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Décision Du Conseil De La Concurrence
publié le 25 juillet 2008

Conseil de la concurrence. - Décision n° 2008-P/K-43 du 7 juillet 2008 Affaires CONC-I/O-98/0031 ISC c/FAB et ses membres et CONC-P/K-05/0023 Test-Achats c/auto-écoles de Belgique I. La procédure 1. Une plainte a été déposée le 16 novem 2. L'auditeur a joint les deux plaintes pour l'instruction dès lors qu'elles concernent des infract(...)

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SERVICE PUBLIC FEDERAL ECONOMIE, P.M.E., CLASSES MOYENNES ET ENERGIE


Conseil de la concurrence. - Décision n° 2008-P/K-43 du 7 juillet 2008 Affaires CONC-I/O-98/0031 ISC c/FAB et ses membres et CONC-P/K-05/0023 Test-Achats c/auto-écoles de Belgique I. La procédure 1. Une plainte a été déposée le 16 novembre 1998 par l'Institut supérieur de Conduite s.p.r.l. (ci-après : « ISC ») contre la Fédération des Auto-Ecoles professionnelles de Belgique ASBL (ci-après : « FAB »). Une deuxième plainte a été déposée le 27 avril 2005 par l'Association belge des Consommateurs Test-Achats ASBL (ci-après : « Test-Achats ») contre les auto-écoles de Belgique. 2. L'auditeur a joint les deux plaintes pour l'instruction dès lors qu'elles concernent des infractions similaires à la Loi sur la protection de la concurrence économique (ci-après : « la LPCE ») dans le secteur des auto-écoles à l'encontre notamment de la FAB.Un rapport a été déposé au Conseil de la concurrence le 21 juin 2007. 3. Lors d'une audience du 29 janvier 2008, un calendrier a été fixé pour le dépôt des observations écrites.A l'audience du 15 mai 2008, les parties ont été entendues par la chambre. Le 23 juin 2008, le conseil de la FAB, a transmis des pièces supplémentaires au Conseil, à la demande de la chambre. Ces pièces ont été communiquées à l'auditeur et rajoutées au dossier. 4. Dans son rapport, l'auditeur demande au Conseil : - de constater que la FAB constitue une association d'entreprises au sens de la LPCE; - de constater que l'article 12, 3, du Règlement d'Ordre intérieur de la FAB constitue une décision d'association d'entreprises qui viole l'article 2, § 1er de la LPCE en ayant pour objet de restreindre la concurrence par les prix des membres de la FAB; - de constater que la recommandation annuelle d'augmentation des tarifs via la publication de prix de revient par la FAB constitue une décision d'association d'entreprises qui viole l'article 2, § 1 de la LPCE en ayant pour objet de restreindre la concurrence par les prix des membres de la FAB; - d'ordonner que la FAB cesse immédiatement les pratiques mentionnées à son égard dans le rapport. 5. Le Conseil de la concurrence constate la connexité des deux affaires qui concernent les mêmes pratiques.L'auditeur a joint les affaires pour les besoins de son rapport et les affaires ont été traitées à la même audience. Le Conseil estime également souhaitable de joindre les affaires pour sa décision. La présente décision est donc à considérer comme une décision dans le sens de l'article 52 de la LPCE pour les affaires CONC-I/O-98/0031 et CONC-P/K-05/0023.

II. La partie incriminée 6. La FAB est une association de professionnels de l'enseignement dans le domaine de la conduite, constituée sous la forme d'une ASBL.7. Selon le rapport, la FAB a pour objet la promotion de la sécurité routière ainsi que la protection et le développement des intérêts professionnels de ses membres, notamment en s'efforçant : - de regrouper les écoles de conduite agréées par l'Etat, ainsi que les centres agréés assurant la formation professionnelle du personnel enseignant et dirigeant des écoles de conduite et les centres de maîtrise automobile qui dépendent de celles-ci; - de veiller, par l'établissement d'un Règlement d'Ordre intérieur, au respect par ses membres des règles déontologiques propres à la profession et d'oeuvrer à la création et au maintien de pratiques conformes à l'éthique professionnelle; - d'entreprendre à la demande de ses membres, ou d'initiative, toute démarche visant à concilier des parties litigantes et, le cas échéant, d'arbitrer tout litige selon les règles fixées par son Règlement d'Ordre Intérieur; - d'assurer la représentation et la défense de ses membres, notamment lors de litiges qui pourraient les opposer aux pouvoirs publics ou à toutes autres instances, d'appuyer, le cas échéant, leurs opinions, actions et demandes légitimes; - de fournir à ses membres tous les avis, conseils et services pouvant servir leurs intérêts professionnels, notamment en organisant l'achat et la vente de documents utiles à l'exercice de la profession, ces services ne pouvant en aucun cas être considérés en soi comme une activité commerciale; - d'étudier tous les aspects socio-économiques de la profession en vue de proposer des options adéquates au développement de l'activité de ses membres. 8. Selon le rapport, au 30 juillet 1999, la FAB était composée de 150 écoles de conduite disséminées sur l'ensemble du territoire belge, ce qui représentait 402 centres d'exploitation.En 2003, le nombre d'écoles de conduite membres de la FAB s'élevait à 138. En date du 20 mars 2005, ce chiffre était pratiquement inchangé puisque la FAB comptait 137 membres. En mai 2007, elle comptait encore 118 membres.

Cette diminution serait due notamment aux faillites d'écoles de conduite déclarées depuis septembre 2006, date d'une réforme des apprentissages de la conduite automobile. Il apparaît des observations écrites déposées par la FAB au Conseil, que la diminution du nombre de membres s'est poursuivie et qu'en 2008 la FAB ne compte plus que 43 membres.

III. Les plaintes 9. Selon ISC, les membres de la FAB auraient agi de manière concertée afin de fixer de manière directe les prix horaires des cours de conduite pratique.Cette entente sur les prix se serait faite selon un découpage régional et à chaque région aurait correspondu un prix. ISC soutenait également le fait qu'il existait une entente entre la FAB et certains fournisseurs de voiture à double commande. Cette entente aurait consisté en une offre aux membres de la FAB de conditions avantageuses sur le matériel précité. 10. En outre, dans sa plainte, ISC qualifie plusieurs actions de la part de la FAB comme des abus de position dominante.ISC déclare que la FAB, profitant de sa position dominante, met tout en oeuvre pour conserver un numerus clausus de fait sur la profession et empêcher l'accès au marché des écoles de conduite aux entreprises ne voulant pas jouer le jeu de la FAB. L'une des stratégies de la FAB pour faire disparaître la concurrence indésirable aurait été le « harcèlement judiciaire ». ISC se plaint d'un second abus de position dominante dans le chef de la FAB. Celle-ci serait la seule instance auprès de laquelle les écoles de conduite peuvent se fournir en « livrets d'évolution ». Ces livrets doivent être remis au candidat ayant choisi la licence d'apprentissage après douze heures de cours. 11. A son tour, Test-Achats soutenait qu'il existait des accords et/ou pratiques concertées entre les auto-écoles dans le cadre de l'obtention du permis B, ayant pour objet de fixer directement les prix des cours de conduite théorique, des cours de conduite pratique ainsi que des frais d'inscription ou de dossier.Ses affirmations résultent d'une enquête comparative qu'elle a effectuée sur les tarifs pratiqués par 102 sièges d'exploitation d'auto-écoles sur les 550 actifs sur le marché belge durant la seconde quinzaine du mois de novembre 2004. Il ressortirait de son étude qu'il y a très peu d'écarts entre les différents tarifs appliqués par les auto-écoles.

