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Arrêt De La Cour Constitutionelle
publié le 20 mai 1998

Arrêt n° 40/98 du 1er avril 1998 Numéros du rôle : 1071, 1075, 1076, 1092 et 1104 En cause : les questions préjudicielles concernant l'article 171, alinéa 2, de la loi-programme du 22 décembre 1989, posées par les Tribunaux du travail d'Anver La Cour d'arbitrage, composée des présidents L. De Grève et M. Melchior, et des juges H. Boel, (...)

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COUR D'ARBITRAGE


Arrêt n° 40/98 du 1er avril 1998 Numéros du rôle : 1071, 1075, 1076, 1092 et 1104 En cause : les questions préjudicielles concernant l'article 171, alinéa 2, de la loi-programme du 22 décembre 1989Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 22/12/1989 pub. 14/11/2011 numac 2011000693 source service public federal interieur Loi-programme fermer, posées par les Tribunaux du travail d'Anvers, de Termonde, section de Saint-Nicolas, et de Gand.

La Cour d'arbitrage, composée des présidents L. De Grève et M. Melchior, et des juges H. Boel, L. François, J. Delruelle, H. Coremans et M. Bossuyt, assistée du greffier L. Potoms, présidée par le président L. De Grève, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles a. Par jugement du 12 mars 1997 en cause de L.Ide contre la s.a.

Coulier Marcel, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 19 mars 1997, le Tribunal du travail d'Anvers a posé les questions préjudicielles suivantes : « L'article 171, alinéa 2, de la loi-programme du 22 décembre 1989Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 22/12/1989 pub. 14/11/2011 numac 2011000693 source service public federal interieur Loi-programme fermer viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution, combinés le cas échéant avec l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, en tant : - que cette disposition établit une distinction entre les employeurs qui ont méconnu l'obligation de publicité contenue aux articles 157 à 159 de cette même loi et tous les autres employeurs, en ce que les employeurs cités en premier lieu sont irréfragablement présumés avoir occupé leurs travailleurs à temps plein, avec pour conséquence qu'ils sont tenus de payer à ces travailleurs une rémunération comme si des prestations de travail à temps plein avaient été fournies indépendamment de la durée réelle de ces prestations, alors que d'autres employeurs ne sont tenus au paiement de la rémunération que proportionnellement au travail réellement presté et peuvent toujours fournir la preuve du volume réel de ce travail ? - que cette disposition inflige une sanction identique à tous les employeurs qui ont méconnu l'obligation de publicité des horaires visée aux articles 157 à 159, sans opérer une distinction selon que ces employeurs ont ou n'ont pas fait auprès de l'O.N.S.S. et du fisc la déclaration correcte du travail réellement presté par leurs travailleurs ? - que cette disposition établit une distinction entre les travailleurs occupés à temps partiel d'un employeur qui a méconnu l'obligation de publicité des horaires visée aux articles 157 à 159 de la loi-programme et les autres travailleurs occupés à temps partiel en ce que les travailleurs cités en premier lieu peuvent prétendre au paiement d'une rémunération comme s'ils avaient fourni des prestations de travail à temps plein alors que d'autres travailleurs occupés à temps partiel ne peuvent prétendre qu'à une rémunération proportionnelle au travail réellement presté ? » Cette affaire est inscrite sous le numéro 1071 du rôle de la Cour. b. Par jugement du 19 mars 1997 en cause de S.Maes contre la s.p.r.l.

Apotheek Ameloot, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 27 mars 1997, le Tribunal du travail de Termonde, section de Saint-Nicolas, a posé la question préjudicielle suivante : « L'article 171 de la loi-programme du 22 décembre 1989Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 22/12/1989 pub. 14/11/2011 numac 2011000693 source service public federal interieur Loi-programme fermer viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution en tant qu'il instaure une présomption irréfragable en vertu de laquelle à défaut de publicité des horaires, les travailleurs à temps partiel sont présumés avoir effectué des prestations dans le cadre d'un contrat de travail à temps plein et ont dès lors droit à un salaire pour prestations à temps plein ? » Cette affaire est inscrite sous le numéro 1075 du rôle de la Cour. c. Par jugement du 25 mars 1997 en cause de l'Office national de sécurité sociale contre A.Steinmetz, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 1er avril 1997, le Tribunal du travail d'Anvers a posé la question préjudicielle suivante : « L'article 171 de la loi-programme du 22 décembre 1989Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 22/12/1989 pub. 14/11/2011 numac 2011000693 source service public federal interieur Loi-programme fermer, modifié par l'article 112 de la loi du 20 juillet 1991 portant des dispositions sociales et diverses, interprété en ce sens que la présomption d'occupation dans le cadre d'un contrat de travail à temps plein est irréfragable, viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution et/ou l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ? » Cette affaire est inscrite sous le numéro 1076 du rôle de la Cour. d. Par jugement du 12 mai 1997 en cause de l'Office national de sécurité sociale contre M.De Pessemier et M. De Pessemier contre l'Office national de sécurité sociale, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 20 mai 1997, le Tribunal du travail de Gand a posé la question préjudicielle suivante : « L'article 171, alinéa 2, de la loi-programme du 22 décembre 1989Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 22/12/1989 pub. 14/11/2011 numac 2011000693 source service public federal interieur Loi-programme fermer, modifié par l'article 112 de la loi du 20 juillet 1991 portant des dispositions sociales et diverses et applicable depuis l'entrée en vigueur de la susdite disposition jusqu'au 30 avril 1997, est-il contraire aux articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'il dispose qu'à défaut de publicité des horaires au sens des articles 157 à 159 de la même loi, les travailleurs seront présumés avoir effectué leurs prestations dans le cadre d'un contrat de travail à temps plein sans que la preuve du contraire puisse être apportée, alors que dans la même hypothèse les mêmes travailleurs sont présumés avoir fourni leurs prestations dans le cadre d'un contrat de travail à temps plein mais sans que soit exclue la preuve du contraire lorsque l'occupation a eu lieu au cours de la période qui a précédé l'entrée en vigueur de l'article 161 de la susdite loi du 20 juillet 1991 et à nouveau pendant la période prenant cours le 1er mai 1997 ? » Cette affaire est inscrite sous le numéro 1092 du rôle de la Cour. e. Par jugement du 10 juin 1997 en cause de J.Buitendijk contre la s.a. Booy Clean Belgium et J. Buitendijk contre la s.a. Booy Clean Wallonie, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 19 juin 1997, le Tribunal du travail d'Anvers a posé les questions préjudicielles suivantes : « L'article 171, alinéa 2, de la loi-programme du 22 décembre 1989Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 22/12/1989 pub. 14/11/2011 numac 2011000693 source service public federal interieur Loi-programme fermer, tel qu'il a été modifié par l'article 112 de la loi du 20 juillet 1991 portant des dispositions sociales et diverses, viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution, en tant : - que cette disposition établit une distinction entre les employeurs qui ont méconnu l'obligation de publicité contenue aux articles 157 à 159 de cette même loi et tous les autres employeurs, en ce que les employeurs cités en premier lieu sont irréfragablement présumés avoir occupé leurs travailleurs à temps plein, avec pour conséquence qu'ils sont tenus de payer à ces travailleurs une rémunération comme si des prestations de travail à temps plein avaient été fournies indépendamment de la durée réelle de ces prestations, alors que d'autres employeurs ne sont tenus au paiement de la rémunération que proportionnellement au travail réellement presté et peuvent toujours fournir la preuve du volume réel de ce travail ? - que cette disposition inflige une sanction identique à tous les employeurs qui ont méconnu l'obligation de publicité des horaires visée aux articles 157 à 159, sans opérer une distinction selon que ces employeurs ont ou n'ont pas fait auprès de l'O.N.S.S. et du fisc la déclaration correcte du travail réellement presté par leurs travailleurs ? - que cette disposition établit une distinction entre les travailleurs occupés à temps partiel d'un employeur qui a méconnu l'obligation de publicité des horaires visée aux articles 157 à 159 de la loi-programme et les autres travailleurs occupés à temps partiel en ce que les travailleurs cités en premier lieu peuvent prétendre au paiement d'une rémunération comme s'ils avaient fourni des prestations de travail à temps plein alors que d'autres travailleurs occupés à temps partiel ne peuvent prétendre qu'à une rémunération proportionnelle au travail réellement presté ? » Cette affaire est inscrite sous le numéro 1104 du rôle de la Cour.

