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Extrait de l'arrêt n° 60/2018 du 17 mai 2018 Numéro du rôle : 6823 En cause : la question préjudicielle relative à l'article 1385quinquies du Code judiciaire, posée par la Cour d'appel de Bruxelles. La Cour constitutionnelle, composée d après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet de la question préjudicielle et procédu(...) Extrait de l'arrêt n° 60/2018 du 17 mai 2018 Numéro du rôle : 6823 En cause : la question préjudicielle relative à l'article 1385quinquies du Code judiciaire, posée par la Cour d'appel de Bruxelles. La Cour constitutionnelle, composée d après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet de la question préjudicielle et procédu(...)
COUR CONSTITUTIONNELLE COUR CONSTITUTIONNELLE
Extrait de l'arrêt n° 60/2018 du 17 mai 2018 Extrait de l'arrêt n° 60/2018 du 17 mai 2018
Numéro du rôle : 6823 Numéro du rôle : 6823
En cause : la question préjudicielle relative à l'article En cause : la question préjudicielle relative à l'article
1385quinquies du Code judiciaire, posée par la Cour d'appel de 1385quinquies du Code judiciaire, posée par la Cour d'appel de
Bruxelles. Bruxelles.
La Cour constitutionnelle, La Cour constitutionnelle,
composée du président J. Spreutels, du président émérite E. De Groot, composée du président J. Spreutels, du président émérite E. De Groot,
conformément à l'article 60bis de la loi spéciale du 6 janvier 1989 conformément à l'article 60bis de la loi spéciale du 6 janvier 1989
sur la Cour constitutionnelle, et des juges J.-P. Snappe, J.-P. sur la Cour constitutionnelle, et des juges J.-P. Snappe, J.-P.
Moerman, E. Derycke, F. Daoût et R. Leysen, assistée du greffier P.-Y. Moerman, E. Derycke, F. Daoût et R. Leysen, assistée du greffier P.-Y.
Dutilleux, présidée par le président J. Spreutels, Dutilleux, présidée par le président J. Spreutels,
après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant :
I. Objet de la question préjudicielle et procédure I. Objet de la question préjudicielle et procédure
Par arrêt du 22 décembre 2017 en cause de Jacques Meganck et Geneviève Par arrêt du 22 décembre 2017 en cause de Jacques Meganck et Geneviève
Demassieux contre la Régie des bâtiments, la SA « Compagnie Demassieux contre la Régie des bâtiments, la SA « Compagnie
d'Entreprises CFE », la SA « Les Entreprises Louis De Waele » et la SA d'Entreprises CFE », la SA « Les Entreprises Louis De Waele » et la SA
« Grond- en Afbraakwerken G. & A. De Meuter », dont l'expédition est « Grond- en Afbraakwerken G. & A. De Meuter », dont l'expédition est
parvenue au greffe de la Cour le 22 janvier 2018, la Cour d'appel de parvenue au greffe de la Cour le 22 janvier 2018, la Cour d'appel de
Bruxelles a posé la question préjudicielle suivante : Bruxelles a posé la question préjudicielle suivante :
« L'article 1385quinquies du Code judiciaire, interprété en ce sens « L'article 1385quinquies du Code judiciaire, interprété en ce sens
qu'il ne permet pas à la partie à la requête de laquelle une astreinte qu'il ne permet pas à la partie à la requête de laquelle une astreinte
a déjà été imposée de demander une astreinte supplémentaire ou a déjà été imposée de demander une astreinte supplémentaire ou
d'augmenter l'astreinte imposée au cas où la partie condamnée à d'augmenter l'astreinte imposée au cas où la partie condamnée à
s'exécuter sous peine d'astreinte reste en défaut de ce faire, alors s'exécuter sous peine d'astreinte reste en défaut de ce faire, alors
qu'il permet à la partie condamnée qui s'est vu imposer une astreinte qu'il permet à la partie condamnée qui s'est vu imposer une astreinte
de demander au juge d'en prononcer la suppression, en suspendre le de demander au juge d'en prononcer la suppression, en suspendre le
cours durant le délai qu'il indique ou la réduire, si le condamné est cours durant le délai qu'il indique ou la réduire, si le condamné est
dans l'impossibilité définitive ou temporaire, totale ou partielle de dans l'impossibilité définitive ou temporaire, totale ou partielle de
satisfaire à la condamnation principale, viole-t-il les articles 10 et satisfaire à la condamnation principale, viole-t-il les articles 10 et
11 de la Constitution, le cas échéant lus en combinaison avec le droit 11 de la Constitution, le cas échéant lus en combinaison avec le droit
d'accès à un juge consacré par l'article 6 de la Convention européenne d'accès à un juge consacré par l'article 6 de la Convention européenne
de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ? ». de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ? ».
