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Extrait de l'arrêt n° 66/2013 du 16 mai 2013 Numéro du rôle : 5400 En cause : le recours en annulation des articles 7, 9 et 11 de la loi du 7 novembre 2011 portant des dispositions fiscales et diverses, introduit par l'ASBL « Ligue des Contri La Cour constitutionnelle, composée des présidents R. Henneuse et M. Bossuyt, et des juges E. De(...) Extrait de l'arrêt n° 66/2013 du 16 mai 2013 Numéro du rôle : 5400 En cause : le recours en annulation des articles 7, 9 et 11 de la loi du 7 novembre 2011 portant des dispositions fiscales et diverses, introduit par l'ASBL « Ligue des Contri La Cour constitutionnelle, composée des présidents R. Henneuse et M. Bossuyt, et des juges E. De(...)
COUR CONSTITUTIONNELLE COUR CONSTITUTIONNELLE
Extrait de l'arrêt n° 66/2013 du 16 mai 2013 Extrait de l'arrêt n° 66/2013 du 16 mai 2013
Numéro du rôle : 5400 Numéro du rôle : 5400
En cause : le recours en annulation des articles 7, 9 et 11 de la loi En cause : le recours en annulation des articles 7, 9 et 11 de la loi
du 7 novembre 2011 portant des dispositions fiscales et diverses, du 7 novembre 2011 portant des dispositions fiscales et diverses,
introduit par l'ASBL « Ligue des Contribuables » et autres. introduit par l'ASBL « Ligue des Contribuables » et autres.
La Cour constitutionnelle, La Cour constitutionnelle,
composée des présidents R. Henneuse et M. Bossuyt, et des juges E. De composée des présidents R. Henneuse et M. Bossuyt, et des juges E. De
Groot, L. Lavrysen, A. Alen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke, Groot, L. Lavrysen, A. Alen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke,
J. Spreutels, T. Merckx-Van Goey, P. Nihoul et F. Daoût, assistée du J. Spreutels, T. Merckx-Van Goey, P. Nihoul et F. Daoût, assistée du
greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président R. Henneuse, greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président R. Henneuse,
après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant :
I. Objet du recours et procédure I. Objet du recours et procédure
Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 10 Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 10
mai 2012 et parvenue au greffe le 14 mai 2012, un recours en mai 2012 et parvenue au greffe le 14 mai 2012, un recours en
annulation des articles 7, 9 et 11 de la loi du 7 novembre 2011 annulation des articles 7, 9 et 11 de la loi du 7 novembre 2011
portant des dispositions fiscales et diverses (publiée au Moniteur portant des dispositions fiscales et diverses (publiée au Moniteur
belge du 10 novembre 2011, troisième édition) a été introduit par belge du 10 novembre 2011, troisième édition) a été introduit par
l'ASBL « Ligue des Contribuables », dont le siège social est établi à l'ASBL « Ligue des Contribuables », dont le siège social est établi à
1000 Bruxelles, rue Lens 13, Alexis Chevalier, demeurant à 5080 1000 Bruxelles, rue Lens 13, Alexis Chevalier, demeurant à 5080
Rhisnes, rue D'Arthey 7, Olivier Laurent, demeurant à 1050 Bruxelles, Rhisnes, rue D'Arthey 7, Olivier Laurent, demeurant à 1050 Bruxelles,
rue du Sceptre 84, Frédéric Ledain, demeurant à 3740 Bilzen, Broekem rue du Sceptre 84, Frédéric Ledain, demeurant à 3740 Bilzen, Broekem
19A, et Pierre-Yves Novalet, demeurant à 1380 Lasne, route de l'Etat 19A, et Pierre-Yves Novalet, demeurant à 1380 Lasne, route de l'Etat
5. 5.
(...) (...)
II. En droit II. En droit
(...) (...)
Quant aux dispositions attaquées Quant aux dispositions attaquées
B.1.1. Les articles 7, 9 et 11 de la loi du 7 novembre 2011 portant B.1.1. Les articles 7, 9 et 11 de la loi du 7 novembre 2011 portant
des dispositions fiscales et diverses disposent : des dispositions fiscales et diverses disposent :
«

Art. 7.Dans l'article 319bis, alinéa 2, [du Code des impôts sur les

«

Art. 7.Dans l'article 319bis, alinéa 2, [du Code des impôts sur les

revenus 1992,] inséré par la loi du 27 décembre 2006, les mots ' à revenus 1992,] inséré par la loi du 27 décembre 2006, les mots ' à
l'article 318. ' sont remplacés par les mots ' aux articles 318, 322, l'article 318. ' sont remplacés par les mots ' aux articles 318, 322,
§§ 2 à 4, et 327, § 3. ' ». §§ 2 à 4, et 327, § 3. ' ».
«

Art. 9.Dans l'article 333/1 du même Code, inséré par la loi du 14

«

Art. 9.Dans l'article 333/1 du même Code, inséré par la loi du 14

avril 2011, les modifications suivantes sont apportées : avril 2011, les modifications suivantes sont apportées :
1° dans le § 1er, l'alinéa 1er est remplacé par ce qui suit : 1° dans le § 1er, l'alinéa 1er est remplacé par ce qui suit :
' Dans les cas visés aux articles 322, § 2, et 327, § 3, alinéa 2, ' Dans les cas visés aux articles 322, § 2, et 327, § 3, alinéa 2,
l'administration informe le contribuable de l'indice ou des indices de l'administration informe le contribuable de l'indice ou des indices de
fraude fiscale ou des éléments sur la base desquels elle estime que fraude fiscale ou des éléments sur la base desquels elle estime que
les investigations menées peuvent éventuellement conduire à une les investigations menées peuvent éventuellement conduire à une
application de l'article 341 et qui justifient une demande de application de l'article 341 et qui justifient une demande de
renseignements auprès d'un établissement financier. Cette notification renseignements auprès d'un établissement financier. Cette notification
s'effectue par lettre recommandée simultanément à l'envoi de la s'effectue par lettre recommandée simultanément à l'envoi de la
demande de renseignements précitée. '; demande de renseignements précitée. ';
2° le § 1er est complété par un alinéa rédigé comme suit : 2° le § 1er est complété par un alinéa rédigé comme suit :
' L'alinéa 1er n'est pas d'application aux demandes de renseignements ' L'alinéa 1er n'est pas d'application aux demandes de renseignements
provenant d'administrations étrangères telles que visées à l'article provenant d'administrations étrangères telles que visées à l'article
322, § 4. '; 322, § 4. ';
3° dans le § 2, 2°, les mots ' à l'article 322, § 2, ' sont remplacés 3° dans le § 2, 2°, les mots ' à l'article 322, § 2, ' sont remplacés
par les mots ' aux articles 322, § 2, et 327, § 3, alinéa 2, '; par les mots ' aux articles 322, § 2, et 327, § 3, alinéa 2, ';
4° dans le § 2, 5°, les mots ' l'article 322, §§ 2 à 4. ' sont 4° dans le § 2, 5°, les mots ' l'article 322, §§ 2 à 4. ' sont
remplacés par les mots ' les articles 322, §§ 2 à 4, et 327, § 3, remplacés par les mots ' les articles 322, §§ 2 à 4, et 327, § 3,
alinéa 2. ' ». alinéa 2. ' ».
« Art.11. Les articles 7 à 9 produisent leurs effets le 1er juillet « Art.11. Les articles 7 à 9 produisent leurs effets le 1er juillet
2011 à l'exception de l'article 9, 1°, qui entre en vigueur le premier 2011 à l'exception de l'article 9, 1°, qui entre en vigueur le premier
jour du mois qui suit celui de la publication de la présente loi au jour du mois qui suit celui de la publication de la présente loi au
Moniteur belge. Moniteur belge.
L'article 2 est applicable aux plus-values réalisées à partir de la L'article 2 est applicable aux plus-values réalisées à partir de la
période imposable qui se rattache à l'exercice d'imposition 2012 ». période imposable qui se rattache à l'exercice d'imposition 2012 ».
B.1.2. Tels qu'ils ont été modifiés par ces dispositions, les articles B.1.2. Tels qu'ils ont été modifiés par ces dispositions, les articles
319bis et 333/1 du Code des impôts sur les revenus 1992 (CIR 1992) 319bis et 333/1 du Code des impôts sur les revenus 1992 (CIR 1992)
disposent : disposent :
«