II. Les faits et les procédures antérieures Affaire portant le numéro 1071 du rôle Du 1er juillet 1989 au 5 juillet 1993, L. Ide a fourni des prestations de travail à temps partiel au service de la s.a. Coulier Marcel. Le 15 juin 1994, elle assigna cette société devant le Tribunal du travail d'Anvers en vue du paiement d'une indemnité de préavis et d'un arriéré de salaire et en vue du dépôt de tous les documents sociaux et fiscaux nécessaires. Elle fonde notamment son action sur l'article 171 de la loi-programme du 22 décembre 1989Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 22/12/1989 pub. 14/11/2011 numac 2011000693 source service public federal interieur Loi-programme fermer. Le Tribunal du travail constate que cet article établit la présomption irréfragable que la demanderesse, depuis l'entrée en vigueur de la loi-programme jusqu'à la fin de son occupation, a exécuté ses prestations dans le cadre d'un contrat de travail à temps plein. Avant de statuer au fond, le Tribunal du travail pose les questions préjudicielles précitées.

Affaire portant le numéro 1075 du rôle Du 18 août 1995 au 14 septembre 1995, S. Maes était occupée par la s.p.r.l. Apotheek Ameloot en vertu d'un contrat de travail verbal. Le 8 février 1996, elle assigna cette société devant le Tribunal du travail de Termonde, section de Saint-Nicolas, en vue du paiement d'un arriéré de salaire et d'autres indemnités. La défenderesse conteste que la demanderesse ait exécuté des prestations à temps plein. La demanderesse se fonde notamment sur la présomption irréfragable de prestations de travail à temps plein inscrite à l'article 171 de la loi-programme du 22 décembre 1989Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 22/12/1989 pub. 14/11/2011 numac 2011000693 source service public federal interieur Loi-programme fermer. Avant de statuer sur la demande, le Tribunal du travail pose la question préjudicielle précitée.

Affaire portant le numéro 1076 du rôle Du 10 janvier 1992 au 8 décembre 1992, A. Steinmetz a occupé un travailleur à temps partiel sans mentionner d'horaire dans le contrat de travail ou dans le règlement de travail et sans communiquer des horaires de travail journaliers cinq jours à l'avance. Le 18 juillet 1995, l'Office national de sécurité sociale (O.N.S.S.) assigna A. Steinmetz devant le Tribunal du travail d'Anvers en vue du paiement d'arriérés de cotisations pour la période concernée. L'O.N.S.S. fonde notamment son action sur la présomption irréfragable d'occupation à temps plein inscrite à l'article 171 de la loi-programme du 22 décembre 1989Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 22/12/1989 pub. 14/11/2011 numac 2011000693 source service public federal interieur Loi-programme fermer. Avant de statuer au fond, le Tribunal du travail pose la question préjudicielle précitée.

Affaire portant le numéro 1092 du rôle M. De Pessemier exploite un hôtel dans lequel, en date du 14 février 1995, il a été constaté au cours d'un contrôle effectué par l'inspection du travail que deux travailleuses fournissaient des prestations sans être mentionnées dans le registre du personnel et sans qu'une copie du contrat de travail à temps partiel fût conservée à l'endroit où le règlement de travail peut être consulté. Le 29 janvier 1996, l'O.N.S.S. assigna M. De Pessemier devant le Tribunal du travail de Gand en vue du paiement des arriérés de cotisations pour les trimestres 93/3 à 95/1 et des cotisations sur pécule de vacances pour les années 1993 et 1994. L'O.N.S.S. se fonde notamment sur la présomption irréfragable de travail à temps plein inscrite à l'article 171 de la loi-programme du 22 décembre 1989Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 22/12/1989 pub. 14/11/2011 numac 2011000693 source service public federal interieur Loi-programme fermer. Le Tribunal du travail renvoie tout d'abord aux trois questions préjudicielles déjà posées par le Tribunal du travail d'Anvers par jugement du 12 mars 1997, mais estime qu'une différence de traitement supplémentaire doit être soumise à l'appréciation de la Cour. Il pose ensuite la question préjudicielle précitée.

Affaire portant le numéro 1104 du rôle Le 1er mars 1991, J. Buitendijk conclut deux contrats de travail distincts avec la s.a. Booy Clean Belgium et avec la s.a. Booy Clean Wallonie, par lesquels il fut désigné en qualité de directeur des deux sociétés, à mi-temps. Les horaires ne furent pas repris dans ces contrats et ne furent pas publiés. Le 31 août 1994, les sociétés mirent fin unilatéralement aux contrats de travail. Le 27 octobre 1994, J. Buitendijk assigna les deux sociétés devant le Tribunal du travail d'Anvers en vue du paiement d'une indemnité de préavis, d'arriérés de salaire et du pécule de vacances et en vue du dépôt des documents sociaux et fiscaux nécessaires. Il se fonde sur la présomption irréfragable de travail à temps plein inscrite à l'article 171 de la loi-programme du 22 décembre 1989Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 22/12/1989 pub. 14/11/2011 numac 2011000693 source service public federal interieur Loi-programme fermer. Le Tribunal du travail pose les questions préjudicielles précitées.

III. La procédure devant la Cour a. Les affaires portant les numéros 1071, 1075 et 1076 du rôle Par ordonnances du 20 mars 1997, du 27 mars 1997 et du 1er avril 1997, le président en exercice a désigné pour chacune des affaires les juges du siège conformément aux articles 58 et 59 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage. Les juges-rapporteurs ont estimé n'y avoir lieu de faire application dans les affaires respectives des articles 71 ou 72 de la loi organique.

Par ordonnance du 16 avril 1997, la Cour a joint les affaires.

Les décisions de renvoi ont été notifiées conformément à l'article 77 de la loi organique, par lettres recommandées à la poste le 23 avril 1997; l'ordonnance de jonction a été notifiée par les mêmes lettres.

