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Extrait de l'arrêt n° 145/2008 du 30 octobre 2008 Numéro du rôle : 4371 En cause : la question préjudicielle concernant l'article 42bis, alinéa 1 er , des lois relatives aux allocations familiales pour travailleurs salariés, coordo La Cour constitutionnelle, composée des présidents M. Melchior et M. Bossuyt, et des juges P. Ma(...) Extrait de l'arrêt n° 145/2008 du 30 octobre 2008 Numéro du rôle : 4371 En cause : la question préjudicielle concernant l'article 42bis, alinéa 1 er , des lois relatives aux allocations familiales pour travailleurs salariés, coordo La Cour constitutionnelle, composée des présidents M. Melchior et M. Bossuyt, et des juges P. Ma(...)
COUR CONSTITUTIONNELLE COUR CONSTITUTIONNELLE
Extrait de l'arrêt n° 145/2008 du 30 octobre 2008 Extrait de l'arrêt n° 145/2008 du 30 octobre 2008
Numéro du rôle : 4371 Numéro du rôle : 4371
En cause : la question préjudicielle concernant l'article 42bis, En cause : la question préjudicielle concernant l'article 42bis,
alinéa 1er, des lois relatives aux allocations familiales pour alinéa 1er, des lois relatives aux allocations familiales pour
travailleurs salariés, coordonnées par arrêté royal du 19 décembre travailleurs salariés, coordonnées par arrêté royal du 19 décembre
1939, posée par la Cour du travail de Liège. 1939, posée par la Cour du travail de Liège.
La Cour constitutionnelle, La Cour constitutionnelle,
composée des présidents M. Melchior et M. Bossuyt, et des juges P. composée des présidents M. Melchior et M. Bossuyt, et des juges P.
Martens, R. Henneuse, L. Lavrysen, J.-P. Moerman et E. Derycke, Martens, R. Henneuse, L. Lavrysen, J.-P. Moerman et E. Derycke,
assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président M. assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président M.
Melchior, Melchior,
après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant :
I. Objet de la question préjudicielle et procédure I. Objet de la question préjudicielle et procédure
Par arrêt du 26 novembre 2007 en cause d'Isabelle Sala-Bembele contre Par arrêt du 26 novembre 2007 en cause d'Isabelle Sala-Bembele contre
l'Office national d'allocations familiales pour travailleurs salariés, l'Office national d'allocations familiales pour travailleurs salariés,
dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 5 décembre dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 5 décembre
2007, la Cour du travail de Liège a posé la question préjudicielle 2007, la Cour du travail de Liège a posé la question préjudicielle
suivante : suivante :
« L'article 42bis, alinéa 1er, des lois relatives aux allocations « L'article 42bis, alinéa 1er, des lois relatives aux allocations
familiales pour travailleurs salariés, coordonnées par arrêté royal du familiales pour travailleurs salariés, coordonnées par arrêté royal du
19 décembre 1939, lu isolément ou conjointement avec les articles 2, 19 décembre 1939, lu isolément ou conjointement avec les articles 2,
3, 26.2 et 27.3, de la Convention relative aux droits de l'enfant 3, 26.2 et 27.3, de la Convention relative aux droits de l'enfant
adoptée à New York le 20 novembre 1989, viole-t-il les articles 10 et adoptée à New York le 20 novembre 1989, viole-t-il les articles 10 et
11 de la Constitution, en ce qu'il traite différemment les enfants 11 de la Constitution, en ce qu'il traite différemment les enfants
bénéficiaires de chômeurs complets indemnisés et les enfants bénéficiaires de chômeurs complets indemnisés et les enfants
bénéficiaires de chômeurs complets non indemnisés, réservant aux bénéficiaires de chômeurs complets non indemnisés, réservant aux
premiers, donc à l'exclusion des seconds, le bénéfice d'un supplément premiers, donc à l'exclusion des seconds, le bénéfice d'un supplément
d'allocations familiales à partir du 7ème mois de chômage ? ». d'allocations familiales à partir du 7ème mois de chômage ? ».
