Etaamb.openjustice.be
Arrêt De La Cour Constitutionelle
publié le 02 mars 1999

Arrêt n° 127/98 du 3 décembre 1998 Numéro du rôle : 1190 En cause : les questions préjudicielles concernant l'article 75, alinéa 2, du décret de la Communauté flamande du 12 juin 1991 relatif aux universités dans la Communauté flamande, posée La Cour d'arbitrage, composée du président L. De Grève et du juge L. François, faisant fonction (...)

source
cour d'arbitrage
numac
1999021066
pub.
02/03/1999
prom.
--
moniteur
https://www.ejustice.just.fgov.be/cgi/article_body(...)
Document Qrcode

COUR D'ARBITRAGE


Arrêt n° 127/98 du 3 décembre 1998 Numéro du rôle : 1190 En cause : les questions préjudicielles concernant l'article 75, alinéa 2, du décret de la Communauté flamande du 12 juin 1991 relatif aux universités dans la Communauté flamande, posées par le Conseil d'Etat.

La Cour d'arbitrage, composée du président L. De Grève et du juge L. François, faisant fonction de président, et des juges P. Martens, J. Delruelle, E. Cerexhe, H. Coremans et A. Arts, assistée du greffier L. Potoms, présidée par le président L. De Grève, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles Par arrêt n° 69.200 du 28 octobre 1997 en cause de J. De Reuck contre l'Université de Gand, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 13 novembre 1997, le Conseil d'Etat a posé les questions suivantes : « 1. L'article 75, alinéa 2, du décret du 12 juin 1991 relatif aux universités dans la Communauté flamande viole-t-il l'article 24, § 5, de la Constitution, en tant que cette disposition habilite sans aucune restriction le gouvernement flamand à établir la liste des activités rémunérées réputées absorber une grande partie du temps d'un membre du personnel académique et ainsi être incompatibles avec une charge à plein temps ? 2. L'article 75, alinéa 2, du décret du 12 juin 1991 relatif aux universités dans la Communauté flamande viole-t-il l'égalité garantie par les articles 10, 11 et 24 de la Constitution ainsi que l'interdiction de discrimination, en tant que l'article précité établit une distinction entre, d'une part, un membre du personnel académique dont les autres activités rémunérées figurent sur une liste établie par le gouvernement flamand, de sorte que sa charge, quel que soit le volume de ces activités et donc même s'il n'excède pas deux demi-journées par semaine, devient d'office à temps partiel et, d'autre part, un membre du personnel académique dont les autres activités rémunérées, quelle qu'en soit la nature mais à condition qu'elles ne figurent pas sur la liste précitée, n'excèdent pas le volume de deux demi-jours par semaine, de sorte qu'il peut continuer à exercer sa charge à plein temps ? » II.Les faits et la procédure antérieure J. De Reuck, professeur à la faculté de médecine de l'Université de Gand, a introduit devant le Conseil d'Etat un recours en annulation de l'arrêté du conseil d'administration de cette Université, par laquelle sa charge de professeur est redéfinie avec effet au 1er octobre 1992 à 70 p.c. d'une charge à temps plein, pour cause d'incompatibilité d'une charge à temps plein avec l'exercice d'une pratique privée.

La partie requérante devant la juridiction a quo soutient que, dans la mesure où l'arrêté entrepris serait fondé sur l'article 75, alinéa 2, du décret du 12 juin 1991 relatif aux universités dans la Communauté flamande, il y a lieu de formuler des réserves concernant la conformité de cette disposition décrétale aux articles 10, 11 et 24, § 4, de la Constitution et qu'il convient de poser à ce sujet une question préjudicielle à la Cour.

Le Conseil d'Etat a décidé de poser non seulement la question susdite, mais également une question concernant la conformité de cette disposition à l'article 24, § 5, de la Constitution.

III. La procédure devant la Cour Par ordonnance du 13 novembre 1997, le président en exercice a désigné les juges du siège conformément aux articles 58 et 59 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage.

Les juges-rapporteurs ont estimé n'y avoir lieu de faire application des articles 71 ou 72 de la loi organique.