L'avis prescrit par l'article 74 de la loi organique a été publié au Moniteur belge du 13 mai 1997.

Des mémoires ont été introduits par : - L. Ide, Lintsesteenweg 225, 2540 Hove, par lettre recommandée à la poste le 6 juin 1997; - le Conseil des ministres, rue de la Loi 16, 1000 Bruxelles, par lettre recommandée à la poste le 6 juin 1997; - la s.p.r.l. Apotheek Ameloot, Oude Dorpstraat 14, 9120 Vrasene, par lettre recommandée à la poste le 6 juin 1997; - A. Steinmetz, Korte Van Ruusbroeckstraat 51 A, 2018 Anvers, par lettre recommandée à la poste le 6 juin 1997; - la s.a. Coulier Marcel, Kapellei 215, 2980 Zoersel, par lettre recommandée à la poste le 9 juin 1997; - W. Peirens, Leeuwerikenlaan 16, 3080 Tervuren, par lettre recommandée à la poste le 10 juin 1997. b. L'affaire portant le numéro 1092 du rôle Par ordonnance du 20 mai 1997, le président en exercice a désigné les juges du siège conformément aux articles 58 et 59 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage. Les juges-rapporteurs ont estimé n'y avoir lieu de faire application des articles 71 ou 72 de la loi organique.

Par ordonnance du 12 juin 1997, la Cour a joint l'affaire portant le numéro 1092 du rôle et les affaires déjà jointes portant les numéros 1071, 1075 et 1076 du rôle.

La décision de renvoi a été notifiée conformément à l'article 77 de la loi organique, par lettres recommandées à la poste le 13 juin 1997; l'ordonnance de jonction du 12 juin 1997 a été notifiée par les mêmes lettres.

L'avis prescrit par l'article 74 de la loi organique a été publié au Moniteur belge du 14 juin 1997.

Le Conseil des ministres a introduit un mémoire, par lettre recommandée à la poste le 24 juillet 1997. c. L'affaire portant le numéro 1104 du rôle Par ordonnance du 19 juin 1997, le président en exercice a désigné les juges du siège conformément aux articles 58 et 59 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage. Les juges-rapporteurs ont estimé n'y avoir lieu de faire application des articles 71 ou 72 de la loi organique.

Par ordonnance du 25 juin 1997, la Cour a joint l'affaire portant le numéro 1104 du rôle et les affaires déjà jointes portant les numéros 1071, 1075, 1076 et 1092 du rôle.

La décision de renvoi a été notifiée conformément à l'article 77 de la loi organique, par lettres recommandées à la poste le 26 juin 1997; l'ordonnance de jonction du 25 juin 1997 a été notifiée par les mêmes lettres.

L'avis prescrit par l'article 74 de la loi organique a été publié au Moniteur belge du 10 juillet 1997.

Des mémoires ont été introduits par : - J. Buitendijk, Riddershoevelaan 34, 2940 Hoevenen-Stabroek, par lettre recommandée à la poste le 6 août 1997; - la s.a. Booy Clean Belgium, Schouwkensstraat 10, 2030 Anvers, et la s.a. Booy Clean Wallonie, Allée Centrale, 6040 Jumet-Charleroi, par lettre recommandée à la poste le 6 août 1997; - le Conseil des ministres, par lettre recommandée à la poste le 7 août 1997. d. Les affaires jointes portant les numéros 1071, 1075, 1076, 1092 et 1104 du rôle Les mémoires ont été notifiés conformément à l'article 89 de la loi organique, par lettres recommandées à la poste le 15 septembre 1997. Des mémoires en réponse ont été introduits par : - le Conseil des ministres, par lettre recommandée à la poste le 13 octobre 1997; - J. Buitendijk, par lettre recommandée à la poste le 13 octobre 1997; - L. Ide et W. Peirens, par lettre recommandée à la poste le 14 octobre 1997; - la s.a. Coulier Marcel, par lettre recommandée à la poste le 15 octobre 1997; - A. Steinmetz, par lettre recommandée à la poste le 15 octobre 1997; - la s.p.r.l. Apotheek Ameloot, par lettre recommandée à la poste le 15 octobre 1997.

Le Conseil des ministres a introduit un « deuxième mémoire en réponse » par lettre recommandée à la poste le 21 novembre 1997.

Par ordonnances du 15 juin 1997 et du 25 février 1998, la Cour a prorogé respectivement jusqu'aux 19 mars 1998 et 19 septembre 1998 le délai dans lequel l'arrêt doit être rendu.

Par ordonnance du 19 février 1998, la Cour a déclaré les affaires en état et fixé l'audience au 10 mars 1998.

Cette ordonnance a été notifiée aux parties ainsi qu'à leurs avocats, par lettres recommandées à la poste le 19 février 1998.

A l'audience publique du 10 mars 1998 : - ont comparu : . Me H. Vandenberghe, avocat au barreau de Bruxelles, pour la s.a.

Coulier Marcel; . Me K. Jespers loco Me W. Rauws et loco Me H. Buyssens, avocats au barreau d'Anvers, pour la s.p.r.l. Apotheek Ameloot et A. Steinmetz; . Me P. Bernaerts loco Me E. Vervaeke, avocats au barreau d'Anvers, pour la s.a. Booy Clean Belgium et la s.a. Booy Clean Wallonie; . Me L. Lenaerts, avocat au barreau d'Anvers, pour L. Ide et W. Peirens; . Me L. Lenaerts loco Me B. Mergits, avocats au barreau d'Anvers, pour J. Buitendijk; . Me A. Lindemans, avocat au barreau de Bruxelles, pour le Conseil des ministres; - les juges-rapporteurs H. Coremans et L. François ont fait rapport; - les avocats précités ont été entendus; - les affaires ont été mises en délibéré.

La procédure s'est déroulée conformément aux articles 62 et suivants de la loi organique, relatifs à l'emploi des langues devant la Cour.

IV. En droit - A - Mémoire de la s.a. Coulier Marcel dans l'affaire portant le numéro 1071 du rôle A.1.1. Les employeurs qui n'ont pas respecté l'obligation de publicité des horaires de travail sont toujours tenus, en vertu d'une présomption irréfragable d'occupation à temps plein, fondée sur l'article 171, alinéa 2, de la loi-programme du 22 décembre 1989Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 22/12/1989 pub. 14/11/2011 numac 2011000693 source service public federal interieur Loi-programme fermer, de payer le salaire pour prestations à temps plein, alors que les autres employeurs sont uniquement tenus de payer le salaire afférent aux prestations effectivement fournies et en tout cas peuvent prouver la durée des prestations effectives. Cette inégalité, qui fait l'objet de la première question préjudicielle, viole les articles 10 et 11 de la Constitution, lus isolément ou en combinaison avec l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme.