Le 8 février 2018, en application de l'article 72, alinéa 1er, de la Le 8 février 2018, en application de l'article 72, alinéa 1er, de la
loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, les loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, les
juges-rapporteurs F. Daoût et E. Derycke ont informé la Cour qu'ils juges-rapporteurs F. Daoût et E. Derycke ont informé la Cour qu'ils
pourraient être amenés à proposer de mettre fin à l'examen de pourraient être amenés à proposer de mettre fin à l'examen de
l'affaire par un arrêt rendu sur procédure préliminaire. l'affaire par un arrêt rendu sur procédure préliminaire.
(...) (...)
III. En droit III. En droit
(...) (...)
B.1. La question préjudicielle invite la Cour à se prononcer sur la B.1. La question préjudicielle invite la Cour à se prononcer sur la
compatibilité avec les articles 10 et 11 de la Constitution, le cas compatibilité avec les articles 10 et 11 de la Constitution, le cas
échéant lus en combinaison avec le droit d'accès à un juge consacré échéant lus en combinaison avec le droit d'accès à un juge consacré
par l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, de par l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, de
l'article 1385quinquies du Code judiciaire, interprété en ce sens l'article 1385quinquies du Code judiciaire, interprété en ce sens
qu'il ne permet pas à la partie à la requête de laquelle une astreinte qu'il ne permet pas à la partie à la requête de laquelle une astreinte
a déjà été imposée de demander une astreinte supplémentaire ou a déjà été imposée de demander une astreinte supplémentaire ou
d'augmenter l'astreinte imposée au cas où la partie condamnée à d'augmenter l'astreinte imposée au cas où la partie condamnée à
s'exécuter sous peine d'astreinte reste en défaut de ce faire, alors s'exécuter sous peine d'astreinte reste en défaut de ce faire, alors
qu'il permet à la partie condamnée qui s'est vu imposer une astreinte qu'il permet à la partie condamnée qui s'est vu imposer une astreinte
de demander au juge d'en prononcer la suppression, d'en suspendre le de demander au juge d'en prononcer la suppression, d'en suspendre le
cours durant le délai qu'il indique ou de la réduire, si le condamné cours durant le délai qu'il indique ou de la réduire, si le condamné
est dans l'impossibilité définitive ou temporaire, totale ou partielle est dans l'impossibilité définitive ou temporaire, totale ou partielle
de satisfaire à la condamnation principale. de satisfaire à la condamnation principale.
B.2. L'article 1385quinquies du Code judiciaire dispose : B.2. L'article 1385quinquies du Code judiciaire dispose :
« Le juge qui a ordonné l'astreinte peut en prononcer la suppression, « Le juge qui a ordonné l'astreinte peut en prononcer la suppression,
en suspendre le cours durant le délai qu'il indique ou la réduire, à en suspendre le cours durant le délai qu'il indique ou la réduire, à
la demande du condamné, si celui-ci est dans l'impossibilité la demande du condamné, si celui-ci est dans l'impossibilité
définitive ou temporaire, totale ou partielle de satisfaire à la définitive ou temporaire, totale ou partielle de satisfaire à la
condamnation principale. condamnation principale.
Dans la mesure où l'astreinte était acquise avant que l'impossibilité Dans la mesure où l'astreinte était acquise avant que l'impossibilité
se fût produite, le juge ne peut la supprimer ni la réduire ». se fût produite, le juge ne peut la supprimer ni la réduire ».
