvent du simple bon sens (la notion de caractère social d'un organisme - ces termes devant, à défaut de signification expresse, être entendus dans leur acception normale - et la notion de personne déshéritée), ou de questions de fait (les constatations) ou de droit (l'inscription dans les statuts). Il ne peut être question de pouvoir discrétionnaire puisque les ministres sont tenus par les éléments précités et prennent leur décision de concert (ce qui constitue une garantie supplémentaire) et sous le contrôle des cours et tribunaux.

A.2.5. Quant à la question de savoir si l'objet social peut également viser d'autres activités que les activités sociales, le Conseil des ministres estime que, l'objet social étant défini dans les statuts, c'est aux ministres compétents qu'il appartient de décider sous le contrôle des juridictions si, lorsque l'affectation à d'autres activités est permise par les statuts, cette affectation ne dénature pas l'objet social et si, le cas échéant, la reconnaissance doit être refusée. Le législateur a en outre précisé que les organismes qu'il entend faire bénéficier de la reconnaissance sont les organismes à caractère social.

A.2.6. Les parties requérantes estiment étonnante l'affirmation non motivée du Conseil des ministres selon laquelle seuls les organismes sociaux et non les professionnels sont susceptibles de bénéficier du taux réduit de la T.V.A. puisque le débat porte précisément sur l'identification des organismes susceptibles d'entrer dans le champ d'application du taux réduit de la T.V.A. La première des trois conditions n'indique pas de critère; l'on pourrait croire qu'une entreprise de construction dont les statuts prévoiraient l'obligation de maintenir, parmi son personnel, une proportion de 10 p.c., par exemple, de chômeurs de longue durée ou de chômeurs de moins de 25 ans, pourrait, sur la base d'une « appréciation de simple bon sens » ou de l' « acception courante » des termes utilisés, être considérée comme ayant un caractère social et engagée dans des oeuvres d'assistance aux personnes déshéritées. Mais il ne semble pas que cela soit le cas puisque les professionnels sont, selon le Conseil des ministres, exclus du bénéfice du régime préférentiel de la T.V.A. Quant à la troisième condition, le Conseil des ministres confond le caractère social de l'organisme (visé par la première condition) et son objet social (visé par la troisième condition et ayant vocation à définir les activités auxquelles il peut se livrer). La loi a distingué l'un de l'autre et l'on peut supposer qu'un organisme pourrait être reconnu comme ayant un caractère social alors que son objet social n'est pas exclusivement limité à des activités de nature sociale et, dès lors, bénéficier du taux réduit de la T.V.A. pour l'ensemble de ses prestations, même celles ne présentant aucun caractère social; dans une telle hypothèse, l'on n'aperçoit pas en quoi l'affectation des produits financiers générés par les livraisons de biens ou les prestations de services à la réalisation de l'objet social ainsi défini pourrait dénaturer celui-ci.

Les explications peu précises du Conseil des ministres semblent indiquer qu'y est visée (ce que confirme sa réponse au second moyen) l'hypothèse d'un organisme dont les statuts autorisent tant des activités à caractère social que d'autres activités sans toutefois limiter l'affectation des produits financiers générés par les livraisons de biens et les prestations de services à la réalisation des seules activités de caractère social. Dans ce cas de figure, il appartiendrait aux ministres compétents de décider, sous le contrôle de juridictions, si cette affectation ne dénature pas - non pas l'objet social mais - le caractère social de l'organisme. Mais une telle interprétation priverait la mesure de tout effet utile puisqu'en imposant que le produit financier des livraisons de biens et des prestations de services, sans distinguer selon qu'il provient ou non des activités mises en oeuvre dans le cadre de la « partie sociale » de l'objet social, soit exclusivement affecté à la réalisation de la « partie sociale » de l'objet social de l'organisme, l'on prive de facto celui-ci des moyens de réaliser les autres missions qui lui sont imparties par son objet social. Dans ces conditions, il ne peut en effet plus disposer d'aucune ressource pour mettre en oeuvre les autres activités prévues par son objet social.

Si l'on doit, d'une part, en conclure que l'objet social de l'organisme candidat ne peut être limité à des activités de caractère social et que, d'autre part, l'affectation des produits financiers générés par les livraisons de biens et les prestations de services peut intervenir au profit de l'ensemble des activités autorisées par l'objet social, la première condition pourrait a priori certainement être rencontrée par certaines entreprises de construction.