En vertu de la jurisprudence constante de la Cour européenne des droits de l'homme, il se déduit du droit à un procès équitable et impartial que toute partie à un procès doit pouvoir prouver sa situation en droit et en fait et que l'égalité des armes des parties doit être respectée à cet égard. La réglementation soumise à la Cour a pour effet qu'un employeur qui n'a pas respecté une obligation ne peut plus invoquer le bénéfice de l'article 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme, alors que les employeurs qui ont respecté cette formalité peuvent le faire. Cette différence de traitement n'est pas raisonnablement justifiée et il n'existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé. Une même argumentation vaut pour l'article 6.2 de la Convention européenne des droits de l'homme, qui garantit la présomption d'innocence.

L'aveu judiciaire et l'aveu extrajudiciaire sont des modes de preuve ordinaires, tant en matière sociale qu'en matière pénale. Une réglementation de la preuve qui exclut l'aveu comme preuve légale est inadmissible à la lumière du principe d'égalité et de proportionnalité si l'on n'apporte à cet égard aucune justification contraignante et pertinente.

A.1.2. Pour ce qui est de la deuxième question préjudicielle, il existe une distinction fondamentale entre les employeurs qui ont respecté les obligations en matière de droit social et de droit fiscal et les employeurs qui se sont rendus coupables de fraude sociale ou de fraude fiscale. Le traitement égal de ces catégories distinctes ne se justifie pas par l'objectif poursuivi par la mesure, consistant à sanctionner l'employeur négligent et à lutter contre le travail au noir. L'employeur qui a respecté les obligations en matière de droit social et de droit fiscal ne peut, en effet, être considéré comme étant resté en défaut.

A.1.3. En ce qui concerne la troisième question préjudicielle aussi, il y a lieu de conclure à la violation du principe d'égalité. La différence de traitement entre les travailleurs à temps partiel dont les uns sont rémunérés à temps plein et les autres à temps partiel n'est pas fondée sur un critère objectivement et raisonnablement justifié, mais sur le respect d'une formalité dénuée de pertinence. La distinction n'est pas proportionnée puisqu'elle n'autorise aucun contrôle du contenu.

Mémoire de L. Ide dans l'affaire portant le numéro 1071 du rôle A.2.1. L'article 171 de la loi-programme du 22 décembre 1989Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 22/12/1989 pub. 14/11/2011 numac 2011000693 source service public federal interieur Loi-programme fermer ne présente aucun rapport avec la présomption d'innocence garantie par l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme en matière pénale. La présomption irréfragable n'est pas inhabituelle en droit social. Les conséquences de pareille présomption ne résultent pas de l'article 171 de la loi-programme, mais de l'article 1352 du Code civil, qui ne peut être réputé contraire aux articles 10 et 11 de la Constitution et qui ne fait d'ailleurs pas l'objet des questions préjudicielles.

A.2.2. En ce qui concerne la première question préjudicielle, il est évident que les employeurs qui respectent les obligations légales sont traités différemment des employeurs qui contreviennent aux lois. Cette distinction est objective et nécessaire pour imposer le respect des obligations légales. Elle n'est pas disproportionnée, étant donné que l'employeur qui applique correctement la loi peut échapper à l'obligation en matière de salaire. En outre, dans la législation sociale, de nombreuses dispositions ont pour conséquence que l'employeur doit verser un salaire sans que des prestations de travail aient été fournies. La question de savoir si, en l'espèce, un salaire doit être versé ne résulte d'ailleurs pas de l'application de l'article 171 de la loi-programme, mais des règles en matière de protection de la rémunération.

A.2.3. Pour ce qui est de la deuxième question préjudicielle, la catégorie des employeurs qui contreviennent aux dispositions relatives à la publicité peut être définie de façon objective. Il est évident que la violation simultanée de ces dispositions et d'autres articles peut entraîner des sanctions cumulées, mais cela n'est pas disproportionné « puisque chaque infraction est évidemment sanctionnée de façon spécifique et qu'en cas d'infraction à plusieurs dispositions, chacune des infractions doit être examinée en fonction du régime spécifique en matière de contrôle et de sanction ».

A.2.4. S'agissant de la troisième question préjudicielle, il convient de constater que les travailleurs ne sont pas tenus à l'obligation de publicité de leurs horaires, en sorte qu'il ne saurait être question à leur égard d'une catégorie objective. Il n'y a en tout cas pas disproportion « puisque le salaire d'un travailleur à temps partiel qui travaille chez un employeur qui observe rigoureusement la réglementation est complété par des allocations de sécurité sociale ».

Mémoires de la s.p.r.l. Apotheek Ameloot dans l'affaire portant le numéro 1075 du rôle et de A. Steinmetz dans l'affaire portant le numéro 1076 du rôle A.3.1. Une première discrimination porte sur l'inégalité de traitement entre les travailleurs à temps partiel dont les horaires ont été rendus publics et les travailleurs à temps partiel dont les horaires n'ont pas été publiés. Dans leurs rapports avec l'employeur, ces catégories de travailleurs à temps partiel se trouvent dans la même situation. Etant donné que la réglementation a pour but de permettre un contrôle plus efficace du respect des horaires, elle est étrangère aux rapports internes entre l'employeur et le travailleur. Le traitement inégal de situations égales viole le principe d'égalité.

Si les travailleurs à temps partiel sont réputés se trouver dans des situations objectivement différentes, le principe d'égalité est également violé. Le but et la portée de la loi ne justifient pas un mode de preuve aussi radical que la présomption irréfragable, qui entraîne un droit au salaire à charge de l'employeur pour des prestations de travail non fournies par le travailleur. Il n'existe pas de rapport raisonnable entre les moyens employés et le but visé.

Dans son arrêt n° 26/95, la Cour a considéré comme contraire au principe d'égalité une présomption irréfragable analogue qui excluait la réfutation de la collusion en matière d'assurances. Enfin, la preuve du caractère manifestement déraisonnable est fournie par le législateur lui-même, qui a, dans l'intervalle, remplacé la présomption irréfragable par une présomption réfragable, ce qui suffit pour atteindre l'objectif de la mesure.

A.3.2. Une seconde discrimination porte sur le traitement égal des travailleurs à temps plein et des travailleurs à temps partiel dont les horaires n'ont pas été rendus publics de la façon prescrite.

Quoiqu'ils se trouvent dans une situation différente par rapport à l'employeur, ils ont tous droit à un salaire pour prestations à temps plein. Ce traitement égal de situations différentes n'est susceptible d'aucune justification raisonnable.

A.3.3. Enfin, le principe d'égalité est violé, en combinaison avec le droit de propriété, étant donné que l'employeur est contraint au paiement d'un salaire au travailleur sans que ce dernier en ait fourni la contrepartie. Un tel transfert forcé de propriété est inadmissible en vertu de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme.

Mémoire en intervention de W. Peirens dans les affaires portant les numéros 1071, 1075 et 1076 du rôle A.4.1. L'intervenant invoque sa qualité de représentant d'une organisation syndicale représentative. Il fait valoir que les travailleurs ont intérêt à un contrôle correct des heures véritablement prestées en cas de travail à temps partiel : toute imprécision à cet égard entraîne une possibilité de fraude, qui a une incidence négative sur la protection sociale des travailleurs via la sécurité sociale.