(...) (...)
III. En droit III. En droit
(...) (...)
La disposition en cause La disposition en cause
B.1. La Cour est interrogée au sujet de l'article 42bis, alinéa 1er, B.1. La Cour est interrogée au sujet de l'article 42bis, alinéa 1er,
des lois relatives aux allocations familiales pour travailleurs des lois relatives aux allocations familiales pour travailleurs
salariés, coordonnées par l'arrêté royal du 19 décembre 1939 (ci-après salariés, coordonnées par l'arrêté royal du 19 décembre 1939 (ci-après
: « les lois coordonnées »). : « les lois coordonnées »).
Cet article 42bis - dont seul l'alinéa 1er est en cause - dispose : Cet article 42bis - dont seul l'alinéa 1er est en cause - dispose :
« Les montants repris à l'article 40 sont majorés, pour les enfants du « Les montants repris à l'article 40 sont majorés, pour les enfants du
bénéficiaire d'une pension visée à l'article 57 et du chômeur complet bénéficiaire d'une pension visée à l'article 57 et du chômeur complet
indemnisé visé à l'article 56novies, à partir du septième mois de indemnisé visé à l'article 56novies, à partir du septième mois de
chômage, ainsi que pour les enfants bénéficiaires du chef d'un chômage, ainsi que pour les enfants bénéficiaires du chef d'un
attributaire en vertu de l'article 56quater dans la situation visée à attributaire en vertu de l'article 56quater dans la situation visée à
l'alinéa 4 de cet article, d'un supplément de : l'alinéa 4 de cet article, d'un supplément de :
1° 34,83 EUR pour le premier enfant; 1° 34,83 EUR pour le premier enfant;
2° 21,59 EUR pour le deuxième enfant; 2° 21,59 EUR pour le deuxième enfant;
3° 3,79 EUR pour le troisième enfant et pour chacun des suivants. 3° 3,79 EUR pour le troisième enfant et pour chacun des suivants.
Le Roi détermine les périodes d'interruption du chômage avec Le Roi détermine les périodes d'interruption du chômage avec
lesquelles il n'est pas tenu compte pour déterminer l'accomplissement lesquelles il n'est pas tenu compte pour déterminer l'accomplissement
et la continuité de la période de chômage de 6 mois. et la continuité de la période de chômage de 6 mois.
Le Roi fixe également les conditions dans lesquelles des périodes Le Roi fixe également les conditions dans lesquelles des périodes
d'inactivité précédant le chômage visé à l'alinéa 1er, sont prises en d'inactivité précédant le chômage visé à l'alinéa 1er, sont prises en
considération pour la détermination de la période de six mois de considération pour la détermination de la période de six mois de
chômage. chômage.
En outre, le bénéficiaire d'une pension et le chômeur visés à l'alinéa En outre, le bénéficiaire d'une pension et le chômeur visés à l'alinéa
1er, doivent avoir la qualité d'attributaire ayant personnes à charge 1er, doivent avoir la qualité d'attributaire ayant personnes à charge
aux conditions déterminées par le Roi. De plus, ceux-ci ne peuvent aux conditions déterminées par le Roi. De plus, ceux-ci ne peuvent
percevoir des revenus de remplacement déterminés par le Roi, dépassant percevoir des revenus de remplacement déterminés par le Roi, dépassant
le montant qu'Il fixe. le montant qu'Il fixe.
Le chômeur complet indemnisé qui est attributaire du supplément Le chômeur complet indemnisé qui est attributaire du supplément
d'allocation prévu à l'alinéa 1er et qui, après avoir exercé une d'allocation prévu à l'alinéa 1er et qui, après avoir exercé une
activité visée à l'article 1er, 5°, de l'arrêté royal du 25 avril 1997 activité visée à l'article 1er, 5°, de l'arrêté royal du 25 avril 1997
portant exécution de l'article 71, § 1erbis, des lois coordonnées portant exécution de l'article 71, § 1erbis, des lois coordonnées
relatives aux allocations familiales, redevient chômeur complet relatives aux allocations familiales, redevient chômeur complet
indemnisé dans les six mois, conserve le droit au supplément indemnisé dans les six mois, conserve le droit au supplément
d'allocation visé à l'alinéa 1er. d'allocation visé à l'alinéa 1er.