Art. 319bis.Les fonctionnaires chargés du recouvrement disposent de

«

Art. 319bis.Les fonctionnaires chargés du recouvrement disposent de

tous les pouvoirs d'investigation prévus par le présent Code en vue tous les pouvoirs d'investigation prévus par le présent Code en vue
d'établir la situation patrimoniale du débiteur pour assurer le d'établir la situation patrimoniale du débiteur pour assurer le
recouvrement des impôts et des précomptes dus en principal et recouvrement des impôts et des précomptes dus en principal et
additionnels, des accroissements d'impôts et des amendes additionnels, des accroissements d'impôts et des amendes
administratives, des intérêts et des frais. administratives, des intérêts et des frais.
Les pouvoirs des fonctionnaires chargés du recouvrement visés à Les pouvoirs des fonctionnaires chargés du recouvrement visés à
l'alinéa 1er s'exercent également sans les limitations prévues à l'alinéa 1er s'exercent également sans les limitations prévues à
l'égard des établissements visés aux articles 318, 322, §§ 2 à 4 et l'égard des établissements visés aux articles 318, 322, §§ 2 à 4 et
327, § 3 ». 327, § 3 ».
«

Art. 333/1.§ 1er. Dans les cas visés aux articles 322, § 2, et 327,

«

Art. 333/1.§ 1er. Dans les cas visés aux articles 322, § 2, et 327,

§ 3, alinéa 2, l'administration informe le contribuable de l'indice ou § 3, alinéa 2, l'administration informe le contribuable de l'indice ou
des indices de fraude fiscale ou des éléments sur la base desquels des indices de fraude fiscale ou des éléments sur la base desquels
elle estime que les investigations menées peuvent éventuellement elle estime que les investigations menées peuvent éventuellement
conduire à une application de l'article 341 et qui justifient une conduire à une application de l'article 341 et qui justifient une
demande de renseignements auprès d'un établissement financier. Cette demande de renseignements auprès d'un établissement financier. Cette
notification s'effectue par lettre recommandée simultanément à l'envoi notification s'effectue par lettre recommandée simultanément à l'envoi
de la demande de renseignements précitée. de la demande de renseignements précitée.
L'alinéa 1er ne s'applique pas lorsque les droits du Trésor sont en L'alinéa 1er ne s'applique pas lorsque les droits du Trésor sont en
péril. La notification s'effectue le cas échéant post factum par envoi péril. La notification s'effectue le cas échéant post factum par envoi
recommandé à la poste, au plus tard 30 jours après l'envoi de la recommandé à la poste, au plus tard 30 jours après l'envoi de la
demande de renseignements visée à l'alinéa 1er. demande de renseignements visée à l'alinéa 1er.
L'alinéa 1er n'est pas d'application aux demandes de renseignements L'alinéa 1er n'est pas d'application aux demandes de renseignements
provenant d'administrations étrangères telles que visées à l'article provenant d'administrations étrangères telles que visées à l'article
322, § 4. 322, § 4.
§ 2. L'administration fiscale fournit une fois par an au ministre un § 2. L'administration fiscale fournit une fois par an au ministre un
rapport qui contient, entre autres, les informations suivantes : rapport qui contient, entre autres, les informations suivantes :
1° le nombre de fois que, conformément à l'article 318, alinéa 2, une 1° le nombre de fois que, conformément à l'article 318, alinéa 2, une
enquête a été menée auprès d'établissements financiers et que des enquête a été menée auprès d'établissements financiers et que des
données ont été utilisées en vue de l'imposition de leurs clients; données ont été utilisées en vue de l'imposition de leurs clients;
2° le nombre de fois que, conformément aux articles 322, § 2, et 327, 2° le nombre de fois que, conformément aux articles 322, § 2, et 327,
§ 3, alinéa 2, une enquête a été menée et que des données ont été § 3, alinéa 2, une enquête a été menée et que des données ont été
demandées auprès d'établissements financiers; demandées auprès d'établissements financiers;
3° les indices concrets, répartis en catégories, par lesquels les 3° les indices concrets, répartis en catégories, par lesquels les
personnes visées à l'article 322, § 2, alinéa 2, se sont laissé guider personnes visées à l'article 322, § 2, alinéa 2, se sont laissé guider
dans leur décision d'accorder une autorisation; dans leur décision d'accorder une autorisation;
4° le nombre de décisions positives et négatives des directeurs; 4° le nombre de décisions positives et négatives des directeurs;
5° une évaluation globale, tant sur le plan technique que juridique, 5° une évaluation globale, tant sur le plan technique que juridique,
de la manière dont a été menée la procédure selon les articles 322, §§ de la manière dont a été menée la procédure selon les articles 322, §§
2 à 4, et 327, § 3, alinéa 2. 2 à 4, et 327, § 3, alinéa 2.
Ce rapport est publié par le Ministre des Finances et transmis à la Ce rapport est publié par le Ministre des Finances et transmis à la
Chambre des représentants ». Chambre des représentants ».
B.1.3. L'article 318 auquel se réfèrent les dispositions attaquées B.1.3. L'article 318 auquel se réfèrent les dispositions attaquées
énonce : énonce :
« Par dérogation aux dispositions de l'article 317, et sans préjudice « Par dérogation aux dispositions de l'article 317, et sans préjudice
de l'application des articles 315, 315bis et 316, l'administration de l'application des articles 315, 315bis et 316, l'administration
n'est pas autorisée à recueillir, dans les comptes, livres et n'est pas autorisée à recueillir, dans les comptes, livres et
documents des établissements de banque, de change, de crédit et documents des établissements de banque, de change, de crédit et
d'épargne, des renseignements en vue de l'imposition de leurs clients. d'épargne, des renseignements en vue de l'imposition de leurs clients.
Si cependant, l'enquête effectuée sur base des articles 315, 315bis et Si cependant, l'enquête effectuée sur base des articles 315, 315bis et
316 a fait apparaître des éléments concrets permettant de présumer 316 a fait apparaître des éléments concrets permettant de présumer
l'existence ou la préparation d'un mécanisme de fraude fiscale, le l'existence ou la préparation d'un mécanisme de fraude fiscale, le
fonctionnaire désigné à cette fin par le Ministre des Finances peut fonctionnaire désigné à cette fin par le Ministre des Finances peut
prescrire à un fonctionnaire du grade d'inspecteur au moins, de prescrire à un fonctionnaire du grade d'inspecteur au moins, de
relever dans les comptes, livres et documents de l'établissement, les relever dans les comptes, livres et documents de l'établissement, les
renseignements permettant de compléter l'enquête et de déterminer les renseignements permettant de compléter l'enquête et de déterminer les
impôts dus par ce client ». impôts dus par ce client ».
Avant sa modification par l'article 166 de la loi-programme (I) du 29 Avant sa modification par l'article 166 de la loi-programme (I) du 29
mars 2012, entré en vigueur le 16 avril 2012, l'article 322 du CIR mars 2012, entré en vigueur le 16 avril 2012, l'article 322 du CIR
1992, auquel se réfèrent les dispositions attaquées, était libellé 1992, auquel se réfèrent les dispositions attaquées, était libellé
comme suit : comme suit :
« § 1er. L'administration peut, en ce qui concerne un contribuable « § 1er. L'administration peut, en ce qui concerne un contribuable
déterminé, recueillir des attestations écrites, entendre des tiers, déterminé, recueillir des attestations écrites, entendre des tiers,
procéder à des enquêtes et requérir, dans le délai qu'elle fixe, ce procéder à des enquêtes et requérir, dans le délai qu'elle fixe, ce
délai pouvant être prolongé pour de justes motifs, des personnes délai pouvant être prolongé pour de justes motifs, des personnes
physiques ou morales, ainsi que des associations n'ayant pas la physiques ou morales, ainsi que des associations n'ayant pas la
personnalité juridique, la production de tous renseignements qu'elle personnalité juridique, la production de tous renseignements qu'elle
juge nécessaires à l'effet d'assurer la juste perception de l'impôt. juge nécessaires à l'effet d'assurer la juste perception de l'impôt.
Toutefois, le droit d'entendre des tiers et de procéder à des enquêtes Toutefois, le droit d'entendre des tiers et de procéder à des enquêtes
ne peut être exercé que par un agent ayant un grade supérieur à celui ne peut être exercé que par un agent ayant un grade supérieur à celui
de contrôleur. de contrôleur.