B.3. Par son arrêt n° 122/2012, du 18 octobre 2012, la Cour a dit pour B.3. Par son arrêt n° 122/2012, du 18 octobre 2012, la Cour a dit pour
droit que l'article 36 des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées le droit que l'article 36 des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées le
12 janvier 1973, viole les articles 10 et 11 de la Constitution en ce 12 janvier 1973, viole les articles 10 et 11 de la Constitution en ce
qu'il ne permet pas à la partie requérante à la requête de laquelle qu'il ne permet pas à la partie requérante à la requête de laquelle
une astreinte a déjà été imposée de demander d'imposer une astreinte une astreinte a déjà été imposée de demander d'imposer une astreinte
supplémentaire ou d'augmenter l'astreinte imposée au cas où l'autorité supplémentaire ou d'augmenter l'astreinte imposée au cas où l'autorité
reste de manière persistante en défaut d'exécuter l'arrêt reste de manière persistante en défaut d'exécuter l'arrêt
d'annulation, alors qu'il permet à l'autorité qui s'est vu imposer une d'annulation, alors qu'il permet à l'autorité qui s'est vu imposer une
astreinte de demander d'annuler cette astreinte, d'en suspendre astreinte de demander d'annuler cette astreinte, d'en suspendre
l'échéance ou de la diminuer en cas d'impossibilité permanente ou l'échéance ou de la diminuer en cas d'impossibilité permanente ou
temporaire ou partielle pour cette autorité de satisfaire à la temporaire ou partielle pour cette autorité de satisfaire à la
condamnation. condamnation.
La Cour a motivé sa décision comme suit : La Cour a motivé sa décision comme suit :
« B.4. L'autorité qui s'est vu imposer une astreinte peut demander au « B.4. L'autorité qui s'est vu imposer une astreinte peut demander au
Conseil d'Etat l'annulation, la suspension ou la diminution de cette Conseil d'Etat l'annulation, la suspension ou la diminution de cette
astreinte lorsqu'il lui est impossible de satisfaire à la condamnation astreinte lorsqu'il lui est impossible de satisfaire à la condamnation
principale. principale.
La personne à la requête de laquelle l'astreinte a été imposée ne peut La personne à la requête de laquelle l'astreinte a été imposée ne peut
demander l'augmentation de l'astreinte ou l'imposition d'une astreinte demander l'augmentation de l'astreinte ou l'imposition d'une astreinte
supplémentaire lorsque l'autorité reste en défaut d'exécuter l'arrêt supplémentaire lorsque l'autorité reste en défaut d'exécuter l'arrêt
d'annulation. d'annulation.
Cette différence de traitement fait l'objet de la question Cette différence de traitement fait l'objet de la question
préjudicielle. préjudicielle.
B.5. Selon le Conseil des ministres, la demande introduite par B.5. Selon le Conseil des ministres, la demande introduite par
l'autorité en vue d'obtenir l'annulation, la suspension ou la l'autorité en vue d'obtenir l'annulation, la suspension ou la
diminution de l'astreinte imposée, en cas d'impossibilité de diminution de l'astreinte imposée, en cas d'impossibilité de
satisfaire à la condamnation principale, ne peut être comparée à la satisfaire à la condamnation principale, ne peut être comparée à la
demande introduite par la partie requérante en vue d'obtenir demande introduite par la partie requérante en vue d'obtenir
l'augmentation de l'astreinte imposée ou l'imposition d'une astreinte l'augmentation de l'astreinte imposée ou l'imposition d'une astreinte
supplémentaire lorsque l'autorité publique reste en défaut d'exécuter supplémentaire lorsque l'autorité publique reste en défaut d'exécuter
l'arrêt d'annulation. l'arrêt d'annulation.
Il ne faut cependant pas confondre différence et non-comparabilité. Il ne faut cependant pas confondre différence et non-comparabilité.
Les effets différents recherchés par les auteurs d'une action en Les effets différents recherchés par les auteurs d'une action en
justice peuvent certes constituer un élément dans l'appréciation d'une justice peuvent certes constituer un élément dans l'appréciation d'une
différence de traitement, mais ils ne suffisent pas pour conclure à la différence de traitement, mais ils ne suffisent pas pour conclure à la
non-comparabilité, sous peine de priver de sa substance le contrôle non-comparabilité, sous peine de priver de sa substance le contrôle
qui est exercé au regard du principe d'égalité et de qui est exercé au regard du principe d'égalité et de
non-discrimination. non-discrimination.
B.6. Le droit à une exécution effective des décisions de justice B.6. Le droit à une exécution effective des décisions de justice
constitue l'un des éléments fondamentaux d'un Etat de droit. constitue l'un des éléments fondamentaux d'un Etat de droit.