A.4.2. L'article 171, alinéa 2, de la loi-programme du 22 décembre 1989Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 22/12/1989 pub. 14/11/2011 numac 2011000693 source service public federal interieur Loi-programme fermer poursuit un but licite. La distinction opérée entre un employeur qui respecte les règles de la loi-programme et un employeur qui y contrevient est objective et adéquate. Compte tenu d'autres garanties inscrites dans la législation sociale, il existe un rapport raisonnable entre les moyens employés et le but visé. A cet égard, il est renvoyé en particulier à la jurisprudence qui n'accorde pas d'allocations de chômage à un travailleur à temps partiel parce que celui-ci n'est pas privé de travail et de rémunération au sens de l'article 44 de l'arrêté relatif au chômage.

Mémoires du Conseil des ministres dans les affaires portant les numéros 1071, 1075 et 1076 du rôle et dans l'affaire portant le numéro 1104 du rôle A.5.1. Après un exposé de la genèse législative et de la portée de l'article 171 de la loi-programme du 22 décembre 1989Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 22/12/1989 pub. 14/11/2011 numac 2011000693 source service public federal interieur Loi-programme fermer, le Conseil des ministres soutient que le législateur n'a pas instauré de catégories différentes de travailleurs à temps partiel ou d'employeurs. La présomption irréfragable a été instaurée pour inciter tous les employeurs qui occupent des travailleurs à temps partiel à respecter la publicité prescrite des horaires.

A.5.2. Si une distinction peut néanmoins être opérée, elle est objectivement et raisonnablement justifiée à la lumière du but et des effets de la mesure. Le but de la mesure consiste à réprimer le travail au noir en permettant le contrôle des horaires et des prestations effectives des travailleurs à temps partiel. La nécessité d'une pénalisation efficace explique la sévérité du législateur à l'égard des employeurs qui n'ont pas publié les horaires.

A.5.3. L'inégalité de traitement entre les travailleurs à temps partiel qui ont droit, du fait de la présomption irréfragable, à un salaire pour travail à temps plein et les autres travailleurs à temps partiel est justifiée. Dans son arrêt n° 10/96, la Cour a déjà considéré qu'il ne saurait être question de discrimination lorsqu'aucun droit n'est limité ou lorsqu'aucune obligation n'est renforcée. Etant donné que les travailleurs à temps partiel reçoivent en toutes circonstances à tout le moins leur salaire proportionnellement à la durée du travail fourni, il n'est pas porté atteinte aux obligations existantes et aux droits acquis des travailleurs à temps partiel. Il n'y a pas disproportion, puisque l'objectif poursuivi ne peut être réalisé de manière efficace que par la technique de la présomption irréfragable de prestations à temps plein.

Mémoire du Conseil des ministres dans l'affaire portant le numéro 1092 du rôle A.6.1. La décision de renvoi concerne uniquement la distinction entre employeurs « irréguliers » fondée sur la période durant laquelle ils ont occupé des travailleurs à temps partiel, un article 171 de la loi-programme formulé différemment étant applicable à chaque période.

A.6.2. Il peut uniquement être question de discrimination si l'application d'une disposition législative égale implique une inégalité inacceptable entre des groupes de personnes différents. « Si l'on pouvait partir du principe qu'il est possible de contrôler au regard du principe d'égalité et de non-discrimination la loi telle qu'elle existe dans les diverses phases de sa genèse et de son évolution ultérieure, il en résulterait que chaque modification législative qui s'adresse à un groupe déterminé ou à une personne déterminée créerait automatiquement deux catégories de groupes ou de personnes, parce que l'ancienne version de la loi est applicable au premier groupe ou à la première personne et la nouvelle à l'autre groupe ou à l'autre personne. Même une prétendue erreur du législateur qui revient sur sa modification originaire n'y change rien. » Mémoire de la s.a. Booy Clean Belgium et de la s.a. Booy Clean Wallonie dans l'affaire portant le numéro 1104 du rôle A.7.1. Pour ce qui est de la première question préjudicielle, les employeurs qui observent l'obligation de publicité des horaires et les autres employeurs se trouvent dans une situation identique. Il est acceptable que le législateur sanctionne l'employeur qui rend impossible la constatation des prestations effectives des travailleurs à temps partiel; il n'est pas acceptable qu'il lèse de surcroît cet employeur en lui opposant une présomption irréfragable de prestations à temps plein. « De cette façon, semblable employeur n'a pas accès à un procès équitable, étant donné qu'il se voit privé de l'appréciation de sa situation par un juge indépendant. Il est déraisonnable de priver un employeur qui se trouve dans cette situation des droits de défense normaux. » Etant donné que la présomption irréfragable ne contribue pas au constat des prestations effectives des travailleurs à temps partiel, il n'existe pas de rapport entre le moyen employé et le but visé.

A.7.2. Pour ce qui est de la deuxième question préjudicielle, les employeurs qui déclarent correctement le travail presté par leurs travailleurs à l'O.N.S.S. et au fisc et ceux qui ne le font pas se trouvent dans des situations fondamentalement différentes. S'ils ne publient pas les horaires, la sanction est toutefois identique pour les deux catégories. « Le préjudice est cependant moins grave pour le fraudeur, puisqu'il a bénéficié de plus de prestations effectives qu'il n'en avait déclarées. [...] La perte subie suite à un constat d'infraction pour la même négligence est plus réduite dans le chef du fraudeur que dans le chef de l'employeur correct. Il est déraisonnable de sanctionner moins lourdement le fraudeur en instaurant la présomption légale de fraude en cas de non-publicité. » A.7.3. S'agissant de la troisième question préjudicielle, les travailleurs à temps partiel des employeurs qui respectent la publicité prescrite des horaires et les travailleurs à temps partiel des employeurs qui ne la respectent pas se trouvent dans une situation identique. La présomption irréfragable de prestations à temps plein pour la catégorie citée en dernier lieu viole le principe d'égalité puisqu'une partie des travailleurs à temps partiel obtient de ce fait un droit à un salaire à temps plein pour des prestations à temps partiel.

Mémoire de J. Buitendijk dans l'affaire portant le numéro 1104 du rôle A.8.1. La seule distinction pertinente relevée dans la décision de renvoi est la distinction entre les employeurs qui ont observé l'obligation de publicité des horaires des travailleurs à temps partiel et les employeurs qui ont méconnu cette obligation. Les autres catégories distinctes qui sont définies dans les questions préjudicielles ne sont pas pertinentes.

A.8.2. La distinction entre les employeurs qui respectent l'obligation de publicité et ceux qui ne la respectent pas est adéquate. Admettre le contraire équivaudrait à rendre impossible toute sanction en cas de non-respect de cette obligation.

A.8.3. C'est à tort que l'on déduirait le caractère déraisonnable de la distinction entre les deux catégories d'employeurs du constat que les travailleurs à temps partiel concernés ont droit à un salaire pour prestations à temps plein. L'obligation de payer le salaire découle de règles de droit social autres que celles qui font l'objet des questions préjudicielles. En droit du travail, le fait d'accorder une garantie de salaire à certains ouvriers n'est pas considéré comme déraisonnable. En outre, il suffit de respecter les formalités nécessaires pour éviter l'application de la sanction de l'article 171 de la loi-programme. Cette disposition était d'ailleurs la seule solution possible pour, d'une part, lutter efficacement contre la fraude sociale et, d'autre part, garantir le droit à la sécurité d'existence des travailleurs concernés.