§ 2. Lorsque l'administration dispose dans le cadre de l'enquête d'un § 2. Lorsque l'administration dispose dans le cadre de l'enquête d'un
ou de plusieurs indices de fraude fiscale ou lorsque l'administration ou de plusieurs indices de fraude fiscale ou lorsque l'administration
envisage de déterminer la base imposable envisage de déterminer la base imposable
conformément à l'article 341, un établissement de banque, de change, conformément à l'article 341, un établissement de banque, de change,
de crédit ou d'épargne est considéré comme un tiers soumis sans de crédit ou d'épargne est considéré comme un tiers soumis sans
restriction à l'application des dispositions du paragraphe 1er. restriction à l'application des dispositions du paragraphe 1er.
Le cas échéant, un fonctionnaire du grade de directeur au moins, Le cas échéant, un fonctionnaire du grade de directeur au moins,
désigné à cet effet par le Ministre des Finances, peut prescrire à un désigné à cet effet par le Ministre des Finances, peut prescrire à un
fonctionnaire du grade d'inspecteur au moins de réclamer auprès d'un fonctionnaire du grade d'inspecteur au moins de réclamer auprès d'un
établissement de banque, de change, de crédit et d'épargne tout établissement de banque, de change, de crédit et d'épargne tout
renseignement pouvant être utile pour déterminer le montant des renseignement pouvant être utile pour déterminer le montant des
revenus imposables du contribuable. revenus imposables du contribuable.
L'agent désigné par le ministre peut uniquement accorder L'agent désigné par le ministre peut uniquement accorder
l'autorisation : l'autorisation :
1° après que l'agent qui mène l'enquête a réclamé au cours de 1° après que l'agent qui mène l'enquête a réclamé au cours de
l'enquête les informations et données relatives aux comptes, par le l'enquête les informations et données relatives aux comptes, par le
biais d'une demande de renseignements telle que visée à l'article 316, biais d'une demande de renseignements telle que visée à l'article 316,
et a stipulé clairement à cette occasion qu'il peut requérir et a stipulé clairement à cette occasion qu'il peut requérir
l'application de l'article 322, § 2, si le contribuable dissimule les l'application de l'article 322, § 2, si le contribuable dissimule les
informations demandées ou s'il refuse de les communiquer. La mission informations demandées ou s'il refuse de les communiquer. La mission
visée à l'alinéa 2 ne peut prendre cours qu'à l'expiration du délai visée à l'alinéa 2 ne peut prendre cours qu'à l'expiration du délai
visé à l'article 316; visé à l'article 316;
2° après avoir constaté que l'enquête effectuée implique une 2° après avoir constaté que l'enquête effectuée implique une
application éventuelle de l'article 341 ou qu'elle a fourni un ou application éventuelle de l'article 341 ou qu'elle a fourni un ou
plusieurs indices de fraude fiscale et qu'il existe des présomptions plusieurs indices de fraude fiscale et qu'il existe des présomptions
que le contribuable dissimule des données à ce sujet auprès d'un que le contribuable dissimule des données à ce sujet auprès d'un
établissement visé à l'alinéa 2 ou refuse de les communiquer lui-même. établissement visé à l'alinéa 2 ou refuse de les communiquer lui-même.
§ 3. Tout établissement de banque, de change, de crédit et d'épargne § 3. Tout établissement de banque, de change, de crédit et d'épargne
est tenu de communiquer les données suivantes à un point de contact est tenu de communiquer les données suivantes à un point de contact
central tenu par la Banque Nationale de Belgique : l'identité des central tenu par la Banque Nationale de Belgique : l'identité des
clients et les numéros de leurs comptes et contrats. clients et les numéros de leurs comptes et contrats.
Lorsque l'agent désigné par le ministre, visé au paragraphe 2, alinéa Lorsque l'agent désigné par le ministre, visé au paragraphe 2, alinéa
3, a constaté que l'enquête visée au paragraphe 2, a révélé un ou 3, a constaté que l'enquête visée au paragraphe 2, a révélé un ou
plusieurs indices de fraude fiscale, il peut demander au point de plusieurs indices de fraude fiscale, il peut demander au point de
contact central les données disponibles relatives à ce contribuable. contact central les données disponibles relatives à ce contribuable.
Le Roi détermine le mode de fonctionnement du point de contact Le Roi détermine le mode de fonctionnement du point de contact
central. central.
§ 4. Les paragraphes 2 et 3 sont également applicables lorsqu'un Etat § 4. Les paragraphes 2 et 3 sont également applicables lorsqu'un Etat
étranger requiert des renseignements : étranger requiert des renseignements :
1° soit dans le cas visé à l'article 338, § 5; 1° soit dans le cas visé à l'article 338, § 5;
2° soit conformément aux dispositions relatives à l'échange de 2° soit conformément aux dispositions relatives à l'échange de
renseignements figurant dans une convention préventive de la double renseignements figurant dans une convention préventive de la double
imposition qui est applicable ou une autre convention internationale imposition qui est applicable ou une autre convention internationale
garantissant la réciprocité. garantissant la réciprocité.
La demande de l'Etat étranger est assimilée à un indice visé au La demande de l'Etat étranger est assimilée à un indice visé au
paragraphe 2. Dans ce cas, l'agent désigné par le ministre accorde, paragraphe 2. Dans ce cas, l'agent désigné par le ministre accorde,
par dérogation au paragraphe 2, l'autorisation sur la base de la par dérogation au paragraphe 2, l'autorisation sur la base de la
demande de l'Etat étranger ». demande de l'Etat étranger ».
Quant à la recevabilité Quant à la recevabilité
En ce qui concerne l'intérêt En ce qui concerne l'intérêt
B.2.1. Le Conseil des ministres conteste l'intérêt des parties B.2.1. Le Conseil des ministres conteste l'intérêt des parties
requérantes à agir à l'encontre de l'article 9 de la loi du 7 novembre requérantes à agir à l'encontre de l'article 9 de la loi du 7 novembre
2011, qui ne concernerait que les contribuables étrangers. 2011, qui ne concernerait que les contribuables étrangers.
B.2.2. Dès lors que les demandes de renseignements provenant B.2.2. Dès lors que les demandes de renseignements provenant
d'administrations étrangères visées à l'article 322, § 4, du CIR 1992 d'administrations étrangères visées à l'article 322, § 4, du CIR 1992
peuvent concerner des contribuables dont la protection relève de peuvent concerner des contribuables dont la protection relève de
l'objet social de l'ASBL « Ligue des Contribuables », cette personne l'objet social de l'ASBL « Ligue des Contribuables », cette personne
morale justifie de l'intérêt à agir à l'encontre de l'article 9 de la morale justifie de l'intérêt à agir à l'encontre de l'article 9 de la
loi du 7 novembre 2011. loi du 7 novembre 2011.
B.2.3. Etant donné que l'intérêt d'au moins une des parties B.2.3. Etant donné que l'intérêt d'au moins une des parties
requérantes est établi, il n'est pas nécessaire d'examiner l'intérêt requérantes est établi, il n'est pas nécessaire d'examiner l'intérêt
des autres parties qui ont introduit conjointement la requête dans des autres parties qui ont introduit conjointement la requête dans
cette affaire. cette affaire.
L'exception est rejetée. L'exception est rejetée.
En ce qui concerne l'objet du recours En ce qui concerne l'objet du recours
B.3.1. Le Conseil des ministres estime que la Cour doit limiter B.3.1. Le Conseil des ministres estime que la Cour doit limiter
l'objet du recours en annulation à l'article 9, 2°, de la loi du 7 l'objet du recours en annulation à l'article 9, 2°, de la loi du 7
novembre 2011 et à l'article 11, alinéa 1er, en ce qu'il fixe la prise novembre 2011 et à l'article 11, alinéa 1er, en ce qu'il fixe la prise
des effets des articles 7 et 9 de cette loi. des effets des articles 7 et 9 de cette loi.
B.3.2. Pour satisfaire aux exigences de l'article 6 de la loi spéciale B.3.2. Pour satisfaire aux exigences de l'article 6 de la loi spéciale
du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, les moyens de la du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, les moyens de la
requête doivent faire connaître, parmi les règles dont la Cour requête doivent faire connaître, parmi les règles dont la Cour
garantit le respect, celles qui seraient violées ainsi que les garantit le respect, celles qui seraient violées ainsi que les
dispositions qui violeraient ces règles et exposer en quoi ces règles dispositions qui violeraient ces règles et exposer en quoi ces règles