L'exécution d'une décision de justice revêt une importance L'exécution d'une décision de justice revêt une importance
particulière dans le contexte du contentieux administratif. En particulière dans le contexte du contentieux administratif. En
introduisant un recours en annulation, le requérant vise à obtenir non introduisant un recours en annulation, le requérant vise à obtenir non
seulement la disparition de l'acte administratif litigieux, mais aussi seulement la disparition de l'acte administratif litigieux, mais aussi
la levée de ses effets. Une protection juridique effective et le la levée de ses effets. Une protection juridique effective et le
rétablissement de la légalité impliquent l'obligation pour rétablissement de la légalité impliquent l'obligation pour
l'administration de se plier à la décision du juge. L'obligation l'administration de se plier à la décision du juge. L'obligation
d'exécution ne se limite pas au dispositif; le fond de la décision d'exécution ne se limite pas au dispositif; le fond de la décision
doit aussi être respecté et appliqué. Si l'administration refuse ou doit aussi être respecté et appliqué. Si l'administration refuse ou
omet de s'exécuter, ou encore tarde à le faire, les garanties dont omet de s'exécuter, ou encore tarde à le faire, les garanties dont
bénéficie le justiciable au cours de la procédure perdent toute raison bénéficie le justiciable au cours de la procédure perdent toute raison
d'être (CEDH, 19 mars 1997, Hornsby c. Grèce, § 41; CEDH, 18 novembre d'être (CEDH, 19 mars 1997, Hornsby c. Grèce, § 41; CEDH, 18 novembre
2004, Zazanis c. Grèce, § 37; CEDH, 9 juin 2009, Nicola Silvestre c. 2004, Zazanis c. Grèce, § 37; CEDH, 9 juin 2009, Nicola Silvestre c.
Italie, § 59). Italie, § 59).
B.7. La possibilité d'imposer une astreinte, prévue par la disposition B.7. La possibilité d'imposer une astreinte, prévue par la disposition
en cause, a été jugée nécessaire par le législateur pour garantir le en cause, a été jugée nécessaire par le législateur pour garantir le
rétablissement de la légalité et une protection juridique effective. rétablissement de la légalité et une protection juridique effective.
Lorsqu'il en définit les conditions, le législateur ne peut porter une Lorsqu'il en définit les conditions, le législateur ne peut porter une
atteinte discriminatoire, au détriment de la partie à la requête de atteinte discriminatoire, au détriment de la partie à la requête de
laquelle l'astreinte a été prononcée, au droit à une exécution laquelle l'astreinte a été prononcée, au droit à une exécution
effective de l'arrêt d'annulation. effective de l'arrêt d'annulation.
Dès lors, si l'autorité peut introduire une demande en vue d'obtenir Dès lors, si l'autorité peut introduire une demande en vue d'obtenir
l'annulation, la suspension ou la diminution de l'astreinte imposée en l'annulation, la suspension ou la diminution de l'astreinte imposée en
cas de circonstance nouvelle, et plus précisément en cas cas de circonstance nouvelle, et plus précisément en cas
d'impossibilité de satisfaire à la condamnation principale, il n'est d'impossibilité de satisfaire à la condamnation principale, il n'est
pas raisonnablement justifié que la partie requérante ne puisse, de pas raisonnablement justifié que la partie requérante ne puisse, de
son côté, introduire une demande en vue d'obtenir l'augmentation de son côté, introduire une demande en vue d'obtenir l'augmentation de
l'astreinte imposée ou l'imposition d'une astreinte supplémentaire l'astreinte imposée ou l'imposition d'une astreinte supplémentaire
lorsque l'autorité reste en défaut d'exécuter l'arrêt d'annulation. lorsque l'autorité reste en défaut d'exécuter l'arrêt d'annulation.
B.8. Il est certes exact, comme le fait valoir la Région de B.8. Il est certes exact, comme le fait valoir la Région de
Bruxelles-Capitale, que le Conseil d'Etat, lorsqu'il fixe le montant Bruxelles-Capitale, que le Conseil d'Etat, lorsqu'il fixe le montant
de l'astreinte, a déjà tenu compte de la résistance prévisible de de l'astreinte, a déjà tenu compte de la résistance prévisible de
l'autorité publique quant à l'exécution de l'arrêt d'annulation, mais l'autorité publique quant à l'exécution de l'arrêt d'annulation, mais
cet élément ne repose nécessairement que sur une estimation et non sur cet élément ne repose nécessairement que sur une estimation et non sur
des faits avérés. L'imprévisible persistance de l'autorité dans des faits avérés. L'imprévisible persistance de l'autorité dans
l'inexécution peut donc également être considérée comme une l'inexécution peut donc également être considérée comme une
circonstance nouvelle. circonstance nouvelle.