A.2.7. Les parties requérantes estiment que l'opinion du Conseil des ministres selon laquelle le législateur ne saurait être tenu de prévoir les moindres détails des législations qu'il adopte est contredite par des arrêtés royaux du 3 mai 1999 qui octroient aux « employeurs » une dispense de cotisations patronales et une allocation de réinsertion et définissent très précisément la notion d'employeur et les critères sur lesquels le ministre de l'Emploi et du Travail doit se fonder.

Cette absence de critère empêche les administrés d'apprécier leur intérêt à introduire une demande de reconnaissance (ce qui démontre l'intérêt des requérantes au moyen) et ne permet pas à l'autorité de prendre une décision raisonnable et fondée sur des critères identiquement applicables à chaque administré, de telle sorte qu'elle porte atteinte aux articles 10 et 11 de la Constitution et au principe général relatif à la sécurité juridique.

Quant au deuxième moyen A.3.1. Le second moyen est pris de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution.

Les parties requérantes soutiennent que les dispositions attaquées ne subordonnent le taux réduit qu'elles établissent à aucune condition quant à la nature des biens livrés ou des services fournis, lesquels ne doivent donc pas, par eux-mêmes, avoir un caractère social pour être facturés à ce taux; dès lors que l'objet social des organismes reconnus ne doit pas davantage être limité à des activités de caractère social et que ces organismes pourront par conséquent effectuer des prestations autres que celles ayant un caractère social, notamment dans le secteur de la construction, tout en bénéficiant, pour ces prestations, d'un taux réduit de la T.V.A. dont ne bénéficient pas les entreprises de construction, les dispositions attaquées établissent une discrimination contraire aux articles 10 et 11 de la Constitution.

A.3.2. Le Conseil des ministres estime que, contrairement à ce que considèrent les requérantes, les biens soumis à la T.V.A. ne peuvent avoir la nature d'activités à caractère social, celles-ci n'étant pas des activités économiques. Exiger que la loi prévoie que les biens et services aient un caractère social et imposer aux organismes reconnus que leur objet social soit limité à des activités de caractère social aboutit à empêcher ces organismes de bénéficier de la mesure et à priver celle-ci de tout effet réel.

Quant à la distorsion de concurrence, elle s'explique et se justifie par la nature de la mesure. Le but y étant inhérent, la mesure est justifiée sans qu'il soit nécessaire de l'avoir exprimé lors du processus d'élaboration de la loi.

A.3.3. Les parties requérantes répliquent que la différence de traitement critiquée ne repose pas sur un critère objectif, faute, elles l'ont dit, de se fonder sur des conditions précises, alors que les arrêtés royaux du 3 mai 1999 précités démontrent que la définition de telles conditions est possible. Celles en cause étant beaucoup plus larges, il est manifeste que le législateur n'a pas entendu limiter l'octroi du régime préférentiel de T.V.A. aux organismes répondant aux conditions prévues par ces arrêtés.

A.3.4. Selon les parties requérantes, l'objectif poursuivi par la loi attaquée - dévoilé par le Conseil des ministres, le législateur ne l'ayant pas indiqué - ne se trouve pas dans un rapport de proportionnalité avec les moyens employés : des restrictions comparables à celles prévues par les arrêtés royaux précités du 3 mai 1999 auraient permis d'atteindre un tel objectif, sans modifier les conditions concurrentielles au préjudice des entreprises de construction, dont la réduction du chiffre d'affaires pourrait entraîner des mesures de licenciement de travailleurs peu qualifiés; de plus, les organismes « à vocation sociale » ont déjà obtenu des réductions de charges patronales, des allocations de réinsertion et la faculté d'obtenir un agrément comme entrepreneur, de telle sorte que le nouvel avantage critiqué ici renforce de manière disproportionnée la distorsion de concurrence déjà créée par ces mesures. - B - B.1.1. Le Conseil des ministres, se fondant sur l'article 4 des statuts de l'a.s.b.l. Confédération nationale de la construction, conteste la recevabilité de la requête en tant qu'elle émane de cette partie requérante.

B.1.2. La Constitution et la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage imposent à toute personne physique ou morale qui introduit un recours en annulation de justifier d'un intérêt. Ne justifient de l'intérêt requis que les personnes dont la situation pourrait être affectée directement et défavorablement par la norme entreprise; il s'ensuit que l'action populaire n'est pas admissible.

Lorsqu'une association sans but lucratif se prévaut d'un intérêt collectif, il est requis que son objet social soit d'une nature particulière et, dès lors, distinct de l'intérêt général; que cet intérêt ne soit pas limité aux intérêts individuels des membres; que la norme entreprise soit susceptible d'affecter l'objet social.

