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Arrêt De La Cour Constitutionelle
publié le 14 février 1998

Arrêt n° 75/97 du 17 décembre 1997 Numéros du rôle : 993 et 1045 En cause : les questions préjudicielles concernant les articles 1 er et 2 de la loi du 6 (...)

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COUR D'ARBITRAGE


Arrêt n° 75/97 du 17 décembre 1997 Numéros du rôle : 993 et 1045 En cause : les questions préjudicielles concernant les articles 1er et 2 de la loi du 6 février 1970 relative à la prescription des créances à charge ou au profit de l'Etat et des provinces et l'article 100, alinéa 1er, 1° et 2°, de l'arrêté royal du 17 juillet 1991 portant coordination des lois sur la comptabilité de l'Etat, posées par la Cour de cassation et la Cour d'appel de Mons.

La Cour d'arbitrage, composée des présidents M. Melchior et L. De Grève, et des juges H. Boel, L. François, P. Martens, J. Delruelle, G. De Baets, E. Cerexhe, H. Coremans, A. Arts, R. Henneuse et M. Bossuyt, assistée du greffier L. Potoms, présidée par le président M. Melchior, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles 1. Par arrêt du 10 octobre 1996 en cause de la Région wallonne contre J.Hody et autres, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour d'arbitrage le 25 octobre 1996, la Cour de cassation a posé la question préjudicielle suivante : « Les dispositions de l'article 1er, alinéa 1er, a et b, de la loi du 6 février 1970 relative à la prescription des créances à charge ou au profit de l'Etat et des provinces et de l'article 100, alinéa 1er, 1° et 2°, des lois, coordonnées par l'arrêté royal du 17 juillet 1991, sur la comptabilité de l'Etat violent-elles les articles 10 et 11 de la Constitution en ce que, en vertu de ces dispositions : a) une action en responsabilité contre l'Etat se prescrit par cinq ans et non par trente ans selon le droit commun, b) il appartient au débiteur d'ordonnancer ou non pareille créance, avec effet sur la prescription de celle-ci ? » Cette affaire est inscrite sous le numéro 993 du rôle de la Cour. 2. Par arrêt du 28 janvier 1997 en cause de R.Moreau contre la Communauté française, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour d'arbitrage le 31 janvier 1997, la Cour d'appel de Mons a posé les questions préjudicielles suivantes : « - L'article 1er de la loi du 6 février 1970 relative à la prescription des créances à charge ou au profit de l'Etat et des Provinces viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution coordonnée, en tant que cette disposition soumet à la prescription quinquennale les créances d'indemnité d'un entrepreneur, qui résultent d'un contrat, marché ou adjudication passé avec l'Etat, tandis que les mêmes créances d'indemnité sont soumises à la prescription trentenaire lorsque le maître de l'ouvrage est un particulier ? - L'article 2 de cette même loi viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution coordonnée en ce que cette disposition soumet à un nouveau délai de prescription quinquennale les créances (des particuliers à l'égard de l'Etat), dont le délai de prescription initiale a été interrompu conformément audit article 2 tandis que la prescription des créances au profit de l'Etat, lorsqu'elle est frappée d'interruption fait courir un nouveau délai de trente ans par application de l'article 7, § 2, de ladite loi ? » Cette affaire est inscrite sous le numéro 1045 du rôle de la Cour.

II. Les faits et la procédure antérieure En ce qui concerne l'affaire portant le numéro 993 du rôle La Cour de cassation est saisie d'un pourvoi, formé par la Région wallonne, contre un arrêt de la Cour d'appel de Mons; cet arrêt avait rejeté l'exception tirée de la prescription, résultant de l'article 1er, alinéa 1er, a) et b), de la loi du 6 février 1970, d'une créance compensant des retards intervenus dans l'exécution d'un marché de travaux; la question de la conformité de cette disposition au principe d'égalité et de non-discrimination ayant été soulevée par l'une des parties, la Cour de cassation pose la double question citée ci-dessus.

En ce qui concerne l'affaire portant le numéro 1045 du rôle A l'occasion de l'exécution de travaux dont il était l'adjudicataire, R. Moreau, entrepreneur retraité, a subi des arrêts de chantiers imputables à l'administration, retards en compensation desquels celle-ci aurait convenu avec lui de diverses indemnités. La Communauté française ayant allégué la prescription desdites créances, R. Moreau l'assigne devant le tribunal de première instance mais est débouté. Il fait appel de cette décision devant la Cour d'appel, devant laquelle, entre autres arguments, il sollicite que la Cour d'arbitrage soit interrogée à titre préjudiciel.

III. La procédure devant la Cour a. L'affaire portant le numéro 993 du rôle Par ordonnance du 25 octobre 1996, le président en exercice a désigné les juges du siège conformément aux articles 58 et 59 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage. Les juges-rapporteurs ont estimé n'y avoir lieu de faire application des articles 71 ou 72 de la loi organique.