Pour l'application de l'alinéa 5, le Roi détermine les périodes, ainsi Pour l'application de l'alinéa 5, le Roi détermine les périodes, ainsi
que leur mode de calcul, prises en compte pour la détermination de la que leur mode de calcul, prises en compte pour la détermination de la
prise de cours de la période de six mois d'activité visée par l'alinéa prise de cours de la période de six mois d'activité visée par l'alinéa
5. Il détermine également les périodes qui interrompent cette activité 5. Il détermine également les périodes qui interrompent cette activité
». ».
B.2. Il est demandé à la Cour si cet article 42bis, alinéa 1er, viole B.2. Il est demandé à la Cour si cet article 42bis, alinéa 1er, viole
les articles 10 et 11 de la Constitution, combinés ou non avec les les articles 10 et 11 de la Constitution, combinés ou non avec les
articles 2, 3, 26.2 et 27.3 de la Convention relative aux droits de articles 2, 3, 26.2 et 27.3 de la Convention relative aux droits de
l'enfant, en ce qu'il traite différemment les enfants bénéficiaires de l'enfant, en ce qu'il traite différemment les enfants bénéficiaires de
chômeurs complets indemnisés et les enfants bénéficiaires de chômeurs chômeurs complets indemnisés et les enfants bénéficiaires de chômeurs
complets non indemnisés, dès lors que, selon le juge a quo, il réserve complets non indemnisés, dès lors que, selon le juge a quo, il réserve
aux premiers le bénéfice d'un supplément d'allocations familiales à aux premiers le bénéfice d'un supplément d'allocations familiales à
partir du septième mois de chômage. partir du septième mois de chômage.
Quant aux exceptions soulevées par le Conseil des ministres Quant aux exceptions soulevées par le Conseil des ministres
En ce qui concerne la compétence de la Cour En ce qui concerne la compétence de la Cour
B.3.1. Selon le Conseil des ministres, la différence de traitement B.3.1. Selon le Conseil des ministres, la différence de traitement
trouverait son origine, non dans l'article 42bis des lois coordonnées, trouverait son origine, non dans l'article 42bis des lois coordonnées,
mais dans l'arrêté royal du 25 février 1994 « déterminant les mais dans l'arrêté royal du 25 février 1994 « déterminant les
conditions d'octroi des prestations familiales du chef des chômeurs », conditions d'octroi des prestations familiales du chef des chômeurs »,
à l'égard duquel la Cour n'est pas compétente. à l'égard duquel la Cour n'est pas compétente.
B.3.2. S'il est vrai que cet arrêté royal précise les droits des B.3.2. S'il est vrai que cet arrêté royal précise les droits des
chômeurs, indemnisés ou non, au regard des allocations familiales et chômeurs, indemnisés ou non, au regard des allocations familiales et
suppléments visés, respectivement, par les articles 40 et 42bis des suppléments visés, respectivement, par les articles 40 et 42bis des
lois coordonnées, il n'en reste pas moins que c'est l'article 42bis, lois coordonnées, il n'en reste pas moins que c'est l'article 42bis,
alinéa 1er, lui-même qui réserve le bénéfice du supplément qu'il alinéa 1er, lui-même qui réserve le bénéfice du supplément qu'il
prévoit, en ce qui concerne les enfants des chômeurs, à ceux du « prévoit, en ce qui concerne les enfants des chômeurs, à ceux du «
chômeur complet indemnisé » - et exclut ainsi du bénéfice de ce chômeur complet indemnisé » - et exclut ainsi du bénéfice de ce
supplément les enfants du chômeur complet non indemnisé. Le fait qu'il supplément les enfants du chômeur complet non indemnisé. Le fait qu'il
appartienne largement au Roi de déterminer les conditions requises appartienne largement au Roi de déterminer les conditions requises
pour être chômeur complet indemnisé n'affecte pas le constat que c'est pour être chômeur complet indemnisé n'affecte pas le constat que c'est
le législateur lui-même qui a attaché à la seule qualité de chômeur le législateur lui-même qui a attaché à la seule qualité de chômeur
complet indemnisé les suppléments d'allocations familiales en cause. complet indemnisé les suppléments d'allocations familiales en cause.