auraient été transgressées par ces dispositions. auraient été transgressées par ces dispositions.
Cette disposition exige donc que les parties requérantes indiquent Cette disposition exige donc que les parties requérantes indiquent
quels sont les articles qui, selon elles, violent les normes quels sont les articles qui, selon elles, violent les normes
mentionnées dans les moyens, dont la Cour garantit le respect. mentionnées dans les moyens, dont la Cour garantit le respect.
La Cour doit déterminer l'étendue du recours en annulation en fonction La Cour doit déterminer l'étendue du recours en annulation en fonction
du contenu de la requête, et notamment sur la base de l'exposé des du contenu de la requête, et notamment sur la base de l'exposé des
moyens. Elle limite son examen aux dispositions au sujet desquelles il moyens. Elle limite son examen aux dispositions au sujet desquelles il
est exposé en quoi elles violeraient les dispositions invoquées dans est exposé en quoi elles violeraient les dispositions invoquées dans
les moyens. les moyens.
B.3.3. Il ressort de la requête que seuls l'article 7, l'article 9, B.3.3. Il ressort de la requête que seuls l'article 7, l'article 9,
2°, et l'article 11, alinéa 1er, en ce qu'il fixe la prise d'effet des 2°, et l'article 11, alinéa 1er, en ce qu'il fixe la prise d'effet des
articles 7 et 9 de la loi du 7 novembre 2011, font l'objet des articles 7 et 9 de la loi du 7 novembre 2011, font l'objet des
critiques des parties requérantes. critiques des parties requérantes.
B.3.4. Le recours est par conséquent irrecevable en ce qu'il est B.3.4. Le recours est par conséquent irrecevable en ce qu'il est
dirigé contre les modifications apportées à l'article 333/1 du CIR dirigé contre les modifications apportées à l'article 333/1 du CIR
1992 par les 1°, 3° et 4° de l'article 9 de la loi du 7 novembre 2011. 1992 par les 1°, 3° et 4° de l'article 9 de la loi du 7 novembre 2011.
Il est également irrecevable en ce qu'il est dirigé contre l'alinéa 2 Il est également irrecevable en ce qu'il est dirigé contre l'alinéa 2
de l'article 11 de la loi du 7 novembre 2011, ainsi que contre de l'article 11 de la loi du 7 novembre 2011, ainsi que contre
l'alinéa 1er de cet article en ce qu'il fixe l'entrée en vigueur l'alinéa 1er de cet article en ce qu'il fixe l'entrée en vigueur
d'autres articles que les articles 7 et 9, 2°, de cette loi. d'autres articles que les articles 7 et 9, 2°, de cette loi.
Quant au fond Quant au fond
En ce qui concerne l'article 7 de la loi du 7 novembre 2011 En ce qui concerne l'article 7 de la loi du 7 novembre 2011
B.4.1. Les parties requérantes prennent un moyen de la violation des B.4.1. Les parties requérantes prennent un moyen de la violation des
articles 10, 11, 22 et 29 de la Constitution, lus en combinaison avec articles 10, 11, 22 et 29 de la Constitution, lus en combinaison avec
l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme. Elles l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme. Elles
estiment que l'article 7 de la loi du 7 novembre 2011 a pour effet de estiment que l'article 7 de la loi du 7 novembre 2011 a pour effet de
supprimer toute limite au pouvoir d'investigation des fonctionnaires supprimer toute limite au pouvoir d'investigation des fonctionnaires
chargés du recouvrement, c'est-à-dire les receveurs, en ce qui chargés du recouvrement, c'est-à-dire les receveurs, en ce qui
concerne les comptes bancaires de leurs débiteurs, les contribuables. concerne les comptes bancaires de leurs débiteurs, les contribuables.
Elles font valoir par ailleurs que, si la modification apportée à Elles font valoir par ailleurs que, si la modification apportée à
l'article 319bis du CIR 1992 par l'article 7 de la loi du 7 novembre l'article 319bis du CIR 1992 par l'article 7 de la loi du 7 novembre
2011 doit être comprise comme permettant également aux receveurs 2011 doit être comprise comme permettant également aux receveurs
d'avoir accès au point de contact central institué par l'article 322, d'avoir accès au point de contact central institué par l'article 322,
§ 3, ce qu'elles contestent, cette disposition méconnaît les § 3, ce qu'elles contestent, cette disposition méconnaît les
dispositions constitutionnelles invoquées. dispositions constitutionnelles invoquées.
B.4.2. Le Conseil des ministres considère que le moyen doit être B.4.2. Le Conseil des ministres considère que le moyen doit être
déclaré irrecevable en ce qu'il invoque la violation des articles 22 déclaré irrecevable en ce qu'il invoque la violation des articles 22
et 29 de la Constitution par l'article 7 de la loi du 7 novembre 2011 et 29 de la Constitution par l'article 7 de la loi du 7 novembre 2011
en raison du fait que les informations obtenues par le receveur en raison du fait que les informations obtenues par le receveur
pourraient être transmises à l'agent taxateur, parce que les parties pourraient être transmises à l'agent taxateur, parce que les parties
ne précisent pas dans leur requête comment les informations peuvent ne précisent pas dans leur requête comment les informations peuvent
être transmises. être transmises.
Aux termes de la requête, les renseignements obtenus par les Aux termes de la requête, les renseignements obtenus par les
fonctionnaires chargés du recouvrement sont susceptibles d'être fonctionnaires chargés du recouvrement sont susceptibles d'être
communiqués à tous les autres fonctionnaires de l'administration communiqués à tous les autres fonctionnaires de l'administration
fiscale, y compris à ceux qui sont chargés de déterminer la base fiscale, y compris à ceux qui sont chargés de déterminer la base
imposable et d'établir l'impôt. Dans leur mémoire en réponse, les imposable et d'établir l'impôt. Dans leur mémoire en réponse, les
parties requérantes font référence à cet égard aux articles 335 et 336 parties requérantes font référence à cet égard aux articles 335 et 336
du CIR 1992 et à un arrêt de la Cour de cassation du 18 novembre 2010 du CIR 1992 et à un arrêt de la Cour de cassation du 18 novembre 2010
(Pas., 2010, n° 683). (Pas., 2010, n° 683).
B.4.3. Le grief relatif à la transmission des renseignements obtenus B.4.3. Le grief relatif à la transmission des renseignements obtenus
par les fonctionnaires chargés du recouvrement aux autres par les fonctionnaires chargés du recouvrement aux autres
fonctionnaires de l'administration fiscale ressort à suffisance de la fonctionnaires de l'administration fiscale ressort à suffisance de la
requête. requête.
L'exception est rejetée. L'exception est rejetée.
B.5.1. L'article 319bis, alinéa 2, du CIR 1992 trouve son origine dans B.5.1. L'article 319bis, alinéa 2, du CIR 1992 trouve son origine dans
l'article 8 de la loi-programme (I) du 27 décembre 2006 et disposait l'article 8 de la loi-programme (I) du 27 décembre 2006 et disposait
jusqu'à sa modification par l'article 7 de la loi du 7 novembre 2011 : jusqu'à sa modification par l'article 7 de la loi du 7 novembre 2011 :
« Les pouvoirs des fonctionnaires chargés du recouvrement visés à « Les pouvoirs des fonctionnaires chargés du recouvrement visés à
l'alinéa 1er s'exercent également sans les limitations prévues à l'alinéa 1er s'exercent également sans les limitations prévues à
l'égard des établissements visés à l'article 318 ». l'égard des établissements visés à l'article 318 ».
Il ressort des travaux préparatoires de cette loi que le législateur a Il ressort des travaux préparatoires de cette loi que le législateur a
voulu accroître les pouvoirs des fonctionnaires chargés du voulu accroître les pouvoirs des fonctionnaires chargés du
recouvrement de l'impôt : recouvrement de l'impôt :
« Cela implique donc que les fonctionnaires chargés du recouvrement « Cela implique donc que les fonctionnaires chargés du recouvrement
peuvent, sans que les limitations de pouvoirs prévues à l'article 318, peuvent, sans que les limitations de pouvoirs prévues à l'article 318,
CIR 92 leur soient applicables, prendre connaissance de tous les CIR 92 leur soient applicables, prendre connaissance de tous les
éléments relatifs à la détermination de la situation patrimoniale d'un éléments relatifs à la détermination de la situation patrimoniale d'un
débiteur d'impôts, qui sont détenus par un ou plusieurs établissements débiteur d'impôts, qui sont détenus par un ou plusieurs établissements
visés à l'article 318, CIR 92, tout en excluant que les éléments ainsi visés à l'article 318, CIR 92, tout en excluant que les éléments ainsi