La décision de renvoi a été notifiée conformément à l'article 77 de la loi organique, par lettres recommandées à la poste le 14 novembre 1996.

L'avis prescrit par l'article 74 de la loi organique a été publié au Moniteur belge du 21 novembre 1996.

Des mémoires ont été introduits par : - la s.a. Belgacom, boulevard Emile Jacqmain 151, 1000 Bruxelles, et J. Hody, place de Bronckart 9, 4000 Liège, par lettre recommandée à la poste le 23 décembre 1996; - le Gouvernement wallon, rue Mazy 25-27, 5100 Namur, par lettre recommandée à la poste le 23 décembre 1996; - le Conseil des ministres, rue de la Loi 16, 1000 Bruxelles, par lettre recommandée à la poste le 27 décembre 1996; - le Gouvernement flamand, place des Martyrs 19, 1000 Bruxelles, par lettre recommandée à la poste le 30 décembre 1996. b. L'affaire portant le numéro 1045 du rôle Par ordonnance du 31 janvier 1997, le président en exercice a désigné les juges du siège conformément aux articles 58 et 59 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage. Les juges-rapporteurs ont estimé n'y avoir lieu de faire application des articles 71 ou 72 de la loi organique.

La décision de renvoi a été notifiée conformément à l'article 77 de la loi organique, par lettres recommandées à la poste le 17 février 1997.

L'avis prescrit par l'article 74 de la loi organique a été publié au Moniteur belge du 20 février 1997.

Des mémoires ont été introduits par : - le Conseil des ministres, rue de la Loi 16, 1000 Bruxelles, par lettre recommandée à la poste le 28 mars 1997; - R. Moreau, avenue de Maire 175, 7500 Tournai, par lettre recommandée à la poste le 2 avril 1997; - le Fonds des bâtiments scolaires de la Communauté française, rue du Chemin de Fer 433, 7000 Mons, par lettre recommandée à la poste le 4 avril 1997; - le Gouvernement wallon, rue Mazy 25-27, 5100 Namur, par lettre recommandée à la poste le 4 avril 1997. c. Les affaires jointes portant les numéros 993 et 1045 du rôle Par ordonnance du 12 février 1997, la Cour réunie en séance plénière a joint les affaires. Par ordonnance du même jour, le président M. Melchior a soumis les affaires à la Cour réunie en séance plénière.

Les mémoires ont été notifiés conformément à l'article 89 de la loi organique, par lettres recommandées à la poste le 21 avril 1997.

Des mémoires en réponse ont été introduits par : - la s.a. Belgacom et J. Hody, par lettre recommandée à la poste le 16 mai 1997, dans l'affaire portant le numéro 993 du rôle; - le Gouvernement wallon, par lettre recommandée à la poste le 16 mai 1997, dans l'affaire portant le numéro 993 du rôle; - le Gouvernement wallon, par lettre recommandée à la poste le 21 mai 1997, dans l'affaire portant le numéro 1045 du rôle; - le Conseil des ministres, par lettre recommandée à la poste le 21 mai 1997, dans les affaires jointes.

Par ordonnances du 25 mars 1997 et du 30 septembre 1997, la Cour a prorogé respectivement jusqu'aux 25 octobre 1997 et 25 avril 1998 le délai dans lequel l'arrêt doit être rendu.

Par ordonnance du 9 juillet 1997, la Cour a déclaré les affaires en état et fixé l'audience au 17 septembre 1997.

Cette ordonnance a été notifiée aux parties ainsi qu'à leurs avocats, par lettres recommandées à la poste le 10 juillet 1997.

A l'audience publique du 17 septembre 1997 : - ont comparu : . Me F. Mourlon Beernaert, avocat au barreau de Bruxelles, loco Me R. Bützler, avocat à la Cour de cassation, pour J. Hody et Belgacom; . Me Ph. Horemans, avocat au barreau de Tournai, pour R. Moreau; . Me O. Verhoeven, avocat au barreau de Bruxelles, loco Me J.-P. Moerman, avocat au barreau de Mons, pour le Fonds des bâtiments scolaires de la Communauté française; . Me P. Van Orshoven, avocat au barreau de Bruxelles, pour le Gouvernement flamand; . Me N. Cahen, avocat au barreau de Bruxelles, loco Me L. Simont, avocat à la Cour de cassation, Me V. Thiry et Me H. de Rode, avocats au barreau de Liège, pour le Gouvernement wallon; . Me P. Duquesne, avocat au barreau de Nivelles, pour le Conseil des ministres; - les juges-rapporteurs R. Henneuse et M. Bossuyt ont fait rapport; - les avocats précités ont été entendus; - les affaires ont été mises en délibéré.

La procédure s'est déroulée conformément aux articles 62 et suivants de la loi organique, relatifs à l'emploi des langues devant la Cour.