Test-Achats signalait également que lors de réunions régionales régulières, des représentants d'auto-écoles discutent des tarifs. 12. Dans son rapport, l'auditeur a constaté que les plaintes étaient recevables.Cette recevabilité n'a pas été contestée par la partie incriminée. 13. Il ressort du rapport déposé par l'auditeur qu'il retient deux griefs à l'encontre de la FAB et qu'il écarte un certain nombre de griefs invoqués par les plaignants.Le Conseil rappelle qu'une plainte est à considérer comme un élément révélateur d'une pratique éventuellement contraire au droit de la concurrence. L'auditeur n'est pas lié par le sujet de la plainte. Il agit dans l'intérêt général en vue de protéger la concurrence sur le marché belge ou une partie substantielle de celui-ci et doit tenir compte de la charge de preuve qui lui incombe. Le choix de retenir deux griefs spécifiques est motivé de façon adéquate dans le rapport de l'auditeur.

IV. Objet du rapport et faits pertinents 14. Le rapport de l'auditeur vise d'une part certaines dispositions se trouvant dans le règlement d'Ordre intérieur de la FAB, et d'autre part la réalisation et la publication d'études du prix de revient des auto-écoles.Le contexte factuel et économique pertinent pour l'analyse par le Conseil peut être résumé comme suit. 15. Le secteur économique concerné est celui des auto-écoles et plus particulièrement les services prestés par ces auto-écoles, à savoir les cours de conduite.16. Les écoles de conduite ne s'occupent que de la préparation aux différents examens et ne délivrent pas de permis.Néanmoins, elles fonctionnent dans un cadre réglementaire strict, notamment inspiré par la sécurité routière. Plusieurs aspects du secteur sont réglementés.

Pendant la durée de l'instruction des modifications du cadre réglementaire ont eu lieu. Bien qu'important pour le fonctionnement des auto-écoles, le cadre réglementaire n'a que peu d'incidence sur l'analyse que le Conseil doit effectuer dans ces affaires concrètes sur la base du droit de la concurrence. Dès lors, seuls les aspects les plus importants de la législation applicable sont mentionnés à titre informatif. 17. L'agrément des auto-écoles de conduite a été rendu obligatoire pour toute école souhaitant enseigner la conduite de véhicules à moteur en 2004.L'introduction de l'agrément obligatoire a été le sujet de controverses, également au sein de la FAB. Outre des conditions relatives au personnel dirigeant et enseignant, à l'établissement lui-même et au matériel automobile, le facteur primordial à la délivrance de l'agrément par le Ministre qui a la sécurité routière dans ses attributions, est la viabilité probable de la future école de conduite.

Dans son rapport, l'auditeur a signalé un moratoire de fait entre 1987 et 1997 : aucun nouvel agrément n'a été autorisé pendant cette période. Durant l'année 1997 deux nouveaux sièges d'exploitation furent agréés, ce qui mettait fin au moratoire. Les deux agréments concernaient les deux centres d'exploitation d'ISC, une des plaignantes. ISC était donc la première école de conduite à bénéficier d'une reconnaissance officielle depuis 1987. 18. Les conditions et les modalités de l'obtention des permis de conduire font également l'objet d'une réglementation détaillée. L'examen qui permet d'obtenir un permis de conduire, est composé de deux parties : un examen théorique et un examen pratique. 19. Il existe différentes formules d'apprentissage pour les candidats et ces formules ont évolué dans le temps, y inclus pendant la période de l'instruction par l'auditeur.Certaines formules impliquent plus d'appel aux services des auto-écoles que d'autres. Dans le contexte de cette affaire, il suffit de mentionner l'introduction de ladite « filière libre », qui permet à un candidat, après l'examen théorique, d'obtenir un permis de conduire provisoire qui l'autorise à apprendre à conduire sur la voie publique avec un guide de son choix. Depuis le 1er septembre 2006, des modifications ont été apportées aux formules d'apprentissage existantes. Ces formules permettent une plus grande flexibilité pour les candidats.

Une des nouvelles formules est le permis de conduire provisoire avec guide qui permet à un candidat âgé d'au moins 17 ans de conduire sur la voie publique avec un guide de son choix, moyennant le respect de certaines conditions relatives au véhicule, au guide et aux horaires à respecter. Dans cette formule, contrairement à la situation avant le 1er septembre 2006, le candidat a la liberté de choisir s'il souhaite prendre également des cours pratiques et, le cas échéant, il choisit le nombre d'heures de cours pratiques qu'il veut suivre auprès d'une auto-école. Il n'y a donc plus l'obligation de suivre un minimum d'heures de cours pratiques donnés par une auto-école. 20. Les prix pratiqués par les auto-écoles pour les cours de conduite, ont fait l'objet d'une réglementation jusqu'en 1994.Comme pour d'autres secteurs, les prix étaient fixés par voie législative. Le rapport de l'auditeur ne contient pas de détails sur les modalités de la fixation des prix à l'époque, qui en tout état de cause, n'était plus d'actualité au moment où les plaintes ont été déposées. Il apparaît du dossier et des éléments soulevés devant le Conseil, que cette fixation de prix dans le passé se faisait en concertation avec le secteur et qu'elle était, du moins partiellement, basée sur des études des prix de revient des auto-écoles actives sur le marché. 21. Le nombre, le lieu d'établissement et la compétence territoriale des centres d'examen sont également réglementés.Les candidats présentent l'examen théorique dans le centre de leur choix. En ce qui concerne l'examen pratique, les candidats subissent leur examen dans le centre qui est compétent pour la commune dans laquelle ils ont leur résidence habituelle ou pour la commune dans laquelle est situé le siège de l'école de conduite agréée où ils ont suivi l'apprentissage s'ils se présentent à l'examen avec cette école.