Il s'ensuit que c'est le législateur lui-même qui a institué la Il s'ensuit que c'est le législateur lui-même qui a institué la
différence de traitement soumise au contrôle de la Cour. différence de traitement soumise au contrôle de la Cour.
B.3.3. L'exception est rejetée. B.3.3. L'exception est rejetée.
En ce qui concerne la portée de la question préjudicielle En ce qui concerne la portée de la question préjudicielle
B.4.1. Selon le Conseil des ministres, la question préjudicielle, B.4.1. Selon le Conseil des ministres, la question préjudicielle,
telle qu'elle est formulée, ne permettrait pas d'identifier avec telle qu'elle est formulée, ne permettrait pas d'identifier avec
précision la situation donnant lieu à une différence de traitement précision la situation donnant lieu à une différence de traitement
contraire aux articles 10 et 11 de la Constitution : en effet, à contraire aux articles 10 et 11 de la Constitution : en effet, à
défaut que soit précisé sur la base de quelle disposition légale le défaut que soit précisé sur la base de quelle disposition légale le
chômeur complet n'est pas indemnisé, la situation de l'enfant d'un tel chômeur complet n'est pas indemnisé, la situation de l'enfant d'un tel
chômeur, non indemnisé, recouvrirait une multitude de situations chômeur, non indemnisé, recouvrirait une multitude de situations
différentes. différentes.
En considération du cas concret soumis au juge a quo, le Conseil des En considération du cas concret soumis au juge a quo, le Conseil des
ministres propose de reformuler la question préjudicielle en limitant ministres propose de reformuler la question préjudicielle en limitant
la saisine de la Cour à la situation des seuls enfants de chômeurs la saisine de la Cour à la situation des seuls enfants de chômeurs
complets qui ne sont pas indemnisés en raison d'une renonciation complets qui ne sont pas indemnisés en raison d'une renonciation
volontaire aux allocations de chômage. En outre, le Conseil des volontaire aux allocations de chômage. En outre, le Conseil des
ministres avance que dès lors que « le législateur a fixé des ministres avance que dès lors que « le législateur a fixé des
conditions d'octroi des prestations familiale dans le chef de conditions d'octroi des prestations familiale dans le chef de
l'attributaire, indépendantes de l'enfant », la « différence de l'attributaire, indépendantes de l'enfant », la « différence de
traitement doit donc s'apprécier dans le chef des attributaires et non traitement doit donc s'apprécier dans le chef des attributaires et non
dans le chef des enfants, qui suivent en principe le sort réservé à la dans le chef des enfants, qui suivent en principe le sort réservé à la
personne à charge de laquelle ils se trouvent ». personne à charge de laquelle ils se trouvent ».
B.4.2. Les parties devant la Cour ne peuvent pas modifier ou faire B.4.2. Les parties devant la Cour ne peuvent pas modifier ou faire
modifier la portée des questions préjudicielles posées par le juge a modifier la portée des questions préjudicielles posées par le juge a
quo. quo.
Le juge a quo soumet à la Cour la différence de traitement faite entre Le juge a quo soumet à la Cour la différence de traitement faite entre
les enfants bénéficiaires de chômeurs complets indemnisés et les les enfants bénéficiaires de chômeurs complets indemnisés et les
enfants bénéficiaires de chômeurs complets non indemnisés. enfants bénéficiaires de chômeurs complets non indemnisés.