Mémoire en réponse de la s.a. Coulier Marcel dans l'affaire portant le numéro 1071 du rôle A.9.1. Bien que le juge a quo estime que la présomption irréfragable de l'article 171 de la loi-programme peut être invoquée par le travailleur, il se déduit d'un arrêt de la Cour de cassation du 28 avril 1997 que la présomption n'est pas établie à l'égard du travailleur mais bien des fonctionnaires et organismes compétents. La question est donc de savoir si le travailleur peut invoquer la présomption de travail à temps plein. Le droit au salaire à temps plein concerne en effet le contrat de travail conclu entre l'employeur et le travailleur, alors que la Cour de cassation considère justement que l'article 171 ne présente aucun rapport avec ce contrat.

A.9.2. Pour le surplus, il est renvoyé à des arrêts récents de la Cour européenne des droits de l'homme.

Mémoire en réponse de L. Ide dans l'affaire portant le numéro 1071 du rôle et de W. Peirens dans les affaires portant les numéros 1071, 1075 et 1076 du rôle A.10. L'article 171, alinéa 2, de la loi-programme ne contient pas de sanction pénale, mais une sanction civile. Il ne peut y avoir de connexité entre les articles 10 et 11 de la Constitution et l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme. De surcroît, la règle de la publicité des horaires permet justement à l'employeur de prouver l'occupation effective du travailleur à temps partiel, étant entendu qu'il faut que cela se fasse « in tempore non suspecto ».

Semblable règle n'est pas contraire au principe de la constatation équitable des infractions ou au principe de l'égalité des armes.

Mémoires en réponse de la s.p.r.l. Apotheek Ameloot dans l'affaire portant le numéro 1075 du rôle et de A. Steinmetz dans l'affaire portant le numéro 1076 du rôle A.11. Le défaut de justification raisonnable pour la distinction établie apparaît du fait que l'autorité, en vue du contrôle et de la répression du travail au noir, dispose déjà d'un arsenal de compétences de contrôle et de sanctions pénales, administratives, civiles et de sécurité sociale. Dès lors, la présomption irréfragable, en tant que moyen de contrôle et de sanction, est disproportionnée à l'objectif poursuivi. En tant que le législateur entend également réaliser des économies au niveau de l'assurance chômage au moyen des dispositions concernées de la loi-programme, le moyen n'est en outre pas adéquat. Il génère au contraire plus de dépenses. Enfin, par la loi du 26 juillet 1996Documents pertinents retrouvés type loi prom. 26/07/1996 pub. 05/10/2012 numac 2012205395 source service public federal interieur Loi relative à la promotion de l'emploi et à la sauvegarde préventive de la compétitivité. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, qui a transformé la présomption irréfragable en une présomption réfragable, le législateur a démontré lui-même qu'une présomption irréfragable n'est pas raisonnablement et objectivement justifiée.

Mémoire en réponse de J. Buitendijk dans l'affaire portant le numéro 1104 du rôle A.12.1. Selon les travaux préparatoires, la norme en cause ne vise pas seulement à sanctionner, dans le cadre de la lutte contre le travail au noir, l'employeur resté en défaut mais vise également à réaliser des économies dans le secteur du chômage. Les dispositions relatives au contrôle des prestations des travailleurs à temps partiel permettent à l'Office national de l'emploi de vérifier si les travailleurs à temps partiel qui sollicitent le bénéfice des allocations de chômage sont privés de travail et de rémunération durant les périodes pour lesquelles ils demandent des allocations de chômage. La disposition poursuit dès lors un double objectif licite.

A.12.2. Pour ce qui est de la deuxième question préjudicielle, il est impossible de vérifier si l'employeur a correctement déclaré les prestations effectives auprès de l'O.N.S.S. et du fisc. La sanction de l'article 171 constitue la pierre angulaire de la réglementation concernant le contrôle des prestations des travailleurs à temps partiel, à défaut de quoi le contrôle devient impossible et l'objectif du législateur une coquille vide. De surcroît, la distinction entre les employeurs qui déclarent de façon correcte le travail à temps partiel effectivement fourni et les employeurs qui ne le font pas néglige le fait qu'en droit social, la distinction entre fraude et irrégularité n'est généralement pas pertinente pour la répression pénale des infractions à la législation sociale.

A.12.3. Quant à la troisième question préjudicielle, la distinction entre les deux catégories de travailleurs, à la supposer pertinente, est en tout cas objectivement et raisonnablement justifiée à la lumière du constat que les dispositions relatives à la publicité des horaires visent également à réprimer les abus au regard de la réglementation du chômage.

A.12.4. Si l'on admettait que la preuve du volume réel des prestations soit fournie d'une autre façon, cela supposerait la collaboration des travailleurs concernés. « Vu l'intérêt évident que ceux-ci peuvent avoir à une déclaration incorrecte des prestations fournies », un tel procédé est incompatible avec le but de la réglementation.

Mémoire en réponse du Conseil des ministres dans les affaires portant les numéros 1071, 1075, 1076 et 1104 du rôle A.13.1. Aucune des parties qui invoquent l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme n'expose en quoi cet article serait applicable en l'espèce et pourrait être violé en combinaison avec les articles 10 et 11 de la Constitution.

A.13.2. Le Conseil des ministres ne voit pas pourquoi une réglementation de la preuve qui exclut l'aveu comme mode de preuve légal serait inadmissible à la lumière des articles 10 et 11 de la Constitution, étant donné que dans d'autres domaines du droit aussi, certains modes de preuves légaux sont exclus.

A.13.3. La réglementation en question entend lutter contre le risque de fraude. Le fait que la même sanction soit imposée à tous les employeurs qui n'ont pas respecté l'obligation de publicité, sans distinguer selon que leur déclaration à l'O.N.S.S. et au fisc est correcte ou non, constitue une simple conséquence de l'application du régime en cause.

A.13.4. La sanction du non-respect d'une règle que le législateur a considérée comme très importante ne constitue pas une atteinte au droit de propriété.

Deuxième mémoire en réponse du Conseil des ministres dans les affaires portant les numéros 1071, 1075, 1076 et 1104 du rôle A.14. Ce mémoire répond à quelques éléments des mémoires en réponse de la s.a. Coulier Marcel et de la s.p.r.l. Apotheek Ameloot et A. Steinmetz. - B - Quant à la recevabilité de l'intervention de W. Peirens dans les affaires portant les numéros 1071, 1075 et 1076 du rôle B.1.1. W. Peirens a introduit un mémoire en intervention. Il invoque sa qualité de représentant d'une organisation syndicale représentative. Il fait valoir que les travailleurs ont intérêt à un contrôle correct des heures effectivement prestées : toute imprécision à cet égard entraîne une possibilité de fraude, ce qui a une incidence négative sur la protection sociale des travailleurs par la sécurité sociale.