V. Marché en cause 22. Comme il a été évoqué sous le point IV., le secteur économique concerné est celui des auto-écoles et plus particulièrement les services prestés par ces auto-écoles, soit les cours de conduite. 23. Les écoles de conduite agréées sont établies sur le territoire belge et possèdent parfois plusieurs centres d'exploitation.En 1999, selon le rapport, il y avait 204 auto-écoles pour 541 sièges d'exploitation. Fin avril 2007, on dénombrait 211 auto-écoles agréées pour environ 595 sièges d'exploitation. Chacun de ceux-ci est attaché à un des 32 centres belges d'examen en fonction de sa situation territoriale. 24. Dans le rapport, l'auditeur fait une distinction en fonction de différents types de permis de conduite, les différentes catégories de permis n'étant pas substituables entre elles.La présente affaire concerne uniquement les cours de conduite visant l'obtention du permis B, c'est-à-dire pour la conduite des véhicules automobiles construits pour le transport de choses ou de personnes, comportant huit places au maximum (non-compris le siège du conducteur) et dont la masse maximale autorisée n'excède pas 3,5 T. 25. Au sein de cette catégorie de permis, il est nécessaire selon l'auditeur de distinguer les cours orientés vers l'obtention du permis théorique des cours orientés vers l'obtention du permis pratique.La détention du permis théorique est une condition pour l'obtention du permis pratique. La distinction semble être basée aussi bien sur la différence au niveau du service rendu que sur la différence des types de clients ciblés. Néanmoins, il ressort de ce qui suit, que le Conseil n'estime pas nécessaire de retenir cette distinction au niveau de la définition du marché en cause (voir ci-dessous sous n° 30). 26. L'auditeur a constaté que le marché géographique pertinent est d'ordre local.Les candidats à l'examen pratique de conduite passent leur examen dans le centre compétent pour la commune dans laquelle ils ont leur résidence normale ou pour la commune dans laquelle est situé le siège de l'école de conduite agréée où ils ont suivi l'apprentissage s'ils se présentent à l'examen avec cette école. En ce qui concerne le passage de l'examen de conduite théorique, les élèves peuvent choisir librement le centre d'examen dans lequel ils le passeront. Toutefois, l'auditeur suppose que le choix se porte naturellement sur une école de conduite proche de la résidence du candidat. Chaque école de conduite agréée est attachée à un centre d'examen déterminé. 27. Il résulte de ces considérations que les candidats sont enclins à choisir une auto-école se situant dans une zone proche de leur résidence.En raison de cette captivité territoriale de la clientèle, la concurrence du côté de la demande s'exerce dans un certain périmètre. Les auto-écoles étant attachées à un centre d'examen, l'auditeur conclut que l'on peut considérer que ce périmètre correspond au territoire couvert par chaque centre d'examen situé en Belgique.

Par conséquent, le territoire d'un centre d'examen délimite le périmètre à l'intérieur duquel s'exerce la concurrence entre les auto-écoles qui lui sont attachées. Selon l'auditeur, c'est au sein de ce territoire que les auto-écoles sont engagées dans l'offre des cours de conduite. Les auto-écoles situées sur des territoires couverts par d'autres centres d'examen ne semblent pas être réellement en concurrence. 28. Le Conseil constate que la partie incriminée n'a pas contesté, en tant que telle, la définition du marché pertinent retenue dans le rapport de l'auditeur, ni en ce qui concerne la dimension des services concernés, ni en ce qui concerne la dimension géographique.29. Le Conseil ajoute que dans ce cas, le comportement qui est évalué en vue de sa compatibilité avec l'article 2 de la LPCE et/ou l'article 81 du Traité CE, émane d'une association d'écoles de conduite.Même si le marché dans lequel chaque membre de l'association opère et entre en concurrence avec d'autres auto-écoles est local, le comportement de l'association peut avoir un impact plus étendu puisque l'association compte des membres dans le territoire de toute la Belgique (Décision n° 2007-I/O-19 du 21 août 2007, Orde der Dierenartsen;Décision n° 2008-I/O-04 du 25 janvier 2008, VEBIC, n° 29). Il peut être nécessaire de tenir compte aussi bien des marchés locaux délimités par les centres d'examen, que de l'ensemble du territoire où des membres de l'association sont actifs. 30. Cependant, en matière d'ententes ou de pratiques restrictives, l'obligation de délimiter de façon approfondie le marché en cause n'existe que dans la mesure où cet exercice est nécessaire pour déterminer si l'accord ou la décision remplit les conditions de l'article 2 de la LPCE ou de l'article 81 du Traité CE (TPI 6 juillet 2000, affaire T-62/98, Volkswagen/Commission, n° 230-231;TPI 16 décembre 2003, affaires T-5/00 et T-6/00, Nederlandse Federatieve Vereniging voor de Groothandel op Elektrotechnisch Gebied et Technische Unie/Commission, n° 123 et 124). Vu la nature de l'infraction et la qualification juridique qui suit ainsi que l'absence de contestation de la part de la partie incriminée, il n'est pas nécessaire de définir plus en détail le marché en cause.

VI. Commerce entre Etats membres 31. Sur la base de l'article 3 du Règlement 1/2003 (JO (2003) L 1, p. 1), le Conseil de la concurrence doit d'abord examiner si les pratiques qui font l'objet de cette affaire doivent également être analysées sous l'angle de l'article 81 du Traité CE. 32. Selon l'auditeur, les pratiques visées ne permettent manifestement pas d'influencer de quelque manière que ce soit les courants d'échange entre Etats membres, s'agissant d'éventuelles ententes sur un marché caractérisé par une dimension géographique locale et sur lequel l'offre comme la demande doit s'analyser exclusivement dans un contexte belge.33. Concernant les pratiques qualifiées de restrictives par l'auditeur dans le chef de la FAB, le Conseil a constaté que ces pratiques concernent (potentiellement) l'ensemble du territoire de la Belgique. L'association a une vocation nationale et compte des membres dans toute la Belgique et en particulier aussi bien en Région flamande qu'en Région wallonne. Par ce fait, ces pratiques pourraient être susceptibles d'affecter le commerce entre Etats membres (§ 78 et suivants des Lignes directrices relatives à la notion d'affectation du commerce figurant aux articles 81 et 82 du traité, JO (2004) C 101, p. 81). 34. Néanmoins, le Conseil considère, tout comme l'auditeur, que, dans le cas d'espèce, la capacité de ces pratiques de cloisonner le marché belge n'est pas établie.Le potentiel d'activités d'auto-écoles venant d'autres Etats membres semble limité par le marché géographique limité dans lequel chaque auto-école opère. Le Conseil estime qu'en tout état de cause, par la nature des restrictions qui sont en cause, ces restrictions ne peuvent pas créer une entrave qui serait un élément décisif dans le choix d'une auto-école étrangère de s'installer ou non en Belgique. L'adhérence à la FAB n'est pas obligatoire pour pouvoir entrer sur le marché, ni juridiquement ni par le fait qu'une majorité des auto-écoles en Belgique en serait membre. En l'absence d'éléments démontrant une modification réelle ou potentielle sensible du commerce entre Etats membres, le Conseil applique la présomption négative en matière d'affectation du commerce entre les Etats membres (CJCE 21 janvier 1999, affaires C-215/96 et 216/96; Lignes directrices précitées, § 13, 50, 77, 80 et 89). 35. Le Conseil n'appliquera pas l'article 81 du Traité CE parce que le dossier ne permet pas de constater une affectation, au moins potentielle, du commerce entre Etats membres.Dans la présente décision, les pratiques qui font l'objet du rapport sera donc examinée uniquement sous l'angle de l'article 2 de la LPCE. Il est rappelé que la non-application de l'article 81 du Traité CE n'affecte pas l'importance que le Conseil attache à la volonté du législateur belge de suivre la pratique et la jurisprudence européenne dans le cadre de l'analyse juridique des pratiques restrictives (Décision n° 2008-I/O-04 du 25 janvier 2008, VEBIC).