La question préjudicielle vise, comme catégorie potentiellement La question préjudicielle vise, comme catégorie potentiellement
discriminée, les enfants bénéficiaires de chômeurs complets non discriminée, les enfants bénéficiaires de chômeurs complets non
indemnisés. Les enfants sont, en droit, les bénéficiaires des indemnisés. Les enfants sont, en droit, les bénéficiaires des
allocations familiales, de telle sorte que, contrairement à ce que allocations familiales, de telle sorte que, contrairement à ce que
soutient le Conseil des ministres, c'est bien eux que concerne la soutient le Conseil des ministres, c'est bien eux que concerne la
différence de traitement en cause. Par ailleurs, les chômeurs complets différence de traitement en cause. Par ailleurs, les chômeurs complets
non indemnisés ont en commun de ne pas percevoir d'indemnité de non indemnisés ont en commun de ne pas percevoir d'indemnité de
chômage, - quelles que soient les spécificités de leur situation. chômage, - quelles que soient les spécificités de leur situation.
Quant au fond Quant au fond
B.5. L'octroi d'allocations familiales vise à contribuer aux frais B.5. L'octroi d'allocations familiales vise à contribuer aux frais
d'entretien et d'éducation des enfants; il offre une compensation d'entretien et d'éducation des enfants; il offre une compensation
partielle à l'augmentation des charges supportées par le ménage lors partielle à l'augmentation des charges supportées par le ménage lors
de l'extension de celui-ci. de l'extension de celui-ci.
Comme il a déjà été relevé, ce sont les enfants concernés qui sont Comme il a déjà été relevé, ce sont les enfants concernés qui sont
bénéficiaires des allocations. bénéficiaires des allocations.
Le régime général des allocations familiales est un régime Le régime général des allocations familiales est un régime
d'assurance, ce qui implique que les ressources de ses bénéficiaires d'assurance, ce qui implique que les ressources de ses bénéficiaires
ne sont pas prises en compte pour déterminer l'existence du droit d'en ne sont pas prises en compte pour déterminer l'existence du droit d'en
bénéficier. bénéficier.
Toutefois, ce régime général est corrigé en faveur de certaines Toutefois, ce régime général est corrigé en faveur de certaines
catégories de bénéficiaires requérant une attention particulière. Tel catégories de bénéficiaires requérant une attention particulière. Tel
est le cas des enfants du bénéficiaire d'une pension, du chômeur est le cas des enfants du bénéficiaire d'une pension, du chômeur
complet indemnisé et du bénéficiaire d'une pension de survie, auxquels complet indemnisé et du bénéficiaire d'une pension de survie, auxquels
l'article 42bis en cause octroie un supplément d'allocations l'article 42bis en cause octroie un supplément d'allocations
familiales. familiales.
B.6.1. L'article 42bis a été inséré dans les lois coordonnées par B.6.1. L'article 42bis a été inséré dans les lois coordonnées par
l'article 3 de l'arrêté royal n° 131 du 30 décembre 1982 portant l'article 3 de l'arrêté royal n° 131 du 30 décembre 1982 portant
redistribution des allocations familiales dans le régime des redistribution des allocations familiales dans le régime des
travailleurs salariés, pris en exécution de la loi du 2 février 1982 travailleurs salariés, pris en exécution de la loi du 2 février 1982
attribuant certains pouvoirs spéciaux au Roi. attribuant certains pouvoirs spéciaux au Roi.