IV. En droit - A - En ce qui concerne l'affaire portant le numéro 993 du rôle Le mémoire du Gouvernement wallon A.1.1. L'arrêt de la Cour n° 32/96 du 15 mai 1996, concluant à la violation des articles 10 et 11 de la Constitution, concerne uniquement les créances en indemnisation des dommages causés à des propriétés par des travaux entrepris par l'Etat.

A l'inverse, le litige dans le cadre duquel la question préjudicielle a été posée concerne l'exécution d'un marché public et les éventuels dommages et intérêts qui peuvent être réclamés par l'adjudicataire à l'administration en raison de retards ou de préjudices qui lui seraient imputables; il s'ensuit que, en l'espèce, c'est la responsabilité contractuelle, et non sa responsabilité quasi délictuelle, qui est en cause.

Les créances résultant de l'exécution d'un marché public diffèrent de celles fondées sur les articles 1382, 1383 et 544 du Code civil. Tout d'abord, les premières ont été expressément visées par le législateur.

Ensuite, elles naissent pendant l'exécution du contrat et non plusieurs années après l'exécution des travaux. Par ailleurs, les parties à un contrat pouvant déroger dans celui-ci à la prescription trentenaire, la situation du cocontractant créancier d'un particulier n'est pas différente de celle du cocontractant de l'Etat. Enfin, les marchés publics et leur exécution font l'objet d'un engagement de crédits au budget de l'Etat, à l'inverse des créances fondées sur la responsabilité contractuelle. Il s'ensuit que, comme indiqué dans l'arrêt précité n° 32/96 de la Cour, le souci de pouvoir clôturer les comptes de l'Etat constitue une justification objective et raisonnable à l'adoption du délai particulier de cinq ans.

A.1.2. En ce qui concerne la seconde branche de la question préjudicielle, l'ordonnancement constitue un ordre de payer; constituant la phase finale des opérations de dépenses sur le plan budgétaire, sa date est certaine et facilement contrôlable par la Cour des comptes. Le rattachement opéré avec l'ordonnancement est en concordance avec l'article 20 de la loi du 28 juin 1963, en vertu duquel les ordonnances enregistrées par le ministre des Finances peuvent être payées pendant cinq ans à partir de l'année budgétaire à laquelle elles se rattachent.

L'ordonnancement doit être considéré comme une reconnaissance de dette de l'Etat débiteur, qui, comme toute reconnaissance de dette, interrompt la prescription. Il ne peut être considéré comme « un acte potestatif » du débiteur dont dépendrait l'écoulement de la prescription.

Par rapport à l'objectif consistant à assurer la clôture des comptes de l'Etat, il n'est pas déraisonnable de prévoir un délai maximal de cinq ans dans lequel le créancier d'une créance produite mais non payée doit avoir porté le litige devant les tribunaux.

Mémoire de Belgacom et de Me J. Hody, curateur A.2. Renversant la jurisprudence antérieure selon laquelle la portée des dispositions en cause était limitée aux créances prévues et autorisées par le budget annuel, l'arrêt de la Cour de cassation du 10 octobre 1996 renforce la discrimination opérée entre le régime de prescription de droit commun et celui des actions contre l'Etat; cette discrimination est d'autant plus critiquable, d'une part, qu'il dépend de l'Etat, en qualité de débiteur, d'ordonnancer ou non une créance invoquée par un citoyen et ce avec effet sur la prescription et, d'autre part, que l'Etat quant à lui dispose d'un délai de trente ans pour agir contre les particuliers, contrairement à la figure inverse.

Mémoire du Conseil des ministres A.3.1. La loi du 6 février 1970 a entendu supprimer les divergences d'interprétation de la loi du 15 mai 1846 et adapter celle-ci, en particulier en distinguant la situation des créanciers tenus de justifier leurs droits de celle des créanciers dispensés de l'introduction d'une demande de paiement.

A.3.2. En ce qui concerne la première partie de la question préjudicielle, il est fait référence à l'arrêt de la Cour n° 32/96 du 15 mai 1996, dont le schéma de raisonnement et les principes sont appliqués à la présente affaire.

Tout d'abord, la question préjudicielle doit être limitée aux seules créances contre l'Etat ou la région résultant de marchés publics, en ce que le délai de prescription pour ces créances est de cinq ans et de trente ans pour les particuliers.