B.1.2. La loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage a réglé l'intervention volontaire d'un tiers dans la procédure relative à une question préjudicielle. Seule une personne répondant aux deux conditions prévues à l'article 87, § 1er, peut, en pareil cas, être réputée partie à une question préjudicielle pendante devant la Cour.

Cette personne doit : - justifier d'un intérêt dans la cause soumise à la juridiction qui a ordonné le renvoi et - avoir adressé un mémoire à la Cour dans le délai prescrit.

B.1.3. Le mémoire en intervention de W. Peirens, qui n'est pas partie dans les affaires mues devant les juges a quo et qui ne justifie pas davantage dans ces affaires de l'intérêt requis par la loi, n'est pas recevable.

Quant à la recevabilité du deuxième mémoire en réponse du Conseil des ministres dans les affaires portant les numéros 1071, 1075, 1076 et 1104 du rôle B.2. Le 21 novembre 1997, le Conseil des ministres a introduit un deuxième mémoire en réponse. Ce mémoire, qui a été introduit en dehors des délais prévus par la loi spéciale du 6 janvier 1989, est irrecevable et est écarté des débats.

Quant aux questions préjudicielles B.3. Il ressort de la formulation des questions préjudicielles et des éléments des diverses causes qu'il est demandé à la Cour d'examiner si les articles 10 et 11 de la Constitution, lus isolément ou en combinaison avec l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, sont ou non violés par l'alinéa 2 de l'article 171 de la loi-programme du 22 décembre 1989Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 22/12/1989 pub. 14/11/2011 numac 2011000693 source service public federal interieur Loi-programme fermer, tel que cet article a été remplacé par l'article 112 de la loi du 20 juillet 1991 portant des dispositions sociales et diverses et tel qu'il était en vigueur du 11 août 1991 au 30 avril 1997.

Cet article énonçait : « Sauf preuve du contraire apportée par l'employeur, les travailleurs à temps partiel seront présumés, à défaut d'inscription dans les documents visés aux articles 160, 162 et 165 ou d'utilisation des appareils visés à l'article 164, avoir effectué leurs prestations conformément aux horaires qui ont fait l'objet des mesures de publicité visées aux articles 157 à 159.

A défaut de publicité des horaires prévus dans les articles 157 à 159, les travailleurs seront présumés avoir effectué leurs prestations dans le cadre d'un contrat de travail à temps plein sans que la preuve du contraire puisse être apportée. » En vertu des susdits articles 160, 162, 164 et 165, les employeurs qui occupent des travailleurs à temps partiel doivent disposer de documents ou d'un appareillage indiquant les horaires et l'identité des travailleurs à temps partiel. En vertu des articles 157 à 159, ces horaires sont soumis à une publicité préalable soit par le dépôt en vue de leur consultation (article 157), soit par le règlement de travail (article 158), soit par affichage (article 159).

B.4. Les travaux préparatoires de la loi du 22 décembre 1989Documents pertinents retrouvés type loi prom. 22/12/1989 pub. 20/03/2009 numac 2009000181 source service public federal interieur Loi relative à la protection du logement familial fermer révèlent que l'article 171 constitue une mesure visant à lutter contre le travail au noir et contre les abus en matière d'allocations de sécurité sociale : « Le travail au noir [...] est particulièrement difficile à détecter lorsqu'il prend la forme d'heures de travail prestées en dehors d'un régime de travail à temps partiel lui-même défini de façon peu précise. » (Doc. parl., Chambre, 1989-1990, n° 975/10, p. 45, et Sénat, 1989-1990, n° 849-2, p. 24) et « En outre, la plupart de ces travailleurs à temps partiel bénéficiant d'allocations de chômage complémentaires, une partie de ces allocations est perçue abusivement, car cumulée avec des prestations de travail.

Les présentes dispositions entendent mettre fin à ces pratiques en rendant possible une meilleure connaissance des prestations réellement effectuées par les travailleurs à temps partiel. » (Doc. parl., Chambre, 1989-1990, n° 975/1, p. 59) La modification apportée à l'article 171 par la loi du 20 juillet 1991 avait pour but, ainsi qu'il ressort des travaux préparatoires, de préciser qu'un « employeur qui n'a pas respecté les obligations imposées par la loi [...] ne peut donc se prévaloir de l'illégalité de la situation pour apporter la preuve du contraire » (Doc. parl., Sénat, 1990-1991, n° 1374-1, p. 39).

En ce qui concerne les première et troisième questions posées dans les affaires portant les numéros 1071 et 1104 du rôle et les questions posées dans les affaires portant les numéros 1075 et 1076 du rôle B.5. Selon les juges a quo, la disposition en cause établit une double différence de traitement selon que l'obligation de publicité inscrite aux articles 157 à 159 précités est ou non respectée par l'employeur : d'une part, entre les employeurs, en ce que ceux qui n'ont pas respecté l'obligation doivent payer un salaire pour prestations à temps plein à leurs travailleurs à temps partiel, et non comme d'autres employeurs une rémunération en proportion des prestations effectives; d'autre part, entre les travailleurs, en ce que ceux qui sont occupés à temps partiel par un employeur qui n'a pas respecté l'obligation perçoivent une rémunération pour prestations à temps plein et non, comme d'autres travailleurs à temps partiel, un salaire en proportion des prestations effectives.

Le fait d'alléguer ces différences implique que les juges a quo estiment que l'article 171, alinéa 2, doit être interprété en ce sens que le caractère irréfragable de la présomption d'occupation à temps plein fait naître dans le chef des travailleurs concernés un droit à la rémunération pour prestations de travail à temps plein et dans le chef des employeurs l'obligation correspondante de payer cette rémunération à temps plein.

B.6. La différence de traitement, relevée dans les questions, tant entre les employeurs qu'entre les travailleurs, repose sur un critère identique : le respect ou la méconnaissance par l'employeur de l'obligation de publicité des horaires. Ce critère est objectif.

B.7. L'instauration d'une présomption irréfragable d'occupation à temps plein dans le chef de l'employeur qui n'a pas respecté l'obligation de publicité est un moyen pertinent pour atteindre le but poursuivi par le législateur. Ainsi qu'il est indiqué en B.4, la mesure entend lutter contre le travail au noir et contre les abus en matière d'allocations de sécurité sociale en permettant de contrôler les prestations de travail effectives.

La Cour doit toutefois encore examiner si la mesure résiste au contrôle de proportionnalité, tant à l'égard des catégories d'employeurs qu'à l'égard des catégories de travailleurs.

B.8. Pour ce qui est des travailleurs, le droit à la rémunération sans prestations de travail effectives ne présente aucun rapport avec la mesure qui, dans l'intérêt de la collectivité des travailleurs, entend lutter contre le travail au noir et contre les abus en matière d'allocations de sécurité sociale et qui ne vise pas à protéger les travailleurs occupés considérés individuellement.