Cet article 42bis accordait des allocations familiales ordinaires Cet article 42bis accordait des allocations familiales ordinaires
journalières et mensuelles à un taux plus élevé en faveur, notamment, journalières et mensuelles à un taux plus élevé en faveur, notamment,
des « enfants bénéficiaires [...] b) des chômeurs complets, visés à des « enfants bénéficiaires [...] b) des chômeurs complets, visés à
l'article 2 de l'arrêté royal n° 49 du 24 octobre 1967 relatif aux l'article 2 de l'arrêté royal n° 49 du 24 octobre 1967 relatif aux
prestations familiales revenant aux chômeurs », à savoir aux enfants prestations familiales revenant aux chômeurs », à savoir aux enfants
des chômeurs indemnisés. des chômeurs indemnisés.
Dans le rapport au Roi précédant cet arrêté royal (Moniteur belge du Dans le rapport au Roi précédant cet arrêté royal (Moniteur belge du
12 janvier 1983, p. 402), il a été observé à ce sujet : 12 janvier 1983, p. 402), il a été observé à ce sujet :
« [Celui-ci] maintient [...] le bénéfice de ces allocations familiales « [Celui-ci] maintient [...] le bénéfice de ces allocations familiales
aux enfants de travailleurs invalides, aux enfants bénéficiant du aux enfants de travailleurs invalides, aux enfants bénéficiant du
supplément pour enfant handicapé en ce qui concerne ce supplément et supplément pour enfant handicapé en ce qui concerne ce supplément et
les suppléments d'âge, aux enfants bénéficiant du taux orphelin ainsi les suppléments d'âge, aux enfants bénéficiant du taux orphelin ainsi
qu'aux enfants de chômeurs indemnisés depuis six mois et aux enfants qu'aux enfants de chômeurs indemnisés depuis six mois et aux enfants
de pensionnés. de pensionnés.
[...] les enfants qui sont eux-mêmes ou dont la famille est dans une [...] les enfants qui sont eux-mêmes ou dont la famille est dans une
situation socio-économique moins favorisée, ne perdront pas les situation socio-économique moins favorisée, ne perdront pas les
avantages qui lui étaient accordés jusqu'à présent ». avantages qui lui étaient accordés jusqu'à présent ».
B.6.2. L'article 42bis a été ultérieurement modifié, notamment, par B.6.2. L'article 42bis a été ultérieurement modifié, notamment, par
l'article 52 de la loi-programme du 22 décembre 1989. Cette l'article 52 de la loi-programme du 22 décembre 1989. Cette
modification a été commentée comme suit lors des travaux préparatoires modification a été commentée comme suit lors des travaux préparatoires
: :
« L'article 42bis concerne l'octroi des allocations familiales « L'article 42bis concerne l'octroi des allocations familiales
majorées, aux pensionnés et chômeurs de longue durée. majorées, aux pensionnés et chômeurs de longue durée.
La réforme contenue dans la présente loi vise une stabilisation de La réforme contenue dans la présente loi vise une stabilisation de
l'octroi des allocations familiales de base, par la trimestrialisation l'octroi des allocations familiales de base, par la trimestrialisation
du droit. du droit.
Comme cela a été dit dans l'exposé des motifs, les majorations Comme cela a été dit dans l'exposé des motifs, les majorations
d'allocations sont accordées pour répondre à des situations d'allocations sont accordées pour répondre à des situations
particulières des familles. Ces majorations restent dues particulières des familles. Ces majorations restent dues
mensuellement. Par conséquent, les montants de prestations mensuellement. Par conséquent, les montants de prestations
actuellement exprimés en terme global, ont été scindés en montants de actuellement exprimés en terme global, ont été scindés en montants de
base (visés au nouvel article 42) et suppléments de prestations. base (visés au nouvel article 42) et suppléments de prestations.
Cette modification ne change rien aux montants versés aux familles Cette modification ne change rien aux montants versés aux familles
bénéficiaires. Il s'agit d'une adaptation technique permettant de bénéficiaires. Il s'agit d'une adaptation technique permettant de
trimestrialiser le droit aux allocations de base en maintenant une trimestrialiser le droit aux allocations de base en maintenant une
certaine souplesse pour l'octroi mensuel des majorations » (Doc. certaine souplesse pour l'octroi mensuel des majorations » (Doc.
parl., Chambre, 1989-1990, n° 975/1, p. 31). parl., Chambre, 1989-1990, n° 975/1, p. 31).