Ensuite, il est relevé que, en vertu de l'arrêt précité, l'Etat n'est pas, en principe, une entité suffisamment comparable aux particuliers en raison de la mission d'intérêt général dont il a la charge. Si, compte tenu du fait que les obligations assumées par l'administration dans un contrat sont du même ordre que celles assumées par un particulier, les manquements de celle-ci ne semblent pas devoir être traités différemment de ceux des particuliers, il n'en reste pas moins que la Cour a considéré qu'une différence objective séparait les deux : l'Etat sert l'intérêt général tandis que les particuliers agissent en considération de leur intérêt personnel. La justification admise par la Cour à la différence de délai de prescription, tirée du souci de pouvoir clôturer les comptes de l'Etat, répond déjà à la première partie de la question préjudicielle, laquelle appelle dès lors une réponse négative. Il doit d'autant plus en être ainsi que le législateur a multiplié les cas de prescriptions abrégées entre particuliers afin de contraindre les créanciers à se montrer diligents, motivation qui est également transposable lorsqu'il s'agit de créances à charge de l'Etat. En outre, les arguments tirés de l'apparition tardive du dommage et de l'absence de négligence dans le chef du créancier, retenus par la Cour pour sanctionner la prescription quinquennale, sont irrelevants en l'espèce : en matière de marchés publics, la non- exécution d'une obligation par l'administration n'est pas susceptible de se présenter tardivement, de telle sorte qu'un créancier normalement diligent doit savoir quand sa créance est exigible, quand il doit la réclamer et jusque quand il peut le faire.

A.3.3. En ce qui concerne la seconde partie de la question préjudicielle, il est fait référence aux éléments exposés ci-dessus sous A.1.2, alinéa 1er, dont il résulterait que le pouvoir de l'Etat d'ordonnancer sa créance avec effet sur la prescription de celle-ci n'est pas discriminatoire.

A.4. A titre subsidiaire, le mémoire aborde l'hypothèse où la seconde question préjudicielle viserait également la question de la prescription réduite en matière de responsabilité extracontractuelle.

L'arrêt n° 32/96 ne semble avoir considéré comme inconstitutionnelle la prescription quinquennale en matière de responsabilité extracontractuelle que dans la seule mesure où celle-ci résulte de préjudices causés à des propriétés par des travaux entrepris par l'Etat ou une région. En toute hypothèse, la fixation d'un délai de prescription réduit pourrait s'avérer raisonnablement justifiée au regard des articles 10 et 11 de la Constitution s'il ne prenait cours qu'à compter de la manifestation du dommage, comme c'est le cas dans différents pays dont la situation est exposée. Une telle interprétation concilierait les intérêts en jeu, à savoir les impératifs budgétaires auxquels l'Etat est tenu, d'une part, et l'équité dont doit bénéficier un créancier non négligent, d'autre part.

Mémoire du Gouvernement flamand A.5.1. En ce qui concerne la première question préjudicielle, il est fait référence aux considérants B.12 à B.15 de l'arrêt n° 32/96 du 15 mai 1996; ces considérants étant entièrement transposables en l'espèce, rien ne justifie que la jurisprudence précitée soit modifiée et cette première question préjudicielle doit recevoir une réponse négative.

A.5.2. En ce qui concerne la question faisant l'objet de la seconde question préjudicielle, à savoir le fait que l'Etat, contrairement aux autres débiteurs, peut faire se prescrire ses obligations en n'ordonnançant pas ses dettes, il est fait référence à un arrêt de la Cour n° 13/94 du 8 février 1994 qui concernerait un problème semblable. Eu égard à cette décision, le Gouvernement flamand s'en remet provisoirement à la sagesse de la Cour sur ce point.

Mémoire en réponse du Gouvernement wallon A.6. Contrairement à ce que soutiennent Belgacom et Me J. Hody, les arrêts de cassation du 24 mai 1860 et du 10 octobre 1996 tranchent des questions totalement différentes. Alors que le premier arrêt précisait les créances auxquelles s'appliquait l'article 34 de la loi du 15 mai 1846 (correspondant à l'actuel article 1er, alinéa 1er, b), de la loi du 6 février 1970), l'arrêt du 10 octobre 1996 se borne à trancher la question de l'application concurrente de l'article 1er précité et de l'article 18, § 2, de l'arrêté ministériel du 10 août 1977; la première de ces dispositions établit un délai de prescription, la seconde un délai de forclusion de l'action en justice.

En outre, la présente affaire concerne une créance contractuelle, alors que l'arrêt de 1860 comme l'arrêt n° 32/96 de la Cour d'arbitrage du 15 mai 1996 concernaient des créances extracontractuelles.

En ce qui concerne l'affaire portant le numéro 1045 du rôle Le mémoire du Conseil des ministres A.7.1. En ce qui concerne la première question préjudicielle, portant sur l'article 1er de la loi du 6 février 1970, le mémoire reprend l'argumentation exposée ci-dessus sous A.3.2.

A.7.2. En ce qui concerne la seconde question préjudicielle, les différents modes d'interruption de la prescription sont décrits, tant en général que dans le cadre de la loi de 1970, ainsi que leurs effets dans le temps.

En ce qui concerne l'interruption de la prescription des créances à charge de l'Etat, un nouveau délai de cinq ans, identique au délai originaire, prend cours au profit du créancier, ce qui est à la fois logique et adéquat par rapport à la qualité de débiteur de nature particulière de l'Etat.

En ce qui concerne les créances au profit de l'Etat, alors que le délai de prescription originaire est également de cinq ans, par contre, en cas d'interruption, le nouveau délai est de trente ans au bénéfice de l'Etat.