La décision de renvoi a été notifiée conformément à l'article 77 de la loi organique, par lettres recommandées à la poste le 27 novembre 1997.

L'avis prescrit par l'article 74 de la loi organique a été publié au Moniteur belge du 5 décembre 1997.

Par ordonnance du 5 janvier 1998, le président en exercice a prorogé de quinze jours le délai d'introduction d'un mémoire, à la demande du Gouvernement flamand.

Cette ordonnance a été notifiée au Gouvernement flamand par lettre recommandée à la poste le 7 janvier 1998.

Des mémoires ont été introduits par : - J. De Reuck, Rijvisschepark 16, 9052 Gand, par lettre recommandée à la poste le 5 janvier 1998; - l'Université de Gand, Sint-Pietersnieuwstraat 25, 9000 Gand, par lettre recommandée à la poste le 12 janvier 1998; - le Gouvernement flamand, place des Martyrs 19, 1000 Bruxelles, par lettre recommandée à la poste le 27 janvier 1998.

Ces mémoires ont été notifiés conformément à l'article 89 de la loi organique, par lettres recommandées à la poste le 5 février 1998.

Des mémoires en réponse ont été introduits par : - J. De Reuck, par lettre recommandée à la poste le 9 mars 1998; - l'Université de Gand, par lettre recommandée à la poste le 9 mars 1998; - le Gouvernement flamand, par lettre recommandée à la poste le 9 mars 1998.

Par ordonnances des 29 avril 1998 et 29 octobre 1998, la Cour a prorogé respectivement jusqu'aux 13 novembre 1998 et 13 mai 1999 le délai dans lequel l'arrêt doit être rendu.

Par ordonnance du 8 juillet 1998, la Cour a déclaré l'affaire en état et fixé l'audience au 30 septembre 1998.

Cette ordonnance a été notifiée aux parties ainsi qu'à leurs avocats, par lettres recommandées à la poste le 10 juillet 1998.

A l'audience publique du 30 septembre 1998, où le président M. Melchior, légitimement empêché, était remplacé par le juge L. François : - ont comparu : . Me P. Leroy, avocat au barreau de Gand, pour J. De Reuck; . Me P. De Somere loco Me P. Devers, avocats au barreau de Gand, pour l'Université de Gand; . Me D. D'Hooghe, avocat au barreau de Bruxelles, pour le Gouvernement flamand; - les juges-rapporteurs A. Arts et J. Delruelle ont fait rapport; - les avocats précités ont été entendus; - l'affaire a été mise en délibéré.

La procédure s'est déroulée conformément aux articles 62 et suivants de la loi organique, relatifs à l'emploi des langues devant la Cour.

IV. Objet de la disposition en cause A l'époque où a été prise la décision attaquée devant le Conseil d'Etat, l'article 75 du décret du 12 juin 1991 relatif aux universités dans la Communauté flamande (dénommé ci-après : décret sur les universités) disposait : « La charge d'un membre du personnel académique qui exerce une autre activité rémunérée, qui absorbe une grande partie de son temps, devient d'office une charge à temps partiel.

Sont considérées comme autres activités [rémunérées] qui absorbent une grande partie du temps, toutes les activités rémunérées dont le volume dépasse deux demi-journées par semaine ou qui figurent sur une liste établie par l'Exécutif flamand. » V. En droit - A - Mémoire de J. De Reuck A.1.1. L'article 24, § 5, de la Constitution n'interdit pas toute délégation, mais, en vertu de la jurisprudence de la Cour, le gouvernement de communauté ou une autre autorité ne peut combler l'imprécision de ces principes, ni affiner des choix politiques insuffisamment détaillés (arrêts nos 30/96 et 73/96). De même, la délégation ne peut aller jusqu'à laisser au gouvernement le soin de déterminer les règles qui sont essentielles pour l'organisation de l'enseignement (arrêt n° 43/96).

En laissant au Gouvernement flamand, sans directives précises, le soin de déterminer les activités qui donnent d'office lieu à une redéfinition d'une charge à temps plein en une charge à temps partiel, l'article 75, alinéa 2, du décret sur les universités viole l'article 24, § 5, précité de la Constitution.