S'agissant des employeurs, l'obligation de payer un salaire à temps plein, fondée sur une présomption de prestations de travail à temps plein qu'ils ne peuvent en aucun cas renverser, constitue une sanction qui - s'ajoutant aux droits et obligations réciproques des employeurs et des travailleurs qui résultent du contrat de travail - n'est pas raisonnablement proportionnée au but poursuivi par la loi, compte tenu du fait que la même loi a prévu des mesures de sanction à l'égard des employeurs en soumettant, à l'article 172, 4°, à une peine d'emprisonnement et à des amendes les employeurs restés en défaut et, s'agissant de la perception et du recouvrement des cotisations de sécurité sociale, en complétant, dans son article 181, la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs par un article 22ter aux termes duquel « à défaut de publicité des horaires, les travailleurs à temps partiel seront présumés avoir effectué leurs prestations dans le cadre d'un contrat de travail à temps plein ».

Il résulte de ce qui précède que, dans l'interprétation selon laquelle la présomption irréfragable d'occupation à temps plein a pour effet que les travailleurs à temps partiel occupés par des employeurs qui n'ont pas respecté l'obligation de publicité acquièrent un droit à une rémunération à temps plein et que les employeurs en question sont tenus de payer cette rémunération, l'article 171, alinéa 2, n'est pas proportionné au but visé et viole dès lors les articles 10 et 11 de la Constitution.

B.9. Toutefois, la Cour constate qu'il existe une autre interprétation.

Dans un arrêt du 28 avril 1997, la Cour de cassation considère que les dispositions des articles 157 à 159 et 171, alinéa 2, de la loi-programme « ne concernent pas le contrat conclu entre l'employeur et le travailleur à temps partiel; qu'elles visent un meilleur contrôle du travail à temps partiel afin de prévenir et de réprimer le travail au noir; qu'il en résulte que [...] la présomption irréfragable [a été] établie [...] à l'usage des fonctionnaires et des institutions ».

Dans cette lecture, la présomption ne constitue rien de plus qu'un élément de preuve dans le cadre du contrôle exercé par l'autorité et à l'usage de ce contrôle. Etant donné que, dans cette interprétation, la présomption légale n'est pas établie au profit des travailleurs, ceux-ci ne peuvent s'en prévaloir pour obtenir une rémunération pour prestations à temps plein. La disposition litigieuse n'affecte pas le contrat de travail.

Dans cette interprétation, l'article 171, alinéa 2, ne contient pas les distinctions alléguées; il ne saurait dès lors entraîner de discrimination.

En ce qui concerne la deuxième question posée dans les affaires portant les numéros 1071 et 1104 du rôle B.10. Il est demandé si les articles 10 et 11 de la Constitution, lus isolément ou en combinaison avec l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, sont violés en ce que, en ce qui concerne le non-respect de l'obligation de publicité inscrite aux articles 157 à 159 précités, tous les employeurs sont traités sans distinction de façon égale s'agissant des effets de la présomption irréfragable, qu'ils aient ou non correctement déclaré le travail presté par leurs travailleurs auprès de l'Office national de sécurité sociale et de l'administration fiscale.

B.11. Les règles constitutionnelles de l'égalité et de la non-discrimination n'excluent pas qu'une différence de traitement soit établie entre des catégories de personnes, pour autant qu'elle repose sur un critère objectif et qu'elle soit raisonnablement justifiée. Les mêmes règles s'opposent, par ailleurs, à ce que soient traitées de manière identique, sans qu'apparaisse une justification raisonnable, des catégories de personnes se trouvant dans des situations qui, au regard de la mesure considérée, sont essentiellement différentes.

L'existence d'une telle justification doit s'apprécier en tenant compte du but et des effets de la mesure critiquée ainsi que de la nature des principes en cause; le principe d'égalité est violé lorsqu'il est établi qu'il n'existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.

B.12. La présomption irréfragable de l'article 171, alinéa 2, était instaurée pour inciter les employeurs à respecter l'obligation de publicité. Ainsi qu'il a été dit au B.4, cette obligation a pour but de réprimer le travail au noir et de lutter contre les abus en matière d'allocations de sécurité sociale.

Au regard de la mesure qui vise à permettre un contrôle du travail réellement presté et de l'exactitude de la déclaration de ce travail, les employeurs qui ont introduit une déclaration correcte auprès de l'Office national de sécurité sociale et de l'administration fiscale concernant le travail fourni par leurs travailleurs et les employeurs qui ne l'ont pas fait ne se trouvent pas dans une situation fondamentalement différente. Le traitement égal de ces catégories de personnes n'est pas discriminatoire.

La question appelle une réponse négative.

En ce qui concerne la question posée dans l'affaire portant le numéro 1092 du rôle B.13. La question revient à interroger la Cour sur le point de savoir si, en ce qui concerne les cotisations à la sécurité sociale, il n'est pas discriminatoire que les travailleurs qui sont présumés avoir effectué leurs prestations dans le cadre d'un contrat de travail à temps plein au cours de la période comprise entre le 11 août 1991 et le 30 avril 1997, d'une part, et les travailleurs qui sont présumés avoir effectué leurs prestations dans le cadre d'un contrat de travail à temps plein durant la période antérieure au 10 août 1991 ou la période postérieure au 1er mai 1997, d'autre part, soient traités différemment en ce que, pour les premiers, la preuve du contraire ne peut être apportée, alors qu'une telle preuve n'est pas exclue pour les derniers.

B.14. Sans qu'elle ait à se prononcer, étant donné les termes de la question posée, sur la portée, durant les différentes périodes, de la disposition en cause, la Cour relève que cette disposition ne porte pas sur l'obligation de cotiser à la sécurité sociale. En effet, cette obligation de cotiser est réglée à l'article 22ter, mentionné au B.8, de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, inséré par l'article 181 de la loi-programme du 22 décembre 1989Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 22/12/1989 pub. 14/11/2011 numac 2011000693 source service public federal interieur Loi-programme fermer. L'article 171, alinéa 2, ne fait donc pas naître la différence de traitement alléguée.

La question appelle une réponse négative.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : - L'article 171, alinéa 2, de la loi-programme du 22 décembre 1989Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 22/12/1989 pub. 14/11/2011 numac 2011000693 source service public federal interieur Loi-programme fermer, modifié par l'article 112 de la loi du 20 juillet 1991 portant des dispositions sociales et diverses, viole les articles 10 et 11 de la Constitution dans l'interprétation selon laquelle la présomption irréfragable d'occupation à temps plein a pour effet que les travailleurs à temps partiel d'employeurs qui n'ont pas respecté l'obligation de publicité acquièrent un droit à une rémunération à temps plein et que les employeurs en question sont tenus au paiement de cette rémunération. - La même disposition ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution dans l'interprétation selon laquelle la présomption irréfragable ne concerne pas le contrat conclu entre l'employeur et le travailleur à temps partiel. - La même disposition ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution en tant qu'elle traite les employeurs de façon égale pour ce qui est des conséquences de la présomption irréfragable, sans distinguer selon qu'ils ont ou non déclaré correctement auprès de l'Office national de sécurité sociale et de l'administration fiscale le travail presté par leurs travailleurs. - La même disposition ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution pour ce qui est de l'obligation de cotiser à la sécurité sociale.

Ainsi prononcé en langue néerlandaise et en langue française, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 1er avril 1998.

Le greffier, L. Potoms.

Le président, L. De Grève.

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