A.7.3. Cette différence de traitement au bénéfice de l'Etat lorsqu'il est créancier par rapport à la situation des autres créanciers lorsque, au contraire, l'Etat est débiteur, a été justifiée comme suit. D'une part, par le souci de ne pas « aggrav[er] [...] la tâche administrative ». D'autre part, par le « remède qui était ainsi apporté au caractère draconien des dispositions de la loi à l'égard de débiteurs se trouvant dans l'impossibilité d'acquitter leur dette [...] avant l'expiration du délai de déchéance de cinq ans et qui de ce fait risquaient la saisie ». A la lumière de ces considérations, l'article 7, § 2, n'apparaît pas disproportionné par rapport aux buts poursuivis par le législateur.

Mémoire de R. Moreau A.8. En ce qui concerne la première question préjudicielle, les conclusions de l'arrêt de la Cour n° 32/96 du 15 mai 1996 sont transposables en l'espèce, rien ne justifiant en effet qu'un raisonnement différent soit tenu lorsqu'il s'agit d'une demande d'indemnisation consécutive à des dommages subis dans le cadre d'un marché public. En effet, en l'espèce, la demande d'indemnité a été établie dès l'apparition du dommage, l'administration a dès lors pu conserver les archives et pièces essentielles du dossier et inscrire les montants ayant fait l'objet d'un accord dans ses prévisions budgétaires.

Le fait pour l'administration de ne pas avoir soulevé la prescription « principale » d'un an résultant de l'article 18 de l'arrêté royal du 5 octobre 1955 implique qu'elle ne puisse plus justifier, au regard des articles 10 et 11 de la Constitution, la prescription quinquennale « secondaire » résultant de la loi du 6 février 1970.

A.9.1. En ce qui concerne la seconde question préjudicielle, est contestée, à titre principal, l'interprétation retenue par le juge a quo : en effet, il ressort des travaux préparatoires que, en cas d'interruption de la prescription d'une créance à charge de l'Etat, c'est un délai non de cinq ans mais de trente ans qui court.

A.9.2. A défaut de retenir cette interprétation, il y a lieu de constater que les arguments avancés pour étayer la prescription quinquennale (charge administrative) valent a fortiori pour un particulier disposant de moyens moindres. Dès lors qu'une dette fait l'objet d'une reconnaissance, il n'y a pas de raison pour que celle-ci ne sorte ses effets que durant cinq ans lorsque le débiteur est l'Etat, et vaille pour trente ans si le débiteur est un particulier.

Mémoire du Gouvernement wallon A.10.1. Comme relevé par la Cour dans son arrêt n° 32/96, tant le fait que l'Etat, à l'inverse des particuliers, serve l'intérêt général que la nécessité pour lui de pouvoir clôturer ses comptes dans un délai raisonnable justifient que les créances dirigées à son encontre fassent l'objet d'une prescription abrégée.

Les motifs pour lesquels la Cour, dans l'arrêt précité, a sanctionné la prescription abrégée ne sont pas applicables en l'espèce : dans le cas d'un dommage d'origine contractuelle, il est immédiatement constatable, de telle sorte que la tardiveté de la réclamation ne peut être le résultat d'une apparition retardée du dommage mais seulement de la négligence du créancier; en outre, ce créancier est, par nature, un professionnel, c'est-à-dire une personne particulièrement bien préparée à la défense de ses intérêts.

A.10.2. En ce qui concerne la seconde question préjudicielle, la Cour n'est saisie que de l'article 2 de la loi du 6 février 1970. Cet article ne détermine pas le délai de prescription applicable après l'interruption de prescription d'une créance à charge de l'Etat, mais se borne à déterminer les modes d'interruption de ces créances. Ces modes d'interruption étant conformes à ceux déterminés par le Code civil, les principes d'égalité et de non-discrimination ne sont pas violés.

Mémoire de la Communauté française A.11. Il est fait référence à l'arrêt n° 32/96 de la Cour du 15 mai 1996, dont les conclusions sont transposables, de telle sorte que les articles 1er et 2 de la loi du 6 février 1970 doivent être déclarés ne pas violer les articles 10 et 11 de la Constitution.

En ce qui concerne les affaires jointes portant les numéros 993 et 1045 du rôle Mémoire en réponse de la s.a. Belgacom et de Me J. Hody A.12.1. Il ressort de l'arrêt n° 32/96 de la Cour d'arbitrage et de l'arrêt de cassation du 24 mai 1860 que les délais de prescription, dérogatoires au droit commun, prévus au bénéfice de l'Etat sont discriminatoires chaque fois que la créance concernée trouve sa source dans une faute de l'Etat; est sans importance, la question de savoir s'il s'agit d'une responsabilité contractuelle ou extracontractuelle, l'essentiel étant que la dette correspondante n'a pas été et n'a pu être prise en compte dans le budget de l'Etat.

A.12.2. En ce qui concerne la faculté donnée à l'Etat de faire se prescrire ses dettes en ne les ordonnançant pas, rien ne justifie une telle différence de traitement par rapport à la situation des autres débiteurs.