B.1.3. L'article 4 des statuts précités dispose : «

Art. 4.La Confédération a pour objet : 1. De réaliser, dans un large esprit de collaboration, l'organisation professionnelle de tous les entrepreneurs relevant de l'industrie de la construction, avec la préoccupation de défendre les véritables intérêts de la profession, en conformité avec les exigences de l'intérêt général.2. D'assurer la représentation officielle des intérêts généraux de l'ensemble des industries de la construction aux points de vue juridique, économique, administratif et social et ce, vis-à-vis de toutes instances politiques, interprofessionnelles et autres, européennes, internationales, nationales et régionales.3. D'assurer la promotion économique du secteur sur les plans national, régional, local et à l'exportation.4. De promouvoir l'entente et la coordination entre les diverses branches de la construction.5. De proposer toutes mesures utiles en vue d'assurer, dans le cadre de l'intérêt général, le développement rationnel de l'activité économique des entrepreneurs confédérés.6. De renseigner les groupements confédérés sur toutes questions juridiques, économiques, administratives et sociales d'ordre général.7. De promouvoir et patronner toutes oeuvres parafédérales susceptibles de concourir au meilleur fonctionnement de l'ensemble de la profession et au bien-être de tout le personnel. Cet objet peut être réalisé de manière généralement quelconque.

La Confédération peut faire tous actes quelconques se rattachant directement ou indirectement, en tout ou en partie, à son objet ou pouvant en amener le développement ou en faciliter la réalisation.

Elle peut prêter tout concours et s'intéresser de manière généralement quelconque à des associations, entreprises et organismes ayant un objet analogue ou connexe ou pouvant aider à la réalisation ou au développement de son objet.

Le conseil national a qualité pour interpréter la nature et l'étendue de l'objet de la Confédération. » B.1.4. Dès lors que l'association sans but lucratif requérante s'est donné pour objet, notamment, de défendre les intérêts de la profession (article 4, alinéa 1er, 1) et d'assurer la représentation officielle de l'ensemble des industries de la construction, notamment au point de vue juridique (article 4, alinéa 1er, 2) et ce, de manière généralement quelconque (article 4, alinéa 2), elle est recevable à demander l'annulation de dispositions qui prévoient la possibilité d'accorder un taux réduit de T.V.A. à des organismes pouvant exercer certaines des activités des professions dont elle défend les intérêts.

L'exception est rejetée.

B.2.1. Les articles 41 et 42 de la loi du 4 mai 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 04/05/1999 pub. 12/06/1999 numac 1999003331 source ministere des finances Loi portant des dispositions fiscales diverses type loi prom. 04/05/1999 pub. 04/06/1999 numac 1999003329 source ministere des finances Loi portant des dispositions fiscales et autres fermer portant des dispositions fiscales diverses énoncent : «

Art. 41.Dans le tableau A de l'annexe à l'arrêté royal n° 20 du 20 juillet 1970 fixant les taux de la taxe sur la valeur ajoutée et déterminant la répartition des biens et des services selon ces taux, il est inséré une rubrique XXIIIbis, rédigée comme suit : ' XXIIIbis. Biens livrés par des organismes à caractère social Les livraisons de biens à l'exclusion des biens d'investissement, effectuées dans l'exercice de leur activité habituelle, par des organismes reconnus conjointement par le ministre des Finances et par un ministre fédéral, régional ou communautaire qui est compétent en la matière, comme ayant un caractère social et engagés dans des oeuvres d'assistance aux personnes déshéritées, à condition que ces organismes soient gérés et administrés par des personnes n'ayant, par elles-mêmes ou par personnes interposées, aucun intérêt financier personnel direct ou indirect dans les résultats de l'exploitation et que les produits financiers générés par ces livraisons de biens soient intégralement affectés à la réalisation de l'objet social de l'organisme reconnu pour autant que leurs statuts stipulent qu'en cas de liquidation la totalité de l'actif net est réinvesti dans un autre organisme reconnu, visé par la présente disposition.

Le ministre des Finances ou son délégué règlent les modalités d'application de la présente rubrique. '

Art. 42.Le même tableau est complété par une rubrique XXXV, rédigée comme suit : ' XXXV. - Services fournis par des organismes à caractère social Les prestations de services, effectuées dans l'exercice de leur activité habituelle, par des organismes reconnus conjointement par le ministre des Finances et par un ministre fédéral, régional ou communautaire qui est compétent en la matière, comme ayant un caractère social et engagés dans des oeuvres d'assistance aux personnes déshéritées, à condition que ces organismes soient gérés et administrés par des personnes n'ayant, par elles-mêmes ou par personnes interposées, aucun intérêt financier personnel direct ou indirect dans les résultats de l'exploitation et que les produits financiers générés par ces prestations de services soient intégralement affectés à la réalisation de l'objet social de l'organisme reconnu pour autant que leurs statuts stipulent qu'en cas de liquidation la totalité de l'actif net est réinvesti [lire : réinvestie] dans un autre organisme reconnu, visé par la présente disposition.