Il a également été précisé : Il a également été précisé :
« Les allocations familiales, on le sait, sont conçues comme une « Les allocations familiales, on le sait, sont conçues comme une
intervention financière dans l'éducation des enfants. Elles tiennent intervention financière dans l'éducation des enfants. Elles tiennent
compte de la situation de fait des familles dans lesquelles l'enfant compte de la situation de fait des familles dans lesquelles l'enfant
est élevé. est élevé.
C'est ainsi que des taux majorés ont été prévus pour faire face à des C'est ainsi que des taux majorés ont été prévus pour faire face à des
difficultés particulières : difficultés particulières :
- diminution des revenus (taux majorés pour chômeurs, invalides, - diminution des revenus (taux majorés pour chômeurs, invalides,
pensionnés), handicap de l'enfant, supplément d'âge, prise en compte pensionnés), handicap de l'enfant, supplément d'âge, prise en compte
du rang de l'enfant. Ces situations peuvent varier d'un mois à l'autre du rang de l'enfant. Ces situations peuvent varier d'un mois à l'autre
et il est essentiel que les prestations familiales, payées et il est essentiel que les prestations familiales, payées
mensuellement, continuent à être liées à la situation réelle des mensuellement, continuent à être liées à la situation réelle des
familles. La fixation trimestrielle du droit assure le paiement familles. La fixation trimestrielle du droit assure le paiement
continu d'un montant de base (sauf cessation de droit), les continu d'un montant de base (sauf cessation de droit), les
suppléments étant accordés mensuellement compte tenu de la situation suppléments étant accordés mensuellement compte tenu de la situation
des familles, pendant le mois auquel ils se rapportent » (ibid., p. des familles, pendant le mois auquel ils se rapportent » (ibid., p.
27). 27).
B.6.3. Il ressort de ce qui précède que le législateur, en octroyant B.6.3. Il ressort de ce qui précède que le législateur, en octroyant
le supplément d'allocations familiales prévu par l'article 42bis des le supplément d'allocations familiales prévu par l'article 42bis des
lois coordonnées, entendait tenir compte de la situation particulière lois coordonnées, entendait tenir compte de la situation particulière
de certaines familles qu'il considérait comme étant dans une situation de certaines familles qu'il considérait comme étant dans une situation
socio-économique défavorisée. socio-économique défavorisée.
B.7.1. En considération, à la fois, de la raison d'être des B.7.1. En considération, à la fois, de la raison d'être des
allocations familiales - compenser partiellement l'augmentation des allocations familiales - compenser partiellement l'augmentation des
charges supportées par le ménage lors de l'extension de celui-ci - et charges supportées par le ménage lors de l'extension de celui-ci - et
de l'objectif spécifique poursuivi par l'octroi du supplément de l'objectif spécifique poursuivi par l'octroi du supplément
d'allocations familiales - prendre en compte la situation d'allocations familiales - prendre en compte la situation
socio-économique de certaines catégories de familles -, rien ne peut socio-économique de certaines catégories de familles -, rien ne peut
raisonnablement justifier que ledit supplément soit refusé aux enfants raisonnablement justifier que ledit supplément soit refusé aux enfants
bénéficiaires de chômeurs complets non indemnisés, alors qu'en bénéficiaires de chômeurs complets non indemnisés, alors qu'en
bénéficient les enfants bénéficiaires de chômeurs complets indemnisés bénéficient les enfants bénéficiaires de chômeurs complets indemnisés
qui se trouvent dans la même situation. qui se trouvent dans la même situation.