Mémoire en réponse du Gouvernement wallon A.13.1. En ce qui concerne la première question posée par la Cour d'appel de Mons, tant son arrêt que celui de la Cour de cassation excluent la thèse du caractère subsidiaire de la prescription quinquennale par rapport aux délais de forclusion résultant des arrêtés relatifs aux clauses administratives contractuelles régissant les marchés de l'Etat.

A.13.2. En ce qui concerne la seconde question posée par la Cour d'appel de Mons, l'ouverture d'un nouveau délai de cinq ans n'est que l'application du droit commun, selon lequel, sauf exception, la prescription nouvelle est soumise aux mêmes conditions et délais que la prescription interrompue; ce nouveau délai de cinq ans ne résulte dès lors pas de l'article 2 de la loi du 6 février 1970.

En ce qui concerne les modes d'interruption du délai de prescription - la simple lettre recommandée - et le délai de réouverture préférentiel de trente ans prévu par l'article 7, ils se justifient par la poursuite par l'Etat de l'intérêt général, d'une part, et par le volume plus important des litiges auxquels il doit faire face, d'autre part.

A.13.3. En ce qui concerne la première question préjudicielle posée par la Cour de cassation, en ce qu'elle vise la prescription des actions extracontractuelles dirigées contre l'Etat, il ressort des motifs de l'arrêt n° 32/96 que l'article 1er, alinéa 1er, a), de la loi du 6 février 1970 pourrait être considéré comme non-discriminatoire s'il était interprété comme ne faisant prendre cours le délai de prescription qu'avec l'apparition du dommage.

A.13.4. En ce qui concerne la seconde question, il ressort de l'arrêt n° 32/96 que le double délai de cinq ans est une mesure en rapport avec l'objectif poursuivi, à savoir permettre à l'Etat de clôturer ses comptes dans un délai raisonnable. Mémoire en réponse du Conseil des ministres A.14. Eu égard à l'article 7, § 1er, alinéa 2, de la loi du 6 février 1970, c'est également un délai de cinq ans qui bénéficie aux particuliers en cas de paiement indu opéré par l'Etat, de telle sorte qu'il n'y a pas de différence de traitement sur le plan de la durée de prescription entre l'Etat et le particulier.

Quant à la faculté donnée à l'Etat d'ordonnancer les dépenses, avec effet sur le délai de prescription, celle-ci se justifie au regard des impératifs du droit budgétaire, lesquels ont été exposés lors des travaux préparatoires. Au regard de ces impératifs, il n'est pas déraisonnable de prévoir qu'un créancier voie sa créance prescrite cinq ans après l'avoir produite, au titre de sanction à une inaction de cinq ans.

La déclaration d'inconstitutionnalité résultant de l'arrêt du 15 mai 1996 n'est pas transposable en l'espèce; en outre, cette transposition méconnaît les passages de l'arrêt validant le délai de prescription raccourci. - B - B.1.1. Les questions préjudicielles portent sur les articles 1er et 2 de la loi du 6 février 1970 relative à la prescription des créances à charge ou au profit de l'Etat et des provinces.

L'article 1er de cette loi dispose : « Sont prescrites et définitivement éteintes au profit de l'Etat, sans préjudice des déchéances prononcées par d'autres dispositions légales, réglementaires ou conventionnelles sur la matière : a) les créances qui, devant être produites selon les modalités fixées par la loi ou le règlement, ne l'ont pas été dans le délai de cinq ans à partir du premier janvier de l'année budgétaire au cours de laquelle elles sont nées;b) les créances qui, ayant été produites dans le délai visé au littera a, n'ont pas été ordonnancées par les Ministres dans le délai de cinq ans à partir du premier janvier de l'année pendant laquelle elles ont été produites;c) toutes autres créances qui n'ont pas été ordonnancées dans le délai de dix ans à partir du premier janvier de l'année pendant laquelle elles sont nées. Toutefois, les créances résultant de jugements restent soumises à la prescription trentenaire; elles doivent être payées à l'intervention de la Caisse des Dépôts et Consignations. » Seul l'alinéa 1er, en ses litterae a) et b), de cet article 1er est visé par les questions préjudicielles; cet article 1er forme l'article 100 des lois sur la comptabilité de l'Etat, coordonnées par l'arrêté royal du 17 juillet 1991.

L'article 2 de la loi du 6 février 1970 dispose : « La prescription est interrompue par exploit d'huissier de justice, ainsi que par une reconnaissance de dette faite par l'Etat.

L'intentement d'une action en justice suspend la prescription jusqu'au prononcé d'une décision définitive. » Cette disposition forme l'article 101 des lois précitées sur la comptabilité de l'Etat, coordonnées par l'arrêté royal du 17 juillet 1991.