L'existence d'autres solutions que celle de l'exécution d'un arrêt L'existence d'autres solutions que celle de l'exécution d'un arrêt
d'annulation, à laquelle le Conseil des ministres fait référence, ne d'annulation, à laquelle le Conseil des ministres fait référence, ne
constitue pas non plus une justification satisfaisante de la constitue pas non plus une justification satisfaisante de la
différence de traitement en cause. La possibilité d'introduire, devant différence de traitement en cause. La possibilité d'introduire, devant
le Conseil d'Etat, un nouveau recours en annulation, dirigé contre la le Conseil d'Etat, un nouveau recours en annulation, dirigé contre la
conduite contraire à l'arrêt d'annulation adoptée par l'autorité et conduite contraire à l'arrêt d'annulation adoptée par l'autorité et
fondé sur la violation de l'autorité de chose jugée dudit arrêt, ainsi fondé sur la violation de l'autorité de chose jugée dudit arrêt, ainsi
que la possibilité de demander au juge civil d'ordonner que soit posé que la possibilité de demander au juge civil d'ordonner que soit posé
un acte administratif déterminé constituent, pour la partie un acte administratif déterminé constituent, pour la partie
requérante, des obstacles procéduraux supplémentaires qui limitent de requérante, des obstacles procéduraux supplémentaires qui limitent de
manière disproportionnée son droit à une exécution effective d'une manière disproportionnée son droit à une exécution effective d'une
décision de justice. Une action en réparation devant le juge ordinaire décision de justice. Une action en réparation devant le juge ordinaire
risque de n'aboutir la plupart du temps qu'à une exécution par risque de n'aboutir la plupart du temps qu'à une exécution par
équivalent, ce qui est précisément le défaut auquel le législateur équivalent, ce qui est précisément le défaut auquel le législateur
entendait remédier en instaurant l'astreinte. entendait remédier en instaurant l'astreinte.
B.9. La disposition en cause n'est par conséquent pas compatible avec B.9. La disposition en cause n'est par conséquent pas compatible avec
les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'elle ne permet pas à les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'elle ne permet pas à
la partie requérante à la requête de laquelle une astreinte a déjà été la partie requérante à la requête de laquelle une astreinte a déjà été
imposée de demander d'imposer une astreinte supplémentaire ou imposée de demander d'imposer une astreinte supplémentaire ou
d'augmenter l'astreinte imposée au cas où l'autorité reste de manière d'augmenter l'astreinte imposée au cas où l'autorité reste de manière
persistante en défaut d'exécuter l'arrêt d'annulation, alors qu'elle persistante en défaut d'exécuter l'arrêt d'annulation, alors qu'elle
permet à l'autorité qui s'est vu imposer une astreinte de demander permet à l'autorité qui s'est vu imposer une astreinte de demander
d'annuler cette astreinte, d'en suspendre l'échéance ou de la diminuer d'annuler cette astreinte, d'en suspendre l'échéance ou de la diminuer
en cas d'impossibilité permanente ou temporaire ou partielle pour en cas d'impossibilité permanente ou temporaire ou partielle pour
cette autorité de satisfaire à la condamnation principale. cette autorité de satisfaire à la condamnation principale.
B.10. Dès lors que cette lacune est située dans le texte soumis à la B.10. Dès lors que cette lacune est située dans le texte soumis à la
Cour, il appartient au juge a quo de mettre fin à Cour, il appartient au juge a quo de mettre fin à
l'inconstitutionnalité constatée par celle-ci, ce constat étant l'inconstitutionnalité constatée par celle-ci, ce constat étant
exprimé en des termes suffisamment précis et complets pour permettre exprimé en des termes suffisamment précis et complets pour permettre
que la disposition en cause soit appliquée dans le respect des que la disposition en cause soit appliquée dans le respect des
articles 10 et 11 de la Constitution, en appliquant par analogie les articles 10 et 11 de la Constitution, en appliquant par analogie les
articles 20 à 24 de l'arrêté royal du 2 avril 1991 déterminant la articles 20 à 24 de l'arrêté royal du 2 avril 1991 déterminant la
procédure devant la section d'administration du Conseil d'Etat en procédure devant la section d'administration du Conseil d'Etat en
matière d'astreinte ». matière d'astreinte ».