VII. L'existence des pratiques restrictives 36. La FAB est une association d'écoles de conduite professionnelles qui défend notamment les intérêts économiques de ses membres.Les auto-écoles qui y sont affiliées sont des entreprises. Par conséquent, la FAB constitue une association d'entreprises au sens de la LPCE. Cette constatation n'a pas été contestée par la FAB. 37. Il est rappelé que la charge de preuve en matière de pratiques restrictives incombe à l'auditeur et que le Conseil doit évaluer cette charge de preuve en tenant compte de tous les éléments dans le dossier de l'instruction ainsi que tous les éléments portés à sa connaissance lors de la procédure devant le Conseil. VII. 1. La restriction contenue dans le Règlement d'Ordre Intérieur 38. Le Conseil doit d'abord examiner si l'article 12 du Règlement d'Ordre intérieur de la FAB (ci-après : « ROI ») constitue une décision d'une association d'entreprises au sens de la LPCE.39. Aussi bien une décision liant les membres, que toute recommandation ou tout autre acte qui reflète la volonté de l'association de coordonner l'action de ses membres, peut être qualifiée comme décision d'une association d'entreprises au sens de l'article 2 de la LPCE.En ce qui concerne l'article 12 du ROI de la FAB, il est clair qu'il s'agit d'une disposition faisant partie d'un règlement qui lie les membres de l'association. Cette disposition fait partie d'un cadre juridique qui comporte des droits et des obligations pour les membres. Il s'agit donc sans aucun doute d'une décision d'association. Cette qualification n'a, par ailleurs, pas été contestée par la FAB. 40. La question se pose alors de savoir si la disposition a pour objet et/ou comme effet de restreindre la concurrence entre les auto-écoles. L'auditeur a considéré que l'article 12, 3 du ROI avait un objet anticoncurrentiel. 41. Le texte de la disposition en question est repris ci-dessous : « 1° Les membres de l'association sont tenus d'observer loyalement les règles d'une saine concurrence, en axant principalement leurs efforts sur la qualité des services rendus à leurs élèves.2° Il leur est interdit de recourir ou de participer à toute forme d'action concertée qui serait, directement ou indirectement, dirigée contre une autre école de conduite agréée, membre de l'association. La notion « action concertée dirigée contre une autre école de conduite » utilisée dans le présent article, ne doit pas être confondue avec des agissements normaux, conformes aux règles de la loyale concurrence et compatible avec le dynamisme de toute activité commerciale. Cette notion vise toute action organisée dans un but agressif, qui a pour conséquence ou pour objet d'occasionner un dommage moral, matériel ou commercial à une ou à plusieurs écoles de conduites concurrentes, membres de l'Association. 3° Les membres de l'Association fixent librement le tarif des services qu'ils proposent.Il leur est toutefois interdit de nuire gravement aux intérêts d'une école de conduite, membre de l'Association, par des pratiques de déstabilisation des prix.

Les termes « pratiques de déstabilisation des prix » repris au présent article, visent toute forme de concurrence déloyale basée sur des prix anormaux, très nettement inférieurs aux prix moyens pratiqués pour un service analogue par les écoles de conduite concurrentes situées dans la région et par laquelle son auteur tente de détourner à son profit tout ou partie de la clientèle des écoles de conduites environnantes, membres de l'Association (...) ». 42. Suite à la communication des griefs effectuée par l'auditeur le 8 mars 2007, le conseil d'administration de la FAB a décidé le 29 mars 2007, tout en contestant son caractère anticoncurrentiel, de modifier cet article : l'alinéa 2 a été supprimé et l'alinéa 3 modifié comme suit : « 3° Les membres de l'Association fixent librement le tarif des services qu'ils proposent.Il leur est interdit de nuire gravement aux intérêts d'une école de conduite, membre de l'Association, par des actions déloyales au regard de la législation sur les pratiques du commerce, ou par des actions de « dumping ». » 43. Dans la présente affaire, le Conseil est uniquement appelé à examiner la version de la disposition qui était en vigueur jusqu'au 29 mars 2007 et qui figurait, selon le rapport, dans le règlement depuis au moins 1997.44. Le Conseil estime que l'article 12 précité, lu dans sa totalité, visait clairement à interdire aux membres de l'association de se faire concurrence par les prix pour augmenter leur nombre de clients respectifs, alors que la concurrence par les prix a, par essence pour objectif de conquérir des parts de marché par une politique de réduction des prix.La formulation de l'article 12 laisse croire également que l'objectif était d'organiser un certain partage de marché en interdisant des actions permettant à débaucher des clients d'autres auto-écoles dans un certain territoire. 45. Dans le cadre de l'analyse requise par l'article 2 de la LPCE, il n'est pas relevant qu'une pratique de réduction de prix puisse nuire aux intérêts d'autres auto-écoles.Pareille restriction n'est en outre pas justifiée par la garantie qu'elle représenterait contre la concurrence dite déloyale et n'est en tout état de cause pas proportionnée à l'objectif de lutter contre pareille concurrence dite déloyale. Le Conseil remarque que la FAB n'a d'ailleurs pas invoqué l'article 2, § 3 de la LPCE qui constituerait la base juridique pour une éventuelle exception à l'interdiction de l'article 2, § 1er de la LPCE. 46. Ce qui importe par contre est que l'association interdit à ses membres des pratiques appelées « déstabilisation des prix » qui sont en réalité des pratiques où une auto-école individuelle déciderait d'adapter sa politique de prix vers le bas, que ce soit temporairement ou de façon permanente.La FAB limitait donc la possibilité de ses membres de fixer en toute liberté leurs prix. Une telle influence de la part de l'association sur la liberté de chacun de déterminer son prix, constitue une restriction de la concurrence. Un accord entre entreprises ou une décision d'association, qui empêche une offre aux consommateurs au prix le plus avantageux, est à considérer comme une restriction grave. 47. En outre, l'article 12 du ROI vise indirectement l'établissement d'un prix moyen que les membres de la FAB étaient tenus de respecter. En ayant pour objectif de prévenir toute baisse significative de tarif de l'un de ses membres, la décision d'association d'entreprises dont question vise donc également à maintenir les prix à un niveau artificiellement élevé. 48. Le ROI de la FAB dans lequel figure l'article 12, a un effet contraignant et prévoit également un système de sanctions : a) le règlement est opposable aux membres et aux mandataires;b) le conseil d'administration peut, notamment, suspendre à titre conservatoire un membre;c) l'assemblée générale peut suspendre ou exclure un membre. Que ces sanctions soient réellement appliquées ou non, n'est pas pertinent dans ce cas à partir du moment où les membres sont contraints de respecter les dispositions du règlement et qu'à tout le moins l'impression est créée que l'association a le pouvoir de sanctionner. 49. Finalement, il ressort du dossier que l'approche générale de la FAB dans ces publications consistait à mettre en garde les membres contre la libéralisation du secteur et la libre concurrence entre les auto-écoles.A titre d'exemple, dans la publication Info FAB de 2005/2006, le secrétaire général lançait « un appel au bon sens en attirant l'attention de tous les exploitants d'auto-école sur le danger de s'engager sur la voie d'une concurrence sans merci, car une fois le processus enclenché, il n'est plus possible de revenir en arrière ». Il convient de citer également les démarches de la FAB contre les agréments accordés à ISC en 1997 (voir ci-dessus sous n° 17). Par ces agréments un nouveau concurrent rentrait dans le marché.