communiqués soient utilisés en vue de l'établissement de l'impôt dû communiqués soient utilisés en vue de l'établissement de l'impôt dû
par ce débiteur » (Doc. parl., Chambre, 2006-2007, DOC 51-2773/001, p. par ce débiteur » (Doc. parl., Chambre, 2006-2007, DOC 51-2773/001, p.
18). 18).
B.5.2. A la suite des modifications apportées à l'article 322 du CIR B.5.2. A la suite des modifications apportées à l'article 322 du CIR
1992 et à l'insertion d'un article 333/1 dans ce Code par les articles 1992 et à l'insertion d'un article 333/1 dans ce Code par les articles
55 et 56 de la loi du 14 avril 2011 portant des dispositions diverses, 55 et 56 de la loi du 14 avril 2011 portant des dispositions diverses,
le législateur a voulu, par l'article 7 de la loi du 7 novembre 2011, le législateur a voulu, par l'article 7 de la loi du 7 novembre 2011,
adapter l'article 319bis, alinéa 2, du CIR 1992 pour que les adapter l'article 319bis, alinéa 2, du CIR 1992 pour que les
fonctionnaires chargés du recouvrement de l'impôt ne soient pas tenus fonctionnaires chargés du recouvrement de l'impôt ne soient pas tenus
de suivre les mêmes règles que les fonctionnaires taxateurs. L'exposé de suivre les mêmes règles que les fonctionnaires taxateurs. L'exposé
des motifs mentionne à ce sujet : des motifs mentionne à ce sujet :
« Afin de permettre aux fonctionnaires du recouvrement, dans le cadre « Afin de permettre aux fonctionnaires du recouvrement, dans le cadre
de leur mission spécifique, de pouvoir continuer de demander aux de leur mission spécifique, de pouvoir continuer de demander aux
établissements de banque, de change, de crédit ou d'épargne des établissements de banque, de change, de crédit ou d'épargne des
informations sur leurs clients, tendant à établir leur situation informations sur leurs clients, tendant à établir leur situation
patrimoniale, sans devoir respecter les conditions prévues aux patrimoniale, sans devoir respecter les conditions prévues aux
articles 322, §§ 2 à 4 et 327, § 3, CIR 92, comme c'est actuellement articles 322, §§ 2 à 4 et 327, § 3, CIR 92, comme c'est actuellement
déjà le cas relativement aux informations demandées en application de déjà le cas relativement aux informations demandées en application de
l'article 318, CIR 92, l'article 319bis, CIR 92 a été adapté. l'article 318, CIR 92, l'article 319bis, CIR 92 a été adapté.
Le point de contact central mentionné à l'article 322, § 3, CIR 92 Le point de contact central mentionné à l'article 322, § 3, CIR 92
sera conformément à l'article 322, § 1er, CIR 92, considéré comme un sera conformément à l'article 322, § 1er, CIR 92, considéré comme un
tiers par les receveurs » (Doc. parl., Chambre, 2010-2011, DOC tiers par les receveurs » (Doc. parl., Chambre, 2010-2011, DOC
53-1737/001, p. 6). 53-1737/001, p. 6).
B.6. La collecte et le traitement des données relatives aux comptes et B.6. La collecte et le traitement des données relatives aux comptes et
transactions financières constituent une ingérence dans le droit au transactions financières constituent une ingérence dans le droit au
respect de la vie privée des personnes concernées, ainsi que des respect de la vie privée des personnes concernées, ainsi que des
personnes qui ont réalisé des opérations financières avec celles-ci. personnes qui ont réalisé des opérations financières avec celles-ci.
Même si la collecte et le traitement de telles données ne permettent Même si la collecte et le traitement de telles données ne permettent
pas toujours de pénétrer directement dans des communications qui pas toujours de pénétrer directement dans des communications qui
peuvent concerner la vie privée dans ce qu'elle a de plus intime, ces peuvent concerner la vie privée dans ce qu'elle a de plus intime, ces
mesures d'investigation peuvent cependant révéler des informations mesures d'investigation peuvent cependant révéler des informations
plus ou moins précises et concordantes sur « la conduite, les opinions plus ou moins précises et concordantes sur « la conduite, les opinions
ou les sentiments » de la personne qui en fait l'objet (voy. mutatis ou les sentiments » de la personne qui en fait l'objet (voy. mutatis
mutandis, CEDH, 2 septembre 2010, Uzun c. Allemagne, § 52). mutandis, CEDH, 2 septembre 2010, Uzun c. Allemagne, § 52).
La Cour doit dès lors veiller à ce que le législateur, lorsqu'il crée La Cour doit dès lors veiller à ce que le législateur, lorsqu'il crée
des possibilités pour l'administration fiscale de prendre connaissance des possibilités pour l'administration fiscale de prendre connaissance
de données relatives aux comptes et transactions financières, respecte de données relatives aux comptes et transactions financières, respecte
les conditions dans lesquelles une telle ingérence dans le droit à la les conditions dans lesquelles une telle ingérence dans le droit à la
protection de la vie privée et, le cas échéant, de la vie familiale protection de la vie privée et, le cas échéant, de la vie familiale
est admissible au regard de l'article 22 de la Constitution, lu en est admissible au regard de l'article 22 de la Constitution, lu en
combinaison avec l'article 8 de la Convention européenne des droits de combinaison avec l'article 8 de la Convention européenne des droits de
l'homme. l'homme.
B.7. Selon les parties requérantes, les dispositions attaquées B.7. Selon les parties requérantes, les dispositions attaquées
devraient également être contrôlées à la lumière des garanties prévues devraient également être contrôlées à la lumière des garanties prévues
par l'article 29 de la Constitution. par l'article 29 de la Constitution.
Cette disposition, qui garantit le secret des lettres, interdit en Cette disposition, qui garantit le secret des lettres, interdit en
principe que le courrier puisse être intercepté et ouvert. principe que le courrier puisse être intercepté et ouvert.
Les dispositions attaquées, qui n'autorisent pas l'administration Les dispositions attaquées, qui n'autorisent pas l'administration
fiscale à intercepter le courrier entre les établissements financiers fiscale à intercepter le courrier entre les établissements financiers
et leurs clients, ne violent donc pas l'article 29 de la Constitution. et leurs clients, ne violent donc pas l'article 29 de la Constitution.
B.8.1. L'article 22 de la Constitution a pour objet de protéger les B.8.1. L'article 22 de la Constitution a pour objet de protéger les
personnes contre les ingérences dans leur vie privée et familiale. personnes contre les ingérences dans leur vie privée et familiale.
La Cour doit dès lors encore vérifier si l'obligation faite aux La Cour doit dès lors encore vérifier si l'obligation faite aux
établissements financiers de divulguer à l'administration fiscale la établissements financiers de divulguer à l'administration fiscale la
correspondance qu'ils ont échangée avec leurs clients est compatible correspondance qu'ils ont échangée avec leurs clients est compatible
avec le droit au respect de la vie privée. avec le droit au respect de la vie privée.
B.8.2. Il ressort des travaux préparatoires de l'article 22 de la B.8.2. Il ressort des travaux préparatoires de l'article 22 de la
Constitution que le Constituant a entendu chercher « à mettre le plus Constitution que le Constituant a entendu chercher « à mettre le plus
possible la proposition en concordance avec l'article 8 de la possible la proposition en concordance avec l'article 8 de la
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des
libertés fondamentales [...], afin d'éviter toute contestation sur le libertés fondamentales [...], afin d'éviter toute contestation sur le
contenu respectif de l'article de la Constitution et de l'article 8 de contenu respectif de l'article de la Constitution et de l'article 8 de
la [Convention] » (Doc. parl., Chambre, 1992-1993, n° 997/5, p. 2). la [Convention] » (Doc. parl., Chambre, 1992-1993, n° 997/5, p. 2).
B.8.3. Les droits que garantissent l'article 22 de la Constitution et B.8.3. Les droits que garantissent l'article 22 de la Constitution et
l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme ne sont l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme ne sont
pas absolus. Bien que l'article 22 de la Constitution reconnaisse à pas absolus. Bien que l'article 22 de la Constitution reconnaisse à
chacun le droit au respect de sa vie privée et familiale, cette chacun le droit au respect de sa vie privée et familiale, cette
disposition ajoute en effet immédiatement : « sauf dans les cas et disposition ajoute en effet immédiatement : « sauf dans les cas et