A.1.2. Le législateur décrétal, à l'article 75, alinéa 2, du décret sur les universités, a établi une distinction entre les activités dont la durée ne dépasse pas deux demi-jours par semaine et les activités qui figurent sur une liste établie par le Gouvernement flamand, que leur durée soit supérieure ou non à deux demi-jours par semaine.

Il n'existe pas de critère de distinction objectif pour les diverses catégories d'activités accessoires. Le Gouvernement dispose d'un pouvoir discrétionnaire, sans que le législateur décrétal offre des garanties pour l'objectivité de ce choix.

En tout état de cause, l'exclusion d'activités qui figurent sur la liste fixée par le Gouvernement, quelle qu'en soit la durée, n'est pas proportionnée à l'objectif poursuivi par le législateur décrétal, qui consistait à faire correspondre le traitement des membres du personnel académique à la réalité. L'exercice le plus minimal d'une activité rémunérée figurant sur la liste, même en dehors des heures auxquelles l'intéressé est censé se trouver à la disposition de l'université, conduit irrévocablement à remplacer la charge à temps plein par une charge à temps partiel.

Conscient de cette disproportion, le législateur décrétal, par l'article 49 du décret du 15 décembre 1993, a ajouté à l'alinéa 2 de l'article 75 une disposition autorisant des dérogations individuelles.

En vertu de l'arrêté d'exécution du 5 mai 1993, l'université peut constater que même en cas d'exercice, durant au maximum deux demi-jours, d'une activité figurant sur la liste, la disponibilité à temps plein d'un membre du personnel académique n'est pas compromise.

La disposition originaire, qui ne prévoyait pas semblable modération, mais prévoyait radicalement la désignation à temps partiel en cas d'exercice d'une activité figurant sur la liste, même si les deux demi-jours par semaine n'étaient pas dépassés, viole le principe d'égalité inscrit aux articles 10, 11 et 24 de la Constitution.

Mémoire de l'Université de Gand A.2.1. Dans son avis relatif à l'avant-projet qui est devenu le décret sur les universités, le Conseil d'Etat n'a formulé aucune objection quant à la constitutionnalité de la disposition présentement contestée.

Selon les travaux préparatoires de l'article 75, alinéa 2, du décret sur les universités, cette disposition modifie la formulation de la réglementation existante et la complète.

L'article 21, § 4, alinéa 2, et § 6, de la loi du 28 avril 1953 portant organisation de l'enseignement universitaire par l'Etat, modifié par la loi du 21 juin 1985Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/06/1985 pub. 15/02/2012 numac 2012000076 source service public federal interieur Loi relative aux conditions techniques auxquelles doivent répondre tout véhicule de transport par terre, ses éléments ainsi que les accessoires de sécurité. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, habilitait également le Roi à fixer une liste des activités réputées absorber une grande partie du temps.

Cette délégation a été justifiée comme suit au cours des travaux préparatoires de la loi du 21 juin 1985Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/06/1985 pub. 15/02/2012 numac 2012000076 source service public federal interieur Loi relative aux conditions techniques auxquelles doivent répondre tout véhicule de transport par terre, ses éléments ainsi que les accessoires de sécurité. - Coordination officieuse en langue allemande fermer : » Il ne semble pas évident qu'une liste comprendrait dans un premier temps toutes les fonctions réellement incompatibles avec la charge à temps plein. Dès lors, ladite liste doit pouvoir être adaptée systématiquement en fonction de l'évolution des nécessités dès que ces dernières se font jour et ce, en dehors du cadre rigide de la modification légale ».

En exécution de l'article 75, modifié par le décret du 27 janvier 1993, il est non seulement accordé une délégation au Gouvernement, mais l'administration de l'université est habilitée à compléter la liste, partant de l'idée que l'administration locale est mieux placée pour évaluer l'application concrète. A fortiori, l'application concrète ne doit pas être considérée comme un aspect essentiel de l'organisation de l'enseignement universitaire.