La FAB s'est opposé contre la venue de ce nouveau concurrent. A titre d'exemple : « Nous avons dit et nous répétons que la population de la périphérie de Wavre permet de faire vivre au maximum deux écoles de conduite (...) (Info-FAB 98/04) ou encore « l'année 1997 nous a apporté de nouvelles agréations, qui n'étaient pas des nouvelle : sous le mince vernis d'une vocation sociale usurpée, elles cachaient l'intention manifeste de leurs bénéficiaires d'éliminer leurs collègues par des tarifs de dumping. (...) » (Info-FAB 97/03).

Selon le Conseil, ces éléments qualifiés par l'auditeur comme « l'approche du secteur par la FAB », bien que non décisifs en soi, renforcent l'objet anticoncurrentiel des dispositions restrictives figurant dans l'article 12 ROI discuté ci-dessus. 50. L'objet anticoncurrentiel de la disposition ayant été établi, il n'y a plus lieu pour le Conseil d'examiner les effets réels ou potentiels sur le marché.L'objectif de limiter la concurrence entre des entreprises et d'harmoniser leurs politiques de prix peut être considéré équivalent à des prix recommandés ou une fixation de prix (TPI 22 octobre 1997, affaires jointes T-213/95 et T-18/96, SCK et FNK, n° 156-164). Les effets sur le marché et leur caractère sensible, peuvent être supposés en présence d'une restriction grave à la concurrence au sens de l'article 2 de la LPCE (CJCE 8 juillet 1999, affaire C-49/92 P, Commission/Anic, n° 99; Lignes directrices de la Commission concernant l'application de l'article 81, § 3 du traité CE, JO (2004) C 101, p. 97, n°19-21). 51. Le Conseil conclut que l'article 12 du ROI dans sa version en vigueur jusqu'en mars 2007, constitue une infraction à l'article 2 de la LPCE dans le chef de la FAB. VII. 2. Les études de prix de revient 52. En ce qui concerne la réalisation et la publication de l'étude du prix de revient par la FAB, l'auditeur a qualifié cette pratique comme une recommandation d'augmentation des tarifs par les auto-écoles. Selon l'auditeur, cette recommandation bien que non-obligatoire, constitue une décision d'association d'entreprises. 53. Un acte ou une pratique d'une association comme une recommandation, peut constituer une décision d'association d'entreprises qui peut être sanctionnée sur la base de l'article 2 de la LPCE s'il constitue l'expression fidèle de la volonté de l'association d'entreprises de coordonner le comportement de ses membres sur le marché conformément aux termes de la recommandation (CJCE 27 janvier 1987, affaire 45/85, Verband der Sachversicherer/Commission;Décision de la Commission du 24 juin 2004, Ordre belge des Architectes, affaire COMP/38549, n° 64). 54. La simple publication d'une étude des prix de revient dans le secteur n'est pas susceptible en soi de constituer une infraction à l'article 2 de la LPCE.En revanche, s'il est normal pour une organisation professionnelle de fournir à ses membres des informations sur l'évolution du marché ou une aide à la gestion, celle-ci ne doit pas exercer d'influence directe ou indirecte sur le libre jeu de la concurrence (Décision de la Commission 96/438 du 5 juin 1996, FENEX, JO (1996) L 181, p. 28). 55. Il y a lieu de vérifier s'il existe suffisamment d'éléments qui permettent de qualifier la réalisation et la publication de l'étude du prix de revient par la FAB d'une recommandation de prix ou d'augmentation des prix.En d'autres termes, il convient d'examiner s'il existe un ensemble de faits et de circonstances qui démontrent la volonté de l'association de coordonner le comportement des membres sur le marché en exerçant une influence sur les tarifs pratiqués. 56. Le dossier démontre que la FAB publie chaque année une étude qui détermine le pourcentage d'évolution du prix de revient d'une heure de cours par rapport à l'année précédente.Cette étude prend en compte l'évolution des différents frais fixes et variables des écoles de conduite et est envoyée, via le bulletin de l'association « Info-FAB », à l'ensemble des membres de la FAB. La FAB a confirmé que jusqu'à la libéralisation des prix en 1994 cette étude était faite en collaboration avec le Ministère de l'Economie. 57. La publication de l'étude contient notamment des tableaux comme suit : Tableau 1 : (Info - FAB 2004/15 du 25 octobre 2004) Pour la consultation du tableau, voir image Tableau 2 (Info - Fab 2005/07 du 25 avril 2005) : Pour la consultation du tableau, voir image (*) Coefficient 1 = votre prix en septembre 1999 58.Dans les publications, la FAB conseille parfois de tenir compte d'augmentations spécifiques comme par exemple un saut d'index de x %, une augmentation de x euro imposée par une convention collective de travail, une indexation de x % liée à une augmentation des primes d'assurance ou encore une indexation des salaires de x %.