Le ministre des Finances ou son délégué règlent les modalités d'application de la présente rubrique. ' » Le texte ne peut se comprendre qu'en considérant les mots « pour autant que » comme introduisant une condition nouvelle par rapport aux deux autres que la disposition vient d'énoncer, et non comme apportant une restriction à celle qui la précède immédiatement.

Le tableau A de l'annexe à l'arrêté royal n° 20 précité est celui qui définit les biens et services soumis au taux de T.V.A. de 6 p.c.

B.2.2. Les dispositions attaquées ont été remplacées par celles qui figurent aux articles 1er et 2 de l'arrêté royal du 20 septembre 2000 « modifiant l'arrêté royal n° 20, du 20 juillet 1970, fixant les taux de la taxe sur la valeur ajoutée et déterminant la répartition des biens et des services selon ces taux, et abrogeant l'arrêté ministériel n° 21, du 5 mai 1999, réglant les modalités d'application des rubriques XXIIIbis et XXXV du tableau A de l'annexe à l'arrêté royal n° 20, du 20 juillet 1970, fixant les taux de la taxe sur la valeur ajoutée et déterminant la répartition des biens et des services selon ces taux, ainsi que l'arrêté ministériel, du 25 août 1999, modifiant l'arrêté ministériel n° 21, du 5 mai 1999, réglant les modalités d'application des rubriques XXIIIbis et XXXV du tableau A de l'annexe à l'arrêté royal n° 20, du 20 juillet 1970, fixant les taux de la taxe sur la valeur ajoutée et déterminant la répartition des biens et des services selon ces taux » (Moniteur belge, 28 septembre 2000, deuxième édition). Les dispositions attaquées ont néanmoins été en vigueur jusqu'à l'entrée en vigueur dudit arrêté royal et ont été exécutées par des arrêtés ministériels des 5 mai 1999 et 25 août 1999.

B.3. Les parties requérantes font valoir que les articles 41 et 42 précités violent les articles 10 et 11 de la Constitution (premier et deuxième moyens) et le « principe général relatif à la sécurité juridique » (premier moyen) en ce qu'ils ne définissent pas les critères sur la base desquels les ministres qu'ils désignent apprécient si les organismes souhaitant ainsi bénéficier d'une réduction du taux de T.V.A. de 21 à 6 p.c. ont ou non un caractère social et sont ou non engagés dans des oeuvres d'assistance aux personnes déshéritées (premier moyen), en ce qu'ils ne subordonnent le bénéfice de la réduction précitée du taux de T.V.A. ni à l'exigence que l'objet social desdits organismes soit limité à des activités de caractère social (premier et deuxième moyens) ni à l'exigence que tous les biens fournis et services prestés aient un caractère social (deuxième moyen). Les dispositions attaquées, d'une part, créeraient ainsi, selon les requérantes, une atteinte discriminatoire à la sécurité juridique en ce que les administrés ne pourraient juger de leur intérêt à introduire une demande visant à bénéficier du taux réduit et ne pourraient prévoir les effets juridiques de leurs actes (premier moyen) et, d'autre part, traiteraient les entreprises de construction de manière discriminatoire suivant qu'elles ont ou non obtenu la reconnaissance à laquelle le bénéfice du taux réduit est subordonné (deuxième moyen).

B.4. Contrairement à ce que soutiennent les parties requérantes, les dispositions attaquées contiennent bel et bien des précisions sur les conditions auxquelles est subordonnée l'application du taux réduit : - il faut que les livraisons ou prestations soient effectuées dans l'exercice de l'activité habituelle des organismes concernés, - ces organismes doivent être reconnus par deux autorités distinctes comme ayant un caractère social et comme engagés dans des oeuvres d'assistance aux personnes déshéritées, - les personnes qui gèrent ces organismes ne peuvent avoir aucun intérêt financier dans le résultat d'exploitation, - les produits financiers résultant des livraisons ou prestations doivent être affectés aux objectifs protégés.