A.2.2. La distinction évoquée dans la deuxième question préjudicielle consiste en ce que, pour une série d'activités rémunérées exercées par des membres du personnel académique, l'on établit une présomption selon laquelle leur volume dépasse en tout état de cause deux demi-jours par semaine, alors que cette présomption n'existe pas pour d'autres activités.

Le but poursuivi par cette mesure consiste à déterminer les limites de l'exercice d'activités accessoires rémunérées, en partant du principe qu'un membre du personnel ayant une charge à temps plein doit également être disponible à temps plein. Cette limitation doit également être appliquée aux activités dont le volume ne se calcule pas simplement en un nombre déterminé de demi-jours par semaine.

En l'espèce, il existe une différence objective entre les activités figurant sur une liste établie par le Gouvernement, et les autres activités qui ne figurent pas sur cette liste.

Ce n'est pas la Cour, mais la juridiction a quo qui doit examiner si le Gouvernement a utilisé des critères adéquats et proportionnés, lors de l'établissement de cette liste.

La circonstance que certaines activités soient d'office réputées représenter plus de deux demi-jours par semaine est justifiée en ce que ces activités impliquent une certaine indépendance de la part des intéressés pour ce qui est de l'organisation de leur temps et en ce qu'il est par conséquent impossible de contrôler si ces activités dépassent ou non deux demi-jours par semaine.

Etant donné que l'intéressé pouvait introduire une demande motivée basée sur la réglementation applicable à l'époque pour que l'administration de l'université accorde une dérogation et constate qu'une activité figurant sur la liste ne compromet pas la disponibilité à temps plein d'un membre déterminé du personnel académique, la distinction litigieuse résiste également au contrôle de proportionnalité.

Mémoire du Gouvernement flamand A.3.1. Le critère employé pour déterminer s'il est satisfait à la condition de légalité de l'article 24, § 5, de la Constitution, et ce pour répondre à la première question préjudicielle, est le caractère « essentiel » d'une mesure pour l'organisation, l'agrément et le subventionnement de l'enseignement.

L'article 75, alinéa 1er, du décret prévoit comme réglementation essentielle que la charge d'un membre du personnel académique qui exerce une activité rémunérée accessoire absorbant une grande partie de son temps devient d'office une charge à temps partiel.

Le critère essentiel permettant de déterminer si une activité rémunérée est compatible avec une charge à temps plein a été inscrit à l'article 21, § 6, de la loi du 28 avril 1953, modifié par l'article 22 de la loi du 21 juin 1985Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/06/1985 pub. 15/02/2012 numac 2012000076 source service public federal interieur Loi relative aux conditions techniques auxquelles doivent répondre tout véhicule de transport par terre, ses éléments ainsi que les accessoires de sécurité. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, et ultérieurement à l'article 75, alinéa 2, du décret sur les universités. Par « autres activités [rémunérées] qui absorbent une grande partie du temps », la loi comme le décret entendent « toutes les activités rémunérées dont le volume dépasse deux demi-journées par semaine ».

Ne va pas à l'encontre de cette règle, le fait d'habiliter le pouvoir exécutif à établir une liste des activités qui sont censées répondre d'office à ce critère. Cette délégation se limite à exécuter concrètement le critère de base fixé dans la loi et le décret.

Le pouvoir exécutif n'étant pas habilité à fixer les critères essentiels en vue de l'organisation de l'enseignement, l'article 24, § 5, de la Constitution n'est pas violé.

A.3.2. Le législateur fédéral, et ensuite le législateur décrétal ont entendu, d'une part, élaborer une réglementation en matière de cumul qui soit cohérente et qui puisse être imposée par les administrations des universités, et, d'autre part, prendre des mesures qui soient compatibles autant que possible avec l'autonomie accordée aux universités, notamment sur le plan de la politique du personnel.

La seconde question préjudicielle part injustement du principe qu'un membre du personnel exerçant une activité rémunérée ne dépassant pas deux demi-journées par semaine verra néanmoins d'office sa charge à temps plein modifiée en une charge à temps partiel puisque son activité figure sur la liste établie par le Gouvernement flamand.