En plus, les publications des tableaux sont accompagnées de conseils sur l'impact que l'évolution des prix de revient doit avoir sur les tarifs appliqués par les auto-écoles avec des recommandations concrètes au niveau de l'augmentation du prix nécessaire.

L'ensemble des conseils et/ou commentaires qui accompagnent la publication des études sont à la base de la qualification par l'auditeur de ces pratiques comme étant des recommandations d'augmentation de prix. 59. Il y a lieu tout d'abord d'examiner les caractéristiques pertinentes des études et la façon dont les résultats sont présentés et publiés par la FAB. Comme il apparaît du tableau 1 ci-dessus, les éléments constitutifs du prix de revient sont énumérés de façon exhaustive (7 catégories) et sont représentés individuellement et proportionnellement par rapport au total des coûts (100 %). Le point de départ est l'année qui avait fait l'objet de l'étude précédente. Les valeurs individuelles sont comparées à l'année antérieure ainsi que le total de l'augmentation des coûts (dans l'exemple 3,66). Un coefficient d'adaptation montre l'évolution par catégorie. Puis, un calcul est effectué aboutissant au pourcentage de chaque coût dans le prix de revient. Le tableau 2 présente un exemple d'un schéma qui comprend l'évolution du prix de revient sur une période de plusieurs années et mentionne également le coefficient d'adaptation. 60. L'augmentation des différents coûts représentés individuellement dans les publications, ainsi que l'augmentation globale des coûts communiquée par la FAB, sont basées sur une moyenne calculée sur base des renseignements fournis par les auto-écoles.Un tel système ne stimule pas chaque auto-école de faire son propre calcul du prix de revient et, de plus, l'encourage à augmenter son prix final en l'alignant, de façon quasi automatique, sur les augmentations des coûts contenues dans les publications de la FAB. Le « coefficient d'adaptation » peut clairement être perçu comme un instrument pour inciter ou tout de moins faciliter, à l'entreprise d'adapter ses propres données, tout comme c'est le cas pour le calcul qui mène à la « nouvelle portion » pour l'année en question (dernière colonne dans le tableau 1).

Pareilles présentation et publication de l'étude effectuée par la FAB comporte déjà en elles-mêmes des caractéristiques qui contribuent à leur nature restrictive au vu des règles de la concurrence. Il ne s'agit pas uniquement d'une aide technique à la gestion. Cette réalisation et la publication des études a pour objet d'uniformiser la gestion des auto-écoles en particulier quant à la détermination des prix et peut être ressentie par les membres comme une recommandation de prix (voir également la Décision du Conseil de la concurrence français du 21 février 2007, Union française des orthoprothésistes, n° 07-D-05; Décision du Conseil du 25 janvier, VEBIC, précitée). 61. Il est essentiel de tenir compte ensuite, des commentaires exprimés par la FAB dans les publications en question (voir Décision n° 2008-I/O-04 du 25 janvier 2005, VEBIC, précitée) et qui accompagnent les tableaux. Dans la publication dont fait partie le tableau 1, la FAB déclare comme suit : « En multipliant chaque portion des divers éléments en 2003, par leur coefficient d'adaptation, nous obtenons les nouveaux pourcentages au 30/09/04, soit au total 103,66 % ».

Ensuite : « Par rapport à la période comprise entre le 30/09/2003 et le 30/09/2004, le prix de revient a augmenté de + 3,66 % et c'est par conséquent cette augmentation qui déterminera en première instance vos tarifs catégorie B pour l'année 2005 ».

Puis en incluant notamment des commentaires sur certains coûts spécifiques : « Pour décider de l'adaptation éventuelle de vos tarifs courant 2005, il y a lieu de tenir compte d'au moins une indexation des salaires de + 2 % dans le courant de l'année, ainsi que du coût salarial supplémentaire et du manque à gagner qui résultent des deux journées de formation imposées par la CCT (..) » Le Conseil a trouvé la même présentation des tableaux et des commentaires semblables dans plusieurs publications se trouvant dans le dossier (voir par exemple 1997/14, 1998/17, 2000/09, 2001/10, 2002/18). 62. Selon la FAB, la réalisation et la publication de ces études ne peuvent pas être interprétées comme une recommandation d'augmentation des tarifs.Le fait que la FAB a précisé dans les publications que chaque membre doit tenir compte de ses coûts structurels propres suffit, selon elle, pour sortir ces conseils du champ d'application de la LPCE. Il est vrai qu'à certaines occasions, notamment en 1997, 1998 et 2000, la FAB a signalé à ses membres que « pour décider de l'adaptation de vos tarifs pour l'année prochaine, il y a lieu de tenir compte de vos coûts structurels propres ». Toutefois, cette mention n'est pas reprise dans plusieurs autres études des prix de revient, comme par exemple en 2001, 2002, 2003, 2004 et 2005. Le Conseil estime donc que cette réserve émise par l'association ne peut en aucun cas enlever le caractère restrictif à l'ensemble des faits.

Au plus, cette mention était contenue dans les publications contenant des tableaux ayant les caractéristiques décrites ci-dessus sous n° 59 et qui comportaient également des commentaires (contradictoires) comme décrits ci-dessus sous n° 61. En cas d'éléments de preuve contradictoires, le Conseil doit évaluer l'ensemble des documents se trouvant dans le dossier pour déterminer quel était l'objectif de l'association. 63. Par ailleurs, dans certaines études, y compris celles citées par la FAB à cet égard, la FAB insiste sur le fait que l'augmentation des coûts relevés dans l'étude « déterminera en première instance » les tarifs de ses membres pour l'année suivante.Une telle mention peut être retrouvée par exemple dans les publications d'études en 1997, 1998, 2003 et 2004 et 2005 et revenait donc systématiquement. 64. Dans son étude de l'évolution du prix de revient de 2005, la FAB avait également précisé que cette étude « ne peut en aucun cas être interprétée comme une invitation à revoir les tarifs à la hausse ». Néanmoins, il ressort du dossier que cette mention retrouvée uniquement dans l'étude de 2005, fait suite aux explications données par le Service et l'auditeur sur le caractère anticoncurrentiel de cette pratique lors de l'audition à la FAB du 10 octobre 2005. 65. Il peut donc être déduit de l'ensemble des éléments cités sous les n° 61-64 que la FAB avait non seulement l'intention de fournir des informations utiles à ses membres sur l'évolution des coûts, mais qu'elle avait également une intention normative, à savoir celle d'harmoniser à la hausse les tarifs par le biais des études qu'elle publiait.Cette volonté de la FAB correspondait aussi à une volonté commune des membres à voir les tarifs adaptés vers le haut (Décision FENEX précitée, sous n° 54). La publication systématique des études du prix de revient comme décrite ci-dessus, permet aux entreprises de prévoir avec un degré raisonnable de certitude quel sera la politique de prix poursuivie par leurs concurrents. 66. Surabondamment, le Conseil estime qu'il ne doit pas uniquement tenir compte des preuves directes que le dossier amène.Il y a lieu également d'avoir égard à l'ensemble du contexte factuel et juridique qui permet d'évaluer si une infraction à l'article 2 de la LPCE a été établie. Il est fait référence ici à l'approche plus générale de la FAB décrite ci-dessus sous n° 49.