B.5. Aucune disposition n'habilite la Cour à annuler une norme pour la seule raison qu'elle serait contraire à un « principe général relatif à la sécurité juridique ». La circonstance qu'une norme présente l'inconvénient d'entraîner une insécurité juridique peut toutefois être prise en considération au moment où se pose la question de savoir si une différence de traitement est justifiée au regard des articles 10 et 11 de la Constitution. Encore faut-il d'abord préciser quelle serait cette différence de traitement et quelles catégories de personnes seraient discriminées.

B.6. Le législateur, lorsqu'il confère une habilitation, est censé n'avoir pas voulu autoriser à violer les articles 10 et 11 de la Constitution. A supposer qu'elle soit imprécise, l'habilitation donnée aux ministres par les dispositions attaquées ne leur permet en aucune façon de déroger au principe selon lequel, lorsqu'une norme établit une différence de traitement entre certaines catégories de personnes, celle-ci doit se fonder sur une justification objective et raisonnable qui s'apprécie par rapport au but et aux effets de la norme considérée. C'est au juge judiciaire et au juge administratif qu'il appartient de censurer la décision par laquelle les ministres auraient accueilli ou rejeté la demande d'un organisme souhaitant bénéficier du taux réduit en se fondant sur une conception illégale ou discriminatoire des notions utilisées par les dispositions attaquées.

B.7.1. La différence de traitement entre les entreprises commerciales de construction et les organismes sociaux en ce qui concerne le taux de T.V.A. réduit se fonde en l'espèce sur un critère objectif, à savoir le fait même de la reconnaissance. La différence de traitement est raisonnablement justifiée par le souci d'aider des organismes de bienfaisance dans le respect de la réglementation européenne en vigueur en matière de concurrence.

Le législateur, qui entendait accorder « le bénéfice du taux réduit de T.V.A. de 6 % pour certaines activités effectuées par des organismes à caractère social (petits riens/spullenhulp, . ) » (Doc. parl., Chambre, 1998-1999, n° 1949/1, p. 19; également n° 1949/8, pp. 8, 10 et 69), a préféré, se référant à la législation européenne, prévoir une réduction du taux de T.V.A. plutôt qu'une exonération de celle-ci, ce qui avait été l'objet d'une proposition de loi antérieure (Doc. parl., Chambre, 1997-1998, n° 1592/1), afin, précisément, de tenir compte de ce que les organismes intéressés livrent des biens et prestent des services analogues à ceux livrés et prestés par des entreprises commerciales soumises à la T.V.A. : « Le ministre indique que la proposition de loi susvisée invoque l'exonération prévue par l'article 13, A, 1, g), de la sixième directive du Conseil du 17 mai 1977 en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - système commun de taxe sur la valeur ajoutée : assiette uniforme (77/388/CEE), telle que modifiée par la directive du Conseil du 16 décembre 1991 complétant le système commun de la taxe sur la valeur ajoutée et modifiant, en vue de l'abolition des frontières fiscales, la directive 77/388/CEE (91/680/CEE).

Toutefois, cette exonération ne peut être accordée que dans certaines limites et est exclue, conformément à l'article 13, A, 2, b), 2e tiret, de la même directive, lorsque les organismes visés font des opérations en concurrence directe avec des entreprises commerciales soumises à la TVA, ce qui est bien le cas ici puisque les centres de récupération s'occupent de la vente de biens d'occasion en concurrence directe avec les brocanteurs, les marchands de vêtements de seconde main, etc.

Par contre, le taux réduit de TVA de 6 % peut trouver à s'appliquer en la matière, conformément à l'article 14 de l'annexe H de la directive 92/77/CEE du Conseil du 10 octobre 1992 relative aux taux de TVA. Cet article vise en effet ' la prestation de services et la livraison de biens par des organismes reconnus comme ayant un caractère social par les Etats membres et engagés dans des oeuvres d'aide et de sécurité sociales, dans la mesure où ces prestations et services ne sont pas exonérés en vertu de l'article 13 '. » (Doc. parl., Chambre, 1998-1999, n° 1949/8, pp. 70 et 71) B.7.2. Les parties requérantes ne démontrent pas - et la Cour n'aperçoit pas - comment un déploiement normal, aux conditions fixées, des activités des organismes reconnus serait manifestement disproportionné par rapport à l'objectif fixé.

B.7.3. Les moyens sont dépourvus de fondement.

Par ces motifs, la Cour rejette le recours.

Ainsi prononcé en langue française, en langue néerlandaise et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 13 décembre 2000.

Le greffier, L. Potoms.

Le président, M. Melchior.

^