B.1.2. La seconde question préjudicielle dans l'affaire portant le numéro 1045 du rôle mentionne également l'article 7, § 2, de la loi du 6 février 1970. Cet article 7 dispose : « § 1er. Sont définitivement acquises à ceux qui les ont reçues les sommes payées indûment par l'Etat en matière de traitements, de pensions, d'avances sur ceux-ci ainsi que d'indemnités ou d'allocations qui sont accessoires ou similaires aux traitements ou aux pensions lorsque le remboursement n'en a pas été réclamé dans un délai de cinq ans à partir du premier janvier de l'année du paiement.

Le délai fixé à l'alinéa 1er est porté à trente ans lorsque les sommes indues ont été obtenues par des manoeuvres frauduleuses ou par des déclarations fausses ou sciemment incomplètes. § 2. Pour être valable, la réclamation doit être notifiée au débiteur par lettre recommandée à la poste et contenir : 1° le montant total de la somme réclamée avec, par année, le relevé des paiements indus;2° la mention des dispositions en violation desquelles les paiements ont été faits. A dater du dépôt de la lettre recommandée, la répétition de l'indu peut être poursuivie pendant trente ans. § 3. Aucun recours n'est ouvert ni contre l'ordonnateur, ni contre le comptable responsables d'un paiement indu dont le recouvrement est devenu impossible en vertu des dispositions qui précèdent. » B.2.1. Considérées globalement, les questions préjudicielles interrogent la Cour sur la compatibilité avec les articles 10 et 11 de la Constitution de trois différences de traitement qui résulteraient de la loi du 6 février 1970 : - la prescription par cinq ans des créances à charge de l'Etat, au lieu de la prescription de trente ans, en principe, des créances à charge des particuliers (article 1er, alinéa 1er, a)); - dans l'hypothèse où le délai de prescription initial a été interrompu, l'ouverture d'un nouveau délai de prescription de cinq ans pour les créances à charge de l'Etat alors qu'il est de trente ans en ce qui concerne les créances qu'il détient à charge des particuliers (articles 2 et 7, § 2, alinéa 2); - la faculté donnée à l'Etat, en tant que débiteur, de laisser se prescrire ses dettes en ne les ordonnançant pas, faculté dont ne disposent pas les autres débiteurs (article 1er, alinéa 1er, b)).

B.2.2. En outre, il ressort des litiges soumis aux juges a quo et, en ce qui concerne l'affaire portant le numéro 1045 du rôle, des questions préjudicielles elles-mêmes, que les différences de traitement citées ci-dessus ne sont soumises au contrôle de la Cour qu'en ce qu'elles concernent les créances d'indemnités résultant, à charge de l'Etat, de l'exécution de marchés publics. La Cour n'examinera dès lors la constitutionnalité des dispositions litigieuses qu'en ce qu'elles avantageraient l'Etat, en qualité de débiteur, par rapport aux autres débiteurs, et uniquement en ce qu'elles concernent ces créances d'indemnité.

B.3. S'il est vrai que l'Etat doit servir l'intérêt général alors que les particuliers peuvent se laisser guider par leur intérêt personnel, l'Etat débiteur, dans ses relations contractuelles en matière de travaux, fournitures et services, n'en peut pas moins être comparé avec les particuliers.

Quant à la première différence de traitement B.4. Si l'article 2262 du Code civil fixe à trente ans le délai de prescription des actions tant réelles que personnelles, beaucoup d'entre elles sont soumises à un délai de prescription plus court en matière contractuelle.

De l'ensemble des dispositions fixant les délais de prescription, il ressort en effet que le législateur a jugé nécessaire de prévoir, pour bon nombre de conventions courantes dans différents secteurs de la vie économique et sociale, des délais empêchant que des litiges s'élèvent entre les parties longtemps après que la relation contractuelle dans le cadre de laquelle les obligations sont nées a pris fin. Dans cette perspective apparaît une évolution de la portée de la prescription trentenaire : celle-ci n'est plus tant l'expression législative de ce que l'intérêt général exige dans la plupart des cas, qu'une règle de caractère résiduel.

B.5. En soumettant à la prescription quinquennale les actions dirigées contre l'Etat, le législateur a pris une mesure en rapport avec le but légitime poursuivi qui est de permettre de clôturer les comptes de l'Etat dans un délai raisonnable. Il a en effet considéré qu'une telle mesure était indispensable, parce qu'il faut que l'Etat puisse, à une époque déterminée, arrêter ses comptes : c'est une prescription d'ordre public et nécessaire au point de vue d'une bonne comptabilité Pasin. 1846, p. 287).

Lors des travaux préparatoires de la loi du 6 février 1970, il fut rappelé que, « faisant pour plus de 150 milliards de dépenses par an, manoeuvrant un appareil administratif lourd et compliqué, submergé de documents et d'archives, l'Etat est un débiteur de nature particulière » et que « des raisons d'ordre imposent que l'on mette fin aussitôt que possible aux revendications tirant leur origine d'affaires arriérées » Doc. parl., Chambre, 1964-1965, n° 971/1, p. 2; Doc. parl., Sénat, 1966-1967, n° 126, p. 4).