Ces éléments soulignent également le lien qui existe entre les deux griefs qui sont retenus contre la FAB : après la libéralisation des prix pour les auto-écoles, l'association a tenté de remplacer les prix réglementés par une harmonisation des prix et une adaptation coordonnée vers le haut. Les études qui faisaient déjà partie du système de réglementation auparavant, ont servi de base à la FAB pour instaurer un nouveau système. Les effets de la libéralisation des prix, qui devait permettre à la libre concurrence de s'installer sur le marché, ont été, du moins potentiellement, réduits par les pratiques de la FAB. 67. L'objectif anticoncurrentiel est déduit de la teneur de la décision d'une association, de ses buts objectifs, du contexte juridique et économique et du comportement de l'association (Décision de la Commission du 24 juin 2004, Ordre des architectes belges et la jurisprudence citée;TPI du 26 septembre 2006, affaire T-168/01, GSK).

Il résulte des éléments de l'espèce que la réalisation et la publication de l'évolution du prix de revient par la FAB à tout le moins jusqu'à la publication de 2005, ainsi que toutes les circonstances citées ci-dessus, font que l'ensemble des faits démontre suffisamment l'expression de sa volonté de coordonner le comportement de ses membres sur le marché en cause, soit en ce qui concerne la méthode du calcul de leurs prix ainsi que le niveau des prix pratiqués. 68. Une telle volonté dans le chef d'une association d'entreprises équivaut à une recommandation et a un objet anticoncurrentiel tout comme les dispositions du ROI discutées ci-dessus.Il n'est plus nécessaire alors d'examiner plus en détail les effets que ces pratiques ont effectivement eu, ou ont pu avoir, sur le marché en cause. Le Conseil reprend entièrement ici le n° 50 ci-dessus.

VII. 3. Durée 69. Le Conseil doit établir la durée infractionnelle.70. La durée d'une pratique restrictive ne doit pas être appréciée en fonction de la période pendant laquelle une pratique est en vigueur mais en fonction de celle pendant laquelle il a été clairement démontré que les entreprises incriminées ou l'association ont adopté un comportement interdit par le droit de la concurrence (TPI 12 décembre 2007, affaires T-101/05 et T-111/05, BASF et UCB/Commission).71. Dans ce cas, en ce qui concerne l'existence des restrictions contenues dans l'article 12 du ROI, la FAB et l'auditeur s'accordent pour dire que l'article 12 du ROI a été en vigueur de mars 1997 jusque mars 2007.En ce qui concerne la réalisation et la publication des études de prix de revient, il apparaît que l'existence de l'infraction est clairement établi à partir de 1994 jusqu'en 2005. Avant 1994, les tarifs des auto-écoles étaient fixés par voie légale. Le rapport ne permet pas d'être plus précis quant à la date de départ (1994) pour le grief concernant les études mais il apparaîtra de la suite que le Conseil estime que la durée de l'infraction n'est pas, dans le cas d'espèce, un facteur pertinent pour la détermination de la sanction.

La FAB n'a pas contesté la durée infractionnelle citée par l'auditeur. 72. Dès lors, le Conseil retient une infraction de mars 1997 à mars 2007 en ce qui concerne l'article 12 du ROI de la FAB et une infraction de 1994 jusque 2005 en ce qui concerne la réalisation et la publication des études de prix de revient. VIII. Sanctions 73. Il suit de ce qui précède que la FAB a enfreint l'article 2 de la LPCE.Il s'agit de deux pratiques qui concernent toutes les deux la tarification des services rendus par les auto-écoles et qui ont pour objet d'empêcher, de restreindre ou de fausser la concurrence. 74. De telles infractions peuvent être sanctionnées par le Conseil sur la base de l'article 63 de la LPCE en sa version actuelle, entrée en vigueur le 1er octobre 2006.L'actuelle LPCE peut également être appliquée à des infractions uniques et continues et ce pour toute la durée de l'infraction, y inclus la période précédant l'entrée en vigueur de l'actuelle LPCE (voir Décision du 25 janvier 2008, VEBIC, précitée; Décision n° 2008-I/O-13 du 4 avril 2008, BBP). 75. Sous l'ancienne LPCE, il n'y n'avait pas de base légale explicite pour sanctionner une association d'entreprises et le Conseil devait le cas échéant se limiter à constater l'infraction éventuelle, une application rétroactive de la loi étant exclue (Décision VEBIC, précitée).Le Conseil a déjà émis des doutes quant à la compatibilité de cette impossibilité de sanctionner des associations avec les obligations qui découlent du Traité CE (voir Décision n° 2007-I/O-05 du 29 janvier 2007, FEDOBA; Décision n° 2007-I/O-19 du 21 août 2008, Orde der Dierenartsen). Dans la présente affaire, il suffit de constater à cet égard que le commerce entre les Etats membres n'est pas affecté par les pratiques de la FAB. 76. En ce qui concerne le deuxième grief retenu par l'auditeur, à savoir le grief concernant la réalisation et la publication des études de prix de revient que le Conseil a estimé avoir été suffisamment établi, le Conseil ne peut infliger une amende.77. Sur la base de la définition de la durée infractionnelle ci-dessus sous n° 69-72, une sanction ne peut dès lors concerner que l'article 12 du ROI de la FAB, puisqu'il s'agit d'une infraction continue qui a duré jusqu'à fin mars 2007.Le Conseil peut faire application de l'article 63 de la LPCE qui permet d'imposer une amende allant jusqu'à 10 % du chiffre d'affaires de l'association.