conditions fixés par la loi ». conditions fixés par la loi ».
Cette disposition constitutionnelle garantit donc qu'aucune ingérence Cette disposition constitutionnelle garantit donc qu'aucune ingérence
des autorités dans le droit au respect de la vie privée et familiale des autorités dans le droit au respect de la vie privée et familiale
ne puisse intervenir si elle n'est pas prévue par des règles ne puisse intervenir si elle n'est pas prévue par des règles
suffisamment précises, adoptées par une assemblée délibérante suffisamment précises, adoptées par une assemblée délibérante
démocratiquement élue, toute ingérence dans ce droit devant répondre à démocratiquement élue, toute ingérence dans ce droit devant répondre à
un besoin social impérieux et être proportionnée à l'objectif légitime un besoin social impérieux et être proportionnée à l'objectif légitime
poursuivi. poursuivi.
B.9. L'article 7 de la loi du 7 novembre 2011 poursuit un objectif B.9. L'article 7 de la loi du 7 novembre 2011 poursuit un objectif
d'intérêt général au sens de l'article 8.2 de la Convention européenne d'intérêt général au sens de l'article 8.2 de la Convention européenne
des droits de l'homme, en ce que le recouvrement efficace de l'impôt des droits de l'homme, en ce que le recouvrement efficace de l'impôt
vise à garantir l'égalité des citoyens devant la loi fiscale et à vise à garantir l'égalité des citoyens devant la loi fiscale et à
sauvegarder les intérêts du Trésor, ce qui est nécessaire pour assurer sauvegarder les intérêts du Trésor, ce qui est nécessaire pour assurer
« le bien-être économique du pays ». « le bien-être économique du pays ».
B.10. La Cour doit encore vérifier si cette ingérence satisfait au B.10. La Cour doit encore vérifier si cette ingérence satisfait au
principe de légalité et si elle est raisonnablement justifiée. principe de légalité et si elle est raisonnablement justifiée.
B.11.1. En réservant au législateur compétent le pouvoir de fixer dans B.11.1. En réservant au législateur compétent le pouvoir de fixer dans
quels cas et à quelles conditions il peut être porté atteinte au droit quels cas et à quelles conditions il peut être porté atteinte au droit
au respect de la vie privée, l'article 22 de la Constitution garantit au respect de la vie privée, l'article 22 de la Constitution garantit
à tout citoyen qu'aucune immixtion dans ce droit ne peut avoir lieu à tout citoyen qu'aucune immixtion dans ce droit ne peut avoir lieu
qu'en vertu de règles adoptées par une assemblée délibérante, qu'en vertu de règles adoptées par une assemblée délibérante,
démocratiquement élue. démocratiquement élue.
Outre cette exigence de légalité formelle, l'article 22 de la Outre cette exigence de légalité formelle, l'article 22 de la
Constitution impose également que l'ingérence dans le droit au respect Constitution impose également que l'ingérence dans le droit au respect
de la vie privée soit libellée en des termes clairs et suffisamment de la vie privée soit libellée en des termes clairs et suffisamment
précis qui permettent d'appréhender de manière prévisible les précis qui permettent d'appréhender de manière prévisible les
hypothèses dans lesquelles le législateur autorise pareille ingérence hypothèses dans lesquelles le législateur autorise pareille ingérence
dans le droit au respect de la vie privée. dans le droit au respect de la vie privée.
De même, l'exigence de prévisibilité à laquelle la loi doit satisfaire De même, l'exigence de prévisibilité à laquelle la loi doit satisfaire
pour être jugée conforme à l'article 8 de la Convention européenne des pour être jugée conforme à l'article 8 de la Convention européenne des
droits de l'homme implique que sa formulation soit assez précise pour droits de l'homme implique que sa formulation soit assez précise pour
que tout individu puisse prévoir, à un degré raisonnable dans les que tout individu puisse prévoir, à un degré raisonnable dans les
circonstances de la cause, les conséquences pouvant résulter d'un acte circonstances de la cause, les conséquences pouvant résulter d'un acte
déterminé (CEDH, 17 février 2004, Maestri c. Italie, § 30). déterminé (CEDH, 17 février 2004, Maestri c. Italie, § 30).
La loi doit offrir des garanties contre les atteintes arbitraires de La loi doit offrir des garanties contre les atteintes arbitraires de
la puissance publique au droit au respect de la vie privée, à savoir la puissance publique au droit au respect de la vie privée, à savoir
en délimitant le pouvoir d'appréciation des autorités concernées avec en délimitant le pouvoir d'appréciation des autorités concernées avec
une netteté suffisante, d'une part, et en prévoyant un contrôle une netteté suffisante, d'une part, et en prévoyant un contrôle
juridictionnel effectif, d'autre part (voy., entre autres, CEDH, 4 mai juridictionnel effectif, d'autre part (voy., entre autres, CEDH, 4 mai
2000, Rotaru c. Roumanie, § 55; 6 juin 2006, Segerstedt-Wiberg c. 2000, Rotaru c. Roumanie, § 55; 6 juin 2006, Segerstedt-Wiberg c.
Suède, § 76; 4 juillet 2006, Lupsa c. Roumanie, § 34). Suède, § 76; 4 juillet 2006, Lupsa c. Roumanie, § 34).
B.11.2. L'article 7 de la loi du 7 novembre 2011 autorise une B.11.2. L'article 7 de la loi du 7 novembre 2011 autorise une
ingérence de l'administration dans la vie privée du contribuable en ingérence de l'administration dans la vie privée du contribuable en
vue d'établir la situation patrimoniale de celui-ci afin d'assurer le vue d'établir la situation patrimoniale de celui-ci afin d'assurer le
recouvrement de l'impôt, sans lui imposer de respecter les conditions recouvrement de l'impôt, sans lui imposer de respecter les conditions
prévues aux articles 322, §§ 2 à 4, et 327, § 3, du CIR 1992. prévues aux articles 322, §§ 2 à 4, et 327, § 3, du CIR 1992.
Le recouvrement de l'impôt intervient à un moment où la dette d'impôt Le recouvrement de l'impôt intervient à un moment où la dette d'impôt
est établie et dans l'hypothèse où elle n'est pas payée par le est établie et dans l'hypothèse où elle n'est pas payée par le
contribuable. contribuable.
La disposition attaquée satisfait dès lors au principe de légalité. La disposition attaquée satisfait dès lors au principe de légalité.
B.12. La Cour doit encore examiner si l'ingérence dans le droit au B.12. La Cour doit encore examiner si l'ingérence dans le droit au
respect de la vie privée du contribuable et des personnes avec respect de la vie privée du contribuable et des personnes avec
lesquelles il a effectué des opérations financières est lesquelles il a effectué des opérations financières est
raisonnablement justifiée. A cet effet, il y a lieu de vérifier la raisonnablement justifiée. A cet effet, il y a lieu de vérifier la
pertinence et la suffisance des motifs invoqués pour justifier cette pertinence et la suffisance des motifs invoqués pour justifier cette
ingérence ainsi que de s'assurer du respect du principe de ingérence ainsi que de s'assurer du respect du principe de
proportionnalité. proportionnalité.
B.13. En autorisant l'administration à s'ingérer dans la vie privée du B.13. En autorisant l'administration à s'ingérer dans la vie privée du
contribuable en vue d'établir la situation patrimoniale de celui-ci contribuable en vue d'établir la situation patrimoniale de celui-ci
afin d'assurer le recouvrement de l'impôt, sans l'obliger à respecter afin d'assurer le recouvrement de l'impôt, sans l'obliger à respecter
les conditions prévues aux articles 322, §§ 2 à 4, et 327, § 3, du CIR les conditions prévues aux articles 322, §§ 2 à 4, et 327, § 3, du CIR
1992, l'article 7 de la loi du 7 novembre 2011 traite de manière 1992, l'article 7 de la loi du 7 novembre 2011 traite de manière
différente les contribuables, selon qu'une atteinte à leur vie privée différente les contribuables, selon qu'une atteinte à leur vie privée
intervient au moment de l'établissement de l'impôt ou au moment du intervient au moment de l'établissement de l'impôt ou au moment du
recouvrement de celui-ci. recouvrement de celui-ci.
Contrairement à ce que soutient le Conseil des ministres, il s'agit de Contrairement à ce que soutient le Conseil des ministres, il s'agit de
catégories comparables. catégories comparables.
La différence de traitement peut toutefois se justifier objectivement La différence de traitement peut toutefois se justifier objectivement
et raisonnablement par le fait que l'atteinte portée au droit à la vie et raisonnablement par le fait que l'atteinte portée au droit à la vie