B.4.1. Tout comme l'astreinte prononcée par le Conseil d'Etat, B.4.1. Tout comme l'astreinte prononcée par le Conseil d'Etat,
l'astreinte prononcée par les juridictions de l'ordre judiciaire a l'astreinte prononcée par les juridictions de l'ordre judiciaire a
pour objectif de garantir le respect de l'autorité de la chose jugée pour objectif de garantir le respect de l'autorité de la chose jugée
des décisions qu'elles prononcent. des décisions qu'elles prononcent.
B.4.2. Pour les mêmes motifs que ceux qui ont été exposés dans l'arrêt B.4.2. Pour les mêmes motifs que ceux qui ont été exposés dans l'arrêt
n° 122/2012 précité, l'article 1385quinquies du Code judiciaire n'est n° 122/2012 précité, l'article 1385quinquies du Code judiciaire n'est
pas compatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution en ce pas compatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution en ce
qu'il ne permet pas à la partie à la requête de laquelle une astreinte qu'il ne permet pas à la partie à la requête de laquelle une astreinte
a déjà été imposée de demander une astreinte supplémentaire ou a déjà été imposée de demander une astreinte supplémentaire ou
d'augmenter l'astreinte imposée au cas où la partie condamnée à d'augmenter l'astreinte imposée au cas où la partie condamnée à
s'exécuter sous peine d'astreinte reste en défaut de ce faire, alors s'exécuter sous peine d'astreinte reste en défaut de ce faire, alors
qu'il permet à la partie condamnée qui s'est vu imposer une astreinte qu'il permet à la partie condamnée qui s'est vu imposer une astreinte
de demander au juge d'en prononcer la suppression, d'en suspendre le de demander au juge d'en prononcer la suppression, d'en suspendre le
cours durant le délai qu'il indique ou de la réduire, si le condamné cours durant le délai qu'il indique ou de la réduire, si le condamné
est dans l'impossibilité définitive ou temporaire, totale ou est dans l'impossibilité définitive ou temporaire, totale ou
partielle, de satisfaire à la condamnation principale. partielle, de satisfaire à la condamnation principale.
B.4.3. La question préjudicielle appelle une réponse affirmative. B.4.3. La question préjudicielle appelle une réponse affirmative.
B.5. Dès lors que le constat de la lacune qui a été fait en B.4.2 est B.5. Dès lors que le constat de la lacune qui a été fait en B.4.2 est
exprimé en des termes suffisamment précis et complets qui permettent exprimé en des termes suffisamment précis et complets qui permettent
l'application de la disposition en cause dans le respect des normes de l'application de la disposition en cause dans le respect des normes de
référence sur la base desquelles la Cour exerce son contrôle, il référence sur la base desquelles la Cour exerce son contrôle, il
appartient au juge a quo de mettre fin à la violation de ces normes. appartient au juge a quo de mettre fin à la violation de ces normes.
Par ces motifs, Par ces motifs,
la Cour la Cour
dit pour droit : dit pour droit :
L'article 1385quinquies du Code judiciaire viole les articles 10 et 11 L'article 1385quinquies du Code judiciaire viole les articles 10 et 11
de la Constitution en ce qu'il ne permet pas à la partie à la requête de la Constitution en ce qu'il ne permet pas à la partie à la requête
de laquelle une astreinte a déjà été imposée de demander une astreinte de laquelle une astreinte a déjà été imposée de demander une astreinte
supplémentaire ou d'augmenter l'astreinte imposée au cas où la partie supplémentaire ou d'augmenter l'astreinte imposée au cas où la partie
condamnée à s'exécuter sous peine d'astreinte reste en défaut de ce condamnée à s'exécuter sous peine d'astreinte reste en défaut de ce
faire. faire.
Ainsi rendu en langue française et en langue néerlandaise, Ainsi rendu en langue française et en langue néerlandaise,
conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur
la Cour constitutionnelle, le 17 mai 2018. la Cour constitutionnelle, le 17 mai 2018.
Le greffier, Le greffier,
P.-Y. Dutilleux P.-Y. Dutilleux
Le président, Le président,
J. Spreutels J. Spreutels
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