En effet, si les uns comme les autres - et les ménages dont ils font En effet, si les uns comme les autres - et les ménages dont ils font
partie - sont confrontés à la difficulté de faire face, avec un budget partie - sont confrontés à la difficulté de faire face, avec un budget
limité, à l'augmentation des charges qu'entraîne l'extension du limité, à l'augmentation des charges qu'entraîne l'extension du
ménage, l'absence d'allocation de chômage est de nature à rendre plus ménage, l'absence d'allocation de chômage est de nature à rendre plus
critique encore la situation financière des ménages dont font partie critique encore la situation financière des ménages dont font partie
les enfants de chômeurs complets non indemnisés; l'octroi du les enfants de chômeurs complets non indemnisés; l'octroi du
supplément d'allocations familiales en cause se justifie dès lors a supplément d'allocations familiales en cause se justifie dès lors a
fortiori dans leur chef. fortiori dans leur chef.
Quant à l'argument selon lequel ce serait le fait de satisfaire, ou Quant à l'argument selon lequel ce serait le fait de satisfaire, ou
non, aux conditions requises par la réglementation pour bénéficier non, aux conditions requises par la réglementation pour bénéficier
d'allocations de chômage qui justifierait la différence de traitement d'allocations de chômage qui justifierait la différence de traitement
en cause, s'il appartient au législateur de déterminer les conditions en cause, s'il appartient au législateur de déterminer les conditions
ouvrant le droit, dans le chef des chômeurs, à des allocations de ouvrant le droit, dans le chef des chômeurs, à des allocations de
chômage, lesdites conditions sont dénuées de pertinence pour chômage, lesdites conditions sont dénuées de pertinence pour
déterminer le montant des allocations familiales, dont les enfants déterminer le montant des allocations familiales, dont les enfants
sont, en droit, les bénéficiaires. sont, en droit, les bénéficiaires.
B.7.2. En outre, en privant les enfants de chômeurs complets non B.7.2. En outre, en privant les enfants de chômeurs complets non
indemnisés du supplément d'allocations familiales qu'il reconnaît aux indemnisés du supplément d'allocations familiales qu'il reconnaît aux
enfants de chômeurs complets indemnisés, l'article 42bis, alinéa 1er, enfants de chômeurs complets indemnisés, l'article 42bis, alinéa 1er,
viole l'article 2 de la Convention relative aux droits de l'enfant, viole l'article 2 de la Convention relative aux droits de l'enfant,
qui interdit que l'enfant soit discriminé sur la base de la situation qui interdit que l'enfant soit discriminé sur la base de la situation
juridique de ses parents, de ses représentants légaux ou des membres juridique de ses parents, de ses représentants légaux ou des membres
de sa famille. Il n'est en effet pas compatible avec cette disposition de sa famille. Il n'est en effet pas compatible avec cette disposition
qu'un enfant, bénéficiaire des allocations familiales, voie le montant qu'un enfant, bénéficiaire des allocations familiales, voie le montant
global de celles-ci affecté uniquement en considération de la global de celles-ci affecté uniquement en considération de la
situation de chômeur non indemnisé de l'attributaire. situation de chômeur non indemnisé de l'attributaire.
B.8. La question préjudicielle appelle une réponse positive. B.8. La question préjudicielle appelle une réponse positive.
Par ces motifs, Par ces motifs,
la Cour la Cour
dit pour droit : dit pour droit :
L'article 42bis, alinéa 1er, des lois relatives aux allocations L'article 42bis, alinéa 1er, des lois relatives aux allocations
familiales pour travailleurs salariés, coordonnées par arrêté royal du familiales pour travailleurs salariés, coordonnées par arrêté royal du
19 décembre 1939, viole les articles 10 et 11 de la Constitution. 19 décembre 1939, viole les articles 10 et 11 de la Constitution.
Ainsi prononcé en langue française et en langue néerlandaise, Ainsi prononcé en langue française et en langue néerlandaise,
conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989, à conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989, à
l'audience publique du 30 octobre 2008. l'audience publique du 30 octobre 2008.
Le greffier, Le greffier,
P.-Y. Dutilleux. P.-Y. Dutilleux.
Le président, Le président,
M. Melchior. M. Melchior.
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