privée en vue du recouvrement de l'impôt ne nécessite pas autant de privée en vue du recouvrement de l'impôt ne nécessite pas autant de
recherches que la détermination du montant des revenus imposables du recherches que la détermination du montant des revenus imposables du
contribuable. Les pouvoirs d'investigation dont disposent les contribuable. Les pouvoirs d'investigation dont disposent les
fonctionnaires chargés du recouvrement visent uniquement à établir la fonctionnaires chargés du recouvrement visent uniquement à établir la
situation patrimoniale du débiteur pour assurer le recouvrement de situation patrimoniale du débiteur pour assurer le recouvrement de
l'impôt. Les conditions prévues par les articles 322, §§ 2 à 4, et l'impôt. Les conditions prévues par les articles 322, §§ 2 à 4, et
327, § 3, du CIR 1992 pour la recherche de renseignements permettant 327, § 3, du CIR 1992 pour la recherche de renseignements permettant
la détermination du montant des revenus imposables du contribuable la détermination du montant des revenus imposables du contribuable
sont pertinentes lorsqu'il s'agit d'établir l'impôt sur la base sont pertinentes lorsqu'il s'agit d'établir l'impôt sur la base
d'indices de fraude fiscale ou de distorsion entre les revenus d'indices de fraude fiscale ou de distorsion entre les revenus
déclarés et le niveau de vie du contribuable; elles ne le sont pas déclarés et le niveau de vie du contribuable; elles ne le sont pas
lorsqu'il s'agit de recouvrer un impôt dû. lorsqu'il s'agit de recouvrer un impôt dû.
Par ailleurs, seuls des renseignements nécessaires à l'établissement Par ailleurs, seuls des renseignements nécessaires à l'établissement
de la situation patrimoniale du débiteur en vue du recouvrement de de la situation patrimoniale du débiteur en vue du recouvrement de
l'impôt peuvent être sollicités auprès des établissements financiers l'impôt peuvent être sollicités auprès des établissements financiers
par les fonctionnaires chargés du recouvrement, ces fonctionnaires par les fonctionnaires chargés du recouvrement, ces fonctionnaires
étant de surcroît tenus de respecter, lors de la collecte et du étant de surcroît tenus de respecter, lors de la collecte et du
traitement de ces renseignements, les prescriptions de la loi du 8 traitement de ces renseignements, les prescriptions de la loi du 8
décembre 1992 « relative à la protection de la vie privée à l'égard décembre 1992 « relative à la protection de la vie privée à l'égard
des traitements de données à caractère personnel », dans les limites des traitements de données à caractère personnel », dans les limites
de son champ d'application matériel. de son champ d'application matériel.
En outre, « celui qui intervient, à quelque titre que ce soit, dans En outre, « celui qui intervient, à quelque titre que ce soit, dans
l'application des lois fiscales [...] est tenu de garder, en dehors de l'application des lois fiscales [...] est tenu de garder, en dehors de
l'exercice de ses fonctions, le secret le plus absolu au sujet de tout l'exercice de ses fonctions, le secret le plus absolu au sujet de tout
ce dont il a eu connaissance par suite de l'exécution de sa mission » ce dont il a eu connaissance par suite de l'exécution de sa mission »
(article 337, alinéa 1er, du CIR 1992). La violation de ce secret (article 337, alinéa 1er, du CIR 1992). La violation de ce secret
professionnel est punie conformément à l'article 458 du Code pénal professionnel est punie conformément à l'article 458 du Code pénal
(article 453 du CIR 1992). Cette obligation implique que (article 453 du CIR 1992). Cette obligation implique que
l'administration fiscale ne peut utiliser ou communiquer à des tiers l'administration fiscale ne peut utiliser ou communiquer à des tiers
des informations relatives à la vie privée du contribuable obtenues des informations relatives à la vie privée du contribuable obtenues
auprès d'un établissement financier qui ne seraient pas nécessaires à auprès d'un établissement financier qui ne seraient pas nécessaires à
assurer la juste perception de l'impôt. assurer la juste perception de l'impôt.
Enfin, il ressort clairement des travaux préparatoires cités en B.5.1 Enfin, il ressort clairement des travaux préparatoires cités en B.5.1
et B.5.2 que le législateur a exclu que les informations obtenues pour et B.5.2 que le législateur a exclu que les informations obtenues pour
permettre le recouvrement de l'impôt soient utilisées pour permettre le recouvrement de l'impôt soient utilisées pour
l'établissement de l'impôt et que le point de contact central l'établissement de l'impôt et que le point de contact central
mentionné à l'article 322, § 3, CIR 1992 est, conformément à l'article mentionné à l'article 322, § 3, CIR 1992 est, conformément à l'article
322, § 1er, CIR 1992, considéré par les receveurs comme un tiers. 322, § 1er, CIR 1992, considéré par les receveurs comme un tiers.
B.14. Le moyen n'est pas fondé. B.14. Le moyen n'est pas fondé.
Quant à l'article 9, 2°, de la loi du 7 novembre 2011 Quant à l'article 9, 2°, de la loi du 7 novembre 2011
B.15. Les parties requérantes prennent un moyen de la violation des B.15. Les parties requérantes prennent un moyen de la violation des
articles 10, 11, 22 et 29 de la Constitution, lus en combinaison avec articles 10, 11, 22 et 29 de la Constitution, lus en combinaison avec
l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme. l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme.
L'article 9 de la loi du 7 novembre 2011 a supprimé l'obligation L'article 9 de la loi du 7 novembre 2011 a supprimé l'obligation
d'informer le contribuable lorsque la demande de renseignements d'informer le contribuable lorsque la demande de renseignements
provient d'un Etat étranger. Les parties requérantes considèrent cette provient d'un Etat étranger. Les parties requérantes considèrent cette
disposition comme discriminatoire et non respectueuse du droit à la disposition comme discriminatoire et non respectueuse du droit à la
vie privée. vie privée.
B.16. L'article 9, 2°, de la loi du 7 novembre 2011 insère dans B.16. L'article 9, 2°, de la loi du 7 novembre 2011 insère dans
l'article 333/1, § 1er, du CIR 1992 un alinéa qui dispose que l'alinéa l'article 333/1, § 1er, du CIR 1992 un alinéa qui dispose que l'alinéa
1er du paragraphe 1er n'est pas d'application aux demandes de 1er du paragraphe 1er n'est pas d'application aux demandes de
renseignements provenant d'administrations étrangères, visées à renseignements provenant d'administrations étrangères, visées à
l'article 322, § 4. l'article 322, § 4.
B.17. Il ressort des travaux préparatoires de la loi du 7 novembre B.17. Il ressort des travaux préparatoires de la loi du 7 novembre
2011 que, selon le législateur, l'obligation d'information relève de 2011 que, selon le législateur, l'obligation d'information relève de
la responsabilité de l'administration étrangère. L'exposé des motifs la responsabilité de l'administration étrangère. L'exposé des motifs
indique : indique :
« En effet, lorsqu'une administration étrangère pose une telle « En effet, lorsqu'une administration étrangère pose une telle
demande, il est censé, vu les procédures particulières pour de telles demande, il est censé, vu les procédures particulières pour de telles
demandes, que l'administration étrangère a effectué préalablement les demandes, que l'administration étrangère a effectué préalablement les
investigations nécessaires auprès du contribuable même de sorte qu'une investigations nécessaires auprès du contribuable même de sorte qu'une
notification préalable [ne] mènerait qu'à une perte de temps inutile » notification préalable [ne] mènerait qu'à une perte de temps inutile »
(Doc. parl., Chambre, 2010-2011, Doc 53-1737/001, p. 7). (Doc. parl., Chambre, 2010-2011, Doc 53-1737/001, p. 7).
Dans son avis, la section de législation du Conseil d'Etat s'est Dans son avis, la section de législation du Conseil d'Etat s'est
interrogée sur la justification de la différence de traitement en interrogée sur la justification de la différence de traitement en
matière de notification entre les demandes d'origine nationale et matière de notification entre les demandes d'origine nationale et
celles provenant de l'étranger. Elle a mis en doute la perte de temps celles provenant de l'étranger. Elle a mis en doute la perte de temps
invoquée, dès lors que « conformément à l'article 331/1, § 1er, du CIR invoquée, dès lors que « conformément à l'article 331/1, § 1er, du CIR
92, l'information relative à la demande de l'Etat étranger de lever le 92, l'information relative à la demande de l'Etat étranger de lever le