Il ressort toutefois de l'analyse du cadre légal et ensuite décrétal qu'il n'existe aucune différence de contenu entre le cas d'un membre du personnel enseignant qui voit sa charge réduite à un temps partiel parce qu'il exerce une activité rémunérée dépassant deux demi-journées par semaine et le cas où sa charge est réduite parce qu'il exerce une activité rémunérée figurant sur la liste établie par le pouvoir exécutif. Le législateur fédéral d'abord et le législateur décrétal ensuite sont partis du principe qu'il s'agit dans les deux cas d'activités professionnelles dont le volume dépasse deux demi-journées.

Avant le décret du 27 janvier 1993, il était théoriquement possible qu'une activité rémunérée figure sur la liste établie par le Gouvernement flamand, mais qu'elle ne dépasse pas de facto deux demi-journées. Le législateur décrétal n'a pas prévu de réglementation distincte pour les cas exceptionnels où l'activité accessoire figurant sur la liste ne dépasserait pas deux demi-jours. Il n'était d'ailleurs pas obligé de le faire : la Cour admet que le législateur appréhende une diversité de situations en faisant usage de catégories qui ne correspondent aux réalités que de manière simplificatrice et approximative.

Par le décret du 27 janvier 1993, le législateur décrétal a revu sa politique. Depuis lors, la distinction est limitée au fait qu'il existe une présomption réfragable que les activités figurant sur la liste excèdent deux demi-jours.

En tant qu'il existe une distinction entre les membres du personnel académique qui voient leur charge réduite à un temps partiel parce qu'ils exercent une activité rémunérée dépassant deux demi-jours par semaine et les membres qui voient leur charge réduite à un temps partiel parce que leur activité figure sur la liste fixée par le Gouvernement flamand, l'on peut difficilement contester l'objectivité de cette distinction.

La nécessité d'employer comme critère le fait que l'activité figure ou non sur la liste est justifiée étant donné qu'il y a lieu d'appréhender une grande diversité d'activités accessoires. Il doit également être possible d'adapter facilement la liste en fonction d'incompatibilités nouvelles.

L'instauration de l'article 21, § 6, de la loi du 28 avril 1953, modifié par la loi du 21 juin 1985Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/06/1985 pub. 15/02/2012 numac 2012000076 source service public federal interieur Loi relative aux conditions techniques auxquelles doivent répondre tout véhicule de transport par terre, ses éléments ainsi que les accessoires de sécurité. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, et ultérieurement de l'article 75, alinéa 2, du décret sur les universités était justifiée, étant donné que le régime de cumul antérieur s'était avéré inopérant. Pour les universités, il était délicat de déterminer elles-mêmes les activités incompatibles avec une charge à temps plein et il était difficile d'apprécier le temps que nécessitait l'exercice de certaines professions.

En instaurant une liste d'activités incompatibles d'office, le législateur entendait garantir le caractère contraignable du régime des cumuls : les activités figurant sur la liste sont assimilées de plein droit à des activités dépassant deux demi-jours par semaine et sont dès lors incompatibles avec des charges à temps plein. Par suite de cette présomption légale, ce n'est plus aux universités d'apprécier si une activité accessoire dépasse deux demi-jours par semaine et l'intéressé doit lui-même démontrer sa disponibilité.

Il reste possible qu'une activité accessoire de plus de deux demi-jours ne figure pas sur la liste. En ce cas, il faut que l'université puisse apprécier si une telle activité est compatible avec une charge à temps plein, le critère de base étant que le membre du personnel exerçant une activité accessoire de plus de deux demi-jours voit sa charge réduite d'office à un temps partiel.

Le caractère adéquat du régime litigieux est donc établi.

La mesure est en outre proportionnée : l'intéressé dont l'activité figure sur la liste est uniquement obligé de demander une dérogation si son activité accessoire ne dépasse pas les deux demi-journées par semaine. Cet inconvénient est proportionné au résultat atteint par l'instauration de la présomption légale.

L'article 75, alinéa 2, du décret sur les universités ne viole donc pas les articles 10, 11 et 24, § 4, de la Constitution.