B.6. Dans son arrêt n° 32/96, la Cour a estimé que la mesure n'était pas raisonnablement justifiée à l'égard des dettes de l'Etat nées du préjudice causé à des propriétés par des travaux exécutés par l'Etat, en dehors de tout lien contractuel avec la personne préjudiciée, un tel préjudice pouvant n'apparaître que plusieurs années après que les travaux ont été exécutés. Le même raisonnement n'est pas pertinent à l'égard des actions qui opposent l'Etat à ses cocontractants en matière de marchés publics. En effet, de tels litiges naissent de l'inexécution ou de la mauvaise exécution de conventions librement conclues avec l'Etat et dont les clauses renseignent les parties sur la nature, la portée et l'ampleur de leurs obligations.

B.7. En soumettant de telles actions à la prescription quinquennale, le législateur a pris une mesure qui n'est pas disproportionnée par rapport à l'objectif qu'il poursuit.

La norme en cause n'est pas discriminatoire.

Quant à la deuxième différence de traitement B.8. L'article 7 de la loi du 6 février 1970 vise l'hypothèse particulière où des sommes ont été indûment payées en matière de traitements, pensions, allocations ou indemnités accessoires ou similaires à des traitements ou pensions. En disposant que la prescription des actions en répétition de ces sommes est de cinq ans (§ 1er) mais que ce délai est porté à trente ans dès que l'Etat a adressé une réclamation par lettre recommandée (§ 2, alinéa 2), le législateur a appliqué à ces actions le délai qui est généralement applicable en matière de répétition d'indu. Il n'est pas pertinent de comparer de telles actions à celles qui sont réglées par l'article 2 de la loi.

Par ailleurs, il n'importe pas de comparer les situations juridiques de l'Etat créancier et de l'Etat débiteur mais celle de l'Etat créancier par rapport aux autres créanciers.

Quant à la troisième différence de traitement B.9. Concernant la possibilité qu'aurait l'Etat de laisser se prescrire ses dettes en ne les ordonnançant pas, il convient de souligner que la disposition législative contestée indique aux créanciers de l'Etat que la prescription des créances qui ont été produites dans le délai légal n'est interrompue que si ces créances ont été ordonnancées dans le délai de cinq ans à partir du 1er janvier de l'année pendant laquelle elles ont été produites. Ce n'est que lorsque l'ordonnancement est intervenu dans les délais que le créancier, en l'absence de paiement, est dispensé de l'obligation d'interrompre le délai de prescription par exploit d'huissier ou de porter le litige devant les tribunaux. En effet, l'ordonnancement, acte administratif posé par une autorité déterminée, dont la date est certaine et contrôlable par la Cour des comptes, interrompt le délai de prescription. La disposition légale contestée n'est donc nullement une disposition potestative qui rendrait le créancier tributaire de l'intervention discrétionnaire de l'Etat débiteur, mais une disposition qui précise quand le créancier doit agir en justice pour exiger le paiement de sa créance et empêcher la prescription de celle-ci.

La mesure prévue à l'article 1er, § 1er, ne peut donc être considérée comme discriminatoire.

B.10. Les questions posées à la Cour appellent une réponse négative.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : - Les dispositions de l'article 1er, alinéa 1er, a) et b), de la loi du 6 février 1970 relative à la prescription des créances à charge ou au profit de l'Etat et des provinces et de l'article 100, alinéa 1er, 1° et 2°, des lois, coordonnées par l'arrêté royal du 17 juillet 1991, sur la comptabilité de l'Etat ne violent pas les articles 10 et 11 de la Constitution en ce que, en vertu de ces dispositions : a) une action en responsabilité contractuelle contre l'Etat se prescrit par cinq ans et non par trente ans selon le droit commun, b) il appartient au débiteur d'ordonnancer ou non pareille créance, avec effet sur la prescription de celle-ci. - L'article 1er de la loi du 6 février 1970 relative à la prescription des créances à charge ou au profit de l'Etat et des provinces ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution, en tant que cette disposition soumet à la prescription quinquennale les créances d'indemnité d'un entrepreneur, qui résultent d'un contrat, marché ou adjudication passé avec l'Etat, tandis que les mêmes créances d'indemnité sont soumises à la prescription trentenaire lorsque le maître de l'ouvrage est un particulier. - L'article 2 de cette même loi ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution en ce que cette disposition soumet à un nouveau délai de prescription quinquennale les créances (des particuliers à l'égard de l'Etat) dont le délai de prescription initiale a été interrompu conformément audit article 2 tandis que la prescription des créances au profit de l'Etat, lorsqu'elle est frappée d'interruption, fait courir un nouveau délai de trente ans par application de l'article 7, § 2, de ladite loi.

Ainsi prononcé en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 17 décembre 1997.

Le greffier, L. Potoms.

Le président, M. Melchior.

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