secret bancaire est simultanée à la demande de renseignements à la secret bancaire est simultanée à la demande de renseignements à la
banque » (Doc. parl., Chambre, 2010-2011, Doc 53-1737/001, p. 26). La banque » (Doc. parl., Chambre, 2010-2011, Doc 53-1737/001, p. 26). La
section de législation du Conseil d'Etat a par ailleurs relevé une section de législation du Conseil d'Etat a par ailleurs relevé une
contradiction entre l'exposé des motifs, qui part de l'idée que le contradiction entre l'exposé des motifs, qui part de l'idée que le
contribuable a été informé par l'administration étrangère, et les contribuable a été informé par l'administration étrangère, et les
explications du délégué, qui considère que l'information du explications du délégué, qui considère que l'information du
contribuable peut poser problème à l'administration étrangère (ibid.). contribuable peut poser problème à l'administration étrangère (ibid.).
Le projet de loi a maintenu la disposition malgré l'avis de la section Le projet de loi a maintenu la disposition malgré l'avis de la section
de législation. L'exposé des motifs indique à cet égard : de législation. L'exposé des motifs indique à cet égard :
« Par contre, le gouvernement est d'avis qu'il est nécessaire de « Par contre, le gouvernement est d'avis qu'il est nécessaire de
conserver le complément à l'article 333/1, § 1er, CIR 92 en ce qui conserver le complément à l'article 333/1, § 1er, CIR 92 en ce qui
concerne la non-expédition d'une notification à un contribuable concerne la non-expédition d'une notification à un contribuable
étranger. Le Conseil d'Etat semble, dans son avis n° 49 856/1, partir étranger. Le Conseil d'Etat semble, dans son avis n° 49 856/1, partir
du fait que, dans les autres pays, une règle similaire existe en du fait que, dans les autres pays, une règle similaire existe en
matière de demande de renseignements à des établissements financiers. matière de demande de renseignements à des établissements financiers.
Rien n'est toutefois moins vrai. Dans la plupart des pays, il n'y a Rien n'est toutefois moins vrai. Dans la plupart des pays, il n'y a
aucune limitation de la possibilité de demander de tels aucune limitation de la possibilité de demander de tels
renseignements. Dans ce sens, il est dès lors tout à fait pertinent renseignements. Dans ce sens, il est dès lors tout à fait pertinent
que le fonctionnaire délégué, en réponse à une demande du Conseil que le fonctionnaire délégué, en réponse à une demande du Conseil
d'Etat, signale que l'envoi d'une notification par l'administration d'Etat, signale que l'envoi d'une notification par l'administration
belge pourrait mettre l'investigation dans l'autre Etat en danger. belge pourrait mettre l'investigation dans l'autre Etat en danger.
L'administration étrangère doit en effet entreprendre toutes les L'administration étrangère doit en effet entreprendre toutes les
démarches dans le cadre de ses propres compétences pour obtenir les démarches dans le cadre de ses propres compétences pour obtenir les
renseignements demandés mais cela implique donc rarement qu'une renseignements demandés mais cela implique donc rarement qu'une
notification doive être envoyée au contribuable étranger. notification doive être envoyée au contribuable étranger.
Dans l'hypothèse où l'administration étrangère est dans l'obligation Dans l'hypothèse où l'administration étrangère est dans l'obligation
de faire une notification conformément à ses règles de droit interne, de faire une notification conformément à ses règles de droit interne,
cela devra nécessairement se produire au moment où la question est cela devra nécessairement se produire au moment où la question est
posée à l'administration belge; qui sur ce point n'est qu'une simple posée à l'administration belge; qui sur ce point n'est qu'une simple
personne intermédiaire entre l'administration étrangère et personne intermédiaire entre l'administration étrangère et
l'établissement financier belge. l'établissement financier belge.
Pour ces raisons, il ne semble pas opportun d'envoyer une notification Pour ces raisons, il ne semble pas opportun d'envoyer une notification
depuis la Belgique » (Doc. parl., Chambre, 2010-2011, Doc 53-1737/001, depuis la Belgique » (Doc. parl., Chambre, 2010-2011, Doc 53-1737/001,
pp. 7 et 8). pp. 7 et 8).
B.18. Comme la Cour l'a précisé dans son arrêt n° 6/2013 du 14 février B.18. Comme la Cour l'a précisé dans son arrêt n° 6/2013 du 14 février
2013, les exigences procédurales « constituent des garanties 2013, les exigences procédurales « constituent des garanties
importantes contre les ingérences arbitraires dans la vie privée du importantes contre les ingérences arbitraires dans la vie privée du
contribuable et des personnes avec lesquelles il a effectué des contribuable et des personnes avec lesquelles il a effectué des
opérations financières ». La Cour a pris en compte dans cet arrêt la opérations financières ». La Cour a pris en compte dans cet arrêt la
notification au contribuable, telle qu'elle est prévue par l'article notification au contribuable, telle qu'elle est prévue par l'article
333/1, § 1er, alinéa 1er, du CIR 1992, pour conclure que l'obligation 333/1, § 1er, alinéa 1er, du CIR 1992, pour conclure que l'obligation
faite aux établissements financiers de divulguer à l'administration faite aux établissements financiers de divulguer à l'administration
fiscale la correspondance qu'ils ont échangée avec leurs clients est fiscale la correspondance qu'ils ont échangée avec leurs clients est
compatible avec le droit au respect de la vie privée dans les compatible avec le droit au respect de la vie privée dans les
conditions fixées par la loi. conditions fixées par la loi.
La différence de traitement en matière de notification entre les La différence de traitement en matière de notification entre les
demandes de l'administration selon qu'elles sont faites à la requête demandes de l'administration selon qu'elles sont faites à la requête
d'un Etat étranger ou non est sans justification raisonnable. d'un Etat étranger ou non est sans justification raisonnable.
L'article 322, § 4, du CIR 1992 prévoit, en effet, que la demande de L'article 322, § 4, du CIR 1992 prévoit, en effet, que la demande de
l'Etat étranger est assimilée à un indice de fraude fiscale. La l'Etat étranger est assimilée à un indice de fraude fiscale. La
notification au contribuable constitue dès lors une garantie notification au contribuable constitue dès lors une garantie
importante contre l'ingérence dans sa vie privée. importante contre l'ingérence dans sa vie privée.
B.19. Le moyen est fondé. B.19. Le moyen est fondé.
B.20. Afin d'éviter les importantes difficultés administratives que B.20. Afin d'éviter les importantes difficultés administratives que
pourrait entraîner l'effet rétroactif de l'annulation, il convient, en pourrait entraîner l'effet rétroactif de l'annulation, il convient, en
application de l'article 8, alinéa 2, de la loi spéciale du 6 janvier application de l'article 8, alinéa 2, de la loi spéciale du 6 janvier
1989 sur la Cour constitutionnelle, de maintenir les effets de la 1989 sur la Cour constitutionnelle, de maintenir les effets de la
disposition annulée comme il est indiqué au dispositif. disposition annulée comme il est indiqué au dispositif.
Par ces motifs, Par ces motifs,
la Cour la Cour
- annule l'article 9, 2°, de la loi du 7 novembre 2011 portant des - annule l'article 9, 2°, de la loi du 7 novembre 2011 portant des
dispositions fiscales et diverses; dispositions fiscales et diverses;
- maintient les effets de la disposition annulée à l'égard de toutes - maintient les effets de la disposition annulée à l'égard de toutes
les applications qui en auraient été faites avant la publication du les applications qui en auraient été faites avant la publication du
présent arrêt au Moniteur belge; présent arrêt au Moniteur belge;
- rejette le recours pour le surplus. - rejette le recours pour le surplus.
Ainsi prononcé en langue française, en langue néerlandaise et en Ainsi prononcé en langue française, en langue néerlandaise et en
langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6
janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, à l'audience publique du janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, à l'audience publique du
16 mai 2013. 16 mai 2013.
Le greffier, Le greffier,
P.-Y. Dutilleux P.-Y. Dutilleux
Le président, Le président,
R. Henneuse R. Henneuse
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