Mémoire en réponse de J. De Reuck A.4.1. L'Université de Gand et le Gouvernement flamand renvoient à la genèse de l'article 75, alinéa 2, du décret sur les universités pour le justifier. La disposition décrétale litigieuse ne serait qu'une reprise de dispositions législatives préexistantes.

Le texte de l'article 21, § 6, de la loi du 28 avril 1953 semble indiquer que le Roi, pour apprécier les activités, doit tenir compte du critère des deux demi-jours par semaine. L'article 75, alinéa 2, du décret sur les universités confère en revanche un pouvoir illimité au Gouvernement pour inscrire des activités dans une liste sans préciser les critères à utiliser ou sans prévoir une quelconque limitation.

Le Gouvernement peut de la sorte effectivement régler de manière autonome un aspect essentiel de la politique d'enseignement. Cela constitue une délégation interdite par l'article 24, § 5, de la Constitution.

A.4.2. Il existe bel et bien une différence de traitement entre les membres du personnel académique qui exercent des activités accessoires rémunérées dépassant deux demi-journées par semaine et les membres qui exercent des activités accessoires figurant sur la liste.

Cette liste, dont l'établissement est laissé à la discrétion du Gouvernement flamand, ne peut être utilisée comme critère de distinction général et objectif.

L'Université de Gand comme le Gouvernement flamand essaient de démontrer le caractère adéquat et proportionné du traitement inégal en renvoyant à la modification de la disposition litigieuse par l'article 25 du décret du 27 janvier 1993. Cette modification n'est toutefois pas applicable au litige dont est saisie la juridiction a quo.

Par suite de l'article 75, alinéa 2, du décret sur les universités, tel qu'il était en vigueur à l'époque de la décision entreprise, la charge à temps plein est d'office réduite dès qu'est exercée une activité figurant sur la liste, sans que l'intéressé ait la possibilité de demander une dérogation à l'administration universitaire.

La redéfinition d'office de la charge à temps plein en une charge à temps partiel, quel que soit le temps qui est absorbé par l'activité accessoire, est disproportionnée aux objectifs poursuivis par le législateur décrétal, d'autant que, pour les activités qui ne figurent pas sur la liste, les intéressés peuvent exercer leurs activités au maximum deux demi-journées par semaine.

Mémoire en réponse de l'Université de Gand A.5.1. La première question préjudicielle n'appelle aucune observation complémentaire.

A.5.2. Pour ce qui est de la deuxième question préjudicielle, l'Université de Gand souhaite ajouter ce qui suit à la lumière des mémoires de J. De Reuck et du Gouvernement flamand.

Les deux parties partent du principe que l'article 21, § 7, de la loi du 21 juin 1985Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/06/1985 pub. 15/02/2012 numac 2012000076 source service public federal interieur Loi relative aux conditions techniques auxquelles doivent répondre tout véhicule de transport par terre, ses éléments ainsi que les accessoires de sécurité. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, qui prévoyait la possibilité de renverser la présomption devant le conseil d'administration des universités, a été abrogé par l'article 75, alinéa 2, du décret sur les universités.

Même dans l'hypothèse où il ne serait prévu aucune possibilité de dérogation individuelle, la disposition litigieuse résiste au contrôle au regard du principe d'égalité.

L'instauration de la présomption irréfragable permettait de mener une politique plus uniforme.

L'on peut admettre que, dans la conception du législateur décrétal de 1991, la réglementation était justifiée parce que la liste à fixer par le Gouvernement flamand contenait uniquement les activités accessoires dont il était admis, d'un point de vue social, que l'exercice de ces activités dépasse deux demi-jours par semaine et qu'elles sont dès lors suffisamment lucratives. Cette présomption a été rendue irréfragable, excluant d'éventuels abus ou l'arbitraire des universités.

L'objectif consistant à accorder une plus grande autonomie aux universités n'a donc pas été déjà réalisé pleinement en 1991.

Après le décret de 1993, il fut à nouveau accordé plus d'autonomie aux universités, notamment pour compléter la liste établie par le Gouvernement flamand. Les deux réglementations qui ont coexisté jusqu'en 1993, à savoir l'une concernant le volume des activités de cumul et l'autre de nature financière, ont été simplifiées en retenant comme seul critère la disponibilité du personnel académique pour l'université.