Dans son rapport, l'auditeur a reconnu qu'une sanction était possible pour ce grief mais n'a pas proposé au Conseil d'imposer une amende vu les circonstances de la cause et la coopération de la FAB. Lors de l'audience du 15 mai 2008 cette question a été adressée lors des débats. 78. Les Lignes directrices de 2004 pour le calcul des amendes (M.B. du 30 avril 2004, Ed. 2, pp. 36261 - 36264) qui ont été publiées dans le cadre de l'ancienne LPCE et dont la formulation s'articulait entièrement sur l'ancienne LPCE, ne sont plus d'application depuis l'entrée en vigueur de la nouvelle LPCE, sauf dans les cas où le Conseil a prévu explicitement qu'il les appliquera encore au titre de droit transitoire. 79. Les facteurs les plus importants pour le calcul de l'amende sont la nature et la gravité de l'infraction ainsi que sa durée.En exerçant son pouvoir d'infliger des amendes sur la base de l'article 63 de la LPCE, la loi prévoit uniquement que le Conseil doit tenir compte d'un montant maximal de 10 % du chiffre d'affaires total de l'entreprise ou de l'association. Dans ce contexte, le Conseil dispose clairement d'une large marge d'appréciation (Décision n° 2008-I/O-13 du 4 avril 2008, BBP). 80. S'agissant dans cette affaire d'une infraction grave puisqu'elle touche aux prix pratiqués par les auto-écoles, le Conseil estime important de sanctionner effectivement la FAB pour cette infraction. En tenant compte du maximum légal, le Conseil considère qu'un montant correspondant à [... %] du chiffre d'affaires de l'association doit constituer le montant de base de l'amende, soit 6990 euros. Le montant de base de l'amende est calculé sur la base du chiffre d'affaires total de [... euros] tel que contenu dans les pièces communiquées au Conseil. Ce montant constitue le chiffre d'affaires au sens de l'article 86, § 2 de la LPCE. Pour déterminer le montant de l'amende, le Conseil s'est basé sur les meilleures données disponibles. 81. Il existe dans cette affaire des circonstances particulières dont le Conseil tient compte lors de la détermination de la sanction. Il y a lieu de constater tout d'abord que l'instruction dans ces affaires a été longue. La première plainte datait de 1998. Même en l'absence d'une atteinte formelle au droit de la défense par le dépassement d'un délai raisonnable au sens de l'article 6 CEDH, le Conseil peut tenir compte de la durée de l'instruction par un souci d'équité (Décision n° 2007-I/O-19 du 22 août 2007, Orde der Dierenartsen).

Ensuite, notamment à cause de la durée de l'instruction, force est de constater que le nombre de membres de la FAB a très fortement diminué ces dernières années. La FAB a soulevé, à juste titre, que le Conseil doit tenir compte de la situation particulière de l'association et de sa représentativité. En faisant référence aux circonstances de la cause, l'auditeur a également clarifié qu'il visait la situation difficile dans laquelle se trouve la FAB. Au plus, en cas d'une amende infligée à une association, les membres peuvent éventuellement être tenus responsables par l'association pour le paiement de l'amende mais dans le cas d'espèce, le nombre actuel des membres n'est plus qu'une petite proportion du nombre des membres au début de l'instruction. Il ne semble pas justifié que les membres actuels subissent des conséquences disproportionnées.

Finalement, aussi bien pour le grief concernant l'article 12 du ROI que pour la réalisation et la publication des études, l'auditeur a constaté que la FAB a mis fin aux infractions pendant l'instruction et avant le dépôt du rapport au Conseil.

Dans un courrier du 8 mars 2007, l'auditeur communique les griefs qui peuvent être imputés à la FAB et l'invite pour une réunion avec l'auditeur et le Service de la concurrence. L'auditeur indique dans son courrier vouloir discuter d'éventuels engagements que la FAB serait susceptible de prendre. Il ressort du dossier que suite à ces contacts, la FAB a immédiatement pris l'initiative de modifier son ROI. Force est de constater que le déroulement de ces événements est tel que la FAB pouvait avoir l'impression que cette initiative et sa collaboration aurait une influence sur l'éventuelle sanction dans la décision du Conseil. 82. Pour ces raisons, le Conseil n'appliquera pas de majoration pour la durée de l'infraction et estime qu'une amende correspondant uniquement au montant de base, basée sur un pourcentage du chiffre d'affaires de l'association, a suffisamment d'effet dissuasif et respecte les principes de la proportionnalité et l'équité, tenant compte de toutes les circonstances de ces affaires et du maximum que la LPCE prévoit. 83. Sur la base de l'article 63 de la LPCE, le Conseil inflige dès lors une amende de 6.990 euros à la FAB à payer selon les modalités prévues à l'article 2 de l'arrêté royal du 31 octobre 2006 relatif au paiement et au recouvrement des amendes et astreintes (Moniteur belge 22 novembre 2006, Ed. 2). 84. Comme l'a également exprimé l'auditeur devant le Conseil, il est important que la décision du Conseil soit portée à la connaissance de tous les membres de la FAB et du secteur des auto-écoles.Une telle mesure devra permettre de mettre fin à toute incertitude qui pourrait exister sur les limites que le droit de la concurrence posent à toute démarche des fédérations professionnelles qui vise ou qui a pour effet d'influencer les prix de leurs membres. La publication de la décision permettra aux membres de prendre connaissance des deux griefs retenus par le Conseil comme infractions à la LPCE et non seulement du grief qui est sanctionnée par une amende.

Dès lors, une mesure de publication prise sur la base de l'article 52 de la LPCE, s'impose dans ces affaires. La FAB devra publier la décision sur son site Internet et aviser les membres de son contenu selon les modalités prévues dans cette décision.

Par ces motifs, Le Conseil de la concurrence, - Constate que la Fédération des Auto-Ecoles professionnelles de Belgique ASBL a commis une infraction à l'article 2 de la loi sur la protection de la concurrence économique et ordonne la cessation de celle-ci; - Inflige à la Fédération des Auto-Ecoles professionnelles de Belgique ASBL une amende de 6990 euros, à payer selon les modalités prévues à l'article 2 de l'arrêté royal du 31 octobre 2006 relatif au paiement et au recouvrement des amendes administratives et astreintes prévues par la loi sur la protection de la concurrence économique; - Ordonne à la Fédération des Auto-Ecoles professionnelles de Belgique ASBL : - de publier la version publique de la présente décision de manière visible sur la page d'accueil de son site Internet au travers d'un lien vers son texte intégral, au moins pendant six mois à dater de la notification de la présente décision; - d'aviser les membres de la FAB du contenu de la présente décision par un écrit, éventuellement par voie électronique, contenant au minimum le dispositif de cette décision et un lien au texte intégral de la présente décision ou une copie du texte intégral;- - de transmettre au greffe à l'attention du Conseil, une copie de la communication adressée aux membres dans un délai d'un mois à dater de la notification de la présente décision.

Ainsi décidé le 7 juillet 2008 par la cinquième chambre du Conseil de la concurrence composée de Mme Laura Parret, conseiller et président de chambre, M. Pierre Battard et M. David Szafran, conseillers.

Conformément à l'article 67 de la loi sur la protection de la concurrence économique, coordonnée le 15 septembre 2006, la notification de la présente décision sera effectuée à la Fédération des Auto-Ecoles Professionnelles de Belgique ASBL, à l'Institut Supérieur de Conduite SPRL, à l'Association belge des Consommateurs Test-Achats ASBL et au Ministre qui a l'Economie dans ses attributions.

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