La suppression du critère financier et le choix de la disponibilité comme seul critère ont eu pour conséquence que les universités elles-mêmes ont reçu plus de compétences pour apprécier cette disponibilité.

Par conséquent, la distinction litigieuse était, dans le contexte donné et eu égard à la réalité sociale, proportionnée aux objectifs consistant, d'une part, à fixer des limites uniformes pour l'exercice d'activités accessoires rémunérées et, d'autre part, à accorder une plus grande autonomie.

Mémoire en réponse du Gouvernement flamand A.6. Le Gouvernement flamand n'a rien à ajouter à son premier mémoire. - B - B.1. Les questions préjudicielles concernent la compatibilité de l'article 75, alinéa 2, du décret de la Communauté flamande du 12 juin 1991 relatif aux universités, l'une avec l'article 24, § 5, l'autre avec les articles 10, 11 et 24 de la Constitution.

B.2. L'article 75, alinéa 1er, de ce décret dispose que la charge à temps plein des membres du personnel académique est d'office remplacée par une charge à temps partiel lorsqu'ils exercent une activité accessoire « qui absorbe une grande partie de [leur] temps ». Selon l'article 75, alinéa 2, litigieux, sont visées les activités dont le volume dépasse deux demi-journées par semaine ou les activités « qui figurent sur une liste établie par le Gouvernement flamand ».

B.3. La Cour observe que ni le dossier transmis par la juridiction a quo ni les pièces destinées à la Cour ne font mention du fait que l'article 75, alinéa 2, du susdit décret relatif aux universités a été complété, avec effet rétroactif, par l'article 49 du décret du 15 décembre 1993 relatif à l'enseignement-V, qui dispose : « L'article 75, deuxième alinéa, du décret du 12 juin 1991 relatif aux universités dans la Communauté flamande, modifié par le décret du 27 janvier 1993, est complété comme suit : "Le Gouvernement flamand peut, lors de [la] détermination de la liste, fixer également les conditions et la procédure auxquelles les autorités universitaires peuvent accorder, par une décision motivée, une dérogation individuelle à un membre du personnel académique qui exerce une activité déterminée figurant dans cette liste". » B.4. Bien que l'article 75 originaire du décret relatif aux universités soit entré en vigueur le 1er octobre 1991 (article 208 du décret du 12 juin 1991) et que le remplacement intégral de cet article par l'article 25 du décret du 27 janvier 1993 soit effectif depuis le 1er octobre 1993 (article 65, 3°, du décret du 27 janvier 1993), l'ajout à l'article 75, alinéa 2, prévu par l'article 49 précité du décret du 15 décembre 1993, a été réalisé avec effet rétroactif au 1er juillet 1991 (article 55 du décret du 15 décembre 1993).

B.5. C'est la décision du 15 janvier 1993, qui a ramené la charge de l'intéressé, à compter du 1er octobre 1992, à 70 p.c. d'une charge à temps plein, qui est attaquée devant le Conseil d'Etat. Les effets juridiques de la décision entreprise se situent au cours de l'année académique 1992-1993.

B.6. Il échet de s'interroger sur le point de savoir s'il y a lieu de tenir compte ou non en l'espèce de la disposition complémentaire de l'article 49 du décret du 15 décembre 1993. La Cour observe que cette disposition a non seulement un effet rétroactif mais qu'elle implique, de surcroît, une délégation supplémentaire, dont il faut, le cas échéant, apprécier la compatibilité avec l'article 24, § 5, de la Constitution.

Dans ces conditions, il est demandé aux parties de faire connaître leur position quant à l'incidence éventuelle de cette disposition sur la constitutionnalité de l'article 75 du décret relatif aux universités.

Par ces motifs, la Cour - ordonne la réouverture des débats; - invite les parties à introduire un mémoire complémentaire pour le 15 janvier 1999 au plus tard, dont elles feront parvenir une copie aux autres parties dans le même délai.

Ainsi prononcé en langue néerlandaise et en langue française, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 3 décembre 1998.

Le greffier, L. Potoms.

Le président, L. De Grève.

^